CA Versailles, ch. famille 2-1, 15 mai 2025, n° 23/06618
VERSAILLES
Arrêt
Infirmation partielle
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Noyer
Conseillers :
Mme Durigon, Mme Thomas
Avocats :
Me Chartier, Me Waltregny, Me Vigouroux, SELARL Barthelemy & Waltregny Avocats Associes
FAITS ET PROCEDURE
Mme [B] [U] et M. [F] [N] ont vécu en concubinage depuis 2004.
Durant leur vie commune, M. [N] et Mme [U] ont acquis en indivision, le 20 avril 2007, à raison de 50% chacun, une maison d'habitation sise à [Localité 12] (78), pour le prix de 178 000 euros.
Cette acquisition a été financée au moyen d'un emprunt immobilier et d'un prêt à taux zéro, un troisième emprunt étant ensuite souscrit pour financer les travaux.
Les parties se sont séparées fin 2014 et M. [N] a alors vécu seul dans le bien indivis. Ce dernier été vendu le 23 juin 2018 au prix de 247 000 euros. Le solde du prix de vente après remboursement des emprunts, soit 119 231,51 euros, est séquestré entre les mains du notaire.
A la suite d'une assignation délivrée le 15 juin 2020 par M. [N], le juge aux affaires familiales du tribunal judiciaire de Versailles, par un jugement contradictoire du 16 juin 2023, a notamment :
- ordonné l'ouverture des opérations de comptes, liquidation et de partage de l'indivision existant entre M. [N] et Mme [U],
- renvoyé les parties devant M. [M], notaire à [Localité 11] (78), ainsi désignée pour y procéder, dans le cadre des dispositions des articles 1364 et suivants du code de procédure civile, et selon ce qui aura été tranché dans le jugement,
- commis le juge du cabinet 9 pour en surveiller le déroulement et dresser rapport en cas de difficulté,
- dit qu'en cas d'empêchement, le notaire et le magistrat commis pourront être remplacés par simple ordonnance rendue sur requête,
- autorisé le notaire désigné à interroger [9], [10], l'administration fiscale et tout organisme centralisant les information relatives aux contrats d'assurance-vie, sans que le secret professionnel puisse lui être opposé,
- dit qu'il appartiendra au notaire commis d'établir les comptes entre les parties, de préciser la consistance exacte de la masse à partager, de procéder, au besoin, à la constitution des lots pour leur répartition, et réaliser, en cas de besoin, leur tirage au sort,
- dit qu'à défaut de présentation d'un des copartageant le notaire pourra le mettre en demeure par acte extrajudiciaire de se faire présenter dans les formes et aux conditions prévues aux articles 841-1 du code civil et 1367 du code de procédure civile,
- dit que le notaire dressera un état liquidatif, dans le délai d'un an suivant sa désignation,
- dit que ce délai sera suspendu et pourra être prorogé dans les conditions prévues aux articles 1369 et 1370 du code de procédure civile,
- dit que le juge commis veillera au bon déroulement des opérations de partage et au respect du délai prévu à l'article 1369 du code de procédure civile, et qu'il pourra à cette fin, même d'office, adresser des injonctions aux parties ou au notaire commis, prononcer des astreintes et procéder au remplacement du notaire commis par le tribunal,
- dit que si un acte de partage amiable est établi en cours de procédure, le notaire en informera le juge qui constatera la clôture de la procédure,
- dit qu'en cas de désaccord des copartageants sur le projet d'acte liquidatif dressé par le notaire, ce dernier transmettra au juge commis un procès-verbal reprenant les dires respectifs des parties ainsi que le projet d'état liquidatif,
- dit que le tribunal statuera sur les points de désaccords sur le fondement des articles 1374 à 1376 du code de procédure civile,
- dit que, sous réserve de justifier de leur règlement devant le notaire, M. [N] détient sur l'indivision une créance au titre du remboursement des échéances du crédit immobilier, du crédit à taux zéro et du crédit travaux concernant le bien indivis qu'il a réglées seul du 1er octobre 2014 jusqu'à la vente,
- dit que sous réserve de justifier de leur règlement devant le notaire, M. [N] détient une créance sur l'indivision au titre des taxes foncières, taxes d'habitation et assurance habitation relatives au bien indivis qu'il a réglées seul du 1er janvier 2015 jusqu'à la vente du bien,
- débouté M. [N] de sa demande de créance relative aux dépenses courantes ([8], fioul, frais d'entretien etc.) exposées pour le bien indivis,
- débouté M. [N] de sa demande de créance au titre des dépenses de matériaux et fournitures utilisés pour la construction des améliorations de la maison,
- fixé la rémunération de l'activité personnelle de M. [N] dans la transformation du bien indivis à la somme de 30 000 euros, et dit qu'il détient une créance de ce montant sur l'indivision,
- débouté M. [N] de sa demande de créance au titre de sa gestion du bien indivis,
- débouté M. [N] de sa demande de créance relative à un prélèvement de 5 430 euros effectué par Mme [U] sur le compte joint,
- débouté M. [N] de sa demande de créance relative aux frais bancaires,
- dit que M. [N] est redevable envers l'indivision d'une indemnité d'occupation de 823 euros par mois du 1er janvier 2015 jusqu'à la vente,
- débouté M. [N] de sa demande de dommages et intérêts pour perte de chance,
- débouté les parties de leurs demandes sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,
- rejeté toute autre demande plus amples ou contraires,
- ordonné l'emploi des dépens en frais généraux de partage.
Par déclaration du 22 septembre 2023, M. [N] a fait appel de cette décision en ce qu'elle :
- l'a débouté de sa demande de créance relative aux dépenses courantes ([8], fioul, frais d'entretien etc..) exposées pour le bien indivis,
- l'a débouté de sa demande de créance au titre des dépenses de matériaux et fournitures utilisés pour la construction des améliorations de la maison,
- l'a débouté de sa demande de créance au titre de sa gestion du bien indivis,
- l'a débouté de sa demande de créance relative à un prélèvement de 5.430 euros effectué par Mme [U] sur le compte joint,
- l'a débouté de sa demande de créance relative aux frais bancaires,
- a dit qu'il est redevable envers l'indivision d'une indemnité d'occupation de 823 euros par mois du 1er janvier 2015 jusqu'à la vente,
- l'a débouté de sa demande de dommages et intérêts pour perte de chance,
- l'a débouté de ses demandes sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- a rejeté toute ses autres demandes plus amples ou contraires.
Dans ses dernières conclusions du 29 avril 2024, M. [N] demande à la cour de :
- De débouter Madame [U] de son appel incident et de toutes ses demandes.
- De confirmer le jugement du 16 juin 2023 en ce qu'il a :
* ordonné l'ouverture des opérations de liquidation et de partage de l'indivision existant entre [F] [N] et [B] [U],
* dit que sous réserve de justifier de leur règlement devant notaire, [F] [N] détient sur l'indivision une créance au titre du remboursement des échéances du crédit immobilier, du crédit à taux zéro et du crédit travaux concernant le bien indivis qu'il a réglées seul du 1er octobre 2014 jusqu'à la vente ;
* dit que sous réserve de justifier de leur règlement devant notaire, [F] [N] détient une créance sur l'indivision au titre des taxes foncières, taxes d'habitation et assurance habitation relatives au bien indivis qu'il a réglées seul du 1er janvier 2015 jusqu'à la vente du bien ;
* Fixé la rémunération de l'activité personnelle de [F] [N] dans la transformation du bien indivis à la somme de 30.000 euros, et dit qu'il détient une créance de ce montant sur l'indivision.
- D'infirmer le jugement en ce qu'il a :
* débouté [F] [N] de sa demande de créance relative aux dépenses courantes ([8], fioul, frais d'entretien etc..) exposées pour le bien indivis ;
* débouté [F] [N] de sa demande de créance au titre des dépenses de matériaux et fournitures utilisés pour la construction des améliorations de la maison ;
- débouté [F] [N] de sa demande de créance au titre de sa gestion du bien indivis ;
- débouté [F] [N] de sa demande de créance relative à un prélèvement de 5.430 euros effectué par [B] [U] sur le compte joint ;
* débouté [F] [N] de sa demande de créance relative aux frais bancaires
* dit que [F] [N] est redevable envers l'indivision d'une indemnité d'occupation de 823 euros par mois du 1er janvier 2015 jusqu'à la vente ;
* débouté [F] [N] de sa demande de dommages et intérêts pour perte de chance ;
* débouté [F] [N] de ses demandes sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile;
* rejeté toute autre demande de [F] [N] plus amples ou contraires.
Et statuant de nouveau, il est demandé à la Cour de :
- Juger que les dépenses courantes payées par Monsieur [N] s'élèvent sauf à parfaire à 7.110,04 euros, fixer la créance de Monsieur [N] à ce titre sur l'indivision à la somme de 3.555,02 euros et condamner Madame [U] au paiement de cette somme.
- Juger que les dépenses de matériaux et fournitures utilisées pour la construction et l'amélioration du bien indivis payées par Monsieur [N] s'élèvent sauf à parfaire à 43.912 euros, fixer la créance de Monsieur [N] à ce titre sur l'indivision à la somme de 21.956,33 euros et condamner Madame [U] au paiement de cette somme.
- fixer la rémunération de Monsieur [N] pour la gestion du bien indivis à 3.000 euros et condamner Madame [U] à lui payer cette somme.
- Dire et juger que Melle [U] doit à l'indivision la somme de 50.000 euros à titre de perte de chance d'avoir vendu le bien indivis à 300.000 euros, du fait de son attitude dilatoire,
- condamner Melle [U] à payer à Monsieur [N] la somme de 4.275,17 euros, en remboursement des frais bancaires ;
- condamner Melle [U] à payer à Monsieur [N] la somme de 5.430 euros indûment prélevée sur le compte joint.
- ordonner la capitalisation des intérêts sur toutes les condamnations à compter de la date de l'assignation.
- condamner Melle [U] à 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- CONDAMNER Melle [U] aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître CHARTIER, avocat aux offres de droit.
Par conclusions du 31 janvier 2024, Mme [U] a formé appel incident. Dans ses dernières conclusions du 13 mai 2024, elle demande à la cour de :
- Infirmer le jugement en ce qu'il a :
' dit que, sous réserve de justifier de leur règlement devant le notaire, [F] [N] détient sur l'indivision une créance au titre des taxes foncières, mais uniquement pour la partie correspondant à la taxe d'ordures ménagères, taxes d'habitation et assurance habitation relatives au bien indivis qu'il a réglées seul du 1er janvier 2015 jusqu'à la vente du bien,
' fixé la rémunération de l'activité personnelle de [F] [N] dans la transformation du bien indivis à la somme de 30.000 euros, et dit qu'il détient une créance de ce montant sur l'indivision,
- Le confirmer au surplus,
Statuant à nouveau,
- Débouter Monsieur [F] [N] de sa demande de fixation d'une créance au titre des taxes ordure ménagères, taxes d'habitation et assurance habitation relatives au bien indivis qu'il a réglées seul du 1er janvier 2015 jusqu'à la vente du bien,
A titre principal,
- Débouter Monsieur [F] [N] de sa demande de fixation d'une créance résultant des travaux qu'il a réalisé dans le bien indivis, et à titre subsidiaire, rapporter le montant de la rémunération de Monsieur [N] au titre de ces travaux à de plus justes proportions,
- Débouter Monsieur [N] de l'ensemble de ses demandes plus amples et contraires,
- Condamner Monsieur [F] [N] à payer à Madame [B] [U], la somme de 5.000 euros au titre des frais irrépétibles qu'elle a exposés ;
- Condamner Monsieur [F] [N] aux dépens.
- Débouter Monsieur [F] [N] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que de sa demande au titre des dépens.
L'ordonnance de clôture a été prononcée le 21 janvier 2025.
Par conclusions du 3 mars 2025 adressées au juge de la mise en état, M. [N] sollicite le rabat de l'ordonnance de clôture.
Par message RPVA en date du 31 mars 2024, la cour a demandé aux parties de se prononcer, avant le 10 avril 2025 12h00, sur le point de savoir si elle était bien saisie des indemnités d'occupation, frais irrépétibles de première instance et capitalisation des intérêts, notamment au regard de l'article 954 du code de procédure civile et du principe selon lequel la cour n'est saisie que de prétentions figurant au dispositif des dernières écritures, prétentions soutenues par des moyens de fait et de droit exposés dans la partie 'motivation'.
Les parties ont répondu le 09 avril 2024. Sur l'indemnité d'occupation et les frais irrépétibles de première instance, M. [N] affirme avoir saisi la cour d'une véritable prétention, ce que conteste Mme [U]. Quant à la capitalisation des intérêts, Mme [U] affirme qu'elle ne constitue pas vraiment une prétention et qu'elle trouve application de plein droit, ce à quoi se rallie M. [N].
Pour un exposé plus détaillé des faits, de la procédure, des moyens et prétentions des parties, la cour renvoie expressément à la décision déférée, ainsi qu'aux conclusions déposées.
PAR CES MOTIFS
1. Sur la demande de révocation de clôture
Il sera rappelé, en tant que de besoin, que le conseiller de la mise en état, au visa de l'article 802 du code de procédure civile, a rejeté la demande de révocation de l'ordonnance de clôture présentée par conclusions du conseil de M. [N], visant à communiquer de nouvelles pièces, les conclusions visant ces pièces étant postérieures à la date de l'ordonnance.
2. Sur l'indemnité d'occupation
Le jugement querellé a dit que M. [N] est redevable envers l'indivision d'une indemnité d'occupation de 823 euros par mois du 1er janvier 2015 jusqu'à la vente.
M. [N] a relevé appel de cette disposition du jugement entrepris et a repris sa demande d'infirmation de cette disposition dans ses dernières conclusions. Il a, dans la partie 'motivation' de ses écritures, soulevé le fait qu'il n'avait jamais occupé privativement et exclusivement le bien indivis, n'y vivant pas, sa domiciliation postale à cet endroit étant de circonstance.
Pour autant, il n'a pas émis de prétentions spécifiques relativement à cette indemnité d'occupation dans la partie dispositive de ses dernières conclusions, ne sollicitant pas la suppression de cette indemnité ou qu'il soit dit qu'il n'était pas redevable de celle-ci envers l'indivision.
De son côté, Mme [U] n'a pas relevé appel incident de cette disposition dont elle demande la confirmation.
Il en résulte que la cour, qui n'est saisie que des prétentions émises par les parties dans le 'dispositif' de leurs dernières conclusions, n'est pas saisie de prétentions de M. [N] relatives aux indemnités d'occupation.
3. Sur les demandes de M. [N] de créances sur l'indivision
L'article 815-13, alinéa 1er du code civil dispose :
Lorsqu'un indivisaire a amélioré à ses frais l'état d'un bien indivis, il doit lui en être tenu compte selon l'équité, eu égard à ce dont la valeur du bien se trouve augmentée au temps du partage ou de l'aliénation. Il doit lui être pareillement tenu compte des dépenses nécessaires qu'il a faites de ses deniers personnels pour la conservation desdits biens, encore qu'elles ne les aient point améliorés.
3.1 sur les taxes fiscales et l'assurance-habitation
Le jugement querellé a dit que M. [N] détenait une créance sur l'indivision, au titre du payement des taxes fiscales et assurance habitation qu'il avait effectué pour le compte de l'indivision.
Mme [U] a formé appel incident sur ce point, relevant que la taxe d'habitation, la taxe des ordures ménagères incluse dans la taxe d'habitation et l'assurance-habitation sont des charges incombant à l'indivisaire occupant des lieux et non à l'indivision et que ces postes de dépenses sont mentionnées également dans la liste des charges récupérables. Elle estime donc que ces trois postes de dépenses doivent être exclus de la créance de M. [N] au titre des taxes fiscales et assurance.
M. [N] ne conclut pas sur ce point.
3.1.2 sur la taxe d'habitation
La taxe d'habitation doit être payée par l'indivision, en contrepartie du versement d'une indemnité par l'indivisaire qui l'occupe privativement. Si auparavant la jurisprudence considérait que l'indivisaire qui occupait le bien devait prendre cette charge à son compte, la Cour de cassation considère désormais que cette dépense est une dépense de conservation à la charge de l'indivision (Civ. 1ère, 10 février 2021, pourvoi N°19-19.271). Est indifférent aux débats que cette dépense nécessaire fasse partie des charges locatives récupérables par le propriétaire sur son locataire, prévues au décret 87-113 du 26 août 1987.
En l'espèce, M. [N] a acquitté cette taxe d'habitation depuis le 1er janvier 2015 jusqu'au 23 juin 2018. Il détient donc une créance sur l'indivision. Mme [U] doit donc être déboutée de sa demande visant à voir dire que cette dépense doit rester à la charge de M. [N].
La décision sera donc confirmée sur ce point.
3.1.2 sur l'assurance habitation
Il est acquis que l'assurance habitation, qui tend à la conservation de l'immeuble, incombe à l'indivision, même si le bien est occupé privativement par un co-indivisaire (1ère Civ, 20 janvier 2004, N° 01-17.124 et 1ère Civ, 16 mars 2016, N° 15-15.704).
En l'espèce, M. [N] a payé cette assurance du 1er janvier 2015 jusqu'au 23 juin 2018. Mme [U] ne distingue pas les différents postes possibles de l'assurance, se contentant de demander à la cour d'écarter la totalité de l'assurance habitation qu'elle estime devoir reposer sur l'occupant des lieux, alors qu'elle incombe en réalité à l'indivision. Sa demande sera donc rejetée.
La décision sera confirmée sur ce point.
3.1.3 sur la taxe des ordures ménagère
Il résulte de la jurisprudence que l'impôt foncier, qui tend à la conservation de l'immeuble indivis, au sens de l'article 815-13, alinéa 1, du code civil incombe à l'indivision jusqu'au jour du partage et non au seul co-indivisaire occupant privativement les lieux (1ère Civ., 13 janvier 2016, N°14-24.767). L'indivisaire qui a employé ses deniers personnels pour faire face à cette dépense dispose d'une créance de ce chef à l'encontre de l'indivision (1re Civ., 5 décembre 2018, pourvoi n° 17-31.189)
L'article 1523 du code général des impôts dispose que la taxe d'enlèvement des ordures ménagères 'est imposée au nom des propriétaires du bien ou usufruitiers et exigibles contre eux et leurs principaux locataires'. En cas d'indivision, la taxe sur les ordures ménagères, liée à la taxe foncière, incombe non au co-propriétaire indivis occupant les lieux mais à l'indivision, puisque inhérente non à l'occupation effective d'un bien mais à sa propriété, chaque co-indivisaire devant l'acquitter au prorata de ses droits dans l'indivision. Est indifférent aux débats que cette dépense nécessaire fasse partie des charges locatives récupérables par le propriétaire sur son locataire, selon le décret 87-113 du 26 août 1987.
En l'espèce, M. [N] a acquitté cette taxe foncière, incluant la taxe des ordures ménagères, du 1er janvier 2015 jusqu'au 23 juin 2018. Or, cette charge reposant sur l'indivision et non sur le co-propriétaire occupant les lieux, M. [N] possède une créance sur l'indivision à ce titre.
La demande de Mme [U] visant à voir dire que cette dépense repose sur le seul M. [N] sera rejetée et la décision querellée confirmée sur ce point.
3.2 sur les dépenses courantes
Le jugement querellé a rejeté la demande de M. [N] visant à voir dire qu'il détenait une créance de 7 110 euros sur l'indivision, au titre des factures de fioul, électricité, entretien de la chaudière qu'il avait acquitté.
M. [N] sollicite l'infirmation de cette disposition, relevant qu'il n'occupait pas le bien indivis et que ces dépenses n'étaient pas liées à l'entretien courant.
Mme [U] demande la confirmation de la disposition entreprise, relevant que ces dépenses sont des dépenses courantes devant rester à la charge de l'occupant du bien, que M. [N] ne justifie pas de ses dépenses et que M. [N] occupait effectivement le bien comme en justifie les cinq mandats de vente (entre mai 2016 et avril 2017) dans lequel il se domicilie au bien indivis.
* En droit, les charges d'entretien courant, liées à l'occupation effective du bien, qui ne modifient ni l'état ni la valeur du bien, n'ouvrent pas droit à indemnisation, restant à la charge de l'indivisaire occupant le bien et non à la charge de l'indivision (1ère civ, 28 mars 2006, N°04-10.596).
En l'espèce, M. [N] a acquitté des dépenses d'énergie et fluide concernant le bien indivis. Il ne peut obtenir que ce soit l'indivision qui les prenne à sa charge, ayant entrepris ses dépenses à raison de son occupation, même temporaire du bien, pour ses confort et usage personnels. Il sera débouté de sa demande de créance sur l'indivision à ce titre.
La décision entreprise sera confirmée sur ce point.
3.3 sur les matériaux et fournitures pour les travaux
Le jugement querellé a rejeté la demande de M. [N] de créance de 43 912 euros sur l'indivision, au titre des matériaux et fournitures qu'il avait acquittés à raison des travaux qu'il avait personnellement entrepris sur le bien indivis, relevant que chacun des concubins est censé avoir assumé les charges lui incombant et qu'aucun justificatif n'était fourni pour des dépens postérieurs au 01 janvier 2015.
M. [N] sollicite l'infirmation de cette disposition, relevant qu'il ne s'agit pas de charges lui incombant mais de dépenses d'amélioration et de construction qu'il a entrepris dans l'intérêt de l'indivision. Il estime que ces dépenses incombaient à l'indivision et non à lui seul.
Mme [U] sollicite la confirmation du jugement entrepris, relevant que les travaux entrepris par les concubins avaient été pris en charge par un prêt spécifique dédié à leur financement et remboursés par les deux concubins. Elle soulève en outre que M. [N] ne justifie pas des dépenses qu'il a réalisées et que si M. [N] a réalisé des travaux, cette charge a été exposée par lui à raison des besoins de la vie commune, sans recours possible contre sa concubine.
En l'espèce, M. [N], à supposer qu'il ait financé des matériaux et fournitures et qu'il l'ait fait au profit du bien indivis, étant rappelé que les deux concubins avaient souscrit tous les deux un prêt bancaire destiné à financer les travaux du bien indivis, ne justifie pas que les dépenses entreprises constituaient des dépenses de conservation ou d'amélioration du bien indivis et non des dépenses d'entretien courant. Il sera en outre relevé qu'un nombre important de dépenses aurait été, selon ses propres déclarations, entreprises avant le 01 janvier 2015, soit à une époque où les deux concubins vivaient ensemble dans le bien indivis (pièces N° 08 - relevé de dépenses effectuées par le seul M. [N]) et que ces dépenses correspondent donc à une charge lui incombant. M. [N] sera donc débouté de sa demande.
La décision entreprise sera confirmée sur ce point.
3.4 sur les transformations opérées sur le bien indivis par M. [N]
Le jugement querellé a fixé à la somme de 30 000 euros la créance de M. [N] sur l'indivision, eu égard à son activité personnelle, au vu des factures d'électricité de 17 280 euros et de maçonnerie peinture de 28 976 euros, soit 46 256 euros.
Mme [U] qui a relevé appel incident, sollicite l'infirmation de cette disposition. Elle relève que M. [N] n'est pas intervenu comme professionnel de travaux qualifiés et qu'il ne peut donc prétendre à une rémunération d'ordre professionnel, alors qu'il produit des devis de professionnels, qui eux bénéficient des garanties légales et que le coût de la main d''uvre est en réalité augmentée de la marge réalisée par l'entreprise du BTP. Elle estime donc qu'en retenant cette valeur le premier juge a surestimé le coût réel des travaux réalisés par M. [N], alors même qu'il était en arrêt de travail et non assuré, à la différence d'un professionnel du bâtiment, visant l'article 1792-1 du code civil. Elle demande donc à ce que M. [N] soit débouté de sa demande ou, à titre subsidiaire, que celle-ci soit ramenée à de plus justes proportions.
M. [N] demande la confirmation de la disposition entreprise, relevant que Mme [U] ne conteste pas la réalité des travaux qu'il a effectués, qui sont actés dans l'acte de vente de la maison et insistant sur la plus-value que ces travaux ont apporté au bien indivis.
Aux termes de l'article 815-12 du code civil, l'indivisaire qui gère le bien a droit à la rémunération de son activité dans les conditions fixées à l'amiable, ou, à défaut, par décision de justice.
Si l'activité personnelle déployée par un indivisaire ayant contribué à améliorer un bien indivis ne peut être assimilée à une dépense d'amélioration, dont le remboursement donnerait lieu à application de l'article 815-13 du code civil ; il en résulte que la plus-value de l'immeuble accroît à l'indivision, l'indivisaire peut prétendre à la rémunération de son activité, conformément à l'article 815-12 du même code.
En l'espèce, M. [N] rappelle que le bien indivis a été acheté 178 000 euros (pièce N° 1 - acte notarié d'achat) et vendu 247 000 euros (pièce N° 12 - acte notarié de vente), soit une plus-value réalisée de 69 000 euros. Il affirme que celle-ci provient en grande partie des travaux qu'il a effectués grâce à son industrie personnelle sur le bien (pièce N° 19 - déclaration d'achèvement des travaux).
Mme [U] ne conteste ni les travaux effectués, ni que ce soit M. [N] qui les ait personnellement effectués, ni la plus-value que les parties en ont retirée. Est indifférent que M. [N] ne puisse apporter une garantie sur les travaux effectués, le couple en ayant bénéficié, à travers la plus-value opérée.
C'est à bon droit que le premier juge a fixé à 30 000 euros l'indemnité due par l'indivision à M. [N]. La demande de Mme [U] visant à voir infirmer la disposition querellée et rejeter la demande de M. [N] sera écartée.
La décision sera confirmée de ce chef.
3.5 sur la gestion opérée par M. [N]
Le jugement querellé a rejeté la demande de M. [N] visant à se voir allouer la somme de 3 000 euros, au titre de son activité de gérant.
M. [N] sollicite l'infirmation de cette disposition, relevant que pendant près de quatre ans, il a géré seul le bien indivis, notamment en payant les dépenses courantes et les taxes et en faisant les démarches auprès des agences immobilières pour mettre en vente le bien.
Mme [U] n'a pas conclu sur ce point précis.
* Aux termes de l'article 815-12 du code civil, l'indivisaire qui gère le bien a droit à la rémunération de son activité dans les conditions fixées à l'amiable, ou, à défaut, par décision de justice.
En l'espèce, M. [N] ne démontre pas qu'il a géré de façon particulièrement fine, spécifique ou complexe l'unique bien indivis, propriété des concubins et que cette gestion lui aurait pris beaucoup de temps. Les tâches qu'il allègue se rapportent à une gestion ordinaire d'un bien que l'on occupe (payement des factures courantes). La cour note également que M. [N] réclame au titre de sa gestion du bien sur le fondement de l'article 815-12 du code civil, à la fois le coût des travaux entrepris (cf : supra) et en même temps la stricte gestion du bien. N'étayant pas suffisamment sa demande, il sera débouté de celle-ci.
Le jugement entrepris sera confirmé de ce chef.
3.6 sur le prélèvement bancaire opérée par Mme [U]
Le jugement querellé a rejeté la demande de M. [N] visant à se voir octroyer la somme de 5 430 euros, au titre d'un retrait indu de Mme [U] sur le compte-joint commun des concubins à la [14].
M. [N] sollicite l'infirmation de cette décision, relevant que Mme [U] avait brutalement vidé le compte joint y faisant un retrait de 5 430 euros, alors que ce compte avait toujours été créditeur auparavant.
Mme [U] demande la confirmation du jugement, ne contestant pas ce retrait bancaire qu'elle a effectué pour faire face aux dépenses courantes, alors que les parties vivaient toujours ensemble et qu'elle déposait de façon habituelle ses salaires sur ledit compte.
* En l'espèce, Mme [U] verse le relevé de compte joint qui atteste de son retrait de 5 408 euros et justifie que son salaire était bien versé sur ce compte (pièce N° 2).
M. [N] ne démontre pas en quoi ce retrait aurait été indu et lui aurait causé un préjudice particulier et spécifique. Sa demande sera donc rejetée.
La décision entreprise sera confirmée sur ce point.
3.7 sur les frais bancaires
Le jugement querellé a rejeté la demande de M. [N] visant à voir condamner Mme [U] à lui verser la somme de 4 275 euros, au titre des frais bancaires qu'il a dû acquitter ensuite du découvert du compte.
M. [N] relève appel de cette disposition, relevant que le découvert du compte joint de la [14], occasionnée ensuite du retrait de la somme de 5 408 euros par Mme [U] (cf : supra) l'a obligé à acquitter la somme de 4 275 euros à la banque, au titre des intérêts bancaires de retard.
Mme [U] soutient que M. [N] a abandonné dans ses dernières écritures sa demande.
* En l'espèce, force est de constater que M. [N] maintient ses demandes de condamnation de Mme [U] à hauteur d'appel, ayant visé cette disposition dans sa déclaration d'appel, en ayant sollicité l'infirmation dans ses dernières écritures dans lesquelles, après avoir motivé sa demande, il émet une prétention relativement à la condamnation de Mme [U]. C'est donc à tort que Mme [U] soutient que M. [N] aurait 'abandonné' sa demande.
Cela dit, M. [N] ne verse pas la moindre pièce, en lien avec sa demande de condamnation de Mme [U]. Sa demande sera donc rejetée.
La décision rendue sera confirmée de ce chef.
3.8 sur les dommages et intérêts
Le jugement querellé a rejeté la demande de dommages et intérêt pour perte de chance formée par M. [N] à l'encontre de l'indivision, l'ayant empêché de vendre le bien à une somme bien supérieure à celle de 247 000 euros, son prix de vente effectif.
M. [N] demande l'infirmation de cette disposition, soutenant que par ses tergiversations Mme [U] avait empêché le bien de se vendre à 314 000 euros, selon estimation du 10 octobre 2015, la vente s'étant opérée bien après, alors que le marché immobilier était orienté à la baisse.
Mme [U] demande l'infirmation de cette disposition, relevant qu'elle avait signé tous les mandats de vente en temps voulu et qu'elle avait reçu des lettres de réserve d'agences immobilières lui faisant part de la mise à prix trop élevé du bien.
En l'espèce, le seul élément objectif versé par M. [N] au soutien de sa prétention est une attestation immobilière du 10 octobre 2025 (pièce N° 16 - attestation CAPI) qui estime le bien indivis à 309 000 euros. Cette seule estimation ne vaut pas preuve de ce que le bien valait ce prix, d'autant que la cour ne sait comment il a été évalué, ni si l'agence s'est rendue sur site. De plus, M. [N] ne démontre pas que Mme [U] a tergiversé ou rechigné à signer les mandats qu'il lui avait présentés (pièces N° 6, 7 et 10 de Mme [U]).
M. [N] n'établissant pas les mérites de sa demande sera débouté de sa prétention visant à l'octroi de dommages et intérêts.
La décision entreprise sera confirmée sur ce point.
3.9 sur les frais irrépétibles
Le jugement querellé a rejeté les demandes des parties aux fins de condamnation à l'article 700 du code de procédure civile.
M. [N] demande l'infirmation de cette disposition. S'il a visé cette disposition dans sa déclaration d'appel et en demande l'infirmation dans ses dernières conclusions, il n'émet pas de demande spécifique relative aux frais irrépétibles de première instance, se contentant d'émettre une prétention globale qui ne concerne que la condamnation de Mme [U] à lui verser 5 000 euros d'article 700 du code de procédure civile, sans distinguer les frais de première instance de ceux générés par la procédure d'appel.
Mme [U] n'a pas conclu sur ce point.
Comme exposé précédemment, au paragraphe 2 relatif à l'indemnité d'occupation, la cour n'en est donc pas saisie.
3.10 sur la capitalisation des intérêts
Le premier juge, pourtant saisi d'une demande de M. [N] visant à voir ordonner la capitalisation des intérêts à compter de la date de l'assignation, n'a pas statué sur ce chef de demande.
M. [N] maintient sa demande, Mme [U] n'a pas conclu sur ce point.
* L'article 1343-2 du code civil prévoit que les intérêts échus, dus au moins pour une année entière, produisent intérêt si le contrat le prévoit ou si une décision de justice le précise.
La cour constate que si M. [N] vise bien au dispositif de ses conclusions sa demande visant à voir ordonner la capitalisation des intérêts sur toutes les condamnations à compter de la date de l'assignation, il n'a pas fait figurer, ni ses arguments ou moyens, ni les textes de loi sur lesquels il fonde sa demande, dans la partie motifs de ses dernières conclusions.
Pour autant, la capitalisation est un mécanisme financier d'ordre public qui trouve à s'appliquer de plein droit lorsqu'elle est prononcée par le juge sur demande d'une partie. Elle ne constitue pas véritablement une prétention au sens procédural du terme mais une simple demande. Elle n'a donc pas à être soutenue par des moyens, arguments ou pièces.
La cour, qui est donc valablement saisie de cette demande, ordonnera la capitalisation des intérêts. Cette dernière sera applicable à compter du jour où sera arrêtée, à l'issue des opérations liquidatives, une créance définitive de l'une des parties envers l'autre.
4. Sur les demandes accessoires
La nature du litige et le sens de la décision rendue amènent la cour à ordonner le partage par moitié des dépens de la procédure d'appel.
La distraction des dépens sera ordonnée au bénéfice de Maître [I], conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
L'équité ne commande pas de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
Statuant en audience publique, par décision contradictoire, après débats tenus en audience publique et en dernier ressort, la cour,
RAPPELLE que le conseiller de la mise en état a rejeté la demande de M. [N] visant à voir révoquer la clôture,
CONFIRME le jugement rendu par le juge aux affaires familiales de Versailles le 16 juin 2023,
Y ajoutant,
ORDONNE la capitalisation des intérêts,
REJETTE toutes autres demandes contraires ou plus amples des parties,
CONDAMNE les parties à payer chacune la moitié des dépens d'appel,
DIT que Maître [I] pourra récupérer les dépens dont elle aura fait l'avance sans en avoir reçu provision, directement sur Mme [U].
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
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