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Décisions

CA Saint-Denis de la Réunion, ch. civ. tgi, 23 mai 2025, n° 24/01003

SAINT-DENIS DE LA RÉUNION

Arrêt

Autre

CA Saint-Denis de la Réunion n° 24/0100…

23 mai 2025

Arrêt N°

PF

R.G : N° RG 24/01003 - N° Portalis DBWB-V-B7I-GDLT

[H]

[P]

C/

S.A.S. FIBRES INDUSTRIES BOIS

S.E.L.A.R.L. [W] [M]

COUR D'APPEL DE SAINT-DENIS

ARRÊT DU 23 MAI 2025

Chambre civile TGI

Appel d'une ordonnance rendue par le JUGE DE LA MISE EN ETAT DE SAINT-PIERRE en date du 13 JUIN 2024 suivant déclaration d'appel en date du 01 AOUT 2024 rg n°: 23/04175

APPELANTES :

Madame [L] [H]

[Adresse 1]

[Localité 7]

Représentant : Me Christine LACAILLE, avocat au barreau de SAINT-PIERRE-DE-LA-REUNION

Madame [T] [P]

[Adresse 1]

[Localité 7]

Représentant : Me Christine LACAILLE, avocat au barreau de SAINT-PIERRE-DE-LA-REUNION

INTIMEES :

S.A.S. FIBRES INDUSTRIES BOIS La société SAS FIBRES INDUSTRIES BOIS, Société par actions simplifiée au capital de 350 000,00 ' immatriculée au RCS de SAINT DENIS (REUNION) sous le n° 415 281 401, dont le siège social est [Adresse 4] (REUNION), prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 4]

[Localité 6]

Représentant : Me Mikaël YACOUBI de la SELARL GAELLE JAFFRE ET MIKAEL YACOUBI, avocat au barreau de SAINT-PIERRE-DE-LA-REUNION

Entreprise [X] [D] [U]

[Adresse 2],

Représentant : Me Emeline K/BIDI, avocat au barreau de SAINT-PIERRE-DE-LA-REUNION

S.E.L.A.R.L. [W] [M] es qualité de mandataire judiciaire (liquidateur) de Monsieur [X] [D] [U], entreprise individuelle

[Adresse 3]

[Localité 5]

Clôture:17 décembre 2024

DÉBATS : en application des dispositions des articles 778, 779 et 905 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 18 Mars 2025 devant la cour composée de :

Président : Monsieur Patrick CHEVRIER, Président de chambre

Conseiller : Madame Pauline FLAUSS, Conseillère

Conseiller : Mme Sophie PIEDAGNEL, Conseillère

Qui en ont délibéré après avoir entendu les avocats en leurs plaidoiries.

A l'issue des débats, le président a indiqué que l'arrêt sera prononcé, par sa mise à disposition le 23 Mai 2025.

Arrêt : prononcé publiquement par sa mise à disposition des parties le 23 Mai 2025.

Greffier : Mme Véronique FONTAINE

LA COUR

Par actes d'huissier des 12 et 13 décembre 2023, Mmes [H] et [P] ont fait assigner la SAS Fibres Industries Bois et M. [U], assisté de la Selarl [W] [M], son mandataire au redressement judiciaire, devant le tribunal judiciaire de Saint Pierre de la Réunion aux fins de les voir reconnaitre leur responsabilité dans les travaux de réalisation d'un deck et d'indemnisation des dommages consécutifs, outre paiement des frais d'expertise, des frais irrépétibles et des dépens.

Par ordonnance du 13 juin 2024, le juge de la mise en état a :

- déclaré Mmes [H] et [P] irrecevables en leurs demandes dirigées contre M. [U] et la Selarl [W] [M] [W] [M] es qualités de mandataire judiciaire de M. [U] ;

- renvoyé les parties à l'audience de mise en état du 22 août 2024 pour les conclusions au fond des demanderesses expurgées des demandes déclarées irrecevables et les conclusions au fond de la SAS Fibres Industries Bois ;

Par déclaration du 1er août 2024 au greffe de la cour, Mmes [H] et [P] ont formé appel de l'ordonnance.

Elles demandent à la cour de:

- Déclarer recevable et bien fondé leur appel à l'encontre de l'ordonnance sur incident du 13 juin 2024 pour les causes sus-énoncées ;

- Infirmer la décision en toutes ses dispositions ;

Statuant de nouveau :

- Juger que la Selarl [W] [M] [W] [M] ne pouvait pas être concernée par la fin de non-recevoir opposée pour uniquement M. [U] ;

- Juger que la demande en fixation des créances du débiteur formulée à l'attention de la Selarl [W] [M] [W] [M] n'est pas irrecevable ;

- Juger que leur demande aux fins de voir déclarer M. [U] responsable aux côtés de la SAS Fibres Industries Bois n'est pas irrecevable ;

- Débouter les intimés de toutes prétentions plus amples ou contraires ;

- Renvoyer l'affaire à la mise en état pour conclusions au fond de toutes les parties ;

- Condamner les intimés au paiement de la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

M. [U], représenté par la Selarl [W] [M], son liquidateur, sollicite de la cour de :

- Confirmer l'ordonnance du juge de la mise en état près le tribunal judiciaire de Saint-Pierre en date du 13 juin 2024 en toutes ses dispositions;

- Prononcer l'irrecevabilité des demandes de Mmes [H] et [P] à son encontre;

La SAS Fibres Industries Bois demande à la cour de:

- Infirmer dans toutes ses dispositions l'ordonnance sur incident réputée contradictoire rendue en premier ressort le 13 juin 2024 par Mme le juge de la mise en état près le tribunal judiciaire de St Pierre ;

Statuant à nouveau :

- Déclarer recevables les demandes dirigées à l'encontre de M. [U], représenté par la Selarl [W] [M], son liquidateur, tendant à établir le principe de la responsabilité de M. [U] dans la survenance des dommages allégués par Mmes [H] et [P], lesquels sont mentionnés dans le rapport d'expertise judiciaire dressé par M. [A] [K] en date du 10 juillet 2023.

En tout état de cause,

- Renvoyer l'affaire par devant le tribunal judiciaire de St Pierre à la première audience de mise en état utile afin que les parties puissent conclure sur le fond.

- Condamner solidairement Mme B à lui payer la somme de 2.000,00 ' au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

- Rejeter toutes demandes, fins ou conclusions plus amples ou contraires.

***

Par message RPVA du 24 avril 2025, au visa des articles L. 624-2 et L. 644-3 du code de commerce et 16 du code de procédure civile, la cour a invité les parties à présenter leurs observations sous quinzaine sur la recevabilité des demandes en fixation des créances de Mmes [H] et [P] au passif de M. [U] eu égard :

- à la compétence du juge commissaire à la procédure collective de M. [U];

- à la conversion de la procédure collective de M. [U] en liquidation judiciaire simplifiée.

Par observations du 7 mai 2023, Mmes [H] et [P] ont fait observer qu'il n'existe aucune discussion, au niveau de la procédure de redressement et de liquidation judiciaire sur le principe de la créance et son admission à titre conservatoire au passif, tant du redressement judiciaire que de la liquidation judiciaire, dans l'attente de la décision au fond à intervenir alors que le mandataire judiciaire a reçu l'assignation concomitamment à la déclaration de créances effectuée à titre conservatoire. Elles en déduisent qu'au regard des circonstances de l'espèce, le juge-commissaire s'est nécessairement considéré comme incompétent au profit du juge saisi attendant sa décision pour inscrire la créance à titre définit conformément à la décision à intervenir.

MOTIFS DE LA DECISION

Vu les dernières conclusions de Mmes [H] et [P] du 30 août 2024, de la SAS Fibres Industries Bois du 27 septembre 2024 et de M. [U], représenté par la Selarl [W] [M], son liquidateur, du 16 octobre 2024 auxquelles la cour se réfère pour plus ample exposé des moyens et prétentions des parties ;

Vu l'ordonnance de clôture du 17 décembre 2024 ;

Sur la recevabilité des demandes de Mmes [H] et [P] envers M. [U]

Aux termes de leurs assignations délivrées les 12 et 13 décembre 2023 à M. [U] et la Selarl [W] [M] (pièces 1 et 2), Mmes [H] et [P] ont demandé au tribunal judiciaire de St Pierre de :

- Déclarer la SAS Fibres Industries Bois et M. [U] solidairement responsables des désordres affectant leur deck et de l'ensemble des préjudices consécutifs ;

- Condamner la SAS Fibres Industries Bois à prendre en charge les travaux de reprise du deck suivant devis de la SARL C2BR de 31.855, 20 euros, incluant le cout d'un bureau d'études, sous réserve d'actualisation ;

- Condamner la SAS Fibres Industries Bois à leur payer les dommages-intérêts ci-après pour les causes sus-énoncées :

. préjudice de jouissance: 6.000 euros ;

. préjudice esthétique: 3.000 euros ;

. préjudice moral: 1.500 euros ;

- Condamner la SAS Fibres Industries Bois à leur rembourser la somme de 6.605 euros consignée pour l'expertise judiciaire ;

- Condamner la SAS Fibres Industries Bois à leur payer la somme de 4.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Condamner la même au titre de la procédure de référé et de l'instance au fond ;

- Ordonner l'inscription par le mandataire judiciaire de M. [U] de leur créance ainsi fixée au passif de la procédure de redressement judiciaire ouverte à l'encontre de M. [U] comme suit :

. travaux de reprise du deck suivant devis de la SARL C2BR de 31.855, 20 euros, incluant le cout d'un bureau d'études, sous réserve d'actualisation ;

. préjudice de jouissance: 6.000 euros ;

. préjudice esthétique: 3.000 euros ;

. préjudice moral: 1.500 euros ;

. Frais d'expertise 6.605 euros ;

. Article 700 du code de procédure civile: 4.000 euros ;

. dépens.

A cette date, M. [U] avait été placé en redressement judiciaire suivant jugement du tribunal mixte de commerce de Saint Pierre du 12 octobre 2023, désignant la Selarl [W] [M] comme mandataire judiciaire au redressement.

Aussi, l'action de Mmes [H] et [P] vise M. [U], exerçant sous l'enseigne MECR, au titre de son activité commerciale ; la recevabilité de celle-ci à l'encontre de M. [U] ne peut être dissociée de la recevabilité de l'action contre le mandataire, sans que le juge de la mise en état ayant soulevé d'office la fin de non-recevoir tirée de l'irrecevabilité de l'action contre M. [U] à raison de l'interdiction des poursuites n'ait à expliciter dans sa demande d'observations adressées aux parties que la recevabilité de cette action contre M. [U] s'entendait également nécessairement de celle contre le mandataire.

Sur ce,

Vu l'article L. 622-21 du code de commerce, interdisant toute action en justice tendant à la condamnation du débiteur en paiement d'une somme d'argent;

Comme le relèvent les appelants et la SAS Fibres Industries Bois, aucune demande formée par Mmes [H] et [P] contre M. [U] ne vise à la condamnation de ce dernier à paiement. Il ne peut être affirmé, comme le fait M. [U], que l'action tend à l'obtention d'un titre exécutoire contre sa personne.

La fin de non-recevoir tirée de l'interdiction des poursuites individuelles à raison de l'ouverture de la procédure collective de M. [U] doit donc être écartée.

En revanche,

Vu l'article L. 624-2 du code de commerce;

Vu l'article L. 644-3 du même code;

Eu égard à l'ouverture de la procédure collective de M. [U] antérieurement à l'introduction de l'action, le juge commissaire est seul compétent pour connaitre de la recevabilité et de l'admission au passif de la procédure de M. [U] des créances déclarées par Mmes [H] et [P] suivant déclaration au mandataire du 8 décembre 2023 (pièce 5).

Aussi, faute pour le juge commissaire d'avoir jugé que la demande excédait sa compétence et invité les parties à saisir le juge du fond, les demandes d'inscription au passif de la procédure collective de M. [U] formées par Mmes [H] et [P] devant le tribunal judiciaire sont irrecevables.

En l'absence de production à la cause d'une décision du juge commissaire, la cour ne peut présumer celle-ci comme l'y invitent les appelantes.

De plus, il résulte des éléments non contestés (p. 11 conclusions SAS Fibres Industries Bois) que la procédure de M. [U] a été convertie en liquidation judiciaire simplifiée par jugement du 27 mars 2024, de sorte que, sauf à ce que la créance de Mmes [H] et [P] ait été considérée comme figurant en rang utile, celle-ci ne sera pas vérifiée.

En conséquence de ce qui précède, l'ordonnance sera partiellement infirmée en ce qu'elle a déclaré irrecevable la demande de Mmes [H] et [P] tendant à voir reconnaitre la responsabilité de M. [U]. et confirmée pour le surplus.

Sur les frais irrépétibles et sur les dépens

Vu les articles 696 et 700 du code de procédure civile;

Chaque partie supportera les dépens qu'elle a exposés.

L'équité commande en outre de rejeter les demandes formées au titre des frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS,

La cour, statuant publiquement, en matière civile et en dernier ressort, par arrêt réputé contradictoire mis à disposition au greffe conformément à l'article 451 alinéa 2 du code de procédure civile,

- Écarte la fin de non-recevoir tirée de l'interdiction des poursuites individuelles contre M. [U];

- Infirme l'ordonnance entreprise sauf en ce qu'elle a déclaré irrecevables devant le tribunal les demandes de Mmes [H] et [P] en inscription de leurs créances au passif de la procédure collective de M. [U];

- La confirme dans cette mesure;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

- Déclare recevable la demande de Mmes [H] et [P] tendant à déclarer M. [U] solidairement responsable avec la SAS Fibres Industries Bois des désordres affectant leur deck et de l'ensemble des préjudices consécutifs;

- Dit n'y avoir lieu à frais irrépétibles;

- Condamne chacune des parties à supporter les dépens de l'incident qu'elle a exposés.

Le présent arrêt a été signé par Monsieur Patrick CHEVRIER, Président de chambre, et par Mme Véronique FONTAINE greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT

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