TUE, 9e ch., 14 mai 2025, n° T-362/21
TRIBUNAL DE L'UNION EUROPÉENNE
Arrêt
Rejet
PARTIES
Demandeur :
Telly s. r. o., Česká asociace satelitních operátorů z. s.
Défendeur :
Commission européenne
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
L. Truchot
Juges :
M. Sampol Pucurull, T. Perišin
1 Par leurs recours fondés sur l’article 263 TFUE, les requérantes, Telly s. r. o. et Česká asociace satelitních operátorů z. s. (ci-après « ČASO »), demandent l’annulation de la décision C(2021) 1601 final de la Commission, du 15 mars 2021, relative à l’aide d’État SA.55805 (2020/FC) – République tchèque – Extension de la durée de validité des droits d’utilisation de fréquences des exploitants de réseaux de télévision numérique terrestre (TNT) (JO 2021, C 177, p. 1, ci-après la « décision attaquée »).
Antécédents du litige
2 La décision attaquée porte sur la prorogation en République tchèque jusqu'au 31 décembre 2030 des droits d'utilisation de fréquences détenus par certains opérateurs de réseau pour la diffusion de la télévision numérique terrestre (ci-après les « licences TNT »), à savoir České Radiokomunikace a.s. (ci-après « ČRa »), sa filiale à 100 % Czech Digital Group a.s. (ci-après « CDG »), Česká televize (ci-après « ČT ») et Digital Broadcasting (ci-après « DB »). Les licences TNT devaient expirer, respectivement, le 11 mai 2021 (ČRa), le 4 mars 2022 (DB), le 30 mai 2023 (ČT) et le 10 janvier 2024 (CDG).
3 La prorogation des licences TNT s'inscrit dans le contexte de la libération de la bande de fréquences 694‑790 MHz (ci-après la « bande 700 MHz ») imposée par la décision (UE) 2017/899 du Parlement européen et du Conseil, du 17 mai 2017, sur l'utilisation de la bande de fréquences 470‑790 MHz dans l'Union (JO 2017, L 138, p. 131).
4 Conformément à la décision 2017/899, les États membres devaient libérer la bande 700 MHz au profit des services de communications électroniques à haut débit sans fil, en principe, pour le 30 juin 2020. Par ailleurs, les États membres devaient veiller à ce que la bande de fréquences 470‑694 MHz soit disponible pour la fourniture de services de radiodiffusion par voie terrestre, y compris la télévision gratuite, au moins jusqu'en 2030.
5 Le 20 juillet 2016, en prévision de l'évolution de la réglementation de l'Union européenne applicable par l'adoption prochaine de la décision 2017/899, le gouvernement tchèque a approuvé l'usnesením vlády č. 648/2016 o Strategie rozvoje zemského digitálního televizního vysílání (ordonnance du gouvernement no 648/2016 portant sur la stratégie pour le développement de la TNT, ci-après la « stratégie de 2016 »). À cette date, la TNT était diffusée en République tchèque, comme dans d'autres États membres, sur la bande 700 MHz. Les autorités tchèques avaient accordé, à titre gratuit, quatre licences TNT pour l'exploitation dans cette bande de quatre multiplex nationaux de la norme DVB‑T/MPEG‑2 (ci-après la « norme DVB‑T »).
6 La stratégie de 2016 exposait la feuille de route pour la migration de la TNT vers la bande de fréquences 470‑694 MHz et annonçait la modernisation, dans ce but, des réseaux de TNT en République tchèque, en passant de la norme DVB‑T à la norme DVB‑T2/HEVC (ci-après la « norme DVB‑T2 »), ainsi que, parmi d'autres mesures, la prorogation des licences TNT jusqu'en 2030.
7 À ces fins, la stratégie de 2016 prévoyait, notamment, la modification ultérieure de la Zákon č. 127/2005 Sb., o elektronických komunikacích (loi no 127/2005 relative aux communications électroniques, ci-après la « loi no 127/2005 ») ainsi que l'élaboration et l'approbation d'un plan technique national de transition vers la norme DVB‑T2 (ci-après le « plan technique de transition »).
8 Le 27 juillet 2016, ČASO a été créée dans le but, notamment, de défendre et de promouvoir les intérêts communs et individuels des membres de cette association, à savoir des prestataires de services de télévision par satellite et par Internet (Internet Protocole Television, IPTV) en République tchèque.
9 Le 19 septembre 2016, ČASO a déposé une plainte devant la Commission européenne en faisant valoir que les mesures de soutien prévues dans la stratégie de 2016 dans le but de favoriser le passage de la norme DVB‑T à la norme DVB‑T2 dans le contexte de la libération de la bande de 700 MHz, y compris la prorogation des licences TNT jusqu'en 2030, constituaient des aides d'État incompatibles, qui favorisaient indûment les opérateurs de réseau de TNT et, indirectement, les prestataires de services de télévision qui utilisaient ce réseau, enfreignant le principe de neutralité technologique. La plainte a été complétée à plusieurs reprises par ČASO entre les années 2017 et 2020.
10 Le 2 décembre 2016, les autorités tchèques ont prénotifié à la Commission les mesures envisagées dans la stratégie de 2016, y compris la volonté de proroger les licences TNT jusqu'en 2030.
11 Le 19 juillet 2017, la Zákon č. 252/2017 Sb., kterým se mění zákon č. 127/2005 Sb. (loi no 252/2017 modifiant la loi no 127/2005, ci-après l'« amendement no 252/2017 ») a été adoptée conformément à la feuille de route définie dans la stratégie de 2016 (voir points 6 et 7 ci-dessus).
12 Le 14 février 2018, DIGI CZ s. r. o., devenue Telly, a déposé une plainte devant la Commission, complétée à plusieurs reprises en 2018 et 2019. Telly est un opérateur de services de télévision payante par satellite et par Internet (IPTV)..
13 Le 29 août 2018, le plan technique de transition annoncé dans la stratégie de 2016 a été approuvé par décret.
14 Entre les 31 mai et 12 juin 2019, sur demande des détenteurs des licences TNT et en application de la procédure prévue par l'article 22 bis, paragraphe 1, de la loi no 127/2005 à laquelle l'article II, paragraphe 5, de l'amendement no 252/2017 renvoyait, le Český telekomunikační úřad (autorité tchèque de régulation des télécommunications, ci-après l'« autorité de régulation ») a organisé quatre consultations publiques au sujet de la modification des licences TNT en prorogeant leur validité jusqu'au 31 décembre 2030.
15 Les observations des tiers recueillies par l'autorité de régulation ont été publiées le 30 juillet 2019.
16 Le 30 septembre 2019, l'autorité de régulation a annoncé l'adoption par le président de son conseil de deux décisions visant à modifier les licences TNT détenues par DB et par ČT en prorogeant leur validité jusqu'au 31 décembre 2030.
17 Le 21 novembre 2019, l'autorité de régulation a annoncé l'adoption par le président de son conseil de deux autres décisions visant à modifier les licences TNT détenues par CDG et par ČRa, en prorogeant leur validité jusqu'au 31 décembre 2030.
18 Le 15 mars 2021, la Commission a adopté la décision attaquée à la suite de cinq demandes de renseignements adressées aux autorités tchèques les 6 mars 2017, 20 octobre 2017, 24 juillet 2018, 13 mars 2019 et 26 février 2020.
19 Dans la décision attaquée, la Commission a considéré que la prorogation des licences TNT détenues par ČRa, CDG, ČT et DB ne constituait pas une aide d'État au sens de l'article 107, paragraphe 1, TFUE, en l'absence de financement au moyen de ressources publiques. À cet égard, la Commission a notamment constaté que les licences TNT avaient toujours été accordées de manière gratuite en République tchèque, de sorte que la prorogation de leur validité sans percevoir de contrepartie ne constituait pas une perte de ressources pour le budget de l'État. La Commission a également rappelé que la réglementation de l'Union n'imposait pas aux autorités nationales d'accorder les licences TNT à titre onéreux.
Conclusions des parties
20 Les requérantes concluent à ce qu'il plaise au Tribunal :
– annuler la décision attaquée ;
– condamner la Commission aux dépens.
21 La Commission, soutenue par la République tchèque, conclut à ce qu'il plaise au Tribunal :
– rejeter les recours ;
– condamner les requérantes aux dépens.
En droit
Sur la recevabilité des demandes d'intervention de la République tchèque et des mémoires en intervention
22 Les requérantes font observer que la République tchèque a présenté ses demandes d'intervention au soutien des conclusions de la Commission le 27 octobre 2021. Or, selon elles, ces demandes auraient dû être présentées, au plus tard, le 25 octobre 2021, dans le respect du délai prévu par l'article 143, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal. Dès lors, ces demandes seraient irrecevables ainsi que les mémoires en intervention de la République tchèque.
23 À cet égard, il y a lieu de rappeler que, conformément à l'article 143, paragraphe 1, du règlement de procédure, la demande d'intervention est présentée dans un délai de six semaines, qui prend cours à la publication visée à l'article 79 dudit règlement.
24 L'article 79 du règlement de procédure prévoit qu'un avis est publié au Journal officiel de l'Union européenne indiquant la date du dépôt de la requête introductive d'instance, le nom des parties principales, les conclusions de la requête ainsi que l'indication des moyens et des principaux arguments invoqués.
25 L'article 60 du règlement de procédure dispose que les délais de procédure sont augmentés d'un délai de distance forfaitaire de dix jours.
26 En l'espèce, les avis visés par l'article 79 du règlement de procédure concernant l'introduction des recours ont été publiés au Journal officiel le 13 septembre 2021 (JO 2021, C 368, p. 22 et 23).
27 Conformément aux critères définis par l'article 143, paragraphe 1, et par l'article 60 du règlement de procédure, le délai pour présenter des demandes d'intervention dans le cadre des présents recours expirait le 4 novembre 2021, délai de distance inclus.
28 Or, la République tchèque a présenté ses demandes d'intervention le 27 octobre 2021.
29 Les demandes d'intervention ayant été présentées dans le délai prévu par le règlement de procédure, elles ont été accueillies par le président de la septième chambre du Tribunal par deux ordonnances du 15 septembre 2022.
30 Dans ces circonstances, les fins de non-recevoir soulevées par les requérantes concernant l'irrecevabilité des demandes d'intervention et des mémoires en intervention de la République tchèque doivent être rejetées.
Sur les demandes d'omission de certaines données envers le public
31 Sur le fondement de l'article 144, paragraphe 2, du règlement de procédure, les requérantes ont demandé l'omission envers la République tchèque de certaines informations figurant dans les requêtes, répliques et dupliques ainsi que dans quelques annexes. A fortiori, cette demande est comprise par le Tribunal, en substance, comme visant également à omettre ces données envers le public sur le fondement des articles 66 et 66 bis du règlement de procédure.
32 La République tchèque n'a pas émis d'objections quant à ces demandes de traitement confidentiel.
33 Lorsqu'une partie présente une demande au titre de l'article 144, paragraphe 2, du règlement de procédure, il appartient, en principe, au président de statuer uniquement sur les pièces et informations dont la confidentialité est contestée (voir, en ce sens et par analogie, ordonnance du 26 janvier 2018, FV/Conseil, T‑750/16, non publiée, EU:T:2018:59, point 14 et jurisprudence citée).
34 Toutefois, nonobstant l'absence de contestation, le Tribunal ne saurait être empêché de rejeter des demandes de traitement confidentiel en ce qu'elles visent des données dont le caractère public ressort manifestement des éléments du dossier ou dont le caractère confidentiel devient, du fait de la divulgation d'autres éléments du dossier, manifestement obsolète (ordonnance du 15 septembre 2016, Deutsche Telekom/Commission, T‑827/14, non publiée, EU:T:2016:545, point 46). Ainsi, dans certaines circonstances, il peut décider de se prononcer sur les aspects non contestés d'une demande de traitement confidentiel (voir, en ce sens, ordonnance du 11 avril 2019, Google et Alphabet/Commission, T‑612/17, non publiée, EU:T:2019:250, point 16).
35 Il convient, en outre, de rappeler que, selon une jurisprudence constante, des informations qui ont été confidentielles, mais qui datent de cinq ans ou plus doivent, de ce fait, être tenues pour historiques et être communiquées aux autres parties, à moins que, exceptionnellement, la partie demandant le maintien de leur confidentialité ne démontre que, malgré leur ancienneté, ces informations constituent toujours des secrets essentiels, notamment industriels ou commerciaux, dont la divulgation lui porterait préjudice ou porterait préjudice au tiers concerné (voir ordonnance du 11 avril 2019, Google et Alphabet/Commission, T‑612/17, non publiée, EU:T:2019:250, point 19 et jurisprudence citée).
36 Par ailleurs, le Tribunal, dans le cadre de l'application des articles 66 et 66 bis du règlement de procédure, doit concilier le principe de publicité des décisions de justice avec le droit à la protection des données personnelles et le droit à la protection du secret professionnel, en ayant également égard au droit du public d'avoir accès, conformément aux principes inscrits à l'article 15 TFUE, aux décisions de justice (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 5 octobre 2020, Broughton/Eurojust, T‑87/19, non publié, EU:T:2020:464, point 49).
37 En l'espèce, le Tribunal décide de ne pas occulter dans la version publique du présent arrêt certaines données visées par les demandes de traitement confidentiel des requérantes dont la confidentialité n'a pas été contestée par la République tchèque. En effet, certaines de ces données, outre le fait qu'elles sont historiques, peuvent être inférées du contenu d'autres parties des dossiers pour lesquelles une demande de traitement confidentiel n'a pas été présentée. Par ailleurs, certains passages des mémoires visés par les demandes de traitement confidentiel concernent certains aspects de la démonstration par les requérantes de leur affectation individuelle au regard des critères définis dans l'arrêt du 15 juillet 1963, Plaumann/Commission (25/62, EU:C:1963:17, p. 223), et contiennent des allégations qui, à l'évidence, ne revêtent pas de nature confidentielle, telles que la description des différents types d'offres de télévision, l'évolution récente du marché de la radiodiffusion télévisuelle en République tchèque et l'impact allégué sur ce marché de la prorogation des licences TNT. Or, l'occultation de ces données affecterait la compréhension par le public de l'arrêt du Tribunal (voir, en ce sens, arrêt du 2 février 2022, Scania e.a./Commission, T‑799/17, EU:T:2022:48, point 82).
Sur la recevabilité des recours
38 Conformément à l'article 263, quatrième alinéa, TFUE, toute personne physique ou morale peut former un recours contre les actes dont elle est le destinataire (premier cas de figure) ou qui la concernent directement et individuellement (deuxième cas de figure) ainsi que contre les actes réglementaires qui la concernent directement et qui ne comportent pas de mesures d'exécution (troisième cas de figure).
39 Sans soulever formellement des exceptions d'irrecevabilité au titre de l'article 130, paragraphe 1, du règlement de procédure, la Commission, soutenue par la République tchèque, conteste la recevabilité des recours au regard des conditions posées par l'article 263, quatrième alinéa, TFUE.
40 Les requérantes soutiennent qu'elles remplissent les conditions de recevabilité prévues par le deuxième cas de figure visé par l'article 263, quatrième alinéa, TFUE.
41 Il est constant que la décision attaquée a pour unique destinataire la République tchèque et non les requérantes. Il en est ainsi car la procédure de contrôle des aides d'État est, compte tenu de son économie générale, une procédure ouverte à l'égard de l'État membre responsable de l'octroi de l'aide (arrêts du 24 mars 2011, Freistaat Sachsen et Land Sachsen-Anhalt/Commission, T‑443/08 et T‑455/08, EU:T:2011:117, point 50, et du 12 novembre 2015, HSH Investment Holdings Coinvest‑C et HSH Investment Holdings FSO/Commission, T‑499/12, EU:T:2015:840, point 28). Les présents recours ne sauraient donc être déclarés recevables au titre du premier cas de figure prévu par l'article 263, quatrième alinéa, premier membre de phrase, TFUE.
42 Avant d'analyser, successivement, si les requérantes remplissent les conditions prévues par les deuxième et troisième cas de figure visés par l'article 263, quatrième alinéa, TFUE, il convient d'examiner la situation spécifique de ČASO en tant qu'association professionnelle.
Sur la situation spécifique de ČASO en tant qu'association professionnelle
43 Il y a lieu de rappeler que les recours formés par des associations ou des groupements sont recevables, selon la jurisprudence, dans trois situations, à savoir lorsqu'ils représentent les intérêts de personnes qui, elles, seraient recevables à agir, ou lorsqu'ils sont individualisés en raison de l'affectation de leurs intérêts propres en tant qu'association ou en tant que groupement, notamment parce que leur position de négociateur a été affectée par l'acte dont l'annulation est demandée, ou encore lorsqu'une disposition légale leur reconnaît expressément une série de facultés à caractère procédural (voir ordonnance du 23 novembre 2015, Milchindustrie-Verband et Deutscher Raiffeisenverband/Commission, T‑670/14, EU:T:2015:906, point 14 et jurisprudence citée).
44 Lorsqu'une association introduit son recours en représentation de ses membres, elle agit en lieu et place de ces derniers. Dès lors, si les membres de cette association ont formé leurs propres recours, le recours de l'association ne saurait être déclaré recevable sur le fondement de leur représentation (voir, en ce sens, ordonnance du 29 mars 2012, Asociación Española de Banca/Commission, T‑236/10, EU:T:2012:176, point 24 et jurisprudence citée).
45 À l'appui de la recevabilité de son recours, ČASO fait valoir au stade de la requête qu'elle est une organisation professionnelle représentant les intérêts des opérateurs satellitaires en République tchèque qui sont tous affectés par la prorogation des licences TNT et, par voie de conséquence, par la décision attaquée. ČASO se prévaut également de sa qualité de plaignante devant la Commission.
46 En réponse à une question du Tribunal, ČASO a précisé dans la réplique qu'elle basait sa qualité pour agir sur celle de ses membres, à savoir Telly et Canal + Luxembourg Sàrl, anciennement dénommée M7 Group (ci-après l'« autre membre de ČASO »). ČASO n'a pas fait valoir qu'elle fondait sa qualité à agir sur un intérêt propre ou sur le fondement d'une disposition légale lui reconnaissant expressément une série de facultés à caractère procédural au sens de la jurisprudence citée au point 43 ci-dessus. Interrogée par le Tribunal au cours de l'audience, ČASO a confirmé qu'elle n'avait que ces deux membres.
47 Il ressort des statuts de ČASO que cette association peut agir en défense des intérêts communs et individuels de ses membres, ce qui n'est pas contesté par la Commission.
48 Cependant, Telly ayant introduit son propre recours visant à l'annulation de la décision attaquée, ČASO ne peut pas se prévaloir de la qualité pour agir à titre individuel de ce membre de l'association, conformément à la jurisprudence citée au point 44 ci-dessus.
49 Dès lors, la recevabilité du recours de ČASO au regard de l'article 263, quatrième alinéa, TFUE doit être examinée uniquement sur le fondement de la représentation des intérêts de l'autre membre de ČASO et de la qualité à agir à titre individuel de ce membre de l'association.
Sur la qualité pour agir des requérantes en vertu du deuxième cas de figure prévu à l'article 263, quatrième alinéa, TFUE
50 Un recours en annulation n'est recevable au titre de l'article 263, quatrième alinéa, deuxième membre de phrase, TFUE que si la partie requérante, qui n'est pas destinataire de la décision attaquée, est directement et individuellement concernée par cette dernière. Les conditions de l'affectation directe et de l'affectation individuelle étant cumulatives, il suffit que l'une d'entre elles fasse défaut pour conclure qu'un recours n'est pas recevable au titre de cette disposition.
51 En l'espèce, le Tribunal estime opportun de débuter l'analyse par l'examen de la condition de l'affectation individuelle.
52 Selon une jurisprudence constante, les sujets autres que les destinataires d'une décision ne sauraient prétendre être individuellement concernés que si cette décision les atteint en raison de certaines qualités qui leur sont particulières ou d'une situation de fait qui les caractérise par rapport à toute autre personne et, de ce fait, les individualise d'une manière analogue à celle dont le destinataire d'une telle décision le serait (voir arrêt du 15 juillet 2021, Deutsche Lufthansa/Commission, C‑453/19 P, EU:C:2021:608, point 33 et jurisprudence citée).
53 S'agissant d'une décision prise par la Commission en matière d'aides d'État, il convient de rappeler que, dans le cadre de la procédure de contrôle visée à l'article 108 TFUE, deux phases doivent être distinguées. D'une part, la phase préliminaire d'examen instituée à l'article 108, paragraphe 3, TFUE, qui permet à la Commission de se former une première opinion sur la compatibilité de l'aide en cause ou sur l'absence d'aide. D'autre part, la procédure formelle d'examen prévue à l'article 108, paragraphe 2, TFUE, qui permet à la Commission d'avoir une information complète sur les données de l'affaire. Ce n'est que dans le cadre de cette procédure que le traité FUE prévoit l'obligation, pour la Commission, de mettre en demeure les intéressés de présenter leurs observations [voir, en ce sens, arrêt du 19 mai 2021, Ryanair/Commission (TAP ; Covid‑19), T‑465/20, EU:T:2021:284, point 21 et jurisprudence citée].
54 Si la Commission constate, dans le cadre de la procédure d'examen préliminaire, que la mesure notifiée suscite des doutes ou des difficultés sérieuses quant à sa compatibilité avec le marché intérieur, elle est tenue d'adopter, sur le fondement de l'article 4, paragraphe 4, du règlement (UE) 2015/1589 du Conseil, du 13 juillet 2015, portant modalités d'application de l'article 108 TFUE (JO 2015, L 248, p. 9), une décision d'ouverture de la procédure formelle d'examen. Il convient de préciser que, selon la jurisprudence, les notions de « doutes » et de « difficultés sérieuses » coïncident (voir arrêt du 21 décembre 2022, Landwärme/Commission, T‑626/20, EU:T:2022:853, point 21 et jurisprudence citée).
55 En adoptant une décision constatant que la mesure en cause ne constitue pas une aide au terme de l'examen préliminaire, la Commission refuse également implicitement d'ouvrir la seconde phase, à savoir la procédure formelle d'examen prévue à l'article 108, paragraphe 2, TFUE et à l'article 6, paragraphe 1, du règlement 2015/1589 (voir, en ce sens, arrêt du 19 octobre 2022, Ighoga Region 10 e.a./Commission, T‑582/20, non publié, EU:T:2022:648, point 35). Lorsque la procédure formelle d'examen n'est pas ouverte, les parties intéressées, qui auraient pu déposer des observations durant cette seconde phase, sont dépourvues de cette possibilité. Pour y remédier, il leur est reconnu le droit de contester, devant le juge de l'Union, la décision prise par la Commission de ne pas ouvrir la procédure formelle d'examen. Ainsi, un recours visant à l'annulation d'une décision fondée sur l'article 108, paragraphe 3, TFUE introduit par une partie intéressée au sens de l'article 108, paragraphe 2, TFUE est recevable lorsque l'auteur de ce recours tend à faire sauvegarder les droits procéduraux qu'il tire de cette dernière disposition [voir arrêt du 19 mai 2021, Ryanair/Commission (TAP ; Covid-19), T‑465/20, EU:T:2021:284, point 22 et jurisprudence citée]. La partie requérante supporte la charge de la preuve de l'existence de doutes ou de difficultés sérieuses devant conduire à l'ouverture d'une procédure formelle d'examen, preuve qu'elle peut rapporter à partir d'un faisceau d'indices concordants, relatifs, d'une part, aux circonstances et à la durée de la phase préliminaire d'examen et, d'autre part, au contenu de la décision attaquée (voir, en ce sens, arrêt du 28 mars 2012, Ryanair/Commission, T‑123/09, EU:T:2012:164, point 77 et jurisprudence citée).
56 En revanche, si une partie requérante met en cause le bien-fondé de la décision constatant que la mesure en cause ne constitue pas une aide au terme de l'examen préliminaire, le simple fait qu'elle puisse être considérée comme intéressée au sens de l'article 108, paragraphe 2, TFUE ne saurait suffire pour que soit admise la recevabilité du recours. Elle doit alors démontrer qu'elle bénéficie d'un statut particulier au sens de l'arrêt du 15 juillet 1963, Plaumann/Commission (25/62, EU:C:1963:17, p. 223). Il en serait notamment ainsi lorsque la partie requérante apporte des éléments permettant de démontrer que la mesure en cause est susceptible de porter substantiellement atteinte à sa position sur le marché concerné (voir arrêt du 15 juillet 2021, Deutsche Lufthansa/Commission, C‑453/19 P, EU:C:2021:608, point 59 et jurisprudence citée).
57 À la lumière de ces principes, il y a lieu de déterminer d'abord si, par l'introduction de leurs recours, les requérantes ont cherché à contester l'absence d'ouverture de la procédure formelle d'examen en invoquant une violation des droits procéduraux conférés par l'article 108, paragraphe 2, TFUE ou bien si elles ont uniquement visé à contester le bien-fondé de la décision attaquée.
– Sur l'invocation par les requérantes de la violation de leurs droits procéduraux au titre de l'article 108, paragraphe 2, TFUE
58 Au soutien de la recevabilité de leurs recours, les requérantes font valoir au stade de la requête que le juge de l'Union a déjà reconnu que les plaignants sont directement et individuellement concernés par les décisions par lesquelles la Commission conclut qu'une mesure ne constitue pas une aide d'État et s'abstient, par conséquent, d'ouvrir la procédure prévue par l'article 108 TFUE.
59 Les requérantes rappellent qu'elles ont déposé des plaintes conformément à l'article 24 du règlement 2015/1589 et jouissent donc de tous les droits que ce règlement confère aux parties intéressées, tels que le droit d'être informées de la position définitive de la Commission sur les griefs soulevés.
60 Selon les requérantes, leur qualité de plaignantes et leur participation active à l'enquête menée par la Commission suffisent pour démontrer qu'elles sont directement et individuellement concernées par la décision attaquée, conformément à la jurisprudence.
61 Par ailleurs, les requérantes rappellent que la qualité de « partie intéressée » n'est pas réservée aux entreprises substantiellement affectées par l'octroi d'une aide.
62 Dans les répliques et dans les observations sur les mémoires en intervention de la République tchèque, les requérantes indiquent que, par leurs recours, elles visent principalement à obtenir la protection de leurs droits légitimes en tant que parties intéressées au sens de l'article 24 du règlement 2015/1589, droits auxquels il aurait d'abord été porté atteinte par la prorogation des licences TNT puis par la décision attaquée. En outre, les requérantes font valoir que la décision litigieuse n'est pas dûment motivée et que, par conséquent, leurs droits procéduraux ont été méconnus.
63 La Commission, soutenue par la République tchèque, fait observer que les requérantes n'invoquent pas une violation de leurs droits procéduraux au titre de l'article 108, paragraphe 2, TFUE, mais contestent le bien-fondé de la décision attaquée.
64 Il y a lieu de rappeler que, conformément à une jurisprudence constante, il n'appartient pas au juge de l'Union d'interpréter le recours d'un requérant mettant en cause exclusivement le bien-fondé d'une décision d'appréciation de la mesure d'aide en cause en tant que telle comme visant en réalité à sauvegarder les droits procéduraux que le requérant tire de l'article 108, paragraphe 2, TFUE lorsque celui-ci n'a pas expressément formé de moyen poursuivant cette fin, sous peine de transformer l'objet de ce recours (voir, en ce sens, arrêt du 14 septembre 2023, Land Rheinland-Pfalz/Deutsche Lufthansa, C‑466/21 P, EU:C:2023:666, point 101 et jurisprudence citée).
65 Cela étant, les arguments du requérant qui visent spécifiquement à démontrer que la Commission aurait dû ouvrir la procédure formelle d'examen sont recevables lorsque le recours à l'appui duquel ces arguments sont invoqués vise effectivement l'annulation de la décision de ne pas ouvrir une telle procédure et que, d'après les termes mêmes de la requête, le requérant fait valoir que le défaut d'ouverture de la procédure d'examen l'a empêché de bénéficier des garanties procédurales auxquelles il a droit (voir, en ce sens, arrêt du 14 septembre 2023, Land Rheinland-Pfalz/Deutsche Lufthansa, C‑466/21 P, EU:C:2023:666, point 102 et jurisprudence citée).
66 En l'espèce, il y a lieu de constater que, si les requérantes se prévalent au soutien de leurs recours de leur qualité de plaignantes et, partant, de tiers intéressés au sens de l'article 108, paragraphe 2, TFUE, elles n'invoquent pas de moyen tiré de la violation des droits procéduraux qu'elles tirent de l'article 108, paragraphe 2, TFUE en l'absence d'ouverture de la procédure formelle d'examen.
67 En effet, au soutien de leurs recours, les requérantes invoquent un premier moyen, tiré d'une erreur manifeste d'appréciation de la Commission dans son analyse portant sur l'article 107, paragraphe 1, TFUE, ainsi qu'un second moyen, tiré de la violation de l'obligation de motivation de la décision attaquée.
68 Par ailleurs, il y a lieu d'observer qu'aucun des arguments avancés par les requérantes au soutien de leurs recours ne vise spécifiquement à démontrer que la Commission aurait dû ouvrir la procédure formelle d'examen prévue par l'article 108, paragraphe 2, TFUE, au cours de laquelle elles auraient pu présenter des observations.
69 En effet, dans le cadre du premier moyen, les requérantes ont présenté des allégations visant à démontrer l'existence d'une erreur manifeste d'appréciation en ce que la Commission a considéré que la prorogation des licences TNT n'impliquait pas de transfert de ressources d'État. Par leur second moyen, les requérantes font valoir que la décision attaquée n'est pas suffisamment motivée. Aucune allégation des requérantes au stade de la requête ne tend à établir, sur la base d'un faisceau d'indices concordants, l'existence de doutes ou de difficultés sérieuses ayant dû conduire à l'ouverture de la procédure formelle d'examen au sens de la jurisprudence citée au point 54 ci-dessus. De surcroît, les requérantes assimilent, à tort, les droits procéduraux tirés de l'article 108, paragraphe 2, TFUE à l'obligation de motivation qui incombe à la Commission sur le fondement de l'article 296 TFUE.
70 À la lumière de ce qui précède, il y a lieu de constater que les requérantes n'ont pas, par l'introduction de leurs recours, cherché à contester l'absence d'ouverture de la procédure formelle d'examen en faisant valoir une violation des droits procéduraux que leur confère l'article 108, paragraphe 2, TFUE, mais ont visé, en revanche, à mettre en cause le bien-fondé de la décision attaquée qui a rejeté, en substance, leurs plaintes.
71 Dans ces conditions, leur affectation individuelle doit être examinée au regard des critères définis dans la jurisprudence citée au point 56 ci-dessus, qui exige que la partie requérante apporte des éléments permettant de démontrer que la mesure en cause est susceptible de porter substantiellement atteinte à sa position sur le marché.
– Sur l'atteinte substantielle à la position sur le marché
72 Pour être recevables à demander l'annulation de la décision attaquée au regard des moyens qu'elles soulèvent, les requérantes doivent démontrer qu'elles ont un statut particulier au sens de la jurisprudence issue de l'arrêt du 15 juillet 1963, Plaumann/Commission (25/62, EU:C:1963:17, p. 223).
73 Conformément à cette jurisprudence, les personnes physiques ou morales ne satisfont à la condition relative à l'affectation individuelle que si l'acte attaqué les atteint en raison de certaines qualités qui leur sont particulières ou d'une situation de fait qui les caractérise par rapport à toute autre personne et, de ce fait, les individualise de manière analogue à celle dont le destinataire le serait (arrêts du 15 juillet 1963, Plaumann/Commission, 25/62, EU:C:1963:17, p. 223 ; du 3 octobre 2013, Inuit Tapiriit Kanatami e.a./Parlement et Conseil, C‑583/11 P, EU:C:2013:625, point 72, et du 27 février 2014, Stichting Woonpunt e.a./Commission, C‑132/12 P, EU:C:2014:100, point 57). Selon la jurisprudence citée au point 56 ci-dessus, cette exigence est satisfaite si la partie requérante apporte des éléments permettant de démontrer que la mesure en cause est susceptible de porter substantiellement atteinte à sa position sur le marché concerné.
74 Les requérantes font valoir que, à supposer même que les critères définis par l'arrêt du 15 juillet 1963, Plaumann/Commission (25/62, EU:C:1963:17, p. 223) soient applicables, elles rempliraient les conditions requises, car Telly et l'autre membre de ČASO sont en situation de concurrence directe avec les opérateurs de TNT et la prorogation des licences TNT les atteint substantiellement.
75 En premier lieu, s'agissant de la concurrence directe, les requérantes font valoir que Telly et l'autre membre de ČASO fournissent des services interchangeables avec ceux proposés par ČRa, CDG et DB sur le marché de la radiodiffusion télévisuelle en République tchèque. Les opérateurs de la plateforme de TNT seraient dans une situation factuelle et juridique comparable à celle des opérateurs des autres plateformes de diffusion de services de télévision, telles que le satellite, le câble et l'Internet (IPTV). En conséquence, selon les requérantes, tous ces opérateurs et fournisseurs exercent leur activité économique sur le même marché pertinent où la neutralité technologique doit être préservée, comme la Commission l'aurait confirmé à maintes reprises dans le cadre de sa pratique décisionnelle.
76 En second lieu, s'agissant de l'atteinte substantielle, les requérantes font valoir, premièrement, que la prorogation des licences TNT constitue une exception au principe de neutralité technologique de nature à fausser la concurrence entre les opérateurs des différentes plateformes. Selon les requérantes, la position sur le marché de Telly et de l'autre membre de ČASO a été affaiblie et continuera à se dégrader à l'avenir par la prorogation des licences TNT, cette dernière ayant directement porté atteinte à leur situation commerciale ou financière.
77 À cet égard, les requérantes expliquent que, en République tchèque, le public peut généralement choisir entre un service de télévision terrestre en clair diffusé par la TNT et des opérateurs de télévision payante, tels que Telly et l'autre membre de ČASO. Traditionnellement, le service de télévision en clair jouirait d'une forte position sur l'ensemble du marché des services de télévision tchèque, avec une part correspondant à au moins 50 % du nombre total de foyers, exerçant ainsi une pression concurrentielle importante sur les opérateurs de télévision payante. Selon les requérantes, du fait de la très forte pénétration du service de télévision en clair, les principaux fournisseurs de contenu télévisuel ne réservent pas les services spéciaux, tels que les archives télévisuelles ou la qualité haute définition, aux seuls opérateurs de télévision payante, mais permettent également au service de télévision en clair diffusé par la plateforme de TNT, qui est gratuit et disponible sur l'ensemble du territoire tchèque, d'en bénéficier. Dans ces conditions, les autres opérateurs de télévision payante, comme Telly et l'autre membre de ČASO, perdraient leur principal avantage concurrentiel sur le marché de la radiodiffusion télévisuelle.
78 Les requérantes font valoir que, en bénéficiant d'une prorogation des licences TNT, les opérateurs de la plateforme de TNT diffusant un service de télévision en clair ont réalisé des économies de coûts considérables, ce qui leur a conféré un avantage concurrentiel important. Dès lors, selon les requérantes, la diffusion sur la plateforme de TNT est artificiellement une diffusion très peu onéreuse pour les organismes de radiodiffusion télévisuelle. Par conséquent, cela les inciterait à préférer la diffusion gratuite de la TNT à la distribution de la télévision payante. Cela serait illustré par le choix de deux organismes de radiodiffusion télévisuelle privés importants de lancer des nouveaux programmes dans le cadre de leur diffusion gratuite, où la TNT est la principale technologie de diffusion. Ainsi, la position de la TNT se trouverait artificiellement renforcée en tant que principale plateforme de radiodiffusion, alors qu'ailleurs en Europe cette place est traditionnellement dévolue au satellite.
79 Dans ces conditions, selon les requérantes, la prorogation des licences TNT a nui aux performances de Telly et de l'autre membre de ČASO et a eu pour effet que leurs chiffres d'affaires [confidentiel] (1), ce qui démontrerait qu'elle leur a directement porté atteinte.
80 Deuxièmement, les requérantes ajoutent que, avant la prorogation des licences TNT, Telly et l'autre membre de ČASO étaient intéressés par une participation à un appel d'offres aux fins de leur attribution. Par ailleurs, l'intérêt de ce dernier aurait été porté à la connaissance de la Commission pendant l'enquête. Ce projet n'aurait pas pu se concrétiser en raison de l'absence de transparence de la prorogation des licences TNT et de son caractère sélectif.
81 Troisièmement, les requérantes estiment que le marché de la radiodiffusion télévisuelle en République tchèque aurait connu une évolution différente si les licences TNT n'avaient pas été prorogées et qu'un appel d'offres avait été organisé. Un nouvel acteur aurait pu entrer sur le marché et développer un service de télévision payante sur la TNT. Dans une telle hypothèse, Telly et l'autre membre de ČASO auraient pu entamer des négociations sur une certaine forme de coopération afin de pouvoir proposer une offre homogène de télévision payante pour l'ensemble des trois technologies.
82 La Commission, soutenue par la République tchèque, rétorque que les requérantes ne fournissent aucun élément démontrant une atteinte à la position sur le marché de Telly et de l'autre membre de ČASO, indiquant une baisse de leurs performances commerciales ou financières, telle qu'une baisse notable du chiffre d'affaires, des pertes financières sensibles ou une diminution significative de leur part de marché à la suite de la prorogation des licences TNT. Les requérantes ne démontreraient pas non plus que cette dernière aurait privé ces opérateurs de la possibilité de réaliser des bénéfices ou aurait entraîné une évolution moins favorable que celle qu'elle aurait connue en l'absence d'une telle mesure.
83 La République tchèque ajoute que le fait que les services fournis par Telly et l'autre membre de ČASO, au moyen de technologies par satellite et par Internet (IPTV), peuvent, dans le contexte plus large de la fourniture de services de télévision, concurrencer dans une certaine mesure ceux fournis au moyen de la technologie TNT ne signifie aucunement que ces derniers soient individuellement concernés par la décision attaquée. En effet, les titulaires des licences TNT seraient avant tout des opérateurs de réseaux, alors que Telly et l'autre membre de ČASO interviendraient sur le marché des services de télévision.
84 Il y a lieu de rappeler que, conformément à la jurisprudence, la démonstration, par la partie requérante, d'une atteinte substantielle à sa position sur le marché n'implique pas de se prononcer de façon définitive sur les rapports de concurrence entre elle et les entreprises bénéficiaires, mais nécessite seulement de la part de ladite partie requérante qu'elle indique de façon pertinente les raisons pour lesquelles la décision de la Commission est susceptible de léser ses intérêts légitimes en affectant substantiellement sa position sur le marché en cause (voir arrêt du 15 juillet 2021, Deutsche Lufthansa/Commission, C‑453/19 P, EU:C:2021:608, point 57 et jurisprudence citée).
85 Il ressort ainsi de la jurisprudence que l'atteinte substantielle à la position concurrentielle de la partie requérante sur le marché en cause résulte non pas d'une analyse approfondie des différents rapports de concurrence sur ce marché, permettant d'établir avec précision l'étendue de l'atteinte à sa position concurrentielle, mais, en principe, d'un constat prima facie que l'octroi de la mesure visée par la décision de la Commission conduit à porter substantiellement atteinte à cette position (arrêt du 15 juillet 2021, Deutsche Lufthansa/Commission, C‑453/19 P, EU:C:2021:608, point 58).
86 Il en découle que cette condition peut être satisfaite dès lors que la partie requérante apporte des éléments permettant de démontrer que la mesure en cause est susceptible de porter substantiellement atteinte à sa position sur le marché concerné (voir arrêt du 15 juillet 2021, Deutsche Lufthansa/Commission, C‑453/19 P, EU:C:2021:608, point 59 et jurisprudence citée).
87 S'agissant des éléments admis par la jurisprudence pour établir une telle atteinte substantielle, en premier lieu, la seule circonstance qu'un acte soit susceptible d'exercer une certaine influence sur les rapports de concurrence existant sur le marché pertinent et que l'entreprise concernée se trouve dans une quelconque relation de concurrence avec le bénéficiaire de cet acte ne saurait suffire pour que ladite entreprise puisse être considérée comme étant individuellement concernée par ledit acte. Dès lors, une entreprise ne saurait se prévaloir uniquement de sa qualité de concurrente par rapport à l'entreprise bénéficiaire (voir arrêt du 15 juillet 2021, Deutsche Lufthansa/Commission, C‑453/19 P, EU:C:2021:608, point 60 et jurisprudence citée).
88 La démonstration d'une atteinte substantielle portée à la position d'un concurrent sur le marché ne saurait être limitée à la présence de certains éléments indiquant une dégradation des performances commerciales ou financières de la partie requérante, tels qu'une importante baisse du chiffre d'affaires, des pertes financières non négligeables ou encore une diminution significative des parts de marché à la suite de l'octroi de l'aide en question. L'octroi d'une aide d'État peut également porter atteinte à la situation concurrentielle d'un opérateur d'autres manières, notamment en provoquant un manque à gagner ou une évolution moins favorable que celle qui aurait été enregistrée en l'absence d'une telle aide (voir arrêt du 15 juillet 2021, Deutsche Lufthansa/Commission, C‑453/19 P, EU:C:2021:608, point 61 et jurisprudence citée).
89 En outre, la jurisprudence n'exige pas que la partie requérante apporte des éléments quant à la taille ou à l'étendue géographique des marchés en cause, ou encore quant à ses parts de marché ou à celles du bénéficiaire de la mesure en cause ou d'éventuels concurrents sur ces marchés (voir, en ce sens, arrêt du 15 juillet 2021, Deutsche Lufthansa/Commission, C‑453/19 P, EU:C:2021:608, point 65).
90 C'est à l'aune de ces principes qu'il convient d'examiner si les éléments avancés par les requérantes démontrent que la prorogation des licences TNT était susceptible d'affecter substantiellement la position concurrentielle de Telly et de l'autre membre de ČASO.
91 En l'espèce, les requérantes expliquent d'abord que la TNT et la technologie satellitaire qu'elles utilisent sont en situation de concurrence sur le marché de la radiodiffusion télévisuelle en République tchèque et décrivent, dans des termes généraux, certaines caractéristiques et dynamiques de ce marché, à savoir la forte pénétration des services de télévision en clair diffusés par la TNT par rapport à d'autres modalités de diffusion, comme le satellite et l'Internet (IPTV) et, dans ces conditions, la tendance des principaux fournisseurs de contenu audiovisuel à diffuser leur contenu en clair par la TNT, au lieu de réserver certains services spéciaux à la télévision payante diffusée sur les autres plateformes.
92 S'agissant de la prorogation des licences TNT, les requérantes font valoir, en substance, que leur gratuité n'est pas conforme au principe de neutralité technologique en ce qu'elle a procuré un avantage concurrentiel important aux opérateurs de réseau de TNT et aux prestataires de services de télévision qui utilisent ce réseau. En effet, la diffusion de contenus par le biais de la TNT serait artificiellement très peu onéreuse, ce qui accentuerait la tendance mentionnée au point 91 ci-dessus. Selon les requérantes, cette prorogation a nui aux performances de Telly et de l'autre membre de ČASO, dont les chiffres d'affaires [confidentiel]. Par ailleurs, en l'absence d'appel d'offres pour l'attribution des licences TNT, Telly et l'autre membre de ČASO auraient été privés de la possibilité d'y participer ou de négocier avec un nouvel entrant, qui aurait changé la dynamique de marché.
93 Il y a lieu de considérer que ces arguments ne suffisent pas pour démontrer que la prorogation des licences TNT était susceptible de porter substantiellement atteinte à la position concurrentielle de Telly et de l'autre membre de ČASO sur le marché sur lequel elles affirment opérer, à savoir le marché de la fourniture de services de télévision en République tchèque, sans qu'il soit besoin de déterminer si toutes les technologies de diffusion de ces services et toutes les offres sont substituables.
94 En effet, les requérantes n'ont fourni aucun élément dans leurs mémoires sur la quantification des avantages allégués en faveur des détenteurs des licences TNT, qui sont des opérateurs de réseau à l'exception de ČT, ni sur la répercussion effective de ces avantages sur le prix facturé par ces détenteurs aux fournisseurs de contenus audiovisuels qui choisissent leur diffusion par la TNT.
95 S'agissant de l'argument selon lequel deux organismes de radiodiffusion privés auraient choisi de lancer des nouveaux programmes dans le cadre de leur diffusion gratuite pour laquelle la TNT est la principale technologie, les requérantes manquent d'établir tout lien de causalité avec l'avantage allégué faisant l'objet de la décision attaquée.
96 S'agissant de l'argument des requérantes tiré de l'impact de la prorogation des licences TNT sur les chiffres d'affaires de Telly et de l'autre membre de ČASO, il s'agit de simples allégations, sans preuve à l'appui. Par ailleurs, les requérantes n'ont présenté aucun indice tendant à établir un lien de causalité.
97 S'agissant de la prétendue violation du principe de neutralité technologique, cette seule allégation n'apporte aucun élément concret sur les effets de la prorogation des licences TNT sur la position de Telly et de l'autre membre de ČASO sur le marché de la fourniture de services de télévision en République tchèque.
98 Enfin, s'agissant des désavantages concurrentiels allégués par les requérantes en raison de l'absence d'appel d'offres pour l'attribution des licences TNT prorogées, il y a lieu de constater que la Commission n'a pas examiné cette mesure dans la décision attaquée.
99 En effet, dans cette décision, la Commission s'est limitée à considérer que la prorogation, à titre gratuit, des licences TNT ne comportait pas de ressources d'État au sens de l'article 107, paragraphe 1, TFUE, de sorte que la qualification d'aide d'État était exclue.
100 Les requérantes n'ont pas avancé, ni a fortiori établi, que, dans l'hypothèse où cette décision devait être annulée, un appel d'offres pour l'attribution des licences TNT devrait nécessairement être organisé par l'autorité de régulation, plutôt qu'une prorogation des licences TNT à titre onéreux.
101 De surcroît, il y a lieu de noter, à l'instar de la Commission, que Telly, qui n'est pas un opérateur de réseau, ne fournit aucune preuve quant à son souhait de participer à un appel d'offres, pas plus qu'elle ne démontre un quelconque intérêt réel à obtenir une licence TNT.
102 Il résulte de ce qui précède que les requérantes sont restées en défaut de démontrer que la décision attaquée est susceptible de léser leurs intérêts légitimes en affectant substantiellement la position de Telly et de l'autre membre de ČASO sur le marché de la fourniture de services de télévision en République tchèque.
103 La condition tenant à l'affectation individuelle prévue par l'article 263, quatrième alinéa, TFUE n'est donc pas remplie.
– Conclusion sur le deuxième cas de figure visé par l'article 263, quatrième alinéa, TFUE
104 Le critère de l'affectation individuelle n'étant pas rempli, il y a lieu de conclure, sans qu'il soit besoin d'examiner le critère de l'affectation directe, que les présents recours ne sont pas recevables au titre du deuxième cas de figure prévu par l'article 263, quatrième alinéa, TFUE.
Sur la qualité pour agir des requérantes en vertu du troisième cas de figure prévu à l'article 263, quatrième alinéa, TFUE
105 Aux termes de l'article 263, quatrième alinéa, troisième membre de phrase, TFUE, toute personne physique ou morale peut former un recours contre les actes réglementaires qui la concernent directement et qui ne comportent pas de mesures d'exécution.
106 Au soutien de la recevabilité de leurs recours, les requérantes ne se sont pas prévalues de cette disposition, mais ont uniquement fait valoir qu'elles étaient directement et individuellement concernées par la décision attaquée au sens de l'article 263, quatrième alinéa, deuxième membre de phrase, TFUE.
107 Au cours de l'audience, les requérantes ont soutenu que la recevabilité des recours ne devait pas être examinée au regard de l'article 263, quatrième alinéa, troisième membre de phrase, TFUE, ni de la nature des mesures nationales en cause. Selon les requérantes, dans l'hypothèse où cette nature devrait néanmoins être examinée au regard de l'article 263, quatrième alinéa, troisième membre de phrase, TFUE, la décision attaquée porterait sur une série d'aides d'État individuelles accordées aux opérateurs de réseau de TNT, qui constitueraient probablement, de ce fait, un régime d'aides.
108 En réponse à des questions écrites du Tribunal, la Commission et la République tchèque ont fait valoir que les recours ne sont pas recevables au regard de l'article 263, quatrième alinéa, troisième membre de phrase, TFUE.
109 Il convient de rappeler que le critère qui subordonne la recevabilité d'un recours introduit par une personne physique ou morale contre une décision dont elle n'est pas le destinataire aux conditions de recevabilité fixées à l'article 263, quatrième alinéa, TFUE constitue une fin de non-recevoir d'ordre public qu'il appartient aux juridictions de l'Union d'examiner à tout moment, même d'office (voir arrêt du 27 février 2014, Stichting Woonpunt e.a./Commission, C‑132/12 P, EU:C:2014:100, point 45 et jurisprudence citée).
110 Dans ces conditions, le Tribunal examinera si les recours sont recevables au titre de l'article 263, quatrième alinéa, troisième membre de phrase, TFUE.
111 Le Tribunal estime opportun de commencer par analyser si la décision attaquée constitue un « acte réglementaire » au sens de l'article 263, quatrième alinéa, troisième membre de phrase, TFUE.
112 Il y a lieu de rappeler que la notion d'« acte réglementaire », au sens de l'article 263, quatrième alinéa, troisième membre de phrase, TFUE, couvre tous les actes non législatifs de portée générale (arrêt du 6 novembre 2018, Scuola Elementare Maria Montessori/Commission, Commission/Scuola Elementare Maria Montessori et Commission/Ferracci, C‑622/16 P à C‑624/16 P, EU:C:2018:873, point 28).
113 Selon une jurisprudence constante, un acte a une portée générale s'il s'applique à des situations déterminées objectivement et s'il produit des effets juridiques à l'égard de catégories de personnes envisagées de manière générale et abstraite (voir arrêt du 6 novembre 2018, Scuola Elementare Maria Montessori/Commission, Commission/Scuola Elementare Maria Montessori et Commission/Ferracci, C‑622/16 P à C‑624/16 P, EU:C:2018:873, point 29 et jurisprudence citée).
114 L'article 1er, sous d), du règlement 2015/1589 définit la notion de « régime d'aides » comme couvrant, dans le cadre d'une première hypothèse définie dans le premier membre de phrase, « toute disposition sur la base de laquelle, sans qu'il soit besoin de mesures d'application supplémentaires, des aides peuvent être octroyées individuellement à des entreprises, définies d'une manière générale et abstraite dans ladite disposition ».
115 La Cour a itérativement jugé, dans le domaine des aides d'État, que les décisions de la Commission qui ont pour objet d'autoriser ou d'interdire un régime national revêtent une portée générale. Cette portée générale résulte du fait que de telles décisions s'appliquent à des situations déterminées objectivement et comportent des effets juridiques à l'égard d'une catégorie de personnes envisagées de manière générale et abstraite (voir arrêt du 6 novembre 2018, Scuola Elementare Maria Montessori/Commission, Commission/Scuola Elementare Maria Montessori et Commission/Ferracci, C‑622/16 P à C‑624/16 P, EU:C:2018:873, point 31 et jurisprudence citée).
116 À la lumière de cette jurisprudence, il y a lieu d'examiner si la décision attaquée porte sur un régime d'aides au sens de la première hypothèse visée par l'article 1er, sous d), premier membre de phrase, du règlement 2015/1589.
117 La qualification d'une mesure étatique en tant que régime d'aides au sens de l'article 1er, sous d), premier membre de phrase, du règlement 2015/1589 présuppose la réunion de trois conditions cumulatives. Premièrement, des aides peuvent être octroyées individuellement à des entreprises sur le fondement d'une disposition. Deuxièmement, aucune mesure d'application supplémentaire n'est requise pour l'octroi de ces aides. Troisièmement, les entreprises auxquelles les aides individuelles peuvent être octroyées doivent être définies « de manière générale et abstraite » (voir, en ce sens, arrêt du 16 septembre 2021, Commission/Belgique et Magnetrol International, C‑337/19 P, EU:C:2021:741, points 58 à 60).
118 Ainsi que la Cour l'a reconnu, la question de savoir si des « mesures d'application supplémentaires » sont nécessaires à l'octroi d'aides individuelles au titre d'un régime d'aides est intrinsèquement liée à celle de la détermination de la « disposition », au sens de l'article 1er, sous d), du règlement 2015/1589, sur laquelle ce régime se fonde. En effet, c'est au regard de cette disposition qu'il convient de déterminer si l'octroi d'aides individuelles est conditionné à l'adoption de telles mesures ou si, au contraire, cet octroi peut se faire sur la seule base de ladite disposition (voir, en ce sens, arrêt du 16 septembre 2021, Commission/Belgique et Magnetrol International, C‑337/19 P, EU:C:2021:741, point 106).
119 Le Tribunal examinera d'abord si la deuxième condition prévue par l'article 1er, sous d), du règlement 2015/1589, à savoir celle tenant à l'absence de « mesures d'application supplémentaires » nécessaires à l'octroi des aides individuelles sur le fondement de la disposition en cause, est remplie en l'espèce.
120 À cet égard, il convient de rappeler que le critère relatif au « besoin de mesures d'application supplémentaires » implique que l'octroi individuel des aides ne peut se faire que par l'intermédiaire d'autres mesures « supplémentaires », qui viennent s'ajouter aux dispositions instituant l'aide en cause, en les complétant ou en les précisant [arrêt du 19 mai 2021, Ryanair/Commission (Espagne ; Covid‑19), T‑628/20, EU:T:2021:285, point 86].
121 De même, l'existence de mesures d'application supplémentaires implique l'exercice d'un pouvoir d'appréciation par l'autorité adoptant les mesures en cause, lui permettant d'influer sur le montant de l'aide, les caractéristiques de celle-ci ou les conditions dans lesquelles cette aide est octroyée. En revanche, la simple application technique des actes prévoyant l'octroi des aides concernées ne constitue pas une « mesure d'application supplémentaire », au sens de l'article 1er, sous d), du règlement 2015/1589 (voir, en ce sens, arrêt du 16 septembre 2021, Commission/Belgique et Magnetrol International, C‑337/19 P, EU:C:2021:741, point 105).
122 En l'espèce, la Commission a considéré dans la décision attaquée que l'article II, paragraphe 5, de l'amendement no 252/2017 constituait la base juridique de la prorogation des licences TNT. Ainsi qu'il est expliqué au paragraphe 11 de la décision attaquée, cette disposition prévoyait la possibilité pour les détenteurs des licences TNT de modifier les droits conférés par ces dernières en ce qui concerne, d'une part, les aspects techniques de la radiodiffusion dans la norme DVB‑T2 et, d'autre part, la prolongation de la validité des licences jusqu'au 31 décembre 2030.
123 L'article II, paragraphe 5, de l'amendement no 252/2017 est libellé comme suit :
« Afin d'assurer la transition vers la norme DVB‑T2, les titulaires d'attributions de radiofréquences pour la [TNT] à l'échelle nationale peuvent demander une modification dans l'attribution des radiofréquences pour la transmission de la radiodiffusion [de la TNT] à l'échelle nationale. À leur demande, l'[autorité de régulation] procède à la modification des attributions existantes des radiofréquences dans la norme DVB‑T, permettant d'exploiter dans la norme DVB‑T2 les réseaux à l'échelle nationale désignés, conformément au plan technique de transition, en fixant les dates de début de l'utilisation des radiofréquences désignées à la diffusion finale dans la norme DVB‑T2 sur les mêmes sites de diffusion et avec les paramètres techniques qui garantissent autant que possible la même amplitude de couverture et l'impact le plus faible possible sur les téléspectateurs, et en prévoyant l'extension de la durée de validité jusqu'au 31 décembre 2030 des attributions des radiofréquences ainsi modifiées. Dans de tels cas, l'[autorité de régulation] procède par analogie aux cas visés par l'article 22 bis de la loi no 127/2005, dans sa version en vigueur à la date d'entrée en vigueur de la présente loi. Les titulaires d'attributions de radiofréquences demandent leur modification en application de la première phrase dans un délai de [six] mois à compter de l'entrée en vigueur du plan technique de transition. »
124 Ainsi que la Commission et la République tchèque l'ont fait observer au cours de l'audience, il ressort, en substance, de l'article II, paragraphe 5, de l'amendement no 252/2017, d'une part, que la prorogation des licences TNT jusqu'au 31 décembre 2030 était nécessairement liée à la modernisation des réseaux de TNT de leurs détenteurs, en passant de la norme DVB‑T à la norme DVB‑T2, et à la modification des licences TNT en ce sens. Cette modernisation devait être effectuée conformément au plan technique de transition mentionné au point 13 ci-dessus, en garantissant autant que possible la même amplitude de couverture et l'impact le plus faible possible sur les téléspectateurs.
125 D'autre part, conformément à l'article II, paragraphe 5, de l'amendement no 252/2017, les détenteurs des licences TNT pouvaient demander à l'autorité de régulation la modification de leurs licences sur le fondement de l'article 22 bis de la loi no 127/2005, applicable par analogie. La demande devait être présentée, au plus tard, six mois à compter de l'entrée en vigueur du plan technique de transition mentionné au point 13 ci-dessus.
126 L'article 22 bis, paragraphe 1, de la loi no 127/2005 dispose que des modifications peuvent être apportées aux attributions de radiofréquences par le président du conseil de l'autorité de régulation à la demande des titulaires des attributions concernées, après consultation publique préalable du marché, organisée conformément à l'article 130 de la loi no 127/2005.
127 Ainsi qu'il ressort, en substance, de l'article 22 bis, paragraphe 3, de la loi no 127/2005, dans le cadre de son examen des modifications envisagées à la suite d'une demande introduite sur le fondement du paragraphe 1 de cette disposition, le président du conseil de l'autorité de régulation doit s'assurer du respect des conditions et des obligations imposées lors de l'octroi initial de l'attribution de radiofréquences en cause. En particulier, le président du conseil de l'autorité de régulation doit prendre en considération les engagements pris par l'attributaire, le type de services pour lesquels les droits avaient été attribués, la nécessité d'assurer une concurrence effective et le respect de la condition tenant à l'usage effectif de la fréquence. Enfin, il est précisé que le changement de l'attribution interviendra seulement s'il est essentiel pour assurer les objectifs d'harmonisation établis par l'Union et dans le cadre de traités internationaux auxquels la République tchèque a adhéré.
128 À la lecture des dispositions de droit national applicables, il y a lieu de constater que la prorogation des licences TNT ne pouvait être accordée par le président du conseil de l'autorité de régulation qu'au cas par cas dans le cadre de décisions individuelles, dans le respect des critères prévus par l'article 22 bis de la loi no 127/2005 et par l'article II, paragraphe 5, de l'amendement no 252/2017 qui impliquaient l'exercice d'un pouvoir d'appréciation qui dépassait la simple application technique des dispositions concernées.
129 En particulier, l'autorité de régulation devait organiser une consultation publique au sujet des demandes de modification des licences TNT présentées par leurs détenteurs et le président du conseil de cette autorité devait évaluer ces demandes en s'assurant, notamment, de l'existence d'une concurrence effective ainsi que du respect des conditions tenant, d'une part, à l'usage effectif des fréquences attribuées dans le cadre de la transition de la norme DVB‑T à la norme DVB‑T2 et, d'autre part, à la limitation de l'impact d'une telle transition sur les téléspectateurs. Sans cette transition, la prorogation des licences TNT ne pouvait pas avoir lieu.
130 Sur la base de cette évaluation, le président du conseil de l'autorité de régulation a adopté les décisions individuelles de modification des licences TNT, mentionnées au paragraphe 13 de la décision attaquée.
131 Il en résulte que la prorogation des licences TNT était conditionnée à l'adoption de « mesures d'application supplémentaires » au sens de l'article 1er, sous d), du règlement 2015/1589.
132 Dès lors, il y a lieu de considérer que la disposition nationale identifiée dans la décision attaquée comme étant la base juridique de la prorogation des licences TNT n'instaure pas un régime d'aides au sens de l'article 1er, sous d), du règlement 2015/1589, sans qu'il soit besoin de déterminer si ladite disposition remplit la troisième condition rappelée au point 117 ci-dessus, tenant à la définition des bénéficiaires de « manière générale et abstraite ».
133 Au vu des considérations qui précèdent, il y a lieu de constater que la décision attaquée ne constitue pas un acte de portée générale et que, dès lors, elle ne relève pas de la catégorie des « actes réglementaires » au sens de l'article 263, quatrième alinéa, troisième membre de phrase, TFUE.
134 Il y a donc lieu de conclure que les recours ne sont pas recevables au titre de l'article 263, quatrième alinéa, troisième membre de phrase, TFUE, sans qu'il soit besoin d'examiner les critères de l'affectation directe et de l'existence de mesures d'exécution.
135 Il résulte de tout ce qui précède que les recours doivent être rejetés dans leur ensemble comme irrecevables.
Sur les dépens
136 Aux termes de l'article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s'il est conclu en ce sens. Les requérantes ayant succombé, il convient de les condamner à supporter leurs propres dépens ainsi que ceux de la Commission, conformément aux conclusions de cette dernière.
137 La République tchèque supportera ses propres dépens, en application de l'article 138, paragraphe 1, du règlement de procédure.
Par ces motifs,
LE TRIBUNAL (neuvième chambre)
déclare et arrête :
1) Les recours sont rejetés comme irrecevables.
2) Telly s. r. o. supportera, outre ses propres dépens, ceux exposés par la Commission européenne dans l'affaire T‑362/21.
3) Česká asociace satelitních operátorů z. s. supportera, outre ses propres dépens, ceux exposés par la Commission dans l'affaire T‑363/21.
4) La République tchèque supportera ses propres dépens.