CA Paris, Pôle 4 ch. 9, 15 mai 2025, n° 23/19298
PARIS
Arrêt
Infirmation
PARTIES
Demandeur :
Domofinance (SA)
Défendeur :
Lte (SAS)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Durand
Conseillers :
Mme Arbellot, Mme Coulibeuf
Avocats :
Me Mendes Gil, Me Habib
FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
Dans le cadre d'un démarchage à domicile, le 31 mars 2015, M. [J] [H] a conclu avec la société AEC ultérieurement dénommée LTE, un contrat prévoyant la fourniture et la pose d'une installation photovoltaïque au prix de 25 000 euros.
Pour financer cette opération, M. [H] a conclu le même jour avec la société Domofinance, un contrat de crédit affecté prévoyant un financement en capital de 25 000 euros au taux de 4,54 % l'an soit un TAEG de 4,64 %, remboursable en 140 échéances mensuelles de 239,74 euros chacune hors assurance facultative, avec un différé d'amortissement de 180 jours.
Les travaux ont été réalisés au domicile de M. [H] et les fonds ont été débloqués par la banque au profit du vendeur le 7 mai 2015, sur la base d'une attestation de réception des travaux sans réserve signée de M. [H] le 21 avril 2015.
L'installation a été raccordée au réseau électrique le 7 juillet 2015 avec revente d'énergie à la société EDF, un contrat de rachat de l'énergie produite ayant été validé par M. [H] le 15 décembre 2015.
M. [H] a fait assigner la société Domofinance ainsi que la société LTE par actes en date du 29 mai 2020, principalement en nullité/résolution des contrats avec déchéance du droit pour la banque à obtenir la restitution du capital prêté et condamnation au paiement de dommages et intérêts, devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Paris.
La société LTE anciennement dénommée AEC a fait l'objet d'une procédure de liquidation judiciaire par jugement du 21 décembre 2021 ouverte par le tribunal de commerce de Bobigny et Maître [N] [F] a été désignée en qualité de mandataire liquidateur.
Le 9 décembre 2022, Maître [F] a été assignée par M. [H] en sa qualité de mandataire liquidateur de la société LTE.
Par jugement réputé contradictoire rendu le 3 octobre 2023 auquel il convient de se reporter, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Paris a :
- dit que la demande de M. [H] n'était pas prescrite,
- déclaré recevable la demande de M. [H],
- déclaré recevable la demande formée à l'encontre de Maître [N] [F] en sa qualité de mandataire liquidateur de la société LTE,
- prononcé la nullité du contrat de vente et constaté la nullité subséquente du contrat de crédit,
- rejeté les demandes de la société Domofinance,
- dit que la société Domofinance a commis une faute la privant de son droit à restitution du capital et des intérêts,
- dit que le demandeur n'est plus débiteur de la banque,
- condamné la société Domofinance à restituer à l'emprunteur les sommes versées,
- rejeté les demandes de dommages et intérêts formées par M. [H],
- rejeté la demande au titre des frais de désinstallation,
- condamné la société Domofinance à payer au demandeur la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné le demandeur à restituer à Maître [F] liquidateur de la société LTE le matériel posé et dit que la mise à disposition pendant une durée de deux mois à compter de la signification de la décision vaut restitution,
- condamné la société Domofinance aux dépens,
- rappelé que l'exécution provisoire est de droit.
Le premier juge a relevé que l'action n'était pas prescrite dans la mesure où le délai de prescription quinquennale devait s'achever au 31 mars 2020 soit dans la période comprise entre le 12 mars 2020 et le 23 juin 2020 prévue par l'ordonnance du 25 mars 2020 relative à la prolongation des délais échus pendant la période d'urgence sanitaire, et que le délai avait été prorogé jusqu'au 31 mai 2020 de sorte qu'une assignation enregistrée le 29 mai 2020 n'était pas tardive.
Il a estimé les demandes formées contre la société LTE en liquidation judiciaire recevables en ce qu'elles ne tendaient pas à la condamnation de cette société au paiement d'une somme d'argent.
Il a considéré que le contrat de vente encourrait l'annulation faute de préciser la marque, le modèle, la surface, les références techniques, le poids et la capacité de production et de performance des panneaux photovoltaïques, en l'absence de remise d'un descriptif ou d'un plan technique et à défaut de planning de réalisation de la prestation et de préciser le délai pour le raccordement.
Il a écarté toute confirmation des irrégularités malgré une exécution volontaire des contrats, en raison de l'absence de démonstration d'une connaissance des vices affectant l'acte ni intention de le réparer de la part de M. [H].
Il a prononcé la nullité du contrat vente, constaté celle du contrat de crédit et imposé au demandeur de mettre à disposition du liquidateur le matériel posé à son domicile.
Il a retenu une faute de la banque mais uniquement en ce qu'elle a libéré les fonds sans s'assurer de l'exécution complète des travaux allant jusqu'au raccordement au réseau, sur la base d'une attestation de fin de travaux incomplète, retenant sa mauvaise foi puisqu'elle ne pouvait ignorer que le contrat principal comportait l'accomplissement de démarches administratives et la prise en charge du raccordement. Il a privé la banque de son droit à restitution du capital et des intérêts de sorte que M. [H] n'est plus débiteur de la banque avec obligation pour la banque de lui restituer les sommes versées en exécution du contrat.
Il a relevé que le surplus des demandes en paiement de dommages et intérêts n'était pas justifié.
Par une déclaration remise électroniquement le 1er décembre 2023, la société Domofinance a relevé appel de cette décision.
Aux termes de ses conclusions remises le 1er mars 2024, l'appelante demande à la cour :
- d'infirmer le jugement en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a rejeté la demande de M. [H] au titre des frais de désinstallation et sa demande de dommages et intérêts et notamment en ce qu'il l'a déboutée de l'ensemble de ses demandes, en ce compris sa demande subsidiaire, en cas de nullité du contrat, visant à la condamnation de M. [H] à lui payer la somme de 25 000 euros en restitution du capital prêté, sa demande plus subsidiaire visant à sa condamnation à lui payer la somme de 25 000 euros correspondant au capital perdu à titre de dommages et intérêts en réparation de sa légèreté blâmable, sa demande visant à sa condamnation à restituer, à ses frais, les panneaux photovoltaïques installés chez lui entre les mains de Maître [N] [F], ès qualité de liquidateur judiciaire de la société LTE, sa demande de compensation des créances réciproques à due concurrence, sa demande de condamnation de M. [H] au paiement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens de l'instance,
statuant à nouveau sur les chefs critiqués,
- de déclarer irrecevables les demandes de M. [H] en nullité des contrats, à tout le moins de dire qu'elles ne sont pas fondées et de l'en débouter, ainsi que de sa demande en restitution des mensualités réglées,
- en tout état de cause de constater que M. [H] est défaillant dans le remboursement du crédit, de prononcer la résiliation judiciaire du contrat de crédit du fait des impayés avec effet au 5 novembre 2023 et de le condamner à lui payer la somme de 7 880,54 euros avec intérêts au taux contractuel de 4,54 % l'an à compter du 5 novembre 2023 sur la somme de de 7 296,80 euros et au taux légal pour le surplus, outre la restitution des sommes versées en exécution du jugement au titre des mensualités précédemment réglées soit la somme de 25 230,26 euros, en tant que de besoin, le condamner à lui restituer cette somme et subsidiairement, de le condamner au paiement des échéances échues impayées au jour où la cour statue, outre la restitution des sommes versées au titre de l'exécution provisoire, et de lui enjoindre de reprendre le remboursement des mensualités à peine de déchéance du terme,
- subsidiairement en cas de nullité des contrats,
- de déclarer irrecevable la demande de M. [H] visant à être déchargé de l'obligation de restituer le capital prêté, à tout le moins l'en débouter et de condamner, en conséquence M. [H] à lui régler la somme de 25 000 euros en restitution du capital prêté,
- en tout état de cause, de déclarer irrecevable et à tout le moins mal fondée la demande de M. [H] visant à la privation de sa créance et au paiement de dommages et intérêts et à tout le moins de l'en débouter,
- très subsidiairement, de limiter la réparation qu'elle devrait eu égard au préjudice effectivement subi par l'emprunteur, à charge pour lui de l'établir et eu égard à la faute de l'emprunteur ayant concouru à son propre préjudice et en conséquence de limiter la décharge à concurrence du préjudice subi, à charge pour M. [H] d'en justifier, en cas de réparation par voie de dommages et intérêts de limiter la réparation à hauteur du préjudice subi et dire et juger que M. [H] reste tenu de restituer l'entier capital emprunté soit 25 000 euros,
- à titre infiniment subsidiaire en cas de privation de la créance de la banque,
- de condamner M. [H] à lui payer la somme de 25 000 euros correspondant au capital perdu à titre de dommages et intérêts en réparation de sa légèreté blâmable, d'enjoindre à M. [H] de restituer, à leurs frais, le matériel installé au liquidateur judiciaire de la société LTE dans un délai de 15 jours à compter de la signification de l'arrêt et dire et juger qu'à défaut de restitution, ils resteront tenus de la restitution du capital prêté et donc à lui payer la somme de 25' 000 euros, subsidiairement, de priver M. [H] de sa créance en restitution des sommes réglées du fait de sa légèreté blâmable,
- de débouter M. [H] de sa demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi que de sa demande formée au titre des dépens,
- d'ordonner le cas échéant la compensation des créances réciproques,
- en tout état de cause, de condamner M. [H] à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens avec distraction au profit de Selas Cloix & Mendes Gil.
La société Domofinance soulève l'irrecevabilité des demandes ou leur caractère non-fondé en expliquant que conformément à l'exigence de bonne foi de l'article 1134 du code civil, la nullité d'un contrat reste et doit rester une sanction exceptionnelle qui ne peut être mise en 'uvre par une partie tout en sachant qu'en réalité elle conservera le bien acquis du fait de l'impossibilité matérielle pour l'autre de le récupérer.
Elle invoque encore le caractère irrecevable, à tout le moins non-fondé du grief tiré de la nullité du contrat de vente qui entraîne la nullité du contrat de crédit sur le fondement d'une irrégularité formelle du bon de commande au regard des dispositions du code de la consommation.
Soulignant le caractère exceptionnel de l'annulation d'un contrat, elle conteste les griefs émis à l'encontre du libellé du bon de commande, rappelle le caractère strict de l'interprétation de l'article L. 111-1 du code de la consommation et estime que le premier juge est allé au-delà des exigences prévues par les textes.
Elle conteste toute méconnaissance des dispositions de l'article L. 111-1 du code de la consommation s'agissant de la désignation des biens qu'elle juge suffisamment précise en rappelant que la Cour de cassation a elle-même retenu, à deux reprises, que la marque du matériel n'est pas nécessairement une caractéristique essentielle de l'installation photovoltaïque et en faisant remarquer qu'il n'a jamais été contesté que le matériel livré était conforme au contrat, y compris en ce qui concerne la marque.
Elle note que les modalités de pose, qui relèvent de contingences techniques, n'ont pas à figurer dans le bon de commande et ne sont nullement requises par le texte qui est d'interprétation stricte et que le contrat n'a pas à intégrer un plan technique d'installation. Elle indique que les conditions générales contiennent un article V sur la livraison et qu'à supposer que lesdites mentions ne seraient pas suffisamment détaillées, cela pourrait fonder, le cas échéant, une action en responsabilité, si l'acquéreur établissait le caractère tardif ou une mauvaise exécution de la prestation, mais non la nullité du contrat, dès lors que la mention est bien présente sur le bon de commande.
Elle note que la preuve d'un préjudice n'est nullement rapportée en lien avec les vices soulevés.
Subsidiairement, elle fait valoir en visant l'article 1338 du code civil dans sa version applicable au litige, que M. [H] en laissant le vendeur procéder à l'installation des panneaux, en réceptionnant l'installation sans réserve et en sollicitant de la banque qu'elle verse les fonds au vendeur, en utilisant l'installation en revendant de l'électricité à EDF et en encaissant les gains d'énergie sans justifier d'aucun courrier de contestation pendant plusieurs années avant d'introduire une action en justice, a confirmé le contrat et renoncé à se prévaloir des nullités du bon de commande. Elle souligne que cette exécution a perduré après l'assignation et ajoute que l'acquéreur ne peut adopter une attitude contradictoire en sollicitant, d'un côté, la nullité des contrats et en poursuivant, de l'autre, leur exécution en sachant parfaitement qu'il ne restituera jamais l'installation.
En l'absence d'annulation des contrats, elle rappelle que le crédit est maintenu et elle note que l'infirmation du jugement entraînera l'obligation pour M. [H] de lui restituer la somme de 25 230,26 euros.
Elle indique que M. [H] ayant cessé de régler les échéances du crédit du fait de l'exécution provisoire qu'il a sollicitée, et l'exécution provisoire s'opérant aux risques de celui qui la sollicite, qu'elle n'a d'autre choix que de solliciter le prononcé de la résiliation judiciaire du contrat de crédit avec effet au 5 novembre 2023 du fait des mensualités impayées et la condamnation de l'emprunteur au paiement de 7 880,54 euros avec les intérêts au taux contractuel de 4,54 % l'an à compter du 5 novembre 2023 sur la somme de 7 296,80 euros et au taux légal pour le surplus, outre la restitution des sommes versées en exécution du jugement au titre des mensualités précédemment réglées et subsidiairement, elle demande sa condamnation à régler les échéances échues impayées au titre du crédit jusqu'à la date de l'arrêt à venir, et son injonction d'avoir reprendre le remboursement du crédit sous peine de déchéance du terme.
A titre subsidiaire, en cas de nullité des contrats, elle fait valoir que l'emprunteur doit lui rembourser le montant du capital emprunté et ce indépendamment du fait que les fonds aient été initialement adressés au vendeur.
Elle juge irrecevable la demande visant à la privation de la créance de la banque, ce alors que M. [H] a poursuivi l'exécution volontaire des contrats et les a confirmés, renonçant ainsi à opposer tout moyen de contestation afférant à une faute dans le déblocage des fonds. Elle conclut au rejet de la demande en l'absence de faute, préjudice et lien de causalité pouvant fonder l'engagement de la responsabilité de la banque.
Elle soutient qu'en cas de nullité du contrat, celle-ci exclut que l'emprunteur puisse rechercher la responsabilité de la banque sur le fondement de l'inexécution d'une obligation contractuelle et que seule la responsabilité civile délictuelle des parties peut être engagée.
Elle conteste toute obligation de contrôler la validité du bon de commande, et soutient subsidiairement que son contrôle ne pourrait en tout état de cause porter que sur une omission totale et grossière et non sur une imprécision. Elle conteste également toute faute dans la vérification de l'exécution de la prestation qui ne lui incombe pas ou dans la délivrance des fonds sur la base d'un mandat de payer donné par le client (en rappelant les obligations du mandataire) et souligne que toutes les demandes de M. [H] à son encontre sont vaines dès lors qu'il ne justifie pas du moindre préjudice ni d'un lien causal entre celui-ci et un fait imputable à la banque.
Elle ajoute que le préjudice serait tout au plus de la perte de chance de ne pas contracter et souligne que M. [H] ne justifie pas quelle mention prétendument omise aurait pu l'empêcher de poursuivre la relation. Elle souligne l'absence de contestation préalable à l'assignation.
Elle relève que s'agissant du déblocage des fonds, il n'y a aucun préjudice dès lors que l'installation est achevée et productrice d'électricité.
Elle considère que le préjudice tiré de l'impossibilité de récupérer le prix de vente résulte dans ce cas de la liquidation judiciaire, mais non d'une faute de la banque. Elle considère que cette impossibilité demeure hypothétique et ajoute que si la cour devait néanmoins retenir un lien de causalité, alors elle devrait tenir compte des impossibilités de restitution des deux côtés et non de celles qui bénéficient exclusivement à M. [H] et souligne qu'il va de fait conserver l'installation d'une valeur de 25 000 euros ce qui limite d'autant son préjudice et que toutes les prestations non restituées et conservées doivent être dès lors évaluées et venir en déduction. Elle ajoute que du fait de l'annulation le crédit devient gratuit. Enfin elle considère que la faute de la victime réduit également son droit à indemnisation. Elle souligne que la légèreté blâmable avec laquelle elle a signé l'attestation de fin de travaux constitue une faute occasionnant un préjudice correspondant au capital prêté dont elle serait privée.
Elle souligne que le demandeur ne peut obtenir une double indemnisation à la fois par la voie de décharge de restitution du capital prêté et par la voie de dommages et intérêts si bien que la demande d'indemnisation doit être déclarée irrecevable et à tout le moins infondée. Elle ajoute que M. [H] qui ne justifie d'aucune contestation pendant presque 5 ans, n'établit pas l'existence d'un préjudice moral en lien de causalité avec une faute de la banque pouvant justifier une condamnation à des dommages et intérêts.
Suivant ordonnance du conseiller de la mise en état du 25 juin 2024 devenue définitive, M. [H] qui avait constitué avocat, a été déclaré irrecevable à conclure.
Maître [N] [F], liquidateur judiciaire de la société LTE a reçu signification de la déclaration d'appel par acte délivré le 8 février 2024 à personne morale et des conclusions d'appel de la société Domofinance par acte délivré le 14 mars 2024 à personne morale. La société LTE avait reçu signification de la déclaration d'appel par acte du 13 février 2024 selon les modalités de l'article 659 du code de procédure civile et des conclusions de l'appelante par acte délivré le 22 mars 2024 selon les mêmes modalités. Ni la société LTE ni Maître [F] n'ont constitué avocat.
Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions de l'appelante, il est renvoyé aux écritures de celle-ci conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 14 janvier 2025 et l'affaire a été appelée à l'audience du 12 mars 2025 pour être mise en délibéré au 15 mai 2025 par mise à disposition au greffe.
M. [H] a fait parvenir à la cour les pièces qu'il avait remises en première instance outre un jeu d'écritures datées du 3 février 2021.
MOTIFS DE LA DÉCISION
A titre liminaire, la cour constate :
- que ne sont pas contestés les chefs du jugement ayant dit que la demande de M. [H] n'était pas prescrite, ayant déclaré recevable la demande de M. [H] au regard de la prescription, ayant déclaré recevable la demande formée à l'encontre de Maître [N] [F] en sa qualité de mandataire liquidateur de la société LTE, le jugement devant ainsi être confirmé sur ces points,
- que le contrat principal conclu le 31 mars 2015 est soumis aux dispositions des articles L. 111-1 et suivants dans leur rédaction issue de la loi n° 2014-344 du 17 mars 2014 relative à la consommation dès lors qu'il a été conclu dans le cadre d'un démarchage à domicile,
- que le contrat de crédit affecté conclu le même jour est soumis aux dispositions de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010, de sorte qu'il sera fait application des articles du code de la consommation dans leur rédaction en vigueur après le 1er mai 2011 et leur numérotation antérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016,
- qu'il convient de faire application des dispositions du code civil en leur version antérieure à l'entrée en vigueur au 1er octobre 2016 de l'ordonnance du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats.
Sur les fins de non-recevoir
La société Domofinance soulève dans le corps de ses écritures le caractère irrecevable, à tout le moins non-fondé du grief tiré de la nullité du contrat de vente entraînant la nullité du contrat de crédit sur le fondement d'une irrégularité formelle du bon de commande. Toutefois cette fin de non-recevoir qui figure dans un titre des écritures n'est pas développée de sorte qu'il ne sera pas statué spécifiquement sur ce point.
La société Domofinance invoque le caractère irrecevable et à tout le moins infondé des demandes en annulation des contrats sur le fondement de l'article 1134 du code civil, faisant état du caractère exceptionnel de la remise en cause d'un contrat par une partie qui ne doit pas agir de mauvaise foi.
Ce faisant, il n'est pas expliqué en quoi la violation de cette disposition viendrait fonder une irrecevabilité des demandes.
Il s'ensuit qu'aucune irrecevabilité n'est encourue de ce chef et que la fin de non-recevoir formée à ce titre en cause d'appel doit être rejetée.
Sur l'annulation de l'ensemble contractuel
M. [H] a été déclaré irrecevable à conclure contre l'appelante. En application des dispositions de l'article 954 du code de procédure civile, il est donc, s'agissant de la nullité du contrat, réputé s'approprier les motifs du jugement, contestés par la société Domofinance.
Sur le moyen tiré de la nullité formelle
Il résulte de l'article L. 121-18-1 du code de la consommation en sa rédaction issue de la loi n° 2014-344 du 17 mars 2014 applicable au présent litige, que le professionnel doit fournir au consommateur un exemplaire daté du contrat conclu hors établissement, sur papier signé par les parties ou, avec l'accord du consommateur, sur un autre support durable, confirmant l'engagement exprès des parties, lequel doit comprendre à peine de nullité, toutes les informations mentionnées au I de l'article L. 121-17 dont l'article L. 121-18 du même code précise qu'elles doivent être rédigées de manière lisible et compréhensible. Ce contrat est accompagné du formulaire type de rétractation mentionné au 2° du I de l'article L. 121-17.
Les informations mentionnées au I de l'article L. 121-17 du code de la consommation en sa rédaction applicable au litige sont, s'agissant de ce type de contrat,'en premier lieu les informations prévues par l'article L. 111-1 soit :
1° Les caractéristiques essentielles du bien ou du service, compte tenu du support de communication utilisé et du bien ou service concerné ;
2° Le prix du bien ou du service, en application des articles L. 113-3 et L. 113-3-1 ;
3° En l'absence d'exécution immédiate du contrat, la date ou le délai auquel le professionnel s'engage à livrer le bien ou à exécuter le service ;
4° Les informations relatives à son identité, à ses coordonnées postales, téléphoniques et électroniques et à ses activités, pour autant qu'elles ne ressortent pas du contexte, ainsi que, s'il y a lieu, celles relatives aux garanties légales, aux fonctionnalités du contenu numérique et, le cas échéant, à son interopérabilité, à l'existence et aux modalités de mise en 'uvre des garanties et aux autres conditions contractuelles. La liste et le contenu précis de ces informations sont fixés par décret en Conseil d'Etat.
Il est également prévu que le vendeur communique au consommateur les conditions, le délai et les modalités d'exercice du droit de rétractation ainsi que le formulaire type de rétractation, dont les conditions de présentation et les mentions qu'il contient sont fixées par décret en Conseil d'Etat.
Selon l'article 9 du code de procédure civile, il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention.
M. [H] produit devant la cour une simple copie relativement lisible de son contrat. Le premier juge a retenu une nullité formelle du contrat principal faute de mention des caractéristiques essentielles des panneaux vendus, faute de remise d'un descriptif ou d'un plan technique et d'indiquer un planning de réalisation de la prestation et en l'absence de mention de tout délai pour le raccordement ceci correspondant aux points 1 et 2 de l=article susvisé.
S'agissant du point 1 le texte n'exige que la mention des caractéristiques essentielles du bien ou du service. Le bon de commande mentionne que l'installation porte sur :
« Photovoltaïque
L'étude, la fourniture, l'installation d'un système de production d'électricité d'origine photovoltaïque composée des éléments suivants':
12 modules solaires photovoltaïques de type Thomson/ Solarworld d'une puissance unitaire de 250 WV
le câblage et protections électriques -boiter DC, interrupteur/sectionneur, parafoudre, boîtier AC, parafoudre, DD30M, coupe-circuit, câbles solaires,
les démarches administratives-déclaration préalable de travaux (demande d'autorisation mairie)-Demande ERDF (Électricité Réseau Distribution France)-Demande de raccordement-Élaboration de la demande de contrat d'achat EDF-AOA (Agence d'Obligation d'Achat)
TTC 25 000 ' ».
La cour observe que contrairement à ce qu'indique le premier juge, la marque des panneaux « Thomson/Solarworld » figure bien au contrat, et l'existence d'une possibilité de substitution d'une marque à l'autre n'est pas critiquable en soi dans la mesure où cette mention était bien visible et a été acceptée par l'acquéreur. La puissance unitaire des panneaux est également précisée et un simple calcul mathématique permet de connaître la capacité de production de l'installation et sa performance en puissance-crête soit 12 x 250 WC = 3 000 watt-crête.
Le texte n'impose pas d'aller dans le détail du modèle, des références, du poids des modules solaires. Il n'impose pas non plus que soient inclus dans le bon de commande une fiche technique ou un plan de réalisation de sorte qu'une annulation du contrat n'est pas encourue à ce titre.
S'agissant de la date ou du délai dans lequel le professionnel s'engage à livrer le bien ou à exécuter le service, le texte n'impose pas non plus de fournir au client un planning détaillé de réalisation de la prestation et s'agissant des délais prévisibles de raccordement au réseau électrique, le vendeur ne peut s'engager sur un tel délai qui dépend de tiers à la prestation, étant observé que la société LTE n'avait à sa charge que la demande de raccordement auprès d'ERDF.
Aucune nullité formelle du contrat n'est donc encourue et le jugement ayant retenu cette nullité doit être infirmé.
Sur le moyen tiré de la nullité fondée sur un dol
La demande de nullité fondée sur un dol n'a pas fait l'objet d'un examen par le premier juge, qui a retenu une cause de nullité formelle. Pour autant, dans ses écritures du 3 février 2021, dont il est impossible de dire si elles ont été maintenues en l'état lors des débats du 19 avril 2023, le demandeur imputait une faute à la banque pour participation au dol commis par le vendeur de sorte qu'il échet d'examiner la demande d'annulation fondée sur un dol et donc les moyens développés par M. [H] à ce sujet.
Selon l'article 1109 du code civil, dans sa rédaction applicable aux contrats, il n'y a point de consentement valable si le consentement n'a été donné que par erreur ou s'il a été extorqué par violence ou surpris par dol.
Aux termes de l'article 1116 du code civil, le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les man'uvres pratiquées par l'une des parties sont telles, qu'il est évident que, sans ces man'uvres, l'autre partie n'aurait pas contracté. Il ne se présume pas et doit être prouvé.
M. [H] souligne les mentions absentes du bon de commande quant aux caractéristiques essentielles. Cette carence, qui n'est au demeurant pas avérée, ne peut constituer à elle seule une réticence dolosive au sens des textes susvisées. En outre, si le vendeur est tenu d'une obligation d'information concernant les caractéristiques du matériel vendu, il ne lui incombe pas d'apporter des explications complémentaires concernant la durée de vie de l'ensemble des composants vendus, ou l'assurance obligatoire à souscrire.
Le raccordement au réseau électrique dépend de la société ERDF et non de la société venderesse de sorte qu'il appartenait à l'acquéreur de s'informer auprès de cette société des modalités concernant le raccordement ou encore quant aux frais de location d'un compteur obligatoire pour la revente d'électricité, étant observé que la société LTE n'avait à sa charge que la demande de raccordement auprès de la société ERDF et qu'il appartenait à l'acquéreur qui s'engageait dans une opération complexe, de s'informer a minima du processus de mise en service de son installation. La preuve d'une quelconque réticence dolosive ou de l'erreur qui en aurait résulté n'est pas démontrée.
Il n'est pas démontré non plus en quoi il serait critiquable pour la société venderesse de faire état de partenariat avec la société EDF ou même la société ERDF dès lors que le raccordement de l'installation et la possibilité de vendre l'électricité produite dépendent d'elles.
Si M. [H] reproche à la société LTE des agissements dolosifs caractérisés par une présentation fallacieuse de la rentabilité de l'installation, le contrat ne contient aucun engagement précis de rentabilité ou aucune promesse relative à un autofinancement et il n'est démontré aucune man'uvre ou tromperie de la société LTE à ce titre ni encore que ces éléments auraient été déterminants de son consentement.
Enfin, M. [H] ne peut ne peut faire accroire qu'il ne comprenait pas la portée de son engagement et le réduire à une simple « candidature sans engagement », alors que concomitamment au contrat de vente, il a signé le contrat de crédit affecté pour financer l'installation commandée, étant rappelé que le bon de commande, qui s'intitule comme tel sur le document y afférent, précise le mode de règlement du financement par crédit.
Dès lors, aucune nullité pour dol n'est encourue.
Le jugement doit être infirmé en ce qu'il a retenu une annulation de l'ensemble contractuel.
Il convient également d'infirmer le jugement ayant condamné M. [H] à restituer à Maître [F] liquidateur de la société LTE le matériel posé et dit que la mise à disposition pendant une durée de deux mois à compter de la signification de la décision vaut restitution.
Le contrat de crédit n'étant pas annulé, il convient également d'infirmer la décision en ce qu'elle a condamné la société Domofinance à restituer à M. [H] les sommes versées en exécution du contrat.
En l'absence de démonstration d'un dol commis par le vendeur, aucune faute ne peut être imputée à la société Domofinance pour participation au dol de son prescripteur. Aucune faute non plus ne peut lui être reprochée quant au contrôle de la régularité apparente du bon de commande.
Sur la faute de la banque
Le premier juge a retenu une faute de la banque qui a libéré les fonds de manière prématurée sans s'assurer de l'exécution complète des travaux allant jusqu'au raccordement au réseau, sur la base d'une attestation de fin de travaux incomplète, devant la priver de son droit à restitution du capital prêté.
Les obligations de l'emprunteur ne prennent effet qu'à compter de la livraison du bien ou de la fourniture de la prestation et il incombe au prêteur de vérifier que l'attestation de fin de travaux suffit à déterminer que la prestation promise a été entièrement achevée mais il ne lui appartient pas de s'assurer par lui-même de l'exécution des prestations et il ne saurait être garant de l'exécution du contrat principal.
Il est rappelé que le contrat de crédit souscrit prévoit expressément que les fonds sont mis à disposition à la livraison du bien et/ou à l'exécution de la prestation et que l'emprunteur donnera instruction au prêteur de débloquer les fonds au profit du vendeur ou prestataire de services désigné sur l'appel des fonds ou la fiche de réception des travaux signée par ce dernier et par l'emprunteur.
La société Domofinance a débloqué les fonds le 7 mai 2015 sur la base d'une fiche de réception des travaux signée par M. [H] le 21 avril 2015 et par la société AEC, attestant que les travaux objets du financement sont terminés et conformes au bon de commande du 31 mars 2015 validé avec la société AEC, que la réception a lieu sans réserve et l'acquéreur demande à la société Domofinance de payer la somme de 25 000 euros au vendeur.
La fiche de réception permet d'identifier sans ambiguïté l'opération financée et d'attester de la livraison de l'installation photovoltaïque à la charge de la société venderesse, étant observé que le nom et les coordonnées de la société AEC y figurent tout comme son numéro d'agrément et que ces données sont reprises au contrat de crédit.
S'agissant de la date de déblocage des fonds, elle est intervenue à la demande de M. [H] qui a signé une demande en ce sens et a également signé une fiche de réception du matériel. Dès lors que l'installation a été achevée, fonctionnelle et productive d'énergie, ce que ne conteste pas M. [H] et où il n'est nullement allégué ni établi que les autorisations auraient été refusées, le caractère prématuré du déblocage des fonds qui est invoqué n'est à l'origine d'aucun préjudice pour M. [H].
Au vu de ce qui précède, le jugement doit être infirmé en ce qu'il a dit que la société Domofinance avait commis une faute la privant de son droit à restitution du capital et des intérêts, dit que M. [H] n'était plus débiteur de la banque, mais confirmé en ce qu'il a rejeté les demandes de dommages et intérêts formées par M. [H] et rejeté la demande au titre des frais de désinstallation.
Sur la demande en résiliation du contrat et en paiement formée par la société Domofinance
L'appelante se prévaut de l'inexécution du contrat de crédit depuis le jugement dont appel pour solliciter la résiliation du contrat et le paiement du solde restant dû outre intérêts au taux contractuel.
Le premier incident de paiement non régularisé remonte à l'échéance du 5 décembre 2023 et la société Domofinance a formé sa demande pour la première fois dans ses écritures du 1er mars 2024, de sorte qu'elle est recevable en son action formée dans le délai de l'article L. 311-52 du code de la consommation.
La situation judiciaire ne suffit pas à qualifier de grave le manquement imputable à l'emprunteur qui avait spontanément assumé ses obligations jusqu'alors.
Il convient donc de rejeter la demande de résiliation du crédit.
Pour autant, les mensualités échues depuis l'échéance du 5 décembre 2023 et jusqu'à la date du présent arrêt sont exigibles selon l'historique de compte communiqué et le tableau d'amortissement. La cour constate que M. [H] avait effectué un remboursement anticipé partiel de 6 000 euros le 8 décembre 2015 et que les mensualités ont été portées à la somme de 197,18 euros à compter du 4 janvier 2016.
À la date du présent arrêt, M. [H] est donc redevable des 18 mensualités échues jusqu'au 5 mai 2025, soit la somme de 3'549,24 euros, conformément aux stipulations contractuelles et devra reprendre le remboursement du crédit à compter de l'échéance du mois de juin 2025.
Il convient de rappeler que M. [H] est en outre redevable de plein droit du remboursement des sommes qu'il a perçu en exécution du jugement qui est infirmé, soit la somme de 25 230,26 euros.
Il y a lieu d'ordonner la compensation des créances réciproques.
Les motifs qui précèdent rendent sans objet les prétentions et moyens subsidiaires.
Sur les autres demandes
Le jugement doit être infirmé en ses dispositions relatives aux dépens et quant à celles relatives aux frais irrépétibles.
Les dépens de première instance et d'appel doivent être mis à la charge de M. [H] qui succombe. Il apparaît en outre équitable de lui faire supporter une partie des frais irrépétibles de la société Domofinance à hauteur de la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Statuant par arrêt rendu par défaut,
Rejette la fin de non-recevoir ;
Infirme le jugement sauf en ce qu'il a dit que la demande formée par M. [J] [H] n'était pas prescrite et l'a déclarée recevable, en ce qu'il a déclaré recevable la demande formée à l'encontre de Maître [N] [F] en sa qualité de mandataire liquidateur de la société LTE, rejeté les demandes de dommages et intérêts formées par M. [J] [H] et rejeté sa demande au titre des frais de désinstallation ;
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Déboute M. [J] [H] de l'intégralité de ses demandes ;
Déclare la société Domofinance recevable en son action en paiement ;
Dit n'y avoir lieu à résiliation du contrat de crédit ;
Condamne M. [J] [H] à régler les 18 mensualités échues du 5 décembre 2023 jusqu'au 5 mai 2025, soit la somme de 3 549,24 euros, et dit qu'il devra reprendre le remboursement du crédit à compter de l'échéance du mois de juin 2025 ;
Rappelle que les parties restent redevables de plein droit du remboursement des sommes perçues en exécution du jugement qui est infirmé ;
Ordonne la compensation des créances réciproques ;
Condamne M. [J] [H] à verser à la société Domofinance une somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne M. [J] [H] aux dépens de première instance et d'appel, avec pour ces derniers distraction au profit de la Selas Cloix et Mendes-Gil ;
Rejette toute demande plus ample ou contraire.