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CA Paris, Pôle 1 - ch. 8, 2 mai 2025, n° 24/16780

PARIS

Arrêt

Autre

CA Paris n° 24/16780

2 mai 2025

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 8

ARRÊT DU 02 MAI 2025

(n° , 4 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 24/16780 - N° Portalis 35L7-V-B7I-CKEJQ

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 03 Mai 2024 -Président du TJ de Créteil - RG n° 24/00321

APPELANTE

S.A.S. SOCIETE DE RENOVATION GENERALE (SRG), incrite au RCS de Versailles sous le n°800 506 958, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Sylvie KONG THONG, avocat au barreau de PARIS, toque : L0069

Ayant pour avocat plaidant Me Gwenaëlle PHILIPPE, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉE

S.E.L.A.R.L. FIDES, prise en la personne de Maître [Z] [Y] [C] es qualité de liquidateur judiciaire de la société L'IMMOBILIERE ORPHALESE

[Adresse 1]

[Localité 4]

Défaillante - déclaration d'appel signifiée le 31 octobre 2024, à personne morale

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 20 Mars 2025, en audience publique, devant la Cour composée de :

Florence LAGEMI, Présidente de chambre

Marie-Catherine GAFFINEL, Conseillère

Patrick BIROLLEAU, Magistrat Honoraire, chargé du rapport,

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Jeanne BELCOUR

ARRÊT :

- RÉPUTÉ CONTRADICTOIRE

- rendu publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Florence LAGEMI, Présidente de chambre et par Jeanne BELCOUR, Greffière, présente lors de la mise à disposition.

La société de rénovation générale (SRG), entreprise de bâtiment tous corps d'état, s'est vue confier par la SCCV Orphalese [Localité 5] 36 des travaux de gros oeuvre pour la construction d'un ensemble immobilier de logements situé [Adresse 6], à [Localité 5] (Hauts-de-Seine).

Invoquant l'absence de règlement de certaines de ses factures, la société SRG a mis en demeure, le 28 janvier 2022, la société Orphalese [Localité 5] 36 de lui régler la somme de 105.870,63 euros TTC.

En l'absence de suite donnée à cette mise en demeure, elle a fait assigner la société Orphalese Asnières 36 devant le juge des référés du tribunal de commerce de Créteil qui, par ordonnance en date du 12 octobre 2022, l'a condamnée au paiement, à titre provisionnel, de la somme de 64.528,52 euros.

Ne parvenant pas, par suite de saisies attribution infructueuses, à faire exécuter la condamnation prononcée à l'encontre de la société Orphalese [Localité 5] 36, elle s'est retournée contre les associés de cette dernière - la société L'immobilière Orphalese et MM. [N], [J] et [O] - aux fins d'obtenir leur condamnation à lui régler les sommes dues.

Le tribunal de commerce de Créteil a, par jugement du 17 janvier 2024, placé la société l'Immobilière Orphalese en liquidation judiciaire et désigné la SELARL Fides, prise en la personne de Maître [Y] [C], en qualité de liquidateur judiciaire.

Par actes des 6, 7 et 8 février 2024, la société SRG a fait assigner la société L'immobilière Orphalese, représentée par son liquidateur judiciaire, la SELARL Fides, ainsi que MM. [N], [J] et [O] devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Créteil aux fins de condamnation, à titre provisionnel, au titre des factures impayées, de la société L'immobilière Orphalese à hauteur de 46.667,25 euros TTC, de M. [O] à hauteur de 5.915,57 euros TTC, de M. [N] à hauteur de 6.572,85 euros TTC et de M. [J] à hauteur de 6.572,85 euros TTC.

Par ordonnance réputée contradictoire du 3 mai 2024, le juge des référés du tribunal judiciaire de Créteil a :

- constaté le désistement d'instance et d'action de la société SRG à l'égard de M. [O] et l'a déclaré parfait ;

- déclaré irrecevables les demandes de la société SRG à l'encontre de la société L'immobilière Orphalese, représentée par la SELARL Fides en qualité de liquidateur judiciaire, faute de signification des conclusions à cette partie défaillante ;

- condamné M. [N], en qualité d'associé de la SCCV Orphalese [Localité 5] 36, à payer à la société SRG une provision d'un montant de 6.572,85 euros, avec intérêts de droit ;

- condamné M. [J], en qualité d'associé de la SCCV Orphalese [Localité 5] 36, à payer à la société SRG une provision d'un montant de 6.572,85 euros, avec intérêts de droit ;

- condamné M. [N] et M. [J] à payer à la société SRG la somme de 1.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens de l'instance en référé.

Par déclaration du 30 septembre 2024, la société SRG a relevé appel de cette décision en ce qu'elle a déclaré irrecevables ses demandes reconventionnelles formulées à l'encontre de la société L'immobilière Orphalese, représentée par la SELARL Fides, prise en la personne de Maître [Y] [C] en qualité de liquidateur judiciaire.

Par conclusions remises et notifiées le 30 décembre 2024, elle demande à la cour de :

- infirmer l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a déclaré irrecevables ses demandes formulées à l'encontre de la SAS L'immobilière Orphalese, représentée par la SELARL Fides en qualité de liquidateur judiciaire ;

statuant à nouveau,

- dire certaine sa créance à l'encontre de la société L'immobilière Orphalese à hauteur de 46.667,25 euros TTC au titre du règlement des factures impayées, outre intérêts de retard majorés conformément aux dispositions légales et contractuelles ;

- dire que sa créance de 46.667,25 euros TTC avec intérêts de retard sera inscrite au passif de la société L'immobilière Orphalese au titre du règlement des factures impayées, outre 55,8 % des intérêts au taux de la principale facilité de refinancement appliquée par la Banque Centrale européenne à son opération de refinancement principale la plus récente majorée de sept points conformément à l'article L.441-10 II du code de commerce et 55,8% de l'indemnité forfaitaire de 40 euros ;

- fixer sa créance au passif de la société L'immobilière Orphalese à la somme de 6.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner l'intimée aux entiers dépens de la présente procédure.

La SELARL Fides ès-qualités de liquidateur judiciaire de la société L'immobilière Orphalese, à laquelle l'appelante a, par actes de commissaire de justice, fait signifier la déclaration d'appel le 31 octobre 2024 à personne habilitée à le recevoir et ses conclusions, le 7 janvier 2025, n'a pas constitué avocat.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 12 mars 2025.

En cours de délibéré, la cour a invité la société SRG à présenter ses observations sur l'application des dispositions de l'article L. 622-21 du code de commerce au présent litige et sur le sort de son action engagée à l'encontre la société L'immobilière Orphalese, en liquidation judiciaire.

Aucune note n'a été déposée par la société SRG.

SUR CE, LA COUR,

La société SRG sollicite l'infirmation de l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a dit irrecevables ses demandes dirigées à l'encontre de la société Fides ès-qualités au motif que ses dernières conclusions n'avaient pas été signifiées par commissaire de justice au liquidateur. Elle fait valoir que ses conclusions ont bien été adressées par courriel au liquidateur judiciaire, d'autant qu'elles ne modifiaient pas les demandes formulées dans l'assignation signifiée au liquidateur. Sur sa demande d'inscription de sa créance de 46.667,25 euros TTC au passif de la société L'immobilière Orphalese, elle soutient que sa créance envers son donneur d'ordre, la société Orphalese [Localité 5] 36, est incontestable et qu'en application de l'article L.211-2 du code de la construction et de l'habitation, aux termes duquel les créanciers de la société débitrice peuvent poursuivre le paiement des dettes sociales contre un associé, elle est fondée à obtenir le paiement de cette somme par un des associés de la société Orphalese [Localité 5] 36, en l'espèce la société L'immobilière Orphalese.

Il est en l'espèce constant que :

- par jugement rendu le 17 février 2024, le tribunal de commerce de Créteil a ouvert une procédure de liquidation judiciaire à l'encontre de la société L'immobilière Orphalese et a désigné la SELARL Fides, prise en la personne de Maître [Y] [C], en qualité de liquidateur judiciaire ;

- la société SRG, recherchant le paiement, par la société L'immobilière Orphalese à concurrence de ses droits sociaux, de sa créance invoquée sur la société Orphalese [Localité 5] 36, demande à la cour de fixer sa créance au passif de la société L'immobilière Orphalese, cette demande s'inscrivant dans le cadre de la procédure de liquidation judiciaire de la société L'immobilière Orphalese.

Aux termes de l'article L. 622-21 du code de commerce :

'I.- Le jugement d'ouverture interrompt ou interdit toute action en justice de la part de tous les créanciers dont la créance n'est pas mentionnée au I de l'article L. 622-17 et tendant :

1° à la condamnation du débiteur au paiement d'une somme d'argent ;

2° à la résolution d'un contrat pour défaut de paiement d'une somme d'argent.

II.- Il arrête ou interdit également toute procédure d'exécution de la part de ces créanciers tant sur les meubles que sur les immeubles ainsi que toute procédure de distribution n'ayant pas produit un effet attributif avant le jugement d'ouverture.

III.- Les délais impartis à peine de déchéance ou de résolution des droits sont en conséquence interrompus'.

Il résulte de ce texte que l'action introduite par la société SRG avant l'ouverture de la liquidation judiciaire de la société L'immobilière Orphalese ne peut être poursuivie après ce jugement dès lors qu'elle n'a donné lieu à aucune décision passée en force de chose jugée.

En l'espèce, le jugement prononçant la liquidation judiciaire de la société L'immobilière Orphalese ayant été rendu le 17 janvier 2024, l'ordonnance entreprise rendue le 3 mai 2024 n'était pas passée en force de chose jugée lors du jugement d'ouverture, de sorte qu'en application de l'article L. 622-21 précité, l'action en paiement ne peut être poursuivie.

En outre, l'instance en référé, qui ne peut tendre qu'au paiement d'une provision, n'est pas une instance en cours interrompue par l'ouverture de la procédure collective du débiteur - l'instance en cours étant celle qui tend à obtenir de la juridiction saisie du principal une décision définitive sur l'existence et le montant de la créance - de sorte que la cour d'appel, saisie d'une demande de fixation d'une créance au passif doit dire n'y avoir lieu à référé, une telle demande échappant au pouvoir du juge des référés en application de l'article L. 622-21 du code de commerce (Com.,19 septembre 2018, pourvoi n° 17-13.210, Bull. 2018, IV, n° 100).

Il convient, en conséquence, d'infirmer l'ordonnance entreprise et de dire n'y avoir lieu à référé, sans possibilité de fixation de la créance de la société SRG.

L'issue du litige commande de laisser à la charge de la société SRG les dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS

Statuant dans la limite de l'appel,

Infirme l'ordonnance entreprise ;

Statuant à nouveau,

Dit n'y avoir lieu à référé sur les demandes de la société de rénovation générale formées à l'encontre de la société Fides en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société L'immobilière Orphalese ;

Laisse à la société de rénovation générale la charge des dépens d'appel.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

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