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Décisions

CA Douai, 8e ch. sect. 1, 15 mai 2025, n° 24/00487

DOUAI

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

BNP Paribas Personal Finance (SA)

Défendeur :

Energie Voltaïque Avenir (SARL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Benhamou

Conseillers :

Mme Ménegaire, Mme Convain

Avocats :

Me Deffrennes, Me Foutry, Me Habib

JCP Valenciennes, du 7 déc. 2023, n° 11-…

7 décembre 2023

EXPOSE DU LITIGE

Le 17 septembre 2013, dans le cadre d'un démarchage à domicile, M. [T] [Z] a conclu avec la société Energie voltaïque avenir un contrat de vente, de fourniture et d'installation d'un kit photovoltaïque incluant 12 panneaux photovoltaïques et un onduleur, moyennant le prix de 22 000 euros.

Pour financer cette opération, M. [Z] a souscrit le même jour un contrat de crédit affecté à l'achat de ce matériel auprès de la société Sygma banque, aux droits de laquelle de trouve désormais la société BNP Paribas personal finance, d'un montant de 22 000 euros, remboursable en 180 mensualités, au taux annuel de

5,37 %.

Les panneaux ont été livrés le 22 octobre 2013.

La société Energie voltaïque avenir a été placée en liquidation judiciaire le 25 novembre 2015, cette procédure ayant été clôturée pour insuffisance d'actifs par jugement du tribunal de commerce de Bobigny en date du 28 octobre 2016. La société Energie voltaïque avenir a été radiée du registre du commerce et des sociétés.

Par acte d'huissier de justice délivré le 14 septembre 2018, M. [Z] a fait assigner Me [N] ès qualité de mandataire ad'hoc de la société Energie voltaïque avenir et la société BNP Paribas personal finance en justice aux fins de voir notamment prononcer la nullité du contrat de vente et du contrat de crédit affecté.

L'affaire a été radiée le 4 avril 2019, puis réintroduite à la demande du requérant.

Par acte d'huissier de justice délivré le 8 décembre 2022, M. [Z] a fait assigner Me [D] ès qualité de mandataire ad litem de la société Energie voltaïque avenir.

Par jugement réputé contradictoire en date du 7 décembre 2023, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Valenciennes a :

- ordonné la jonction des instances numéro 11-22-1286 et 11-22 454 sous le numéro le plus ancien 11-22-454,

- déclaré recevable l'action engagée par M. [Z],

- rejeté la demande de sommation d'avoir à communiquer un état définitif des sommes remboursées par M. [Z],

- prononcé la nullité du contrat de vente conclu le 17 septembre 2013 entre M. [Z] et la société Energie voltaïque avenir,

- constaté la nullité de plein droit du contrat de crédit conclu le 17 septembre 2013 entre M. [Z] et la société BNP Paribas personal finance,

- dit qu'en raison de la clôture pour insuffisance d'actifs de la société Energie voltaïque avenir par jugement du tribunal de commerce de Bobigny en date du 28 octobre 2016 et en l'absence de reprise du matériel installé par la société Energie voltaïque avenir, l'acquéreur pourra disposer du bien,

- constaté l'existence d'une faute de la société BNP Paribas personal finance dans le déblocage des fonds,

- dit que la société BNP Paribas personal finance sera privée de l'intégralité de sa créance de restitution des fonds prêtés à M. [Z],

- condamné en conséquence de la nullité du contrat de prêt la société BNP Paribas personal finance à payer à M. [Z] l'intégralité des sommes versées par celui-ci au titre du contrat de crédit affecté, soit 26 696,82 euros,

- débouté M. [Z] de sa demande de dommages et intérêts complémentaires,

- débouté M. [Z] de sa demande en paiement au titre du devis de désinstallation,

- débouté les parties du surplus de leurs demandes,

- condamné la société BNP Paribas personal finance à payer à M. [Z] la somme de 800 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- rejeté la demande de la société BNP Paribas personal finance fondée sur l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la société BNP Paribas personal finance aux entiers dépens de l'instance,

- rappelé que la présente décision est assortie de l'exécution provisoire de plein droit.

Par déclaration reçue par le greffe de la cour le 2 février 2024, la société BNP Paribas personal finance a relevé appel de ce jugement en ce qu'il :

- déclaré recevable l'action engagée par M. [Z],

- prononcé la nullité du contrat de vente conclu le 17 septembre 2013 entre M. [Z] et la société Energie voltaïque avenir,

- constaté la nullité de plein droit du contrat de crédit conclu le 17 septembre 2013 entre M. [Z] et la société BNP Paribas personal finance,

- constaté l'existence d'une faute de la société BNP Paribas personal finance dans le déblocage des fonds,

- dit que la société BNP Paribas personal finance sera privée de l'intégralité de sa créance de restitution des fonds prêtés à M. [Z],

- condamné en conséquence de la nullité du contrat de prêt la société BNP Paribas personal finance à payer à M. [Z] l'intégralité des sommes versées par celui-ci au titre du contrat de crédit affecté, soit 26 696,82 euros,

- débouté les parties du surplus de leurs demandes,

- condamné la société BNP Paribas personal finance à payer à M. [Z] la somme de 800 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- rejeté la demande de la société BNP Paribas personal finance fondée sur l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la société BNP Paribas personal finance aux entiers dépens de l'instance,

Aux termes de ses dernières conclusions déposées et notifiées par voie électronique le 4 octobre 2024, l'appelante demande à la cour de :

- la recevoir en son appel, la déclarer bien fondée,

- réformer le jugement rendu par le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Valenciennes du 7 décembre 2023 en ce qu'il a :

- prononcé la nullité du contrat de vente conclu le 17 septembre 2013 entre M. [Z] et la société Energie voltaïque avenir,

- constaté la nullité de plein droit du contrat de crédit conclu le 17 septembre 2013 entre M. [Z] et la société BNP Paribas personal finance,

- constaté l'existence d'une faute de la société BNP Paribas personal finance dans le déblocage des fonds,

- dit que la société BNP Paribas personal finance sera privée de l'intégralité de sa créance de restitution des fonds prêtés à M. [Z],

- condamné en conséquence de la nullité du contrat de prêt la société BNP Paribas personal finance à payer à M. [Z] l'intégralité des sommes versées par celui-ci au titre du contrat de crédit affecté, soit 26 696,82 euros,

- débouté les parties du surplus de leurs demandes,

- condamné la société BNP Paribas personal finance à payer à M. [Z] la somme de 800 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- rejeté la demande de la société BNP Paribas personal finance fondée sur l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la société BNP Paribas personal finance aux entiers dépens de l'instance,

Statuant à nouveau ,

Vu les anciens articles L.311-32 et L.311-33 du code de la consommation,

vu l'ancien article 1134 du code civil,

vu les anciens articles 1108 et suivants du code civil,

vu l'ancien article 1338 du code civil,

vu l'ancien article 1315 du code civil,

vu l'article 9 du code de procédure civile,

vu les pièces versées aux débats,

à titre principal,

- dire et juger que le bon de commande régularisé le 17 septembre 2013 par M. [Z] respecte les dispositions des anciens articles L.121-23 et L.121-24 du code de la consommation,

- à défaut, dire et juger que M. [Z] a amplement manifesté sa volonté de renoncer à invoquer la nullité du contrat au titre des prétendus vices l'affectant sur le fondement des anciens articles L.121-23 et suivants du code de la consommation et ce, en toute connaissance des dispositions applicables,

- constater la carence probatoire de M. [Z],

- dire et juger que les conditions d'annulation du contrat principal de vente sur le fondement d'un prétendu dol ou d'une prétendue absence de cause ne sont pas réunies et qu'en conséquence le contrat de crédit affecté conclu par M. [Z] n'est pas annulé,

- en conséquence, débouter M. [Z] de l'intégralité de ses demandes et notamment de sa demande de remboursement des sommes d'ores et déjà versées par M. [Z] dans le cadre de l'exécution du contrat de crédit affecté consenti le 17 septembre 2013,

à titre subsidiaire, si par extraordinaire la cour devait confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a prononcé la nullité du contrat principal de vente conclu le 17 septembre 2013 et de manière subséquente constaté la nullité de plein droit du contrat de crédit affecté,

- constater, dire et juger que la société Sygma banque aux droits de laquelle vient la société BNP Paribas Personal Finance n'a commis aucune faute en procédant à la délivrance des fonds, ni dans l'octroi du crédit,

- en conséquence, débouter M. [Z] de l'intégralité de ses demandes à l'encontre de la société BNP Paribas personal finance et notamment de sa demande de remboursement des sommes d'ores et déjà versées par M. [Z] dans le cadre de l'exécution du contrat de crédit affecté consenti le 17 septembre 2013, à l'exception des seules sommes qui auraient pu être versées par l'emprunteur au-delà du montant du capital prêté,

à titre infiniment subsidiaire, si par impossible la cour considérait que la société Sygma banque aux droits de laquelle vient la société BNP Paribas Personal Finance a commis une faute dans le déblocage des fonds,

- dire et juger que le préjudice subi du fait de la perte de chance de ne pas contracter le contrat de crédit affecté litigieux ne peut être égal au montant de la créance de la banque,

- dire et juger que M. [Z] conservera l'installation des panneaux solaires photovoltaïques qui ont été livrés et posés à son domicile par la société Energie voltaïque avenir (puisque ladite société a fait l'objet d'une procédure de liquidation judiciaire de sorte qu'elle ne se présentera jamais au domicile de M. [Z] pour récupérer le matériel), que l'installation photovoltaïque fonctionne parfaitement puisque elle a été dûment raccordée au réseau ERDF-ENEDIS, puis mise en service et que M. [Z] perçoit chaque année des revenus énergétiques grâce à l'installation photovoltaïque litigieuse,

- par conséquent, dire et juger que la société BNP Paribas Personal Finance ne saurait être privée de la totalité de sa créance de restitution compte tenu de l'absence de préjudice avéré subi par M. [Z],

- en conséquence, débouter M. [Z] de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions, et notamment de sa demande en remboursement des sommes d'ores et déjà versées par lui dans le cadre de l'exécution du contrat de crédit affecté consenti le 17 septembre 2013, à l'exception des seules sommes qui auraient pu être versées par l'emprunteur au-delà du montant du capital prêté,

- à défaut, réduire à de bien plus justes proportions le préjudice subi par M. [Z] et le condamner à restituer à la société BNP Paribas Personal Finance une fraction du capital prêté, qui ne saurait être inférieure aux deux tiers du capital prêté,

en tout état de cause,

- débouter M. [Z] de l'intégralité de ses demandes en paiement de dommages et intérêts complémentaires telles que formulées à l'encontre de la société BNP Paribas Personal Finance, en l'absence de faute imputable au prêteur et à défaut de justifier de la réalité et du sérieux d'un quelconque préjudice qui serait directement lié à prétendue faute que M. [Z] tente de mettre à la charge du prêteur,

- débouter M. [Z] de sa demande en paiement de dommages et intérêts au titre de la désinstallation des panneaux telle que formulée à l'encontre de la société BNP Paribas Personal Finance,

- condamner M. [Z] à payer la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers frais et dépens, y compris ceux d'appel, dont distraction au profit de Me Francis Deffrennes, avocat aux offres de droit, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 14 janvier 2025, M. [Z] demande à la cour de :

Vu les articles L.111-1, L.311-1, L.311- 6, L.311-8, L.311-13, L.311-32, L.311-35, L.312-2, L. 312-7, L. 312-11, L.312-33, L.313-1, L.313-3 à L.313-5 et D. 311-4-3 du code de la consommation,

vu les articles L.121-21, L.121-23 à L.121-26 et R.121-5 du code de la consommation dans leur rédaction applicable au cas d'espèce,

vu les articles L.421-1 à L.421-5 et L.480-4 du code de l'urbanisme,

vu les articles L.313-5-1, L.519-1 et L.546-1 du code monétaire et financier,

vu l'article L.512-1du code des assurances,

vu les articles 1109, 1116, 1710 et 1792 du code civil,

vu les articles 11, 513 et 700 du code de procédure civile, vu les pièces produites,

- confirmer le jugement du juge des contentieux la protection du tribunal judiciaire de Valenciennes en ce qu'il a :

- déclaré recevable l'action engagée par M. [Z],

- prononcé la nullité du contrat de vente conclu le 17 septembre 2013 entre M. [Z] et la société Energie voltaïque avenir,

- constaté la nullité de plein droit du contrat de crédit conclu le 17 septembre 2013 entre M. [Z] et la société BNP Paribas personal finance,

- constaté l'existence d'une faute de la société BNP Paribas personal finance dans le déblocage des fonds,

- dit que la société BNP Paribas personal finance sera privée de l'intégralité de sa créance de restitution des fonds prêtés à M. [Z],

- condamné en conséquence de la nullité du contrat de prêt la société BNP Paribas personal finance à payer à M. [Z] l'intégralité des sommes versées par celui-ci au titre du contrat de crédit affecté, soit 26 696,82 euros,

- condamné la société BNP Paribas personal finance à payer à M. [Z] la somme de 800 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- rejeté la demande de la société BNP Paribas personal finance fondée sur l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la société BNP Paribas personal finance aux entiers dépens de l'instance,

- Infirmer le jugement rendu le 7 décembre 2023 par le juge des contentieux de la protection de Valenciennes en ce qu'il a :

- débouté M. [Z] de sa demande de dommages et intérêts complémentaires,

- débouté M. [Z] de sa demande au titre des frais de désinstallation,

- débouté M. [Z] du surplus de ses demandes,

Statuant à nouveau ,

Si par extraordinaire la cour infirmait la décision de première instance en ce qu'elle a condamné la banque à restituer à M. [Z] l'intégralité des échéances versées,

à titre subsidiaire,

- condamner la société BNP Paribas personal finance venants aux droits de la société Sygma banque à verser à M. [Z] la somme de 26 000 euros, sauf à parfaire, à titre de dommages et intérêts, du fait de la négligence fautive de la banque,

à titre infiniment subsidiaire,

si par extraordinaire la cour infirmait la décision en ce qu'elle a prononcé la nullité des contrats,

- prononcer la déchéance du droit aux intérêts au titre du crédit affecté,

- en conséquence, condamner la société BNP Paribas personal finance à restituer à M. [Z] la somme de 4 696,82 euros au titre des intérêts trop perçus,

en tout état de cause

- condamner la société BNP Paribas personal finance venant aux droits de la société Sygma banque à verser à M. [Z] les sommes de :

- 3 000 euros au titre du préjudice financier et du trouble de jouissance,

- 3 000 euros au titre du préjudice moral,

- condamner la société BNP Paribas personal finance venant aux droits de la société Sygma banque à verser à M. [Z] la somme de 2 832 euros au titre du devis de désinstallation,

- condamner la société BNP Paribas personal finance venant aux droits de la société Sygma banque à payer à M. [Z] la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens,

- débouter la société société BNP Paribas personal finance venant aux droits de la société Sygma banque de toutes ses demandes, fins et conclusions contraires aux présentes.

Régulièrement assigné par acte de commissaire de justice délivré à personne le 14 mars 2024, Me [D] ès qualité de mandataire ad litem de la société Energie voltaïque avenir n'a pas constitué avocat.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, il convient de se reporter aux écritures des parties pour l'exposé de leurs moyens.

La clôture de l'affaire a été rendue le 30 janvier 2025.

MOTIFS

Sur la recevabilité

La cour constate que bien qu'elle ait fait appel de la disposition du jugement qui a déclaré l'action de M. [Z] recevable, la société BNP Paribas personal finance ne discute pas cette disposition, ni ne demande, dans le dispositif de ses conclusions, de voir déclarer cette action irrecevable. Ce point n'étant pas contesté devant la cour il convient en conséquence de confirmer la décision entreprise en ce qu'elle a à bon droit déclaré l'action engagée par M. [Z] recevable .

Sur la nullité du bon de commande

Il y a lieu de préciser qu'il sera fait application des dispositions du code de la consommation dans leur version issue de la loi n°93-949 du 27 juillet 1993 applicable au cas d'espèce, le contrat de vente ayant été conclu le 17 septembre 2013.

En vertu de l'article L. 121-23 du code de la consommation, dans sa version issue de la loi n°93-949 du 27 juillet 1993 applicable au cas d'espèce, les opérations de démarchage doivent faire l'objet d'un contrat dont un exemplaire doit être remis au client au moment de la conclusion de ce contrat et comporter notamment, à peine de nullité, le nom du démarcheur, la désignation précise de la nature et des caractéristiques des biens offerts ou des services proposés, les conditions d'exécution du contrat, notamment les modalités et le délai de livraison des biens ou d'exécution de la prestation de services ainsi que la mention du prix global à payer et des modalités de paiement, avec cette précision qu'en cas de vente à tempérament ou de vente à crédit, doivent également y figurer les formes exigées par la réglementation sur la vente à crédit, ainsi que le taux nominal de l'intérêt et le taux effectif global de l'intérêt. Doit encore à être mentionné la faculté de renonciation prévue à l'article L. 121-25 du même code, ainsi que les conditions d'exercice de cette faculté et, de façon apparente, le texte intégral des articles L. 121-23, L. 121-24, L. 121-25 et L. 121-26 du code de la consommation.

L'intimé soutient que le contrat de vente est nul notamment en ce qu'il ne reproduit pas la désignation précise de la nature et des caractéristique des biens offerts ou services proposés à la vente, notamment la marque des biens, le modèle, la référence, le poids, la dimension des panneaux et de l'onduleur, ni leur performance ; que le bon de commande en sa possession ne comporte pas les modalités de financement et de remboursement ; qu'il ne comporte aucune mention sur les conditions d'exécution du contrat et les délais de mise en service des panneaux, que le délai de livraison n'est pas mentionné, ni le nom du démarcheur, qu'enfin le bon de commande ne respecte pas les dispositions du code de la consommation en matière de droit de rétractation le bordereau ne pouvant être détaché sans amputer le contrat.

La société BNP Paribas personal finance répond que le contrat de vente n'est pas nul en ce que les caractéristiques essentielles des matériels offerts à la vente son parfaitement détaillées ; qu'aucune disposition du code de la consommation n'impose de faire figurer au bon de commande la marque, le poids, la dimension des panneaux ; que la loi n'impose pas davantage de faire figurer le prix détaillé de chaque matériel, un prix global étant suffisant. Elle ajoute que le contrat de vente auquel était joint le contrat de crédit est conforme aux dispositions de l'article L.121-23 du code de la consommation, l'emprunteur ayant eu connaissance des conditions de financement, et qu'il comporte les mentions relatives au droit de rétractation, ainsi qu'un bordereau de rétractation. Elle ajoute que les emprunteurs ont confirmé la nullité encourue en exécutant volontairement le contrat, en toute connaissance des vices l'affectant, les articles L.121-23 et suivants du code de la consommation étant reproduits aux conditions générales.

En l'espèce, le contrat de vente litigieux porte sur la fourniture et la pose d'une installation solaire photovoltaïque d'une puissance globale de 3 000 Wc comportant 12 panneaux d'une puissance individuelle de 250 WC. La société Energie voltaïque avenir s'est engagée à accomplir les démarches administratives et de raccordement de l'installation au réseau ERDF .

La nature complexe de l'opération contractuelle en question implique impérativement que soit précisées certaines caractéristiques essentielles. Faute de telles précisions le consommateur ne sera pas en mesure de procéder comme il peut légitimement en ressentir la nécessité - à une comparaison pertinente entre diverses offres de même nature proposées sur le marché afin d' opérer le choix qui lui paraît le plus judicieux.

Dans le cas présent le bon de commande ne mentionne pas la marque des panneaux et de l'onduleur offerts à la vente. Ainsi la marque des panneaux solaires en cause est choisie discrétionnairement par le vendeur de panneaux photovoltaïques. Or la Cour de cassation dans un arrêt de principe du 24 janvier 2024 a considéré que constitue une caractéristique essentielle la marque du bien ou du service faisant l'objet du contrat ( Civ, 1ère, 24 janvier 2024, n° du pourvoi 21-20.691).

De plus, le bon de commande s'agissant de la date de livraison précise à l'article 2 des conditions générales 'La livraison des produits et matériels, dans la limite des stocks disponibles, est déterminée par le distributeur qui fixe avec le client une date 'D'INSTALLATION' respectant obligatoirement les dispositions du code de la consommation en matière de vente à domicile (article L.121-21 et suivant du code de la consommation) et dans la limite de 90 jours maximum à compter du jour de la signature du présent bon de commande'.

Force est de constater que cette indication est parfaitement insuffisante pour répondre aux exigence de l'article L.121-23 du code de la consommation dès lors qu'il n'est pas distingué entre le délai de pose des modules et celui de réalisation des prestations à caractère administratif et qu'un tel délai global ne permet pas à l'acquéreur de déterminer de façon suffisamment précise quant le vendeur aura exécuté ses différentes obligations, notamment la date du raccordement ERDF qui conditionne le fonctionnement effectif de l'installation.

Enfin, si le contrat de vente comporte un bordereau de rétractation, celui-ci n'est toutefois pas conforme aux exigences légales dès lors qu'il est situé directement au verso du seul emplacement dédié, au recto, aux date, noms et signatures des parties au contrat, et qu'il s'ensuit qu'en cas d'utilisation de cette faculté, le consommateur détruirait l'instrumentum du contrat qui perdrait ainsi totalement sa valeur probante.

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres griefs exposés par M. [Z], il résulte des observations qui précèdent que le bon de commande en date du 17 septembre 2013 est irrégulier au regard des dispositions protectrices du code de la consommation, ce qui entraîne sa nullité, sans que le consommateur ait à démontrer le caractère déterminant pour son consentement des informations manquantes, s'agissant d'une nullité d'ordre public.

A visa de l'article 1338 du code civil dans sa version antérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 applicable à la date du contrat, la société BNP Paribas Personal Finance fait valoir que M. [Z] confirmé la nullité du contrat de vente au motif qu'en toute connaissance des vices qui affectaient le bon de commande, qu'ils ne pouvaient ignorer dans la mesure où ledit bon de commande comportait en caractères parfaitement lisibles les dispositions des articles L.121-23 à L.121-6 du code de la consommation relatives au démarchage à domicile, il s'est néanmoins abstenus d'user de sa faculté de rétractation, a signé le certificat de livraison, accepté sans réserve l'installation du matériel à son domicile, demandé la mise à dispositions des fonds par le prêteur et payé les mensualités de l'emprunt.

Néanmoins, il ne résulte d'aucun élément objectif du dossier que M. [Z] même si il avait connaissance des irrégularités du bon de commande, ait manifesté la volonté non équivoque de renoncer à la nullité qui en découle, étant entendu que son acceptation de la livraison n'a pu avoir pour effet de couvrir ces irrégularités ainsi que la nullité qui a vocation à les sanctionner. Au regard de sa qualité de simple profane il devait de toute évidence ignorer que le défaut des mentions obligatoires entachant le bon de commande était sanctionné par la nullité de cet acte juridique s'agissant d'une nullité relative dans le cadre protecteur du droit de la consommation. Il ne ressort par ailleurs d'aucun élément objectif du dossier que l'acquéreur ait confirmé cet acte nul en renonçant à la nullité qui en découle notamment en adressant au vendeur un courrier recommandé faisant état de sa renonciation explicite à la nullité de cet acte juridique.

Il convient dès lors de confirmer le jugement entrepris entrepris en ce qu'il a prononcé la nullité du contrat de vente conclu le 17 septembre 2013 par bon de commande n°2727 entre la société Energie voltaïque avenir et M. [Z].

Sur la nullité du contrat de crédit affecté

En application des dispositions de l'article L 311-32 du code de la consommation dans sa rédaction issue de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010, le contrat est annulé ou résolu de plein droit lorsque le contrat en vue duquel il a été conclu est lui même résolu ou annulé.

Le contrat principal de vente ayant été annulé, il convient de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a constaté la nullité de plein droit du contrat de crédit conclu entre la société Sygma banque, aux droits de laquelle vient désormais la société BNP Paribas personal finance, et M. [Z].

Sur les conséquences de la nullité du contrat principal de vente et du contrat de crédit

L'annulation du contrat principal de vente et du contrat de crédit qui certes anéantit ces deux conventions ne saurait toutefois conduire au rétablissement mécanique du statu quo ante. En effet il faudra tenir compte aussi le cas échéant, des conséquences de l'éventuelle privation de la banque de sa créance de restitution.

Sur les conséquence de la nullité du contrat de vente

Au regard du prononcé de la nullité du contrat principal de vente, Me [D] ès qualité de mandataire ad litem de la société Energie voltaïque avenir devra restituer le prix de vente à M. [Z] étant entendu que celui-ci devra restituer le matériel installé.

Sur les conséquences de la nullité du contrat de crédit affecté:

Il résulte d'une jurisprudence bien établie que commet une faute la banque qui verse les fonds prêtés au vendeur de panneaux photovoltaïques sans avoir dûment et préalablement vérifié la conformité du bon de commande aux dispositions du code de la consommation. La banque commet également une faute en ne s'assurant pas au moyen de toutes démarches utiles, de la bonne exécution des travaux par le vendeur des panneaux photovoltaïques conformément à ses engagements contractuels avant de débloquer les fonds prêtés.

En l'espèce, la société BNP Paribas personal finance a manifestement commis une faute en ne vérifiant pas la conformité du bon de commande litigieux affecté de graves irrégularités aux dispositions d'ordre public du code de la consommation lorsqu'elle a débloqué les fonds du crédit affecté.

Pour obtenir la réparation de son préjudice, le consommateur doit établir l'existence de son préjudice et le fait qu'il est dûment corrélé à la faute de la banque.

Force est de constater que la faillite du vendeur doit être considérée comme générant un préjudice suffisant pour priver le prêteur de sa créance de restitution. En effet du fait de cette déconfiture M. [Z] se verra incontestablement dans l'impossibilité de récupérer le prix de vente auprès de la société Energie voltaïque avenir placée en liquidation judiciaire - alors même que cette restitution du prix aurait été la conséquence juridique normale et automatique résultant de l'annulation du contrat de vente. Il convient de souligner qu'au cas particulier la clôture de la procédure de liquidation judiciaire de la société Energie voltaïque avenir rend absolument certaine et non pas seulement probable la non restitution du prix par cette société.

Dans un arrêt de principe en date du 10 juillet 2024 la première chambre civile de la Cour de cassation a considéré que lorsque la restitution du prix à laquelle le vendeur est condamné, par suite de l'annulation du contrat de vente ou de prestation de service, est devenue impossible du fait de l'insolvabilité du vendeur ou du prestataire, le consommateur, privé de la contrepartie de la restitution du bien vendu, justifie d'une perte subie équivalente au montant du crédit souscrit pour le financement du prix du contrat de vente ou de prestation de service annulé en lien de causalité avec la faute de la banque qui, avant de verser au vendeur le capital emprunté, n'a pas vérifié la régularité formelle du contrat principal (Cass. Civ, 1ère 10 juillet 2024, n° du pourvoi 23-15.802).

La Cour suprême estime ainsi qu'en libérant le capital emprunté sans vérifier la régularité du contrat principal, la banque a manqué à ses obligations, et que d'autre part, l'emprunteur avait subi un préjudice consistant à ne pas pouvoir obtenir, auprès d'un vendeur placé en liquidation judiciaire, la restitution du prix de vente du matériel. Elle en déduit que la banque dans ce cas doit être condamnée à restituer à l'emprunteur à titre de dommages et intérêts une somme correspondant au capital emprunté.

Il est donc logique au regard des observations qui précédent, que la Société BNP Paribas personal finance soit privée de sa créance de restitution.

Il convient dès lors de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a privé la société BNP Paribas personal finance de sa créance de restitution du montant du capital prêté au titre du contrat de crédit du 17 septembre 2013 à l'encontre de M. [Z].

Par ailleurs, confirmant le jugement entrepris, il y a lieu de condamner la société BNP personal finance à restituer à M. [Z] l'ensemble des sommes versées par ce dernier en exécution du contrat de crédit du 17 septembre 2013, soit

26 696,82 euros arrêtée au 7 décembre 2023 date du jugement.

Il n' y a pas lieu de limiter les sommes dues par la banque au montant du capital emprunté comme cela est demandé par cette dernière, car elle doit restituer l'intégralité de ce qu'elle a reçu.

Cette condamnation est prononcée en deniers ou quittances afin de tenir compte d'éventuels règlements de l'emprunteur non comptabilisées qui seraient intervenus après le 7 décembre 2023.

Par ailleurs, la faute avérée de la Société BNP Paribas personal finance SA COFIDIS en l'espèce a causé à M. [Z] un préjudice incontestable qui doit être justement et exactement arbitré à hauteur du montant intégral de la créance de restitution. Il doit en effet être fait application dans le cas présent du principe fondamental dans la sphère de la responsabilité civile de la réparation intégrale du préjudice qui commande de réparer tout le préjudice mais rien que le préjudice.

Il convient dès lors de confirmer par substitution de motifs le jugement entrepris en ce qu'il a débouté M. [Z] de se demandes de dommages et intérêts complémentaires et au titre du devis de désinstallation formulée à l'encontre de la société BNP Paribas personal finance.

Sur l'application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au titre de l'instance d'appel

Il apparaît inéquitable de laisser à la charge de M. [Z] les frais irrépétibles exposés par lui devant la cour et non compris dans les dépens.

Il convient dès lors de condamner la société BNP Personal finance à payer à M. [Z] la somme de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre de l'instance d'appel.

En revanche, il n'apparaît pas inéquitable de laisser à la charge de la société BNP Paribas personal finance les frais irrépétibles exposés par elle devant la cour et non compris dans les dépens.

Il y a lieu en conséquence de débouter la société BNP Paribas personal finance de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre de l'instance d'appel.

Il convient de condamner la société BNP Paribas personal finance qui succombe, aux entiers dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS,

La cour statuant par arrêt réputé contradictoire, dans les limites de l'appel,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant ;

Condamne la SA BNP Paribas personal finance à payer à M. [T] [Z] la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles d'appel ;

Condamne la SA BNP Paribas personal finance aux dépens d'appel.

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