CA Bordeaux, 2e ch. civ., 15 mai 2025, n° 21/07074
BORDEAUX
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Smabtp (Sté)
Défendeur :
Ekip' (SELARL), Groupama Centre Atlantique (Sté)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Boudy
Conseillers :
M. Figerou, Mme de Vivie
Avocats :
Me Bertin, Me Rodier, Me Coué, Me Cotrian, Me Maillot
FAITS ET PROCÉDURE :
1. M. [L] [P] et Mme [T] [N] épouse [P] (ci-après les époux [P]) sont propriétaires d'une maison d'habitation située au [Adresse 3] à [Localité 6] en Charentes.
Suivant facture n°562 en date du 8 octobre 2010, la société à responsabilité limitée (SARL) Allsun France a installé sur le toit de leur maison, 15 tuiles solaires photovoltaïques devant produire 3 000 WC (watt-crête) d'électricité, moyennant le prix de 18 700 euros TTC.
Au fil du temps, les époux [P] ont constaté une diminution de la production d'électricité.
2. Après s'être rapprochés de la société Allsun sans obtenir de solution, par acte du 16 mars 2017, ils ont assigné la SARL Allsun devant le tribunal de grande instance d'Angoulême afin d'obtenir la condamnation de cette dernière à remplacer les 15 panneaux photovoltaïques, outre des dommages-intérêts.
Par actes des 19 septembre, 10 octobre et 13 octobre 2017, la SARL Allsun a fait assigner en intervention forcée maître [B] [W], ès qualités de mandataire ad'hoc de la société Auversun, fabricant des panneaux, la société Smabtp en sa qualité d'assureur de la SAS Auversun et la société Staubli Electrical Connectors, fournisseurs des panneaux litigieux.
Par acte du 14 février 2019, la SARL Allsun a fait assigner en intervention forcée la compagnie Groupama centre Atlantique, son assureur en responsabilité civile.
Par jugement du 14 février 2021, le tribunal de commerce de Bordeaux a ouvert une procédure de redressement judiciaire au bénéfice de la société Allsun, la SCP Cbf étant désignée en qualité d'administrateur et la SELARL Ekip' en celle de mandataire judiciaire.
Par actes des 24 et 25 mars 2021, les époux [P] ont fait assigner en intervention forcée la Selarl Ekip, ès qualités et la Scp Cbf.
Par ordonnance du 30 janvier 2018, le juge de la mise en état a ordonné une mesure d'expertise, laquelle a été confiée à M. [J].Le juge des référés a en outre dit que l'expert judiciaire pourrait faire enlever les panneaux atteints de désordres et la société Allsun devrait y procéder dans un délai de six semaines à compter de la note de l'expert, sous astreinte de 50 euros par jour de retard, passé ce délai.
L'expert judiciaire a déposé son rapport le 30 septembre 2018.
Les époux [P] ont saisi le Juge de la mise en état d'un incident afin d'obtenir la condamnation de la société Allsun à leur payer la somme provisionnelle de 5.000 euros au titre des préjudices qu'ils estimaient avoir subi du fait de la défaillance des panneaux photovoltaïques. La société Allsun a alors formé un appel en garantie à l'encontre de la SMABTP en sa qualité d'assureur de la société Auversun, fabricant des panneaux litigieux, sur le fondement des dispositions de l'article 1641 du Code civil.
Par ordonnance du 16 juillet 2019, le Juge de la mise en état a condamné la société Allsun à payer aux époux [P] la somme provisionnelle de 5.000 euros à valoir sur leurs préjudices résultant de la perte de production d'électricité. La société Allsun a par ailleurs été déboutée de ses demandes à l'encontre de la SMABTP.
3. Par jugement du 14 octobre 2021, le tribunal judiciaire d'Angoulême a :
- mis hors de la cause la SAS Staübli Electrical Connectors,
- débouté M. et Mme [P] et de leur demande tendant à voir condamner la SARL Allsun France à procéder au remplacement des 15 panneaux photovoltaïques et à leur raccordement sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter du 1 août 2018,
- liquidé l'astreinte prononcée par l'ordonnance du juge de la mise en état en date du 30 septembre 2018 au 12 décembre 2018 et fixé au montant de 1500 euros la créance de M. et Mme [P] à l'encontre de la procédure de liquidation judiciaire de la SARL Allsun France au titre de ladite astreinte,
- fixé la créance des époux [P] à l'encontre de la procédure de liquidation judiciaire de la Sarl Allsun France aux sommes de :
- 5 847,58 euros au titre de l'indemnisation de la perte de production électrique qu'ils ont subie jusqu'à l'exécution des travaux de reprise,
- 533,61 euros représentant le coût des travaux de remise en état rendus nécessaires par les infiltrations qui ont affecté le plafond de la cuisine de la maison des époux [P],
- 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- débouté les époux [P] de leur demande tendant à voir condamner la SARL Allsun France à leur payer la somme de 3 000 euros à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive injustifiée,
- débouté M. [Z] ès qualités de mandataire liquidateur de la SARL Allsun France de sa demande tendant à voir condamner les époux [P] à lui payer la somme de 7 300 euros à titre de remboursement des provisions versées par ladite société,
- débouté la SARL Allsun France de sa demande tendant à voir condamner les époux [P] à lui verser la somme de 3 000 euros au titre du remplacement des panneaux photovoltaïques défectueux,
- dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au profit de la SARL Allsun France,
- dit que la compagnie Groupama centre Atlantique était tenue de garantir la SARL Allsun France du paiement de l'ensemble des sommes mises à la charge de la procédure collective de celle-ci par la présente décision, en ce compris au titre de l'article 700 du code de procédure civile et des dépens,
- débouté la SARL Allsun France de sa demande tendant à voir condamner la compagnie Groupama Centre Atlantique à rembourser les sommes déjà payées par la SARL Allsun France en exécution des ordonnances du juge de la mise en état en date du 30 janvier 2018 et du 16 juillet 2019,
- condamné la compagnie Groupama centre Atlantique à payer à Maître [Z] ès qualités de mandataire liquidateur de la SARL Allsun France la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au profit de la compagnie Groupama centre Atlantique,
- déclaré non prescrite la demande de garantie par la SARL Allsun France à l'encontre de la SMABTP,
- condamné la Smabtp à garantir la Sarl Allsun France du paiement de l'ensemble des sommes mises à la charge de la procédure collective de celle-ci par la présente décision, en ce compris au titre de l'article 700 du code de procédure civile et des dépens,
- débouté la SARL Allsun France de sa demande tendant à voir condamner la Smabtp à rembourser les sommes déjà payées par ladite SARL en exécution des ordonnances du juge de la mise en état du 30 janvier 2018 et du 16 juillet 2019,
- condamné la Smabtp à payer à Maître [Z] ès qualité de mandataire liquidateur de la SARL Allsun France la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au profit de la Smabtp,
- ordonné l'exécution provisoire de la présente décision,
- déclaré le présent jugement commun et opposable à Maître [Z] ès qualités de mandataire liquidateur de la SARL Allsun France,
- débouté les parties de toutes leurs autres demandes plus amples ou contraires,
- condamné la SARL Allsun France aux dépens, en ce compris les frais d'expertise judiciaire.
4. La Smabtp a relevé appel du jugement le 24 décembre 2021. La déclaration d'appel a été signifiée, par acte du 3 février 2022, à Maître [Z] ès qualité de mandataire liquidateur de la SARL Allsun et à la SELARL Ekip.
Par acte du 17 mai 2022, la compagnie d'assurance Groupama centre Atlantique a assigné en appel provoqué devant la cour d'appel de Bordeaux les époux [P].
Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 21 février 2022, la Smabtp demande à la cour, sur le fondement des articles L.124-5 alinéa 4 du code des assurances:
- de la recevoir en ses conclusions et l'y déclarer bien fondée,
- d'infirmer le jugement en ce qu'il a estimé que la garantie subséquente n'était pas éteinte au jour où l'assignation lui a été délivrée par la société Allsun,
- d'infirmer le jugement en ce qu'il a jugé qu'elle ne pouvait opposer aux tiers lésés les exclusions de garanties ainsi que les plafonds et franchises prévues au contrat d'assurance,
et, statuant à nouveau,
à titre principal,
- de juger qu'elle n'est plus l'assureur de la société Auversun au jour de la réclamation de la société Allsun et de Groupama Centre Atlantique du fait de l'expiration de la garantie subséquente,
- d'ordonner sa mise hors de cause,
subsidiairement,
- de juger que sa police exclut les dommages, les vices, défauts et non-conformités affectant les produits ou composants livrés ainsi que les frais entraînés par leur dépose et repose (article 1.2.3),
- de relever que les panneaux photovoltaïques ont pour vocation exclusive la revente d'électricité à ERDF,
- de juger que sont exclus expressément de façon claire et limitée les dommages affectant les équipements y compris leurs accessoires (matériels, machines, organes de transformation de l'énergie...) dont la fonction exclusive est de permettre l'exercice d'une activité professionnelle industrielle ou commerciale dans l'ouvrage (article 9.2.3),
- de rejeter toute demande dirigée à son encontre recherchée en sa qualité d'assureur de la société Auversun,
- d'ordonner sa mise hors de cause,
très subsidiairement,
- de juger que toute condamnation éventuellement susceptible d'être mise à sa charge ne pourra intervenir que dans les limites du contrat d'assurance, avec plafonds et franchises opposables au tiers lésé,
- de condamner la société Allsun à lui payer la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.
Elle a signifié ses conclusions le 3 mars 2022 à maître [Z] ès qualités de mandataire liquidateur de la SARL Allsun et à la SELARL Ekip.
Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 11 mai 2022, la compagnie d'assurance Groupama Atlantique demande à la cour, sur le fondement des articles 1147 ancien, 1792 du code civil, 480 du code de procédure civile :
- de confirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire d'Angoulême le 14 octobre 2021 (RG n°17/00639) en ce qu'il a :
- débouté les époux [P] de leur demande tendant à voir condamner la SARL Allsun France à procéder au remplacement des 15 panneaux photovoltaïques et à leur raccordement sous astreinte de 50 par jour de retard à compter du 1 août 2018,
- débouté les époux [P] de leur demande tendant à voir condamner la Sarl Allsun France à leur payer la somme de 3000 euros à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive injustifiée,
- débouté la SARL Allsun France de sa demande tendant à la voir condamner à rembourser les sommes déjà payées par la SARL Allsun France en exécution des ordonnances du juge de la mise en état en date du 30 janvier 2018 et du 16 juillet 2019,
- déclaré non prescrite la demande de garantie formée par la SARL Allsun France à l'encontre de la Smabtp,
- condamné la Smabtp à garantir la Sarl Allsun France du paiement de l'ensemble des sommes mises à la charge de la procédure collective de celle-ci par la présente décision, en ce compris au titre de l'article 700 du code de procédure civile et des dépens,
- de réformer le jugement rendu par le tribunal judiciaire d'Angoulême le 14 octobre 2021 (RG n°17/00639) en ce qu'il a :
- fixé la créance des époux [P] à l'encontre de la procédure de liquidation judiciaire de la SARL Allsun France aux sommes de :
- 5 847,58 euros au titre de l'indemnisation de la perte de production électrique qu'ils ont subie jusqu'à l'exécution des travaux de reprise,
- 533,61 euros représentant le coût des travaux de remise en état rendus nécessaires par les infiltrations qui ont affecté le plafond de la cuisine de la maison des époux [P],
- 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- dit qu'elle est tenue de garantir la SARL Allsun France du paiement de l'ensemble des sommes mises à la charge de la procédure collective de celle-ci par la présente décision, en ce compris au titre de l'article 700 du code de procédure civile et des dépens,
statuant à nouveau,
sur l'engagement de la responsabilité décennale de la société Allsun,
- de juger que les désordres survenus sur l'installation des consorts [P] sont imputables aux produits livrés par la société Auversun,
- de juger que la société Allsun a parfaitement rempli la mission qui lui incombait lors de l'installation des panneaux photovoltaïques,
- de juger en conséquence que les désordres survenus sur l'installation des consorts [P] relèvent d'une cause étrangère à la prestation fournie par la société Allsun,
- de juger que la responsabilité de la société Allsun ne peut dès lors être engagée,
sur sa garantie,
- de juger que l'activité de la société Allsun était garantie par la compagnie MMA au moment de la réclamation formulée auprès d'elle,
- de juger en conséquence que la garantie n'est pas mobilisable par elle en application des conditions générales du contrat d'assurance,
- de constater que si sa garantie avait vocation à être mobilisée, celle-ci serait en droit d'opposer une franchise contractuelle de 10 % à toute condamnation prononcée à son encontre,
- de débouter la société Allsun de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions aux fins de relever indemne formulée son encontre,
- de débouter la compagnie d'assurance Smabtp de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions aux fins de relever indemne formulée à son encontre,
- de condamner la partie succombante à lui la somme de 5 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- de condamner la même aux entiers dépens dont distraction pour ceux de la présente procédure au profit de la Selarl Cabinet Caporale Maillot Blatt, avocats à la cour, sur le fondement des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Elle a signifié ses conclusions par acte du 18 mai 2022 à la Selarl Ekip et à maître [Z] ès qualités de mandataire liquidateur de la société Allsun.
Les époux [P] ont constitué avocat, mais n'ont pas conclu.
La SELARL Ekip' ès qualité n'a pas constitué avocat.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 4 mars 2025.
MOTIFS
5. Le tribunal a jugé que le contrat d'assurance souscrit par la société Auversun auprès de la SMABTP avait été résilié soit le 1 août 2017 soit le 20 septembre 2017, selon que le mandataire judiciaire de la société Auversun a répondu ou non à la lettre de l'assureur le mettant en demeure d'opter pour la résiliation ou la continuation du contrat d'assurance et que, dans la mesure où la société Allsun avait été assignée le 16 mars 2017, il était ainsi établi que le contrat d'assurance passé entre la société Auversun et la SMABTP n'était pas résilié à la date de l'appel en cause de la société Allsun.
6. La SMABTP soutient que le tribunal a manifestement commis une confusion entre les sociétés Auversun et Allsun, alors que la date à laquelle cette dernière a été assignée est inopérante pour savoir si la garantie subséquente était expirée ou non. C'est la réclamation qui est faite soit à l'assuré, soit à l'assureur qui déclenche la garantie. Aussi, la réclamation adressée à un tiers au contrat d'assurance, comme ici la société Allsun est sans effet sur la mobilisation ou non des garanties. Or, en l'espèce, la garantie subséquente de 5 ans prévue à l'article L 124-5 alinéa 4 du code des assurances a commencé à courir le lendemain de la résiliation du contrat d'assurance, soit le 2 août 2012, soit un mois après la mise en demeure adressée par elle à la société Auversun, le 1 juillet 2012, par laquelle elle l'a mettait en demeure de payer les cotisations impayées. Or, en l'absence de réponse de l'assurée, le délai subséquent de 5 ans a donc expiré le 2 août 2017, soit antérieurement à l'assignation adressée à la SMABTP le 13 octobre 2017.
La société Groupama demande que le jugement entrepris soit réformé en ce qu'il a retenu la responsabilité décennale de la société Allsun et sa garantie. Or, pour cette dernière garantie, elle précise qu'elle a résilié le contrat d'assurance de la société Allsun au 31 décembre 2013. Dès lors, la société Allsun a nécessairement souscrit une assurance décennale à compter du 1 janvier 2014, s'agissant d'une assurance obligatoire, bien qu'elle soit restée taisante face à la sommation de communiquer qui lui a été délivrée. Dès lors, c'est ce nouvel assureur qui doit garantir et non elle-même. Elle ajoute que la SMABTP ne peut pas opposer un plafond contractuel de garantie, lequel n'est opposable aux tiers qu'à la condition que les conditions générales et particulières du contrat soient signées par l'assuré, ce qui n'est pas démontré en l'espèce.
Sur ce
7. L'article L. 124-5 du code des assurances dispose notamment: « La garantie est, selon le choix des parties, déclenchée soit par le fait dommageable, soit par la réclamation. Toutefois, lorsqu'elle couvre la responsabilité des personnes physiques en dehors de leur activité professionnelle, la garantie est déclenchée par le fait dommageable. Un décret en Conseil d'État peut également imposer l'un de ces modes de déclenchement pour d'autres garanties.
Le contrat doit, selon les cas, reproduire le texte du troisième ou du quatrième alinéa du présent article.
La garantie déclenchée par le fait dommageable couvre l'assuré contre les conséquences pécuniaires des sinistres, dès lors que le fait dommageable survient entre la prise d'effet initiale de la garantie et sa date de résiliation ou d'expiration, quelle que soit la date des autres éléments constitutifs du sinistre.
La garantie déclenchée par la réclamation couvre l'assuré contre les conséquences pécuniaires des sinistres, dès lors que le fait dommageable est antérieur à la date de résiliation ou d'expiration de la garantie, et que la première réclamation est adressée à l'assuré ou à son assureur entre la prise d'effet initiale de la garantie et l'expiration d'un délai subséquent à sa date de résiliation ou d'expiration mentionné par le contrat, quelle que soit la date des autres éléments constitutifs des sinistres. Toutefois, la garantie ne couvre les sinistres dont le fait dommageable a été connu de l'assuré postérieurement à la date de résiliation ou d'expiration que si, au moment où l'assuré a eu connaissance de ce fait dommageable, cette garantie n'a pas été resouscrite ou l'a été sur la base du déclenchement par le fait dommageable. L'assureur ne couvre pas l'assuré contre les conséquences pécuniaires des sinistres s'il établit que l'assuré avait connaissance du fait dommageable à la date de la souscription de la garantie.
Le délai subséquent des garanties déclenchées par la réclamation ne peut être inférieur à cinq ans. Le plafond de la garantie déclenchée pendant le délai subséquent ne peut être inférieur à celui de la garantie déclenchée pendant l'année précédant la date de la résiliation du contrat. Un délai plus long et un niveau plus élevé de garantie subséquente peuvent être fixés dans les conditions définies par décret.
Lorsqu'un même sinistre est susceptible de mettre en jeu les garanties apportées par plusieurs contrats successifs, la garantie déclenchée par le fait dommageable ayant pris effet postérieurement à la prise d'effet de la loi n° 2003-706 du 1 août 2003 de sécurité financière est appelée en priorité, sans qu'il soit fait application des quatrième et cinquième alinéas de l'article L. 121-4.
Les dispositions du présent article ne s'appliquent pas aux garanties d'assurance pour lesquelles la loi dispose d'autres conditions d'application de la garantie dans le temps.'
8. En l'espèce, la société Auversun a souscrit auprès de la compagnie SMABTP un contrat d'assurance construction à effet au 1er septembre 2011.
Les articles 9, 11 et 13 des conditions générales du contrat précisent les conditions d'application dans le temps des garanties. Notamment, la garantie fonctionne en « base réclamation », selon les dispositions de l'article L.124-5 alinéa 4 du Code des assurances, applicable aux sinistres survenant entre la prise d'effet de la garantie et l'expiration d'un délai subséquent qui s'écoule à compter de la date de résiliation ou d'expiration du contrat ou de la garantie.
Le contrat signé entre la société Aversun et la SMABTP a été résilié par l'assureur le 20 septembre 2012, soit un mois après la mise en demeure qui a été adressée par l'assureur au mandataire judiciaire de la société Auversun le 20 août 2012. Aussi, en l'espèce, la garantie subséquente de 5 ans prévue à l'article L 124-5 alinéa 4 du code des assurances a commencé à courir le lendemain de la résiliation du contrat d'assurance, soit le 21 septembre 2012.
9. En conséquence, le délai subséquent de 5 ans a donc expiré le 21 septembre 2017 soit antérieurement à l'assignation adressée à la SMABTP, le 13 octobre 2017.
Dès lors, la garantie de la SMABTP n'est pas mobilisable.
Le jugement sera infirmé en ce sens.
10. Par ailleurs, l'article 1792 du code civil dispose: ' Tout constructeur d'un ouvrage est responsable de plein droit, envers le maître ou l'acquéreur de l'ouvrage, des dommages, même résultant d'un vice du sol, qui compromettent la solidité de l'ouvrage ou qui, l'affectant dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement, le rendent impropre à sa destination.
Une telle responsabilité n'a point lieu si le constructeur prouve que les dommages proviennent d'une cause étrangère.'
La présomption de responsabilité de l'article 1792 du code civil suppose que soit établi un lien d'imputabilité entre le dommage constaté et l'activité du locateur d'ouvrage, sauf la faculté pour celui-ci de s'en exonérer en établissant la preuve d'une cause étrangère.
11. Or, la société Allsun a engagé sa responsabilité décennale en mettant en 'uvre des tuiles solaires défaillantes dans le temps, car, en sa qualité de professionnel de la construction, elle devait s'assurer que les tuiles mises en 'uvre étaient pérennes et permettraient d'obtenir la production d'énergie qu'elle avait elle-même promise au maître d'ouvrage.
En conséquence, le fait qu'elle n'ait pas elle-même fabriqué ces tuiles solaires et que l'installation solaire qu'elle a réalisée ne soit pas contraire aux règles de l'art ne permet pas d'écarter sa responsabilité décennale.
12. Dès lors, le jugement sera confirmé en ce qu'il a retenu la responsabilité décennale de la société Allsun.
13. Par ailleurs, si dans le cadre de la présente procédure, la société Groupama a fait en vain sommation à la société Allsun d'avoir à communiquer ses contrats de responsabilité décennale à compter de 2014, alors que son propre contrat avait été résilié au 31 décembre 2013 et qu'une telle assurance est obligatoire, la preuve de la souscription d'un nouveau contrat d'assurance au titre de la responsabilité décennale de la société Allsun à compter de l'année 2014 n'est pas rapportée.
Notamment, contrairement à ce que soutient la société Groupama, il n'est pas démontré qu'un nouveau contrat aurait été souscrit par la société Allsun auprès de la société MMA IARD, alors que l'attestation d'assurance qu'elle a versé au débat concerne une autre société, la société EURL Holding Financiere Migon et ce contrat aurait été étendu à la société Allsun uniquement pour l'année 2019. En toute hypothèse, un tel contrat n'a pas été versé au débat.
En conséquence, le jugement sera confirmé en ce qu'il a retenu la garantie de la société Groupama.
14. La SELARL Ekip' ès qualitès de mandataire liquidateur de la société Allsun succombant devant la cour d'appel sera condamnée aux dépens d'appel et à verser à la SMABTP la somme de 2000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Confirme le jugement entrepris sauf en ce qu'il a déclaré non prescrite la demande de garantie formée par la SARL Allsun à l'encontre de la SMABTP et en ce qu'il a condamné cette dernière à garantir la SARL Allsun du paiement de l'ensemble des sommes mises à la charge de la procédure collective en ce compris au titre de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens, et en ce qu'il a condamné la SMABTP à payer à Me [E] [Z] ès qualités de mandataire liquidateur de la SARL Allsun France la somme de 2500 euros au titre de l'article de l'article 700 du code de procédure civile, et statuant à nouveau de ces chefs du jugement:
Déclare prescrite la demande de garantie formée par la société Allsun à l'encontre de la SMABTP,
Déboute la société Allsun de ses demandes de garantie de la SMABTP du paiement de l'ensemble des sommes mises à la charge de la procédure collective,
Déboute Me [E] [Z], aujourd'hui la SELARL Ekip', de sa demande de condamnation de la SMABTP au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
y ajoutant:
Déboute les parties de leurs autres demandes,
Condamne la SELARL Ekip' ès qualités de mandataire liquidateur de la société AllsunFrance aux dépens d'appel,
Condamne la SELARL Ekip' ès qualités de mandataire liquidateur de la société AllsunFrance à payer à SMABTP la somme de 2000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Le présent arrêt a été signé par Monsieur Jacques BOUDY, président, et par Madame Audrey COLLIN, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.