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Décisions

CA Paris, Pôle 4 ch. 9 a, 15 mai 2025, n° 24/01075

PARIS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

X

Défendeur :

Asi Automobile (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Durand

Conseillers :

Mme Arbellot, Mme Bussiere

Avocat :

Me Coyola

Trib. prox. Lagny-sur-Marne, du 6 févr. …

6 février 2023

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Selon bon de commande en date du 18 octobre 2021, M. [M] [X] a acquis de la société ASI Automobile, un véhicule automobile d'occasion de marque Peugeot modèle 5008 immatriculé [Immatriculation 3] au prix de 5 000 euros.

Se plaignant de dysfonctionnements sur le véhicule un mois après la vente, M. [X] a fait procéder à plusieurs réparations et a sollicité du vendeur, en vain, le remboursement des sommes engagées.

Par acte délivré le 14 novembre 2022, M. [X] a fait assigner la société ASI Automobile devant le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité de Lagny-sur-Marne en remboursement des travaux de remise en état du véhicule, en indemnisation de son préjudice financier pour 60 euros, de son préjudice de jouissance pour 2 700 euros et de son préjudice moral pour 500 euros.

Suivant jugement réputé contradictoire rendu le 6 février 2023, le juge l'a débouté de l'intégralité de ses demandes et l'a condamné aux dépens de l'instance.

Aux termes de ses motifs fondés sur l'article 1641 du code civil, le juge a relevé que le véhicule vendu avait été mis en circulation en 2011 et affichait 216 919 kilomètres au compteur, que M. [X] avait parcouru normalement et sans immobilisation plus de 2 340 kilomètres en deux mois soit 39 kilomètres par jour et qu'il n'était pas anormal que des réparations doivent être effectués pour certaines coûteuses, s'agissant d'un véhicule ancien ayant parcouru de nombreux kilomètres, ce qui ne constituait pas un vice rendant le véhicule impropre à son usage. Il a noté que ce n'était qu'en septembre 2022, soit 11 mois après la vente, que le kit d'embrayage et le liquide de frein avaient dû être changés sans qu'il ne soit démontré que l'acquéreur ait dû entre-temps diminuer l'usage du véhicule.

Il a considéré que la preuve n'était pas non plus rapportée d'un défaut de conformité du bien vendu sur le fondement des articles L. 217-4, L. 217-5 et L. 217-10 du code de la consommation.

La société ASI Automobile a été placée en liquidation judiciaire par jugement du tribunal de commerce de Meaux du 13 novembre 2023 et la SCP Philippe Angle-Denis Hazane-Sylvie Duval désignée en tant que liquidateur judiciaire.

Par déclaration formée par voie électronique le 28 décembre 2023, M. [X] a interjeté appel de la décision.

Par conclusions signifiées par RPVA le 27 mars 2024, M. [X] demande à la cour d'appel :

- de le dire recevable et bien fondé en son appel,

- de réformer la décision dont appel,

- statuant à nouveau,

- à titre principal, de juger que la société ASI Automobile est tenue à la garantie des vices cachés s'exerçant lors de la vente du véhicule Peugeot 5008 immatriculé [Immatriculation 3],

- en conséquence, de la condamner au paiement de la somme de 1 250 euros en diminution du prix de vente,

- de juger que cette société est responsable des désordres affectant le véhicule au titre de ses garanties légales,

- de la condamner à réparer les conséquences dommageables de ses manquements en lui réglant la somme en principal de 8 326,40 euros TTC en réparation de son entier préjudice calculé de la manière suivante :

' 5 102,40 euros TTC en réparation de son préjudice matériel lié aux travaux de remise en état du véhicule,

' 60 euros TTC en réparation de son préjudice financier lié aux frais d'intérêts du crédit bancaire souscrit pour financer les réparations,

' 2 700 euros en réparation du préjudice de jouissance lié à l'absence d'utilisation de son véhicule durant 6 mois, soit 15 euros par jour,

' 500 euros en réparation de son préjudice moral,

avec intérêts au taux légal à compter du prononcé de la décision à intervenir,

- de dire n'y avoir lieu à écarter l'exécution provisoire de droit du jugement à intervenir,

- de condamner la société ASI Automobile au paiement de la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'alinéa 2 de l'article 700 du code de procédure civile et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 sur l'aide juridictionnelle à Maître Claire Coyola sous réserve que cette dernière renonce au bénéfice de l'aide juridictionnelle, ce qu'elle s'engage à faire,

- de la condamner en tous les dépens de première instance et d'appel.

À l'appui de ses prétentions, il expose avoir été dans l'obligation d'effectuer des réparations importantes sur le véhicule à savoir le remplacement des disques et des plaquettes de freins le 24 décembre 2021, le remplacement de la batterie le 11 mars 2022, le remplacement des pneumatiques le 11 mars 2022, soit moins de 5 000 kilomètres après l'achat puis le remplacement du kit de distribution le 14 mars 2022 et la purge et le remplacement du liquide de frein le 23 mars 2022. Il indique que ces réparations ont été faites moins de 6 mois après l'acquisition du véhicule pour un montant de 5 102,40 euros TTC. Il affirme avoir dû entreprendre encore de nouveaux travaux de réparation au mois de septembre 2022 en changeant l'embrayage pour 2 500 euros.

Il soutient qu'il apparaît très clairement des circonstances de temps et de lieu que les désordres affectant le véhicule étaient antérieurs à la vente, que ceux-ci sont intervenus moins de 6 mois après la vente et qu'il s'agit de défauts majeurs qui se sont révélés dans les semaines qui ont suivi l'établissement du contrôle technique du 19 octobre 2021 présenté au moment de la vente de sorte qu'il est fort étonnant qu'aucune mention spécifique d'alerte n'ait été mentionnée par les professionnels de l'automobile, tant le technicien que le vendeur. Il ajoute que le garage n'a jamais daigné lui transmettre les factures d'entretien du véhicule.

Il estime être bien fondé en ses demandes en ce qu'il apparaît très nettement qu'il ne pouvait raisonnablement avoir connaissance des avaries qui affectaient le véhicule dont il se portait acquéreur, lesquelles ne pouvaient être ignorées de la société ASI Automobile, vendeur professionnel. Il estime être bien fondé sur le fondement de l'article 1644 du code civil, à demander la diminution du prix d'un quart, soit de 1 250 euros et réclame l'indemnisation de ses préjudices sur le fondement de l'article 1645 du code civil s'agissant d'un vendeur professionnel.

Sur le préjudice financier, il indique avoir contracté un emprunt pour financer le véhicule et réclame le paiement des intérêts soit 60 euros. Il demande la réparation d'un préjudice de jouissance pour l'absence d'utilisation de son véhicule durant 6 mois, soit 15 euros par jour. Il ajoute avoir subi des retentissements importants sur son équilibre psychique et moral du fait de l'ensemble des désordres causés par l'acquisition de son véhicule (réparations diverses à effectuer, coûts liés aux réparations, immobilisation du véhicule, procédure judiciaire pour faire reconnaître ses droits) et demande l'indemnisation de son préjudice moral à hauteur de 500 euros.

La société ASI Automobile représentée par son liquidateur à qui la déclaration d'appel a été signifiée par acte remis le 8 mars 2024 à personne morale , n'a pas constitué avocat. Elle a reçu signification des conclusions de l'appelant par acte délivré le 2 avril 2024 à personne morale.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 28 janvier 2025 et l'affaire appelée à l'audience du 5 mars 2025 pour être mise en délibéré par mise à disposition au greffe le 15 mai 2025.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Selon l'article 472 du code de procédure civile, lorsque le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond, le juge ne fait droit à la demande que s'il l'estime régulière, recevable et bien fondée.

Il résulte du dernier alinéa de l'article 954 du code de procédure civile que la partie qui ne conclut pas ou qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement est réputée s'en approprier les motifs.

Il doit être constaté que M. [X] ne fonde plus ses demandes sur l'existence d'un défaut de conformité du bien acquis mais uniquement sur l'existence d'un vice caché puisque s'il cite l'article L. 217-7 du code de la consommation dans ses écritures, il ne développe aucun moyen à ce titre.

Sur l'existence d'un vice caché

Aux termes de l'article 9 du code de procédure civile, il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi, les faits nécessaires au succès de sa prétention.

Il résulte des dispositions de l'article 1641 du code civil que le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage que l'acheteur ne l'aurait pas acquise, ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, s'il les avait connus.

Pour que la responsabilité du vendeur puisse être engagée, trois critères cumulatifs doivent être réunis : un vice caché et antérieur à la vente et un véhicule impropre à sa destination.

Il résulte des articles 1645 et 1646 du code civil que le vendeur qui avait lui-même connaissance du vice doit des dommages et intérêts à l'acheteur tandis que celui qui les ignorait n'est tenu outre la restitution du prix que des frais occasionnés par la vente mais il est désormais acquis que le vendeur professionnel est présumé les avoir connus.

M. [X] justifie de ce que la société par actions simplifiée ASI Automobile était inscrite au registre du commerce et des sociétés du tribunal de commerce de Meaux sous le numéro 881 415 293 pour une activité d'entretien et de réparation de véhicules automobiles, d'achat, de vente, de revente, de location et de maintenance de tout véhicule. Elle avait donc la qualité de vendeur professionnel.

Il démontre que le véhicule Peugeot 2008 d'occasion immatriculé [Immatriculation 3] a été acquis de cette société suivant bon de commande du 18 octobre 2021 au prix de 5 000 euros, somme intégralement versée par suite de la finalisation de la cession le 22 octobre 2021.

Il est établi au vu des pièces produites, que ce véhicule a été mis en circulation le 30 décembre 2011 et qu'il avait déjà parcouru 216 919 kilomètres au moment de la vente. L'acquéreur reconnaît avoir pris connaissance du contrôle technique réalisé le 19 octobre 2021 par un centre de contrôle technique lequel relève une seule défaillance mineure relative à une anomalie du dispositif antipollution sans dysfonctionnement important.

M. [X] démontre avoir rencontré des difficultés avec le véhicule dès le 22 novembre 2021 date à laquelle il a adressé deux courriers à la société de vente pour lui réclamer en vain la prise en charge des réparations liées au filtre à particule et au freinage en raison d'une garantie de 3 mois affichée par le vendeur et à défaut, pour lui demander un échange de véhicules.

L'acquéreur communique aux débats diverses factures attestant de la réalisation des travaux suivants sur le véhicule :

- remplacement du filtre à particule, fuite d'huile, remplacement des disques et des plaquettes de frein le 24 décembre 2021 (facture société Metin Services automobiles -Peugeot pour 2 217,55 euros)

- remplacement de la batterie, remplacement de pneumatiques, le 11 mars 2022 (facture Norauto pour 568,25 euros),

- remplacement du kit de distribution, pompe à eau, courroies d'accessoires, diagnostic eco contrôle le 14 mars 2022 (facture Norauto de 684,90 euros),

- purge et remplacement de liquide de frein le 23 mars 2022 (facture Norauto pour 61,95 euros),

- changement de l'embrayage le 29 septembre 2022 (facture Midas pour 2 500 euros).

Il est acquis que les travaux ont tous été réalisés dans les 5 mois de la vente à l'exception du changement de l'embrayage et alors que la première facture du 24 décembre 2021 permet de constater que M. [X] avait alors parcouru 2 348 kilomètres en deux mois soit environ 39 kilomètres par jour, en ce compris les week ends, ce qui représente un usage assez important du véhicule sur une moyenne de 14 000 kilomètres par an. Les travaux réalisés sont tous liés à une usure normale d'un véhicule de 10 ans, ayant déjà parcouru de nombreux kilomètres, et rien ne démontre que ces désordres soient antérieurs à la vente, mis à part le dysfonctionnement du système anti pollution qui était connu de M. [X], ce défaut mineur ne l'ayant pas empêché de finaliser son acquisition au prix de 5 000 euros. Il n'est pas démontré d'immobilisation du véhicule au-delà d'une durée de quelques jours le temps que les réparations ne soient finalisées ni que les désordres aient pu rendre le véhicule impropre à toute utilisation. Il doit être relevé également comme le fait le premier juge que ce n'est qu'au mois de septembre 2022 soit 11 mois après la vente que le kit d'embrayage et le liquide de frein ont dû être remplacés sans qu'il soit démontré que l'acquéreur ait dû diminuer, entre-temps, l'usage qu'il faisait de son véhicule.

Il résulte de ce qui précède que M. [X] ne démontre pas l'existence d'un vice caché au sens de l'article 1641 du code civil et que c'est à juste titre que le premier juge l'a débouté de l'intégralité de ses demandes et l'a condamné aux dépens.

M. [X] succombant, devra supporter les dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant par arrêt réputé contradictoire rendu en dernier ressort,

Confirme le jugement ;

Y ajoutant,

Condamne M. [M] [X] aux dépens d'appel ;

Rejette toute demande plus ample ou contraire.

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