Livv
Décisions

CA Nîmes, 2e ch. A, 15 mai 2025, n° 24/01692

NÎMES

Arrêt

Infirmation

PARTIES

Demandeur :

Axa France Iard (SA)

Défendeur :

Swisslife Assurances De Biens (SA), L'univers De La Cheminee (SARL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Azouard

Conseillers :

M. Liegeon, Mme Huet

Avocats :

Me Jonquet, Me Harnist, Me Grillon

TGI Rodez, du 3 juin 2019, n° 17/00799

3 juin 2019

EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

Le 13 février 2013, un incendie est survenu au domicile des époux [Y] entrainant la destruction de leur maison d'habitation sise [Adresse 5] à [Localité 8] ainsi que de l'intégralité de leurs mobiliers et affaires personnelles.

Le 29 mars et 07 mai 2013, une expertise amiable a été réalisée à l'initiative de l'assureur des époux [Y], la compagnie Swisslife Assurance de biens, en présence notamment du représentant de la SARL L'Univers de la cheminée, qui avait installé selon facture du 19 novembre 2012 une cheminée, et de son assureur, la société Axa France IARD.

Selon les rapports des expertises amiables des 31 mars et 8 mai 2013, 1'insta1lation de 1'insert de cheminée et de ses conduits par l'entreprise L'Univers de la cheminée a présenté dc nombreuses non conformités dont certaines semblaient être en lien direct avec 1e sinistre.

En 1'absence de l'expert de la compagnie Axa lors de la seconde réunion amiable, il n'a pas été possible de poursuivre les investigations.

Par une ordonnance de référé en date du 4 juillet 2013, le tribunal de grande instance de Rodez a désigné en qualité d'expert judiciaire, M. [E] [J], lequel a déposé son rapport le 24 juillet 2015.

Les 12 février et 02 mars 2016, les époux [Y] ont réclamé à l'entreprise L'Univers de la cheminée et à son assureur la somme de 266.838,06' en réparation de leurs préjudices.

Aucun règlement amiable n'étant intervenu, par exploit d'huissier en date des 19 et 20 juillet 2017, les époux [Y], et leur assureur la société Swisslife Assurance de biens, ont assigné devant 1e tribunal de grande instance de Rodez la SARL L'Univers de la cheminée et son assureur, la société Axa France Iard.

Par jugement contradictoire en date du 03 juin 2019, le tribunal de grande instance de Rodez a,

au visa de l'expertise judiciaire de M. [J], des articles 1240, 1343-2 et 1792 et suivants du code civil :

- Ordonné le rabat de la clôture au jour des plaidoiries.

- Déclaré les époux [Y] recevables à agir.

- Déclaré la compagnie d'assurances Swisslife Assurance de biens, recevable à agir en sa qualité de subrogée de ses assurés.

- Déclaré la SARL L'Univers de la cheminée entièrement responsable de 1'incendie par suite des non-conformités de1'insert, ouvrage qu'elle a installé 1e 19 novembre 2012.

En conséquence,

- Condamné in solidum la SARL L'Univers de la cheminée et son assureur la compagnie Axa à payer aux époux [Y] la somme totale de 79.308,06' à titre de dommages et intérêts en réparation de leurs préjudices matériels et immatériels se décomposant comme suit':

- 199.327,49' TTC au titre de la reconstruction.

- l.607' TTC au titre de l'enlèvement des gravats.

- 15.600' au titre de leur préjudice de jouissance.

- 5.383,57' au titre de leurs frais d'assistance aux expertises.

- à déduire la somme de 142.610' au titre de l'indemnisation perçue par leur assureur, soit la somme totale de 79.308,06' avec intérêts au taux légal à compter de la réception de la mise en demeure 1e 16 février 2016 et capitalisation par application des dispositions de 1'article 1343-2 du code civil.

- Condamné la SARL L'Univers de la cheminée à payer aux époux [Y] la somme de 37.597' à titre de dommages et intérêts en réparation de leur préjudice mobilier avec intérêts au taux légal à compter de la réception de la mise en demeure le 16 février 2016 et capitalisation par application des dispositions de l'article 1343-2 du code civil.

- Condamné in solidum la SARL L'Univers de la cheminée et son assureur la compagnie d'assurances Axa à payer aux époux [Y] la somme de 4.500' à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive.

- Dit que la compagnie Axa devra garantir son assurée, la SARL L'Univers de la cheminée, dans 1e cadre du contrat d'assurance les liant à 1'exclusion du préjudice mobilier et sous réserve de la franchise contractuelle de 1.500' par sinistre à la charge de cette dernière.

- Condamné in solidum la SARL L'Univers de la cheminée et son assureur la compagnie Axa à payer à la compagnie d'assurances Swisslife Assurance de biens la somme de 142.6106 au titre dc sa créance en sa qualité de subrogée de ses assurés.

- Déboute les parties du surplus de leurs demandes.

- Condamne in solidum la SARL L'Univers de la cheminée et son assureur la compagnie Axa à payer aux époux [Y] la somme de 3.000' et à la compagnie Swisslife Assurance de biens la somme de 1.500' par application des dispositions de 1'artic1e 700 du code de procédure civile.

- Condamne in solidum la SARL L'Univers de la cheminée et son assureur la compagnie Axa aux entiers dépens de la présente instance, de celle en référé, en ce compris les frais d'expertise, dont distraction au pro't de la SCP GRILLON par application des dispositions dc 1°article 699 du code de procédure civile

La SA Axa France Iard a interjeté appel de ce jugement par déclaration au greffe en date du 12 juin 2019.

La cour d'appel de Montpellier, par arrêt de défaut du 20 avril 2022, a':

- Confirmé le jugement dans ses dispositions soumises à la cour sauf en ce qu'il a condamné in solidurn la société l'Univers de la cheminée et son assureur Axa France lard à payer aux époux [Y] la somme de 5 383,57' an titre de leurs frais d'assistance aux expertises et la somme de 4500' a titre de dommages et intérêts pour résistance abusive.

Statuant à nouveau de ces chefs

- Condamné in solidum la société l'Univers de la cheminée et son assureur Axa France Iard à payer aux époux [Y] la somme de l2 706,57' au titre de leurs frais d'assistance aux expertises,

- Condamné la société Axa France lard à payer aux époux [Y] la somme de l0 000' à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive.

Y ajoutant

- Condamné in solidum la sociétés l'Univers de la cheminée et son assureur Axa France lard à payer aux époux [Y] la somme de 2500' par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

- Condamne in solidum la société l'Univers de la cheminée et son assureur Axa France lard à payer à la société Swisslife Assurance de biens la somme de 4000' par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

- Condamné in solidum la société l'Univers de la cheminée et son assureur Axa France lard aux dépens d'appel, avec application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile an profit de l'avocat qui en affirme son droit.

La société Axa France Iard a formé un pourvoi en cassation contre l'arrêt rendu le 20 avril 2022 par la cour d'appel de Montpellier.

Par arrêt en date du 21 mars 2024, la troisième chambre civile de la Cour de cassation a statué ainsi qu'il suit':

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il déclare M. et Mme [Y] et la société Swisslife assurance de biens recevables à agir, l'arrêt rendu le 20 avril 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ;

Remet, sauf sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Nîmes ;

Condamne M. et Mme [Y] et la société Swisslife assurance de biens aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette-les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

aux motifs suivants':

'Sur le troisième moyen, pris en sa première branche

«'Vu les articles 1792, 1792-2 et 1792-3 du code civil :

Aux termes du premier de ces textes, tout constructeur d'un ouvrage est responsable de plein droit, envers le maître ou l'acquéreur de l'ouvrage, des dommages, même résultant d'un vice du sol, qui compromettent la solidité de l'ouvrage ou qui, l'affectant dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement, le rendent impropre à sa destination. Une telle responsabilité n'a point lieu si le constructeur prouve que les dommages proviennent d'une cause étrangère.

Aux termes du deuxième, la présomption de responsabilité établie par l'article 1792 s'étend également aux dommages qui affectent la solidité des éléments d'équipement d'un bâtiment, mais seulement lorsque ceux-ci font indissociablement corps avec les ouvrages de viabilité, de fondation, d'ossature, de clos ou de couvert. Un élément d'équipement est considéré comme formant indissociablement corps avec l'un des ouvrages lorsque sa dépose, son démontage ou son remplacement ne peut s'effectuer sans détérioration ou enlèvement de matière de cet ouvrage.

Aux termes du troisième, les autres éléments d'équipement de l'ouvrage font l'objet d'une garantie de bon fonctionnement d'une durée minimale de deux ans à compter de sa réception.

Alors qu'il était jugé antérieurement, en application de ces textes, que l'impropriété à destination de l'ouvrage, provoquée par les dysfonctionnements d'un élément d'équipement adjoint à la construction existante, ne relevait pas de la garantie décennale des constructeurs, la Cour de cassation juge, depuis l'année 2017, que les désordres affectant des éléments d'équipement, dissociables ou non, d'origine ou installés sur existant, relèvent de la responsabilité décennale lorsqu'ils rendent l'ouvrage dans son ensemble impropre à sa destination (3e Civ., 15 juin 2017, pourvoi n° 16-19.640, Bull. 2017, III, n°71 ; 3e Civ., 14 septembre 2017, pourvoi n° 16-17.323, Bull. 2017, III, n 100).

Elle a, également, écarté l'application de l'article L. 243-1-1, II, du code des assurances, selon lequel les obligations d'assurance des constructeurs ne sont pas applicables aux ouvrages existants avant l'ouverture du chantier, à l'exception de ceux qui, totalement incorporés dans l'ouvrage neuf, en deviennent techniquement indivisibles, lorsque les désordres affectants l'élément d'équipement installé sur existant rendaient l'ouvrage, dans son ensemble, impropre à sa destination (3e Civ., 26 octobre 2017, pourvoi n° 16-18.120, Bull. 2017, III, n 119).

Ce revirement de jurisprudence poursuivait, en premier lieu, un objectif de simplification en ne distinguant plus selon que l'élément d'équipement était d'origine ou seulement adjoint à l'existant, lorsque les dommages l'affectant rendaient l'ouvrage en lui-même impropre à sa destination.

Il visait, en second lieu, à assurer une meilleure protection des maîtres de l'ouvrage, réalisant plus fréquemment des travaux de rénovation ou d'amélioration de l'habitat existant.

Ces objectifs n'ont, toutefois, pas été atteints.

D'une part, la Cour de cassation a été conduite à préciser la portée de ces règles. Ainsi, il a été jugé que les désordres affectant un élément d'équipement adjoint à l'existant et rendant l'ouvrage impropre à sa destination ne relevaient de la responsabilité décennale des constructeurs que lorsqu'ils trouvaient leur siège dans un élément d'équipement au sens de l'article 1792-3 du code civil, c'est-à-dire un élément destiné à fonctionner (3e Civ., 13 juillet 2022, pourvoi n°19-20.231, publié).

La distinction ainsi établie a abouti à multiplier les qualifications attachées aux éléments d'équipement et les régimes de responsabilité qui leur sont applicables, au risque d'exclure des garanties légales du constructeur les dommages causés par les éléments d'équipement d'origine.

D'autre part, il ressort des consultations entreprises auprès de plusieurs acteurs du secteur (France assureurs, Fédération nationale des travaux publics, Confédération de l'artisanat et des petites entreprises du bâtiment, Fédération française du bâtiment, Institut national de la consommation) que les installateurs d'éléments d'équipement susceptibles de relever de la garantie décennale ne souscrivent pas plus qu'auparavant à l'assurance obligatoire des constructeurs.

La jurisprudence initiée en 2017 ne s'est donc pas traduite par une protection accrue des maîtres de l'ouvrage ou une meilleure indemnisation que celle dont ils pouvaient déjà bénéficier au titre d'autres garanties d'assurance.

C'est pourquoi il apparaît nécessaire de renoncer à cette jurisprudence et de juger que, si les éléments d'équipement installés en remplacement ou par adjonction sur un ouvrage existant ne constituent pas en eux-mêmes un ouvrage, ils ne relèvent ni de la garantie décennale ni de la garantie biennale de bon fonctionnement, quel que soit le degré de gravité des désordres, mais de la responsabilité contractuelle de droit commun, non soumise à l'assurance obligatoire des constructeurs.

La jurisprudence nouvelle s'applique à l'instance en cours, dès lors qu'elle ne porte pas d'atteinte disproportionnée à la sécurité juridique ni au droit d'accès au juge.

Pour condamner in solidum la société L'Univers de la cheminée et la société Axa sur le fondement de la garantie décennale, l'arrêt énonce que les désordres affectant des éléments d'équipement, dissociables ou non, d'origine ou installés sur existant, relèvent de la responsabilité décennale lorsqu'ils rendent l'ouvrage dans son ensemble impropre à sa destination, puis retient que le désordre affectant l'insert de cheminée a causé un incendie ayant intégralement détruit l'habitation.

En statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

Portée et conséquences de la cassation

En application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation du chef de dispositif de l'arrêt condamnant la société Axa, in solidum avec la société L'Univers de la cheminée, à payer à M. et Mme [Y] la somme de 79 308,06 euros et à la société Swisslife celle de 142 610 euros, après avoir retenu, au titre du préjudice matériel de M. et Mme [Y], la somme de 199 327,49 euros correspondant à la valeur de reconstruction de leur maison, s'étend aux chefs de dispositif condamnant la société L'Univers de la cheminée à payer les mêmes sommes à M. et Mme [Y] ainsi que celle de 37 597 euros au titre de leur préjudice mobilier, outre les intérêts au taux légal à compter du 16 février 2016 sur cette somme et la capitalisation des intérêts qui s'y rattachent par un lien de dépendance nécessaire.

En application du même texte et pour le même motif, la cassation s'étend au chef de dispositif condamnant la société Axa à payer à M. et Mme [Y] la somme de 10 000 euros à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive.

La société Axa France Iard a formalisé le 17 mai 2024, une déclaration de saisine devant la cour d'appel de Nîmes, cour de renvoi.

La société l'Univers de la cheminée qui s'est vue signifier à étude le 4 juillet 2024 par la société Axa France Iard la déclaration de saisine de la cour d'appel de renvoi et les conclusions en date du 11 juin 2024 n'a pas constituée avocat.

L'affaire a été fixée à bref délai à l'audience du 5 novembre 2024 en application des dispositions de l'article 1037-1 du code de procédure civile, renvoyée à l'audience du 25 février 2025 et mise en délibéré par mise à disposition au greffe au 15 mai 2025.

EXPOSE DES PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 15 octobre 2024, la société Axa France Iard demande à la cour en ses seules prétentions de :

VU le jugement du 3 juin 2019 rendu au bénéfice des époux [Y] par le Tribunal de grande instance de Rodez ;

VU l'appel interjeté par la société AXA FRANCE IARD ;

VU l'arrêt rendu par la Cour d'appel de Montpellier le 20 avril 2022;

VU l'arrêt de cassation du 21 mars 2024 rendu par la 3ème chambre civile ;

VU la saisine de la Cour de renvoi de Nîmes par la société AXA FRANCE IARD ;

VU la portée de la décision rendue par la Cour de cassation ;

DONNER acte à la société AXA FRANCE IARD qu'elle ne conteste plus la recevabilité des époux [Y] et de la société SWISSLIFE à solliciter l'indemnisation des préjudices en lien avec l'incendie en date du 13 février 2013 malgré la vente par les époux [Y] de leur bien immobilier en cours d'expertise à la commune de [Localité 8], sans réserve de leurs droits.

REFORMER en conséquence la décision dont appel en toutes ses dispositions, à l'exception de celles relatives à la recevabilité des époux [Y] et de la société SWISSLIFE à solliciter l'indemnisation des préjudices en lien avec l'incendie en date du 13 février 2013 à l'encontre de la société L'UNIVERS DE LA CHEMINEE et de la société AXA FRANCE IARD et STATUANT à nouveau, malgré la vente du bien immobilier détruit à la Commune de [Localité 8], et rejeter toute condamnation de la société AXA FRANCE IARD, faute de pouvoir mobiliser ses garanties.

- Sur l'absence d'application de la garantie décennale et de l'assurance obligatoire :

VU les dispositions des articles 1147, 1792 et suivants du code civil ;

VU les dispositions de l'article L.241-1 du code des assurances ;

VU le rapport d'expertise judiciaire et les pièces produites aux débats ;

REFORMER la décision dont appel en ce qu'elle a appliqué le régime de la garantie décennale et en conséquence le régime de l'assurance obligatoire au cas d'espèce.

REJETER toute demande de condamnation de la société AXA FRANCE IARD.

- Sur l'absence d'application des garanties facultatives associées à la garantie décennale :

REJETER toute demande de condamnation de la société AXA FRANCE IARD.

REFORMER en conséquence la décision dont appel en ce qu'elle a reconnu la garantie octroyée par la société AXA FRANCE IARD mobilisable et rejeter toute demande indemnitaire formée à l'encontre de la société AXA FRANCE IARD.

CONDAMNER en conséquence la société SWISSLIFE et les époux [Y] à la restitution des sommes précédemment allouées.

CONDAMNER les époux [Y] et la société SWISSLIFE au paiement de la somme de la somme de 5.000 ' sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance.

A titre subsidiaire et si la Cour estimait que les garanties de la société AXA FRANCE IARD puissent être mobilisées ;

VU l'article L.121-12 du code des assurances ;

VU l'absence de production de la police de dommages ;

VU la quittance faisant référence à la seule subrogation légale ;

REJETTER la demande subrogatoire de la société SWISS LIFE ASSURANCE DE BIENS faute de pouvoir vérifier l'absence de clause d'exclusion applicable à l'espèce et notamment à un dommage de construction.

VU le principe de l'indemnisation intégrale des préjudices ;

VU la cession par les époux [Y] en cours d'expertise de leur maison d'habitation à la commune de [Localité 8] pour une somme de 10.000 ' ;

VU les évaluations produites par les époux [Y] eux-mêmes et leur assureur de dommages concernant la valorisation du m² sur la commune de [Localité 8] ;

JUGER qu'il ne peut être allé au-delà de la somme de 1.000 ' du m² justifiant la liquidation d'une somme de 120.000 ' au titre du préjudice subi.

LIMITER en conséquence la condamnation de la société AXA FRANCE IARD en sa qualité d'assureur de la société L'UNIVERS DE LA CHEMINEE au paiement de la somme de 110.000 ' en l'état de la somme de 10.000 ' déjà versée par la commune de [Localité 8].

REJETER l'appel incident formé par les intimés concernant la prise en charge du mobilier ou les honoraires d'expert, la société AXA FRANCE IARD ne discutant pas les évaluations retenues à l'occasion de l'expertise judiciaire.

DONNER acte à la société AXA FRANCE IARD qu'elle ne conteste pas le montant des dommages mobiliers acquis pour une somme de 37.597 ', comme l'évacuation des gravats pour une somme de 1.607 ' et la somme de 15.600 ' au titre du préjudice de jouissance en lien avec la relocation des époux [Y], comme la somme de 12.706,57 ' réglée au titre des frais d'expert d'assuré par les époux [Y] à la condition que ces derniers ne soient pas pris en compte dans le cadre de l'évaluation des frais irrépétibles.

JUGER que les intérêts en lien avec les indemnités ainsi octroyées seront liquidés conformément aux dispositions de l'article 1231-7 du code civil prévoyant l'application d'intérêts à compter de la décision de condamnation.

REFORMER en revanche la décision en ce qu'elle a mis à la charge de la société AXA FRANCE IARD une pénalité pour procédure abusive, l'assureur ayant été parfaitement diligent dans l'affaire en référence et ayant exercé son seul droit de défense à résister contre la jurisprudence depuis renversée par la 3ème chambre civile de la Cour de cassation concernant les éléments d'équipement dissociables rapportés sur un ouvrage existant.

REJETER l'appel incident relatif à l'octroi d'une indemnité pour résistance abusive, la société AXA FRANCE IARD ayant été légitime à prétendre à l'absence d'application des garanties construction au litige de l'espèce en l'état du débat doctrinal et jurisprudentiel constant sur ce point et réglé par le revirement obtenu à l'occasion de la présente procédure.

LIMITER les frais irrépétibles à la somme de 1.500 ' au bénéfice des époux [Y] et à la somme de 3.000 ' au bénéfice de la société SWISSLIFE assurance de biens.

STATUER ce que de droit sur les dépens.

La société Axa France Iard fait valoir essentiellement':

- sur le rejet de l'application de la garantie décennale suite à des désordres en seul lien avec la pose d'un élément d'équipement sur un immeuble existant':

- que l'insert mis en 'uvre chez les époux [Y] est un élément d'équipement dissociable adjoint à un immeuble existant.

- que l'installation réalisée n'a nécessité que de menus travaux de maçonnerie sans atteinte au gros 'uvre de l'immeuble, puisque le conduit comme l'âtre de la cheminée existaient préalablement,

- que dans ce cas, les désordres découlant de l'installation de l'insert, même affectant l'existant, ne peuvent permettre le jeu de la garantie décennale au bénéfice du propriétaire de l'immeuble auquel a été adjoint l'insert.

- que l'insert n'est pas scellé mais posé et donc parfaitement démontable sans atteinte ou détérioration de l'immeuble existant, et qu'il ne peut donc être considéré que cela correspond à l'édification d'un ouvrage ou à la mise en 'uvre d'un élément d'équipement indissociable sur un immeuble neuf et concomitamment équipé,

- que l'insert installé est donc un élément d'équipement dissociable adjoint à un immeuble ancien,

- que seul le régime de responsabilité contractuelle de droit commun est donc applicable en cas de sinistre en lien avec l'insert, mais pas celui de la garantie décennale, si bien que la société Axa France Iard ne peut être recherchée en qualité d'assureur décennal de la société l'Univers de la cheminée et que la garantie décennale n'est pas mobilisable,

- que le rejet de la garantie décennale empêche de mobiliser les garanties facultatives de l'article 2.14 de la police s'agissant des «'dommages matériels aux existants'» et de l'article 2.15 s'agissant des «'dommages immatériels consécutifs'» dans la mesure où ces garanties sont conditionnées à la démonstration de la double condition de la participation de l'assuré à la réalisation d'un ouvrage et d'être à l'origine d'un sinistre relevant de la garantie décennale.

- sur le rejet de toute couverture au titre de la responsabilité civile de la société l'Univers de la cheminée au motif d'une inobservation inexcusable des règles de l'art':

- que la société l'Univers de la cheminée en ayant mis en 'uvre un insert dans la maison d'habitation des époux [Y] sans respect des règles de l'art et occasionnant un incendie ayant détruit pour partie leur maison d'habitation, a manqué à ses obligations contractuelles permettant d'engager sa responsabilité contractuelle de droit commun de manière à permettre l'indemnisation des préjudices ainsi subis.

- qu'il y a une absence de garantie en l'état de l'impossibilité pour l'assuré en sa qualité de professionnel de fabricant de cheminée et de pose d'insert, d'ignorer les conséquences de ses manquements aux règles de l'art :

- qu'en application des dispositions de l'article L.113-1 du code des assurances, des stipulations de la police concernant l'inobservation inexcusable des règles de l'art et du rapport de l'expert ayant décrit l'ensemble des graves manquements commis par la société l'Univers de la cheminée aux règles de l'art quant à la pose d'un insert et la qualification plus globale de « mauvais bricolage » de la mise en 'uvre de l'insert ;

- que vu le caractère causal des manquements avec le sinistre de l'espèce la société Axa France Iard est bien fondée à dénier sa garantie à la société l'Univers de la cheminée en l'état de l'impossibilité pour son assuré d'ignorer les conséquences de ses manquements aux règles de l'art.

- sur la juste indemnisation des préjudices':

- qu'il est acquis que les époux [Y] ont le 25 novembre 2014 vendu leur bien à la commune et qu'il est donc acquis qu'ils n'auront pas à la reconstruire, si bien qu'il convient de les indemniser non pas du coût de la reconstruction de l'immeuble ( dont il n'est pas contesté l'évaluation faite par le cabinet B2M à la somme de 199'327,49 euros TTC) mais de la valeur vénale du bien qui peut être estimée au vu de la localisation du bien et de sa structure à la somme de 130'000 euros dont devra être déduite la somme de 10'000 euros déjà perçue suite à la vente du bien à la commune.

- que le coût du mobilier évalué par l'expert judiciaire à la somme de 37'597 euros n'est pas discuté.

- sur l'irrecevabilité des demandes de la société Swisslife Assurance de biens en son appel incident':

- que la compagnie Swislife Assurance de biens ne produit pas aux débats les conditions générales et particulières de la police dommages justifiant l'exercice de son recours subrogatoire ce qui ne lui permet pas de justifier de l'absence d'une clause d'exclusion relative aux dommages résultant d'un vice de construction et donc de justifier que la somme versée à son assuré l'a été en exécution de l'obligation de garantie née du contrat d'assurance.

Aux termes de leurs dernières conclusions notifiées par voie électronique le 22 février 2025, M. et Mme [Y] et la société Swisslife Assurances de biens demandent à la cour de :

Vu les anciens articles 1134, 1146, 1154 et 1382 du Code Civil

Vu les articles 1240 et 1792 du code civil, dans leur rédaction actuelle

Vu les articles 542, 696 et 700 du CPC

Vu le rapport d'expertise amiable du Cabinet BRETESCHE, du 08 mai 2013

Vu le rapport d'expertise judiciaire de Monsieur [J], du 24 juillet 2015

Vu le dire du Conseil d'AXA FRANCE IARD en date du 27 mai 2015, et le rapport du Cabinet B2m

Vu la jurisprudence

Vu l'Arrêt de la Cour d'Appel de MONTPELLIER du 20 avril 2022

Vu l'Arrêt de la Cour de Cassation du 21 mars 2024

Vu le Jugement attaqué dont est présentement saisie la Cour d'Appel de NIMES sur renvoi de Cassation

Rejeter la nouvelle jurisprudence de la Cour de cassation dans son arrêt de renvoi du 21 mars 2024, cette nouvelle jurisprudence portant manifestement atteinte disproportionnée à la sécurité juridique et au droit d'accès au juge

DECLARER l'Appel incident des époux [Y] et de SWISSLIFE ASSURANCES DE BIENS recevables

DEBOUTER la Compagnie d'Assurances AXA France IARD de l'intégralité de ses demandes.

' CONCERNANT LA RECEVABILITE DES DEMANDES DES EPOUX [Y]

CONFIRMANT le Jugement attaqué

DECLARER les époux [Y] recevables à agir,

' CONCERNANT LA RECEVABILITE DES DEMANDES DE SWISSLIFE ASSURANCES DE BIENS

CONFIRMANT le Jugement attaqué

DECLARER la Compagnie SWISSLIFE ASSURANCES DE BIENS recevable à agir en sa qualité de subrogée de ses Assurés,

' CONCERNANT LA RESPONSABILITE DE LA SARL L'UNIVERS DE LA CHEMINEE

CONFIRMANT le Jugement attaqué

DECLARER la SARL L'UNIVERS DE LA CHEMINEE entièrement responsable de l'incendie du 13 février 2013 ayant détruit la maison d'habitation des époux [Y] sis [Adresse 5] à [Localité 8] par suite des non-conformités de la cheminée, ouvrage qu'elle a installé le 19 novembre 2012, au titre de l'article 1792 du Code Civil

' CONCERNENANT LA GARANTIE DE LA COMPAGNIE AXA FRANCE IARD

CONFIRMER le jugement attaqué, en ce qu'il a DIT ET JUGE que la Compagnie d'Assurances AXA France IARD devra garantir son Assurée, la SARL L'UNIVERS DE LA CHEMINEE, dans le cadre du contrat d'assurance les liant (police d'assurance n°°559185204)

INFIRMER le jugement attaqué, en ce qu'il a DIT ET JUGE que la garantie de la Compagnie d'Assurances AXA France IARD n'était pas acquise concernant le préjudice mobilier.

CONDAMNER la Compagnie d'Assurances AXA France IARD à garantir son Assurée dans le cadre du contrat d'assurance les liant (police d'assurance n°559185204), la SARL L'UNIVERS DE LA CHEMINEE, de l'intégralité des condamnations prises à son encontre.

' EN CONSEQUENCE, SUR LES PREJUDICES MATERIELS DES EPOUX [Y]

ET DE SWISSLIFE ASSURANCES DE BIENS

FIXER le préjudice des époux [Y] à la somme totale de 266.838,06 ' (deux cents soixante-six mille huit cents trente-huit euros et six centimes), se décomposant comme suit :

- Préjudice immobilier (TTC)'''''''.'''199.327,49 ',

- Préjudice mobilier '''''''''''''' 37.597,00 ',

- Préjudice pour l'emport des gravas (TTC) '''''1.607,00 ',

- Préjudice de jouissance '''''.......................15.600,00 ',

- Préjudice honoraires Expert « Assurés » ''''12.706,57 ',

Total : ''''''''''''''..'''''.266.838,06 '.

A déduire la somme de 142.610,00 ' (cent quarante-deux mille six cents dix euros) au titre de l'indemnisation perçue par leur Assureur, soit la somme totale de 124.228,06 ' (cent vingt-quatre mille deux cents vingt-huit euros et six centimes).

CONDAMNER conjointement et solidairement la SARL L'UNIVERS DE LA CHEMINEE et son Assureur la Compagnie d'Assurances AXA France IARD à payer aux époux [Y] la somme de 124.228,06 ' (cent vingt-quatre mille deux cents vint huit euros et six centimes) avec intérêts au taux légal à compter de la réception de la mise en demeure le 16 février 2016 et capitalisation par application des dispositions de l'article 1343-2 du Code Civil.

CONDAMNER conjointement et solidairement la SARL L'UNIVERS DE LA CHEMINEE et son Assureur la Compagnie d'Assurances AXA France IARD à payer à la Compagnie d'assurances SWISSLIFE ASSURANCES DE BIENS la somme de 142.610,00 ' (cent quarante-deux mille six cents dix euros) au titre de sa créance en sa qualité de subrogée de ses Assurés :

' CONCERNANT LA RESISTANCE ABUSIVE DE LA SARL L'UNIVERS DE LA CHEMINEE ET LA COMPAGNIE D'ASSURANCES AXA FRANCE IARD

CONDAMNER la SARL L'UNIVERS DE LA CHEMINEE et AXA France IARD à réparer le préjudice moral et financier subi par les époux [Y] pour leur résistance abusive.

INFIRMER le Jugement attaqué, concernant le montant alloué aux époux [Y]

CONDAMNER conjointement et solidairement la SARL L'UNIVERS DE LA CHEMINEE et son Assureur la Compagnie d'Assurances AXA France IARD à payer aux époux [Y] la somme de 10.000,00 ' (dix mille euros) à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive.

' CONCERNANT LES DEPENS ET FRAIS IRREPETIBLES

INFIRMER le Jugement attaqué, concernant le montant alloué aux époux [Y] et à SWISSLIFE ASSURANCES DE BIENS

CONDAMNER conjointement et solidairement la SARL L'UNIVERS DE LA CHEMINEE et son Assureur la Compagnie d'Assurances AXA FRANCE IARD à payer aux époux [Y] la somme de 7.000,00 ' (sept milles euros) par application des dispositions de l'article 700 du CPC.

CONDAMNER conjointement et solidairement la SARL L'UNIVERS DE LA CHEMINEE et son Assureur la Compagnie d'Assurances AXA FRANCE IARD à payer à SWISSLIFE ASSURANCES DE BIENS la somme de 15.000,00 ' (quinze milles euros).

CONDAMNER conjointement et solidairement la SARL L'UNIVERS DE LA CHEMINEE et la Compagnie d'Assurances AXA France IARD, aux entiers dépens de première instance au fond devant le TGI de RODEZ, de ceux de la procédure de référé, en ce compris les frais d'expertise, et des dépens d'appel devant la Cour d'Appel de MONTPELLIER et présentement devant la Cour d'Appel de NIMES dont, pour ces derniers, distraction au profit de Maître HARNIST et ce au visa de l'article 699 du CPC.

Ils soutiennent pour l'essentiel':

- sur la garantie décennale':

- que la compagnie Axa France Iard ne critique pas les faits en tant que tel à savoir que la société l'Univers de la cheminée a été mandatée pour installer une cheminée et poser un insert, travaux qu'elle n'a pas réalisés dans les règles de l'art, si bien qu'un incendie a pris naissance et que surtout l'origine de l'incendie ne se situe pas dans l'insert métallique en lui-même mais bien dans les travaux d'évacuation réalisés par la société l'Univers de la cheminée au-dessus de l'insert,

- que la Cour de cassation n'a pas pris la notion exacte de la nature des travaux exécutés par la société l'Univers de la cheminée en se limitant à la notion d'insert, et en occultant tous les travaux d'installation et le fait qu'un insert ne suffit pas à lui-même pour assurer le fonctionnement d'une cheminée et qu'il y a en réalité de vrais travaux de maçonnerie avec l'installation de tuyaux d'évacuation, de hottes, d'isolation, de trappes sur toute la hauteur de la cheminée et c'est bien dans les hauteurs de la cheminée que l'incendie a pris naissance et non dans l'insert lui-même, ni même à son niveau,

- que cela constitue donc des travaux d'installation d'une cheminée devenus indissociables de l'ouvrage et donc relevant de la garantie décennale';

- sur les garanties connexes contractuelles':

- que Axa France Iard est non seulement l'assureur responsabilité décennale de la société l'Univers de la cheminée mais est également l'assureur responsabilité civile de droit commun de la société,

- que les garanties connexes prévues contractuellement ont vocation à s'appliquer pour la totalité du bâtiment détruit comme pour la garantie décennale,

- que selon l'article 2.14 de la police d'assurance les meubles font bien partis des équipements garantis par Axa lesquels sont également garantis dans le cadre de la responsabilité civile selon l'article 2.17 de la police d'assurance,

- sur l'indemnisation des préjudices':

- que c'est le chiffrage même proposé par la compagnie Axa qui a été accepté dès juillet 2015 par les époux [Y] pour trouver une issue rapide et pourtant la société Axa n'a eu de cesse depuis la première instance de contester le montant des demandes en proposant une évaluation bien en dessous de la valeur vénale de la maison,

- sur la résistance abusive de la société l'Univers de la cheminée et de son assureur Axa France Iard':

- que très rapidement il a été clair que le responsable du sinistre était la société l'Univers de la cheminée mais cette dernière et son assureur ont tout fait pour retarder le règlement du dossier et l'indemnisation, et ce malgré l'acceptation par les époux [Y] du chiffrage proposé par la compagnie Axa,

- sur la non application de la jurisprudence nouvelle que la Cour de cassation':

- que l'arrêt du 21 mars 2024 porte une atteinte disproportionnée aux droits des époux [Y] car à la suite de l'incendie qui a détruit leur immeuble ils ont tout perdu et n'ont peu que compter sur la solidarité pour ne pas se retrouver sans toit.

MOTIFS

La cour relève à titre liminaire que la question de la recevabilité des époux [Y] et de la société Swisslife Assurance de biens à solliciter l'indemnisation des préjudices en lien avec l'incendie en date du 13 février 2013 malgré la vente par les époux [Y] de leur bien immobilier n'est plus en débat devant la cour d'appel de renvoi la compagnie Axa France Iard ne soutenant plus l'irrecevabilité sur ce fondement et cette question étant définitivement tranchée en l'état de la arrêt de la Cour de cassation du 21 mars 2024 qui n'a pas cassé l'arrêt attaqué sur ce point.

Sur la nature des désordres, la responsabilité de la société l'Univers de la cheminée et la garantie de la SA Axa France Iard':

La cour observe d'abord que comme en première instance et contrairement aux motifs de la Cour de cassation dans son arrêt du 21 mars 2024, les époux [Y] et la compagnie Swisslife Assurance de biens forment leurs demandes tant à l'encontre de la société l'Univers de la cheminée'que de son assureur la SA Axa France Iard sur le seul fondement de la garantie décennale ne développant aucun autre fondement et limitant leurs prétentions à une confirmation du jugement dont appel sur ce point.

La cour d'appel de renvoi n'est donc tenue qu'à l'examen de la responsabilité de la société l'Univers de la cheminée'et de la garantie de son assureur sur le seul fondement de la garantie légale décennale.

Au regard de la nouvelle jurisprudence dégagée par la Cour de cassation dans la présente affaire, laquelle jurisprudence selon l'arrêt du 21 mars 2014 est applicable à l'instance en cours en ce que selon l'arrêt elle ne porte pas d'atteinte disproportionnée à la sécurité juridique ce que ne démontrent pas les époux [Y] et la société Swisslife Assurance de biens et en ce qu'elle ne porte pas atteinte à l'accès au juge dans la mesure où la responsabilité d'un constructeur peut être recherchée sur d'autres fondements juridiques et en particulier sur la responsabilité contractuelle, si un élément d'équipement installé en remplacement ou par adjonction sur un ouvrage existant ne constitue pas en lui-même un ouvrage, il ne relève ni de la garantie décennale ni de la garantie biennale de bon fonctionnement, quel que soit le degré de gravité des désordres, mais de la responsabilité contractuelle de droit commun.

Il convient donc de déterminer en l'espèce si les travaux d'installation d'un insert au domicile des époux [Y] étant précisé qu'il n'est pas contesté qu'il s'agit d'un élément d'équipement installé sur un ouvrage existant constituent ou non un ouvrage au sens de l'article 1792 du code civil.

Concernant la notion d'ouvrage pour l'aménagement d'une cheminée existante comme au cas présent il convient de rechercher s'il y a eu notamment des travaux de maçonnerie comportant en particulier la création d'un conduit maçonné, d'un système de ventilation et d'une sortie en toiture.

En l'espèce il ressort du rapport d'expertise judiciaire, de la facture de travaux établie par la société l'Univers de la cheminée et des rapports d'expertises amiables réalisés par le cabinet Gargasi Expertises mandaté par la société Swisslife Assurance de biens'que':

- la société l'Univers de la cheminée selon facture n° 7210 en date du 19 novembre 2012 a installé dans la maison de M. et Mme [Y] un insert dans la cheminée existante et a procédé au tubage du conduit existant,

- au-dessus de l'insert il n'y avait pas de chambre de décompression placée correctement,

- l'isolation thermique de l'intérieur de la hotte a été réalisée par des petits morceaux d'isolants dont certains n'étaient pas fixés à la maçonnerie de la hotte,

- les trappes de sortie d'air chaud pouvaient se fermer complètement pouvant créer un piège à calories,

- une poutrelle en bois existante trop proche du tube installé dans le conduit a été remplacée au niveau du passage du tube par une poutrelle en béton,

- l'incendie s'est déclaré au niveau du conduit de la cheminée, et l'écart au feu avec le reste de la structure (plafond et plancher) en bois est quasiment inexistant,

- la chaleur dégagée par le tuyau d'évacuation des fumées augmentée par la chaleur concentrée dans le haut de la hotte a calciné les lattes de bois composant le plafond ainsi que les poutres environnantes,

- le point d'éclair du bois s'est abaissé et l'incendie a alors pris naissance.

Il ressort de l'ensemble de ces éléments que contrairement à ce que soutiennent les époux [Y] et la société Swisslife Assurance de biens les travaux réalisés par la société l'Univers de la cheminée ne constituent pas un ouvrage au sens de l'article 1792 du code civil, dans la mesure où la société a installé un insert dans une cheminée existante, a installé un tubage dans un conduit existant, n'a pas procédé à des travaux de maçonnerie le simple fait d'avoir remplacé une poutrelle en bois existante au niveau du passage du tube par une poutrelle en béton ne pouvant être qualifié de travaux de maçonnerie comme le démontre d'ailleurs le coût minime de cette prestation ( 185 euros pour la fourniture de la poutrelle béton et d'autres matériaux diverses, baguettes, colle, ') au regard de l'ensemble des travaux d'un coût total de 3'809,50 euros HT).

Les époux [Y] et la société Swisslife Assurance de biens affirment mais sans le démontrer que les travaux réalisés par la société l'Univers de la cheminée seraient indissociables de l'ouvrage existants, et le fait que le feu aurait pris dans le conduit et non dans l'insert à le supposer exact est indifférent dans la mesure où tant la pose d'un insert que la pose d'un tube dans un conduit existant ne constituent pas un ouvrage au sens de l'article 1792 du code civil, étant observé qu'il n'est pas soutenu que la société l'Univers de la cheminée ait réalisé le conduit maçonné ce dernier étant existant lors de son intervention.

Par conséquent dans la mesure où les travaux réalisés en novembre 2012 par la société l'Univers de la cheminée dans l'immeuble de M. et Mme [Y] sur un ouvrage existant ne peuvent être qualifiés d'ouvrage au sens de l'article 1792 du code civil, ils ne relèvent pas de la garantie décennale et ce même si le degré de gravité des désordres est avéré, mais de la responsabilité contractuelle de droit commun.

Le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Rodez le 3 juin 2019 sera donc infirmé en ce qu'il a considéré que la société l'Univers de la cheminée était en application des dispositions de l'article 1792 du code civil responsable de plein droit des désordres.

Par ailleurs c'est également sur le fondement du contrat de responsabilité obligataire souscrit par la société l'Univers de la cheminée auprès de la société Axa France Iard que le jugement dont appel a considéré que la société Axa France Iard avait l'obligation de garantir la totalité des travaux de réparation. Or dans la mesure où les travaux en cause ne relèvent de la garantie décennale obligatoire l'assureur responsabilité décennale obligatoire de l'entreprise ne peut être condamné sur ce fondement à garantir les travaux de rénovation.

Dans la mesure où la cour ne peut que répondre aux prétentions des parties et que les époux [Y] et la société Swisslife Assurance de biens se limitent à demander dans leurs prétentions devant la présente cour la condamnation de la société l'Univers de la cheminée et de son assureur sur le fondement de l'article 1792 du code civil sans former de prétention même à titre subsidiaire de condamnation sur le fondement de la responsabilité contractuelle, la cour ne peut statuer sur ce fondement et ne peut par conséquent qu'infirmer le jugement déféré en ce qu'il a':

- condamné in solidum la SARL L'Univers de la cheminée et son assureur la compagnie Axa à payer aux époux [Y] la somme totale de 79.308,06' à titre de dommages et intérêts en réparation de leurs préjudices matériels et immatériels se décomposant comme suit':

- 199.327,49' TTC au titre de la reconstruction.

- l.607' TTC au titre de l'enlèvement des gravats.

- 15.600' au titre de leur préjudice de jouissance.

- 5.383,57' au titre de leurs frais d'assistance aux expertises.

- à déduire la somme de 142.610' au titre de l'indemnisation perçue par leur assureur, soit la somme totale de 79.308,06' avec intérêts au taux légal à compter de la réception de la mise en demeure 1e 16 février 2016 et capitalisation par application des dispositions de 1'article 1343-2 du code civil.

- condamné la SARL L'Univers de la cheminée à payer aux époux [Y] la somme de 37.597' à titre de dommages et intérêts en réparation de leur préjudice mobilier avec intérêts au taux légal à compter de la réception de la mise en demeure le 16 février 2016 et capitalisation par application des dispositions de l'article 1343-2 du code civil.

- condamné in solidum la SARL L'Univers de la cheminée et son assureur la compagnie d'assurances Axa à payer aux époux [Y] la somme de 4.500' à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive.

- dit que la compagnie Axa devra garantir son assurée, la SARL L'Univers de la cheminée, dans 1e cadre du contrat d'assurance les liant à 1'exclusion du préjudice mobilier et sous réserve de la franchise contractuelle de 1.500' par sinistre à la charge de cette dernière.

- condamné in solidum la SARL L'Univers de la cheminée et son assureur la compagnie Axa à payer à la compagnie d'assurances Swisslife Assurance de biens la somme de 142.6106 au titre dc sa créance en sa qualité de subrogée de ses assurés';

Et débouter M. et Mme [Y] et la société Swisslife Assurance de biens de l'ensemble de leurs demandes.

Sur les demandes accessoires':

Le jugement dont appel sera également infirmé en ses dispositions au titre des frais irrépétibles et des dépens.

L'équité ne commande pas de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, tant pour les frais irrépétibles exposés en première instance que pour ceux exposés devant la présente cour de renvoie, et chaque partie devra supporter la charge des dépens exposés par elle devant le tribunal de grande instance comme devant la cour d'appel de renvoi.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt de défaut et rendu par mise à disposition au greffe, dans les limites de sa saisine sur renvoi après l'arrêt de cassation partielle rendu le 21 mars 2024 par la Cour de cassation,

Infirme le jugement rendu le 3 juin 2019 par le tribunal de grande instance de Rodez en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Déboute M. [X] [Y] et Mme [D] [P] épouse [Y] et la société Swisslife Assurance de biens de l'ensemble de leurs demandes';

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile';

Dit que chaque partie supportera la charge des dépens exposés par elle devant le tribunal de grande instance comme devant la cour d'appel de renvoi.

Arrêt signé par la présidente et par la greffière.

© LIVV - 2025

 

[email protected]

CGUCGVMentions légalesPlan du site