CA Douai, 8e ch. sect. 1, 15 mai 2025, n° 23/00389
DOUAI
Arrêt
Infirmation partielle
PARTIES
Demandeur :
BNP Paribas Personal Finance (SA), Alliance (SAS)
Défendeur :
Alliance (SAS)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Benhamou
Conseiller :
Mme Ménegaire
Avocats :
Me Dremière, Me Auffret de Peyrelongue, Me Deffrennes
FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES:
Dans le cadre d'un démarchage à domicile, le 26 octobre 2016, M. [W] [E] a conclu avec la société IC GROUPE exerçant sous l'enseigne 'Immo Confort' une prestation relative à l'installation d'un kit photovoltaïque et d'un chauffe-eau thermodynamique pour un montant TTC de 21 500 euros selon bon de commande n°1924.
Afin de financer une telle installation, selon offre préalable acceptée en date du 26 octobre 2016, M. [W] [E] s'est vu consentir par la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE, un crédit d'un montant de 21 500 euros remboursable en 120 mensualités incluant les intérêts au taux nominal annuel de 3,83 %.
Par jugement en date du 13 décembre 2018, le tribunal de commerce de Nanterre a prononcé la liquidation judiciaire de la société IC GROUPE et a désigné la SELAS ALLIANCE prise en la personne de Maître [M] [N] es qualité de liquidateur judiciaire de la société IC GROUPE.
Par actes d'huissier en date des 4 et 25 octobre 2021, M. [W] [E] a fait assigner en justice Maître [M] [N] venant aux droits de la société IC GROUPE ainsi que la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE aux fins notamment de voir prononcer la nullité des contrats de vente et de crédit affecté.
Par jugement contradictoire en date du 22 décembre 2022, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Lille, a :
- rejeté les fins de non recevoir soulevés par Maître [M] [N] es qualité de liquidateur judiciaire de la société IC GROUPE et la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE,
- déclaré recevable 1'action en nullité des contrats de vente et de crédit de M. [W] [E],
- prononcé la nullité du contrat de vente conclu 1e 26 octobre 2016 entre M. [W] [E] et de la société IC GROUPE exerçant sous l'enseigne 'Immo Confort' an terme du bon de commande n° 1924,
- dit que la restitution par l'acquéreur du matériel installé par IC CONFORT au titre du bon de commande du 26 octobre 2016 sera opérée par sa mise à disposition par M. [W] [E] au liquidateur judiciaire de la société IC CONFORT jusqu'a la clôture de la procédure collective,
- dit que si le liquidateur judiciaire entend reprendre le bien de l'entreprise en liquidation judiciaire, il le fera aux frais de la procédure collective et à charge de remettre les lieux en leur état antérieur au contrat,
- dit que faute pour Ie liquidateur de reprendre l'ensemble du matériel installé dans les deux mois suivant la signification du jugement, M. [W] [E] pourra en disposer librement,
- constaté la nullité du contrat de crédit affecté conclu le 26 octobre 2016 entre M. [W] [E] et la Société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE,
- condamné la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE à restituer à M. [W] [E] la somme de 3680,12 euros,
- condamné la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE a payer a M. [W] [E] la somme de 2150 euros à titre de dommages et intérêts,
- condamné solidairement Maître [M] [N] es qualité de liquidateur judiciaire de la société IC GROUPE et la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE à payer à M. [W] [E] la somme de 850 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné in solidum Maître [M] [N] es qualité de liquidateur judiciaire de la société IC GROUPE et la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE aux entiers dépens,
- rappelé que l'exécution provisoire de la présente décision est de droit.
Par déclaration enregistrée au greffe de la cour le 24 janvier 2025, M. [W] [E] a interjeté appel de cette décision en ce qu'elle a:
' condamné la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE a restituer à M. [W] [E] la somme de 3680,12 euros,
' condamné la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE a payer a M. [W] [E] la somme de 2150 euros à titre de dommages et intérêts,
' condamné solidairement Maître [M] [N] es qualité de liquidateur judiciaire de la société IC GROUPE et la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE à payer à M. [W] [E] la somme de 850 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Vu les dernières conclusions de M. [W] [E] en date du 13 août 2023, et tendant à voir :
- déclarer Monsieur [W] [E] recevable et bien fondé en son appel, y faire droit ;
- confirmer le jugement rendu le 22 décembre 2022 par le Tribunal Judiciaire de Lille en ce qu'il a prononcé la nullité de la vente entre la société IC GROUP et Monsieur [W] [E], la nullité subséquente du prêt ayant financé cet achat ;
- infirmer le jugement entrepris, en ce qu'il a jugé que Monsieur [W] [E] ne justifiait pas de l'existence d'un préjudice équivalent aux sommes remboursées à la banque et condamné la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE à restituer à Monsieur [W] [E] la somme de 3.680,12 euros et à lui payer la somme de 2.150 euros à titre de dommages et intérêts;
Statuant à nouveau :
- condamner la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE à restituer à Monsieur [W] [E] la somme de 25.180,12 euros payée à la banque, sans prétendre à compensation avec le capital prêté ;
En tout état de cause :
- débouter la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE de toutes ses demandes fins et conclusions ;
- débouter la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE de son appel
incident ;
- condamner solidairement la SELAS ALLIANCE ' représentée par Maître [M] [N] ' prise en qualité de liquidateur judiciaire de la société IC GROUPE et la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE à payer à Monsieur [E] la somme de 3.000 euros, au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;
- les condamner solidairement aux entiers dépens.
Vu les dernières conclusions de la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE en date du 6 janvier 2025, et tendant à voir :
- Recevoir la S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE en son appel incident, la déclarer bien fondée.
- Réformer le jugement intervenu devant le Juge des contentieux de la protection près le Tribunal Judiciaire de LILLE en date du 22 décembre 2022 en ce qu'il a prononcé la nullité du contrat de vente le 26 octobre 2016 entre Monsieur [W] [E] et la société IC Groupe exerçant sous l'enseigne « Immo Confort» au terme du bon de commande n° 1924, en ce qu'il a constaté la nullité du contrat de crédit affecté conclu le 26 octobre 2016 entre Monsieur [W] [E] et la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE, en ce qu'il a condamné la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE à restituer à Monsieur [W] [E] la somme de 3680,12 euros, en ce qu'il a condamné la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE à payer à Monsieur [W] [E] la somme de 2150 euros à titre de dommages et intérêts, en ce qu'il a condamné la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE, solidairement avec Maître [M] [N] es qualité de liquidateur judiciaire de la société IC Groupe, à payer à Monsieur [W] [E] la somme de 850 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, et en ce qu'il a condamné la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE, in solidum avec Maître [M] [N] es qualité de liquidateur judiciaire de la société IC Groupe, aux entiers dépens.
Et statuant à nouveau
Vu les articles L.312-55 et L.312-56 du Code de la Consommation,
Vu les articles 1103 et 1104 du Code Civil,
Vu l'article 1182 du Code Civil,
Vu l'article 1315 du Code Civil devenu l'article 1353 dudit Code,
Vu l'article 9 du Code de Procédure Civile,
Vu la jurisprudence citée,
Vu les pièces versées aux débats,
A titre principal,
- Dire et juger que le bon de commande régularisé le 26 octobre 2016 par Monsieur [W] [E] avec la Société IMMO CONFORT respecte les dispositions des articles L.221-5 et suivants du Code de la Consommation.
- A défaut, constater, dire et juger que Monsieur [W] [E] a amplement manifesté sa volonté de renoncer à invoquer la nullité des contrats au titre des prétendus vices les affectant sur le fondement de l'article L.221-5 du Code de la Consommation et ce, en toute connaissance des dispositions applicables.
- Constater la carence probatoire de Monsieur [W] [E].
- Dire et juger que les conditions d'annulation du contrat principal de vente conclu avec la société IMMO CONFORT sur le fondement d'un prétendu dol ne sont pas réunies et qu'en conséquence le contrat de crédit affecté conclu par Monsieur [W] [E] avec la S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE n'est pas annulé.
- En conséquence, débouter Monsieur [W] [E] de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions formulées à l'encontre de la S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE et notamment de sa demande en remboursement des sommes d'ores et déjà versées dans le cadre de l'exécution du contrat de crédit affecté consenti par la S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE à Monsieur [W] [E] selon offre préalable acceptée par ce dernier le 26 octobre 2016.
A titre subsidiaire, si par extraordinaire la Cour d'Appel devait confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a prononcé la nullité du contrat de vente le 26 octobre 2016 entre Monsieur [W] [E] et la société IC Groupe exerçant sous l'enseigne « Immo Confort » au terme du bon de commande n° 1924 et en ce qu'il a constaté la nullité du contrat de crédit affecté conclu le 26 octobre 2016 entre Monsieur [W] [E] et la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE,
- Constater, dire et juger que la S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE n'a commis aucune faute en procédant à la délivrance des fonds ni dans l'octroi du crédit.
- Par conséquent, confirmer le jugement intervenu devant le Juge des contentieux de la protection près le Tribunal Judiciaire de LILLE en date du 22 décembre 2022 en ce qu'il a condamné la Société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE à restituer à Monsieur [W] [E] uniquement la somme de 3.680,12 euros, correspondant à la différence entre les sommes versées par Monsieur [E] au prêteur (25 180,12 euros) et le montant du capital prêté (21 500 euros).
- Et débouter Monsieur [W] [E] de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions formulées à l'encontre de la S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE et notamment de sa demande en remboursement des sommes d'ores et déjà versées dans le cadre de l'exécution du contrat de crédit affecté qui lui a été consenti par la S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE selon offre préalable acceptée le 26 octobre 2016, à l'exception des seules sommes versées par Monsieur [E] entre les mains du prêteur au-delà du montant du capital prêté.
A titre infiniment subsidiaire, si par impossible la Cour d'Appel devait considérer que la S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE a commis une faute dans le déblocage de fonds,
- Dire et juger que le préjudice subi du fait de la perte de chance de ne pas contracter le contrat de crédit affecté litigieux ne peut être égal au montant de la créance de la banque.
- Dire et juger que les panneaux solaires photovoltaïques commandés par Monsieur [W] [E] ont bien été livrés et posés à son domicile par la société IMMO CONFORT, que lesdits matériels fonctionnent parfaitement puisque Monsieur [E] ne rapporte absolument pas la preuve d'un quelconque dysfonctionnement qui affecterait les matériels installés à son domicile et qui serait de nature à les rendre définitivement impropres à leur destination.
- Dire et juger que Monsieur [W] [E] conservera l'installation des panneaux solaires photovoltaïques qui ont été livrés et posés à son domicile par la société IMMO CONFORT (puisque ladite société est en liquidation judiciaire et qu'elle ne se présentera donc jamais au domicile de Monsieur [E] pour récupérer les matériels installés à son domicile), que l'installation photovoltaïque fonctionne parfaitement puisque ladite installation a bien été raccordée au réseau ERDF-ENEDIS, puis mise en service et que Monsieur [E] perçoit chaque année des revenus énergétiques grâce à l'installation photovoltaïque litigieuse.
- Par conséquent, dire et juger que la S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE ne saurait être privée de sa créance de restitution, compte tenu de l'absence de préjudice avéré pour Monsieur [W] [E].
- Par conséquent, confirmer le jugement intervenu devant le Juge des contentieux de la protection près le Tribunal Judiciaire de LILLE en date du 22 décembre 2022 en ce qu'il a condamné la Société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE à restituer à Monsieur [W] [E] uniquement la somme de 3.680,12 euros, correspondant à la différence entre les sommes versées par Monsieur [E] au prêteur (25 180,12 euros) et le montant du capital prêté (21 500 euros).
- Et débouter Monsieur [W] [E] de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions formulées à l'encontre de la S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE et notamment de sa demande en remboursement des sommes d'ores et déjà versées dans le cadre de l'exécution du contrat de crédit affecté qui lui a été consenti par la S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE selon offre préalable acceptée le 26 octobre 2016, à l'exception des seules sommes versées par Monsieur [E] entre les mains du prêteur au-delà du montant du capital prêté.
- A défaut, réduire à de bien plus justes proportions le préjudice subi par Monsieur [E] et dire et juger que Monsieur [W] [E] devait à tout le moins restituer à la S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE une fraction du capital prêté, fraction qui ne saurait être inférieure aux deux tiers du capital prêté.
En tout état de cause,
- Condamner Monsieur [W] [E] à payer à la S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE la somme de 1.500,00 euros en application des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
- Condamner Monsieur [W] [E] aux entiers frais et dépens, y compris ceux d'appel dont distraction au profit de Maître Francis DEFFRENNES, Avocat aux offres de droit, conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de Procédure Civile.
Pour sa part la SELAS ALLIANCE prise en la personne de Maître [M] [N] es qualité de liquidateur judiciaire de la société IC GROUPE a été assignée devant la cour par acte de commissaire de justice en date du 22 février 2023 signifié à personne morale étant entendu que cet acte extrajudiciaire a été remis à une personne habilitée à le recevoir. Toutefois cette intimée n'a pas constitué avocat ni donc conclu en cause d'appel.
Pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties qui ont constitué avocat et conclu devant la cour, il convient de se référer à leurs écritures respectives.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 22 janvier 2025.
- MOTIFS DE LA COUR:
- Sur la nullité du contrat principal de vente:
L'article L221-5-1° du code de la consommation s'agissant des contrats conclus hors établissement prévoit en substance que préalablement à la conclusion d'un contrat de vente ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations prévues à l'article L. 111-1.
L'article L 111-1 du même code quant à lui dans sa version résultant de l'ordonnance n°2016-301 du 14 mars 2016 et applicable au présent litige, dispose:
«Avant que le consommateur ne soit lié par un contrat de vente de biens ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations suivantes:
1° Les caractéristiques essentielles du bien ou du service, compte tenu du support de communication utilisé et du bien ou service concerné;
2° Le prix du bien ou du service, en application des articles L. 112-1 à L. 112-4;
3° En l'absence d'exécution immédiate du contrat, la date ou le délai auquel le professionnel s'engage à livrer le bien ou à exécuter le service ; 4° Les informations relatives à son identité, à ses coordonnées postales, téléphoniques et électroniques et à ses activités, pour autant qu'elles ne ressortent pas du
contexte ;
5° S'il y a lieu, les informations relatives aux garanties légales, aux fonctionnalités du contenu numérique et, le cas échéant, à son interopérabilité, à l'existence et aux modalités de mise en 'uvre des garanties et aux autres conditions contractuelles;
6° La possibilité de recourir à un médiateur de la consommation dans les conditions prévues au titre Ier du livre VI.
La liste et le contenu précis de ces informations sont fixés par décret en Conseil d'État.
Les dispositions du présent article s'appliquent également aux contrats portant sur la fourniture d'eau, de gaz ou d'électricité, lorsqu'ils ne sont pas conditionnés dans un volume délimité ou en quantité déterminée, ainsi que de chauffage urbain et de contenu numérique non fourni sur un support matériel. Ces contrats font également référence à la nécessité d'une consommation sobre et respectueuse de la préservation de l'environnement.»
De plus l'article L111-2 du code de la consommation dans sa version résultant de l'ordonnance n°2016-301 du 14 mars 2016 et qui a vocation à s'appliquer au présent litige, dispose :
'Outre les mentions prévues à l'article L. 111-1, tout professionnel, avant la conclusion d'un contrat de fourniture de services et, lorsqu'il n'y a pas de contrat écrit, avant l'exécution de la prestation de services, met à la disposition du consommateur ou lui communique, de manière lisible et compréhensible, les informations complémentaires relatives à ses coordonnées, à son activité de prestation de services et aux autres conditions contractuelles, dont la liste et le contenu sont fixés par décret en Conseil d'Etat.
Les informations complémentaires qui ne sont communiquées qu'à la demande du consommateur sont également précisées par décret en Conseil d'Etat.'
L'article L 221-9 du dit code dispose quant à lui:
«Le professionnel fournit au consommateur un exemplaire daté du contrat conclu hors établissement, sur papier signé par les parties ou, avec l'accord du consommateur, sur un autre support durable, confirmant l'engagement exprès des parties.
Ce contrat comprend toutes les informations prévues à l'article L. 221-5.
Le contrat mentionne, le cas échéant, l'accord exprès du consommateur pour la fourniture d'un contenu numérique indépendant de tout support matériel avant l'expiration du délai de rétractation et, dans cette hypothèse, le renoncement de ce dernier à l'exercice de son droit de rétractation.
Le contrat est accompagné du formulaire type de rétractation mentionné au 2° de l'article L. 221-5.»
Par ailleurs l'article L 242-1 du même code prévoit en ce qui le concerne que les dispositions de l'article L 221-9 sont prévues à peine de nullité du contrat conclu hors établissement.
Au cas particulier la nature complexe de l'opération contractuelle en question implique impérativement que soit précisées certaines caractéristiques essentielles. Faute de telles précisions le consommateur ne sera pas en mesure de procéder - comme il peut légitimement en ressentir la nécessité - à une comparaison pertinente entre diverses offres de même nature proposées sur le marché afin d' opérer le choix qui lui paraît le plus judicieux.
Dans le cas présent le bon de commande ne mentionne pas le prix de panneaux photovoltaïques d'une part et le prix du chauffe-eau thermodynamique d'autre part étant précisé que les rubriques prévues à cet effet ne sont pas renseignées.
Par ailleurs si ce bon de commande précise la marque des panneaux photovoltaïques (Solarworld), il ne spécifie nullement la marque du chauffe-eau thermodynamique. Or la Cour de cassation dans un arrêt de principe du 24 janvier 2024 a considéré que la marque constituait une caractéristique essentielle de l'installation de panneaux photovoltaïques ( Cass, 1ère civ. 24 janvier 2024, n° du pourvoi 21-20.691).
De plus le bon de commande s'agissant du délai prévu d'installation mentionne de manière extrêmement vague en caractères difficilement lisible: '6 à 8 semaines'. De plus ce bon de commande n'indique nullement le point de départ de ce délai ( signature du bon de commande, ou tout autre événement). De plus ce document contractuel omet de spécifier le calendrier précis des travaux concernant la prestation fournie avec notamment la date des démarches administratives visant à obtenir l'autorisation de la mairie et la date du raccordement ERDF qui conditionne le fonctionnement effectif de l'installation.
Il ressort ainsi des observations qui précédent, que le consommateur, M. [W] [E] n'a pas été suffisamment informé sur la prestation qu'il entendait obtenir dans le cadre du contrat en cause - étant bien entendu que la marque des panneaux photovoltaïques et le calendrier des travaux apparaissent comme des caractéristiques essentielles et même primordiales de la prestation en cause. Il est incontestable que le bon de commande en question ne satisfait pas aux exigences protectrices du consommateur résultant des dispositions précitées du code de la consommation sans qu'il soit besoin d'apprécier si ces éléments ont été déterminants du consentement s'agissant d'une nullité d'ordre public.
En outre il ne résulte d'aucun élément objectif du dossier que M. [W] [E], même s'il avait connaissance des irrégularités du bon de commande, ait manifesté la volonté non équivoque de renoncer à la nullité qui en découle, étant entendu que son acceptation de la livraison n'a pu avoir pour effet de couvrir ces irrégularités ainsi que la nullité qui a vocation à les sanctionner. Au regard de sa qualité de simple profane il devait de toute évidence ignorer que le défaut des mentions obligatoires entachant le bon de commande était sanctionné par la nullité de cet acte juridique s'agissant d'une nullité relative dans le cadre protecteur du droit de la consommation. Il ne ressort par ailleurs d'aucun élément objectif du dossier que M. [W] [E] ait expressément confirmé cet acte nul en renonçant à la nullité qui en découle notamment en envoyant au vendeur un courrier explicite à ce sujet de renonciation à la nullité du contrat en cause.
Il convient dès lors de confirmer le jugement querellé en ce qu'il a prononcé la nullité du contrat de vente conclu 1e 26 octobre 2016 entre M. [W] [E] et de la société IC GROUPE exerçant sous l'enseigne 'Immo Confort' an terme du bon de commande n° 1924.
- Sur la nullité du contrat de crédit affecté:
En application des dispositions de l'article L 312-55 du code de la consommation, le contrat de crédit est résolu ou annulé de plein droit lorsque le contrat en vue duquel il a été conclu, est lui même judiciairement résolu ou annulé.
Le contrat principal de vente ayant été annulé, il convient dès lors de confirmer le jugement querellé en ce qu'il a constaté la nullité du contrat de crédit affecté conclu le 26 octobre 2016 entre M. [W] [E] et La Société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE.
- Sur les conséquences de la nullité du contrat principal de vente et du contrat de crédit:
Dans le cas présent l'annulation du contrat principal de vente et du contrat de crédit qui certes anéantit ces deux conventions ne saurait toutefois conduire au rétablissement mécanique du statu quo ante. En effet dans certains cas la banque pourra se trouver privée de sa créance de restitution. Par ailleurs la faillite du vendeur peut aussi avoir une incidence sur la restitution du matériel en rendant de facto impossible la reprise du matériel par la société installatrice des panneaux photovoltaïques.
' Sur les conséquences de l'annulation du contrat principal de vente:
Dans les rapports entre le vendeur et son cocontractant consommateur, l'annulation de la vente commande en principe au liquidateur judiciaire de la société IL GROUPE de restituer le prix de vente à M. [W] [E] (restitution du prix qui ne peut être effective car la société IL GROUPE n'est pas in bonis), conséquence juridique normale de l'annulation du contrat de vente.
Par ailleurs l'acquéreur devra restituer le matériel installé.
Il convient dès lors de confirmer le jugement querellé en ce qu'il a:
' dit que la restitution par l'acquéreur du matériel installé par IL CONFORT au titre du bon de commande du 26 octobre 2016 sera opérée par sa mise à disposition par M. [W] [E] au liquidateur judiciaire de la société IL CONFORT jusqu'a La clôture de la procédure collective,
'dit que si le liquidateur judiciaire entend reprendre le bien de l'entreprise en liquidation judiciaire, il le fera aux frais de la procédure collective et à charge de remettre les lieux en leur état antérieur au contrat,
' dit que faute pour Ie liquidateur de reprendre l'ensemble du matériel installé dans les deux mois suivant la signification du jugement, M. [W] [E] pourra en disposer librement.
' Sur les conséquences de l'annulation du contrat de crédit affecté:
Il résulte d'une jurisprudence bien établie que commet une faute, la banque qui verse les fonds prêtés au vendeur de panneaux photovoltaïques et du chauffe-eau thermodynamique sans avoir dûment et préalablement vérifié la conformité du bon de commande aux dispositions du code de la consommation. La banque commet également une faute en ne s'assurant pas au moyen de toutes démarches utiles, de la bonne exécution des travaux par le vendeur des panneaux photovoltaïques et du chauffe-eau thermodynamique conformément à ses engagements contractuels avant de débloquer les fonds prêtés.
Au cas particulier l'objectivité commande de constater que la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE a commis une faute en ne vérifiant pas la conformité du bon de commande litigieux aux dispositions d'ordre public du code de la consommation lorsqu'elle a débloqué les fonds du crédit affecté.
La banque peut ainsi être privée de sa créance de restitution quand l'emprunteur justifie d'un préjudice en lien de causalité avec cette faute.
Dans un arrêt de principe en date du 10 juillet 2024 la première chambre civile de la Cour de cassation a considéré que lorsque la restitution du prix à laquelle le vendeur est condamné, par suite de l'annulation du contrat de vente ou de prestation de service, est devenue impossible du fait de l'insolvabilité du vendeur ou du prestataire, le consommateur, privé de la contrepartie de la restitution du bien vendu, justifie d'une perte subie équivalente au montant du crédit souscrit pour le financement du prix du contrat de vente ou de prestation de service annulé en lien de causalité avec la faute de la banque qui, avant de verser au vendeur le capital emprunté, n'a pas vérifié la régularité formelle du contrat principal (Cass. Civ, 1ère 10 juillet 2024, n° du pourvoi 23-15.802).
La Cour suprême estime ainsi qu'en libérant le capital emprunté sans vérifier la régularité du contrat principal, la banque a manqué à ses obligations, et que d'autre part, l'emprunteur a subi un préjudice consistant à ne pas pouvoir obtenir, auprès d'un vendeur placé en liquidation judiciaire, la restitution du prix de vente du matériel. Elle en déduit que la banque dans ce cas doit être condamnée à restituer à l'emprunteur à titre de dommages et intérêts une somme correspondant au capital emprunté.
Au cas d'espèce force est de constater que la faillite du vendeur doit être considérée comme générant un préjudice suffisant pour priver le prêteur de sa créance de restitution. En effet du fait de cette déconfiture M. [W] [E] se verra incontestablement dans l'impossibilité de récupérer le prix de vente auprès de la société placée en liquidation judiciaire - alors même que cette restitution du prix aurait été la conséquence juridique normale et automatique résultant de l'annulation du contrat de vente. Il convient de souligner que cette liquidation judiciaire rend absolument certaine et non pas seulement probable la non restitution du prix par cette société ayant fait l'objet d'une procédure collective.
La faute de la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE en l'espèce a causé à M. [W] [E] un préjudice incontestable qui doit être justement et exactement arbitré à hauteur du montant intégral de la créance de restitution. Il y a lieu en effet en l'espèce de faire application du principe fondamental dans la sphère de la responsabilité civile de la réparation intégrale du préjudice qui commande de réparer tout le préjudice mais rien que le préjudice.
Il est donc logique au regard des observations qui précédent, que la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE soit privée totalement de sa créance de restitution à hauteur de 21.500 euros.
Il convient dès lors d'infirmer le jugement querellé en ce qu'il a condamné la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE a restituer a M. [W] [E] la somme de 3680,12 euros, et condamné la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE à payer à M. [W] [E] la somme de 2150 euros à titre de dommages et intérêts. Il y a lieu par suite, statuant à nouveau, de condamner la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE à payer à M. [W] [E] la somme de 21.500 euros correspondant au montant exact du capital emprunté en réparation du préjudice subi.
Par ailleurs s'agissant des autres points déférés à la cour dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel, le premier juge par des motifs pertinents que la cour adopte, ayant opéré une exacte application du droit aux faits, il y a lieu les concernant d'entrer en voie de confirmation.
- Sur l'application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au titre de l'instance d'appel:
Il apparaît inéquitable de laisser à la charge de M. [W] [E] les frais irrépétibles exposés par lui et non compris dans les dépens tant en première instance qu'en cause d'appel.
Il convient dès lors de condamner la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE à payer à M. [W] [E] d'un montant de 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles au titre de l'instance d'appel.
En revanche il n'apparaît pas inéquitable de laisser à la charge de la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE les frais irrépétibles exposés par elle devant la cour et non compris dans les dépens.
Il ya lieu en conséquence de débouter la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles au titre de l'instance d'appel.
- Sur le surplus des demandes:
Au regard des considération qui précédent, il y a lieu de débouter les parties du surplus de leurs demandes.
- Sur les dépens:
La SELAS ALLIANCE prise en la personne de Maître [M] [N] es qualité de liquidateur judiciaire de la société IL GROUPE , et la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE succombant, il y a lieu de condamner in solidum la SELAS ALLIANCE prise en la personne de Maître [M] [N] es qualité de liquidateur judiciaire de la société IL GROUPE , et la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE aux entiers dépens d'appel.
PAR CES MOTIFS,
Statuant par arrêt réputé contradictoire, rendu en dernier ressort, et par mise à disposition au greffe,
- Confirme le jugement querellé sauf en ce qu'il a:
' condamné la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE à restituer a M. [W] [E] la somme de 3680,12 euros,
' condamné la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE à payer à M. [W] [E] la somme de 2150 euros à titre de dommages et intérêts,
Statuant à nouveau sur les points infirmés et y ajoutant,
- Condamne la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE à payer à M. [W] [E] la somme de 21.500 euros correspondant au montant exact du capital emprunté en réparation du préjudice subi,
- Condamne la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE à payer à M. [W] [E] d'un montant de 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles au titre de l'instance d'appel,
- La déboute de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles au titre de l'instance d'appel,
- Déboute les parties du surplus de leurs demandes,
- Condamne in solidum la SELAS ALLIANCE prise en la personne de Maître [M] [N] es qualité de liquidateur judiciaire de la société IC GROUPE , et la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE aux entiers dépens d'appel.