CA Rennes, 3e ch. com., 20 mai 2025, n° 24/05755
RENNES
Arrêt
Autre
3ème Chambre Commerciale
ARRÊT N°174
N° RG 24/05755 - N° Portalis DBVL-V-B7I-VJIY
(Réf 1ère instance : 2024L00236)
S.A.R.L. UNITEECH
C/
S.E.L.A.R.L. DAVID-GOIC & ASSOCIÉS PRISE EN LA PERSONNE DE ME [W] [P],
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Me QUESNEL
Copie certifiée conforme délivrée
le :
à :
Uniteech
Selarl David Goïc
Parquet général
TC Rennes
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 20 MAI 2025
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Président : Monsieur Alexis CONTAMINE, Président de chambre,
Assesseur : Madame Sophie RAMIN, Conseiller,
Assesseur : Madame Marie-Line PICHON, Conseillère, désignée par ordonnance du premier président de la cour d'appel de Rennes du 10 février 2025
GREFFIER :
Monsieur Jean-Pierre CHAZAL, lors des débats, et Madame Julie ROUET, lors du prononcé,
MINISTERE PUBLIC :
Monsieur Laurent FICHOT, avocat général, auquel l'affaire a été régulièrement communiquée, entendu en ses observations.
DÉBATS :
A l'audience publique du 10 Mars 2025 devant Monsieur Alexis CONTAMINE, magistrat rapporteur, tenant seul l'audience, sans opposition des représentants des parties et qui a rendu compte au délibéré collégial
ARRÊT :
Réputé contradictoire, prononcé publiquement le 20 Mai 2025 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats
****
APPELANTE :
S.A.R.L. UNITEECH immatriculée sous le numéro 907 645 253 du registre du commerce et des sociétés de RENNES agissant poursuite et diligences de ses représentants légaux domiciliés au siège
[Adresse 3]
[Localité 1]
Représentée par Me Anne-Marie QUESNEL de la SELARL QUESNEL DEMAY LE GALL-GUINEAU OUAIRY-JALLAIS BOUCHER BEUCHER -FLAMENT, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de RENNES
INTIMÉE :
S.E.L.A.R.L. DAVID-GOIC & ASSOCIÉS pris en la personne de Maître [W] [P] en qualité de mandataire et liquidateur de la société UNITEECH par jugements des 9 octobre 2023 et 18 octobre 2024
[Adresse 2]
[Localité 1]
N'ayant pas constitué avocat bien que régulièrement assignée par acte de commissaire de Justice en date du 15 novembre 2024 remis à personne morale
FAITS ET PROCEDURE :
Du 11 avril 2022 au 28 août 2023, la société Uniteech a embauché Mme [N] en contrat d'apprentissage dans le cadre de sa formation BTS.
Par ordonnance du 19 octobre 2022, le juge des référés a ordonné à la société Uniteech de payer à Mme [N] différentes sommes au titre de salaires impayés, d'une indemnité compensatrice de congés payés et de dommages et intérêts.
Les 10 et 23 juillet 2023, la société Uniteech a réglé une partie des sommes à Mme [N].
Le 9 octobre 2023, la société Uniteech a été placée en redressement judiciaire à la suite de la demande de Mme [N]. La société David-Goic & Associés, prise en la personne de M. [P], a été désignée en qualité de mandataire judiciaire.
Le 15 février 2024, le tribunal de commerce de Rennes a constaté que la société Uniteech disposait des capacités financières suffisantes pour poursuivre son activité.
Le 11 septembre 2024, la société David-Goic & Associés a saisi le tribunal d'une demande de conversion en liquidation judiciaire.
Par jugement du 09 octobre 2024, le tribunal de commerce de Rennes a :
- Prononcé la conversion de la procédure de redressement judiciaire en liquidation judiciaire et décidé de faire application de la procédure de liquidation judiciaire simplifiée de :
Société Uniteech
[Adresse 3]
[Localité 1]
Enseigne : Uniteech
Activité : high-tech, informatiques, téléphones
RCS Rennes 907 645 253 (2021 B 3399)
- Maintient M. Mignon, en qualité de juge commissaire,
- Nommé liquidateur la société David-Goic & Associés, prise en la personne de Me [P], [Adresse 2],
- Dit que conformément à l'article L. 644-2 du code de commerce, le liquidateur procédera à la vente des biens mobiliers de gré à gré ou aux enchères publiques dans les quatre mois suivant le jugement de liquidation,
- Dit qu'à l'issue de cette période, il sera procédé à la vente aux enchères publiques des biens subsistants,
- Dit que les biens mobiliers à vendre seront ceux figurant à l'inventaire déposé au greffe du tribunal de commerce,
- Dit que le liquidateur procèdera, conformément à l'article L. 644-3 du code de commerce, à la vérification des seules créances susceptibles de venir en rang utile dans les répartitions et des créances résultant d'un contrat de travail,
- Dit que conformément à l'article L. 644-5 du code de commerce, la clôture de la procédure devra intervenir au plus tard dans le délai de 6 mois à compter de la décision ayant ordonné ou décidé l'application de la procédure de liquidation judiciaire simplifiée,
- Ordonné l'exécution provisoire du présent jugement,
- Ordonné la publicité prévue par la loi en pareil cas.
Par déclaration du 18 octobre 2024, la société Uniteech a interjeté appel.
Par ordonnance du 17 décembre 2024, le premier président de chambre délégué par ordonnance du premier président a suspendu l'exécution provisoire du jugement convertissant le redressement judiciaire en liquidation judiciaire.
Il retient que le seul fait que le débiteur n'ait pas déposé de plan de redressement au terme de la période d'observation ne suffit pas à justifier la conversion en liquidation judiciaire. Il considère que les éléments soulevés par la société David-Goic & Associés permettent de présenter un plan.
Les dernières conclusions de la société Uniteech ont été déposées le 7 mars 2025.
La société David-Goic & Associés, prise en la personne de M. [P], devenue société Praxis, n'a pas constitué avocat devant la cour.
L'ordonnance de clôture a été prononcée le 27 février 2025.
Par conclusions du 3 mars 2025, la société Uniteech a demandé la révocation de l'ordonnance de clôture pour que soient prises en comptes cinq nouvelles pièces qu'elle produit pour justifier de sa situation actuelle.
La cour doit apprécier l'éventuelle impossibilité de redressement d'une entreprise à la date à laquelle elle statue. Il convient donc de prendre en compte les éléments d'appréciation les plus récents possibles. La société Uniteech produit des pièces dont une en date du 26 février 2025. Il n'est cependant justifié d'aucun évènement grave. Il y a lieu de rejeter la demande de révocation de l'ordonnance de clôture.
Les pièces n°13 à 17 produites le 3 mars 2025 par la société Uniteech permettent d'apprécier la situation de la société Uniteech à une date aussi proche que possible de celle à laquelle la cour statue. Il y a donc lieu de les recevoir.
Le 12 mai 2025, les parties ont été invitées, pour le 19 mai 2025 au plus tard, à faire valoir leurs éventuelles observations sur ces pièces.
La société Unitech a fait valoir ses observations le 19 mai 2025.
MOYENS ET PRÉTENTIONS :
La société Uniteech demande à la cour de :
- Infirmer le jugement en ce qu'il a :
- Prononcé la conversion de la procédure de redressement judiciaire en liquidation judiciaire et décidé de faire application de la procédure de liquidation judiciaire simplifiée,
- Maintient M. Mignon, en qualité de juge commissaire,
- Nommé liquidateur la société David-Goic & Associés en qualité de liquidateur,
- Dit que le liquidateur procèdera à la vente des biens mobiliers soit de gré à gré aux enchères publiques dans les quatre mois suivant le jugement,
- Dit que les biens mobiliers à vendre seront ceux figurant à l'inventaire déposé au greffe du tribunal de commerce,
- Dit que le liquidateur devra procéder à la vérification des créances,
- Dit que la clôture de la procédure devra intervenir au plus tard dans le délai de 6 mois à compter de la décision,
- Ordonné l'exécution provisoire,
Et statuant de nouveau :
- Juger que la société Uniteech n'est pas dans l'impossibilité de poursuivre son activité et que son redressement n'est pas impossible,
- Juger en conséquence que la liquidation judiciaire n'est pas caractérisée,
- Juger que la société Uniteech bénéficiera d'un redressement judiciaire,
- Accorder une prorogation exceptionnelle à la société Uniteech de la période d'observation,
- Dépens comme de droit.
Le minsitère public est d'avis de confirmer le jugement rendu en ce qu'il lui revient seul de prolonger la période d'observation et en ce que le débiteur n'a proposé aucun moyen d'apurer le passif à l'issue de cette période.
Pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties il est renvoyé à leurs dernières conclusions visées supra.
DISCUSSION :
La société Praxis, ès qualités, n'a pas constitué avocat devant la cour. Elle est réputée adopter les motifs du jugement.
La cour n'est pas saisie d'une demande de prolongation de la période d'observation décidée par le tribunal de commerce. Une infirmation de la décision dont appel entrainerait en tout état de cause un renvoi de l'affaire devant le tribunal de commerce de Rennes et permettrait l'ouverture d'une nouvelle période d'observation d'une durée maximale de trois mois.
La cour est saisie d'une demande d'infirmation du jugement en ce qu'il a ordonné la conversion de la procédure de redressement judiciaie en liquidation judiciaire.
La procédure de liquidation judiciaire est ouverte à tout débiteur commerçant en cessation des paiements et dont le redressement est manifestement impossible :
Article L. 640-1 du code de commerce dans sa version en vigueur depuis le 1er janvier 2006 :
Il est institué une procédure de liquidation judiciaire ouverte à tout débiteur mentionné à l'article L. 640-2 en cessation des paiements et dont le redressement est manifestement impossible.
La procédure de liquidation judiciaire est destinée à mettre fin à l'activité de l'entreprise ou à réaliser le patrimoine du débiteur par une cession globale ou séparée de ses droits et de ses biens.
La cessation des paiements se caractérise par l'impossibilité de faire face au passif exigible avec l'actif disponible et s'apprécie au jour où le juge statue :
Article L. 631-1 du code de commerce dans sa version en vigueur depuis le 15 mai 2022 :
Il est institué une procédure de redressement judiciaire ouverte à tout débiteur mentionné aux articles L. 631-2 ou L. 631-3 qui, dans l'impossibilité de faire face au passif exigible avec son actif disponible, est en cessation des paiements. Le débiteur qui établit que les réserves de crédit ou les moratoires dont il bénéficie de la part de ses créanciers lui permettent de faire face au passif exigible avec son actif disponible n'est pas en cessation des paiements.
Cette condition s'apprécie, s'il y a lieu, pour le seul patrimoine engagé par l'activité ou les activités professionnelles.
La procédure de redressement judiciaire est destinée à permettre la poursuite de l'activité de l'entreprise, le maintien de l'emploi et l'apurement du passif. Elle donne lieu à un plan arrêté par jugement à l'issue d'une période d'observation et, le cas échéant, à la constitution de classes de parties affectées, conformément aux dispositions des articles L. 626-29 et L. 626-30. La demande prévue au quatrième alinéa de l'article L. 626-29 peut être formée par le débiteur ou l'administrateur judiciaire.
La société Uniteech fait valoir qu'elle a communiqué les éléments comptables de l'année 2022 et les tableaux de bord ainsi que ses derniers relevés de comptes bancaires dans le cadre de la procédure de redressement judiciaire. Elle estime que le passif est principalement constitué des condamnations à l'encontre de Mme [N] et qu'elle est en mesure de payer ses charges courantes sans engendrer de nouvelles dettes.
La société Uniteech fait aussi valoir qu'elle a diversifié son activité, que son chiffre d'affaires est en augmentation et qu'elle justifie de mesures pérennes et évolutives alors que le passif est peu élevé.
A l'ouverture du redressement judiciaire, le résultat net comptable de la société Uniteech était déficitaire de 6.331 euros. La période d'observation fixée le 9 octobre 2023 a ensuite été renouvelée une fois, pour une durée totale de 12 mois. Sur cette période, aucun plan de continuation, ni aucun document comptable encourageant n'a été établi.
Le mandataire judiciaire a retenu dans son rapport du 9 septembre 2024 un passif à épurer de 5.602,80 euros hors créance superprivilégiée de l'AGS pour 1.379,30 euros.
Devant la cour, la société Uniteech présente un projet de plan d'apurement de sa dette de 5.603 euros sur une période allant de juin 2025 à juin 2028 à raison d'échéances annuelles de 1.400 euros chacune. Le chiffre d'affaires retenu pour les 9 premiers mois de l'année 2024 est de près de 62.000 euros et le chiffre d'affaires prévu pour l'année 2025 est de près de 85.000 euros.
La société Uniteech justifie avoir payé son loyer en janvier et février 2025. Elle produit des justificatifs de rentrées de paiement par carte bancaire. Ces justificatifs sont trés moyennement pertinents en ce qu'ils ne sont ni datés ni affectés à un compte identifiable mais ils sont dans la lignée des rentrées d'argent dont il est justifié pour certains mois de l'année 2024.
En l'état de ces justificatifs, il n'est pas établi que le redressement de la société Uniteech est manifestement impossible.
L'expiration de la durée de la période d'observation n'a pas pour effet de mettre fin à la procédure collective dès lors que le tribunal n'a pas été saisi d'une demande de clôture de la procédure collective dans les conditions fixées par les dispositions de l'article R.626-18 du code de commerce.
Il y a lieu d'infirmer le jugement en ce qu'il a converti la procédure en liquidation judiciaire et de renvoyer l'affaire devant le tribunal de commerce de Rennes pour poursuite des opérations de la procédure collective.
En application des dispositions de l'article L.661-9 du code de commerce, et pour permettre la mise en place d'un plan de redressement, il y a lieu d'ouvrir une nouvelle période d'observation jusqu'au 20 août 2025.
Sur les frais et dépens :
Il y a lieu de dire que les dépens de première instance et d'appel seront pris en frais privilégiés de la procédure collective.
PAR CES MOTIFS :
La cour :
- Infirme le jugement,
Statuant à nouveau :
- Dit n'y avoir lieu à conversion de la procédure de redressement judiciaire en liquidation judiciaire au profit de la société Uniteech,
- Renvoie la procédure devant le tribunal de commerce de Rennes pour poursuite des opérations de la procédure collective,
- Ouvre une nouvelle période d'observation jusqu'au 20 août 2025,
- Dit qu'en application de l'article R661-7 du code de commerce, la présente décision sera notifiée aux parties et au procureur général à la diligence du greffier de la cour et qu'une copie de la présente décision sera transmise dans les huit jours de son prononcé au greffier du tribunal de commerce de Rennes pour l'accomplissement des mesures de publicité prévues par l'article R621-8 du code de commerce,
- Rejette les demandes plus amples ou contraires des parties,
- Dit que les dépens de première instance et d'appel seront employés en frais privilégiés de procédure collective.
LE GREFFIER LE PRESIDENT
ARRÊT N°174
N° RG 24/05755 - N° Portalis DBVL-V-B7I-VJIY
(Réf 1ère instance : 2024L00236)
S.A.R.L. UNITEECH
C/
S.E.L.A.R.L. DAVID-GOIC & ASSOCIÉS PRISE EN LA PERSONNE DE ME [W] [P],
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Me QUESNEL
Copie certifiée conforme délivrée
le :
à :
Uniteech
Selarl David Goïc
Parquet général
TC Rennes
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 20 MAI 2025
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Président : Monsieur Alexis CONTAMINE, Président de chambre,
Assesseur : Madame Sophie RAMIN, Conseiller,
Assesseur : Madame Marie-Line PICHON, Conseillère, désignée par ordonnance du premier président de la cour d'appel de Rennes du 10 février 2025
GREFFIER :
Monsieur Jean-Pierre CHAZAL, lors des débats, et Madame Julie ROUET, lors du prononcé,
MINISTERE PUBLIC :
Monsieur Laurent FICHOT, avocat général, auquel l'affaire a été régulièrement communiquée, entendu en ses observations.
DÉBATS :
A l'audience publique du 10 Mars 2025 devant Monsieur Alexis CONTAMINE, magistrat rapporteur, tenant seul l'audience, sans opposition des représentants des parties et qui a rendu compte au délibéré collégial
ARRÊT :
Réputé contradictoire, prononcé publiquement le 20 Mai 2025 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats
****
APPELANTE :
S.A.R.L. UNITEECH immatriculée sous le numéro 907 645 253 du registre du commerce et des sociétés de RENNES agissant poursuite et diligences de ses représentants légaux domiciliés au siège
[Adresse 3]
[Localité 1]
Représentée par Me Anne-Marie QUESNEL de la SELARL QUESNEL DEMAY LE GALL-GUINEAU OUAIRY-JALLAIS BOUCHER BEUCHER -FLAMENT, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de RENNES
INTIMÉE :
S.E.L.A.R.L. DAVID-GOIC & ASSOCIÉS pris en la personne de Maître [W] [P] en qualité de mandataire et liquidateur de la société UNITEECH par jugements des 9 octobre 2023 et 18 octobre 2024
[Adresse 2]
[Localité 1]
N'ayant pas constitué avocat bien que régulièrement assignée par acte de commissaire de Justice en date du 15 novembre 2024 remis à personne morale
FAITS ET PROCEDURE :
Du 11 avril 2022 au 28 août 2023, la société Uniteech a embauché Mme [N] en contrat d'apprentissage dans le cadre de sa formation BTS.
Par ordonnance du 19 octobre 2022, le juge des référés a ordonné à la société Uniteech de payer à Mme [N] différentes sommes au titre de salaires impayés, d'une indemnité compensatrice de congés payés et de dommages et intérêts.
Les 10 et 23 juillet 2023, la société Uniteech a réglé une partie des sommes à Mme [N].
Le 9 octobre 2023, la société Uniteech a été placée en redressement judiciaire à la suite de la demande de Mme [N]. La société David-Goic & Associés, prise en la personne de M. [P], a été désignée en qualité de mandataire judiciaire.
Le 15 février 2024, le tribunal de commerce de Rennes a constaté que la société Uniteech disposait des capacités financières suffisantes pour poursuivre son activité.
Le 11 septembre 2024, la société David-Goic & Associés a saisi le tribunal d'une demande de conversion en liquidation judiciaire.
Par jugement du 09 octobre 2024, le tribunal de commerce de Rennes a :
- Prononcé la conversion de la procédure de redressement judiciaire en liquidation judiciaire et décidé de faire application de la procédure de liquidation judiciaire simplifiée de :
Société Uniteech
[Adresse 3]
[Localité 1]
Enseigne : Uniteech
Activité : high-tech, informatiques, téléphones
RCS Rennes 907 645 253 (2021 B 3399)
- Maintient M. Mignon, en qualité de juge commissaire,
- Nommé liquidateur la société David-Goic & Associés, prise en la personne de Me [P], [Adresse 2],
- Dit que conformément à l'article L. 644-2 du code de commerce, le liquidateur procédera à la vente des biens mobiliers de gré à gré ou aux enchères publiques dans les quatre mois suivant le jugement de liquidation,
- Dit qu'à l'issue de cette période, il sera procédé à la vente aux enchères publiques des biens subsistants,
- Dit que les biens mobiliers à vendre seront ceux figurant à l'inventaire déposé au greffe du tribunal de commerce,
- Dit que le liquidateur procèdera, conformément à l'article L. 644-3 du code de commerce, à la vérification des seules créances susceptibles de venir en rang utile dans les répartitions et des créances résultant d'un contrat de travail,
- Dit que conformément à l'article L. 644-5 du code de commerce, la clôture de la procédure devra intervenir au plus tard dans le délai de 6 mois à compter de la décision ayant ordonné ou décidé l'application de la procédure de liquidation judiciaire simplifiée,
- Ordonné l'exécution provisoire du présent jugement,
- Ordonné la publicité prévue par la loi en pareil cas.
Par déclaration du 18 octobre 2024, la société Uniteech a interjeté appel.
Par ordonnance du 17 décembre 2024, le premier président de chambre délégué par ordonnance du premier président a suspendu l'exécution provisoire du jugement convertissant le redressement judiciaire en liquidation judiciaire.
Il retient que le seul fait que le débiteur n'ait pas déposé de plan de redressement au terme de la période d'observation ne suffit pas à justifier la conversion en liquidation judiciaire. Il considère que les éléments soulevés par la société David-Goic & Associés permettent de présenter un plan.
Les dernières conclusions de la société Uniteech ont été déposées le 7 mars 2025.
La société David-Goic & Associés, prise en la personne de M. [P], devenue société Praxis, n'a pas constitué avocat devant la cour.
L'ordonnance de clôture a été prononcée le 27 février 2025.
Par conclusions du 3 mars 2025, la société Uniteech a demandé la révocation de l'ordonnance de clôture pour que soient prises en comptes cinq nouvelles pièces qu'elle produit pour justifier de sa situation actuelle.
La cour doit apprécier l'éventuelle impossibilité de redressement d'une entreprise à la date à laquelle elle statue. Il convient donc de prendre en compte les éléments d'appréciation les plus récents possibles. La société Uniteech produit des pièces dont une en date du 26 février 2025. Il n'est cependant justifié d'aucun évènement grave. Il y a lieu de rejeter la demande de révocation de l'ordonnance de clôture.
Les pièces n°13 à 17 produites le 3 mars 2025 par la société Uniteech permettent d'apprécier la situation de la société Uniteech à une date aussi proche que possible de celle à laquelle la cour statue. Il y a donc lieu de les recevoir.
Le 12 mai 2025, les parties ont été invitées, pour le 19 mai 2025 au plus tard, à faire valoir leurs éventuelles observations sur ces pièces.
La société Unitech a fait valoir ses observations le 19 mai 2025.
MOYENS ET PRÉTENTIONS :
La société Uniteech demande à la cour de :
- Infirmer le jugement en ce qu'il a :
- Prononcé la conversion de la procédure de redressement judiciaire en liquidation judiciaire et décidé de faire application de la procédure de liquidation judiciaire simplifiée,
- Maintient M. Mignon, en qualité de juge commissaire,
- Nommé liquidateur la société David-Goic & Associés en qualité de liquidateur,
- Dit que le liquidateur procèdera à la vente des biens mobiliers soit de gré à gré aux enchères publiques dans les quatre mois suivant le jugement,
- Dit que les biens mobiliers à vendre seront ceux figurant à l'inventaire déposé au greffe du tribunal de commerce,
- Dit que le liquidateur devra procéder à la vérification des créances,
- Dit que la clôture de la procédure devra intervenir au plus tard dans le délai de 6 mois à compter de la décision,
- Ordonné l'exécution provisoire,
Et statuant de nouveau :
- Juger que la société Uniteech n'est pas dans l'impossibilité de poursuivre son activité et que son redressement n'est pas impossible,
- Juger en conséquence que la liquidation judiciaire n'est pas caractérisée,
- Juger que la société Uniteech bénéficiera d'un redressement judiciaire,
- Accorder une prorogation exceptionnelle à la société Uniteech de la période d'observation,
- Dépens comme de droit.
Le minsitère public est d'avis de confirmer le jugement rendu en ce qu'il lui revient seul de prolonger la période d'observation et en ce que le débiteur n'a proposé aucun moyen d'apurer le passif à l'issue de cette période.
Pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties il est renvoyé à leurs dernières conclusions visées supra.
DISCUSSION :
La société Praxis, ès qualités, n'a pas constitué avocat devant la cour. Elle est réputée adopter les motifs du jugement.
La cour n'est pas saisie d'une demande de prolongation de la période d'observation décidée par le tribunal de commerce. Une infirmation de la décision dont appel entrainerait en tout état de cause un renvoi de l'affaire devant le tribunal de commerce de Rennes et permettrait l'ouverture d'une nouvelle période d'observation d'une durée maximale de trois mois.
La cour est saisie d'une demande d'infirmation du jugement en ce qu'il a ordonné la conversion de la procédure de redressement judiciaie en liquidation judiciaire.
La procédure de liquidation judiciaire est ouverte à tout débiteur commerçant en cessation des paiements et dont le redressement est manifestement impossible :
Article L. 640-1 du code de commerce dans sa version en vigueur depuis le 1er janvier 2006 :
Il est institué une procédure de liquidation judiciaire ouverte à tout débiteur mentionné à l'article L. 640-2 en cessation des paiements et dont le redressement est manifestement impossible.
La procédure de liquidation judiciaire est destinée à mettre fin à l'activité de l'entreprise ou à réaliser le patrimoine du débiteur par une cession globale ou séparée de ses droits et de ses biens.
La cessation des paiements se caractérise par l'impossibilité de faire face au passif exigible avec l'actif disponible et s'apprécie au jour où le juge statue :
Article L. 631-1 du code de commerce dans sa version en vigueur depuis le 15 mai 2022 :
Il est institué une procédure de redressement judiciaire ouverte à tout débiteur mentionné aux articles L. 631-2 ou L. 631-3 qui, dans l'impossibilité de faire face au passif exigible avec son actif disponible, est en cessation des paiements. Le débiteur qui établit que les réserves de crédit ou les moratoires dont il bénéficie de la part de ses créanciers lui permettent de faire face au passif exigible avec son actif disponible n'est pas en cessation des paiements.
Cette condition s'apprécie, s'il y a lieu, pour le seul patrimoine engagé par l'activité ou les activités professionnelles.
La procédure de redressement judiciaire est destinée à permettre la poursuite de l'activité de l'entreprise, le maintien de l'emploi et l'apurement du passif. Elle donne lieu à un plan arrêté par jugement à l'issue d'une période d'observation et, le cas échéant, à la constitution de classes de parties affectées, conformément aux dispositions des articles L. 626-29 et L. 626-30. La demande prévue au quatrième alinéa de l'article L. 626-29 peut être formée par le débiteur ou l'administrateur judiciaire.
La société Uniteech fait valoir qu'elle a communiqué les éléments comptables de l'année 2022 et les tableaux de bord ainsi que ses derniers relevés de comptes bancaires dans le cadre de la procédure de redressement judiciaire. Elle estime que le passif est principalement constitué des condamnations à l'encontre de Mme [N] et qu'elle est en mesure de payer ses charges courantes sans engendrer de nouvelles dettes.
La société Uniteech fait aussi valoir qu'elle a diversifié son activité, que son chiffre d'affaires est en augmentation et qu'elle justifie de mesures pérennes et évolutives alors que le passif est peu élevé.
A l'ouverture du redressement judiciaire, le résultat net comptable de la société Uniteech était déficitaire de 6.331 euros. La période d'observation fixée le 9 octobre 2023 a ensuite été renouvelée une fois, pour une durée totale de 12 mois. Sur cette période, aucun plan de continuation, ni aucun document comptable encourageant n'a été établi.
Le mandataire judiciaire a retenu dans son rapport du 9 septembre 2024 un passif à épurer de 5.602,80 euros hors créance superprivilégiée de l'AGS pour 1.379,30 euros.
Devant la cour, la société Uniteech présente un projet de plan d'apurement de sa dette de 5.603 euros sur une période allant de juin 2025 à juin 2028 à raison d'échéances annuelles de 1.400 euros chacune. Le chiffre d'affaires retenu pour les 9 premiers mois de l'année 2024 est de près de 62.000 euros et le chiffre d'affaires prévu pour l'année 2025 est de près de 85.000 euros.
La société Uniteech justifie avoir payé son loyer en janvier et février 2025. Elle produit des justificatifs de rentrées de paiement par carte bancaire. Ces justificatifs sont trés moyennement pertinents en ce qu'ils ne sont ni datés ni affectés à un compte identifiable mais ils sont dans la lignée des rentrées d'argent dont il est justifié pour certains mois de l'année 2024.
En l'état de ces justificatifs, il n'est pas établi que le redressement de la société Uniteech est manifestement impossible.
L'expiration de la durée de la période d'observation n'a pas pour effet de mettre fin à la procédure collective dès lors que le tribunal n'a pas été saisi d'une demande de clôture de la procédure collective dans les conditions fixées par les dispositions de l'article R.626-18 du code de commerce.
Il y a lieu d'infirmer le jugement en ce qu'il a converti la procédure en liquidation judiciaire et de renvoyer l'affaire devant le tribunal de commerce de Rennes pour poursuite des opérations de la procédure collective.
En application des dispositions de l'article L.661-9 du code de commerce, et pour permettre la mise en place d'un plan de redressement, il y a lieu d'ouvrir une nouvelle période d'observation jusqu'au 20 août 2025.
Sur les frais et dépens :
Il y a lieu de dire que les dépens de première instance et d'appel seront pris en frais privilégiés de la procédure collective.
PAR CES MOTIFS :
La cour :
- Infirme le jugement,
Statuant à nouveau :
- Dit n'y avoir lieu à conversion de la procédure de redressement judiciaire en liquidation judiciaire au profit de la société Uniteech,
- Renvoie la procédure devant le tribunal de commerce de Rennes pour poursuite des opérations de la procédure collective,
- Ouvre une nouvelle période d'observation jusqu'au 20 août 2025,
- Dit qu'en application de l'article R661-7 du code de commerce, la présente décision sera notifiée aux parties et au procureur général à la diligence du greffier de la cour et qu'une copie de la présente décision sera transmise dans les huit jours de son prononcé au greffier du tribunal de commerce de Rennes pour l'accomplissement des mesures de publicité prévues par l'article R621-8 du code de commerce,
- Rejette les demandes plus amples ou contraires des parties,
- Dit que les dépens de première instance et d'appel seront employés en frais privilégiés de procédure collective.
LE GREFFIER LE PRESIDENT