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CA Toulouse, 2e ch., 13 mai 2025, n° 23/01576

TOULOUSE

Arrêt

Autre

CA Toulouse n° 23/01576

13 mai 2025

13/05/2025

ARRÊT N°25/187

N° RG 23/01576 - N° Portalis DBVI-V-B7H-PNGP

IMM CG

Décision déférée du 13 Mars 2023

Tribunal de Commerce de CASTRES

( 2020000564)

M. MARCOU

SCP [P] BRU

C/

S.A. BPIFRANCE

Société CABROL CONSTRUCTION METALLIQUE

CONFIRMATION

Grosse délivrée

le

à Me SOREL

Me BENOIT-DAIEF

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

2ème chambre

***

ARRÊT DU TREIZE MAI DEUX MILLE VINGT CINQ

***

APPELANTE

SCP [P] BRU prise en la personne de Me [G] [P] en qualité de mandataire liquidateur à la liquidation judiciaire de la SA CABROL CONSTRUCTION METALLIQUE en application d'une ordonnance du 4 mai 2018

[Adresse 8]

[Adresse 8]

[Localité 6]

Représentée par Me Philippe PERES de la SCP ALRAN PERES RENIER, avocat plaidant au barreau de CASTRES

Représentée par Me Gilles SOREL, avocat postulant au barreau de TOULOUSE

INTIMEES

S.A. BPIFRANCE anciennement dénommée Bpifrance Financement agissant poursuites et diligences de son Président Général en exercice domicilié en cette qualité audit siège, agissant tant en son nom personnel qu'au nom et pour le compte des sociétés :

- HSBC France, SA ayant son siège social [Adresse 1], RCS Paris N°775 670 284,

- BTP BANQUE, SA ayant son siège social [Adresse 5], RCS Paris N°339 182 784,

- BANQUE POPULAIRE OCCITANE, SA coopérative de Banque Populaire à capital variable, ayant sont siège social [Adresse 4], RCS Toulouse N° 560 801 300

[Adresse 3]

[Localité 7]

Représentée par Me Ophélie BENOIT-DAIEF de la SELARL SELARL LX PAU-TOULOUSE, avocat postulant au barreau de TOULOUSE

Représentée par Me Sylvie EX-IGNOTIS de la SCP SCP FOUCHE-EX IGNOTIS, avocat plaidant au barreau de VAL-DE-MARNE

SA CABROL CONSTRUCTION METALLIQUE

Agissant en vertu de ses droits propres prise en la personne de ses dirigeants, Mr [Y] [O] et [N] [O] respectivement domiciliés :

[Adresse 9] et [Adresse 2]

Non représentée

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 805 et 907 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 13 Janvier 2025, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant I. MARTIN DE LA MOUTTE, conseillère, chargée du rapport et S. MOULAYES, conseillère. Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

V. SALMERON, présidente

I. MARTIN DE LA MOUTTE, conseillère

S. MOULAYES, conseillère

Greffier, lors des débats : A. CAVAN

ARRET :

- Défaut

- prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

- signé par V. SALMERON, présidente, et par A. CAVAN, greffier de chambre

Exposé des faits et procédure :

Par acte en date des 25 mars 2014 et 4 juillet 2014, la Société BPI France Financement aujourd'hui dénommée BPI France a consenti au profit de la Société Cabrol Construction métallique (la société Cabrol) le renouvellement d'un crédit de trésorerie dénommé Avance +en pool n°23410 avec le concours d'HSBC France, BTP Banque et BP Occitane d'un montant de 2.000.000 euros sur la période du 26 mars 2014 au 05 mars 2015.

Par acte en date du 13 mai 2013, la Société BPI France Financement a également procédé au profit de la Société Cabrol à l'ouverture d'un crédit de trésorerie « Avance plus emploi 2013 » n°95619 d'un montant de 74.000 Euros pour la période du 14 mai 2013 au 4 mars 2014 destiné au financement de la créance détenue sur le Trésor Public par celle-ci au titre du crédit d'impôts pour la Compétitivité et l'Emploi de l'année 2013.

Par acte du 24 Mars 2014, la Société Bpi France Financement a procédé au profit de la Société Cabrol à l'ouverture d'un crédit de trésorerie « Avance plus emploi 2014 » N° 113460 d'un montant de 108.000 Euros pour la période du 25 Mars 2014 au 20 février 2015 destiné au financement de la créance détenue sur le Trésor Public par celle-ci au titre du crédit d'impôts pour la Compétitivité et l'Emploi de l'année 2014.

Enfin, par acte du 25 Mars 2014, la Société BPI France Financement a procédé au profit de la Société Cabrol au renouvellement d'une ligne de garantie à première demande N° 64514 d'un montant de 3.000.000,00 Euros sur la période du 04 Mars 2014 au 05 Mars 2015.

Par jugement rendu en date du 30 janvier 2015, le tribunal de commerce de Castres a prononcé l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire à l'égard de la Société Cabrol en désignant Maître [R] [H] en qualité de mandataire judiciaire.

Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 27 Mars 2015, la Société BPI France a déclaré sa créance entre les mains de Maître [H], tant en son nom personnel qu'au nom et pour le compte des sociétés HSBC France, BTP Banque et BPO

- Au titre du crédit Avance plus emploi pour la somme de 636.084,95 Euros en joignant les pouvoirs des partenaires bancaires.

- Au titre du crédit Avance plus emploi 2013 pour la somme de 76.104,64 Euros

- Au titre du crédit Avance plus emploi 2014 pour la somme de 102.481,15 Euros.

- Au titre des engagements de garantie à première demande pour la somme de 2.677.401,46 euros

Soit au total pour la somme de 3.492.072,20 Euros dont 3.392.072,20 euros à titre chirographaire et 100.000 euros à titre gagiste.

Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 23 octobre 2015, Maître [H] ès qualités a contesté la créance de la Société BPI France au motif que 'aucune somme ne serait due, les soldes semblent être créditeurs à notre profit'.

Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 04 novembre 2015, la Société BPI France a soutenu qu'en vertu de l'article L622-25 du code de commerce et de la jurisprudence applicable, la créance à déclarer et à admettre devait être celle existant au jour du jugement d'ouverture de la procédure collective.

Selon huit ordonnances du 13 janvier 2020, le juge commissaire s'est déclaré incompétent et a invité les parties à se pourvoir devant le juge du fond au motif qu'il n'avait pas compétence pour interpréter les contrats ni pour faire les comptes entre les parties.

Par exploit en date du 12 février 2020, la société BPI France Financement a saisi le Tribunal de commerce.

Par jugement du 13 mars 2023, le tribunal de commerce a :

- débouté Maître [P] de l'ensemble de ses demandes.

- fixé les créances de la SA BPI France au 30 janvier 2015, date du jugement d'ouverture de la procédure collective de la SA Cabrol au passif de sa liquidation judiciaire:

- à la somme de 636 084.95 ', outre intérêts au taux Euribor 1 mois moyenne à 1.60 %, l'an à titre privilégié gagiste pour le crédit «Avance plus en pool »

- à la somme de 76 104.64 ' outre intérêts au taux Euribor 1 mois moyenne 1, 60 % l'an à titre privilégié gagiste pour le crédit «Avance plus emploi»

- à la somme de 102 481', outre intérêts au taux Euribor 1 mois moyenne à 1, 60 % l'an à titre privilégié gagiste pour le crédit «Avance plus emploi»

- à la somme de 2 677 401.60 ' à titre de privilégié gagiste au titre de la ligne de garantie à première demande.

- condamné maître [P] ès qualités à une indemnité de 3 000 ' en application de l'article 700 outre les dépens.

Par déclaration en date du 28 avril 2023, la SCP [P] Bru a relevé appel de ce jugement en intimant la BPI France Financement.

La clôture est intervenue le 11 mars 2024

Prétentions et moyens des parties :

Vu les conclusions notifiées le 2 janvier 2023 auxquelles il est fait expressément référence pour l'énoncé du détail de l'argumentation, de la SCP [P] Bru en sa qualité de mandataire judiciaire de la SA Cabrol Construction Métallique demandant de :

Infirmer le jugement du tribunal de commerce de Castres du 13 mars 2023.

- Déclarer irrecevable la demande d'admission de la somme de 100 000 ' à titre privilégié gagiste pour chacune des créances déclarées par la société BPI France en application de l'article 564 du Code de procédure civile.

Avant dire droit,

- Enjoindre la SA BPI France de faire communication des pièces suivantes :

- Le grand livre pour chaque marché cédé faisant notamment apparaître : ' le montant global du marché à sa signature

' le détail des situations cédées

' les sommes mobilisées par l'organisme de crédit

' le détail des situations payées par le maître de l'ouvrage et ce, pour chaque marché en cours au jour du jugement déclaratif.

Les procès-verbaux de réception des marchés pour lesquels la SA BPI France a cautionné la retenue de garantie en faisant la distinction :

' des marchés sur lesquels il a été donné mainlevée par le maître de l'ouvrage

' des marchés sur lesquels cette mainlevée n'a pas encore été effectuée

A défaut de satisfaire à cette injonction, rejeter les déclarations de créances de la SA BPI France relatives à la ligne de crédit Avance plus en pool et garantie à première demande

A titre infiniment subsidiaire,

- Dire et juger que la créance de BPI France ne peut être admise qu'à titre chirographaire pour la somme de 3 392 072.20 ' et gagiste pour 100 000'.

- Condamner la SA BPI France à une indemnité de 3 000 ' en application de l'article 700 du CPC.

- La condamner aux entiers dépens.

Vu les conclusions notifiées le 15 février 2024 auxquelles il est fait expressément référence pour l'énoncé du détail de l'argumentation de la BPI France demandant au visa des articles R 624-5 du code de commerce, et L 622-25 et L 628 du code de commerce, de :

- Confirmer le jugement rendu en toutes ses dispositions.

- Fixer la créance de la Société Bpifrance au passif de la liquidation judiciaire de la Société Cabrol à la date du 30 janvier 2015, date du jugement d'ouverture de la procédure de redressement judiciaire pour les sommes déclarées à savoir :

- Au titre du crédit Avance + en pool n°23410 à la somme échue de 636 084,95 euros outre les intérêts au taux Euribor 1 mois moyenne + 1,60% garantie par un gage espèces de 100.000 euros donc 536.084,95 euros à titre chirographaire et 100.000 euros à titre privilégié gagiste.

- Au titre du crédit Avance + emploi 2013 n°95619 à la somme échue de 76 104,64 euros outre les intérêts au taux Euribor 1 mois moyenne + 1,60% garantie par un gage espèces de 100.000 euros donc 76 104,64 euros à titre privilégié gagiste.

- Au titre du crédit Avance + emploi 2014 n°113460 à la somme échue de 102 481,15 euros outre les intérêts au taux Euribor 1 mois moyenne + 1,60% garantie par un gage espèces de 100.000 euros donc 2.481,15 euros à titre chirographaire et 100.000 euros à titre privilégié gagiste.

- Au titre de la ligne de garantie première demande n°64514 à la somme à échoir de 2 677 401,46 euros garantie par un gage espèces de 100.000 euros donc 2 577 401,46 euros à titre chirographaire et 100.000 euros à titre privilégié gagiste.

- Condamner la SCP [P] Bru, mandataire judiciaire, en sa qualité de liquidateur de la société Cabrol à payer à la société Bpifrance Financement la somme de 3.000 Euros sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

Par arrêt avant dire droit du 23 juillet 2024, la cour a :

- Ordonné la réouverture des débats,

- Invité les parties à conclure sur la recevabilité de l'appel eu égard au lien d'indivisibilité unissant les parties à l'instance relative à l'admission des créances et à l'absence du débiteur qui n'a pas été intimé,

- le cas échéant, invité le mandataire à régulariser par une nouvelle déclaration d'appel ;

- Réservé les dépens.

Par déclarations en date du 24 juillet 2024 et du 25 juillet 2024, la SCP [P] Bru prise en sa qualité de liquidateur de la société Cabrol Construction Métallique a relevé appel du jugement du tribunal de commerce de Castres du 13 mars 2023 en intimant la BPI et la société Cabrol Constructions Metalliques. Ces deux procédures ont été jointes sous le N° RG 24/2559.

Vu les conclusions notifiées le 8 novembre 2024 auxquelles il est fait expressément référence pour l'énoncé du détail de l'argumentation de la société BPI France demandant à la cour de :

- Ordonner la jonction de la procédure RG 24/02559 avec la procédure RG 23/01576,

Sur le fond,

- Débouter La SCP [P]-Bru, représentée par Maître [G] [P], mandataire judiciaire pris en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société Cabrol Constructions Métalliques de toutes ses demandes

- Confirmer le jugement rendu en toutes ses dispositions.

- Fixer la créance de la Société Bpifrance au passif de la liquidation judiciaire de la Société Cabrol Consruction Metallique à la date du 30 janvier 2015, date du jugement d'ouverture de la procédure de redressement judiciaire pour les sommes déclarées à savoir :

- Au titre du crédit Avance plus en pool n°23410 à la somme échue de 636 084,95 euros outre les intérêts au taux EURIBOR 1 mois moyenne + 1,60% garantie par un gage espèces de 100.000 euros donc 536.084,95 euros à titre chirographaire et 100.000 euros à

titre privilégié gagiste.

- Au titre du crédit Avance plus emploi 2013 n°95619 à la somme échue de 76 104,64 euros outre les intérêts au taux euribor 1 mois moyenne + 1,60% garantie par un gage espèces de 100.000 euros donc 76 104,64 euros à titre privilégié gagiste.

- Au titre du crédit Avance + emploi 2014 n°113460 à la somme échue de 102 481,15 euros outre les intérêts au taux euribor 1 mois moyenne + 1,60% garantie par un gage espèces de 100.000 euros donc 2.481,15 euros à titre chirographaire et 100.000 euros à titre privilégié gagiste.

- Au titre de la ligne de garantie première demande n°64514 à la somme à échoir de 2 677 401,46 euros garantie par un gage espèces de 100.000 euros donc 2 577 401,46 euros à titre chirographaire et 100.000 euros à titre privilégié gagiste.

- Condamner la SCP [P]-Bru en sa qualité de liquidateur de la société Cabrol Constructions Metalliques à payer à la société Bpifrance Financement la somme de 3.000 Euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

- Condamner la même aux entiers dépens.

La société Cabrol Construction Métallique à laquelle la déclaration d'appel a été dénoncée par acte signifié à l'étude, n'a pas constitué avocat.

Motifs

Pour satisfaire à l'invitation de la cour, la SCP [P] Bru en sa qualité de liquidateur de la société Cabrol Construction a régularisé deux nouvelles déclarations d'appel, procédures qui ont été jointes sous le n° 24/2559, en intimant la BPI France et la société Cabrol Construction.

Il y a lieu d'ordonner la jonction des procédures enregistées sous les n°23/1576 et 24/2559.

Le créancier et le débiteur étant désormais dans la cause, l'appel formé par le liquidateur est donc recevable.

La société BPI a déclaré 4 créances entre les mains du mandataire judiciaire de la société Cabrol Construction et sollicité leur admission par le juge commissaire, lequel, estimant que les contestations relatives à l'interprétation des contrats et aux comptes à réaliser entre les parties excédaient ses pouvoirs a invité les parties à mieux se pourvoir devant le juge du fond.

La société BPI a satisfait à cette obligation et sollicite la fixation de ses créances au passif de la société Cabrol pour les sommes déclarées, ainsi que leur qualification de créance privilégiée à concurrence de 100 000 '.

Elle fait valoir que les contrats Avance plus, Avance plus CICE et Avance plus en pool sont des contrats de crédit, en exécution desquels des fonds ont été mis à disposition de la société Cabrol Construction qui supporte l'obligation de les rembourser.

Elle ajoute que les cessions de créance n'ont été consenties par la société Cabrol France qu'à titre de garantie des sommes dues au titre de ces prêts.

Elle estime que sa créance ayant vocation à être admise par le juge commissaire pour son montant au jour de l'ouverture de la procédure collective, c'est à cette même date qu'elle doit être fixée dans le cadre de la présente instance.

Enfin, elle soutient que le gage dont elle bénéficie à concurrence de 100 000 ' garantit l'ensemble des lignes de crédit souscrites.

Le liquidateur de la société Cabrol soutient pour sa part que la créance de la société BPI au titre des lignes de crédit n'est pas justifiée par les pièces produites puisque, au titre du contrat Avance + en pool, ces avances sont subordonnées à la cession effective des marchés et que, en l'espèce, rien ne permet de déterminer le montant des paiements perçus par la banque au titre des marchés cédés.

Il estime que, s'agissant de la créance au titre de la garantie à première demande pour la somme de 2 677401, 46 ', il appartient à la banque de démontrer marché par marché, l'existence de réserves à réception de nature à justifier la garantie de la BPI.

Enfin, il soutient que c'est à tort que le tribunal de commerce a retenu l'intégralité de la créance 'à titre privilégié gagiste ' puisque la BPI a déclaré sa créance à titre gagiste pour 100 000 ' et à titre chirographaire pour le surplus.

La cour est saisie sur l'appel de la décision du tribunal de commerce afin de trancher les contestations excédant les pouvoirs du juge commissaire et de permettre en conséquence à ce dernier de statuer sur l'admission de la créance déclarée par la société BPI.

Pour se déclarer incompétent et inviter les parties à 'mieux se pourvoir devant les juges du fond', le juge commissaire a retenu qu'il n'avait pas compétence pour interpréter les contrats et 'faire les comptes entre les parties. '

S'agissant de la créance de la banque résultant de la garantie à première demande, après avoir constaté que le liquidateur soutenait qu'il appartient à la banque de produire les procès-verbaux de réception alors que la BPI faisait valoir qu'il appartient à la société Cabrol de surveiller ses comptes ainsi que les situations de ses travaux, il a estimé que cette contestation devait être jugée sérieuse.

En application de l'article L 624-2 du code de commerce, et sauf constat de l'existence d'une instance en cours, le juge-commissaire a une compétence exclusive pour décider de l'admission ou du rejet des créances déclarées.

Lorsqu'il se déclare incompétent pour trancher une contestation et invite les parties à saisir le juge compétent, les pouvoirs de ce dernier, et, à sa suite, ceux de la cour saisie par la voie de l'appel, se limitent à l'examen de cette contestation(Com, 8 mars 2023, n°21-18.737).

En l'espèce, le juge commissaire, par une décision qui n'a pas été contestée, s'est déclaré incompétent pour interpréter les contrats mais aussi pour ' faire les comptes entre les parties', et déterminer qui supporte la charge du montant de la créance, si bien qu'il appartient à la cour dans le cadre de la présente instance de déterminer créance par créance, le montant des sommes dues.

Pour ce faire, il lui appartient d'apprécier les créances déclarées pour leur montant au jour du jugement d'ouverture, sans prendre en compte les événements postérieurs susceptibles d'influer sur la somme qui sera ultérieurement distribuée par le liquidateur (Com, 5 juillet 2023, n°22-10.104)

En revanche, le juge commissaire n'a pas retenu de contestation sérieuse relative au caractère privilégié ou chirographaire de ces créances. Dès lors, il n'entrait pas dans les pouvoirs du tribunal de statuer sur ce point et, dans le cadre de l'instance d'appel, la demande de la société BPI tendant à ce qu'il soit statué sur ce point, excède les pouvoirs juridictionnels de la cour. Il appartiendra au juge commissaire, seul compétent pour admettre la créance, et qui n'a pas retenu de contestation sérieuse sur ce point, de dire si la créance est privilégiée ou non, et le cas échéant dans quelle proportion.

- Sur les sommes dues au titre de l'avance en pool n°23410

La BPI a déclaré à ce titre la somme de 636 084, 95 ' outre les intérêts au taux conventionnel.

Elle justifie par la production de la convention du 25 mars 2014 et 4 juillet 2014 avoir consenti à la société Cabrol le renouvellement d'un crédit de trésorerie Avance plus en pool avec le concours de HSBC, BTP Banque et BP Occitanie.

En application des dispositions de l'article 7 de cette convention, le remboursement des sommes dues est garanti, notamment, par les créances cédées par la société débitrice au profit de la BPI.

La créance de la société BPI au jour de l'ouverture de la procédure collective résulte de la différence entre les fonds prêtés et le montant des intérêts contractuels d'une part et les sommes perçues au titre des créances cédées par la société empruntrice d'autre part.

La BPI en justifie par la production de relevés de compte détaillés faisant apparaître les avances consenties tant par elle même que par les banques BP Occitane Mazamet, BTP Banque, et HSBC France, mais aussi les sommes perçues antérieurement au jugement d'ouverture au titre des créances cédées par la société Cabrol.

C'est donc vainement que le liquidateur lui reproche de ne pas justifier des sommes perçues et la cour observe sur ce point que le liquidateur ne démontre pas que la banque a perçu antérieurement au jugement d'ouverture des sommes non comptabilisées dans son décompte.

Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a retenu que la BPI était créancière de la somme de 636 084, 95 ' outre les intérêts.

C'est en revanche à tort que le tribunal, excédant ses pouvoirs juridictionnels a dit cette créance à titre 'privilégié-gagiste' alors qu'il n'était pas investi du pouvoir de statuer sur le caractère privilégié ou non de la créance. Le jugement sera infirmé sur ce point.

- sur les sommes dues au titre de la convention Avance plus emploi 2013 n°95619

La BPI a déclaré à ce titre la somme de 76 104, 64 ' échue au 30 janvier 2015.

Elle justifie avoir en exécution de la convention « Avance plus emploi 2013 » N° 95619, consenti à la société Cabrol, à concurrence de 74.000 Euros une avance sur la créance détenue sur le Trésor Public au titre du crédit d'impôts pour la Compétitivité et l'Emploi (CICE) de l'année 2013.

Il résulte des relevés de compte versés aux débats que le 30 janvier 2015, date d'ouverture de la procédure collective, le CICE n'avait pas été remboursé à l'établissement de crédit.

Il convient en application des stipulations contractuelles et notamment de l'article 17 des conditions générales prévoyant le versement d'une indemnité forfaitaire, de retenir que la BPI était créancière au 30 janvier 2015 de la somme de 76 104, 64 ' outre les intérêts contractuels. Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a dit la BPI créancière de cette somme mais infirmé en ce qu'il a dit cette créance à titre 'privilégié-gagiste, le tribunal ayant excédé ses pouvoirs sur ce dernier point.

- sur les sommes dues au titre de la convention Avance plus emploi 2014 n°113460.

La BPI a déclaré à ce titre la somme de 102 481, 15 ' échue au 30 janvier 2015.

Elle justifie avoir en exécution de la convention « Avance plus emploi 2014» n° 113460, consenti à concurrence de 108 000 Euros une avance sur la créance détenue par la société Cabrol sur le Trésor Public au titre du CICE de l'année 2014.

Il résulte des relevés de compte versés aux débats que le 30 janvier 2015, date d'ouverture de la procédure collective, le CICE n'avait pas été remboursé à l'établissement de crédit.

Il convient en application des stipulations contractuelles et notamment de l'article 17 des conditions générales prévoyant le versement d'une indemnité forfaitaire, de retenir que la BPI était créancière au 30 janvier 2015 de la somme de 102 481, 15 ' outre les intérêts contractuels.

Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a dit la BPI créancière de cette somme mais infirmé en ce qu'il a dit cette créance à titre 'privilégié-gagiste', le tribunal ayant excédé ses pouvoirs sur ce dernier point.

- sur les sommes dues au titre de la ligne garantie à première demande

La BPI a déclaré à ce titre la somme de 2 677 401, 46 '. Certes, cette créance demeure éventuelle mais ce caractère éventuel ne dispense pas le créancier de son obligation à déclaration.

La BPI justifie de cette demande par la production de la convention du 25 mars 2014 dénommé ' garantie à première demande', ayant vocation, à concurrence de 3 millions d'euros à garantir une avance ou à remplacer la retenue de garantie mise à la charge du titulaire du marché pour couvrir les réserves à la réception des travaux ainsi que celles formulées le cas échéant pendant le délai de garantie.

Cette convention prévoit qu'il appartient à la société Cabrol de transmettre à la BPI, toute décision de réception ou d'admission des marchés garantis. La société Cabrol est donc mal fondée à reprocher à la banque de ne pas justifier des procès-verbaux de réception des travaux, qu'elle détient et qu'il lui appartenait de transmettre à la banque.

La BPI justifie enfin de la liste des engagements de garantie à première demande délivrés en exécution de cette convention, et des mainlevées intervenues avant la date d'ouverture de la procédure collective et démontre ainsi qu'à cette date sa créance au titre de cet engagement s'élevait à la somme de 3 392 072, 20 '.

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a dit la BPI créancière de cette somme mais infirmé en ce qu'il a dit cette créance à titre 'privilégié-gagiste', le tribunal ayant excédé ses pouvoirs sur ce dernier point.

Les dépens de la procédure d'appel sont à la charge de la procédure collective de la société Cabrol.

Les circonstances de l'espèce ne justifient pas qu'une indemnité soit allouée à la BPI en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Par ces motifs

Confirme le jugement sauf en ce qu'il a fixé les créances de la BPI au passif de la procédure collective de la société Cabrol Construction métallique à titre privilégié-gagiste,

Statuant à nouveau du chef infirmé et y ajoutant,

Dit que la demande de la BPI tendant à voir qualifier chacune de ses créances de privilégiée à concurrence de 100 000 ' excède les pouvoirs de la cour,

Déboute le liquidateur de ses demandes de communication de pièces sous astreinte.

Dit que les dépens d'appel sont à la charge de la procédure collective de la société Cabrol Construction Metallique.

Déboute la BPI de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La greffière, La présidente,

.

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