CA Paris, Pôle 4 ch. 9 a, 15 mai 2025, n° 23/18826
PARIS
Arrêt
Infirmation partielle
PARTIES
Demandeur :
Domofinance (SA)
Défendeur :
P
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Durand
Conseillers :
Mme Arbellot, Mme Bussiere
Avocats :
Me Mendes Gil, Me Fajri, Me Habib
FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
Dans le cadre d'un démarchage à domicile, le 24 mai 2016, M. [P] [C] et Mme [I] [V] épouse [C] ont conclu avec la société AEC ultérieurement dénommée LTE, un contrat prévoyant la fourniture et la pose d'une installation photovoltaïque en vue de la revente de l'énergie produite au prix de 25 500 euros.
Pour financer cette opération, M. et Mme [C] ont conclu le même jour avec la société Domofinance, un contrat de crédit affecté prévoyant un financement en capital de 25 500 euros au taux de 4,54 % l'an soit un TAEG de 4,64 % l'an, remboursable en 140 échéances mensuelles de 239,44 euros chacune hors assurance facultative avec un différé d'amortissement de 180 jours.
Les travaux ont été réalisés au domicile des époux [C] et les fonds ont été débloqués par la banque au profit du vendeur sur la base d'une attestation de réception des travaux sans réserve signée le 10 juin 2016 par M. [C].
L'installation a été raccordée au réseau électrique et M. [C] a validé un contrat d'achat de l'énergie produite par l'installation avec la société EDF le 28 septembre 2017.
M. et Mme [C] ont fait assigner la société Domofinance ainsi que la société LTE, par actes en date du 16 mars 2020, principalement en nullité/résolution des contrats et déchéance du droit pour la banque à obtenir la restitution du capital et condamnation au paiement de dommages et intérêts devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Paris.
La société LTE anciennement dénommée AEC a fait l'objet d'une procédure de liquidation judiciaire par jugement du 21 décembre 2021 du tribunal de commerce de Bobigny et Maître [X] [B] a été désignée en qualité de mandataire liquidateur.
Le 3 mai 2022, Maître [B] a été assignée en sa qualité de mandataire liquidateur de la société LTE.
Par jugement réputé contradictoire rendu le 3 octobre 2023 auquel il convient de se reporter, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Paris a :
- déclaré recevables les demandes de M. et Mme [C],
- déclaré recevables les demandes à l'encontre de Maître [X] [B] en sa qualité de mandataire liquidateur de la société LTE,
- prononcé la nullité du contrat de vente et constaté la nullité subséquente du contrat de crédit,
- rejeté les demandes de la société Domofinance,
- dit que la société Domofinance a commis une faute la privant de son droit à restitution du capital et des intérêts,
- dit que les demandeurs ne sont plus débiteurs de la banque,
- condamné la société Domofinance à restituer aux emprunteurs les sommes versées,
- rejeté les demandes de dommages et intérêts formées par M. et Mme [C],
- rejeté la demande au titre des frais de désinstallation,
- condamné la société Domofinance à payer aux demandeurs la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné les demandeurs à restituer à Maître [B] liquidateur de la société LTE, le matériel posé et dit que la mise à disposition pendant une durée de deux mois à compter de la signification de la décision vaut restitution,
- condamné la société Domofinance aux dépens,
- rappelé que le jugement était exécutoire de droit.
Le premier juge a déclaré les demandes formées contre la société LTE recevables malgré la procédure collective en ce qu'elles ne tendaient pas à la condamnation de la société LTE au paiement d'une somme d'argent.
Il a considéré que le contrat de vente encourrait l'annulation faute de préciser la marque, le modèle, la surface, les références techniques, le poids et la capacité de production et de performance des panneaux photovoltaïques, de détailler un planning d'exécution des prestations et d'indiquer un délai pour le raccordement.
Il a écarté toute confirmation des irrégularités malgré une exécution volontaire des contrats, sans démonstration d'une connaissance des vices affectant l'acte ni intention de le réparer.
Il a prononcé la nullité du contrat vente, constaté celle du contrat de crédit et imposé aux demandeurs de mettre à disposition du liquidateur le matériel posé à leur domicile.
Il a retenu une faute de la banque mais uniquement en ce qu'elle avait libéré les fonds sans s'assurer de l'exécution complète des travaux allant jusqu'au raccordement au réseau électrique sur la base d'une attestation de fin de travaux incomplète, faisant preuve de mauvaise foi puisqu'elle ne pouvait ignorer que le contrat principal comportait l'accomplissement de démarches administratives et la prise en charge du raccordement. Il a privé la banque de son droit à restitution du capital et des intérêts de sorte que M. et Mme [C] ne sont plus débiteurs de la banque avec obligation de restitution des sommes versées en exécution du contrat.
Il a relevé que le surplus de leurs demandes en paiement de dommages et intérêts n'était pas justifié.
Par une déclaration remise électroniquement le 23 novembre 2023, la société Domofinance a relevé appel de cette décision.
Aux termes de ses conclusions n° 2 remises le 2 août 2024, l'appelante demande à la cour :
- d'infirmer le jugement en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a rejeté la demande des époux [C] au titre des frais de désinstallation et leurs demandes de dommages et intérêts et les a condamnés à restituer à Maître [B] liquidateur le matériel posé dans le cadre du contrat et dit que la mise à disposition du matériel à leur domicile pendant une durée de deux mois à compter de la signification de la décision vaut restitution, et notamment en ce qu'il l'a déboutée de l'ensemble de ses demandes, en ce compris sa demande subsidiaire, en cas de nullité du contrat, visant à la condamnation solidaire de M. et Mme [C] à lui payer la somme de 25 500 euros en restitution du capital prêté, sa demande plus subsidiaire visant à leur condamnation solidaire à lui payer cette même somme correspondant au capital perdu à titre de dommages et intérêts en réparation de leur légèreté blâmable, sa demande visant à leur condamnation solidaire à restituer, à leurs frais, les panneaux photovoltaïques installés chez eux entre les mains de Maître [X] [B], en qualité de liquidateur judiciaire de la société LTE, sa demande de compensation des créances réciproques à due concurrence, sa demande de condamnation solidaire des demandeurs au paiement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens de l'instance,
- statuant à nouveau sur les chefs critiqués,
- de déclarer irrecevables les demandes de M. et Mme [C] en nullité des contrats, à tout le moins de dire qu'elles ne sont pas fondées et de les en débouter, ainsi que de leur demande en restitution des mensualités réglées ; de déclarer irrecevable la demande visant au prononcé de la déchéance du droit aux intérêts et à tout le moins de les en débouter,
- en tout état de cause de constater que M. et Mme [C] sont défaillants dans le remboursement du crédit, de prononcer la résiliation judiciaire du contrat de crédit du fait des impayés avec effet au 5 décembre 2023 et de les condamner solidairement à lui payer la somme de 6 969,70 euros avec les intérêts au taux contractuel de 4,54 % l'an à compter du 5 décembre 2023 sur la somme de 6 453,43 euros et au taux légal pour le surplus, outre la restitution des sommes versées à M. et Mme [C] en exécution du jugement au titre des mensualités précédemment réglées, soit la somme de 25 943,75 euros correspondant aux échéances du 14 juin 2016 au 5 novembre 2023 et de les condamner solidairement, en tant que de besoin, à lui restituer cette somme de 25 943,75 euros et subsidiairement, de les condamner solidairement au paiement des échéances échues impayées au jour où la cour statue, outre la restitution des sommes versées au titre de l'exécution provisoire, et de leur enjoindre de reprendre le remboursement des mensualités à peine de déchéance du terme,
- subsidiairement en cas de nullité des contrats,
- de déclarer irrecevable la demande de M. et Mme [C] visant à être déchargés de l'obligation de restituer le capital prêté, à tout le moins les en débouter et de condamner, en conséquence M. et Mme [C] solidairement à lui régler la somme de 25 500 euros en restitution du capital prêté,
- en tout état de cause, de déclarer irrecevable et à tout le moins mal fondée la demande de M. et Mme [C] visant à la privation de sa créance et au paiement de dommages et intérêts et à tout le moins de les en débouter,
- très subsidiairement, de limiter la réparation qu'elle devrait eu égard au préjudice effectivement subi par l'emprunteur, à charge pour lui de l'établir et eu égard à la faute de l'emprunteur ayant concouru à son propre préjudice et en conséquence de limiter la décharge à concurrence du préjudice subi, à charge pour M. et Mme [C] d'en justifier, en cas de réparation par voie de dommages et intérêts de limiter la réparation à hauteur du préjudice subi et dire et juger que M. et Mme [C] restent tenus in solidum de restituer l'entier capital emprunté soit 25 500 euros,
- à titre infiniment subsidiaire en cas de privation de la créance de la banque,
- de condamner M. et Mme [C] solidairement à lui payer la somme de 25 500 euros correspondant au capital perdu à titre de dommages et intérêts en réparation de leur légèreté blâmable, d'enjoindre à M. et Mme [C] de restituer, à leurs frais, le matériel installé au liquidateur judiciaire de la société LTE dans un délai de 15 jours à compter de la signification de l'arrêt et dire et juger qu'à défaut de restitution, ils resteront tenus de la restitution du capital prêté et donc à lui payer la somme de 25'500 euros, subsidiairement, de priver M. et Mme [C] de leur créance en restitution des sommes réglées du fait de leur légèreté blâmable,
- de débouter M. et Mme [C] de toutes autres demandes, moyens et prétentions,
- d'ordonner le cas échéant la compensation des créances réciproques,
- en tout état de cause, de condamner in solidum M. et Mme [C] à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et dépens avec distraction au profit de Selas Cloix & Mendes Gil.
La société Domofinance soulève l'irrecevabilité des demandes ou leur caractère non-fondé en expliquant que conformément à l'impératif de sécurité juridique et à l'exigence de bonne foi, la nullité d'un contrat reste et doit rester une sanction exceptionnelle.
Elle invoque encore le caractère irrecevable, à tout le moins non-fondé du grief tiré de la nullité du contrat de vente qui entraîne la nullité du contrat de crédit sur le fondement d'une irrégularité formelle du bon de commande au regard des dispositions du code de la consommation.
Soulignant le caractère exceptionnel de l'annulation d'un contrat, elle conteste les griefs émis à l'encontre du libellé du bon de commande, rappelle le caractère strict de l'interprétation de l'article L. 111-1 du code de la consommation et souligne que le premier juge est allé au-delà des exigences prévues par les textes.
Elle conteste toute méconnaissance des dispositions de l'article L. 111-1 et L. 221-5 et L. 221-8 du code de la consommation s'agissant de la désignation des biens qu'elle juge suffisamment précise en rappelant que la Cour de cassation a elle-même retenu, à deux reprises, que la marque du matériel n'est pas nécessairement une caractéristique essentielle de l'installation photovoltaïque et en faisant remarquer qu'il n'a jamais été contesté que le matériel livré était conforme au contrat, y compris en ce qui concerne la marque.
Elle note que les modalités de pose, qui relèvent de contingences techniques, n'ont pas à figurer au bon de commande et ne sont nullement requises par le texte du code de la consommation, qui est d'interprétation stricte et que le contrat n'a pas à intégrer un plan technique d'installation. Elle ajoute qu'il est matériellement impossible de préciser le délai de réalisation du raccordement, qui dépend d'un tiers, ERDF, le vendeur ne pouvant s'engager en termes de délais que sur sa propre prestation. Elle indique que les conditions générales non produites par les acquéreurs contiennent un article V sur la livraison puis un article VIII sur la mise en service, expliquant le process aux acquéreurs, qui sont donc mal fondés à le contester. Elle en conclut qu'il y avait donc bien des mentions dans le bon de commande sur les délais et modalités d'exécution de la prestation, ce qui exclut le prononcé d'une nullité du bon de commande sur ce fondement. Elle précise qu'à supposer que lesdites mentions ne seraient pas suffisamment détaillées, cela pourrait fonder, le cas échéant, une action en responsabilité, si l'acquéreur établissait le caractère tardif ou une mauvaise exécution de la prestation, mais non la nullité du contrat, dès lors que la mention est bien présente sur le bon de commande.
Elle indique que le coût total du crédit ne fait pas partie des mentions devant figurer au contrat principal, que les mensualités du crédit sont indiquées hors assurance et que les acquéreurs ont parfaitement été informés des modalités de l'emprunt par le contrat de crédit signé simultanément.
S'agissant du point de départ du délai de rétractation, elle affirme que contrairement à ce que soutient la partie adverse, il démarre bien à compter de la signature du bon de commande et non à compter de la réception de la prestation si bien que la mention d'un délai de rétractation démarrant à compter de la signature du contrat n'est pas erronée.
Elle note que la preuve d'un préjudice n'est nullement rapportée en lien avec les vices soulevés.
Subsidiairement, elle fait valoir en visant l'article 1338 du code civil dans sa version applicable au litige que M. et Mme [C], en laissant le vendeur procéder à l'installation des panneaux, en réceptionnant l'installation sans réserve et en sollicitant de la banque qu'elle verse les fonds au vendeur, en utilisant l'installation en revendant de l'électricité à ERDF sans justifier d'aucun courrier de contestation pendant plus de 4 ans avant d'introduire une action en justice ont confirmé le contrat et ont renoncé à se prévaloir des nullités du bon de commande qu'ils connaissaient du fait de la reproduction des articles du code de la consommation. Elle souligne que cette exécution a perduré après l'assignation et ajoute que les acquéreurs ne peuvent adopter une attitude contradictoire en sollicitant, d'un côté, la nullité des contrats et en poursuivant, de l'autre, son exécution en sachant parfaitement qu'ils ne restitueront jamais l'installation.
Elle fait valoir que les allégations de dol au sens de l'article 1116 du code civil ne sont aucunement étayées quant à une promesse de rentabilité ou d'autofinancement et que les époux [C] n'établissent ni les man'uvres dolosives ni l'erreur commise. Elle souligne que les intimés produisent à cet égard de nombreuses pièces qui ne concernent pas leur dossier et dont l'authenticité et la pertinence posent question notamment la « simulation du démarcheur », manuscrite et non authentifiée, que la partie adverse produit en pièce n° 24.
Elle ajoute que si les acquéreurs font également état de ce que le vendeur utiliserait le slogan d'EDF et qu'ils n'auraient pas été informés de la durée de vie de certaines pièces, ces éléments ne sont pas à même d'établir une tromperie, dans un contexte où ils ne justifient d'aucune contestation pendant 5 ans. Elle indique que le moyen selon lequel ils n'auraient pas été suffisamment renseignés sur le délai de raccordement, l'assurance obligatoire, la location obligatoire d'un compteur et la durée de vie du matériel n'est pas davantage fondé.
Elle note l'absence de toute expertise contradictoire, de toute pièce concernant le crédit d'impôt perçu et observe que les intimés ne produisent pas l'intégralité de leurs factures de revente, alors qu'ils prétendent percevoir un revenu de 934,66 euros pour l'année 2018-2019 soit un revenu total de 28 039,80 euros sur 30 ans (sans tenir compte du crédit d'impôt et de l'augmentation des tarifs de rachat proposés par EDF).
Elle indique qu'ils sont également mal fondés à soutenir qu'ils n'auraient pas été conscients que la production dépendait de l'ensoleillement, ce alors qu'il s'agit d'une donnée que tout acquéreur en « bon père de famille » ne saurait ignorer.
Elle rappelle qu'en l'absence de nullité du contrat principal, le contrat de crédit est maintenu. Elle juge irrecevable, à tout le moins infondée la demande de nullité du contrat de crédit ainsi que la demande de restitution des mensualités réglées. Elle demande la restitution des sommes versées par suite de l'exécution provisoire au titre des mensualités réglées soit la somme de 25 943,75 euros. Elle ajoute que les emprunteurs ayant cessé de régler les échéances du crédit, la résiliation du contrat doit être ordonnée et que les emprunteurs doivent être solidairement condamnés à lui régler les sommes dues.
Elle soutient qu'en cas de nullité du contrat, celle-ci exclut que les emprunteurs puissent rechercher la responsabilité de la banque sur le fondement de l'inexécution d'une obligation contractuelle. Elle juge irrecevable la demande du couple [C] visant à la privation de la créance de la banque, ce alors que celui-ci a poursuivi l'exécution volontaire des contrats et les a confirmés, renonçant ainsi à opposer tout moyen de contestation afférant à une irrégularité formelle du bon de commande ou à une faute dans le déblocage des fonds. A tout le moins, elle demande son rejet en l'absence de faute, préjudice et lien de causalité pouvant fonder l'engagement de la responsabilité de la banque.
Elle conteste toute obligation de contrôler la validité du bon de commande, et soutient subsidiairement que son contrôle ne pourrait en tout état de cause porter que sur une omission totale et grossière et non sur une imprécision. Elle conteste également toute faute dans la vérification de l'exécution de la prestation qui ne lui incombe pas ou dans la délivrance des fonds sur la base d'un mandat de payer donné par le client (en rappelant les obligations du mandataire) et souligne que toutes les demandes de M. et Mme [C] à son encontre sont vaines dès lors qu'ils ne justifient pas du moindre préjudice ni d'un lien causal entre celui-ci et un fait imputable à la banque.
Elle ajoute que le préjudice serait tout au plus de la perte de chance de ne pas contracter et souligne que M. et Mme [C] ne justifient pas quelle mention prétendument omise aurait pu les empêcher de poursuivre la relation. Elle souligne l'absence de contestation préalable à l'assignation.
Elle relève que s'agissant du déblocage des fonds, il n'y a aucun préjudice dès lors que l'installation est achevée et productrice d'électricité.
Elle considère que le préjudice tiré de l'impossibilité de récupérer le prix de vente résulte dans ce cas de la liquidation judiciaire, mais non d'une faute de la banque. Elle considère que cette impossibilité demeure hypothétique et ajoute que si la cour devait néanmoins retenir un lien de causalité, alors elle devrait tenir compte des impossibilités de restitution des deux côtés et non de celles qui bénéficient exclusivement à M. et Mme [C] et souligne qu'ils vont de fait conserver l'installation d'une valeur de 25 500 euros ce qui limite d'autant leur préjudice et que toutes les prestations non restituées et conservées doivent être dès lors évaluées et venir en déduction. Elle ajoute que du fait de l'annulation le crédit devient gratuit. Enfin elle considère que la faute de la victime réduit également son droit à indemnisation. Elle souligne que la légèreté blâmable avec laquelle elle a signé l'attestation de fin de travaux constitue une faute occasionnant un préjudice correspondant au capital prêté dont elle serait privée.
Elle soutient que la demande de déchéance du droit aux intérêts contractuels est présentée pour la première fois en appel et donc irrecevable et mal fondée puisqu'elle produit bien le résultat de consultation du FICP.
Elle rappelle que les demandeurs ne peuvent obtenir une double indemnisation à la fois par la voie de décharge de restitution du capital prêté et par la voie de dommages et intérêts si bien que la demande d'indemnisation doit être déclarée irrecevable et à tout le moins infondée.
Aux termes de leurs conclusions n° 2 notifiées par voie électronique le 8 janvier 2025, M. et Mme [C] demandent à la cour :
- de confirmer le jugement et de le réformer uniquement en ce qu'il a rejeté leurs demandes de dommages et intérêts,
- statuant à nouveau,
- de déclarer leurs demandes recevables et bien-fondées
- de débouter les sociétés Domofinance et LTE de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,
- en conséquence,
- d'ordonner le remboursement par la banque des sommes qui ont été versées à savoir 26 943,75 euros selon l'historique du compte, sauf à parfaire, avec intérêts au taux légal à compter de la présente décision,
- à titre subsidiaire, de condamner la société Domofinance à leur verser la somme de 26 943,75 euros sauf à parfaire, à titre de dommage et intérêts du fait de sa négligence fautive,
- en tout état de cause, si la Cour estimait que le remboursement des échéances ou le versement de dommages et intérêts était conditionné à la désinstallation du matériel,
- de retenir que la désinstallation pourra se faire soit par mise à disposition de l'installation au mandataire liquidateur pendant un délai de trois mois à compter de la signification de l'arrêt afin qu'il procède à la dépose et remise en état de la toiture à ses frais soit aux frais des époux [C] et de dire qu'ils pourront solliciter l'exécution des condamnations pécuniaires prononcées par l'arrêt à intervenir, à l'encontre de la société Domofinance en apportant la preuve de la désinstallation,
- à titre infiniment subsidiaire, si la Cour ne faisait pas droit aux demandes et ne prononçait pas la nullité des conventions,
- de prononcer la déchéance du droit aux intérêts du crédit affecté,
- en conséquence, de condamner la banque à leur restituer les sommes perçues en sus du capital emprunté, soit la somme de 1 443,75 euros, sauf à parfaire,
- en tout état de cause, de la condamner au paiement des sommes de 3 000 euros au titre de leur préjudice économique et leur trouble de jouissance, de 3 000 euros au titre de leur préjudice moral et de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.
M. et Mme [C] affirment avoir été démarchés d'abord par voie téléphonique par un représentant de la société LTE, anciennement AEC se présentant comme partenaire de la société EDF pour les besoins d'une campagne d'information des usagers puis que le démarcheur leur a promis qu'ils pourraient bénéficier d'une installation photovoltaïque gratuite car autofinancée sur une durée de 12 années par la revente de l'énergie à la société EDF, productive de revenus à l'issue de cette période, puisque la société EDF s'engagerait à racheter l'électricité ainsi produite sur une durée de 20 ans et ce sur la base d'une simulation de rentabilité mensongère.
Ils estiment leur action recevable contre le vendeur en liquidation judiciaire dans la mesure où ils ne forment pas de demandes en paiement d'une somme d'argent.
Ils soutiennent que le bon de commande est nul dès lors qu'il ne mentionne ni la marque, ni le modèle et les références des panneaux, leur dimension, poids, aspect, couleur, le type de cellule (monocristallin ou polycristallin, dont les avantages et le rendement sont beaucoup plus faibles pour le second), la marque, le modèle et les références de l'onduleur, qui est la 2ème pièce maîtresse de ce type d'installation ainsi que de l'ensemble des autres matériels en faisant partie (écran sous toiture, clips de sécurité, disjoncteur, parafoudre'). Ils notent que le vendeur n'ayant jamais délivré de facture, ils sont dans l'incapacité totale de vérifier le matériel qui leur a véritablement été installé.
Ils déplorent qu'aucune indication n'ait été donnée s'agissant de la date de livraison, celle de mise en service, que le coût total du crédit n'est pas mentionné et que le montant des mensualités est volontairement erroné, que le point de départ du délai de rétractation est erroné.
Ils affirment en outre que le contrat est nul, leur consentement ayant été vicié sur le fondement des articles 1109, 1116 du code civil, et L. 111-1 du code de la consommation dès lors que le vendeur s'est bien engagé contractuellement à ce que la centrale photovoltaïque soit autofinancée, promesse non tenue. Ils estiment que le commercial aurait dû les informer que le projet n'était pas autofinancé, que l'omission de certaines informations essentielles (délai d'attente de plusieurs mois avant raccordement, capitalisation des intérêts qui courait dès le début du contrat de crédit, perception des revenus énergétiques annuellement, début de règlement du crédit avec leurs propres deniers et revenus énergétiques dépendant de la production des photons, grâce au soleil) caractérise l'intention de tromper, dans la mesure où si la société LTE avait donné cette information, ils n'auraient jamais conclu ce contrat.
Ils rappellent que de nombreuses informations obligatoires ne figuraient pas au contrat, que la société LTE a sciemment fait état de partenariats mensongers pour pénétrer leur habitation et affirment que les agissements dolosifs du vendeur sont caractérisés par la présentation fallacieuse de la rentabilité de l'installation. Sur ce dernier point, ils expliquent que l'agent intervenu à l'opération ne pouvait ignorer qu'une centrale d'une puissance de 5 100 watts-crêtes a une capacité de production maximale de 5 100 watts-crêtes/an, lorsqu'elle est installée et orientée dans des conditions optimales et le dol qu'il commettait en les engageant à emprunter durant 12 ans, quatre fois plus qu'ils ne pourraient gagner, sans qu'ils puissent recevoir les aides étatiques pourtant promises par le technicien. Ils précisent que le seul exemplaire du bon de commande de la société LTE indique « sous réserve d'éligibilité du dossier de rendement auquel cas caduc ' AUTOFINANCE ' tarif de rendement 0.3501 ' garanti 20 ans ' chèque de 1.200 euros à la pose et chèque de 4.250 euros versé sous 3 mois ». Ils ajoutent que le démarcheur a spécifié sur le bon de commande « Autofinance 0 ' » et a établi une simulation détaillée, dans laquelle le terme d'autofinancement apparaît à plusieurs reprises, en promettant un revenu par EDF garanti à hauteur de 2 438,37 euros par an, un crédit annuel à hauteur de 2 355,12 euros et une compensation financière des deux sommes de sorte qu'ils feraient ainsi une « opération blanche » comme indiqué explicitement dans la simulation. Ils en concluent que tant dans la simulation que sur le bon de commande, le démarcheur leur a garanti un tarif de rachat d'énergie par EDF à hauteur de 0,2501 euros, sans pour autant leur avoir précisé que le tarif de rachat est fixé au jour du raccordement, et est dégressif tous les trimestres. Ils ajoutent qu'à réception de la première facture de production, ils ont pu réaliser l'idée que leur installation n'était aucunement rentable.
Ils reprochent au vendeur de leur avoir faussement présenté l'opération contractuelle comme étant une candidature « sans engagement », soumise à la confirmation de sa parfaite viabilité économique et de son autofinancement, afin qu'ils n'usent pas de leur droit de rétractation et affirment que ce n'est qu'après écoulement de leur droit de rétractation qu'ils ont pu apprendre le caractère définitif du contrat, le démarcheur ayant d'ailleurs mentionné sur le bon de commande : « Sous réserve d'éligibilité du dossier de rendement auquel cas caduc ». Ils font état d'une volonté « extorquée » dans la mesure le coût total du crédit qui aurait pu les alerter ne figure nulle part au contrat.
Ils contestent toute confirmation du contrat, faisant valoir leur absence de connaissance des vices dont ils soulignent qu'il est désormais admis qu'elle ne peut résulter de la reproduction des articles du code de la consommation.
Ils soulignent que la nullité du contrat de vente entraîne celle du contrat de crédit en application des dispositions de l'article L. 311-32 du code de la consommation.
Sur la responsabilité de la banque, ils soutiennent qu'elle a commis une faute en finançant un contrat nul, en ne vérifiant pas la régularité formelle du bon de commande, laquelle doit la priver de son droit à restitution. Ils affirment que leur préjudice résulte du fait qu'ils se sont trouvés liés par la validation de l'opération effectuée par la banque à une société peu sérieuse dont l'intervention ne les aura qu'endettés.
A titre subsidiaire, ils sollicitent que la banque soit déchue des intérêts au taux contractuel, relevant que la société Domofinance ne justifie pas de la consultation préalable du FICP. Ils contestent tout nouvelle demande à cet égard puisqu'ils indiquent qu'ils avaient bien formé une demande de déchéance des intérêts en première instance telle que cela résulte du jugement.
En raison de l'annulation des contrats, ils demandent le remboursement par la banque de la somme de 26 943,75 euros selon historique communiqué, sauf à parfaire.
A titre subsidiaire, si la cour décidait de ne pas faire droit à cette dernière demande, ils sollicitent la condamnation de la banque à leur verser la somme de 26 943,75 euros (capital emprunté et intérêts trop perçus), à titre de dommages et intérêts en application de la jurisprudence récente de la Cour de cassation.
Ils demandent en outre, au regard de l'analyse de la jurisprudence actuelle de la Cour de céans, et si par extraordinaire le versement d'une telle indemnité (restitution des échéances versées ou versement de dommages et intérêts) était conditionné à la désinstallation des panneaux, de prévoir spécifiquement que la mise en 'uvre de la désinstallation effective puisse être réalisée par mise à disposition de l'installation au mandataire liquidateur dans un délai ne pouvant excéder trois mois à compter de la signification de l'arrêt à intervenir ou bien en cas de carence du liquidateur, à leurs frais à charge pour eux de rapporter à la banque la preuve de la désinstallation. Ils affirment ne pas avoir l'intention de conserver l'installation, dont ils ne seraient d'ailleurs plus propriétaires, par l'effet de l'arrêt et jugent qu'il serait particulièrement inéquitable de conditionner le remboursement des échéances versées ou le versement de dommages et intérêts par la banque fautive, à la seule l'intervention du liquidateur de la société installatrice, dont la solvabilité est particulièrement compromise.
Ils font également état d'un préjudice financier et de jouissance et d'un préjudice moral qu'ils estiment être en lien avec les fautes de la banque.
Suivant acte délivré le 5 février 2024 à domicile, Maître [X] [B], liquidateur judiciaire de la société LTE a reçu signification de la déclaration d'appel. Les premières conclusions de l'appelante ont été signifiées à Maître [B] ès-qualités par acte du 1er mars 2024 délivré à domicile. Maître [B] n'a pas constitué avocat.
Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions des parties, il est renvoyé aux écritures de celles-ci conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 14 janvier 2025 et l'affaire a été appelée à l'audience du 5 mars 2025 pour être mise en délibéré au 15 mai 2025 par mise à disposition au greffe.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Selon l'article 472 du code de procédure civile, lorsque le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond, le juge ne fait droit à la demande que s'il l'estime régulière, recevable et bien fondée.
Il résulte de l'article 954 dernier alinéa du code de procédure civile que la partie qui ne conclut pas ou qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement est réputée s'en approprier les motifs.
A titre liminaire, la cour constate :
- que ne sont pas contestés les chefs du jugement ayant déclaré recevables les demandes de M. et Mme [C] et celles formées à l'encontre de Maître [X] [B] en sa qualité de mandataire liquidateur de la société LTE, le jugement devant ainsi être confirmé sur ces points,
- que le contrat principal conclu le 24 mai 2016 est soumis aux dispositions des articles L. 111-1 et suivants dans leur rédaction issue de la loi n° 2014-344 du 17 mars 2014 relative à la consommation dès lors qu'il a été conclu dans le cadre d'un démarchage à domicile,
- que le contrat de crédit affecté conclu le même jour est soumis aux dispositions de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010, de sorte qu'il sera fait application des articles du code de la consommation dans leur rédaction en vigueur après le 1er mai 2011 et leur numérotation antérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016,
- qu'il convient de faire application des dispositions du code civil en leur version antérieure à l'entrée en vigueur au 1er octobre 2016 de l'ordonnance du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats.
Sur les fins de non-recevoir
La société Domofinance soulève dans le corps de ses écritures le caractère irrecevable, à tout le moins non-fondé du grief tiré de la nullité du contrat de vente entraînant la nullité du contrat de crédit sur le fondement d'une irrégularité formelle du bon de commande. Toutefois cette fin de non-recevoir qui figure dans un titre des écritures n'est pas développée de sorte qu'il ne sera pas statué spécifiquement sur ce point.
La société Domofinance invoque le caractère irrecevable et à tout le moins infondé des demandes en annulation des contrats, faisant état du caractère exceptionnel de la remise en cause d'un contrat par une partie qui ne doit pas agir de mauvaise foi.
Ce faisant, il n'est pas expliqué en quoi cette assertion viendrait fonder une irrecevabilité des demandes.
Il s'ensuit qu'aucune irrecevabilité n'est encourue de ce chef et que la fin de non-recevoir formée à ce titre en cause d'appel doit être rejetée.
Sur la demande d'annulation de l'ensemble contractuel
Sur le moyen tiré de la nullité formelle
Il résulte de l'article L. 121-18-1 du code de la consommation en sa rédaction issue de la loi n° 2014-344 du 17 mars 2014 applicable au présent litige, que le professionnel doit fournir au consommateur un exemplaire daté du contrat conclu hors établissement, sur papier signé par les parties ou, avec l'accord du consommateur, sur un autre support durable, confirmant l'engagement exprès des parties, lequel doit comprendre à peine de nullité, toutes les informations mentionnées au I de l'article L. 121-17 dont l'article L. 121-18 du même code précise qu'elles doivent être rédigées de manière lisible et compréhensible. Ce contrat est accompagné du formulaire type de rétractation mentionné au 2° du I de l'article L. 121-17.
Les informations mentionnées au I de l'article L. 121-17 du code de la consommation en sa rédaction applicable au litige sont, s'agissant de ce type de contrat,'en premier lieu les informations prévues par l'article L. 111-1 soit :
1° Les caractéristiques essentielles du bien ou du service, compte tenu du support de communication utilisé et du bien ou service concerné ;
2° Le prix du bien ou du service, en application des articles L. 113-3 et L. 113-3-1 ;
3° En l'absence d'exécution immédiate du contrat, la date ou le délai auquel le professionnel s'engage à livrer le bien ou à exécuter le service ;
4° Les informations relatives à son identité, à ses coordonnées postales, téléphoniques et électroniques et à ses activités, pour autant qu'elles ne ressortent pas du contexte, ainsi que, s'il y a lieu, celles relatives aux garanties légales, aux fonctionnalités du contenu numérique et, le cas échéant, à son interopérabilité, à l'existence et aux modalités de mise en 'uvre des garanties et aux autres conditions contractuelles. La liste et le contenu précis de ces informations sont fixés par décret en Conseil d'Etat.
Il est également prévu que le vendeur communique au consommateur les conditions, le délai et les modalités d'exercice du droit de rétractation ainsi que le formulaire type de rétractation, dont les conditions de présentation et les mentions qu'il contient sont fixées par décret en Conseil d'Etat.
Selon l'article 9 du code de procédure civile, il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention.
M. et Mme [C] contestent que les points 1,2 et 3 visés à l'article L. 111-1 du code de la consommation aient été respectés et font état de l'indication d'un point de départ du délai de rétractation erroné. Ils produisent le bon de commande en original.
S'agissant du point 1 le texte n'exige que la mention des caractéristiques essentielles du bien ou du service. Le bon de commande mentionne que l'installation porte sur :
« Délai de livraison :
Centrale photovoltaïque-revente à EDF
comprenant un kit d'intégration, coffret protection, disjoncteur, parafoudre, onduleur, mise à terre des générateur (norme NF 15-10)
matériel garanti 25 ans SAVI
Panneaux photovoltaïques certifiés CE
Nombre de modules': 17
Puissance unitaire du module': 300 WC
Total puissance 5 100 WC
Prise en charge des démarches administratives+ installation complète+accessoires et fournitures + mise en service
observations': sous réserve d'éligibilité du dossier de rendement auquel cas caduc ' AUTOFINANCE (illisible)' tarif de rachat 0,250 cts FIXE EDF- garanti 20 ans ' report 6 mois du financement après travaux-chèque 1 200 euros versé à la pose et chèque 4 250 euros versé sous 3 mois
TTC 25 500 ' ».
La cour observe que le texte n'impose pas d'aller dans le détail du modèle, des références, de la dimension, du poids, de l'aspect, de la couleur des panneaux, du type de cellule (monocristallin ou polycristallin) ni du modèle et des références de l'onduleur et des autres matériels accessoires. Il n'impose pas non plus que soient inclus dans le bon de commande une fiche technique ou un plan de réalisation. En revanche, la marque des principaux matériels vendus constitue désormais selon la jurisprudence de la Cour de cassation une caractéristique essentielle de sorte qu'en omettant de mentionner la marque des panneaux et celle de l'onduleur le contrat encourt l'annulation.
S'agissant du prix du bien ou du service, il figure (25 500 euros) et le texte n'impose pas que le prix unitaire de chaque élément soit détaillé ni que soit mentionné de manière séparée le prix de la main d''uvre et celle du matériel s'agissant d'une opération globale. Par ailleurs, s'agissant des mentions relatives au crédit, ce texte ne les impose plus à la différence de l'ancien texte de l'article L. 121-23 du code de la consommation qui n'est pas applicable à ce contrat. Dès lors l'absence de coût global du crédit dans le bon de commande ou encore la seule mention des mensualités du crédit ne sont pas de nature à entraîner l'annulation de ce bon de commande. Au demeurant, la cour observe que toutes les mentions ont été portées à la connaissance de M. et Mme [C] dans le contrat de crédit.
S'agissant de la date ou du délai dans lequel le professionnel s'engage à livrer le bien ou à exécuter le service, la cour observe que le bon de commande ne mentionne aucun délai et dès lors le bon de commande encourt également l'annulation de ce chef.
M. et Mme [C] se prévalent encore de la violation des dispositions légales relatives au droit de rétractation concernant le point de départ de celui-ci et soutiennent que s'agissant d'un contrat mixte, le délai pour exercer le droit de rétractation de 14 jours, court, non à compter de la signature du bon de commande, mais à compter de la livraison.
Il résulte de la combinaison des articles L. 121-18-1, L. 121-7 et L. 121-18 du code de la consommation en leur rédaction issue de la loi n° 2014-344 du 17 mars 2014 applicable au présent litige, que le contrat doit aussi notamment comprendre à peine de nullité, les informations suivantes mentionnées au I de l'article L. 121-17 rédigées de manière lisible et compréhensible à savoir :
2° Lorsque le droit de rétractation existe, les conditions, le délai et les modalités d'exercice de ce droit ainsi que le formulaire type de rétractation, dont les conditions de présentation et les mentions qu'il contient sont fixées par décret en Conseil d'Etat.
L'article 54 de la loi n° 2014-1545 du 20 décembre 2014 relative à la simplification de la vie des entreprises et portant diverses dispositions de simplification et de clarification du droit et des procédures administratives publiée le 21 décembre 2014 a modifié l'article L. 121-21 du code de la consommation en précisant « le 2° est complété par une phrase ainsi rédigée : « Le consommateur peut exercer son droit de rétractation à compter de la conclusion du contrat ».
Il résulte donc de l'article L. 121-21 du code de la consommation dans sa formulation applicable au litige que le consommateur dispose d'un délai de quatorze jours pour exercer son droit de rétractation d'un contrat conclu à distance, à la suite d'un démarchage téléphonique ou hors établissement, et que ce délai court de la conclusion du contrat pour les contrats de prestation de services et ceux mentionnés à l'article L. 121-16-2, et de la réception du bien par le consommateur ou un tiers, autre que le transporteur, désigné par lui, pour les contrats de vente de biens et les contrats de prestation de services incluant la livraison de biens mais que le consommateur peut aussi exercer son droit de rétractation à compter de la conclusion du contrat.
Il s'agit en l'espèce d'un contrat de vente et d'installation et dès lors le délai de rétractation expirait quatorze jours après la livraison. Or le bon de rétractation mentionne qu'il convient de l'expédier au plus tard le quatorzième jour à partir du jour de la commande ou si ce jour expire normalement un samedi ou un dimanche ou un jour férié ou chômé le premier jour ouvrable suivant, est irrégulier et le bon de commande qui ne précise pas les bonnes conditions de rétractation. Le contrat encourt donc l'annulation de ce chef également.
Partant c'est à bon droit que le premier juge a considéré que le contrat encourait l'annulation sans qu'il soit besoin de démonstration d'un quelconque préjudice.
Il est admis que la nullité formelle résultant du texte précité est une nullité relative à laquelle la partie qui en est bénéficiaire peut renoncer par des actes volontaires explicites dès lors qu'elle avait connaissance des causes de nullité.
Selon l'article 1338 du code civil dans sa version applicable au litige, l'acte de confirmation ou de ratification d'une obligation contre laquelle la loi admet l'action en nullité n'est valable que lorsqu'on y trouve la substance de cette obligation, la mention du motif de l'action en nullité, et l'intention de réparer le vice sur lequel cette action est fondée.
À défaut d'acte de confirmation ou de ratification, il suffit que l'obligation soit exécutée volontairement après l'époque à laquelle l'obligation pouvait être valablement confirmée ou ratifiée. La confirmation, ratification, ou exécution volontaire dans les formes et à l'époque déterminées par la loi, emporte la renonciation aux moyens et exceptions que l'on pouvait opposer contre cet acte, sans préjudice néanmoins du droit des tiers.
Le bon de commande litigieux reproduit le texte intégral des articles L. 111-1, L. 111-2, L. 121-17, L. 121-18, L. 121-18-1, L. 121-18-2, L. 121-19-2, L. 121-21, L. 121-21-5 du code de la consommation.
Pour autant, depuis un arrêt rendu le 24 janvier 2024 (pourvoi n° 22-15.199), la première chambre civile de la Cour de cassation estime désormais que la reproduction même lisible, des dispositions du code de la consommation prescrivant le formalisme applicable à un contrat conclu hors établissement, ne permet pas au consommateur d'avoir une connaissance effective du vice résultant de l'inobservation de ces dispositions et de caractériser la confirmation tacite du contrat, en l'absence de circonstances, qu'il appartient au juge de relever, permettant de justifier d'une telle connaissance et pouvant résulter, en particulier, de l'envoi par le professionnel d'une demande de confirmation, conformément aux dispositions de l'article 1183 du code civil, dans sa rédaction issue l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, applicable, en vertu de l'article 9 de cette ordonnance aux contrats conclus dès son entrée en vigueur.
Aucun acte ultérieur ne révèle en l'espèce la volonté univoque de ratifier le contrat en toute connaissance de cause nonobstant le fait que les acquéreurs aient laissé le vendeur procéder à l'installation des panneaux photovoltaïques, réceptionné l'installation sans émettre de réserve et sollicité de la banque qu'elle verse les fonds au vendeur et qu'ils profitent d'une installation parfaitement fonctionnelle et productive d'électricité.
Partant, la nullité relative encourue ne se trouve pas couverte et c'est à juste titre que le premier juge a prononcé la nullité du contrat de vente sur la base d'une irrégularité formelle et constaté la nullité subséquente du contrat de crédit.
Au regard de ces annulations, la demande de nullité fondée sur un dol présentée en second lieu est devenue sans objet, les époux [C] n'imputant pas à la banque de complicité dans le dol commis par le vendeur. Les demandes de résiliation du contrat de crédit et en paiement formées par la banque sont également sans objet en raison de l'annulation du contrat de crédit.
Sur les conséquences de la nullité des contrats
Sur la vente
Les contrats étant anéantis, il convient de replacer les parties dans leur état antérieur à la conclusion des contrats.
Il convient de dire que M. et [C] devront tenir à disposition de la société AEC devenue LTE prise en la personne de son mandataire liquidateur, l'ensemble des matériels installés à leur domicile pendant un délai de trois mois à compter de la notification de l'arrêt et de dire que passé ce délai, si le liquidateur n'a pas émis la volonté de reprendre les matériels, ils pourront en disposer comme ils l'entendent et le cas échéant les conserver.
Sur le contrat de crédit et la responsabilité de la société Domofinance
Il est admis que l'annulation d'un contrat de crédit affecté, en conséquence de celle du contrat constatant la vente ou la prestation de services qu'il finance, emporte la remise en l'état antérieur. Elle emporte donc pour la banque l'obligation de rembourser les sommes perçues.
Il y a donc lieu de confirmer le jugement en ce qu'il a considéré que la société Domofinance devait rembourser aux époux [C] les sommes perçues en exécution du contrat de crédit. Le jugement n'a pas chiffré les sommes remboursées. La société Domofinance indique que les emprunteurs ont réglé une somme de 25 943,75 euros correspondant aux échéances du 14 juin 2016 au 5 novembre 2023. M. et Mme [C] prétendent quant à eux avoir réglé la somme totale de 26 943,75 euros.
L'historique de compte communiqué en pièce 5 par l'appelante et non contesté permet d'attester du déblocage des fonds au 14 juin 2016 puis du versement des échéances à compter du 5 janvier 2017 jusqu'à l'échéance du 5 novembre 2023 incluse soit 327,87 + 261,20 euros x 82 =21 746,27 euros outre une somme de 4 200 euros versée le 16 mars 2017 soit un total de 25 946,27 euros.
La société Domofinance doit donc être condamnée à rembourser cette sommes aux époux [C].
L'annulation du contrat emporte aussi pour l'emprunteur l'obligation de restituer au prêteur le capital prêté. Cependant, le prêteur qui a versé les fonds sans s'être assuré, comme il y était tenu, de la régularité formelle du contrat principal ou de sa complète exécution, peut être privé en tout ou partie de sa créance de restitution, dès lors que l'emprunteur justifie avoir subi un préjudice en lien avec cette faute.
Les demandes de M. et Mme [C] tendant à voir priver la banque de son droit à restitution du capital ou de dommages et intérêts sont donc parfaitement recevables.
Les intimés reprochent à la banque d'avoir commis une faute en finançant un contrat nul et soutiennent que si la banque avait fait preuve de diligence, ils ne se seraient pas retrouvés dans une situation financière et personnelle alarmante à rembourser un crédit excessif sur la base d'un contrat qui ne respecte pas les exigences du code de la consommation.
Si la banque n'est tenue de déceler que les irrégularités flagrantes du bon de commande et s'il doit être constaté que la marque des matériels vendus n'a été retenue par la Cour de cassation comme une qualité essentielle déterminante du consentement de l'acquéreur que récemment s'agissant en l'espèce d'un contrat remontant à 2016 de sorte qu'il ne peut donc être reproché au prêteur de faute ou de manque de vigilance à ce titre au regard de jurisprudences évolutives en la matière, il reste que l'absence de délai de livraison ne pouvait lui échapper non plus le fait que le contrat mentionnait un délai de rétractation erroné.
La banque a donc bien commis une faute.
S'agissant du préjudice, s'il est exact que la nullité doit permettre une remise en état antérieur et que la liquidation du vendeur va priver M. et Mme [C] de la possibilité d'une restitution du prix de vente, il reste qu'ils ne paieront pas non plus les intérêts du crédit également annulé, qu'ils ont déjà tiré des revenus de cette installation pendant 8 ans, qu'ils se gardent bien de produire toutes leurs factures, ne versant aux débats que les trois premières qui font apparaître un revenu de 926,09 euros, de 928,61 euros et de 934,66 euros soit un revenu moyen de 929,78 euros nécessairement sous-évalué faute de quoi ils auraient produit toutes leurs factures de sorte qu'il n'y a pas lieu de déduire les factures de location du compteur, qu'ils ont été admis à ne plus devoir restituer le matériel passé un délai de 3 mois à compter de la signification de l'arrêt ce qui implique en ce cas qu'ils vont conserver un matériel fonctionnel dont la valeur n'est pas nulle et dont la durée de vie estimée à 25 ans va leur permettre de percevoir des revenus. Ils ont sur 8 ans d'ores et déjà bénéficié d'un revenu d'au moins 7 438,24 euros.
Dès lors il convient de considérer que la faute de la banque ne leur cause qu'un préjudice de 18 061,76 euros (25 500 ' 7 438,24) si le mandataire vient effectivement procéder à la dépose et ne leur en cause aucun si tel n'est pas le cas. Il n'y a donc lieu de ne prévoir la privation de la créance de restitution de la banque dans cette mesure que passé le délai octroyé au liquidateur pour la reprise et à défaut pour celui-ci d'y avoir procédé, les modalités étant prévues au dispositif. Le jugement doit donc être infirmé en ce qu'il a privé la banque de la totalité de sa créance de restitution. La compensation des créances réciproques doit être ordonnée et il doit être rappelé que le présent arrêt infirmatif constitue le titre permettant la restitution des sommes versées au titre de l'exécution provisoire du jugement infirmé.
En revanche, la preuve n'est nullement démontrée d'une légèreté blâmable de M. et Mme [C] de nature à limiter leur préjudice.
La demande de déchéance du droit aux intérêts contractuels n'a pas lieu d'être, les contrats étant annulés ce qui de fait exonère l'emprunteur des intérêts du crédit.
Les époux [C] soutiennent encore avoir été victimes de man'uvres frauduleuses et avoir subi de ce fait un important préjudice moral. Ils font également valoir avoir dû supporter une installation aussi inutile qu'inesthétique, le bruit permanent d'un onduleur électrique et le temps perdu en démarches administratives, ainsi que l'angoisse d'avoir à supporter de très longues années, le remboursement d'un crédit ruineux et le sentiment de s'être fait escroquer.
Toutefois ils n'imputent aucune man'uvre frauduleuse à la société Domofinance dont ils ne soutiennent pas qu'elle aurait été complice d'un dol commis par le vendeur. Ils disposent d'une installation fonctionnelle qui produit de l'électricité qu'ils revendent. La banque ne saurait supporter le préjudice moral invoqué à l'origine duquel elle n'est pas, la seule faute qui lui est reprochée étant de ne pas avoir décelé les irrégularités formelles du bon de commande. Contrairement à ce qu'ils affirment ils ne démontrent aucune répercussion psychologique.
Ils ne démontrent pas plus un important préjudice économique et un trouble de jouissance imputables à la société Domofinance au-delà de l'annulation des contrats déjà obtenue.
Le jugement doit donc être confirmé en ce qu'il a rejeté les demandes de dommages et intérêts formées par M. et Mme [C] et la demande au titre des frais de désinstallation, plus soutenue en appel.
Sur les autres demandes
Le jugement doit être confirmé en ses dispositions relatives aux dépens et quant à celles relatives aux frais irrépétibles, les contrats ayant été annulés.
Les dépens d'appel doivent être mis à la charge de la banque qui succombe en sa demande d'infirmation des annulations. Il apparaît en outre équitable de lui faire supporter une partie des frais irrépétibles de M. et Mme [C] à hauteur de la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Statuant par arrêt rendu par défaut,
Rejette les fins de non-recevoir ;
Confirme le jugement en ce qu'il a :
- déclaré recevables les demandes de M. [P] [C] et de Mme [I] [V] épouse [C],
- déclaré recevables les demandes à l'encontre de Maître [X] [B] en sa qualité de mandataire liquidateur de la société LTE,
- prononcé la nullité du contrat de vente et constaté la nullité subséquente du contrat de crédit,
- condamné la société Domofinance à restituer aux emprunteurs les sommes versées,
- rejeté les demandes de dommages et intérêts formées par M. et Mme [C],
- rejeté la demande au titre des frais de désinstallation,
- condamné la société Domofinance à payer à M. [P] [C] et Mme [I] [V] épouse [C] une somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné la société Domofinance aux dépens
- rappelé que le jugement était exécutoire de droit,
L'infirme pour le surplus et statuant à nouveau et y ajoutant,
Ordonne à M. [P] [C] et Mme [I] [V] épouse [C] de tenir à disposition de la société AEC devenue LTE prise en la personne de son mandataire liquidateur Maître [X] [B] l'ensemble des matériels installés à leur domicile pendant un délai de trois mois à compter de la notification de l'arrêt et de dire que passé ce délai, si le liquidateur n'a pas émis la volonté de reprendre les matériels ils pourront en disposer comme ils l'entendent et les conserver ;
Condamne la société Domofinance à rembourser à M. [P] [C] et Mme [I] [V] épouse [C] les mensualités réglées au titre du crédit soit la somme de 25 946,27 euros correspondant aux échéances du 5 janvier 2017 au 5 novembre 2023 incluse ;
Fixe le préjudice de M. [P] [C] et Mme [I] [V] épouse [C] en lien avec la faute de la banque à la somme de 18 061,76 euros si le mandataire vient effectivement procéder à la dépose dans ce délai, et dit qu'à défaut ils ne subissent pas ce préjudice en lien avec cette faute ;
En conséquence, condamne M. [P] [C] et Mme [I] [V] épouse [C] solidairement passé un délai de trois mois à compter de la signification du présent arrêt, à rembourser à la société Domofinance la somme de 25 500 euros sauf à justifier de la reprise effective du matériel par la société AEC devenue LTE prise en la personne de son mandataire liquidateur dans les trois mois de la signification de l'arrêt et réduit le montant de cette condamnation à 18 061,76 euros s'ils justifient que cette reprise a effectivement eu lieu dans le délai imparti ;
Ordonne la compensation des créances réciproques ;
Condamne la société Domofinance à payer à M. [P] [C] et Mme [I] [V] épouse [C] la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne la société Domofinance aux dépens d'appel ;
Rejette toute demande plus ample ou contraire.