CA Dijon, 2e ch. civ., 15 mai 2025, n° 22/00699
DIJON
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
MV2 (SAS)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Blanchard
Conseillers :
Mme Charbonnier, Mme Kuentz
Avocats :
Me Djambazova, SCP Merienne & Associes, Me Charlot-Jacquard, SELARL Charlot & Associes
EXPOSE DU LITIGE
Le 9 juin 2020, Mme [P] [T] et M. [W] [O] ont signé le 9 juin 2020 avec la SAS MV2, deux bons de commande de travaux sur leur maison d'habitation portant sur :
- des travaux d'isolation sous toiture d'un montant de 11 000 euros TTC financés par la souscription d'un crédit auprès de la société Cofidis (n°200169),
- la pose d'un plancher pour un montant de 1650 euros TTC (n° 200164).
Par lettre recommandée adressée le 15 janvier 2021 reçue le 18 janvier suivant, ils ont entendu « se désengager » du contrat.
Par courrier recommandé du 21 janvier 2021, la société MV2 les a mis en demeure de lui permettre l'accès au chantier et à défaut de lui régler la somme de 5 830 euros à titre d'indemnité de résiliation en application des conditions générales de vente.
Sur l'assignation délivrée le 20 avril 2021 par la société MV2 et par jugement du 6 mai 2022, le tribunal judiciaire de Chaumont a :
- prononcé la nullité des deux contrats conclus entre la société MV2 et Mme [T] et M. [O], matérialisés par les deux bons de commande n°200169 et 200164 signés le 9 juin 2020,
- débouté en conséquence la société MV2 de l'ensemble de ses demandes,
- condamné la société MV2 à verser aux défendeurs la somme de 700 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné la société MV2 aux dépens.
Suivant déclaration au greffe du 2 juin 2022, la société MV2 a relevé appel de cette décision.
Prétentions et moyens de la société MV2 :
Par dernières conclusions notifiées par voie électronique le 18 août 2022, la société MV2 demande à la cour, au visa des articles L.216-1, L.216-2, L.221-18 et R.111-1 du code de la consommation, de :
infirmant le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Chaumont le 6 mai 2022,
- prononcer la résiliation des contrats de prestations de service conclus le 9 juin 2020 aux torts exclusifs de Mme [T] et M. [O] ;
en conséquence,
- condamner solidairement Mme [T] et M. [O] à verser à la société MV2 la somme de 5 830 euros au titre de l'indemnité de résiliation contractuellement prévue avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 23 février 2021 ;
- condamner in solidum Mme [T] et M. [O] à verser la somme de 2 000 euros à la société MV2 par application de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamner Mme [T] et M. [O] aux entiers dépens.
Prétentions et moyens de Mme [T] et M [O] :
Par dernières conclusions notifiées par voie électronique le 16 novembre 2022, Mme [T] et M. [O] entendent voir, au visa des articles L.242-1 et suivants du code de la consommation :
- débouter purement et simplement la société MV2 de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions ;
en conséquence :
à titre principal :
- confirmer le jugement en toutes ses dispositions ;
- constater la nullité des bons de commandes signés en méconnaissance des dispositions d'ordre public relatives au démarchage au domicile ;
- débouter la société MV2 de sa demande de condamnation de M. [O] et Mme [T] a payer l'indemnité de résiliation ;
y ajoutant :
- débouter la société MV2 de sa demande de condamnation des consorts [T]-[O] au reglement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamner la société MV2 à payer à Mme [P] [T] et M. [W] [O] la somme de 1.000 euros chacun en application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens ;
à titre subsidiaire :
- constater l'inopposabilité des conditions générales de vente et, par voie de conséquence, les consorts [T]-[O] ne pourront étre tenus au reglement de l'indemnité de résiliation ;
- débouter la société MV2 de sa demande de condamnation des consorts [T]-[O] au règlement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamner la société MV2 à payer à Mme [P] [T] et M. [W] [O] la somme de 1 000 euros chacun en application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens.
à titre in'niment subsidiaire :
- réduire le montant de l'indemnité de résiliation réclamée par la société MV2 ;
- débouter la société MV2 de sa demande de condamnation des consorts [T]-[O] au règlement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamner la société MV2 à payer à Mme [P] [T] et M. [W] [O] la somme de 1.000 euros chacun en application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens.
En application de l'article 455 du code de procédure civile, il convient de se référer aux conclusions susvisées pour un plus ample exposé des moyens des parties.
La procédure a été clôturée par ordonnance du 4 juin 2024.
MOTIFS DE LA DECISION :
Mme [T] et M. [O] soutiennent que les bons de commandes ne comportent pas l'intégralité des informations prescrites à peine de nullité par les dispositions du code de la consommation, particulièrement en l'absence de mention du nom du démarcheur.
La société MV2 fait valoir que c'est elle le professionnel au sens des dispositions du code de la consommation et que les bons de commandes sont réguliers puisqu'ils comportent l'ensemble des éléments propres à son identification.
Les deux contrats, qui comportent la mention « hors établissement », ont été conclus le 9 juin 2020 et se trouvent soumis aux dispositions du code de la consommation résultant de l'ordonnance n°2016-301 du 14 mars 2016, du décret n°2016-884 du 29 juin 2016 et de la loi n° 2017-203 du 21 février 2017.
Selon les dispositions combinées des articles L.221-9, L.221-5 et L.111-1, 4° de ce code, le professionnel doit fournir au consommateur un exemplaire du contrat conclu hors établissement comprenant de manière lisible et compréhensible, les informations relatives notamment à son identité, à ses coordonnées postales, téléphoniques et électroniques et à ses activités, pour autant qu'elles ne ressortent pas du contexte.
L'article L.242-1 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 22 décembre 2021, sanctionne de la nullité la violation des dispositions de l'article L.221-9.
Les deux bons de commande désignent sans ambiguïté la société MV2 en qualité de professionnel cocontractant des consorts [T]-[O] et comportent l'indication de sa forme sociale, de son siège social, de ses coordonnées postales, téléphoniques et électroniques.
Ils comportent également la signature d'un représentant commercial sans préciser son identité, ni ses propres coordonnées.
Selon l'article liminaire du code de la consommation, le professionnel est défini comme celui qui agit à des fins entrant dans le cadre de son activité commerciale, industrielle, artisanale, libérale ou agricole, y compris lorsqu'il agit au nom ou pour le compte d'un autre professionnel.
L'obligation d'information sur l'identité du professionnel vise à assurer la protection du consommateur qui doit être en mesure d'identifier son cocontractant, comme son représentant, que ce dernier soit salarié ou travailleur indépendant.
Il est établi par les pièces produites que le représentant commercial signataire des bons de commande, M. [F] [K], était salarié de la société MV2, en qualité de représentant commercial, de sorte qu'intervenu aux contrats dans le cadre de son activité commerciale et agissant au nom de la société MV2, il avait la qualité de professionnel au sens du code de la consommation et devait fournir aux consommateurs les informations relatives à son identité et à ses diverses coordonnées, sauf à ce qu'elles soient identiques à celles de la société qui l'emploie.
C'est donc avec raison que le premier juge a considéré que les bons de commandes étaient entachés d'une irrégularité sanctionnée de la nullité.
Le jugement sera confirmé en toutes ses dispositions.
PAR CES MOTIFS
Confirme le jugement du tribunal judiciaire de Chaumont en date du 6 mai 2022 en ses chefs de dispositif soumis à la cour,
y ajoutant,
Condamne la SAS MV2 aux dépens de l'instance d'appel ;
Condamne la SAS MV2 à payer à Mme [P] [T] et M. [W] [O], indivisément entre eux, la somme complémentaire de 1300 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.