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Décisions

CA Riom, ch. com., 21 mai 2025, n° 24/00723

RIOM

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Cofidis (SA)

Défendeur :

Cofidis (SA), Enrciel (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Dubled-Vacheron

Conseillers :

Mme Noir, Mme Berger

Avocats :

Me Lacquit, Me Hascoet, Me Gay, Me Scotto di Liguori

Trib. prox. Riom, JCP, du 15 févr. 2024,…

15 février 2024

Exposé du litige :

Suivant bon de commande signé le 10 octobre 2017, Mme [D] [I] a conclu avec la S.A.S Enrciel, un contrat portant sur l'installation d'une centrale photovoltaïque, financée à l'aide d'un prêt affecté d'un montant de 13.900 euros remboursable en 144 échéances mensuelles 123,35 euros hors assurance, avec intérêts au taux de 3,66% l'an, souscrit le même jour auprès de la S.A. Cofidis.

L'installation a été effectuée en novembre 2017. Le raccordement de l'installation au réseau a été réalisé le 13 février 2018.

Par jugement du 12 novembre 2020, la S.A.S Enrciel a été placée en liquidation judiciaire, et Maître [J] [U] a été désigné en qualité de liquidateur.

Mme [I] a fait assigner par acte d'huissier en date du 12 mai 2023 la S.A.S Enrciel, prise en la personne de son liquidateur judiciaire Me [J] [U], et la S.A. Cofidis devant le juge des contentieux de la protection de Riom afin de voir notamment prononcer l'annulation du contrat de vente la liant avec la S.A.S Enrciel, l'annulation du contrat de crédit affecté la liant avec la S.A. Cofidis et la condamnation de cette dernière à lui rembourser les sommes versées par I'emprunteur outre le paiement de dommages et intérêts.

Par jugement réputé contradictoire du 15 février 2024, le juge des contentieux de la protection a :

- prononcé la nullité du contrat souscrit le 10 octobre 2017 entre Mme [I] d'une part et la S.A.S Enrciel, d'autre part ;

- constaté l'annulation de plein droit du contrat de crédit affecté conclu entre Madame [D]

[I] d'une part, et la S.A. Cofidis d'autre part ;

- dit que Mme [I] doit restituer à la S.A. Cofidis le capital emprunté, déduction faite de la privation partielle du droit à restitution de celle-ci, soit une somme de 6.950 euros ;

- dit que la S.A. Cofidis doit restituer à Mme [I] une somme de 9.007,03 euros au titre des échéances échues payées, arrêtée au mois d'août 2023, outre les échéances de crédit postérieures sur justification du paiement par les emprunteurs ;

- condamné après compensation la S.A. Cofidis à payer à Mme [I] la somme de 2.057,53 euros outre les échéances de crédit postérieures au mois d'août 2023 sur justification du paiement par les emprunteurs ;

- condamné la S.A.S Enrciel,, prise en la personne de son liquidateur judiciaire Me [J] [U], et la S.A. Cofidis à payer à Mme [I] une somme de 1.500,00 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné la S.A.S Enrciel, prise en la personne de son liquidateur judiciaire Me [J] [U] et la S.A. Cofidis aux dépens.

La SA Cofidis a interjeté appel de ce jugement le 26 avril 2024.

Aux termes de leurs conclusions notifiées par RPVA le 17 octobre 2024, la SA Cofidis demande à la cour de :

- à titre principal d'infirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions ;

- statuant à nouveau de :

- déclarer toutes les demandes de Mme [I] irrecevables, la prescription étant acquise, sauf en ce qui concerne la nullité pour erreur ;

- déclarer la demande de nullité pour erreur mal fondée ;

- à titre subsidiaire, si la cour venait à déclarer les demandes de Mme [I] recevables les déclarer mal fondées et l'en débouter ;

- à titre infiniment subsidiaire, si la cour venait à confirmer le jugement sur la nullité des conventions :

- infirmer le jugement sur les conséquences de la nullité des conventions, sur les fautes de Cofidis et sur le prétendu préjudice subi par Mme [I] ;

- statuant à nouveau :

- condamner Mme [I] à lui rembourser l'intégralité du capital, soit la somme de 13.900 euros au taux légal à compter de l'arrêt à intervenir en l'absence de faute ;

- à titre infiniment subsidiaire :

- la priver de 1 000 euros sur le capital et condamner Madame [D] [I] à lui payer la somme de 12.900 euros au taux légal à compter de l'arrêt à intervenir.

- en tout état de cause :

- débouter Mme [I] de sa demande de condamnation formée à son encontre au titre d'un prétendu préjudice moral,

- condamner Mme [I] à lui payer à la SA Cofidis la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

- condamner Mme [I] aux entiers dépens.

Aux termes de ses conclusions notifiées par RPVA le 30 octobre 2024, Mme [I] demande à la cour de :

- à titre principal, confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu le 15 février 2024 ;

- à titre subsidiaire , réformer le jugement rendu le 15 mars 2024 ce qu'il a :

- dit qu'elle doit restituer à la SA Cofidis le capital emprunté, déduction faite de la privation partielle du droit à restitution de celle-ci soit une somme de 6.950 euros,

- dit que la SA Cofidis doit lui restituer une somme de 9.007,03 euros au titre des échéances échues payées, arrêtée au mois d'août 2023, outre les déchéances de crédit postérieures sur justification du paiement par les emprunteurs,

- condamné après compensation, la SA Cofidis à lui payer la somme de 2.057,53 euros outre les échéances de crédit postérieures au mois d'août 2023 sur justification du paiement par les emprunteurs,

- débouté les parties du surplus de leurs demandes ;

- en conséquence statuant à nouveau :

- juger que son consentement a été vicié pour cause d'erreur sur la rentabilité économique de l'opération ;

- prononcer la nullité du contrat de vente conclu le 10 octobre 2017 entre elle et la société Cofidis';

- juger que la nullité du contrat de vente conclu le 10 octobre 2017 est absolue et ne peut donc pas être confirmée ;

- subsidiairement, juger qu'elle n'était pas informée des vices, et n'a jamais eu l'intention de les réparer, ni eu la volonté de confirmer l'acte nul ;

- juger par conséquent que la nullité du bon de commande du 10 octobre 2017 n'a fait l'objet d'aucune confirmation ;

- juger qu'elle tient le matériel à disposition de la société Enrciel, représentée par Maître [U] et que les frais de désinstallation et de remise en état seront mis à la charge de la société Enrciel représentée par Maître [U] ;

- juger qu'à défaut de reprise du matériel dans le délai de deux mois à compter de la décision à intervenir, la société Enrciel, représentée par Maître [U] est réputée y avoir renoncé ;

- prononcer la nullité consécutive du contrat de crédit affecté conclu le 10 octobre 2017 entre elle et la SA Cofidis ;

- juger que l'établissement bancaire Cofidis a commis une faute lors du déblocage des fonds au bénéfice de la société Cofidis ;

- juger qu'elle justifie d'un préjudice ;

- juger que la SA Cofidis est privée de son droit à réclamer restitution du capital prêté ; - condamner la SA Cofidis à lui restituer l'intégralité des sommes versées par elle au titre du capital, intérêts et frais accessoires en vertu du contrat de crédit affecté du 10 octobre 2017, soit la somme de 11.144,91 euros, somme arrêtée en octobre 2024 ;

- à titre très subsidiaire :

- juger que la SA Cofidis a manqué à son devoir de mise en garde et de prudence ;

- condamner la SA Cofidis à lui payer, la somme de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice lié à la perte de chance de ne pas souscrire le prêt excessif ;

- juger que la SA Cofidis a manqué à son obligation d'information et de conseil ;

- prononcer la déchéance de l'intégralité du droit aux intérêts afférents au contrat de crédit conclu le 10 octobre 2017 et condamner Mme [I] à lui rembourser l'intégralité des intérêts, frais et accessoires déjà versés ;

- condamner la SA Cofidis à lui verser la somme de 5.000 euros au titre de son préjudice moral';

- en tout état de cause condamner la SA Cofidis à lui payer la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du CPC ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Aucun avocat ne s'est constitué pour la Selarl [U], prise en sa qualité de liquidateur de la SAS Enrciel, à qui la déclaration d'appel et les conclusions ont été signifiées par acte du 3 juin 2024 délivré à personne morale.

Il sera renvoyé pour l'exposé complet des demandes et moyens de parties à leurs dernières conclusions.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 19 décembre 2024.

MOTIFS :

1- Sur les demandes formées au titre du contrat de vente :

a-sur la demande de nullité du contrat de vente au visa des dispositions du code de la consommation :

- sur la recevabilité de l'action en nullité formée par Mme [I] :

Mme [I] fonde sa demande de nullité du contrat de vente sur les irrégularités de forme affectant le bon de commande. La SA Cofidis soutient qu'en application de l'article l'article 2224 du code civil, les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans, à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer et que le point de départ de ce délai de prescription se situe au jour où l'emprunteur est en mesure de déceler les erreurs qu'il allègue. Elle déclare que s'agissant d'une action en nullité au visa des dispositions du code de la consommation, Mme [I] était en mesure de déceler les erreurs dès la date de signature du bon de commande, soit le 10 octobre 2017, de sorte que son action est prescrite.

En réponse, Mme [I] soutient que la date de conclusion du contrat de vente et de prêt conclu par un consommateur ne peut constituer le point de départ de principe d'un délai de prescription et qu'une action en nullité pour vice de forme court à compter du jour où le consommateur emprunteur a effectivement conscience du vice en question. Elle déclare qu'en sa qualité de consommatrice elle n'a pas été en mesure de déceler elle-même les vices affectant l'acte et que ce n'est que bien après la conclusion du contrat, avec le recul sur le fonctionnement de l'installation, que son attention a été attirée sur l'existence d'éléments pouvant faire présumer du non-respect des règles du code de la consommation et qu'elle a entrepris d'agir pour obtenir le bénéfice de ses droits ; que le dommage n'a été objectivé qu'après réalisation d'un rapport d'expertise amiable en date du 14 octobre 2022 et que c'est uniquement à compter de cette date qu'elle a pu avoir conscience de l'absence de rentabilité de son installation. Elle ajoute que conformément à la jurisprudence il ne peut être déduit du fait que les articles du code de la consommation qui prévoient ces nullités soient reproduits au verso du contrat une connaissance par le demandeur, simple consommateur, des irrégularités affectant le bon de commande. Elle en conclut que le point de départ de son action doit être fixé à la date du 14 octobre 2022 (date du rapport d'expertise amiable) ou au plus tard à la date du 20 mars 2019 (date de la première facture de revente) de sorte que son action sera déclarée recevable.

Sur ce,

Selon l'article 2224 du code civil, les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans, à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.

Dans le cas d'une action en annulation de contrat fondée sur l'irrégularité formelle de l'acte contractuel au regard des dispositions du code de la consommation, le point de départ du délai de prescription de l'action en annulation du contrat conclu hors établissement, se situe au jour où le consommateur a connu ou aurait dû connaître les défauts d'information affectant la validité du contrat.

Il incombe au juge de caractériser la date à laquelle l'acquéreur a pu avoir une connaissance effective du vice résultant de l'inobservation de ces dispositions. Or, cette connaissance ne peut résulter du seul fait que les conditions générales figurant au verso du bon de commande reproduisent, même lisiblement, les dispositions du code de la consommation prescrivant le formalisme applicable à un contrat conclu hors établissement. Dès lors, la seule lecture par l'acquéreure des conditions générales du contrat ne lui permettaient pas d'avoir la connaissance des éventuels vices du bon de commande. (Cass Civ.1ère 12 mars 2025 n° 23-22.043)

En l'espèce, c'est à juste titre que le JCP a considéré que Mme [I], particulier sans connaissance spéciale en matière de droit, ne disposait pas des aptitudes nécessaires pour se convaincre, au jour de la conclusion du contrat litigieux, de l'existence ou non d'une cause de nullité.

Mme [I] produit son contrat d'achat d'électricité auprès de ERDF du 18 février 2019 ainsi que la première facture reçue le 20 mars 2019. Il y a lieu de considérer que la réception de cette première facture annuelle du rachat de l'électricité produite par l'installation lui permettait d'appréhender la réalité de son engagement de sorte que c'est à compter de cette date que Mme [I] était en mesure de connaître les défauts d'information affectant la validité du contrat et d'exercer une action fondée sur la méconnaissance des dispositions du code de la consommation.

Son action n'est donc pas prescrite et le jugement déféré qui a déclaré l'action de Mme [I] recevable sera donc confirmé.

- sur le bien-fondé de l'action en nullité du contrat principal au visa des dispositions du code de la consommation :

L'appelante fait valoir qu'en application des dispositions de l'article 1184 du code civil, faute pour l'emprunteur de démontrer le caractère déterminant des prétendues carences du bon de commande , la nullité ne peut être prononcée ; que le code de la consommation n'impose pas au vendeur de faire apparaître les références des panneaux ou de l'onduleur sur le bon de commande ni le poids ou la surface des panneaux ; que la puissance de l'onduleur est toujours équivalente à celle des panneaux ; qu'en l'espèce la marque de l'onduleur est précisée; qu'en ce qui concerne le support de la pose des panneaux à partir du moment où il s'agit d'une intégration au bâti les aspects techniques relèvent du DTU et ne sont pas déterminants du consentement des emprunteurs ; enfin, que s'agissant de nullités relatives en acceptant la livraison des marchandises, suivi les travaux et signé une attestation sans réserve Mme [I] est irrecevable et en tout cas mal fondée à solliciter la nullité sur ce fondement.

L'intimée fait valoir que des irrégularités affectent le bon de commande tenant à l'absence des caractéristiques essentielles des biens ou des services proposés, à l'insuffisance des mentions relatives au prix, à l'imprécision du délai et des modalités de livraison dans lesquelles le professionnel s'engage à livrer le bien ou exécuter le service et tenant à l'absence de mention sur la possibilité de recourir à un médiateur ainsi que ses coordonnées. Elle indique, enfin, que le bon de commande contient des mentions irrégulières concernant la mention erronée du point de départ du délai de prescription.

Sur ce,

Le contrat de vente a été conclu entre l'intimée et la société Enrciel le 10 octobre 2017 à l'occasion d'un démarchage à domicile. Ils relèvent par suite du régime des articles L. 221-1 et suivants du code de la consommation dans leur version applicable au litige issue de la loi n° 2014-344 du 17 mars 2014, recodifiée à compter du 1er octobre 2016.

Selon l'article L.221-5 1° du code de la consommation préalablement à la conclusion d'un contrat de vente ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations prévues aux articles L. 111-1 et L.111-2.

L'article L.111-1 du même code dans sa version résultant de l'ordonnance n°2016-301 du 14 mars 2016 et applicable au présent litige, dispose que :

'Avant que le consommateur ne soit lié par un contrat de vente de biens ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations suivantes:

1° Les caractéristiques essentielles du bien ou du service, compte tenu du support de communication utilisé et du bien ou service concerné ;

2° Le prix du bien ou du service, en application des articles L.112-1 à L.112-4 ;

3° En l'absence d'exécution immédiate du contrat, la date ou le délai auquel le professionnel s'engage à livrer le bien ou à exécuter le service ;

4° Les informations relatives à son identité, à ses coordonnées postales, téléphoniques et électroniques et à ses activités, pour autant qu'elles ne ressortent pas du contexte ;

5° S'il y a lieu, les informations relatives aux garanties légales, aux fonctionnalités du contenu numérique et, le cas échéant, à son interopérabilité, à l'existence et aux modalités de mise en oeuvre des garanties et aux autres conditions contractuelles ;

6° La possibilité de recourir à un médiateur de la consommation dans les conditions prévues au titre Ier du livre VI.

La liste et le contenu précis de ces informations sont fixés par décret en Conseil d'État.

Les dispositions du présent article s'appliquent également aux contrats portant sur la fourniture d'eau, de gaz ou d'électricité, lorsqu'ils ne sont pas conditionnés dans un volume délimité ou en quantité déterminée, ainsi que de chauffage urbain et de contenu numérique non fourni sur un support matériel. Ces contrats font également référence à la nécessité d'une consommation sobre et respectueuse de la préservation de l'environnement.'

L'article L.221-9 du dit code dispose quant à lui que 'Le professionnel fournit au consommateur un exemplaire daté du contrat conclu hors établissement, sur papier signé par les parties ou, avec l'accord du consommateur, sur un autre support durable, confirmant l'engagement exprès des parties.

Ce contrat comprend toutes les informations prévues à l'article L. 221-5.

Le contrat mentionne, le cas échéant, l'accord exprès du consommateur pour la fourniture d'un contenu numérique indépendant de tout support matériel avant l'expiration du délai de rétractation et, dans cette hypothèse, le renoncement de ce dernier à l'exercice de son droit de rétractation. Le contrat est accompagné du formulaire type de rétractation mentionné au 2° de l'article L. 221-5.'

Par ailleurs l'article L.242-1 du même code prévoit que les dispositions de cet article sont prescrites à peine de nullité du contrat conclu hors établissement.

Au cas d'espèce, le bon de commande est rédigé comme suit :

'fourniture d'une centrale solaire d'une puissance de 3000 WC 300 Watts comprenant 10 capteurs, onduleur(s) 10, coffret AC, coffret DC, parafoudre et différentiel.

Marque des panneaux : EUPENER Marque onduleur : ENPHASE '

Revente de surplus totale : vous vendez l'intégralité de votre production photovoltaïque à EDF

TOTAL HT : 12 636,36 euros

TVA 10% : 1 263,64 euros

TOTAL TTC : 13 900 euros

Il résulte de la description contenue dans le bon de commande que les désignations techniques telles que rappelées sont suffisamment précises pour informer le consommateur contractant, les textes n'imposant pas la mention de tous les détails techniques (poids, taille ), sauf si ces détails sont déterminants de la conclusion du contrat, ce qui n'est pas démontré. De même, aucun texte n'exige la mention du prix unitaire de chaque élément constitutif du bien offert ou du service proposé de sorte que l'annulation du contrat n'était donc pas encourue en l'absence d'une telle mention.

S'agissant du délai de livraison, la date de livraison et les modalités doivent être suffisamment précises. En l'espèce, le bon de commande ne fait figurer que des mentions standardisées :'visite du technicien au plus tard dans les deux mois à compter de la signature de la commande ; délai d'installation des équipements : au plus tard dans les 4 mois ; durée des travaux : 5 jours maximum (hors raccordement le cas échéant)'. Or, les délais spécifiés sont trop imprécis pour répondre aux exigences de l'article L. 111-1, 3° du code de la consommation, dès lors qu'il n'était pas distingué entre le délai de pose des modules et celui de réalisation des prestations à caractère administratif et qu'un tel délai global ne permettait pas aux acquéreurs de déterminer de manière suffisamment précise quand le vendeur exécuterait ses différentes obligations.

De même, en application des dispositions de l'article L. 111-1-6° du code de la consommation, un contrat de vente conclu hors établissement doit comporter, à peine de nullité, une mention relative à la possibilité de recourir à un médiateur de la consommation dans les conditions prévues au titre Ier du livre VI du code de la consommation, ainsi que les coordonnées du ou des médiateurs de la consommation compétents dont le professionnel relève en application de l'article L. 616-1. Or, force est de constater que le bon de commande litigieux ne fait pas mention de recourir à un médiateur et n'indique de ce fait aucunes coordonnées.

Enfin, s'agissant du délai de rétractation, en vertu de l'article L. 221-8 du code de la consommation, applicable à l'espèce, le consommateur dispose d'un délai de quatorze jours pour exercer son droit de rétractation d'un contrat conclu à distance, à la suite d'un démarchage téléphonique ou hors établissement. Ce délai court à compter de la conclusion du contrat pour les contrats de prestation de service et de la réception du bien par le consommateur pour les contrats de vente. En application de l'article L. 221-1- II du code de la consommation le contrat qui a pour objet à la fois la fourniture de prestation de services et la livraison de biens est assimilé à un contrat de vente (Cass civ 1ère 17 mai 2023 n°21-25.670).

En l'espèce, le bon de commande conclu par les parties portant sur la fourniture de panneaux ainsi que sur l'installation de ces matériels et leur mise en service après raccordement, a donc pour objet à la fois la livraison de biens et la fourniture d'une prestation de services destinée à leur installation et mise en service, ce qui constitue un contrat de vente faisant courir le délai de rétractation de quatorze jours à compter de la réception du matériel par les acquéreurs et non à compter de la conclusion du contrat.

Dès lors, la mention d'un délai de rétractation "au plus tard le 14ème jour à partir de la commande" dans le formulaire de rétractation du bon de commande était erronée et était susceptible de faire croire à Mme [I] qu'il était expiré avant même la livraison des biens.

En conséquence, c'est à bon droit que l'intimée fait valoir que l'analyse du de commande révèle que les modalités d'exercice du droit de rétractation sont erronées.

Il s'ensuit, au regard des irrégularités constatées sur les bons de commande, que le contrat principal n'est pas conforme aux exigences de formalisme prévues par le code de la consommation à peine de nullité.

b- sur la confirmation du contrat :

La méconnaissance des dispositions sus-visées du code de la consommation, tout comme celle des articles 1130 et suivants du code civil, est sanctionnée par une nullité relative susceptible d'être couverte par les actes postérieurs.

Selon l'article 1182 du code civil, la confirmation est l'acte par lequel celui qui pourrait se prévaloir de la nullité y renonce. Cet acte mentionne l'objet de l'obligation et le vice affectant le contrat. La confirmation ne peut intervenir qu'après la conclusion du contrat.

L'exécution volontaire du contrat, en connaissance de la cause de nullité, vaut confirmation. En cas de violence, la confirmation ne peut intervenir qu'après que la violence a cessé.

La confirmation emporte renonciation aux moyens et exceptions qui pouvaient être opposés, sans préjudice néanmoins des droits des tiers.

La reproduction même lisible, des dispositions du code de la consommation prescrivant le formalisme applicable à un contrat conclu hors établissement ne permet pas au consommateur d'avoir une connaissance effective du vice résultant de l'inobservation de ces dispositions et de caractériser la confirmation tacite du contrat. (Cass civ1ère 24 janvier 2024 n° 22-16.115).

L'acte de confirmation ne se présume pas et doit résulter d'une volonté claire et non équivoque.

En l'espèce, le fait que Mme [I] ne se soit pas opposée à la réalisation des travaux , ait signé l'attestation de fin de travaux et payé les échéances du prêt ne permet pas d'en déduire qu'elle a entendu réparer le vice du contrat dès lors qu'il n'est pas établi qu'à l'époque des faits elle avait connaissance des vices affectant l'opération.

Il convient en conséquence de confirmer le jugement en ce qu'il a prononcé la nullité des contrats de vente du 10 mai 2017 sans qu'il soit besoin d'examiner les moyens soulevés au titre d'un éventuel vice du consentement.

2- sur la nullité subséquente du contrat de crédit et ses conséquences :

La SA Cofidis soutient qu'elle a libéré les fonds au vu d'une attestation de livraison et de mise en service du 27 octobre 2017 de sorte que Mme [I] disposait d'un délai de 5 ans expirant le 27 octobre 2022 pour agir en responsabilité contre elle et que la prescription est donc acquise.

Ensuite, elle fait valoir qu'elle n'avait pas à vérifier la mise en service de l'installation, ni à vérifier l'obtention des autorisations administratives. ; que dès lors qu'elle prouve la mise en service de l'installation les obligations des emprunteurs prennent effet à son égard et il n'appartient plus au juge de s'interroger sur le contenu de l'attestation de livraison. Elle déclare qu'elle a libéré les fonds au vu d'une attestation de livraison et de mise en service avec demande de financement ; qu'il lui appartenait de procéder à un simple contrôle de la régularité formelle du bon de commande lui permettant de détecter les causes de nullité flagrantes.

À titre infiniment subsidiaire, elle rappelle qu'il appartient désormais à l'emprunteur d'apporter la preuve d'une faute, d'un préjudice et d'un lien de causalité ; que si Mme [I] ne peut récupérer les fonds auprès du vendeur en liquidation judiciaire c'est parce que Mme [I] a fait le choix de ne pas procéder à une déclaration de créance et a sciemment perdu une chance d'obtenir la restitution du prix auprès du liquidateur ; que Mme [I] a fait le choix de rester en possession du matériel, a déjà récupéré 7 600 euros et continue à en percevoir les fruits de sorte qu'elle ne justifie pas d'un préjudice de nature à priver la banque de la totalité du capital.

En réponse, Mme [I] fait valoir que lorsque les fonds ont été débloqués de manière fautive le prêteur doit être privé des effets normalement attachés à la résolution du crédit et donc de la possibilité de réclamer la restitution des fonds. Elle estime qu'en l'espèce la banque a commis des fautes dans le déblocage des fonds entre les mains du vendeur en ne vérifiant pas la validité du bon de commande ainsi que le droit applicable et en l'absence de vérification du bon fonctionnement de l'installation de sorte que ce comportement la prive de son droit à réclamer la restitution du capital prêté à l'emprunteur. Cette privation de la créance de restitution doit être totale pour avoir un caractère dissuasif pour la banque. En outre la jurisprudence considère que le préjudice est caractérisé en cas de liquidation du vendeur en l'absence de possibilité pour l'acquéreur de se retourner contre le vendeur pour obtenir la restitution du prix de vente. Enfin, elle indique que la prestation réalisée par la société était affectée de plusieurs malfaçons et qu'elle subit régulièrement de nombreuses infiltrations sous sa toiture, ce qui entraîne des frais de réparation de la toiture.

Elle sollicite, à titre principal, la confirmation du jugement qui a limité l'obligation de restitution du capital à hauteur de 50 % du capital emprunté et, à titre subsidiaire, la privation de la banque de l'intégralité de sa créance de restitution en ce que la limitation de l'obligation de restitution fait obstacle à l'indemnisation intégrale de ses préjudices.

Sur ce,

En vertu de l'article L.312-55 du code de la consommation, le contrat de vente étant annulé, le contrat de crédit affecté est lui-même annulé. En conséquence, Mme [I] est bien recevable à solliciter l'indemnisation de son préjudice. La fin de non-recevoir tirée de la prescription sera donc rejetée.

L'article L. 312-27 prévoit que le prêteur est responsable de plein droit à l'égard de l'emprunteur de la bonne exécution des obligations relatives à la formation du contrat de crédit, que ces obligations soient à exécuter par le prêteur qui a conclu ce contrat ou par des intermédiaires de crédit intervenant dans le processus de formation du contrat de crédit, sans préjudice de son droit de recours contre ceux-ci.

Il se déduit de ces dispositions que, par l'effet de l'annulation du contrat de crédit, les parties à ce contrat sont rétablies dans leur état antérieur, ce qui impose en principe à l'emprunteur de restituer le capital emprunté. Ce dernier peut échapper à une telle restitution s'il démontre que le prêteur a commis une faute. La faute du prêteur peut prendre deux formes : un défaut de vérification de l'exécution complète du contrat principal ou un défaut de vérification de la régularité formelle de ce contrat. Enfin, si l'emprunteur peut invoquer la faute du prêteur pour échapper à la restitution de tout ou partie du capital, il doit également justifier de l'existence d'un préjudice consécutif.

S'agissant du remboursement, par l'emprunteur, du capital prêté, il s'évince des articles L.311-31 et L.311-32 du code de la consommation que le prêteur qui a versé les fonds sans s'être assuré, comme il y était tenu, de la régularité formelle du contrat principal ou de sa complète exécution, peut être privé en tout ou partie de sa créance de restitution, dès lors que l'emprunteur justifie avoir subi un préjudice en lien avec cette faute (Cass.Civ 1ère 25 novembre 2020, 19-14.908).

- sur la faute de la banque :

En l'espèce, comme il a été relevé ci-dessus, le contrat de vente était affecté d'irrégularités sanctionnées par la nullité, tenant notamment à une mauvaise information relativement au bordereau de rétractation.

Ainsi, la banque qui a versé les fonds sans procéder préalablement, auprès du vendeur et de l'emprunteur, aux vérifications qui lui auraient permis de constater que le contrat de démarchage à domicile était affecté d'une cause de nullité, commet une faute étant observé que la banque ne saurait se désintéresser de la régularité formelle d'un tel contrat, compte tenu du caractère unique de l'opération commerciale qu'elle finance, ainsi qu'il a été dit précédemment.

- sur le préjudice

La preuve de la faute commise par le prêteur dans l'exécution de ses obligations étant établie, il appartient à Mme [I] de démontrer l'existence de son préjudice et que celui-ci résulte directement de la faute de l'établissement bancaire.

En l'espèce, il est établi que le raccordement au réseau ERDF a été effectué, que l'installation est opérationnelle et produit de l'électricité, revendue à ERDF. L'absence de rentabilité ne constitue pas un préjudice indemnisable dès lors que la banque ne saurait être tenue des manquements de son partenaire commercial quant à la performance énergétique. Enfin, si Mme [I] affirme qu'elle subit de nombreuses infiltrations de façon régulière sur son toit en raison de malfaçons de l'installation, force est de constater qu'elle ne justifie par aucune pièce de ce préjudice et des frais de réparation de la toiture qu'elle invoque.

Toutefois, la société Enrciel étant placée en liquidation judiciaire, l'impossibilité pour l'emprunteur d'obtenir la restitution du prix est, selon le principe d'équivalence des conditions, une conséquence de la faute de la banque dans l'examen du contrat principal.

En l'espèce, même si Mme [I] pourra conserver le matériel installé en l'absence de demande de restitution par le liquidateur, celle-ci se trouve incontestablement dans une situation dommageable étant privée de son droit à restitution du prix consécutive à l'annulation du contrat de vente de sorte que la banque, par ses divers manquements, a contribué au préjudice subi par l'emprunteur.

Par conséquent, c'est à juste titre que le premier juge a fixé, afin d'éviter tout enrichissement de la part de l'emprunteur, la privation du droit de l'établissement de crédit à restitution du capital à concurrence de 50 % du capital emprunté.

Ainsi, le jugement qui a condamné la SA Cofidis à payer à Mme [I] la somme de 2 057,53 euros, outre les échéances postérieures réglées par elle sur justification du paiement sera confirmé.

Il a été fait droit à la demande principale formée par Mme [I] de sorte qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ses demandes formées à titre subsidiaire sur les manquements de la banque à ses obligations.

3- sur la demande en dommages et intérêts pour préjudice moral :

Mme [I] a affirme qu'elle s'est endettée sur 12 années pour financer l'opération qui devait lui être rentable.

Néanmoins, force est de constater qu'elle justifie par aucun élément précis qu'elle se trouve dans une situation financière difficile du fait de la souscription du contrat litigieux.

Le jugement qui l'a déboutée de sa demande en dommages-intérêts au titre de son préjudice moral sera donc confirmé.

4- sur les dépens et les frais irrépétibles :

La SA Cofidis, qui succombe, sera condamnée aux dépens d'appel et à payer à Mme [I] la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

La cour, statuant par arrêt réputé contradictoire statuant en dernier ressort,

Confirme le jugement en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

Condamne la SA Cofidis à payer à Mme [D] [I] la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile';

Condamne la SA Cofidis aux dépens d'appel.

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