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Décisions

CA Paris, Pôle 1 ch. 8, 16 mai 2025, n° 24/17504

PARIS

Arrêt

Infirmation

PARTIES

Demandeur :

CH (SARL)

Défendeur :

Poncelet (SCI)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Lagemi

Conseillers :

Mme Gaffinel, M. Birolleau

Avocats :

Me Scavazza, Me Tigzim, Me Hatet-Sauval, Me Rémond

TJ Paris, hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, …

29 août 2024

Par acte du 30 juin 2008, la société Poncelet a consenti à la société CH, exerçant sous l'enseigne 'Arôme', un bail commercial portant sur des locaux dépendant d'un immeuble situé [Adresse 2] à [Localité 3], moyennant un loyer annuel de 16.800 euros, hors charges et hors taxes, payable trimestriellement et d'avance.

Le 13 octobre 2023, la société Poncelet a fait signifier à la société CH un commandement de payer, visant la clause résolutoire stipulée dans le bail, pour la somme en principal de 17.276,07 euros, au titre des loyers et charges dus au 4ème trimestre 2023 inclus.

Par acte du 23 novembre 2023, la société Poncelet a assigné la société CH devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Paris aux fins, notamment, de constatation de l'acquisition de la clause résolutoire, expulsion de la défenderesse et condamnation de cette dernière au paiement, par provision, de l'arriéré locatif et d'une indemnité d'occupation.

Par ordonnance du 29 août 2024, le premier juge a :

constaté l'acquisition de la clause résolutoire et la résiliation de plein droit du bail en date du 30 juin 2008 conclu entre la société Poncelet et la société CH portant sur les locaux situés [Adresse 2] à [Localité 3] avec effet au 13 novembre 2023 à minuit ;

dit qu'à défaut de restitution volontaire des locaux précités dans le délai de 30 jours à compter de la signification de l'ordonnance, la société CH pourra être expulsée, ainsi que tous occupants de son chef, avec le cas échéant le concours d'un serrurier et de la force publique ;

dit que le sort des meubles se trouvant dans les lieux loués sera régi conformément aux articles L. 433-1 et R. 433-1 et suivants du code des procédures civiles d'exécution ;

fixé, à titre provisionnel, au montant du loyer augmenté des charges et taxes, tel qu'il résulterait de la poursuite du bail, l'indemnité d'occupation due par la société CH à la société Poncelet à compter du 14 novembre 2023 et jusqu'à la libération effective des lieux par la remise des clés ;

condamné la société CH à payer à la société Poncelet la somme provisionnelle de 31.682,75 euros à valoir sur l'arriéré locatif et d'indemnité d'occupation selon décompte arrêté au 3 juillet 2024, échéance du troisième trimestre 2024 incluse, assortie des intérêts au taux légal à compter du 13 octobre 2023 sur la somme de 10.364,00 euros et à compter du prononcé de l'ordonnance pour le surplus ;

condamné la société CH à payer à la société Poncelet, à titre provisionnel, l'indemnité d'occupation ainsi fixée, en cas de maintien dans les lieux, à compter du 1er octobre 2024 et jusqu'à la date de libération effective et définitive des lieux ;

condamné la société CH à payer à la société Poncelet la somme de 2.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

dit n'y avoir lieu à référé sur les autres demandes, dont la demande reconventionnelle de provisions sur dommages et intérêts et la demande reconventionnelle subsidiaire de délai de paiement ;

condamné la société CH au paiement des dépens, en ce compris le coût du commandement de payer du 13 octobre 2023.

Par déclaration du 14 octobre 2024, la société CH a relevé appel de cette décision en critiquant l'ensemble de ses chefs de dispositif.

Dans ses dernières conclusions remises et notifiées le 25 mars 2025, la société CH demande à la cour de :

infirmer l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau,

A titre principal,

prononcer l'irrecevabilité des demandes de la société Poncelet ;

la débouter de l'ensemble de ses demandes ;

A titre subsidiaire,

dire n'y avoir lieu à référé au regard des contestations sérieuses soulevées ;

rejeter l'ensemble des demandes de la société Poncelet en acquisition de la clause résolutoire et inviter la société Poncelet à mieux se pourvoir ;

A titre infiniment subsidiaire,

suspendre les effets de la clause résolutoire ;

lui octroyer rétroactivement les plus larges délais pour s'acquitter de sa dette locative ;

A titre reconventionnel et en toutes hypothèses,

ordonner le cas échéant sa réintégration immédiate dans les lieux loués ;

ordonner la consignation des loyers à venir jusqu'à la réalisation des travaux à venir par le bailleur ;

ordonner la diminution du loyer dû à compter de l'arrêt à intervenir de 35 % ;

condamner la société Poncelet à lui payer la somme de 4.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens de première instance et d'appel.

Dans ses uniques conclusions remises et notifiées le 24 février 2025, la société Poncelet demande à la cour de :

dire irrecevables comme nouvelles les demandes de la société CH portant sur la nullité du commandement de payer du 13 octobre 2023 et la consignation des loyers ;

débouter la société CH de l'ensemble de ses demandes ;

rectifier et en tant que de besoin infirmer l'ordonnance du chef de la date d'acquisition de la clause résolutoire ;

constater acquise à son profit la clause résolutoire visée dans le commandement délivré le 13 octobre 2023 à la société CH, à la date du 13 décembre 2023 ;

Pour le surplus,

confirmer l'ordonnance entreprise ;

En tout état de cause,

condamner la société CH à lui payer la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

condamner la société CH aux dépens en application de l'article 699 du code de procédure civile.

La clôture de la procédure a été prononcée le 26 mars 2025.

Pour un exposé plus détaillé des faits, de la procédure, des moyens et prétentions des parties, la cour renvoie expressément à la décision déférée ainsi qu'aux conclusions susvisées, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

SUR CE, LA COUR

Sur l'acquisition de la clause résolutoire et ses conséquences

Selon l'article 834 du code de procédure civile, dans tous les cas d'urgence, le président du tribunal judiciaire peut ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l'existence d'un différend.

Selon l'article 835 du même code, le président du tribunal judiciaire peut toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

En application de ces textes, il est possible, en référé, de constater la résiliation de plein droit d'un bail en application d'une clause résolutoire lorsque celle-ci est mise en oeuvre régulièrement.

Selon l'article L. 145-41 du code de commerce, toute clause insérée dans le bail prévoyant la résiliation de plein droit ne produit effet qu'un mois après un commandement demeuré infructueux. Le commandement doit, à peine de nullité, mentionner ce délai.

Faute d'avoir payé ou contesté les causes du commandement de payer dans le délai imparti, prévu au bail, le locataire ne peut remettre en cause l'acquisition de la clause résolutoire sauf à démontrer la mauvaise foi du bailleur lors de la délivrance du commandement de payer. L'existence de cette mauvaise foi doit s'apprécier lors de la délivrance de l'acte ou à une période contemporaine à celle-ci.

Au cas présent, il est constant que les loyers n'étant plus payés, la société Poncelet a fait délivrer à la société CH un commandement de payer, le 13 octobre 2023, pour la somme de 17.276,07 euros représentant l'arriéré locatif au 4ème trimestre 2023 inclus et que les causes de ce commandement n'ont pas été réglées dans le délai imparti par cet acte.

Pour s'opposer aux effets de ce commandement, la société CH fait valoir, à titre principal, que la demande tendant à la constatation de l'acquisition de la clause résolutoire est irrecevable dans la mesure où l'action a été engagée prématurément, avant l'expiration du délai imparti par le commandement de payer de sorte que la société Poncelet ne disposait d'aucun droit d'agir lors de l'introduction de l'instance et qu'elle a été privée de la possibilité de régulariser sa situation ou d'agir en opposition audit commandement devant le juge du fond.

La société Poncelet s'oppose à la fin de non-recevoir soulevée en soutenant d'une part, que lors de l'audience, elle était pourvue du droit d'agir dès lors que celle-ci s'est tenue postérieurement à l'expiration du délai visé au commandement et au bail ; que la société CH n'a eu aucune intention de régler sa dette dans le délai imparti et pouvait saisir le juge du fond si elle l'avait estimé utile.

La clause résolutoire stipulée dans bail commercial conclu entre les parties prévoit 'qu'à défaut de paiement d'un seul terme ou fraction de terme de loyer ou accessoires à son échéance ou en cas d'inexécution d'une seule des clauses et conditions du bail, et deux mois après une mise en demeure restée infructueuse, le bail sera résilié de plein droit, même en cas de paiement ou d'exécution postérieure à l'expiration des délais ci-dessus'.

Le 13 octobre 2023, la société Poncelet a fait délivrer à la société CH un commandement de payer l'arriéré locatif dans le délai de deux mois visé dans la clause résolutoire et en reproduisant les dispositions de l'article L.145-41 du code de commerce.

Il est constant que le délai d'un mois prévu par ce texte est un délai minimum qui s'impose aux parties, lesquelles peuvent toutefois y déroger en fixant contractuellement un délai plus long, comme tel est le cas en l'espèce.

Ainsi, en application du bail et du délai laissé dans le commandement de payer, la société CH disposait d'un délai de deux mois pour régler les sommes réclamées ou contester le commandement de payer en saisissant le juge du fond, lequel expirait le 13 décembre 2023.

Or, la société Poncelet a assigné la société CH devant le premier juge suivant acte du 23 novembre 2023, soit avant l'expiration du délai imparti à cette dernière pour régulariser la situation locative. Il en résulte qu'à la date de l'acte introductif d'instance, la société Poncelet était dépourvue du droit d'agir en acquisition de la clause résolutoire de sorte que ses demandes tendant au constat de la résiliation du bail, à l'expulsion de la société locataire et au paiement d'une indemnité d'occupation provisionnelle sont irrecevables.

L'ordonnance entreprise sera donc infirmée de ces chefs.

En revanche, la demande en paiement portant sur l'arriéré locatif n'étant pas encadrée par le respect du délai imparti par le commandement de payer, est recevable.

Sur la demande de provision

Selon l'article 835, alinéa 2, du code de procédure civile, dans les cas où l'existence d'une obligation n'est pas sérieusement contestable, le président du tribunal judiciaire peut accorder une provision au créancier, ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire.

Au cas présent, le premier juge a condamné la société CH au paiement de la somme de 31.682,75 euros augmentée des intérêts de retard au titre de l'arriéré locatif arrêté au troisième trimestre 2024 inclus.

Pour obtenir l'infirmation de l'ordonnance, la société CH a soutenu l'absence de pouvoir de la juridiction des référés au regard de l'exception d'inexécution qu'elle oppose.

Elle fait ainsi valoir qu'elle s'est trouvée dans l'impossibilité d'exploiter les locaux loués du fait des infiltrations de fuel subies depuis décembre 2020 provenant d'une conduite du réseau de chauffage collectif, partie commune, ne lui permettant pas d'utiliser les lieux loués conformément à la destination du bail et manifestant le manquement du bailleur à son obligation de délivrance.

La société Poncelet conteste le caractère sérieux de la contestation émise dès lors que les nuisances subies sont le fait d'un tiers à la relation contractuelle, le syndicat des copropriétaires, et ne sont pas causées par les locaux ou elle-même, précisant avoir aidé la locataire dans ses démarches auprès de son assureur et du syndic de la copropriété. Elle conteste toute responsabilité et invoque les dispositions du bail qui stipulent, d'une part, que le preneur ne peut exiger du bailleur aucune indemnité ni diminution du loyer pour tous accidents et tous dégâts qui pourraient survenir dans les lieux loués par suite de rupture de canalisation de gaz, d'eau, d'électricité ou de chauffage central et, d'autre part, qu'il renonce à exercer toute action de ce chef contre le bailleur.

Il ressort des stipulations du bail que la société Poncelet a donné en location à la société CH une boutique située au rez-de-chaussée à droite en entrant de la porte de l'immeuble et le sous-sol en dépendant avec escalier d'accès, afin d'y exercer une activité d'achat et de vente de produits cosmétiques, esthétiques et naturels, de bijoux fantaisie et accessoires, soins de visage, de corps et manucure, gérer un espace beauté et de relaxation.

Il n'est pas contesté que des infiltrations de fioul se sont produites dans les locaux loués à l'origine de désordres et de nuisances olfactives, la gérante de la société CH les ayant dénoncés en mars 2021, par mails envoyés au gestionnaire du bien loué, en précisant 'depuis un mois il y a un tuyau d'huile qui fuit du kérosène de chauffage pour tout l'immeuble' (mail du 3 mars 2021) ; 'le gasoil continue de s'infiltrer et le local est toujours rempli d'une très forte odeur au sous-sol ainsi qu'au rez-de-chaussée (...)' et signalant des incidences tant sur sa santé que sur son activité commerciale, celle-ci expliquant avoir perdu de la clientèle à cause de l'odeur, être obligée d'appliquer un demi-tarif, voire des soins à titre gracieux afin de limiter cette perte (mail du 8 mars 2021).

Le gestionnaire du bien a d'ailleurs adressé un mail, le 22 avril 2021, à l'assureur de la locataire dans lequel il écrivait 'Nous attirons votre attention sur les nuisances et dangers de cette fuite qui perdure, imbibe la moquette et ruisselle le long des murs. Ces nuisances et dangers sont tant sur l'impossibilité d'exploiter le local que sur la santé du preneur et de sa clientèle, (...) le risque d'incendie est aggravé et des mesures s'imposent, de même que la dépollution en urgence du local'. Il s'est également adressé au syndic de l'immeuble, par mail du 22 avril 2021, pour lui demander une intervention en urgence, en lui indiquant, notamment, 'les effluves rendent inoccupable le local. Ce qui ouvre droit à des indemnités pour le preneur, des pertes de loyers pour le bailleur à la charge du SDC'.

Les procès-verbaux de constat dressés les 4 mai 2021 et 25 novembre 2024 démontrent que les infiltrations survenues au sous-sol du local loué sont à l'origine d'une forte odeur d'hydrocarbure, perceptible de manière continue et homogène, dès l'accès au local, et que sont présentes, au sous-sol, des tâches et traces noires sur les murs et le plafond dans l'angle, sous le hall d'entrée de l'immeuble voisin, des coulures sur les murs à la jonction entre un coffrage et une canalisation au plafond et des auréoles noires sur le sol.

Il apparaît ainsi que les désordres et nuisances constatés en 2021 dans les lieux loués sont encore persistants en 2024, aucun travaux n'ayant été entrepris par quiconque pour y remédier, ni aucune indemnité n'ayant été versée à la société CH, alors que cette dernière indique dans ses conclusions que l'origine de la fuite aurait été réparée en décembre 2023.

Au regard des éléments qui précèdent et de la nature de l'activité exercée par cette société, il ne peut être sérieusement contesté que celle-ci a été fortement perturbée par les nuisances subies et que les locaux loués n'ont pu être utilisés conformément à leur destination contractuellement fixée, le représentant du bailleur ayant admis que ceux-ci étaient devenus dangereux et inexploitables.

La société CH produit des attestations émanant de M. [G], qui indique fréquenter 'le commerce de Mme [H] depuis mi-2023 (et avoir) constaté les dégâts qu'elle a subis depuis 2021. D'abord une odeur désagréable de fioul qui donne mal à la tête (et) empêche de rester longtemps au sous-sol' et de M. [F], qui précise avoir 'constaté l'état d'insalubrité de la pièce du bas depuis 2021', les 'infiltrations d'eau qui génèrent des moisissures et fortes odeurs de fuel domestique qui indisposent les personnes qui fréquentent l'établissement', ce témoin mentionnant en outre que 'l'activité de Mme [H] périclite à cause de ces problèmes : les associés sont partis, les salariés sont partis, et la clientèle se fait rare'. La société CH verse également aux débats un certificat d'arrêt de travail de Mme [H] en date du 15 février 2021, d'une durée d'un mois, pour intoxication par vapeurs toxiques et un certificat médical du 6 mai 2024 attestant d'un suivi régulier de cette dernière depuis juillet 2021.

Il apparaît ainsi que les infiltrations de fuel dont les effets persistent encore à ce jour ont affecté la substance même de la chose louée de sorte que nonobstant les clauses du bail invoquées par la société Poncelet, le manquement de cette dernière à son obligation de délivrance pourrait être retenu, la cour relevant, au surplus, qu'aucune solution n'a été apportée au preneur par cette dernière à l'exception de la délivrance, dans ce contexte, du commandement de payer visant la clause résolutoire et de l'assignation, dans les circonstances précédemment décrites, aux fins de constatation de la résiliation du bail.

La cour relève encore que les infiltrations ayant pour origine une partie commune de l'immeuble, la société CH ne pouvait pas de son chef faire entreprendre des travaux pour les faire cesser et qu'au regard de la nature des nuisances subies nécessitant, selon le mail susvisé du gestionnaire du bien loué, une dépollution de celui-ci, seul le bailleur, propriétaire du bien, pouvait intervenir pour rendre le local conforme à sa destination.

La société Poncelet ne peut utilement invoquer les dispositions de l'article 1725 du code civil selon lequel le bailleur n'est pas tenu de garantir le preneur du trouble que des tiers apportent par voie de fait à sa jouissance, et se prévaloir d'une voie de fait imputable au syndicat des copropriétaires, dont la responsabilité est manifestement engagée dès lors que le trouble subi par la société CH résulte d'une défaillance d'une partie commune. En effet, le syndicat des copropriétaires, dont la société Poncelet est membre, ne peut être considéré comme un tiers au sens de ce texte.

Dans ces conditions, la demande formée par la société Poncelet au titre de l'arriéré locatif relève de l'appréciation du juge du fond ayant seul pouvoir pour statuer sur l'étendue de l'obligation du preneur et l'éventuelle responsabilité du bailleur. Il n'y a donc pas lieu à référé de ce chef et ce nonobstant les paiements intervenus par la société CH en exécution de l'ordonnance entreprise.

Sur les demandes reconventionnelles

Sur la demande de réintégration

La société CH invoquant le commandement de quitter les lieux, qui lui a été signifié le 6 novembre 2024, et indiquant être sous la menace d'une procédure d'expulsion, demande que soit ordonnée sa réintégration dans les lieux loués dans l'hypothèse où l'expulsion serait poursuivie.

Mais, il n'y a pas lieu d'accueillir cette demande dès lors qu'il n'est pas démontré que la procédure d'expulsion a été menée à son terme.

Sur la demande de réduction des loyers et de consignation

La société CH demande, à compter de l'arrêt à intervenir jusqu'à ce que les travaux indispensables à la remise en état du local soient réalisés par qui de droit et, notamment, le bailleur, d'une part, à bénéficier d'une réduction de loyer de 35 %, et, d'autre part, à être autorisée à les consigner.

Il ne relève pas des pouvoirs du juge des référés de réduire le montant du loyer contractuel. Il n'y a donc pas lieu à référé de ce chef.

Il résulte des articles 564, 566 et 567 du code de procédure civile, qu'à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait ; elles ne peuvent ajouter aux prétentions soumises au premier juge que les demandes qui en sont l'accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire ; enfin, les demandes reconventionnelles sont recevables en cause d'appel.

La demande de consignation des loyers s'analysant comme la conséquence des demandes formées par la société CH devant le premier juge, est recevable en appel.

L'état des lieux loués justifie qu'il soit fait droit à la demande de consignation du loyer contractuel majoré des charges et taxes pour l'avenir dans l'attente de la réalisation de travaux permettant à la société CH d'exploiter les locaux dans des conditions conformes à leur destination.

Cette consignation sera ordonnée entre les mains de la Caisse des dépôts et consignations qui, en application de l'article L. 518-17 du code monétaire et financier, est chargée de recevoir les consignations de toute nature ordonnées par une décision de justice.

Les fonds consignés seront remis à la société Poncelet sur présentation à la Caisse des dépôts et consignations, soit d'un procès-verbal de constat de commissaire de justice constatant la réalisation des travaux dans les lieux loués - étant précisé que le commissaire de justice sera autorisé à pénétrer dans les lieux loués à la requête du bailleur sur présentation de la présente décision, sous réserve d'en aviser au préalable le preneur -, soit d'un document signé des deux parties et procédant au même constat.

En l'absence de travaux dans un délai de six mois, à compter de la signification de la présente décision, les sommes consignées seront restituées à la société CH.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Au regard de l'issue du litige en appel, chacune des parties supportera les dépens et frais qu'elle a exposés tant en première instance que devant la juridiction du second degré.

PAR CES MOTIFS

Infirme l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau,

Déclare irrecevables les demandes de la société Poncelet tendant à la constatation de la résiliation du bail et ses conséquences ;

Dit n'y avoir lieu à référé sur la demande de la société Poncelet tendant au paiement de l'arriéré locatif ;

Dit n'y avoir lieu à statuer sur la demande de réintégration ;

Dit n'y avoir lieu à référé sur la demande tendant à la réduction du montant du loyer contractuel ;

Déclare recevable la demande de consignation des loyers formée par la société CH ;

Ordonne, à compter de la signification du présent arrêt, la consignation du loyer contractuel majoré des charges et taxes, entre les mains de la Caisse des dépôts et consignations ;

Dit que les fonds consignés seront remis à la société Poncelet sur présentation à la Caisse des dépôts et consignations, soit d'un procès-verbal de constat d'un commissaire de justice constatant la réalisation des travaux dans les lieux loués soit d'un document signé des deux parties et procédant au même constat ;

Dit que le commissaire de justice sera autorisé à pénétrer dans les lieux loués à la requête du bailleur sur présentation de la présente décision, sous réserve d'en aviser au préalable le preneur ;

Dit qu'en l'absence de travaux dans un délai de six mois à compter de la signification du présent arrêt, les sommes consignées seront restituées à la société CH ;

Dit que chacune des parties supportera les dépens et frais exposés tant en première instance qu'en appel.

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