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Décisions

CA Toulouse, 2e ch., 27 mai 2025, n° 23/00854

TOULOUSE

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

MDS Investissements (SARL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Salmeron

Conseillers :

Norguet, Moulayes

Avocats :

Dulon, Levy, Alran

TGI Castres, du 2 févr. 2023, n° 22/0013…

2 février 2023

Faits et procédure :

Par acte authentique en date du 2 mai 2017, dressé par Maître [E], notaire, [D] [K] et son épouse, [S] [Y], ont donné à bail commercial à la Sarl Mds Investissements, dont l'activité est la gestion de centres de soins et d'esthétique, un local situé au [Adresse 3] à [Localité 7] (81).

Le bail portait sur le local commercial lui-même ainsi que sur une réserve, des places de parkings extérieures attenantes, des places de parking souterraines et une cave.

Déplorant l'occupation régulière des places de stationnement extérieures par des tiers, la Sarl Mds Investissements a adressé à la mairie de [Localité 7], le 29 janvier 2018, une demande afin de se voir autorisée à réaliser des marquages au sol destinés à matérialiser les trois places de parking privées réservées à sa clientèle.

Par courrier du 31 octobre 2018, la mairie de [Localité 7] lui a répondu que l'espace disponible existant devant la vitrine ne permettait pas le traçage au sol de trois places de stationnement réglementaire et que le stationnement était seulement toléré à cet endroit à la condition qu'il ne gêne pas la libre circulation des piétons.

La Sarl Mds Investissements, s'interrogeant sur la réelle propriété des époux [K] sur la partie extérieure réservée au stationnement, s'est alors retournée vers ses bailleurs pour leur demander de justifier de la réalité des places de stationnement mentionnées dans le bail.

Par courrier retour, les bailleurs ont confirmé être propriétaires de l'espace affecté au stationnement des véhicules et que, contrairement aux affirmations de la mairie, cet espace permettait le stationnement et non une simple tolérance de stationnement. Les bailleurs ont renvoyé la locataire vers la mairie en vue d'obtenir gain de cause sur ce point, en lui rappelant que les travaux d'amélioration avaient contractuellement été mis à sa charge.

A compter de ces échanges, les relations se sont dégradées entre la locataire et les bailleurs et des retards de paiement des loyers sont apparus.

Le 10 décembre 2019, les époux [K] ont adressé un commandement de payer à la Sarl Mds Investissements relatif aux loyers impayés et aux impôts dus et non acquittés.

Sans réponse de leur locataire, les bailleurs l'ont assignée en référé devant le tribunal judiciaire de Castres aux fins de constatation de la résiliation de plein droit du bail pour non paiement des loyers.

En cours de procédure, les parties s'étant entendues et la Sarl Mds Investissements ayant réglé sa dette, les bailleurs se sont désistés de l'instance.

Par courrier en date du 4 décembre 2020, la Sarl Mds Investissements a demandé à ses bailleurs la révision rétroactive des loyers ainsi que la restitution du trop-versé, évalué à 7 286 euros HT, en avançant un défaut de jouissance des places de stationnement extérieur incluses dans le périmètre du bail. Elle leur a aussi indiqué que la clause de révision annuelle du loyer figurant dans le bail était contraire aux dispositions d'ordre public de l'article L145-38 du code du commerce et réclamé à ce titre la restitution de la somme de 1 880 euros HT.

En réponse, par courrier du 18 février 2021, les époux [K] ont fourni à la Sarl Mds Investissements des documents tirés du cadastre et l'acte de vente en date du 4 décembre 1978 attestant de l'existence des places de stationnement et de leur propriété sur ces dernières.

Par sommation interpellative signifiée en date du 16 août 2021, la Sarl Mds Investissements a demandé aux époux [K] de justifier du lieu de situation des trois places de parking figurant au bail, de leurs dimensions précises et de la réalité de leur droit de propriété sur cet emplacement.

Par acte du 23 décembre 2021, la Sarl Mds Investissements a assigné les époux [K] devant le tribunal judiciaire de Castres aux fins de prononcer rétroactivement la réduction du loyer mensuel à compter du 2 mai 2017, de les voir condamnés à lui régler à ce titre en répétition de l'indu la somme de 13 648,13 euros TTC, de dire la clause de révision annuelle du loyer non écrite et en conséquence de les voir condamnés à lui restituer la somme de 2 010 euros TTC, ainsi que de les voir condamnés au paiement de la somme de 510 663 euros en réparation de l'ensemble des préjudices découlant du dol subi par la locataire.

Une médiation a été proposée aux parties par le juge de la mise en état, qui n'a pu aboutir.

Reconventionnellement, les époux [K] ont soutenu les manquements contractuels de la Sarl Mds Investissements à ses obligations du fait des retards de paiement des loyers et sollicité en réparation de leur préjudice la somme de 50 000 euros à titre de dommages et intérêts.

Par jugement du 2 février 2023, le tribunal judiciaire de Castres a :

rejeté l'ensemble des demandes présentées par la Sarl Mds Investissements (ou Investissements),

rejeté la demande reconventionnelle de dommages intérêts présentée par [D] [K] et [S] [Y] épouse [K],

condamné la Sarl Mds Investissements (ou Investissements) à payer à [D] [K] et [S] [Y] épouse [K] la somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

condamné la Sarl Mds Investissements (ou Investissements) aux dépens de l'instance,

dit n'y avoir lieu à écarter l'exécution provisoire.

Par déclaration en date du 9 mars 2023, la Sarl Mds Investissements a relevé appel du jugement aux fins de le voir réformé en intégralité à l'exception du chef de dispositif ayant rejeté la demande reconventionnelle en dommages intérêts présentée par [D] [K] et [S] [Y] épouse [K].

Par voie de conclusions, les époux [K] ont fait appel incident du chef de dispositif ayant rejeté leur demande reconventionnelle en dommages intérêts.

La Sarl Mds Investissements a donné congé pour la fin du mois d'avril 2023.

Par acte du 20 juin 2023, la Sarl Mds Investissements a assigné en intervention forcée, à hauteur d'appel, la mairie de [Localité 7].

Par jugement en date du 20 octobre 2023, le tribunal de commerce de Castres a ouvert une procédure de liquidation judiciaire à l'encontre de la Sarl Mds Investissements et désigné la Scp Vitani [I], représentée par Maître [I] [V], en qualité de mandataire liquidateur.

La Scp Vitani-[I] est intervenue volontairement à la procédure, es qualités.

La clôture est intervenue le 13 janvier 2025. L'affaire a été fixée à l'audience du 18 février 2025.

Prétentions et moyens des parties :

Vu les conclusions d'appelante responsives et récapitulatives n°2 devant la cour d'appel de Toulouse notifiées le 16 novembre 2023 auxquelles il est fait expressément référence pour l'énoncé du détail de l'argumentation, et dasn lesquelles la Sarl Mds Investissements et la Scp Vitani-[I] es qualités demandent, au visa des articles 1137, 1162, 1190, 1195 et 1231 du code civil, 555 et 696 du code de procédure civile et les articles L145-38 et L145-39 du code de commerce:

le rejet de toutes les conclusions contraires comme injustes et mal fondées,

la reconnaissance du caractère juste et bien fondée de l'intervention volontaire de la Scp Vitani [I] es qualité de mandataire judiciaire,

la réformation du jugement entrepris, en ce que le jugement critiqué a rejeté l'ensemble des demandes présentées par la Sarl Mds Investissements (ou Investissements), condamné la Sarl Mds Investissements (ou Investissements) à payer à Monsieur [D] [K] et Madame [S] [Y] épouse [K] la somme de 1500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, condamné la Sarl Mds Investissements (ou Investissements) aux dépens de l'instance, dit n'y avoir lieu à écarter l'exécution provisoire,

statuant à nouveau, la reconnaissance de la réduction du loyer mensuel ht à la somme de 1.522,29 euros à compter rétroactivement du 2 mai 2017 jusqu'à la date du 30.04.2023 date de départ des lieux,

la condamnation des époux [K] à rembourser à la Sarl Mds Investissements la somme de 15 292,80 euros ttc au titre de la répétition de l'indu de loyers pour des places de parking,

que la clause du bail commercial en date du 2 mai 2017 prévoyant une révision annuelle du loyer sur le fondement de l'article L 145-38 du code de commerce soit réputée non écrite,

la condamnation en conséquence des époux [K] à payer à la Sarl Mds Investissements la somme de 2 010 euros ttc au titre des loyers trop versés dans le cadre de la révision annuelle du loyer depuis la date de prise d'effet du bail commercial,

la condamnation des époux [K] à payer à la Sarl Mds Investissements la somme de 510 663 euros au titre du préjudice subi du fait du dol,

leur condamnation au paiement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du cpc ainsi qu'aux entiers dépens.

Vu les conclusions d'intimé n°2 devant la cour d'appel de Toulouse notifiées le 10 octobre 2023 auxquelles il est fait expressément référence pour l'énoncé du détail de l'argumentation, et dans lesquelles la mairie de Castres demande, au visa des articles L2122-1 à L2122-3 du code général de la propriété des personnes publiques :

qu'il soit constaté qu'aucune demande n'est formulée à l'encontre de la mairie de [Localité 7],

qu'il soit statué ce que de droit sur les demandes des parties,

que soit prononcée en conséquence la mise hors de cause de la Mairie de [Localité 7] de la présente procédure,

la condamnation de la Sarl Mds Investissements au paiement de la somme de 1 500 euros au profit de la Mairie de [Localité 7] au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens dont distraction au profit de l'avocat soussigné.

Vu les conclusions en appel notifiées le 24 août 2023 auxquelles il est fait expressément référence pour l'énoncé du détail de l'argumentation, dans lesquelles [D] [K] et [S] [Y] épouse [K] demandent au visa des articles 1240 du code civil, 6 et 555 du code de procédure civile, L112-2 du code monétaire et financier :

l'infirmation du jugement entrepris en ce qu'il a débouté les consorts [K] de la demande de dommages et intérêts de 50 000 euros et qu'il leur a seulement attribué la somme de 1 500 euros pour l'application de l'article 700 du code de procédure civile,

la condamnation de la Sarl Mds Investissements à payer la somme de 50 000 euros de dommages et intérêts au titre de la responsabilité contractuelle,

la condamnation de la Sarl Mds Investissements à payer aux époux [K] la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

la condamnation de la Sarl Mds Investissements aux entiers dépens,

la confirmation pour le surplus le jugement entrepris ayant débouté Mds Investissement de l'ensemble de ses demandes.

MOTIFS

La cour prend acte de l'intervention volontaire de la Scp Vitani-[I] en qualité de mandataire liquidateur de la Sarl Mds Investissements.

A la demande la mairie de [Localité 7], il est également pris acte et constaté de ce qu'il n'est formulé aucune prétention à son égard.

Sur la propriété des époux [K], le dol et les demandes en révision rétroactive du loyer et indemnitaires de la Sarl Mds Investissements

Les articles 1130 et 1137 du code civil disposent que l'erreur, le dol et la violence vicient le consentement lorsqu'ils sont de telle nature que, sans eux, l'une des parties n'aurait pas contracté ou aurait contracté à des conditions substantiellement différentes. Leur caractère déterminant s'apprécie eu égard aux personnes et aux circonstances dans lesquelles le consentement a été donné. Le dol est le fait pour un contractant d'obtenir le consentement de l'autre par des man'uvres ou des mensonges.

La Sarl Mds Investissements soutient l'existence d'un dol commis à son détriment lors de la conclusion du contrat de bail commercial, les bailleurs ayant stipulé faussement la mise à disposition de places de stationnement extérieur privées attachées au local alors qu'ils ne rapportent pas la preuve de leur propriété sur la bande de terrain concernée et que la mairie a refusé d'y apposer des marquages réglementaires aux fins de figurer les trois stationnements prévus.

La locataire affirme que, n'ayant pu bénéficier de ces places de stationnement comprises dans le montant du loyer mensuel, il y a lieu de réduire le loyer du bail commercial de manière rétroactive et d'ordonner que les bailleurs lui restituent le trop-versé à hauteur de 15 292,80 euros ttc. Elle demande également l'indemnisation des divers préjudices découlant pour elle de la conclusion d'un bail affecté d'un dol et de l'absence de jouissance des places de stationnements, dont le remboursement des travaux d'aménagement du local et une perte de chiffre d'affaires, pour un montant cumulé de 510 663 euros.

En réplique, les bailleurs contestent tout dol en maintenant être bien propriétaires des emplacements de stationnement litigieux, qui sont privatifs et non compris dans l'espace public, et dont la locataire a eu normalement la jouissance. Ils indiquent que leur propriété a été confirmée par la mairie de [Localité 7] dans son courrier qui a simplement mis en avant le manque de place ne permettant pas la réalisation de marquages réglementaires. Le loyer fixé n'ayant donc aucune raison d'être révisé de manière rétroactive, ils sollicitent le rejet des prétentions de l'appelante tant s'agissant du trop-versé que de ses autres demandes indemnitaires, de surcroît sans lien avec la faute reprochée.

Afin de déterminer si le bail comporte des mentions mensongères en indiquant la mise à disposition de la locataire de places de stationnement extérieures inexistantes, ou situées sur une bande de terrain n'appartenant pas aux bailleurs, la cour doit étudier les diverses pièces produites afin d'établir la topographie des lieux et leur statut juridique.

Les parties produisent diverses pièces dont l'examen permet de relever les éléments suivants :

le bail commercial, produit conjointement par les parties, mentionne, dans son article « Désignation » qu'il est accordé sur les locaux compris « dans un ensemble immobilier soumis au régime de la copropriété situé à [Localité 7] ['] Section BR, N°[Cadastre 4], lieu-dit « [Adresse 3] », Surface 00 ha 04 a 44 ca : les deux lots de copropriété suivants : Lot numéro quarante (40) en rez de chaussée, un local commercial et un atelier avec parking extérieur donnant sur les [Adresse 6], d'une superficie de 330 mètres carrés environ [...] » outre deux parkings couverts, une réserve et une cave en sous sol. Il est ensuite indiqué « le preneur pourra également utiliser les trottoirs et les parties extérieures, situées [Adresse 6], au droit des vitrines du local commercial, ce droit résultant de la conservation par le bailleur des espaces qui n'ont pas fait l'objet d'une cession au promoteur et qui n'ont pas été incorporées au domaine public ou à la copropriété, ainsi déclaré par ce dernier » ;

l'acte de vente conclu le 4 décembre 1978 entre les époux [K] et la Sci Fracasty, promoteur, produit par les intimés, précise qu'il a été créé une copropriété avec extension de l'immeuble initial sur 3 étages, en réservant aux époux [K] le lot N°40 situé au rez-de-chaussée, et mentionne en page 3 la rétrocession par les époux [K] à la commune de Castres d'une partie du terrain nécessaire à l'aménagement du carrefour [Adresse 8] et [Adresse 6] mais que les époux [K] restent propriétaires du N°[Cadastre 4] de la section BR pour 4 ares 44 centiares ;

le plan cadastral produit en pièce 17 par les époux [K] matérialise la présence d'une bande non construite en lisière gauche de l'emprise du N°[Cadastre 4], et la présence de 3 emplacements, larges de 2m26 chacun, permettant le stationnement de véhicules devant la vitrine du local, sur la propriété des intimés ;

le courrier adressé par la mairie de [Localité 7] à la Sarl Mds Investissements le 31 octobre 2018, en réponse à la demande de marquages réglementaires, indique que « cet espace a été entièrement revêtu en béton désactivé sur votre partie privative et la partie publique. Les bordures ont été surbaissées permettant l'accès vers cet espace devant votre commerce. Le stationnement à cet endroit est toléré seulement s'il permet la libre circulation des piétons. L'espace existant disponible ne se prête pas au traçage de stationnement réglementaire »,

enfin, l'examen de la pièce N° 9 produite par l'appelante et comportant une photographie démontrant la présence de véhicules garés sur cette zone, permet de visualiser la configuration de la zone litigieuse. Ce document supporte une mention en commentaire indiquant « il n'y a pas assez de place sur la partie privative du lieu pour créer 3 places de stationnement en épi. Les voitures débordent sur la partie trottoir dédiée aux piétons. »

La mairie de [Localité 7] précise au surplus dans ses conclusions que son courrier n'a répondu à la Sarl Mds Investissements que sur la possibilité de réaliser les marquages des stationnements au sol, et en l'espèce l'impossibilité d'y procéder faute de place suffisante, sans se positionner sur la délimitation de la propriété des époux [K]. Elle maintient le caractère privatif de la zone de stationnement et renvoie à l'acte de vente du 4 décembre 1978 ayant établi les limites de propriété entre le domaine public et la propriété des bailleurs. Elle indique que la « tolérance » évoquée dans son courrier ne se rapportait qu'au fait que cette partie privative étant contiguë du domaine public, et en l'espèce prolongeant le trottoir, le stationnement n'y était toléré qu'autant qu'il permettait la libre circulation des piétons.

Il découle de l'analyse de l'ensemble de ces documents que les époux [K] sont bien propriétaires de la bande privative non construite jouxtant le local commercial sur sa gauche et permettant de garer, devant la vitrine, plusieurs véhicules sans que leur nombre ne soit précisé dans le bail ; que néanmoins cette bande, qui a fait l'objet d'un revêtement spécifique par la mairie lors des travaux d'aménagement du carrefour, prolonge le trottoir, lequel appartient au domaine public, de sorte que le stationnement ne pouvait qu'y être toléré par la mairie à la condition qu'il ne gêne pas la circulation des piétons.

C'est donc de manière justifiée que la mairie a indiqué à la locataire ne pouvoir y apposer des marquages réglementaires, le stationnement des véhicules débordant sur la voie publique, sur laquelle ni les époux [K], ni la Sarl Mds Investissements ne disposaient d'une autorisation d'occupation.

Dès lors, c'est en vain que l'appelante, qui ne rapporte pas la preuve de l'absence de propriété des bailleurs sur les parkings litigieux, soutient un dol dans la conclusion du bail commercial, les mentions de l'acte étant conformes à la topographie réelle des lieux et à leur statut juridique.

C'est également de manière inopérante que la locataire demande la révision rétroactive du loyer pour défaut de jouissance des places de stationnement mentionnées dans la mesure où ces places existaient et étaient mises à sa disposition, étant rappelé que le bail n'a jamais mentionné la capacité dudit parking. La Sarl Mds Investissements, qui avait toute latitude pour procéder à l'apposition de signes réservant lesdits stationnements à sa clientèle, ne produit aucune pièce au soutien de l'encombrement permanent de ces places par des tiers à son commerce. Dès lors, il n'est caractérisé aucun défaut de jouissance d'un des éléments du bail et sa demande de révision rétroactive du loyer de ce chef tout comme ses demandes indemnitaires appuyées sur les prétendues « fausses déclarations mentionnées au bail » sont rejetées.

Le jugement de première instance est confirmé en ce qu'il a débouté la Sarl Mds Investissements de ces demandes.

Sur la clause d'indexation figurant dans le bail commercial

La Sarl Mds Investissements soutient que le bail a prévu à la fois une révision triennale du loyer mais également une révision annuelle du loyer. Ces deux stipulations étant contradictoires, le bail déroge à l'ordre public et la locataire demande que la clause de révision annuelle du loyer soit réputée non écrite et que les bailleurs soient condamnés à lui restituer la somme de 2 010 euros TTC de loyers trop-versés en application de cette clause.

Les époux [K] affirment que l'article L 145-38 du code de commerce, qui ne vise que les révisions triennales des baux, n'est pas applicable en l'espèce puisqu'il y a été contractuellement dérogé par le biais d'une clause contractuelle de révision annuelle, dont ils soutiennent la validité, de sorte qu'il ne peut être fait droit à la demande de répétition de l'indu formée par l'appelante.

La révision du loyer en cours d'exécution du bail commercial est strictement encadrée par la loi. Cependant, les clauses contractuelles dites d'échelle mobile sont valides. L'article L145-38 du code de commerce régit la révision triennale du loyer tandis que l'article L145-39 du même code règlemente les clauses d'échelle mobile.

En l'espèce, le bail commercial du 2 mai 2017 mentionne dans son article « Révision légale du loyer » : « Le loyer sera indexé sur l'indice trimestriel des loyers commerciaux publié par l'Institut National de la Statistique et des Études Économiques. A cet effet, le réajustement, tant à la hausse qu'à la baisse, du loyer s'effectuera conformément aux dispositions de l'article L145-38 du code de commerce, tous les ans à la date anniversaire de l'entrée en jouissance. »

Il n'est fait aucune mention d'une révision triennale du loyer dans le reste du document.

La cour rappelle que les deux mécanismes peuvent se cumuler dans le même contrat de sorte que la contradiction avancée par la locataire n'est pas caractérisée.

Si l'article L145-39 du code de commerce et non l'article L145-38 du même code, devait être visé dans la clause litigieuse, l'absence de toute mention d'une révision triennale du loyer dans le reste du bail permet de conclure à la simple erreur matérielle.

Malgré cette erreur de plume, la clause, comme le contrat de bail en lui-même, étaient suffisamment clairs pour renseigner la Sarl Mds Investissements sur le mécanisme de révision du loyer applicable au bail, de sorte qu'il n'y a pas lieu de réputer non-écrite la clause d'indexation annuelle du loyer visée au contrat de bail. La demande formulée par l'appelante en répétition de l'indu fondée sur l'inapplicabilité de cette clause pendant le cours du bail est rejetée.

Le jugement de première instance est confirmé en ce qu'il a débouté la Sarl Mds Investissements de cette demande.

Sur la demande reconventionnelle des époux [K]

Les époux [K], avançant les manquements de leur locataire dans l'exécution de ses propres obligations contractuelles, sollicitent la condamnation de la Sarl Mds Investissements à leur verser la somme de 50 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation des préjudices subis de ce chef.

La Sarl Mds Investissements et la SCP Vitani-[I], es qualités, ne formulent aucune observation sur cette demande.

En l'espèce, la cour constate qu'une procédure de liquidation judiciaire a été ouverte en cours de procédure d'appel à l'encontre de la Sarl Mds Investissements par jugement du tribunal de commerce de Castres du 20 octobre 2023.

Les époux [K] ne justifient pas de la déclaration de leur créance relative au présent litige au passif de la procédure collective de la Sarl Mds Investissements. Les pièces complémentaires produites via le RPVA postérieurement à l'audience du 18 février 2025, sans autorisation de la cour de production d'une note en délibéré, ne sont pas recevables.

Il est jugé qu'en application des dispositions de l'article L. 622-22, alinéa 1, du code de commerce lorsque le débiteur est placé en liquidation judiciaire, les instances en cours sont interrompues jusqu'à ce que le créancier poursuivant ait procédé à la déclaration de sa créance et ne peuvent être reprises que sur justification de cette déclaration de créance. A défaut, la cour d'appel ne peut que constater que les conditions de la reprise d'instance ne sont pas réunies, et que, partant, elle ne peut statuer sur les demandes présentées par le créancier.

Les époux [K] ne justifient pas de leur déclaration de créance dans la procédure collective de la Sarl Mds Investissements. La cour constate donc que les conditions de la reprise d'instance ne sont pas réunies et qu'il ne peut donc être statué sur la demande des époux [K], et renvoie à l'audience de mise en état du 12 juin 2025, pour justifier de la déclaration de créances sous peine de radiation.

Sur les demandes accessoires,

Confirmé quasiment intégralement, le jugement de première instance le sera également sur ses dispositions relatives aux dépens et frais irrépétibles de première instance.

La Sarl Mds Investissements et la Scp Vitani-[I], es qualités, parties succombantes, seront condamnées in solidum aux dépens d'appel.

Les circonstances de l'espèce ne justifient pas qu'il soit alloué d'indemnités en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile. Les parties seront déboutées de leurs demandes formulées sur ce fondement.

PAR CES MOTIFS,

La Cour,

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a rejeté la demande reconventionnelle en dommages intérêts présentée par [D] [K] et [S] [Y] épouse [K],

Et, statuant à nouveau,

Constate que les conditions de la reprise d'instance, suspendue par l'ouverture de la liquidation judiciaire à l'encontre de la Sarl Mds Investissements, ne sont pas réunies et que, de ce chef, il ne peut être statué sur la demande reconventionnelle en allocation de dommages et intérêts formulée par les époux [K] à l'encontre de la Sarl Mds Investissements et de la Scp Vitani-[I], es qualités,

Dès lors, y ajoutant,

Renvoie sur ce seul point l'affaire à l'audience de mise en état du 12 juin 2025, afin que les époux [K] justifient de leur déclaration de créances sous peine de radiation,

Condamne la Sarl Mds Investissements et la Scp Vitani-[I], en qualité de mandataire liquidateur de la Sarl Mds Investissements, in solidum aux dépens d'appel,

Déboute la Sarl Mds Investissements, la Scp Vitani-[I], en qualité de mandataire liquidateur de la Sarl Mds Investissements, [S] [Y] épouse [K], [D] [K] et la Mairie de Castres de leurs demandes formées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

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