CA Poitiers, 1re ch., 13 mai 2025, n° 23/01566
POITIERS
Arrêt
Infirmation
PARTIES
Demandeur :
Human Immobilier (SAS)
Défendeur :
P, J, F
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Monge
Conseillers :
M. Orsini, M. Maury
Avocats :
Me Le Lain, Me Olivier, Me Huberdeau, Me Michot, Me Moliniere
PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Par acte du 11 février 2004, [Y] [F], a acquis une maison d'habitation située [Adresse 6] à [Localité 1] (Charente-Maritime). Ce bien, édifié en 1968, était à usage de résidence secondaire.
Par acte du 30 avril 2019, elle a donné mandat de vente de ce bien à deux agences immobilières, dont l'agence Bourse de l'Immobilier (désormais dénommée Human Immobilier) implantée à [Localité 1].
Elle a, par l'intermédiaire de cette agence, convenu de la vente de la maison aux époux [K] [P] et [E] [J]. Le compromis de vente est en date du 3 juillet 2019.
La vente a été réitérée par acte authentique du 10 octobre 2019. Il y a été stipulé une clause de non garantie des vices cachés.
L'assureur de protection juridique des acquéreurs qui lui avaient déclaré un sinistre en raison d'infiltrations en toiture, a missionné le cabinet Texa en qualité d'expert.
Les acquéreurs ont fait assigner l'agence immobilière devant le juge des référés du tribunal judiciaire de La Rochelle afin que soit ordonnée une mesure d'expertise. L'agence a appelé en cause [Y] [F]. Par ordonnance du 3 novembre 2020, [Z] [A] a été commis en qualité d'expert. Le rapport d'expertise est en date du 5 avril 2021.
Par acte du 16 juillet 2021, les époux [K] [P] et [E] [J]ont assigné la société Bourse de l'Immobilier et [Y] [F] devant le tribunal judiciaire de La Rochelle.
Ils ont demandé à titre principal de les condamner in solidum au paiement des sommes de :
- 15.275 ' correspondant au coût des travaux de remise en état de la couverture ;
- 648,73 ' correspondant au coût des travaux de reprise des embellissements intérieurs ;
- 5.000 ' à titre de dommages et intérêts.
Ils ont soutenu que la venderesse connaissait le mauvais état de la toiture qu'elle n'avait pas signalé et que l'agence avait commis une faute en ayant présenté le bien entièrement rénové, ne nécessitant pas de travaux et en n'ayant pas procédé à la vérification de ces allégations.
La venderesse a conclu au rejet de ces demandes aux motifs que les acquéreurs n'ignoraient pas que la toiture n'avait pas été refaite, qu'une infiltration s'était produite en 2018 et que des tuiles avaient été changées.
L'agence immobilière a de même conclu au rejet de ces demandes, les acquéreurs ayant été informés de l'état de la toiture.
Par jugement du 21 mars 2023, le tribunal judiciaire de La Rochelle a statué en ces termes :
'DÉCLARE Madame [F] tenue de garantir les vices cachés dont sont victimes M. [K] [P] et Madame [E] [J] épouse [P],
DIT que la Sas Human Immobilier -anciennement Bourse de l'immobilier -a manqué à ses obligations,
CONDAMNE en conséquence in solidum la Sas Human Immobilier et Madame [F] à verser à M. [K] [P] et Madame [E] [J] épouse [P] la somme de 15 800 ' (quinze mille huit cents euros) en réparation des préjudices, toutes causes confondues,
ORDONNE un partage de responsabilité entre la Sas Human Immobilier et Madame [F] à hauteur de 50 %,
CONDAMNE la Sas Human Immobilier à relever indemne Madame [F] des condamnations prononcées à son encontre en principal, intérêts, article 700 et dépens à hauteur de ce partage,
DÉBOUTE les parties de leurs plus amples demandes,
CONDAMNE in solidum la Sas Human Immobilier et Madame [F] à verser à M. [K] [P] et Madame [E] [J] épouse [P],la somme de 4000 ' (quatre mille euros) au titre des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile,
CONDAMNE in solidum la Sas Human Immobilier et Madame [F] aux dépens incluant les frais d'expertise judiciaire et les dépens de l'instance en référé,
RAPPELLE que l'exécution provisoire est de droit'.
Il a considéré que :
- la venderesse, qui connaissait l'état de la toiture qui n'était pas visible de l'extérieur, était tenue de garantir ce vice caché ;
- l'agence immobilière, en n'ayant pas préalablement vérifié les allégations de l'annonce qu'elle avait rédigée, avait commis une faute engageant sa responsabilité délictuelle à l'encontre de la venderesse, qu'elle devait dès lors garantir.
Par déclaration reçue au greffe le 3 juillet 2023, la société Human Immobilier (anciennement Bourse de l'Immobilier) a interjeté appel de ce jugement.
Par conclusions notifiées par voie électronique le 21 mars 2024, elle a demandé de :
'VOIR DECLARER recevable et bien fondé en son appel la SAS HUMAN IMMOBILIER,
VOIR REFORMER le jugement rendu par le Tribunal judiciaire de LA ROCHELLE du 21 mars 2023 en ce qu'il a :
- DIT que la SAS HUMAN IMMOBILIER -anciennement BOURSE DE L''IMOBILIER- a manqué à ses obligations,
- CONDAMNE, en conséquence, in solidum la SAS HUMAN IMMOBILIER et Madame [F] à verser à M. [K] [P] et Madame [E] [P] la somme de 15 800 ' (quinze mille huit cents euros) en réparation despréjudices, toutes causes confondues ;
- ORDONNE un partage de responsabilité entre la SAS HUMAN IMMOBILIER et Madame [F] à hauteur de 50% ;
- CONDAMNE la SAS HUMAN IMMOBILIER à relever indemne Madame [F] des condamnations prononcées à son encontre en principal, intérêts, article 700 et dépens à hauteur de ce partage ;
- DEBOUTE la SAS HUMAN IMMOBILIER de l'ensemble de ses demandes ;
- CONDAMNE in solidum la SAS HUMAN IMMOBILIER et Madame [F] à verser à M. [K] [P] et Madame [E] [P] la somme de 4 000 ' (quatre mille euros) au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;
- CONDAMNE in solidum la SAS HUMAN IMMOBILIER et Madame [F] aux dépens incluant les frais d'expertise judiciaire et les dépens de l'instance de référé »
VOIR CONFIRMER le jugement rendu par le Tribunal judiciaire de LA ROCHELLE du 21mars 2023 en ce qu'il a déclaré Madame [F] tenue de garantir les vices cachés dont sont victimes M. [K] [P] et Madame [E] [J] épouse [P],
En conséquence et statuant à nouveau,
Vu les articles 1240 et 1992 du Code Civil,
Vu la jurisprudence citée,
VOIR DEBOUTER Monsieur [K] [P] et Madame [E] [P] de l'ensemble de leurs demandes présentées à l'encontre de la SAS HUMAN IMMOBILIER, VOIR DEBOUTER Madame [Y] [F] de l'ensemble de ses demandes présentées à l'encontre de la SAS HUMAN IMMOBILIER,
VOIR CONDAMNER in solidum Monsieur [K] [P] et Madame [E] [P], d'une part, et Madame [Y] [F], d'autre part, à verser à la SAS HUMAN IMMOBILIER la somme de 5 000 Euros sur le fondement de l'article 700 du CPC ainsi qu'aux dépens, en ce compris ceux de première instance avec distraction au profit de Maître Marion LE LAIN en application des dispositions de l'article 699 du Code de Procédure Civil'.
Elle a soutenu que sa responsabilité n'était pas engagée aux motifs que :
- le vice n'était pas apparent et ne lui était pas connu ;
- l'expert judiciaire n'avait retenu que la responsabilité de la venderesse ;
- celle-ci, qui lui avait déclaré que la toiture était en bon état, savait que des tuiles avaient dû être changées ;
- la conseillère de l'agence avait précisé aux futurs acquéreurs que la toiture n'avait pas été refaite depuis l'origine, qu'elle était dans un état convenable et que sa mandante n'avait pas mentionné la nécessité de travaux en toiture ;
- les acquéreurs n'avaient pas démontré que l'état de la toiture avait été déterminant de leur engagement ;
- le lien de causalité entre la faute imputée et le préjudice allégué n'était pas établi.
Elle a ajouté, sur le préjudice, que les époux [K] [P] et [E] [J] savaient avoir acquis une maison ancienne, dans l'état dans lequel elle se trouvait, et que des traces des infiltrations de 2018 demeuraient sur le plafond d'une chambre et sur une poutre.
Elle a conclu au rejet de la demande de garantie de [Y] [F], n'ayant pas délivré les informations auxquelles elle était tenue à son égard.
Par conclusions notifiées par voie électronique le 6 mars 2024, les époux [K] [P] et [E] [J] ont demandé de :
'Déclarer recevable mais mal fondé l'appel formé par la SAS HUMAN IMMOBILIER (anciennement dénommée BOURSE DE L'IMMOBILIER) à l'encontre du jugement rendu par le Tribunal Judiciaire de LA ROCHELLE le 21 Mars 2023.
Vu les dispositions des articles 1641 et suivants et Code Civil.
Vu les dispositions des articles 1231-1 et suivants du Code Civil.
Vu l'ordonnance de référé rendue par la Présidente du Tribunal Judiciaire de LA ROCHELLE le 3 Novembre 2020.
Vu le rapport déposé par l'expert judiciaire le 5 Avril 2021.
Vu les éléments du dossier.
En conséquence, et statuant à nouveau,
Confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le Tribunal Judiciaire de LA ROCHELLE le 23 Mars 2023,
Y ajoutant,
Condamner la SAS HUMAN IMMOBILIER (anciennement dénommée BOURSE DE L'IMMOBILIER) à verser aux époux [P] ' [J] pris comme une seule et mêmepartie, la somme complémentaire de 5.000 ' au titre des frais irrepétibles d'appel ainsi qu'à prendre en charge les entiers dépens d'appel'.
Ils ont maintenu que :
- la venderesse, qui avait connaissance du vice dont elle n'avait pas fait mention, devait sa garantie ;
- l'état de la toiture n'était pas visible lors de la vente ;
- l'agence immobilière, en ayant présenté le bien comme ayant été entièrement rénové et ne nécessitant pas de travaux, avait manqué à ses obligations en n'ayant pas vérifié son état.
Par conclusions notifiées par voie électronique le 10 octobre 2024, [Y] [F] a demandé de :
'Vu les pièces produites, Vu les dispositions des articles 1641 et suivants du Code Civil, les articles 1217 et suivants du Code Civil,
Rejetant toutes conclusions contraires comme injustes et mal fondées,
Faire droit à l'appel incident,
Infirmer le jugement en ce qu'il a déclaré Madame [F] tenue de garantir les vices cachés dont sont victimes Monsieur et Madame [P],
Statuant à nouveau,
Débouter Monsieur et Madame [P] de leur demande de garantie des vices cachés envers Madame [F],
Infirmer le jugement en ce qu'il a condamné in solidum la SAS Human Immobilier et madame [F] à verser à M et Mme [P] la somme de 15800 euros en réparation des préjudices toutes causes confondues,
Infirmer le jugement en ce qu'il a ordonné un partage de responsabilité entre la SAS Human Immobilier et Madame [F] à hauteur de 50%,
Infirmer le jugement en ce qu'il a condamné in solidum la SAS Human Immobilier et Madame [F] à verser à Monsieur et Madame [P] la somme de 4000 euros sur le fondement de l'article 700 du CPC ainsi qu'aux dépens de l'instance incluant les frais d'expertise et les dépens de l'instance de référé,
Statuant à nouveau,
Juger n'y avoir lieu à condamnation de Madame [F] à indemniser Monsieur et Madame [P] en réparation de leurs préjudices, ni à leur verser un article 700,
Juger n'y avoir lieu à partage de responsabilité avec Madame [F]
Juger n'y avoir lieu à condamnation de Madame [F] aux dépens incluant les frais d'expertise et les dépens de l'instance de référé,
Débouter Monsieur et Madame [P] et la SAS Bourse de l'Immobilier devenue Human Immobilier, de toutes leurs demandes à l'encontre de Madame [F],
Condamner Monsieur et Madame [P] à payer à Madame [F] la somme de 4000 euros sur le fondement de l'article 700 du CPC ainsi qu'aux dépens de l'instance,
A titre subsidiaire,
Confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la SAS Human Immobilier, à relever et garantir Madame [F] des condamnations prononcées à son encontre en principal, intérêts, article 700 et dépens,
En toutes hypothèses,
Débouter Monsieur et Madame [P] et la SAS Bourse de l'Immobilier devenue Human Immobilier, de toute leurs demandes envers Madame [F],
Condamner la SAS Human Immobilier à payer à Madame [F] la somme de 4000 euros sur le fondement de l'article 700 du CPC ainsi qu'aux dépens de l'instance'.
Elle a soutenu que :
- la toiture avait été présentée à l'agence immobilière comme étant d'origine et dans un bon état général, n'ayant connu qu'un épisode d'infiltrations en 2018 lors d'une tempête ;
- les acquéreurs avaient eu une connaissance de l'état de la toiture, qui n'avait pas été présentée comme neuve ou rénovée ;
- le bien avait été visité à plusieurs reprises, dont les combles ;
- les acquéreurs avaient entreposé avant la signature de l'acte de vente leurs meubles dans le bien, dont ils avaient ainsi une parfaite connaissance ;
- les changements de tuiles réalisés étaient visibles de l'arrière de la maison.
Elle a rappelé que les époux [K] [P] et [E] [J] avaient acquis le bien en l'état, sans garantie des vices cachés.
Elle a ajouté que :
- vendeur profane, elle avait confié la vente du bien à deux agences immobilières qui avaient la responsabilité des annonces et du descriptif du bien à vendre ;
- l'agence immobilière avait informé avant la signature du compromis les époux [K] [P] et [E] [J] sur l'ancienneté et l'état de la toiture ;
- les manquements de l'agence immobilière engageaient sa responsabilité contractuelle à son égard.
L'ordonnance de clôture est du 24 octobre 2024.
MOTIFS DE LA DÉCISION
A - SUR LA GARANTIE DES VICES CACHÉS PAR LA VENDERESSE
L'article 1641 du code civil dispose que : 'Le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage que l'acheteur ne l'aurait pas acquise, ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, s'il les avait connus'.
L'article 1642 du même code précise que : 'Le vendeur n'est pas tenu des vices apparents et dont l'acheteur a pu se convaincre lui-même'.
1 - sur le descriptif du vice
[W] [O] du cabinet Texa Expertises - Stelliant missionné par l'assureur de protection juridique des acquéreurs a indiqué que :
'Des traces d'infiltration sont apparentes au niveau de l'étage.
En arrivant sur la parcelle, nous n'avons pas constaté de désordres particuliers au niveau de la couverture.
Les époux [P] ont mis à notre disposition des photographies prises par les entreprises de couverture qui mettent en évidence l'état fortement dégradé des tuiles.
Les époux [P] ont récupéré une ancienne tuile qui a été remplacée. En effet, avec le temps, elles sont devenues gélives d'où le délitement généralisé'.
L'expert judiciaire, après avoir rappelé en page 1 de son rapport que : 'Il s'agit d'une maison construite en 1968", a indiqué en page 6 de son rapport que :
'Lorsque l'on monte sur une échelle. il est observé qu'un grand nombre de tuiles sont dégradées.
Les tuiles se délitent en surface.
Vue d'une tuile posée au sol :
Elle est dégradé en partie entière. Elle reste étanche pendant un certain temps, mais finit par casser et entraîner des infiltrations.
L'origine des délitements des tuiles s'explique par le fait que celles fabriquées dans les années 1960 étaient poreuses et gélives. L'action des mousses et des lichens qui se nourrissent de l'eau accentue les dégradations en plus des cycles gel/dégel'.
Il a conclu que : 'La couverture dégradée s'explique par la présence de tuiles vétustes en terre cuite datant des années 1960".
Le vice à l'origine des infiltrations est la vétusté de la toiture.
2 - sur l'apparence
En page 7 de son rapport, [W] [O] précité a indiqué que : 'En arrivant sur la parcelle, nous n'avons pas constaté de désordres particuliers au niveau de la couverture'.
L'expert judiciaire a indiqué dans son rapport :
- en page 5 que : 'La dégradation n'est pas visible du bas de la maison' ;
- en page 7 que :
'Plusieurs tuiles ont été changées : entre 20 et 30 tuiles environ.
Cela est visible seulement lorsqu'on monte dans les combles.
[...]
La qualité de la couverture n'est pas visible du bas comme expliqué ci-avant.
Elle n'est visible qu'en montant sur une échelle relativement grande puisqu'il existe un étage. La hauteur est moins importante sur la partie arrière ce qui nous a permis de monter sur une échelle' ;
- en page 8 : 'Nous avons expliqué que la couverture est dégradée depuis de nombreuses années et que cela n'était pas perceptible par les acheteurs et par l'agence immobilière'.
Les photographies annexées en page 5 du rapport d'expertise établissent toutefois que la toiture, sur l'avant et sur l'arrière de la maison, était visible avec un léger recul, sans qu'il soit nécessaire de monter sur une échelle.
Dans un courriel en date du 27 octobre 2019 adressé au notaire ayant instrumenté la vente, à l'agence immobilière et à la venderesse, les acquéreurs ont indiqué que :
'Concernant la maison de [Localité 1]...je reviens vers vous pour avoir votre avis et vos conseils pour les points suivants :
- Lors d'une visite de la maison fin juin nous avions remarqué des traces de fuites de pluie sur la poutre d'une chambre. Mme [M] [I] la conseillère de l'agence La bourse de l'immobilier nous avait dit que le problème de fuite avait été réglé et que la toiture n'était certes pas récente mais dans état convenable et ne nous a pas informé de travaux de réfection à envisager dans l'immédiat.
Nous venons d'emménager depuis une quinzaine de jours et la fuite est toujours présente (voir photo jointe) , les couvreurs que nous avons contacté pour
réparer nous ont dit que toute la toiture est en très mauvais état (morte) et est à refaire rapidement.
- De plus au mois de juillet nous avions aussi remarqué au moins 2 poutres endommagées sur le coté ouest de la maison . Mme [M] de l'agence avait pris en charge de contacter un menuisier charpentier pour nous faire établir un devis de réparation . Nous n'avons à ce jour jamais reçu ce devis malgré plusieurs relances auprès de Mme [M] ''
Nous apprenons que les bouts de poutres sont complètement pourris et doivent être remplacés en urgence car il y a un risque de danger de chute !!!
A noter que l'annonce de l'agence La Bourse de l'immobilier mentionnait une vente sans travaux et entièrement rénovée. (voir fichiers joints)
Ni Mme [F] ni Mme [M] ne nous ont signalé et informé du très mauvais état de la toiture et des poutres pourries dangereuses'.
Les acquéreurs avaient ainsi, antérieurement à la signature du compromis de vente, connaissance :
- de l'existence d'infiltrations anciennes par la toiture ;
- de l'ancienneté de la toiture ;
- du pourrissement de poutres de la charpente, dont il n'a plus été fait état par la suite.
L'expert judiciaire a indiqué en page 7 de son rapport que :
'Plusieurs tuiles ont été changées : entre 20 et 30 tuiles environ. Cela est visible seulement lorsqu'on monte dans les combles'.
Aucun élément des débats n'établit que l'accès aux combles était, sinon impossible, du moins difficile.
Le remplacement visible de certaines tuiles de la toiture conduisait nécessairement à s'interroger sur l'état global de la toiture.
Dès lors que les futurs acquéreurs avaient :
- pu constater l'existence d'infiltrations en toiture par le passé et le remplacement de tuiles en nombre conséquent,
- connaissance de l'ancienneté de la toiture de l'habitation construite en 1968, qui n'avait pas été refaite,
- une vue sur la toiture du pied de l'habitation,
le mauvais état de la toiture, le vice allégué, doit être considéré apparent à la date de l'établissement du compromis de vente, puis de la vente.
3 - sur la garantie de la venderesse
Il a été stipulé en page 9 de l'acte de vente, au paragraphe 'état du bien', que :
'L'ACQUEREUR prend le BIEN dans l'état où il se trouve au jour de l'entrée en jouissance, sans recours contre le VENDEUR pour quelque cause que ce soit notamment en raison :
' des vices apparents,
' des vices cachés.
S'agissant des vices cachés, il est précisé que cette exonération de garantie ne s'applique pas :
' si le VENDEUR a la qualité de professionnel de l'immobilier ou de la construction, ou s'il est réputé ou s'est comporté comme tel,
' s'il est prouvé par l'ACQUEREUR, dans les délais légaux, que les vices cachés étaient en réalité connus du VENDEUR'.
Le rapport d'expertise amiable ne comporte aucune indication sur la connaissance du vice par la venderesse.
L'expert judiciaire a émis en page 7 de son rapport l'avis suivant :
'Le descriptif du bien à vendre précise que la toiture est en bon état général:
pièce n° 2 de Maître [R].
Ce document a été pré-rempli par l'agence immobilière, mais il est signé par la vendeuse Madame [F].
Cette dernière avait connaissance de l'état de la couverture. En effet, elle a confirmé que plusieurs tuiles ont été changées par des amis. Ces derniers l'ont forcément prévenue que la toiture était très dégradée.
Cela correspond aux tuiles changées visibles dans les combles'.
Toutefois, dès lors que le vice était apparent, il est indifférent, s'agissant de la garantie des vices du bien vendu par la venderesse, que cette dernière ait eu connaissance de l'état vétuste de la toiture.
La venderesse est pour ces motifs fondée à se prévaloir de la clause d'exclusion de garantie stipulée à l'acte de vente.
Le jugement sera pour ces motifs infirmé en ce qu'il condamné [Y] [F] à garantir les acquéreurs du vice affectant la toiture du bien.
B - SUR LES DEMANDES FORMÉES A L'ENCONTRE DE l'AGENCE IMMOBILIÈRE
1 - par les acquéreurs
L'article 1991 alinéa 1er du code civil dispose que : 'Le mandataire est tenu d'accomplir le mandat tant qu'il en demeure chargé, et répond des dommages-intérêts qui pourraient résulter de son inexécution' et l'article 1992 alinéa 1er que : 'Le mandataire répond non seulement du dol, mais encore des fautes qu'il commet dans sa gestion'.
L'inexécution par une partie de ses engagements contractuels constitue à l'égard des tiers au contrat une faute de nature délictuelle, dont elle doit réparation des conséquences dommageables.
La charge de la preuve de la faute pèse sur les acquéreurs qui s'en prévalent.
[Y] [F] a confié un 'mandat de vente pro' (n° 628FB2) en date du 30 avril 2019 à la société Bourse de l'immobilier dont seule la responsabilité délictuelle est susceptible d'être engagée à l'encontre des acquéreurs.
Aux termes de ce mandat, la rédaction et la diffusion des annonces (vitrine, réseau, internet, réseaux sociaux) sont de la responsabilité de l'agence.
Le descriptif du bien à vendre ne décrit pas l'état général du bien immobilier. Au paragraphe 'toiture', il a été mentionné : 'Etat général : Bon'. Ce descriptif a été signé par [Y] [F]. Aucun document justifiant de l'état supposé de la toiture n'a été communiqué à l'agence immobilière, laquelle n'en a pas sollicité la communication.
Cette mention s'entend pour un vendeur profane d'une toiture remplissant son office.
L'annonce rédigée par l'agence immobilière indique : 'Centre de [Localité 1], maison des années 60 entièrement rénovée, offrant séjour cuisine de 55m², 4 chambre, salle d'eau, cellier, vaste terrasse, sur un terrain de 1.251m². Toutes commodités et futur port de plaisance à pieds'.
Le descriptif du bien figurant en seconde page reprend ces énonciations. Il y est précisé, à la rubrique 'Environnement et aspect général du bien' : 'bord océan, tranquillité, calme, privilégié. Bien avec du cachet. Plus de 20 ans. Sans travaux, standing, terrasse, raccordé au TAE, exposition Sud-Ouest'.
Il n'est pas établi que cette annonce a été soumise à l'approbation de [Y] [F] préalablement à sa diffusion.
L'expert amiable a conclu en page 12 de son rapport que : 'A notre humble avis, nous pensons que la responsabilité de l'agence immobilière « BOURSE DE L'IMMOBILIER » peut être recherchée car les documents fournis (descriptif de l'annonce) n'ont pas permis aux époux [P] d'appréhender l'état réel de la couverture'.
En page 9 de son rapport, en réponse à des dires des conseils des parties, l'expert judiciaire a indiqué que :
'Il n'est pas de la mission de l'agent immobilier de monter sur le toit pour vérifier l'état de la couverture et contredire les informations données par la venderesse.
[...]
Seule Madame [F] était en mesure de donner la bonne information à l'agent immobilier'.
Cette information a été délivrée à l'agence qui l'a retransmise aux futurs acquéreurs qui ont admis, ainsi que relevé précédemment, avoir été informés avant la signature du compromis de vente que : 'la toiture n'était certes pas récente mais dans état convenable'.
La présentation avantageuse du bien sur l'annonce immobilière n'est en conséquence pas fautive, dès lors que les informations nécessaires ont été délivrées antérieurement à la vente.
Le jugement sera pour ces motifs réformé en ce qu'il a retenu la responsabilité de l'agence immobilière engagée.
2 - par la venderesse
Pour les motifs qui précèdent, la responsabilité contractuelle de l'agence immobilière à l'égard de [Y] [F] n'est pas engagée.
Celle-ci, qui n'est pas tenue de garantir les acquéreurs, n'est dès lors pas fondée en ses demandes dirigées à l'encontre de l'agence immobilière.
C - SUR LES DÉPENS
La charge des dépens de première instance et d'appel incombe aux époux [K] [P] et [E] [J]. Ils seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile par Maître Marion Le Lain.
D - SUR LES DEMANDES PRÉSENTÉES SUR LE FONDEMENT DE L'ARTICLE 700 DU CODE DE PROCÉDURE CIVILE
Le jugement sera pour les motifs qui précèdent infirmé en ce qu'il a condamné l'appelante et [Y] [F] sur ce fondement.
Les circonstances de l'espèce ne justifient pas de faire droit aux demandes présentées de ce chef devant la cour.
PAR CES MOTIFS,
statuant par arrêt mis à disposition au greffe, contradictoire et en dernier ressort,
INFIRME le jugement du 21 mars 2023 du tribunal judiciaire de La Rochelle;
et statuant à nouveau,
DÉBOUTE les époux [K] [P] et [E] [J] de l'ensemble de leurs prétentions ;
CONDAMNE les époux [K] [P] et [E] [J] aux dépens de première instance et d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile par Maître Marion Le Lain ;
REJETTE les demandes présentées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.