CA Rouen, ch. civ. et com., 15 mai 2025, n° 24/00014
ROUEN
Arrêt
Infirmation partielle
PARTIES
Demandeur :
Resto Compagny (SAS)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Vannier
Vice-président :
M. Urbano
Conseiller :
Mme Menard-Gogibu
Avocats :
Me Merabet, Me Guiheneuf
EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE
Par acte sous seing privé du 11 mars 2014, Monsieur [S] [G] et Madame [W] [M] épouse [G], bailleurs, ont consenti un bail commercial à la société Le Four à Bois, preneur, d'un local commercial composé d'une pièce principale et d'une cave en sous-sol situés [Adresse 3] à [Localité 4] et ceci moyennant un loyer annuel de 4 320 euros et une provision mensuelle de 20 euros pour la taxe foncière.
La SAS Resto Compagny exerce une activité de restauration rapide de type pizzeria.
Par acte sous seing privé du 30 août 2017, la société Le Four à Bois a cédé à la SAS Resto Compagny son fonds de commerce de restauration rapide sur place, à emporter ou en livraison, et le droit au bail.
Par acte d'huissier du 14 décembre 2021, Monsieur et Madame [G] ont fait délivrer à la SAS Resto Compagny un commandement visant la clause résolutoire lui enjoignant de régler la somme de 7 260,60 euros.
Par acte d'huissier de justice du 24 janvier 2022, la SAS Resto Compagny a fait assigner son bailleur devant le tribunal judiciaire de Rouen aux fins d'obtenir l'inopposabilité du commandement de payer.
Par jugement du 2 novembre 2023, le tribunal judiciaire de Rouen a :
- écarté des débats les conclusions de la société Resto Compagny notifiées le 21 août 2023 ;
- rejeté la demande de la société Resto Compagny en inopposabilité du commandement du 14 décembre 2021 ;
- rejeté la demande de la société Resto Compagny tendant à ce que Monsieur [S] [G] et Madame [M] épouse [G] soient condamnés à lui payer une somme de 10 000 euros ;
- condamné la société Resto Compagny à payer à Monsieur [S] [G] et Madame [M] épouse [G] la somme de 2 760 euros avec intérêts au taux légal à compter de ce jour ;
- accordé à la société Resto Compagny un délai de grâce pour se libérer et dit qu'ils devront s'en acquitter par 12 paiements mensuels successifs d'un montant de 230 euros, en sus du loyer et des charges en cours, payables le 5 de chaque mois, le premier règlement devant intervenir le 5 du mois suivant la signification de la présente décision ;
- dit qu'à défaut de respecter une seule de ces mensualités, les débiteurs perdront de plein droit le bénéfice des délais de paiement ;
- rappelé que, pendant le cours du délai accordé, les effets de la clause résolutoire du bail conclu entre les parties sont suspendus et que, si les modalités du paiement précité sont intégralement respectées par la défenderesse, la clause résolutoire sera réputée n'avoir jamais joué ;
- dit qu'à défaut de paiement d'une seule mensualité ou du loyer courant, la clause résolutoire reprendra son plein effet ;
En tant que de besoin, dans l'hypothèse du non- respect des délais de paiement :
- constaté l'acquisition de plein droit de la clause résolutoire insérée au bail du 11 mars 2014 liant les parties, à compter du 14 janvier 2022 et dit que la société Resto Compagny devra quitter les lieux et rendre libre de toute occupation les lieux loués sis [Adresse 3] à [Localité 4], en satisfaisant aux obligations des locataires sortants, notamment par la remise des clefs ;
- autorisé en tant que de besoin le concours d'un serrurier voire de la force publique à l'huissier requis pour procéder à l'exécution de la mesure.
- condamné dans ce cas, la société Resto Compagny à payer à Monsieur [S] [G] et Madame [M] épouse [G] une indemnité mensuelle d'occupation provisionnelle égale au montant du loyer et des charges normalement dus en cas de continuation du bail à compter du 15 décembre 2021 et jusqu'à la date de son départ effectif ;
- condamné la société Resto Compagny aux entiers dépens, en ce compris les frais du commandement de payer du 14 décembre 2021 ;
- admis les avocats qui en ont fait la demande et qui peuvent y prétendre au bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;
- condamné la société Resto Compagny à payer à Monsieur [S] [G] et Madame [M] épouse [G] la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
- rejeté les demandes de Monsieur [S] [G] et Madame [M] épouse [G] formulées au titre des articles 699 et 700 du code de procédure civile ;
- rejeté les autres demandes, les demandes contraires ou plus amples ;
- rappelé que la présente décision est de droit exécutoire à titre provisoire.
La SAS Resto Compagny a interjeté appel de ce jugement par déclaration du 30 décembre 2023.
EXPOSE DES PRETENTIONS
Vu les conclusions du 31 janvier 2025 auxquelles il est renvoyé pour exposé des moyens et prétentions de la SAS Resto Compagny qui demande à la Cour de :
- juger l'appel recevable
- rejeter les demandes des consorts [G] tendant à voir déclarer irrecevables certaines des demandes des concluantes au motif qu'il s'agirait de demandes nouvelles produites en cause d'appel ;
- réformer le jugement dont appel en ce qu'il a écarté des débats les conclusions de Resto Compagny notifiées le 21 août 2023 ;
- réformer le jugement dont appel en ce qu'il a rejeté la demande en inopposabilité du commandement du 14 décembre 2021 ;
- réformer le jugement dont appel en ce qu'il a rejeté la demande de condamnation des consorts [G] au paiement d'une somme de 10 000 euros de dommages et intérêts ;
- réformer le jugement en ce qu'il a condamné la société Resto Compagny à payer à Monsieur [S] [G] et Madame [M] épouse [G] la somme de 2 760 euros avec intérêts au taux légal à compter de ce jour ;
- réformer le jugement en ce qu'il a accordé à la société Resto Compagny un délai de grâce pour se libérer et dit qu'ils devront s'en acquitter par 12 paiements mensuels successifs d'un montant de 230 euros, en sus du loyer et des charges en cours, payables le 5 de chaque mois, le premier règlement devant intervenir le 5 du mois suivant la signification de la présente décision ;
- dire qu'à défaut de respecter une seule de ces mensualités, les débiteurs perdront de plein droit le bénéfice des délais de paiement ;
- rappeler que, pendant le cours du délai accordé, les effets de la clause résolutoire du bail conclu entre les parties sont suspendus et que, si les modalités du paiement précipité sont intégralement respectées par la défenderesse, la clause résolutoire sera imputée n'avoir jamais joué ;
- dire qu'à défaut de paiement d'une seule mensualité ou du loyer courant, la clause résolutoire reprendra son plein effet ;
- réformer le jugement en ce qu'il rappelait que, pendant le cours du délai accordé, les effets de la clause résolutoire du bail conclu entre les parties sont suspendus et que, si les modalités du paiement précipité sont intégralement respectées par la défenderesse, la clause résolutoire sera imputée n'avoir jamais joué ;
- dire qu'à défaut de paiement d'une seule mensualité ou du loyer courant, la clause résolutoire reprendra son plein effet ;
En tant que de besoin, dans l'hypothèse du non-respect des délais de paiement :
- réformer le jugement en ce qu'il a constaté en tant que de besoin, dans l'hypothèse du non-respect des délais de paiement, l'acquisition de plein droit de la clause résolutoire insérée au bail du 11 mars 2024 liant les parties, à compter du 14 janvier 2022 et dit que la société Resto Compagny devra quitter les lieux et rendre libre de toute occupation les lieux loués sis [Adresse 3] à [Localité 4], en satisfaisant aux obligations des locataires sortants, notamment par la remise des clefs ;
- autoriser en tant que besoin le concours d'un serrurier voire de la force publique à l'huissier requis pour procéder l'exécution de la mesure ;
- condamner dans ce cas, la société Resto Compagny à payer à Monsieur [S] [G] et Madame [M] épouse [G] une indemnité mensuelle d'occupation provisionnelle égale au montant du loyer et des charges normalement dus en cas de continuation du bail à compter du 15 décembre 2021 et jusqu'à la date de son départ effectif ;
- réformer le jugement dont appel en ce qu'il a condamné la société Resto Compagny aux entiers dépens, en ce compris les frais du commandement de payer du 14 décembre 2021, ainsi qu'au paiement d'une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
- réformer le jugement en ce qu'il a rejeté les autres demandes, les demandes contraires ou plus amples.
Et, statuant à nouveau :
A titre principal :
- déclarer inopposable le commandement du 14 décembre 2021
En conséquence,
- dire que les effets de la clause résolutoire actionnée par le commandement de payer du 14 décembre 2021 seront neutralisés et ne produiront aucun effet ;
- confirmer le jugement en ce qu'il estimait le forfait électricité de 80 euros par mois inopposable ;
- dire inopposable la hausse des loyers commerciaux présente au commandement de payer du 14 décembre 2021 ;
- fixer la dette locative au jour du jugement dont appel à la somme de 5 400 euros ;
- réduire les loyers exigibles depuis le 1er septembre 2017 et jusqu'au 1er mars 2022 d'une somme de 50 % au regard des manquements du bailleur à l'obligation de délivrance,
- condamner les bailleurs au remboursement d'une somme de 9 720 euros de loyers au titre du trop-perçu généré par la réduction des loyers ;
- condamner les bailleurs au paiement d'une somme de 10 000 euros de dommages et intérêts au titre de leurs inexécutions contractuelles ;
- condamner le bailleur à faire intervenir le Consuel en vue d'obtenir une attestation de conformité de l'installation électrique, cela sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter de la signification de l'arrêt à intervenir.
Subsidiairement :
- juger que la SAS Resto Compagny pourra se libérer de son obligation de payer le montant de la somme représentant les loyers et les charges dues au jour de l'arrêt à intervenir dans un délai de 18 mois à compter de sa signification ;
- dire que cette somme s'appliquera sur le solde restant à régler en deniers ou quittance déduction faite des règlements de 230 euros opérés mensuellement par la SAS Resto Compagny dans le prolongement du jugement dont appel ;
- dire et juger que durant les délais accordés les effets de la clause résolutoire seront suspendus ;
- dire et juger qu'une fois les délais respectés, les effets de la clause résolutoire seront anéantis ;
En tout état de cause :
- débouter Monsieur [G] [S], et Madame [M] [W] de leur appel incident et les débouter notamment de leurs demandes de condamnation au paiement d'une somme de 7 260 euros en vertu du commandement litigieux et au paiement d'une indemnité d'occupation dans le prolongement ;
- débouter Monsieur [G] [S], et Madame [M] [W] de leurs demandes de condamnation au paiement d'un forfait électrique à hauteur de 80 euros par mois ;
- débouter Monsieur [G] [S], et Madame [M] [W] de leurs demandes de rejet d'octroi de délais de paiement pour s'acquitter du solde des loyers et de leurs demandes de rejet de suspension des effets de la clause résolutoire ;
- débouter Monsieur [G] [S], et Madame [M] [W] de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions produites en cause d'appel ;
- condamner Monsieur [G] [S], et Madame [M] [W], au paiement d'une somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamner Monsieur [G] [S], et Madame [M] [W] au paiement des dépens.
Vu les conclusions du 3 février 2025 auxquelles il est renvoyé pour exposé des moyens et prétentions de Monsieur [S] [G] et Madame [W] [M] épouse [G] qui demandent à la cour de :
- déclarer la société Resto Compagny mal fondée en son appel du jugement rendu le 2 novembre 2023 RG n° 22/01286 ;
- déclarer les demandes de la société Resto Compagny irrecevables au titre des demandes nouvelles en cause d'appel, concernant les demandes suivantes :
- irrégularité de la hausse des loyers ;
- la réduction des loyers (50 %) et la suspension des effets de la clause résolutoire et l'octroi d'un délai pour s'acquitter du solde du paiement des loyers.
- sur la condamnation du bailleur à obtenir une attestation de conformité du Consuel.
- déclarer les époux [G] bien fondés dans leur appel incident ;
Y faisant droit :
- infirmer le jugement rendu le 2 novembre 2023 RG n°22/01286 en ce qu'il a :
- condamné la société Resto Compagny à payer à Monsieur [S] [G] et Madame [M] épouse [G] la somme de 2 760 euros avec intérêts au taux légal à compter de ce jour ;
- accordé à la société Resto Compagny un délai de grâce pour se libérer et dit qu'ils devront s'en acquitter par 12 paiements mensuels successifs d'un montant de 230 euros, en sus du loyer et des charges en cours, payables le 5 de chaque mois, le premier règlement devant intervenir le 5 du mois suivant la signification de la présente décision ;
- dit qu'à défaut de respecter une seule de ces mensualités, les débiteurs perdront de plein droit le bénéfice des délais de paiement ;
- rappelé que, pendant le cours du délai accordé, les effets de la clause résolutoire du bail conclu entre les parties sont suspendus et que, si les modalités du paiement précité sont intégralement respectées par Ia défenderesse, la clause résolutoire sera réputée n'avoir jamais joué ;
- dit qu'à défaut de paiement d'une seule mensualité ou du loyer courant, la clause résolutoire reprendra son plein effet. »
Statuant à nouveau de ces chefs :
- constater la résiliation du bail commercial en date du 11 mars 2014, Monsieur et Madame [G] ont donné bail commercial à la société Le Four à Bois d'un ensemble immobilier situé à [Localité 4], [Adresse 3] aux torts et griefs de la société Resto Compagny ;
- dire que dans les 8 jours de la décision à intervenir, la société Resto Compagny devra vider de personne, de ses biens et de tout occupant de leur chef les lieux loués situés à [Localité 4], [Adresse 3] et restituer les clés afférentes aux lieux ;
- dire qu'à défaut par la SAS Resto Compagny d'obtempérer, Monsieur et Madame [G] seront autorisés à procéder à leur expulsion par tous voies et moyens de droit et notamment avec le concours de la force publique ;
- condamner la société Resto Compagny à payer à Monsieur et Madame [G] la somme provisionnelle de 5 721,60 euros à valoir sur le montant des loyers et indemnités d'occupation des lieux afférents à fin décembre 2021 et restant à parfaire pour les mois suivants et ce jusqu'à la décision à intervenir avec intérêts aux taux légal à compter du 14 décembre 2021 date du commandement de payer ;
- constater que le forfait électrique de 80 euros par mois est opposable à la société Resto Compagny ;
- condamner la société Resto Compagny à la somme de 7 004,57 euros, sauf à parfaire, au titre de sa consommation électrique depuis le mois de janvier 2022, jusqu'au départ effectif de la société Resto Compagny ou la pose d'un compteur électrique individuel ;
- dire opposable à la société Resto Compagny la hausse des loyers commerciaux présente dans le commandement de payer du 14 décembre 2021 ;
- condamner la société Resto Compagny à payer à Monsieur et Madame [G] une indemnité d'occupation des lieux mensuelle égale au montant du loyer et des charges à compter du 15 décembre 2021 jusqu'à la libération effective des lieux au titre de l'occupation de l'ensemble immobilier situé [Adresse 3] à [Localité 4] ;
- débouter la société Resto Compagny de sa demande de délai de grâce pour se libérer et dit qu'ils devront s'en acquitter par 12 paiements mensuels successifs d'un montant de 230 euros, en sus du loyer et des charges en cours, payables le 5 de chaque mois, le premier règlement devant intervenir le 5 du mois suivant la signification de la présente décision ;
- débouter la société Resto Compagny de sa demande de suspension des effets de la clause résolutoire ;
Pour le surplus :
- confirmer le jugement rendu le 2 novembre 2023 RG n°22/01286 ;
En tout état de cause :
- débouter la société Resto Compagny de sa demande de diminution du loyer ;
- débouter la société Resto Compagny de sa demande de remboursement de loyer ;
- débouter la société Resto Compagny de de toutes ses demandes, fins et prétentions contraires ;
- condamner la société Resto Compagny à payer aux époux [G] la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en cause d'appel.
- condamner la société Resto Compagny aux entiers dépens.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 4 février 2025.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur le rejet des conclusions prononcé par le premier juge :
Dans le dispositif de ses conclusions, l'appelante demande que le jugement entrepris soit réformé en ce qu'il a écarté des débats ses conclusions notifiées le 21 août 2023 au motif qu'elle était parfaitement en droit de conclure avant la date de clôture sans voir écarter ses conclusions et que l'argument d'une notification tardive ne suffit pas à écarter des écritures. Les époux [G] font valoir que les conclusions ayant été écartées des débats, l'appelante ne peut pas en cause d'appel présenter les demandes qui y sont contenues et qui sont nouvelles.
Pour rejeter les conclusions de la société Resto Compagny, le premier juge a considéré que :
- les parties avaient été avisées le 15 mars 2023 de la clôture le 23 août 2023 alors que la société Resto Compagny avait déposé ses nouvelles conclusions le 21 août 2023 à 13h54 ;
- ces écritures comportaient, par rapport aux conclusions précédentes, 14 nouvelles pages, de nouvelles demandes reconventionnelles et se fondaient sur 4 nouvelles pièces d'une centaine de pages communiquées le même jour ;
- de telles écritures déposées à moins de deux jours de la clôture ne permettaient pas à M. et Mme [G] de conclure en réponse en temps utile,
Ces motifs sont et demeurent pertinents au stade de l'appel et la cour les adopte.
Le jugement entrepris sera confirmé sur ce point.
Sur la recevabilité des demandes de la société Resto Compagny de réduction des loyers, d'irrégularité d'une hausse de loyers, et de condamnation du bailleur à obtenir une attestation de conformité du Consuel :
Les époux [G] soutiennent que :
* ces demandes formulées dans le cadre de conclusions notifiées tardivement ont été écartées des débats par le premier juge dans la mesure où le contradictoire n'avait pas été respecté ;
* ces demandes sont nouvelles en cause d'appel ;
* les demandes nouvelles ne sont acceptées que si elles tendent à opposer une compensation, ou si elles tendent à faire écarter les prétentions adverses, ce qui n'est nullement le cas.
La société Resto Compagny réplique que :
* ces demandes ont été formulées dans le cadre des écritures qui ont été écartées des débats en première instance ce qu'elle conteste ;
* dans l'acte introductif d'instance, il s'agissait ainsi de contester la demande de règlement de loyers et de charges de la part du bailleur qui est une demande litigieuse ;
* ces demandes sont connexes et en rapport avec le litige initial et ne sauraient être qualifiés de demandes nouvelles ;
* la demande portant sur la production d'une attestation de conformité du Consuel n'est pas une demande nouvelle dès lors que dès l'acte introductif d'instance il était mentionné un manquement à l'obligation de délivrance du bailleur en ce que le local ne contenait ni eau ni électricité ni chauffage ni tout-à-l'égout.
Réponse de la cour
Aux termes de l'article 564 du code de procédure civile : « A peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait. »
Aux termes de l'article 565 du code de procédure civile « Les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge, même si leur fondement juridique est différent ».
Aux termes de l'article 566 du même code « Les parties ne peuvent ajouter aux prétentions soumises au premier juge que les demandes qui en sont l'accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire ».
Pour s'opposer à la réclamation du bailleur portant sur le paiement de loyers et donc faire écarter cette prétention, la société Resto Compagny invoque l'irrégularité de la hausse des loyers d'un montant supérieur à ceux arrêtés contractuellement. Il s'agit par conséquent d' un moyen de défense et non d'une prétention nouvelle et sa demande sollicitant, à titre subsidiaire, de voir réduire montant des loyers au regard des manquements allégués à l'obligation de délivrance du bailleur tend également à faire écarter la demande en paiement des loyers présentée par les époux [G]. Il s'ensuit que ces demandes sont recevables.
S'agissant de la demande de production d'une attestation de conformité du Consuel, elle n'est pas de nature à faire écarter la demande en paiement des loyers et charges et elle ne tend pas aux mêmes fins que la prétention soumise au premier juge tendant à l'inopposabilité du commandement de payer, aux délais de paiement ou encore à la demande de dommages et intérêts. Elle n'est pas plus l'accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire de ces mêmes demandes. Il s'ensuit que cette demande est irrecevable.
Sur l'opposabilité du commandement de payer délivré le 14 décembre 2021
Moyens des parties
La société Resto Compagny soutient que :
* le commandement vient sanctionner par la résiliation du bail commercial le non- respect d'un forfait de frais d'électricité non contractuel ; les époux [G] savaient parfaitement qu'ils étaient en train de forcer le consentement du preneur pour le voir accepter le forfait litigieux en le menaçant de résilier le bail et de l'expulser en cas de refus ; ils sont de mauvaise foi ;
* elle ne peut se voir opposer de prétendus accords oraux entre l'ancien exploitant et le bailleur ;
* c'est de mauvaise foi que le bailleur a fait délivrer le commandement de payer les loyers pour lesquels elle était en droit de se prévaloir d'une exception d'inexécution même partielle ; le bail ne respecte pas l'obligation de délivrance du bailleur : le bailleur a fait procéder à la refonte de l'installation électrique de la totalité du bâtiment et en raccordant la concluante au compteur général, elle a reconnu que c'est une obligation qui était à sa charge ;
* avant février 2022, l'installation électrique était sous-dimensionnée par rapport aux besoins du commerce ; elle était dans son droit de ne pas s'acquitter des loyers commerciaux compte tenu de la violation de l'obligation de délivrance ; le locataire substitué dans les droits et obligations de l'ancien exploitant peut valablement revendiquer le manquement à l'obligation de délivrance du bailleur ;
* depuis cette date, elle n'a plus de coupures intempestives de courant, elle aura attendu plus de quatre ans avant de disposer d'un outil de travail conforme ;
* le bailleur ne pouvait fournir un local sans eau, sans électricité, il s'agit d'obligations qui relèvent de son obligation de délivrance.
Les époux [G] répliquent que :
* la locataire est de mauvaise foi ; ils n'ont été avisés de la cession du fonds de commerce et du droit au bail que quelques mois après la prise de possession des lieux par la société Resto Compagny ; cette dernière a toujours réglé le forfait électrique à l'époque où elle réglait également ses loyers ; elle a tacitement repris l'engagement conclu entre son prédécesseur Le Four à Bois et Monsieur et Madame [G] ;
* la pose de compteurs individuels a pu avoir lieu le 12 janvier 2022 ; la société Resto Compagny ne peut pas leur reprocher d'avoir mis en place un forfait électrique alors même qu'il était inférieur à sa consommation réelle ; il est donc cohérent que le commandement de payer inclue les dettes électriques des preneurs ;
* les locaux loués permettaient parfaitement à la société Resto Compagny d'exercer son activité de pizzaiolo, tout comme le faisait la société Four à Bois qui lui a revendu son fonds de commerce ; l'appelante ne s'est pas plainte de difficultés à exercer son activité ; c'est à réception du commandement de payer visant la clause résolutoire que la société Resto Compagny a évoqué de prétendues difficultés électriques.
Réponse de la cour
Aux termes de l'article L145-41 du code de commerce « Toute clause insérée dans le bail prévoyant la résiliation de plein droit ne produit effet qu'un mois après un commandement demeuré infructueux. Le commandement doit, à peine de nullité, mentionner ce délai. (...) »
Selon ce texte, la résiliation de plein droit d'un bail commercial par application de la clause résolutoire implique qu'a été violée une obligation expressément prévue au contrat.
Ne peut produire effet un commandement de payer visant la clause résolutoire du bail que s'il est délivré de bonne foi, conformément à l'exigence posée à l'article 1104 du code civil.
Le commandement de payer délivré le 14 décembre 2021 vise un arriéré de loyers et charges d'un montant de 7 620 euros selon décompte du 13 décembre 2021. Sont réclamés à ce titre le loyer (360 euros jusqu'en juin 2021 puis 393 euros), la provision relative à la taxe foncière (20 euros), le forfait électricité (80 euros).
Le contrat de bail du 11 mars 2014 stipule à la rubrique Clause Résolutoire : « qu'à défaut de paiement d' un seul terme de loyer à son échéance ainsi que des frais de commandement et autres frais de poursuites, ou d'exécution d'une seule des conditions du présent bail qui sont toutes de rigueur (...) le présent bail sera résilié de plein droit, si bon semble au BAILLEUR d'exercer toute action qu'il pourra juger utile (...) »
Il est stipulé au bail outre le paiement du loyer une clause relative aux charges aux termes de laquelle la provision mensuelle est de 20 euros au titre de la taxe foncière.
Le bail ne comporte aucune mention sur un forfait électrique de sorte que nonobstant les pièces produites par les époux [G] pour justifier d'un engagement de la société Resto Compagny sur ce point, le commandement délivré le 14 décembre 2021 ne pouvait pas porter sur le forfait électrique mensuel de 80 euros qui ne ressort pas d'une obligation expressément visée par le contrat de bail.
Pour autant le commandement de payer portant également sur des loyers et charges prévus par les clauses du bail, étant relevé que plus de 10 loyers sont réclamés, aucune mauvaise foi ne saurait être retenue à l'encontre du bailleur pour avoir délivré cet acte comportant une charge non expressément stipulée.
En deuxième lieu, la société Resto Compagny argue de la mauvaise foi des époux [G] dans la délivrance du commandement de payer au motif que le bailleur ayant manqué à son obligation de délivrance, elle pouvait se prévaloir de l'exception d'inexécution et ne pas régler le loyer.
Selon les dispositions de l'article 1719 du code civil, le bailleur est tenu d'une obligation de délivrance.
L'obligation principale du preneur est de régler le loyer et seule l'impossibilité d'utiliser les lieux loués comme le prévoit le bail peut justifier le non paiement du loyer.
Le bail signé le 11 mars 2014 par Le Four à Bois prédécesseur de la société Resto Compagny précise au titre de la désignation des lieux loués que le local est délivré sans eau et sans électricité et au titre de la destination que les biens sont destinés à l'usage de tous commerces.
Il est stipulé au paragraphe Observation que le local ne possède pas de compteur électrique, que le bailleur s'engage à fournir au preneur un compteur électrique qui sera placé dans les parties communes dans un délai de deux mois et en contrepartie le preneur s'engage à prendre à ses frais l'installation électrique à l'intérieur du local.
La société Le four à Bois a exercé dans les lieux loués une activité de restauration rapide sur place, à emporter ou en livraison.
Le 30 août 2017, la société Resto Compagny a acquis ce fonds de commerce exploité dans les locaux litigieux ainsi que le droit au bail et force est de relever qu'elle ne justifie nullement d'une impossibilité voire de difficultés à exercer son activité dans lesdits locaux quand bien même les époux [G] ont fait procéder à la pose de compteurs individuels dans les parties communes seulement le 12 janvier 2022 permettant alors au preneur de procéder à l'installation électrique dans son local, la société Resto Compagny ne prétendant toutefois pas qu'elle ne disposait pas d'électricité avant cette date.
De plus, la cour relève que la société Resto Compagny a toujours réglé le forfait électrique à l'époque où elle réglait également ses loyers ce qui établit par la même la fourniture d'électricité. Et si la société Resto Compagny soutient avoir subi des coupures électriques intempestives du fait d'une installation électrique sous-dimensionnée avant l'installation des compteurs dans les parties communes, elle n'en justifie nullement. Ainsi que relevé par le premier juge, la société Resto Compagny ne communique aucun élément permettant d'établir les éventuels défauts de l'installation électrique tels qu'un constat d'huissier ou des clichés photographiques.
S'agissant de la fourniture d'un local délivré avec la mention sans eau, la société Resto Compagny ne fait état d'aucune doléance concrète à ce titre et ce d'autant qu'il est stipulé au bail signé le 11 mars 2014 au paragraphe Observation que « concernant l'absence d'eau le PRENEUR s'engage à prendre à ses frais la pose du compteur ». Il convient d'ajouter comme dit plus haut que le local a été exploité par le prédécesseur de la société Resto Compagny pendant trois ans et par cette dernière à compter du 11 mars 2014 sans qu'elle ne prétende et a fortiori ne démontre avoir émis des réclamations à ce titre ou encore avoir été entravée dans l'exploitation de son commerce.
Il s'ensuit que la société Resto Compagny ne peut sérieusement soutenir que le commandement de payer a été délivré de mauvaise foi par le bailleur. Le jugement sera confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de la société Resto Compagny en inopposabilité du commandement de payer du 14 décembre 2021.
Sur la demande de dommages et intérêts présentée par la société Resto Compagny
Moyens des parties
La société Resto Compagny soutient que :
* le préjudice subi par le locataire est évident, dès lors que le bail mentionnait que le local ne comprenait ni eau, ni électricité, ni chauffage et que les griefs portant sur les insuffisances de l'installation électrique ont perduré jusqu'en 2022 : arrêt du four à pizza, arrêt de la ligne de téléphone empêchant la prise de commande, changement des réfrigérateurs, perte du chiffre d'affaires ;
* le préjudice subi s'induit nécessairement des faits ; il s'est traduit par le danger subi par l'exploitant compte tenu de l'usage d'une installation électrique non conforme, il a subi un préjudice moral ;
* le bailleur n'a donné aucune suite à un dégât des eaux intervenu dans le local le 29 avril 2023.
Les époux [G] font valoir que :
* la société Resto Compagny n'hésite pas à maintenir cette demande en cause d'appel, sans rapporter la preuve de ses prétendus préjudices.
Réponse de la cour
Alors que les lieux ont été pris à bail dans les conditions décrites plus haut à compter de mars 2014 puis exploités par la société Resto Compagny depuis août 2017, la cour ne peut que constater que l'appelante ne produit aucune pièce pour démontrer la réalité des faits invoqués à l'appui de la demande de dommages et intérêts à savoir les pannes d'électricité et leurs conséquences alléguées telles que l'arrêt du four à pizza, l'arrêt de la ligne de téléphone, le changement de réfrigérateurs. Et toujours en l'absence de tout élément de preuve, elle ne démontre pas plus que lesdites pannes en les supposant établies ou encore la prétendue absence d'eau lui auraient causé un préjudice financier qui se mesure à l'aune d'éléments comptables. Elle ne démontre pas non plus l'existence d'un préjudice en lien avec une absence de compteur électrique individuel ou encore la réalité d'une installation électrique défaillante à défaut de production de toute pièce justificative en ce sens.
Il s'ensuit que le jugement sera confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de la société Resto Compagny tendant à ce que Monsieur [S] [G] et Madame [M] épouse [G] soient condamnés à lui payer une somme de 10 000 euros.
Sur la hausse des loyers commerciaux
Moyens des parties
La société Resto Compagny soutient que :
* le bail commercial a été conclu le 11 mars 2014, le commandement fait apparaître une hausse des loyers à compter de juillet 2021 sans respect des dispositions de l'article L145-38 du code de commerce sur la révision triennale et sans aucune demande de révision formée par le bailleur ; la révision n'étant pas régulière, les loyers litigieux ne peuvent être pris en compte que pour le montant de 360 euros.
Les époux [G] répliquent que :
* le loyer a été révisé conformément aux conditions du bail.
Réponse de la cour
Il ressort du courrier du 19 août 2021 de M. [G] adressé à la société Resto Compagny qu'il précise à cette dernière que le bail prévoit une valorisation des loyers et il lui précise les indices applicables ainsi que le montant du loyer en résultant.
Le bail stipule au paragraphe « Révision du Loyer » que :
« le loyer ci-dessus fixé sera révisable à l'expiration de chaque période annuelle dans les conditions prescrites par le décret du 30 septembre 1953 et les textes subséquents concernant le loyer d'immeuble à usage commercial ou industriel , en prenant pour base le dernier indice du coût de la construction connu à ce jour et publié par l'INSEE, qui est celui de 1612 pour celui du 3 ème trimestre 2013. »
Il ne s'agit donc pas de la révision triennale qui a été appliquée par les époux [G] comme soutenu à tort par la société Resto Compagny mais de la révision automatique annuelle prévue au bail dont le bailleur peut faire application, sans formalisme particulier.
L'augmentation du loyer par application de la clause de révision annuelle étant prévue par le bail, le moyen qui soutient que la hausse est irrégulière sera écarté.
Sur la demande de réduction des loyers au titre de l'exception d'inexécution invoquée par la société Resto Compagny
La société Resto Compagny soutient que :
* depuis la loi Pinel de 2014, les travaux de mise en conformité sont entièrement à la charge du propriétaire bailleur sans dérogation possible ;
* la défaillance de l'installation électrique lui a causé de nombreuses difficultés : l'absence de courant et l'impossibilité d'utiliser son matériel informatique, de prendre des commandes clients constituent des éléments préjudiciables à l'exploitation du fonds de commerce ;
* le bailleur supportera une responsabilité partagée de l'ordre de 50% des loyers commerciaux.
Les époux [G] répliquent que :
* la société Resto Compagny ne justifie nullement d'un quelconque préjudice ; le bail mentionnait bien l'absence de compteur électrique individuel ; le bail n'est pas soumis à la loi Pinel ; depuis l'installation des compteurs électriques individuels, la société Resto Compagny n'a toujours pas fait les démarches comme elle s'était engagée à le faire pour effectuer l'installation électrique à l'intérieur du local ; elle se branche illégalement sur le compteur électrique alimentant les parties communes.
Réponse de la cour
Le bail ayant été signé le 11 mars 2014, il n'est pas soumis aux dispositions de la loi dite Pinel entrée en vigueur le 18 juin 2014 soit postérieurement à la conclusion du bail entre Monsieur et Madame [G] et le Four à Bois. Ne s'appliquent donc pas les dispositions citées par l'appelante soit les articles L 145- 40-1, L 145-40-2, R 145-35 du code de commerce de sorte que n'incombent pas nécessairement au bailleur des travaux de mise en conformité dès lors qu'ils sont mis à la charge du preneur par une clause du bail.
Ainsi que dit plus haut, la société Resto Compagny ne justifie nullement d'une impossibilité voire de difficultés à exploiter son activité dans lesdits locaux quand bien même les époux [G] ont procédé à l'installation de compteurs électriques individuels dans les parties communes seulement le 12 janvier 2022 permettant alors au preneur de procéder à l'installation électrique dans son local.
Aucun élément n'est produit pour établir l'existence de difficultés d'exploitation en lien avec l'installation électrique et avant janvier 2022, la société Resto Compagny était alimentée en électricité. Elle ne démontre donc pas l'existence d'une inexécution suffisamment grave du bailleur justifiant de réduire le montant de son loyer tel que fixé par le bail.
Par ailleurs, il est expressément stipulé au contrat de bail par une clause parfaitement licite que le preneur aura à faire l'installation électrique à l'intérieur de son local dès que le bailleur aura mis en place un compteur électrique dans les parties communes. En janvier 2022, le bailleur a fait installer les compteurs électriques individuels dans les parties communes et il produit un procès- verbal de commissaire de justice du 14 février 2023 ayant constaté que « le compteur sur lequel figure l'inscription commerce est raccordé électriquement à l'aide de deux câbles bleu et noir vers le compteur électrique des parties communes » ce qui corrobore les termes du courrier recommandé adressé à la société Resto Compagny par les époux [G] le 13 janvier 2022 pour rappeler à la locataire qu'elle n'avait pas pris ses dispositions pour l'alimentation de son commerce et qu'elle devait retirer l'installation de rallonge alimentant les appareils électriques du sous-sol du commerce. La société Resto Compagny ne produit aucun élément pour contester le procès-verbal de constat qui conforte ce courrier de mise en demeure.
Il convient dès lors de débouter la société Resto Compagny de sa demande de réduction des loyers.
Sur le montant des sommes dues par la société Resto Compagny au titre du commandement de payer délivré le 14 décembre 2021 :
Le commandement de payer a été délivré pour obtenir le paiement par la société Resto Compagny de la somme de 7 098 euros qui correspond :
- au montant du loyer mensuel de 360 euros au titre des mois de décembre 2018, juillet 2019, janvier, février, juin, juillet, août, septembre, décembre 2020 : 3 240 euros
- au montant du loyer mensuel de 393 euros au titre des mois de juillet à décembre 2021 : 2 358 euros
- au montant de la provision mensuelle de 20 euros pour la taxe foncière pour chacun des mois précités : 300 euros
- au montant du forfait électrique mensuel de 80 euros pour chacun de ces mêmes mois : 1 200 euros.
Dès lors que le forfait électrique n'est pas expressément visé par une stipulation contractuelle, il ne pouvait pas faire l'objet du commandement de payer de sorte qu'il convient de retrancher la somme de 1 200 euros de celle de 7 098 euros soit un montant dû de 5 898 euros.
Par ailleurs, il convient de déduire la somme de 380 euros payée par la société Resto Compagny au titre du mois de décembre 2020 ainsi qu'il en est justifié par son relevé de compte ouvert dans les livres de la Caisse d'Epargne et daté du 31 décembre 2020 qui mentionne un paiement le 8 décembre 2020 au titre du loyer de 460 euros, ce paiement étant corroboré par la quittance de loyer produite par les époux [G] au titre du mois de décembre 2020.
Il s'ensuit que c'est la somme de 5 518 euros qui était due au titre du commandement de payer et qui n'a pas été payée dans le mois de sa délivrance soit le 14 janvier 2022 de sorte que c'est à bon droit que le premier juge a constaté la résiliation de plein droit du bail par acquisition de la clause résolutoire insérée au bail.
Sur la demande de délais de paiement et de suspension des effets de la clause résolutoire
Moyens des parties
La société Resto Compagny soutient que :
* elle a réglé les loyers de l'année 2022 et du 1er janvier au 1er août 2023 ; le litige a pour cause le comportement du bailleur ; les mesures de confinement ont compliqué sa tâche ; elle a acquis un fonds dont la situation était difficile ; elle a assuré le règlement des loyers postérieurs au commandement de payer ;
* aucun exploitant ne retient le règlement de loyers commerciaux sans raison après les avoir acquittés pendant de nombreux mois si ce n'est en raison d'une crise de trésorerie générant une insuffisance de disponibilités ;
* la dette n'est pas exorbitante et elle ne justifie pas la perte du fonds de commerce ; elle a respecté les délais de paiement qui lui ont été impartis et a apuré le passif.
Les époux [G] répliquent que :
* le solde de la dette de la société Resto Compagny au titre du commandement s'élève à la somme de 4.500 euros ;
* la société Resto Compagny n'honore pas l'entier règlement du loyer, ce dernier ayant été réactualisé à la somme de 393 euros depuis juillet 2021 ; le simple fait de ne pas payer son loyer ne justifie pas d'avoir des difficultés financières.
Réponse de la cour
Il résulte des dispositions de l'article L145-41 du code de commerce que les juges saisis d'une demande présentée dans les formes et conditions prévues aux articles 1343-5 ou 1244-1 à 1244-3 anciens du code civil peuvent, en accordant des délais, suspendre les effets d'une clause résolutoire, lorsque la résiliation n'est pas constatée ou prononcée par une décision de justice passée en force de chose jugée.
Au titre du commandement de payer la société Resto Compagny doit la somme de 5 518 euros dont à déduire la somme de 2 760 euros versée dans la suite du jugement entrepris qui a accordé à la société Resto Compagny un délai de 12 mois pour payer ladite somme soit un reste dû de 2 758 euros.
La société Resto Compagny est redevable d'une indemnité d'occupation qui n'a pas été complètement payée dans la suite du jugement entrepris puisqu'elle règle la somme de 360 euros au titre du loyer et non celle de 393 euros et qu'elle n'a pas payé avant le jugement la provision pour charges de 20 euros par mois.
Aucune pièce comptable n'est produite par l'appelante pour permettre à la cour d'apprécier sa capacité à rembourser la somme de 2 758 euros et de payer en outre l'indemnité d'occupation revalorisée.
Ainsi à hauteur d'appel la société Resto Compagny échoue à démontrer être en capacité de résorber sa dette et de régler le loyer courant. De plus l'appelante est de mauvaise foi en résistant à régler sa consommation d'électricité que ce soit par la voie du forfait ou par la voie de sa consommation réelle alors qu'il lui appartenait de prendre à ses frais l'installation électrique à l'intérieur de son local ainsi qu'il sera exposé au paragraphe suivant.
Par conséquent, elle sera déboutée de sa nouvelle demande de délais de paiement et de suspension des effets de la clause résolutoire.
Sur la demande en paiement de la somme de 7 004,57 euros au titre de la consommation électrique
Les époux [G] font valoir que :
* la société Resto Compagny tire un avantage du forfait électrique qui est bien inférieur à sa consommation réelle ; ils justifient de l'accord tacite de la société Resto Compagny sur le paiement du forfait ; le forfait mensuel de 80 euros lui est opposable ; il était déjà réglé par la société Le Four à Bois ;
* la pose de compteurs individuels a pu avoir lieu le 12 janvier 2022 et avant cette date l'ensemble des locataires payait un forfait électrique ; puis les locataires ont disposé chacun de leur compteur individuel à l'exception de la société Resto Compagny qui a pris l'initiative de se brancher frauduleusement sur le compteur de faible puissance destiné à l'éclairage des parties communes ; les factures correspondent uniquement aux consommations de la société Resto Compagny.
La société Resto Compagny réplique que :
* la loi Pinel mentionne que les charges locatives doivent être expressément visées par le bail ; en l'absence de mention dans le bail, aucune charge ne peut lui être réclamée ; les époux [G] ne lui adressent pas de récapitulatif annuel des charges, impôts et taxes ; le bail ne liste aucun forfait électrique.
Réponse de la cour
Si le commandement de payer ne pouvait pas viser le forfait mensuel de 80 euros car non expressément stipulé au bail, il ressort des quittances de loyer produites par les époux [G] que la société Resto Compagny a payé ce forfait mensuel à compter de juin 2018 en même temps qu'elle réglait son loyer et ceci jusqu'en juin 2021. Les quittances de loyer précisent « Reçu de Resto Compagny la somme de 460 euros pour le montant d'un mois de loyer dont 80 euros de forfait électricité et 20 euros pour la taxe foncière (...) » Il s'en déduit que la société Resto Compagny en payant ce forfait en toute connaissance de cause en a admis le bien fondé. La preuve est ainsi rapportée d'un accord implicite sur ce point de sorte que la société Respo Compagny est bien redevable de cette somme mensuelle jusqu'à l'installation électrique du compteur dans les parties communes soit jusqu'en janvier 2022 ce qui représente une somme due de 560 euros (80 X 7 mois).
Puis après cette installation et compte tenu des stipulations contractuelles, il appartenait à la société Resto Compagny de prendre à ses frais l'installation électrique à l'intérieur du local de sorte qu'en n'y procédant pas elle est redevable de sa consommation réelle à compter de février 2022 soit de la somme de 5 085,63 euros arrêtée à juin 2024 qui résulte des factures produites par les époux [G] et du tableau émanant du fournisseur d'énergie récapitulant les sommes dues au titre des factures d'électricité dont les références sont indiquées, la cour ne retenant pas la somme de 654,08 euros indiquée de façon manuscrite sur le tableau récapitulatif en ce qu'elle fait double emploi avec la facture référencée n° 364828.
La société Resto Compagny sera condamnée à payer aux époux [G] la somme de 5 645,63 euros.
Sur les demandes accessoires
Le jugement sera confirmé pour le surplus de ses dispositions soumises à la cour. La société Resto Compagny partie perdante réglera les dépens d'appel et l'équité commande de la condamner à payer aux époux [G] la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour statuant par arrêt contradictoire et par mise à disposition au greffe,
Dit recevable la demande de la société Resto Compagny de réduction des loyers ainsi que sa demande tendant à l'inopposabilité de la hausse de loyers,
Dit irrecevable sa demande de condamnation du bailleur à produire une attestation de conformité du Consuel,
Confirme le jugement entrepris en ce qu'il a
- écarté des débats les conclusions de la société Resto Compagny notifiées le 21 août 2023 ;
- rejeté la demande de la société Resto Compagny en inopposabilité du commandement du 14 décembre 2021 ;
- rejeté la demande de la société Resto Compagny tendant à ce que Monsieur [S] [G] et Madame [M] épouse [G] soient condamnés à lui payer une somme de 10 000 euros ;
- condamné la société Resto Compagny à payer à Monsieur [S] [G] et Madame [M] épouse [G] la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamné la société Resto Compagny aux entiers dépens, en ce compris les frais du commandement de payer du 14 décembre 2021 ;
- rejeté les demandes de la société Resto Compagny formulées au titre des articles 699 et 700 du code de procédure civile ;
L'infirme en ses autres dispositions soumises à la cour,
Statuant à nouveau,
Constate l'acquisition de plein droit de la clause résolutoire insérée au bail du 11 mars 2014 liant les parties, à compter du 14 janvier 2022 et dit que la société Resto Compagny devra quitter les lieux et rendre libre de toute occupation les lieux loués sis [Adresse 3] à [Localité 4], en satisfaisant aux obligations des locataires sortants, notamment par la remise des clefs ;
Autorise en tant que de besoin le concours d'un serrurier voire de la force publique au commissaire de justice requis pour procéder à l'exécution de la mesure ;
Condamne la société Resto Compagny à payer à Monsieur [S] [G] et Madame [M] épouse [G] une indemnité d'occupation mensuelle égale au montant du loyer et des charges normalement dus à compter du 14 janvier 2022 et jusqu'à complète libération des lieux et remise des clés ;
Condamne la société Resto Compagny à payer à Monsieur [S] [G] et Madame [M] épouse [G] la somme de 8 402,63 euros avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt ;
Déboute la société Resto Compagny de sa demande de délais et de suspension des effets de la clause résolutoire ;
Condamne la société Resto Compagny aux dépens de l'appel ;
Condamne la société Resto Compagny à payer à Monsieur [S] [G] et Madame [M] épouse [G] la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
Déboute la société Resto Compagny de sa demande présentée en application de l'article 700 du code de procédure civile.