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Décisions

CA Versailles, ch. civ. 1-5, 22 mai 2025, n° 24/06456

VERSAILLES

Arrêt

Infirmation

PARTIES

Défendeur :

Century 21 Osmose (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme de Rocquigny du Fayel

Conseillers :

Mme Igelman, M. Henrion

Avocats :

Me Vesvres, Me Le Floch, Me Magnac

TJ Pontoise, du 11 sept. 2024, n° 24/006…

11 septembre 2024

EXPOSE DU LITIGE

Par acte authentique du 16 décembre 2011, M. [E] [Y] et Mme [I] [W] ont acquis un bien immobilier situé [Adresse 2] à [Localité 9].

Par acte authentique du 26 septembre 2019, M. [Y] et Mme [W] ont vendu le bien immobilier à M. [B] [O] et Mme [A] [G].

Par acte authentique du 17 juin 2022, M. [K] [S] et Mme [V] [L] [U] ont acquis ledit bien auprès de M. [O] et de Mme [G].

La SAS Century 21 Osmose a officié, en qualité de mandataire, lors des deux ventes successives de 2019 et 2022.

Le bien ainsi successivement vendu est constitué d'une maison d'habitation de type hybride, à savoir meulière et briques, édifiée sur vide sanitaire, avec un terrain attenant. Il a été en dernier lieu acquis par M. [S] et Mme [L] [U] moyennant le prix de 378 000 euros.

Par acte de commissaire de justice délivré le 30 mai 2024, M. [S] et Mme [L] [U] ont fait assigner en référé M. [O] et Mme [G], ainsi que la société Century 21 Osmose aux fins d'obtenir principalement :

- une mesure d'expertise judiciaire à confier à un ingénieur bâtiment et/ou ingénieur structure, afin d'analyser les désordres dont ils font état, notamment la fissuration de la façade,

- la fixation d'une provision à consigner au greffe, à titre d'avance sur les honoraires de l'expert, dans le délai qui sera imparti par la décision à intervenir et la mettre à la charge partagée des parties, soit 50% à la charge de M. [S] et Mme [L] [U] et 50% à la charge de M. [O] et Mme [G],

- à titre provisionnel, la condamnation de M. [O] et Mme [G] au paiement de la somme globale de 5 000 euros en faveur de M. [S] et Mme [L] [U] à valoir sur leur préjudice matériel de perte de jouissance (2 500 euros) et leur préjudice moral (2 500 euros),

- la condamnation de M. [O] et Mme [G] aux entiers dépens, dont distraction au profit de Me Magnac, avocat, en application de l'article 699 du code de procédure civile.

Par acte de commissaire de justice délivré le 28 juin 2024, M. [O] et Mme [G] ont fait assigner en référé M. [Y] et Mme [W], aux fins d'obtenir principalement la jonction de la procédure avec celle introduite par M. [S] et Mme [L] [U] et de voir les opérations d'expertise judiciaire à intervenir déclarées opposables et contradictoires envers M. [Y] et Mme [W], précédents propriétaires de l'immeuble concerné.

Par ordonnance réputée contradictoire rendue le 11 septembre 2024, le juge des référés du tribunal judiciaire de Pontoise a :

- reçu l'intervention forcée de M. [Y] et Mme [W] par M. [O] et Mme [G],

- prononcé la jonction des affaires enregistrées sous les numéros RG24/614 et RG24/698 sous le numéro unique RG24/614,

- ordonné une mesure d'expertise et désigné en qualité d'expert :

Monsieur [D] [X]

[Adresse 7]

[Localité 14]

[XXXXXXXX01]

lequel pourra prendre l'initiative de recueillir l'avis d'un autre technicien, mais seulement dans une spécialité distincte de la sienne,

avec pour mission de :

- convoquer les parties, au besoin par télécopie ou par courrier électronique avec demande d'avis de réception, en adressant copie par lettre simple aux avocats des parties,

- se faire communiquer tous documents et pièces qu'il estimera utiles à l'accomplissement de sa mission,

- prendre connaissance de tous documents contractuels et techniques, tels que plans, devis, marchés et autres,

- se rendre sur les lieux en présence des parties ou celles-ci dûment appelées,

- relever et décrire les désordres expressément mentionnés dans l'assignation et affectant l'immeuble litigieux et, le cas échéant, sans nécessité d'extension de mission, tous désordres connexes, ayant d'évidence la même cause mais révélés postérieurement à l'assignation, sans préjudice par ailleurs des dispositions de l'article 238 alinéa 2 du code de procédure civile,

- en détailler l'origine, les causes et l'étendue, et fournir tous éléments permettant à la juridiction de déterminer à quels intervenants ces désordres sont imputables, et dans quelles proportions,

- indiquer, au vu des éléments recueillis, si les désordres constatés étaient apparents lors de l'acquisition, ou s'ils sont apparus postérieurement ; dans le premier cas, indiquer s'ils pouvaient être décelés par un acquéreur profane ou si celui-ci pouvait en apprécier la portée,

- indiquer les conséquences de ces désordres quant à la solidité, l'habitabilité, l'esthétique du bâtiment, et, plus généralement quant à l'usage qui peut en être attendu ou quant à la conformité à sa destination,

- décrire, à partir des éléments recueillis, la nature des travaux de rénovation relatifs à l'installation électrique, à l'isolation par cloisonnement et au plancher de la chambre du R+1, intervenus antérieurement à la vente du bien immobilier par M. [O] et Mme [G] à M. [S] et Mme [L] [U],

- donner son avis sur les solutions appropriées pour y remédier, telles que proposées par les parties ; évaluer le coût des travaux utiles à l'aide de devis d'entreprises fournis par les parties,

- donner son avis sur les préjudices et coûts induits par ces désordres et sur leur évaluation, dès lors que ces demandes sont présentées de manière motivée,

- rapporter toutes autres constatations utiles à l'examen des prétentions des parties,

- en cas d'urgence ou de péril en la demeure reconnus par l'expert, autorisé le demandeur à faire exécuter, à ses frais avancés et pour le compte de qui il appartiendra, sous la direction du maître d''uvre et par des entreprises qualifiées de son choix, les travaux estimés indispensables par l'expert qui, dans ce cas, déposera un pré-rapport précisant la nature, l'importance et le coût de ces travaux,

le cas échéant, (en cas de nécessité d'établir un compte entre les parties) :

- donner son avis sur les mémoires et situations de l'entreprise ou sur le décompte général définitif vérifiés par le maître d''uvre ou le maître d'ouvrage, ainsi que sur les postes de créances contestés et notamment par exemple sur les pénalités de retard et créances relatives au compte prorata,

- proposer un apurement des comptes entre les parties en distinguant le cas échéant les moins-values résultant de travaux entrant sur le devis non exécutés, le montant des travaux effectués mais non inclus dans le devis en précisant sur ce point s'ils étaient techniquement nécessaires au regard de l'objet du contrat, et plus généralement en distinguant les coûts de reprise nécessaires en fonction du chacune des entreprises intervenues sur le chantier,

- faire toutes observations utils au règlement du litige,

- fait injonction aux parties de communiquer aux autres parties les documents de toute nature qu'elles adresseront à l'expert pour établir le bien fondé de leurs prétentions,

- dit que l'expert sera saisi et effectuera sa mission conformément aux dispositions des articles 263 et suivants du code de procédure civile,

- dit que l'expert devra, autant que possible, dématérialiser les opérations d'expertise en utilisant Opalexe, et qu'il déposera son rapport dans le délai de 9 mois à compter de l'avis de consignation, sauf prorogation de ce délai dûment sollicité en temps utile auprès du juge du contrôle (en fonction d'un nouveau calendrier prévisionnel préalablement présenté aux parties),

- dit que l'expert devra, dès réception de l'avis de versement de la provision à valoir sur sa rémunération, convoquer les parties à une première réunion qui devra se tenir avant l'expiration d'un délai de deux mois, au cours de laquelle il procédera à une lecture contradictoire de sa mission, présentera la méthodologie envisagée, interrogera les parties sur d'éventuelles mises en cause, établira contradictoirement un calendrier de ses opérations et évaluera le coût prévisible de la mission, et qu'à l'issue de cette première réunion il adressera un compte-rendu aux parties et au juge chargé du contrôle,

- dit que, sauf accord contraire des parties, l'expert devra adresser à celles-ci une note de synthèse dans laquelle il rappellera l'ensemble de ses constatations matérielles, présentera ses analyses et proposera une réponse à chacune des questions posées par la juridiction,

- dit que l'expert devra fixer aux parties un délai pour formuler leurs dernières observations ou réclamations en application de l'article 276 du code de procédure civile et rappelé qu'il ne sera pas tenu de prendre en compte les transmissions tardives,

- désigné le magistrat chargé du contrôle des expertises pour suivre la mesure d'instruction et statuer sur tous incidents,

- dit que l'expert devra rendre compte à ce magistrat de l'avancement de ses travaux d'expertise et des diligences accomplies et qu'il devra l'informer de la carence éventuelle des parties dans la communication des pièces nécessaires à l'exécution de sa mission conformément aux dispositions des articles 273 et 275 du code de procédure civile,

- fixé à la somme de 3 600 euros la provision à valoir sur la rémunération de l'expert, qui devra être consignée par M. [S] et Mme [L] [U] entre les mains du régisseur d'avances et de recettes de ce tribunal, dans le délai maximum de 2 mois à compter de la présente ordonnance, sans autre avis,

- dit que, faute de consignation dans ce délai impératif, la désignation de l'expert sera caduque et privée de tout effet,

- dit que dans les 2 mois à compter de sa désignation l'expert indiquera le montant de sa rémunération définitive prévisible afin que soit éventuellement ordonnée une provision complémentaire dans les conditions de l'article 280 du code de procédure civile,

- dit qu'en déposant son rapport, l'expert adressera aux parties à leurs conseils une copie de sa demande de rémunération,

- déclaré l'ordonnance opposable à M. [Y] et Mme [W],

- condamné M. [O] et Mme [G] à payer la somme provisionnelle de 5 000 euros à M. [S] et Mme [L] [U] à valoir sur la réparation de leur préjudice,

- dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- laissé les dépens à la charge de M. [S] et Mme [L] [U],

- rappelé que la décision est exécutoire à titre provisoire.

Par déclaration reçue au greffe le 8 octobre 2024, M. [O] et Mme [G] ont interjeté appel de cette ordonnance en ce qu'elle les a condamnés à payer la somme provisionnelle de 5 000 euros à M. [S] et Mme [L] [U] à valoir sur la réparation de leur préjudice.

Dans leurs dernières conclusions déposées le 18 février 2025 auxquelles il convient de se reporter pour un exposé détaillé de leurs prétentions et moyens, M. [O] et Mme [G] demandent à la cour, au visa des articles 5, 269, 446-1 et 835 alinéa 2 du code de procédure civile, de :

'- infirmer l'ordonnance de référé rendue le 11 septembre 2024 en ce qu'elle a condamné M. [O] et Mme [G] à payer la somme provisionnelle de 5 000 euros à M. [S] et Mme [L] [U] à valoir sur la réparation de leur préjudice,

statuant à nouveau :

- débouter M. [S] et Mme [L] [U] de leur demande de provision à valoir sur la réparation des préjudices allégués,

- déclarer irrecevable la demande formée par M. [S] et Mme [L] [U] tendant à condamner les consorts [O] à leur payer la somme de 1 800 euros sur la somme de 3 600 euros réglée par eux à la régie du tribunal de Pontoise,

- débouter M. [S] et Mme [L] [U] de l'intégralité de leurs demandes,

- débouter M. [Y] et Mme [W] de l'intégralité de leurs demandes,

- condamner solidairement M. [S] et Mme [L] [U] à verser à M. [O] et Mme [G] in solidum la somme de 1 800 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- laisser à la charge de chaque partie les dépens qu'elle aura exposés.'

Dans leurs dernières conclusions déposées le 10 mars 2025 auxquelles il convient de se reporter pour un exposé détaillé de leurs prétentions et moyens, M. [S] et Mme [L] [U] demandent à la cour, au visa des articles 5, 145, 446-1, 457, 488, 835 et 906-2 du code de procédure civile, 1383-2, 1641 et 1643 du code civil, de :

'au fond :

- avant dire doit, solliciter la communication du registre d'audience (plumitif) auprès du greffe du tribunal de Pontoise pour rendre compte de la teneur des débats à l'audience du 30 juillet 2024,

à titre principal :

- confirmer l'ordonnance entreprise en qu'elle a ordonné la mesure d'expertise technique concernant le désordre structurel constaté,

- confirmer la condamnation des consorts [O] à la somme provisionnelle de 5 000 euros en faveur des consorts [S],

- débouter les consorts [O], appelants, de l'ensemble de leurs demandes,

à titre complémentaire, par voie d'appel incident :

- à supposer par extraordinaire que l'ordonnance entreprise puisse être réformée sur la condamnation provisionnelle, la cour reste à même de répartir la charge des frais d'expertise entre les demandeurs et défendeurs, à hauteur de 50% chacun,

- condamner en conséquence les consorts [O] à payer aux consorts [S] la somme de 1 800 euros sur la somme de 3 600 euros réglée par eux à la régie du tribunal de Pontoise,

- condamner également les consorts [O] à contribuer à l'étude de sols requise au stade l'expertise judiciaire pour un montant de 3 894 euros, à hauteur de 50%, soit la somme de 1 947 euros due par eux aux consorts [S],

en tout état de cause :

- débouter les consorts [O] de leur demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile, pour les raisons précitées,

- à supposer même infirmation (sic), dire et juger que les consorts [O], à l'origine d'un appel dû à leur propre fait, seront donc tenus d'assumer leurs frais irrépétibles liés à cette instance,

- condamner les consorts [O] à payer aux consorts [S] la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour couvrir leurs propres frais de défense,

- condamner les consorts [O] aux entiers dépens de l'instance d'appel.'

Dans leurs dernières conclusions déposées le 6 mars 2025 auxquelles il convient de se reporter pour un exposé détaillé de leurs prétentions et moyens, M. [Y] et Mme [W] demandent à la cour, au visa des articles 546 et suivants, 696 et 700 du code de procédure civile, de :

'- statuer ce que de droit sur la demande d'infirmation de la décision entreprise en ce qu'elle a condamné les appelants à payer la somme provisionnelle de 5 000 euros à M. [S] et Mme [L] [U] à valoir sur leur préjudice,

- condamner Mme et M. [O] à verser aux époux [Y] une somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens en ce compris le remboursement du timbre fiscal de 225 euros.'

La société Century 21 Osmose, à qui la déclaration d'appel a été signifiée, à personne morale, le 24 octobre 2024 et les conclusions le 24 octobre 2024, n'a pas constitué avocat.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 25 mars 2025.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Sur la demande d'infirmation des appelants

M. [O] et Mme [G] sollicitent la réformation de l'ordonnance critiquée uniquement en ce qu'elle les a condamnés à payer une somme provisionnelle de 5 000 euros à M. [S] et Mme [L] [U] à valoir sur la réparation de leurs préjudices.

Ils soutiennent dans un premier temps que cette ordonnance se heurte à une difficulté majeure dans la mesure où les principes de l'oralité des débats et du contradictoire n'ont pas été respectés.

Ils expliquent que lors de l'audience de plaidoiries devant le premier juge, M. [S] et Mme [L] [U] n'ont pas plaidé ni soutenu oralement leur demande de versement d'une provision à valoir sur la réparation de leur préjudice, de sorte que le juge des référés n'était pas saisi de cette demande .

Ils considèrent que c'est donc avec inexactitude que l'ordonnance querellée a mentionné qu' « en réponse, Monsieur [B] [O] et Madame [A] [G] ne s'opposent pas à la demande de provision » alors que ce point n'avait pas été débattu ; que la lecture de l'assignation en intervention forcée qu'ils ont fait délivrer à Mme et M. [Y] suffit à se convaincre qu'ils n'envisageaient nullement d'accepter le versement d'une quelconque provision.

Ils allèguent dans un second temps de l'existence d'une contestation sérieuse devant faire obstacle à l'allocation d'une telle provision, rappelant que s'ils ont formé les protestations et réserves d'usage à la demande de désignation d'un expert judiciaire et attrait dans la cause leurs vendeurs, c'est pour que la mesure d'expertise établisse l'absence de responsabilité de leur part et mette un terme aux demandes infondées de M. [O] et Mme [G] à leur encontre.

Ils relatent que du temps de leur occupation de la maison, ils n'ont pas touché à l'isolation existante, ni effectué de travaux structurels et rappellent que l'acte de vente contient une clause d'exonération de responsabilité en cas de vice caché, tandis qu'ils ignoraient l'existence du désordre invoqué qui n'était pas apparent.

Ils concluent également à l'absence de démonstration par M. [S] et Mme [L] [U] de l'existence des préjudices allégués ainsi que du lien de causalité avec les désordres invoqués.

M. [S] et Mme [L] [U] sollicitent la confirmation de l'ordonnance critiquée sur la provision octroyée.

Ils indiquent vouloir intenter une action en responsabilité en raison des vices cachés qui étaient connus de leur vendeur suite à leur découverte courant l'été 2023 d'une grave fissuration affectant le mur porteur et impactant la solidité de l'ouvrage, nécessitant des travaux confortatifs complexes et coûteux.

Pour contrer la remise en cause par les appelants des constatations souveraines du juge de première instance, ils indiquent avoir sollicité du greffe du tribunal judiciaire de Pontoise la communication du registre d'audience. Ils précisent être en attente de réponse et indiquent qu' 'à ce stade, la cour d'appel pourra également solliciter la communication de cette source documentaire pour établir objectivement et surseoir à statuer en attendant'.

Ils ajoutent, au fond, que les arguments des appelants se heurtent aux énonciations de l'ordonnance ayant la force probante d'un acte authentique et qu'ils ne peuvent se dédouaner d'un aveu judiciaire fait à l'audience par leur mandataire.

Ils soutiennent que la confirmation de l'ordonnance s'impose :

- au visa de l'article 457 du code de procédure civile et de la force probante de l'ordonnance dont appel,

- au visa des articles 1383-2 du code civil et 446-1 du code de procédure civile et de l'aveu judiciaire fait à l'audience par M. [O] et Mme [G] qui ne se sont pas opposés à la demande provisionnelle de réparation,

- au visa de l'article 488 du code de procédure civile, en ce que la provision octroyée n'a pas autorité de la chose jugée au principal.

Sur le fond de leur demande, ils soutiennent caractériser l'existence d'un préjudice de jouissance depuis la découverte de la lézarde dans la pièce dite « rose », qui est restée en l'état de gros 'uvre et le restera pendant la durée de l'expertise judiciaire, voire du contentieux ; que la perte de jouissance d'une pièce de vie d'environ 15 m² pour une durée indéfinie, retenue à 2 500 euros, est donc minimaliste.

Ils prétendent que cette situation a eu un grave impact sur leur moral et qu'ils ont subi une dépression réactionnelle, de sorte que le préjudice moral évalué à 2 500 euros est là encore une estimation minimale.

M. et Mme [Y] demandent à la cour de statuer ce que de droit sur la demande d'infirmation formulée par M. [O] et Mme [G].

Sur ce,

L'article 835 alinéa 2 du code de procédure prévoit que le président du tribunal judiciaire peut dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, accorder une provision au créancier, ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire.

En application de ce texte, le montant de la provision qui peut être allouée en référé n'a d'autre limite que le montant non sérieusement contestable de la créance alléguée.

Pour condamner M. [O] et Mme [G] à verser une provision à M. [S] et Mme [L] [U], le juge des référés a retenu qu'ils ne s'opposaient pas à la demande formulée.

Il ressort des mentions de ordonnance attaquée que les conseils des parties se sont positionnés à l'audience en indiquant qu'ils se référaient à leurs écritures, ce qui se déduit de la mention suivante figurant en page 5 de la décision : « Conformément à l'article 446-1 du code de procédure civile, pour plus ample informé de l'exposé et des prétentions, il est renvoyé à l'assignation introductive d'instance et aux écritures déposées et développées oralement à l'audience. »

Or force est de constater que les seules écritures de M. [O] et Mme [G] étaient constituées par l'assignation en intervention forcée qu'ils ont fait délivrer à M. et Mme [Y], aux termes de laquelle ils sollicitaient du juge des référés qu'il ordonne la jonction des procédures, entende leurs protestations et réserves d'usage à l'égard de la mesure de référé expertise introduite par M. [S] et Mme [L] [U], et qu'il déclare les opérations d'expertise judiciaire à intervenir opposables et contradictoires à M. et Mme [Y], précédents propriétaires de l'immeuble concerné.

Dès lors, sans que la prise de connaissance des notes d'audience consignées par le greffier n'apparaisse nécessaire, ces éléments sont suffisants pour en déduire qu'aux termes de leurs écritures M. [O] et Mme [G] ne s'étaient pas expressément opposés à la demande de provision formée par M. [S] et Mme [L] [U] et que leur conseil ne l'a pas davantage fait lors de l'audience de plaidoiries, en se remettant à ses écritures, tandis que cette demande de provision figurait dans les conclusions des demandeurs.

Dans ces conditions, le premier juge a pu retenir que M. [O] et Mme [G] ne s'opposaient pas à la demande de provision, sans que cela puisse être qualifié d'aveu judiciaire et sans que cela ne puisse non plus être considéré comme un acquiescement à la demande. Le juge de première instance a simplement entendu tirer des conséquences juridiques de l'absence de positionnement des défendeurs sur la demande de provision, pour considérer qu'il convenait d'y faire droit.

La demande des intimés aux fins de solliciter avant-dire droit la communication du registre d'audience (plumitif) auprès du greffe du tribunal de Pontoise sera rejetée, tandis que la demande d'infirmation de M. [O] et Mme [G] à cet égard ne saurait prospérer.

Toutefois, comme ci-dessus rappelé, une demande de provision ne peut aboutir devant le juge des référés que si la créance ainsi alléguée apparaît due de manière certaine.

La demande de provision de M. [S] et Mme [L] [U] est fondée sur la responsabilité que pourrait pourraient encourir M. [O] et Mme [G] au titre de la garantie des vices cachés.

Au vu de la clause exonératoire de garantie du vendeur figurant dans l'acte authentique de vente du 17 juin 2022 entre les parties, et alors qu'il n'est en l'état pas établi que les vendeurs avaient connaissance du vice caché allégué, la demande de provision formée par les acquéreurs contre leurs vendeurs ne saurait prospérer.

La responsabilité de M. [O] et Mme [G] ne pouvant à ce stade être considérée comme engagée avec l'évidence requise en référé, l'ordonnance querellée sera infirmée en ce qu'elle les a condamnés à verser une provision à M. [S] et Mme [L] [U].

Sur l'appel incident de M. [S] et Mme [L] [U]

M. [S] et Mme [L] [U] forment un appel incident pour solliciter le remboursement par les appelants de la moitié de la somme de 3 600 euros que le premier juge a mis entièrement à leur charge au titre de la provision à valoir sur la rémunération de l'expert désigné.

Ils répondent aux appelants que cette demande n'échappe pas au double degré de juridiction et est recevable.

Pour les mêmes raisons, ils sollicitent que les appelants soient condamnés à supporter la moitié des frais qu'ils ont dû exposer pour payer l'étude de sol confiée à la société Infraneo.

M. [O] et Mme [G], intimés à cet appel incident, soulèvent en premier lieu l'irrecevabilité de la demande au motif que l'appel à l'encontre de la disposition qui fixe la provision à valoir sur la rémunération de l'expertise n'est pas susceptible de recours dans la mesure où elle ressort du pouvoir discrétionnaire du juge.

En second lieu, ils font valoir que ces demandes sont mal fondées dans la mesure où leur responsabilité n'est ni engagée, ni judiciairement reconnue et qu'au surplus, s'agissant de la demande au titre des frais de l'étude des sols, celle-ci relève de la compétence du juge du contrôle des expertises.

Sur ce,

L'article 269 du code de procédure civile dispose que :

« Le juge qui ordonne l'expertise ou le juge chargé du contrôle fixe, lors de la nomination de l'expert ou dès qu'il est en mesure de le faire, le montant d'une provision à valoir sur la rémunération de l'expert aussi proche que possible de sa rémunération définitive prévisible. Il désigne la ou les parties qui devront consigner la provision au greffe de la juridiction dans le délai qu'il détermine ; si plusieurs parties sont désignées, il indique dans quelle proportion chacune des parties devra consigner. Il aménage, s'il y a lieu, les échéances dont la consignation peut être assortie. »

Il est constant que la décision qui fixe la provision n'est pas susceptible de recours, de sorte que la demande relevant de cet article sera déclarée irrecevable.

La contestation des frais de recours à un sachant dans le cadre de l'expertise relève quant à elle du juge du contrôle des expertises, de sorte qu'elle n'est pas davantage recevable.

Sur les demandes accessoires :

M. et Mme [Y] sollicitent la condamnation des appelants à leur verser la somme de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles, faisant valoir que l'appel interjeté à leur égard, alors qu'aucune demande n'est formée contre eux, n'avait aucun intérêt ; qu'il ne s'agit pas d'une obligation procédurale ; qu'ils ne pouvaient demeurer défaillants sans connaître les intentions des demandeurs en première instance et les échanges à venir ; qu'ils ont dû engager des frais et débours, outre l'anxiété générée par cette nouvelle procédure à la quelle ils ne devraient pas être partie, ce que reconnaissent d'ailleurs expressément les appelants dans leurs écritures.

M. [O] et Mme [G] rétorquent que M. et Mme [Y] étant parties à la procédure de première instance, il est naturel et normal qu'ils soient informés de la déclaration d'appel et des conclusions d'appelants ; que la signification de ces actes de procédure ne leur imposait pas de constituer avocat.

Sur ce,

Il sera tout d'abord relevé qu'aucune des parties ne critique l'ordonnance attaquée en ses dispositions relatives aux frais irrépétibles et dépens de première instance, de sorte que la cour n'est saisie d'aucune demande à ce titre.

Compte tenu de la nature du litige, il sera dit que chaque partie conservera la charge des dépens d'appel par elle exposés et par équité, il sera dit n'y avoir lieu à appliquer les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

La cour statuant dans les limites de sa saisine, par arrêt réputé contradictoire rendu en dernier ressort,

Infirme l'ordonnance du 11 septembre 2024 en ce qu'elle a condamné M. [B] [O] et Mme [A] [G] à payer la somme provisionnelle de 5 000 euros à M. [K] [S] et Mme [V] [L] [U] à valoir sur la réparation de leur préjudice,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Dit n'y avoir lieu à référé sur la demande de provision de M. [K] [S] et Mme [V] [L] [U],

Déclare irrecevables les demandes de M. [K] [S] et Mme [V] [L] [U] formées au titre de leur appel incident,

Dit que chaque partie conservera la charge des dépens d'appel par elle exposés,

Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en appel.

Arrêt prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, signé par Madame Pauline DE ROCQUIGNY DU FAYEL, Conseillère faisant fonction de Présidente et par Madame Elisabeth TODINI, Greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

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