CA Versailles, ch. civ. 1-3, 22 mai 2025, n° 22/00489
VERSAILLES
Arrêt
Autre
COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 50D
Chambre civile 1-3
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 22 MAI 2025
N° RG 22/00489
N° Portalis DBV3-V-B7G-U65C
AFFAIRE :
[L] [W]
...
C/
[H] [U]
...
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 09 Décembre 2021 par le TJ de Versailles
N° Chambre : 2
N° RG : 20/04183
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le :
à :
Me Katell FERCHAUX-
LALLEMENT de la SELARL BDL AVOCATS
Me Guillaume NICOLAS de la SCP PIRIOU METZ NICOLAS
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE VINGT DEUX MAI DEUX MILLE VINGT CINQ,
La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
Madame [L] [W]
née le 05 Octobre 1976 à [Localité 10]
de nationalité Française
[Adresse 5]
[Localité 2]
Monsieur [R] [S]
né le 01 Mars 1976 à [Localité 9]
de nationalité Française
[Adresse 4]
[Localité 3]
Représentant : Me Katell FERCHAUX-LALLEMENT de la SELARL BDL AVOCATS, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 629
Représentant : Me Frédéric PERRIN, Plaidant, avocat au barreau de PARIS
APPELANTS
****************
Monsieur [H] [U]
né le 20 Mars 1970 à [Localité 11]
de nationalité Française
[Adresse 1]
[Localité 6]
Monsieur [X] [A]
né le 24 Août 1975 à [Localité 8] (ROYAUME UNI)
de nationalité Française
[Adresse 1]
[Localité 6]
Représentant : Me Guillaume NICOLAS de la SCP PIRIOU METZ NICOLAS, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 255
INTIMES
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 13 février 2025, les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Charlotte GIRAULT, Conseillère, chargée du rapport et Monsieur Bertrand MAUMONT, Conseiller.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Florence PERRET, Présidente,
Madame Charlotte GIRAULT, Conseillère
Monsieur Bertrand MAUMONT, Conseiller
Greffière, lors des débats : Mme FOULON
**********
FAITS ET PROCEDURE :
Par acte authentique du 15 décembre 2016, M. [H] [U] et M. [X] [A] (ci-après, " les consorts [C] ") ont fait l'acquisition, auprès de Mme [L] [W] et M. [R] [S] (ci-après, " les consorts [D] "), d'une maison située [Adresse 1] à [Localité 7], moyennant le prix de 535 000 euros.
Soutenant s'être rendus compte, peu après leur entrée en possession, de la très importante humidité de la maison et de l'effondrement partiel de l'enduit du plafond de la cave, les acquéreurs ont fait diligenter, par l'intermédiaire de leur assureur, une expertise amiable, puis sollicité une expertise judiciaire, qui a été ordonnée par le juge des référés de Versailles le 12 avril 2018.
Le 11 mars 2020, M. [F], expert judiciaire, a déposé son rapport.
Par acte d'huissier du 3 août 2020, les consorts [C] ont assigné les consorts [D] devant le tribunal judiciaire de Versailles, estimant que la clause élusive de responsabilité pour vices cachés leur était inopposable.
Par jugement du 9 décembre 2021, le tribunal judiciaire de Versailles a :
- déclaré la clause d'exclusion de la garantie des vices cachés contenue à l'acte de vente du 15 décembre 2016 inopposable aux consorts [C],
- condamné in solidum les consorts [D] à payer aux consorts [C] la somme de 71 369,58 euros à titre de dommages et intérêts,
- condamné in solidum les consorts [D] aux dépens de l'instance au fond et de référé, qui comprendront notamment les frais d'expertise judiciaire, dont distraction au profit de la société Piriou Metz Nicolas, en application de l'article 699 du code de procédure civile,
- condamné in solidum les consorts [D] à verser aux consorts [C] la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- écarté l'exécution provisoire de droit du présent jugement,
- débouté les parties du surplus de leur demandes.
Par acte du 25 janvier 2022, les consorts [D] ont interjeté appel et prient la cour, par dernières écritures du 14 décembre 2022, de :
Sur les condamnations des appelants et le rejet de leurs demandes,
- infirmer le jugement déféré en ce qu'il :
* a déclaré que les vices affectant le plafond de la cave constituaient des vices cachés au sens de l'article 1641 du code civil,
* a déclaré la clause élusive de responsabilité contenue à l'acte de vente du 15 décembre 2016 inopposable aux consorts [C],
* les a condamnés in solidum à payer aux consorts [C] la somme de 71 369,58 euros à titre de dommages et intérêts,
* les a condamnés in solidum aux dépens de l'instance au fond et de référé, lesquels comprennent notamment les frais d'expertise judiciaire, dont distraction au profit de la société Piriou Metz Nicolas, en application de l'article 699 du code de procédure civile,
* les a condamnés in solidum a' verser aux consorts [C] la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Sur le surplus,
- confirmer pour le surplus le jugement déféré,
Et statuant à nouveau,
- les déclarer recevables en toutes leurs demandes,
- débouter les consorts [C] de toutes leurs demandes et les dire mal fondées,
A titre principal,
- prononcer qu'aucun vice caché n'est caractérisé,
- prononcer que leur responsabilité ne peut être engagée sur le fondement des vices cachés,
A titre subsidiaire,
- prononcer que la clause élusive de responsabilité figurant à l'acte authentique de vente est opposable aux consorts [C],
- prononcer que leur responsabilité ne peut être engagée sur le fondement des vices cachés,
A titre très subsidiaire,
- les condamner in solidum à payer aux consorts [C] la somme de 3 277,50 euros à titre de dommages et intérêts,
En tout état de cause,
- condamner in solidum les consorts [C] aux dépens de l'instance au fond et en référé, lesquels comprennent notamment les frais d'expertise judiciaire,
- condamner in solidum les consorts [C] à leur verser une somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Par dernières écritures du 15 novembre 2023, les consorts [C] prient la cour de :
- dire et juger les consorts [D], mal fondés en leur appel et les en débouter,
- confirmer le jugement dont appel en toutes ces dispositions,
En conséquence,
- condamner in solidum les consorts [D] à leur payer la somme de 71 369,58 euros avec révision et indexation sur l'indice BT01 du coût de la construction sur celle de
67 901,58 euros,
- condamner in solidum les consorts [D] à leur payer la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner in solidum les consorts [D], aux entiers dépens de l'instance dont distraction au profit de la société Piriou Metz Nicolas, en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
La cour renvoie aux écritures des parties en application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile pour un exposé complet de leur argumentation.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 16 janvier 2025.
EXPOSE DES MOTIFS
Conformément aux dispositions de l'article 954, alinéa 3, du code de procédure civile, les prétentions sont récapitulées au dispositif des dernières conclusions et la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif. Les demandes tenant à voir " dire et juger " ou " prononcer" ne constituent en l'espèce pas des prétentions au sens de l'article 4 de ce même code, mais des moyens.
Sur la demande au titre de la garantie des vices cachés
Le tribunal a reconnu aux désordres affectant le plafond de la cave le caractère de vices cachés, mais non ceux affectant la dégradation de la toiture qu'il a déclarés apparents. Il a écarté la clause d'exclusion de garantie contenue dans l'acte de vente et condamné les consorts [D] à verser la somme de 71 369,58 euros en réparation de leurs dommages.
Pour voir infirmer le jugement quant au caractère caché des vices, les consorts [D] soutiennent comme en première instance qu'aucun vice caché ne peut être caractérisé en ce que d'une part, l'humidité importante et notoire du bâtiment au jour de la vente caractérisait en elle-même un aléa quant à l'état de la structure même du bâtiment, faisant obstacle à toute qualification de vice caché ; et que d'autre part, la clause élusive de responsabilité attirait précisément l'attention des acquéreurs sur " l'état du sol ou du sous-sol ", seule partie de la maison explicitement mentionnée, de sorte que les acquéreurs ne pouvaient légitimement ignorer au jour de la vente l'existence d'un aléa quant à l'état de la structure même du bâtiment. Ils contestent le fait que les travaux sont récents et font valoir que le tribunal a extrapolé la date des travaux sans tenir compte du témoignage du précédent propriétaire lequel mentionne la présence de plâtre sur le plafond de la cave déjà en 2007.
Les consorts [C] demandent la confirmation du jugement en s'appuyant sur l'expertise. Ils contestent l'argumentation consistant à déduire de la présence d'humidité dans la maison la réalité des dommages affectant le plafond de la cave rappelant qu'aucun lien certain ne peut raisonnablement être fait par un profane, ni même un technicien de la construction, entre l'humidité des murs moellons et les vices du plafond de la cave qui relèvent de l'entretien normal d'un bâtiment très ancien. Ils concluent qu'il est contradictoire pour les appelants de relever un aléa, par nature imprévisible et incertain, induit par l'humidité notoire et certaine de la maison : ils relèvent que si tel était le cas, les vendeurs ne pouvaient " en toute logique l'ignorer puisque les causes et les conséquences en étaient visibles ". Ils soutiennent enfin que le plafond de la cave présentait un état satisfaisant lors de leurs visites avant d'acheter, du fait du plâtre ne faisant apparaître aucun désordre, de sorte que le vice était bien caché. Ils ajoutent que la clause élusive de responsabilité était une simple clause de style et usuelle qui ne donne aucune information particulière sur l'état du plafond de la cave ou sur les conséquences de l'humidité de la maison.
Sur ce,
Selon l'article 1641 du code civil, le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage que l'acheteur ne l'aurait pas acquise, ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, s'il les avait connus.
Aux termes de l'article 1642 du même code, le vendeur n'est pas tenu des vices apparents et dont l'acheteur a pu se convaincre lui-même.
Il résulte de ces textes que la garantie des vices cachés peut être mise en 'uvre si la chose est affectée d'un vice remplissant les trois conditions, cumulatives, suivantes :
- le vice affectait déjà la chose au moment de sa vente ;
- il n'était alors ni connu de l'acheteur ni apparent pour celui-ci ;
- il présente un caractère de gravité de nature à porter atteinte à l'usage attendu de la chose.
En outre, l'article 1643 énonce que le vendeur est tenu des vices cachés, quand même il ne les aurait pas connus, à moins que, dans ce cas, il n'ait stipulé qu'il ne sera obligé à aucune garantie.
Enfin, il résulte de l'article 1645 que dans tous les cas, l'acquéreur peut obtenir réparation de ses préjudices en démontrant que le vendeur connaissait les vices de la chose.
Il résulte de ces textes que le vendeur ne peut se prévaloir d'une clause limitative ou exclusive de garantie, dès lors qu'il est établi qu'il avait connaissance du vice de la chose dont il s'est séparé.
Comme l'a relevé exactement le tribunal reprenant les termes de l'expert, le désordre est constitué de la présence de " vieux fers IPN corrodés à un niveau très avancé, aboutissant à leur feuilletage et à leur délitement et s'encastrant dans les murs d'une façon qui est devenue symbolique ", situation qui présente un danger par rapport à la tenue du plancher bas du rez-de-chaussée, nécessitant une reprise en sous-'uvre, notamment une démolition-reconstruction. En outre, seul le caractère apparent du désordre fait débat en l'espèce.
Le vice apparent est celui qui apparaît après une vérification élémentaire par le profane et qui ne nécessite ni investigation particulière ni assistance d'un homme de l'art.
Le cabinet [Z], expert de l'assureur des consorts [C], intervenant le lendemain de la vente soit le 16 décembre 2016, constate que : " Au rez-de chaussée (') tous les murs sont saturés en humidité jusqu'a' une hauteur d'environ 1,80 mètres " ; ces mêmes murs " présentent des dégradations liées à cette humidité " ; " les murs du sous-sol sont saturés en humidité sur toute leur hauteur " ; sur ces mêmes murs " Les enduits sont boursouflés et présentent des traces de salpêtre ".
Il conclut que " 1. l'humidité est consécutive à des remontées capillaires qui existent depuis la construction de la maison. 2. les fers du plancher sont dégradés par la présence d'humidité et l'absence d'entretien. Les anciens propriétaires ont recouvert les fers avec du plâtre. Ce recouvrement des fers a empêché le diagnostiqueur de constater l'état de la structure et donc de le notifier dans son rapport. "
Quant à l'expert judiciaire, M. [F], il précise qu'" il est certain que les désordres auxquels il faut pallier aujourd'hui ont une origine ancienne et que leur caractère est assez courant dans le bâti ancien n'était pas de nature à attirer l'attention de l'agence immobilière. Par contre, la personne qui a procédé à la réappropriation sommaire de la surface du plancher haut de la cave avait conscience de la situation et n'avait pas, en temps et en heure fait procéder aux réfections nécessaires ". Il évoque " le caractère malhabile et improvisé de la tentative de ragréage, présentant une surface tumultueuse, qui a été appliquée en plafond de la cave, afin de masquer les vieux fers délités par la rouille et de tenter de réduire l'impact visuel de la dégradation du hourdis et du décollement de l'épaisse couche ancienne en " plâtre grossier " conforme aux techniques anciennes de construction en vigueur lors de l'édification de cette maison ". Selon lui " cette non-maîtrise de l'emploi et du gâchage du plâtre, ainsi que l'absence d'emploi d'outils de lissage ne peuvent avoir été effectués que par un amateur afin de tenter d'estomper de façon maladroite la corrosion des fers du plancher haut de cette cave, et les déformations inhérentes au décollement des enduits couvrant le hourdis en moellons ".
Il relève enfin que " l'état structurel du plafond aurait dû être corrigé depuis de nombreuses années, ce dont les propriétaires précédents auraient dû se soucier notamment au regard de leur propre sécurité et de celles des personnes amenées à meubler et habiter ".
Si l'humidité, par ailleurs non contestée et largement décrite par le cabinet [Z], affectait déjà fortement la chose au moment de sa vente, il résulte des constatations et de l'analyse de l'expert sur le type de plâtre utilisé et la technique de pose que les travaux effectués de manière récente et non professionnelle avaient pour objet de cacher un vice pouvant affecter la structure de l'immeuble, ce que d'ailleurs les appelants ne contestent véritablement à aucun moment dans leurs écritures. L'humidité ne saurait en conséquence être " un aléa quant à la structure ", lequel présente un caractère incertain alors qu'au contraire les experts ont conclu à la préexistence du vice et au camouflage de l'état de la structure soutenant le plafond du sous-sol. Au surplus, pour exonérer le vendeur de cet alea, il aurait fallu que celui-ci soit accepté par les acheteurs, ce que ne fait absolument pas ressortir la clause concernant " l'état du sol ou du sous-sol ", qui est une clause-type.
En se bornant à considérer que l'humidité était notoire et apparente, de sorte que les acquéreurs ne pouvaient qu'avoir conscience, même en étant profanes, que cette humidité était susceptible d'avoir des implications non visibles dans leur entièreté au jour de la vente, les consorts [D] déduisent à tort que le désordre visé au titre des vices cachés ne pouvait qu'être connu. En effet, le vice dont il s'agit, s'il est une des conséquences possibles de cette humidité, n'en demeure pas moins l'altération de la structure métallique soutenant le plafond de la cave et le plancher du rez-de -chaussée et non l'humidité elle-même. Ce vice rend l'immeuble impropre à sa destination dès lors que le plafond de la cave est dangereux, pouvant s'effondrer, pour la sécurité des habitants. Or cet état d'altération avait précisément été caché volontairement.
Les consorts [D] font valoir en vain que le propriétaire qui leur a vendu le bien litigieux en 2010, M. [P], atteste que " cette acquisition de 2007 a été réalisée en l'état, un plâtre déjà existant constituait le revêtement du plafond de la cave ". En effet, l'acquisition des consorts [C] a été faite en 2016 et l'expert judiciaire mentionne " la fraîcheur des interventions (p3 du rapport) " et indique " on distingue bien la différence avec l'ancien plâtre grossier, qui n'a pas[la] même composition chimique ". Il s'en déduit que le témoignage de M. [P] ne permet pas de contredire les constatations de l'expert concernant la superposition de deux plâtres l'un ancien grossier, avec inclusion de charbon de bois qui concourt à sa solidité, sur lequel " le plâtre fin n'adhère visiblement pas " (p7 du rapport). Au contraire ce témoignage permet de confirmer que le plâtre qu'il évoque (près de 10 ans avant la vente aux consorts [D]) n'est pas celui qualifié de " frais " utilisé postérieurement, le terme " fraîcheur " utilisé par un expert, de même que l'expression " ragréage sommaire récent au plâtre fin " (p5 du rapport) excluant des travaux de plus de 10 ans, alors même qu'il est également noté un manque d'adhérence de la couche de plâtre fin, de sorte que celui-ci ne peut être ancien.
Les consorts [C] démontrent que le vice n'a pu leur apparaître qu'après le décrochage du plâtre laissant apparaitre l'état de la structure métallique et pour ce qui est de l'ampleur du vice, qu'après les analyses faites par les experts.
Par ailleurs, la clause d'exonération de responsabilité visée à l'acte, est rédigée comme suit :
" L'acquéreur prend LE BIEN dans son état au jour de l'entrée en jouissance, tel qu'il l'a vu et visité, sans recours contre LE VENDEUR pour quelque cause que ce soit et notamment pour mauvais état de la ou des constructions pouvant exister, du sol ou du sous-sol, erreur dans la désignation, le cadastre ou la contenance cadastrale, toute différence, excédât-elle un vingtième devant faire son profit ou sa perte. "
Or, le vendeur ne peut s'en prévaloir, dès lors qu'il est établi qu'il avait connaissance du vice de la chose dont il s'est séparé.
La clause rédigée en termes génériques ne présente pas le caractère de précision nécessaire à attirer l'attention particulière sur l'humidité et ses conséquences spécifiques sur l'altération de la structure de l'immeuble.
Dès lors, c'est par ces motifs ajoutés à ceux du tribunal et que la cour adopte que le tribunal a retenu la réalité du vice caché et écarté l'application de la clause élusive de responsabilité.
Le jugement est confirmé de ce chef.
Sur la demande de réparation
Le tribunal a retenu des frais de réparation évalués par l'expert judiciaire, dont il a déduit la somme relative aux réparations de couverture à hauteur de 3 272,50 TTC.
Les consorts [D] s'opposent à ce montant, considérant que les consorts [C] justifient n'avoir engagé que des travaux pour un montant effectivement payé de 3 277,50 euros (en réalité 3 272,50 euros).
Les consorts [C] soutiennent que la réalité du préjudice et son évaluation peuvent être prouvées par tout moyen et en l'espèce rappellent qu'ils ont produit des devis à l'expert qui les a validés dans leur principe et leur montant. Ils sollicitent au regard de la volatilité des marchés et de la durée de la procédure une révision et une indexation en fonction de l'indice BT01 du coût de la construction à compter du jour des devis et jusqu'au parfait paiement.
Sur ce,
L'article 1644 précise que dans les cas des articles 1641 et 1643, l'acheteur a le choix de rendre la chose et de se faire restituer le prix, ou de garder la chose et de se faire rendre une partie du prix.
L'action estimatoire permettant de replacer l'acheteur dans la situation où il se serait trouvé si la chose vendue n'avait pas été atteinte de vices, l'acquéreur d'un immeuble est fondé à demander la restitution du prix correspondant au coût des travaux nécessaires pour remédier aux vices (Cass. civ. 3ème, 1er févr. 2006, n° 05-10.845).
Les travaux ont été estimés dans le cadre de l'expertise judiciaire contradictoire. La victime n'ayant pas à minimiser son dommage en vue de la réparation que le droit lui permet d'obtenir, c'est exactement que le tribunal a retenu le montant des devis repris dans le rapport, déduction faite d'une facture de 3 272,50 euros correspondant aux réparations de couverture.
La cour n'étant pas appelée à actualiser un préjudice dans le cadre d'une action estimatoire, il y a lieu de considérer que la somme allouée par le tribunal à titre de réduction du prix, à une époque plus proche de la vente, est pleinement satisfactoire, sans qu'il y ait lieu à indexer la somme au regard de l'indice BT01 du coût de la construction à compter du jour des devis et jusqu'au parfait paiement. Cette demande est donc rejetée.
Sur les autres demandes
En application de l'article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie.
Aux termes de l'article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Dans tous les cas, le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation.
Les dispositions du jugement relatives aux frais irrépétibles et aux dépens sont confirmées.
Les consorts [D] succombant sont condamnés in solidum aux dépens qui seront recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile, ainsi qu'à verser aux consorts [C] ensemble, à la somme de 4 000 euros au titre de leurs frais irrépétibles engagés,
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement par décision contradictoire mise à disposition,
Confirme le jugement dans ses dispositions soumises à la cour,
Y ajoutant,
Rejette la demande d'application d'une révision et une indexation en fonction de l'indice BT01 du coût de la construction à compter du jour des devis sur la somme de 67 901,58 euros,
Condamne in solidum Mme [L] [W] et M. [R] [S] à verser à M. [H] [U] et M. [X] [A] ensemble la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne in solidum Mme [L] [W] et M. [R] [S] aux dépens, dont distraction au profit de la SCP Piriou Metz Nicolas, conformément à l'article 699 du code de procédure civile
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Florence PERRET, Présidente et par Madame FOULON, Greffière , auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La Greffière, La Présidente,
DE
VERSAILLES
Code nac : 50D
Chambre civile 1-3
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 22 MAI 2025
N° RG 22/00489
N° Portalis DBV3-V-B7G-U65C
AFFAIRE :
[L] [W]
...
C/
[H] [U]
...
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 09 Décembre 2021 par le TJ de Versailles
N° Chambre : 2
N° RG : 20/04183
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le :
à :
Me Katell FERCHAUX-
LALLEMENT de la SELARL BDL AVOCATS
Me Guillaume NICOLAS de la SCP PIRIOU METZ NICOLAS
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE VINGT DEUX MAI DEUX MILLE VINGT CINQ,
La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
Madame [L] [W]
née le 05 Octobre 1976 à [Localité 10]
de nationalité Française
[Adresse 5]
[Localité 2]
Monsieur [R] [S]
né le 01 Mars 1976 à [Localité 9]
de nationalité Française
[Adresse 4]
[Localité 3]
Représentant : Me Katell FERCHAUX-LALLEMENT de la SELARL BDL AVOCATS, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 629
Représentant : Me Frédéric PERRIN, Plaidant, avocat au barreau de PARIS
APPELANTS
****************
Monsieur [H] [U]
né le 20 Mars 1970 à [Localité 11]
de nationalité Française
[Adresse 1]
[Localité 6]
Monsieur [X] [A]
né le 24 Août 1975 à [Localité 8] (ROYAUME UNI)
de nationalité Française
[Adresse 1]
[Localité 6]
Représentant : Me Guillaume NICOLAS de la SCP PIRIOU METZ NICOLAS, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 255
INTIMES
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 13 février 2025, les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Charlotte GIRAULT, Conseillère, chargée du rapport et Monsieur Bertrand MAUMONT, Conseiller.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Florence PERRET, Présidente,
Madame Charlotte GIRAULT, Conseillère
Monsieur Bertrand MAUMONT, Conseiller
Greffière, lors des débats : Mme FOULON
**********
FAITS ET PROCEDURE :
Par acte authentique du 15 décembre 2016, M. [H] [U] et M. [X] [A] (ci-après, " les consorts [C] ") ont fait l'acquisition, auprès de Mme [L] [W] et M. [R] [S] (ci-après, " les consorts [D] "), d'une maison située [Adresse 1] à [Localité 7], moyennant le prix de 535 000 euros.
Soutenant s'être rendus compte, peu après leur entrée en possession, de la très importante humidité de la maison et de l'effondrement partiel de l'enduit du plafond de la cave, les acquéreurs ont fait diligenter, par l'intermédiaire de leur assureur, une expertise amiable, puis sollicité une expertise judiciaire, qui a été ordonnée par le juge des référés de Versailles le 12 avril 2018.
Le 11 mars 2020, M. [F], expert judiciaire, a déposé son rapport.
Par acte d'huissier du 3 août 2020, les consorts [C] ont assigné les consorts [D] devant le tribunal judiciaire de Versailles, estimant que la clause élusive de responsabilité pour vices cachés leur était inopposable.
Par jugement du 9 décembre 2021, le tribunal judiciaire de Versailles a :
- déclaré la clause d'exclusion de la garantie des vices cachés contenue à l'acte de vente du 15 décembre 2016 inopposable aux consorts [C],
- condamné in solidum les consorts [D] à payer aux consorts [C] la somme de 71 369,58 euros à titre de dommages et intérêts,
- condamné in solidum les consorts [D] aux dépens de l'instance au fond et de référé, qui comprendront notamment les frais d'expertise judiciaire, dont distraction au profit de la société Piriou Metz Nicolas, en application de l'article 699 du code de procédure civile,
- condamné in solidum les consorts [D] à verser aux consorts [C] la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- écarté l'exécution provisoire de droit du présent jugement,
- débouté les parties du surplus de leur demandes.
Par acte du 25 janvier 2022, les consorts [D] ont interjeté appel et prient la cour, par dernières écritures du 14 décembre 2022, de :
Sur les condamnations des appelants et le rejet de leurs demandes,
- infirmer le jugement déféré en ce qu'il :
* a déclaré que les vices affectant le plafond de la cave constituaient des vices cachés au sens de l'article 1641 du code civil,
* a déclaré la clause élusive de responsabilité contenue à l'acte de vente du 15 décembre 2016 inopposable aux consorts [C],
* les a condamnés in solidum à payer aux consorts [C] la somme de 71 369,58 euros à titre de dommages et intérêts,
* les a condamnés in solidum aux dépens de l'instance au fond et de référé, lesquels comprennent notamment les frais d'expertise judiciaire, dont distraction au profit de la société Piriou Metz Nicolas, en application de l'article 699 du code de procédure civile,
* les a condamnés in solidum a' verser aux consorts [C] la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Sur le surplus,
- confirmer pour le surplus le jugement déféré,
Et statuant à nouveau,
- les déclarer recevables en toutes leurs demandes,
- débouter les consorts [C] de toutes leurs demandes et les dire mal fondées,
A titre principal,
- prononcer qu'aucun vice caché n'est caractérisé,
- prononcer que leur responsabilité ne peut être engagée sur le fondement des vices cachés,
A titre subsidiaire,
- prononcer que la clause élusive de responsabilité figurant à l'acte authentique de vente est opposable aux consorts [C],
- prononcer que leur responsabilité ne peut être engagée sur le fondement des vices cachés,
A titre très subsidiaire,
- les condamner in solidum à payer aux consorts [C] la somme de 3 277,50 euros à titre de dommages et intérêts,
En tout état de cause,
- condamner in solidum les consorts [C] aux dépens de l'instance au fond et en référé, lesquels comprennent notamment les frais d'expertise judiciaire,
- condamner in solidum les consorts [C] à leur verser une somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Par dernières écritures du 15 novembre 2023, les consorts [C] prient la cour de :
- dire et juger les consorts [D], mal fondés en leur appel et les en débouter,
- confirmer le jugement dont appel en toutes ces dispositions,
En conséquence,
- condamner in solidum les consorts [D] à leur payer la somme de 71 369,58 euros avec révision et indexation sur l'indice BT01 du coût de la construction sur celle de
67 901,58 euros,
- condamner in solidum les consorts [D] à leur payer la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner in solidum les consorts [D], aux entiers dépens de l'instance dont distraction au profit de la société Piriou Metz Nicolas, en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
La cour renvoie aux écritures des parties en application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile pour un exposé complet de leur argumentation.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 16 janvier 2025.
EXPOSE DES MOTIFS
Conformément aux dispositions de l'article 954, alinéa 3, du code de procédure civile, les prétentions sont récapitulées au dispositif des dernières conclusions et la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif. Les demandes tenant à voir " dire et juger " ou " prononcer" ne constituent en l'espèce pas des prétentions au sens de l'article 4 de ce même code, mais des moyens.
Sur la demande au titre de la garantie des vices cachés
Le tribunal a reconnu aux désordres affectant le plafond de la cave le caractère de vices cachés, mais non ceux affectant la dégradation de la toiture qu'il a déclarés apparents. Il a écarté la clause d'exclusion de garantie contenue dans l'acte de vente et condamné les consorts [D] à verser la somme de 71 369,58 euros en réparation de leurs dommages.
Pour voir infirmer le jugement quant au caractère caché des vices, les consorts [D] soutiennent comme en première instance qu'aucun vice caché ne peut être caractérisé en ce que d'une part, l'humidité importante et notoire du bâtiment au jour de la vente caractérisait en elle-même un aléa quant à l'état de la structure même du bâtiment, faisant obstacle à toute qualification de vice caché ; et que d'autre part, la clause élusive de responsabilité attirait précisément l'attention des acquéreurs sur " l'état du sol ou du sous-sol ", seule partie de la maison explicitement mentionnée, de sorte que les acquéreurs ne pouvaient légitimement ignorer au jour de la vente l'existence d'un aléa quant à l'état de la structure même du bâtiment. Ils contestent le fait que les travaux sont récents et font valoir que le tribunal a extrapolé la date des travaux sans tenir compte du témoignage du précédent propriétaire lequel mentionne la présence de plâtre sur le plafond de la cave déjà en 2007.
Les consorts [C] demandent la confirmation du jugement en s'appuyant sur l'expertise. Ils contestent l'argumentation consistant à déduire de la présence d'humidité dans la maison la réalité des dommages affectant le plafond de la cave rappelant qu'aucun lien certain ne peut raisonnablement être fait par un profane, ni même un technicien de la construction, entre l'humidité des murs moellons et les vices du plafond de la cave qui relèvent de l'entretien normal d'un bâtiment très ancien. Ils concluent qu'il est contradictoire pour les appelants de relever un aléa, par nature imprévisible et incertain, induit par l'humidité notoire et certaine de la maison : ils relèvent que si tel était le cas, les vendeurs ne pouvaient " en toute logique l'ignorer puisque les causes et les conséquences en étaient visibles ". Ils soutiennent enfin que le plafond de la cave présentait un état satisfaisant lors de leurs visites avant d'acheter, du fait du plâtre ne faisant apparaître aucun désordre, de sorte que le vice était bien caché. Ils ajoutent que la clause élusive de responsabilité était une simple clause de style et usuelle qui ne donne aucune information particulière sur l'état du plafond de la cave ou sur les conséquences de l'humidité de la maison.
Sur ce,
Selon l'article 1641 du code civil, le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage que l'acheteur ne l'aurait pas acquise, ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, s'il les avait connus.
Aux termes de l'article 1642 du même code, le vendeur n'est pas tenu des vices apparents et dont l'acheteur a pu se convaincre lui-même.
Il résulte de ces textes que la garantie des vices cachés peut être mise en 'uvre si la chose est affectée d'un vice remplissant les trois conditions, cumulatives, suivantes :
- le vice affectait déjà la chose au moment de sa vente ;
- il n'était alors ni connu de l'acheteur ni apparent pour celui-ci ;
- il présente un caractère de gravité de nature à porter atteinte à l'usage attendu de la chose.
En outre, l'article 1643 énonce que le vendeur est tenu des vices cachés, quand même il ne les aurait pas connus, à moins que, dans ce cas, il n'ait stipulé qu'il ne sera obligé à aucune garantie.
Enfin, il résulte de l'article 1645 que dans tous les cas, l'acquéreur peut obtenir réparation de ses préjudices en démontrant que le vendeur connaissait les vices de la chose.
Il résulte de ces textes que le vendeur ne peut se prévaloir d'une clause limitative ou exclusive de garantie, dès lors qu'il est établi qu'il avait connaissance du vice de la chose dont il s'est séparé.
Comme l'a relevé exactement le tribunal reprenant les termes de l'expert, le désordre est constitué de la présence de " vieux fers IPN corrodés à un niveau très avancé, aboutissant à leur feuilletage et à leur délitement et s'encastrant dans les murs d'une façon qui est devenue symbolique ", situation qui présente un danger par rapport à la tenue du plancher bas du rez-de-chaussée, nécessitant une reprise en sous-'uvre, notamment une démolition-reconstruction. En outre, seul le caractère apparent du désordre fait débat en l'espèce.
Le vice apparent est celui qui apparaît après une vérification élémentaire par le profane et qui ne nécessite ni investigation particulière ni assistance d'un homme de l'art.
Le cabinet [Z], expert de l'assureur des consorts [C], intervenant le lendemain de la vente soit le 16 décembre 2016, constate que : " Au rez-de chaussée (') tous les murs sont saturés en humidité jusqu'a' une hauteur d'environ 1,80 mètres " ; ces mêmes murs " présentent des dégradations liées à cette humidité " ; " les murs du sous-sol sont saturés en humidité sur toute leur hauteur " ; sur ces mêmes murs " Les enduits sont boursouflés et présentent des traces de salpêtre ".
Il conclut que " 1. l'humidité est consécutive à des remontées capillaires qui existent depuis la construction de la maison. 2. les fers du plancher sont dégradés par la présence d'humidité et l'absence d'entretien. Les anciens propriétaires ont recouvert les fers avec du plâtre. Ce recouvrement des fers a empêché le diagnostiqueur de constater l'état de la structure et donc de le notifier dans son rapport. "
Quant à l'expert judiciaire, M. [F], il précise qu'" il est certain que les désordres auxquels il faut pallier aujourd'hui ont une origine ancienne et que leur caractère est assez courant dans le bâti ancien n'était pas de nature à attirer l'attention de l'agence immobilière. Par contre, la personne qui a procédé à la réappropriation sommaire de la surface du plancher haut de la cave avait conscience de la situation et n'avait pas, en temps et en heure fait procéder aux réfections nécessaires ". Il évoque " le caractère malhabile et improvisé de la tentative de ragréage, présentant une surface tumultueuse, qui a été appliquée en plafond de la cave, afin de masquer les vieux fers délités par la rouille et de tenter de réduire l'impact visuel de la dégradation du hourdis et du décollement de l'épaisse couche ancienne en " plâtre grossier " conforme aux techniques anciennes de construction en vigueur lors de l'édification de cette maison ". Selon lui " cette non-maîtrise de l'emploi et du gâchage du plâtre, ainsi que l'absence d'emploi d'outils de lissage ne peuvent avoir été effectués que par un amateur afin de tenter d'estomper de façon maladroite la corrosion des fers du plancher haut de cette cave, et les déformations inhérentes au décollement des enduits couvrant le hourdis en moellons ".
Il relève enfin que " l'état structurel du plafond aurait dû être corrigé depuis de nombreuses années, ce dont les propriétaires précédents auraient dû se soucier notamment au regard de leur propre sécurité et de celles des personnes amenées à meubler et habiter ".
Si l'humidité, par ailleurs non contestée et largement décrite par le cabinet [Z], affectait déjà fortement la chose au moment de sa vente, il résulte des constatations et de l'analyse de l'expert sur le type de plâtre utilisé et la technique de pose que les travaux effectués de manière récente et non professionnelle avaient pour objet de cacher un vice pouvant affecter la structure de l'immeuble, ce que d'ailleurs les appelants ne contestent véritablement à aucun moment dans leurs écritures. L'humidité ne saurait en conséquence être " un aléa quant à la structure ", lequel présente un caractère incertain alors qu'au contraire les experts ont conclu à la préexistence du vice et au camouflage de l'état de la structure soutenant le plafond du sous-sol. Au surplus, pour exonérer le vendeur de cet alea, il aurait fallu que celui-ci soit accepté par les acheteurs, ce que ne fait absolument pas ressortir la clause concernant " l'état du sol ou du sous-sol ", qui est une clause-type.
En se bornant à considérer que l'humidité était notoire et apparente, de sorte que les acquéreurs ne pouvaient qu'avoir conscience, même en étant profanes, que cette humidité était susceptible d'avoir des implications non visibles dans leur entièreté au jour de la vente, les consorts [D] déduisent à tort que le désordre visé au titre des vices cachés ne pouvait qu'être connu. En effet, le vice dont il s'agit, s'il est une des conséquences possibles de cette humidité, n'en demeure pas moins l'altération de la structure métallique soutenant le plafond de la cave et le plancher du rez-de -chaussée et non l'humidité elle-même. Ce vice rend l'immeuble impropre à sa destination dès lors que le plafond de la cave est dangereux, pouvant s'effondrer, pour la sécurité des habitants. Or cet état d'altération avait précisément été caché volontairement.
Les consorts [D] font valoir en vain que le propriétaire qui leur a vendu le bien litigieux en 2010, M. [P], atteste que " cette acquisition de 2007 a été réalisée en l'état, un plâtre déjà existant constituait le revêtement du plafond de la cave ". En effet, l'acquisition des consorts [C] a été faite en 2016 et l'expert judiciaire mentionne " la fraîcheur des interventions (p3 du rapport) " et indique " on distingue bien la différence avec l'ancien plâtre grossier, qui n'a pas[la] même composition chimique ". Il s'en déduit que le témoignage de M. [P] ne permet pas de contredire les constatations de l'expert concernant la superposition de deux plâtres l'un ancien grossier, avec inclusion de charbon de bois qui concourt à sa solidité, sur lequel " le plâtre fin n'adhère visiblement pas " (p7 du rapport). Au contraire ce témoignage permet de confirmer que le plâtre qu'il évoque (près de 10 ans avant la vente aux consorts [D]) n'est pas celui qualifié de " frais " utilisé postérieurement, le terme " fraîcheur " utilisé par un expert, de même que l'expression " ragréage sommaire récent au plâtre fin " (p5 du rapport) excluant des travaux de plus de 10 ans, alors même qu'il est également noté un manque d'adhérence de la couche de plâtre fin, de sorte que celui-ci ne peut être ancien.
Les consorts [C] démontrent que le vice n'a pu leur apparaître qu'après le décrochage du plâtre laissant apparaitre l'état de la structure métallique et pour ce qui est de l'ampleur du vice, qu'après les analyses faites par les experts.
Par ailleurs, la clause d'exonération de responsabilité visée à l'acte, est rédigée comme suit :
" L'acquéreur prend LE BIEN dans son état au jour de l'entrée en jouissance, tel qu'il l'a vu et visité, sans recours contre LE VENDEUR pour quelque cause que ce soit et notamment pour mauvais état de la ou des constructions pouvant exister, du sol ou du sous-sol, erreur dans la désignation, le cadastre ou la contenance cadastrale, toute différence, excédât-elle un vingtième devant faire son profit ou sa perte. "
Or, le vendeur ne peut s'en prévaloir, dès lors qu'il est établi qu'il avait connaissance du vice de la chose dont il s'est séparé.
La clause rédigée en termes génériques ne présente pas le caractère de précision nécessaire à attirer l'attention particulière sur l'humidité et ses conséquences spécifiques sur l'altération de la structure de l'immeuble.
Dès lors, c'est par ces motifs ajoutés à ceux du tribunal et que la cour adopte que le tribunal a retenu la réalité du vice caché et écarté l'application de la clause élusive de responsabilité.
Le jugement est confirmé de ce chef.
Sur la demande de réparation
Le tribunal a retenu des frais de réparation évalués par l'expert judiciaire, dont il a déduit la somme relative aux réparations de couverture à hauteur de 3 272,50 TTC.
Les consorts [D] s'opposent à ce montant, considérant que les consorts [C] justifient n'avoir engagé que des travaux pour un montant effectivement payé de 3 277,50 euros (en réalité 3 272,50 euros).
Les consorts [C] soutiennent que la réalité du préjudice et son évaluation peuvent être prouvées par tout moyen et en l'espèce rappellent qu'ils ont produit des devis à l'expert qui les a validés dans leur principe et leur montant. Ils sollicitent au regard de la volatilité des marchés et de la durée de la procédure une révision et une indexation en fonction de l'indice BT01 du coût de la construction à compter du jour des devis et jusqu'au parfait paiement.
Sur ce,
L'article 1644 précise que dans les cas des articles 1641 et 1643, l'acheteur a le choix de rendre la chose et de se faire restituer le prix, ou de garder la chose et de se faire rendre une partie du prix.
L'action estimatoire permettant de replacer l'acheteur dans la situation où il se serait trouvé si la chose vendue n'avait pas été atteinte de vices, l'acquéreur d'un immeuble est fondé à demander la restitution du prix correspondant au coût des travaux nécessaires pour remédier aux vices (Cass. civ. 3ème, 1er févr. 2006, n° 05-10.845).
Les travaux ont été estimés dans le cadre de l'expertise judiciaire contradictoire. La victime n'ayant pas à minimiser son dommage en vue de la réparation que le droit lui permet d'obtenir, c'est exactement que le tribunal a retenu le montant des devis repris dans le rapport, déduction faite d'une facture de 3 272,50 euros correspondant aux réparations de couverture.
La cour n'étant pas appelée à actualiser un préjudice dans le cadre d'une action estimatoire, il y a lieu de considérer que la somme allouée par le tribunal à titre de réduction du prix, à une époque plus proche de la vente, est pleinement satisfactoire, sans qu'il y ait lieu à indexer la somme au regard de l'indice BT01 du coût de la construction à compter du jour des devis et jusqu'au parfait paiement. Cette demande est donc rejetée.
Sur les autres demandes
En application de l'article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie.
Aux termes de l'article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Dans tous les cas, le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation.
Les dispositions du jugement relatives aux frais irrépétibles et aux dépens sont confirmées.
Les consorts [D] succombant sont condamnés in solidum aux dépens qui seront recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile, ainsi qu'à verser aux consorts [C] ensemble, à la somme de 4 000 euros au titre de leurs frais irrépétibles engagés,
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement par décision contradictoire mise à disposition,
Confirme le jugement dans ses dispositions soumises à la cour,
Y ajoutant,
Rejette la demande d'application d'une révision et une indexation en fonction de l'indice BT01 du coût de la construction à compter du jour des devis sur la somme de 67 901,58 euros,
Condamne in solidum Mme [L] [W] et M. [R] [S] à verser à M. [H] [U] et M. [X] [A] ensemble la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne in solidum Mme [L] [W] et M. [R] [S] aux dépens, dont distraction au profit de la SCP Piriou Metz Nicolas, conformément à l'article 699 du code de procédure civile
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Florence PERRET, Présidente et par Madame FOULON, Greffière , auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La Greffière, La Présidente,