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Décisions

CA Nîmes, référés du pp, 23 mai 2025, n° 25/00023

NÎMES

Ordonnance

Autre

CA Nîmes n° 25/00023

23 mai 2025

COUR D'APPEL

DE NÎMES

REFERES

ORDONNANCE N°

AFFAIRE : N° RG 25/00023 - N° Portalis DBVH-V-B7J-JPNB

AFFAIRE : [M] [X], [X], S.A.S. SECRETS INTIMES C/ S.C.I. ISMA

JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT

ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ RENDUE LE 23 Mai 2025

A l'audience publique des RÉFÉRÉS de la COUR D'APPEL DE NÎMES du 25 Avril 2025,

Nous, S. DODIVERS, Présidente de Chambre à la Cour d'Appel de NÎMES, spécialement désignée pour suppléer le Premier Président dans les fonctions qui lui sont attribuées,

Assistée de Madame Véronique PELLISSIER, Greffière, lors des débats et lors du prononcé,

Après avoir entendu en leurs conclusions et plaidoiries les représentants des parties, dans la procédure introduite

PAR :

Madame [G] [M] [X]

née le 05 Septembre 1963 à [Localité 7]

[Adresse 6]

[Localité 5]

représentée par Me Frédéric MANSAT JAFFRE de la SELARL MANSAT JAFFRE, Postulant, avocat au barreau de NIMES,

représentée par Me Isabelle GARCIA DUCROS, Plaidant, avocat au barreau de MONTPELLIER

Monsieur [B] [X]

né le 28 Janvier 1964 à [Localité 8]

[Adresse 6]

[Localité 5]

représenté par Me Frédéric MANSAT JAFFRE de la SELARL MANSAT JAFFRE, Postulant, avocat au barreau de NIMES,

représenté par Me Isabelle GARCIA DUCROS, Plaidant, avocat au barreau de MONTPELLIER

S.A.S. SECRETS INTIMES

identifiée au SIREN sous le n° 904 505 203 et immatriculée au RCS de NIMES sous le n° 90450520300011

prise en la personne de son représentant légal en exercice audit siège

[Adresse 6]

[Localité 5]

représentée par Me Frédéric MANSAT JAFFRE de la SELARL MANSAT JAFFRE, Postulant, avocat au barreau de NIMES,

représentée par Me Isabelle GARCIA DUCROS, Plaidant, avocat au barreau de MONTPELLIER

DEMANDEURS

S.C.I. ISMA

identifiée au SIREN sous le n° 479745192 et immatriculée au RCS de NIMES sous le n° 479 745 192

prise en la personne de ses co-gérants en exercice domiciliés ès qualités audit siège

[Adresse 1]

[Localité 4]

représentée par Me Christine GELY-MAY, avocat au barreau d'ALES

DÉFENDERESSE

Maître [N] [K]

agissant en qualité de mandataire judiciaire de la SOCIETE SECRETS INTIMES SA, nommé à ces fonctions suivant jugement rendu par le Tribunal de Commerce de NIMES en date du 12 février 2025

INTERVENANT VOLONTAIRE

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Localité 3]

représenté par Me Frédéric MANSAT JAFFRE de la SELARL MANSAT JAFFRE, Postulant, avocat au barreau de NIMES,

représenté par Me Isabelle GARCIA DUCROS, Plaidant, avocat au barreau de MONTPELLIER

INTERVENANT

Avons fixé le prononcé au 23 Mai 2025 et en avons ensuite délibéré conformément à la loi ;

A l'audience du 25 Avril 2025, les conseils des parties ont été avisés que l'ordonnance sera rendue par sa mise à disposition au Greffe de la Cour le 23 Mai 2025.

EXPOSE DU LITIGE

Par jugement du 10 janvier 2025, assorti de l'exécution provisoire, le tribunal judiciaire d'Alès a, entre autres dispositions, :

Débouté la SAS Secrets Intimes de l'intégralité de ses demandes ;

Prononcé la résiliation du bail signé le 10 novembre 2021 entre la SCI Isma et la SAS Secrets Intimes pour inexécution contractuel du locataire à compter de la présente décision ;

Ordonné l'expulsion de la SAS Secrets Intimes avec obligation de remettre les clés dans un délai de 15 jours à compter de la signification de la présente décision ;

Dit que passé ce délai, la SAS Secrets Intimes sera redevable envers la SCI Isma d'une astreinte provisoire de 60 ' par jour de retard ;

Dit que l'astreinte provisoire court pendant un délai maximum de 4 mois, à charge pour la SCI Isma à défaut pour la SAS Secrets Intimes d'avoir quitté les lieux et remis les clés dans un délai de 15 jours à compter de la signification du présent jugement, de solliciter du juge de l'exécution la liquidation de l'astreinte provisoire et le prononcé d'une astreinte définitive ;

Condamné la SAS Secrets Intimes à payer à la SCI Isma la somme de 13.252,1 1' pour les loyers et charges impayés depuis décembre 2023 et jusqu'au présent jugement, assortis des intérêts de retard au taux légal à compter du 11 avril 2024 ;

Condamné la SAS Secrets Intimes à payer à la SCI Isma la somme de 761 euros au titre de la pénalité de 3% du montant de chacune des sommes dues en vertu du contrat de bail et payées avec retard ou non payées, du mois de décembre 2023 jusqu'au présent jugement, assortie des intérêts de retard au taux légal à compter de la présente décision ;

Ordonné la capitalisation des intérêts ;

Dit que le dépôt de garantie versé par la SAS Secrets Intimes restera acquis à la SCI Isma ;

Ordonné que les paiements effectués par la SAS Secrets Intimes à la SCI Isma s'imputeront prioritairement sur les frais et honoraires de recouvrement, de procédure et de justice, sur les intérêts, dommages et intérêts, ajustement de l'avance de la provision pour charges, dépôt de garantie, réajustement du dépôt de garantie, éventuelle indemnité d'occupation, puis seulement ensuite sur les loyers ;

Condamné la SAS Secrets Intimes aux entiers dépens ;

Condamné la SAS Secrets Intimes à payer à la SCI Isma la somme de 3.000 euros ;

Débouté la SCI Isma du surplus de ses demandes.

Mme [G] [M] [X], M. [B] [X] et la SAS Secrets Intimes ont interjeté appel de ces dispositions par déclaration en date du 30 janvier 2025.

Par exploit de commissaire de justice en date du 11 février 2025, arguant de l'existence de moyens sérieux de réformation soumis à la cour d'appel au fond et d'un risque de conséquences manifestement excessives qui se sont révélées postérieurement à la décision de première instance, Mme [G] [M] [X], M. [B] [X] et la SAS Secrets Intimes ont fait assigner la SCI Isma devant le premier président sur le fondement de l'article 514-3 du code de procédure civile afin de voir arrêter l'exécution provisoire attachée au jugement rendu le 10 janvier 2025 par le tribunal judiciaire d'Alès, condamner la SCI Isma à leur payer la somme de 1 000 euros au titre des frais irrépétibles par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

La société Secrets Intimes a été placée en redressement judiciaire par jugement en date du 12 février 2025 rendu par le tribunal de commerce de Nîmes.

A l'appui de ses prétentions, la société Secrets Intimes représentée par son mandataire par conclusions du 19 mars 2025, invoque l'existence de moyens sérieux d'annulation ou de réformation de la décision contestée tenant :

l'appréciation insuffisante du trouble de jouissance par le tribunal qui n'a pas pris en compte les désordres affectant l'exploitation du local donné à bail, n'ayant retenu que les preuves produites après sa saisine,

la qualification insuffisante du maçon et de l'architecte lesquels n'avaient pas les qualifications nécessaires à l'établissement d'un diagnostic d'une structure et attester de la solidité structurelle d'un bâtiment,

le retard dans l'exécution des travaux de toiture lesquels ont été réalisés par la saisine du tribunal et ne remédient pas aux désordres constatés antérieurement,

le dol commis par le bailleurs qui les a amenés à déposé une plainte ordinale adressée au Président du Conseil régional des Notaires du ressort de la cour d'appel de Nîmes.

Ils soutiennent également l'existence de conséquences manifestement excessives en ce que la SAS Secrets Intimes est dans une situation financière très difficile et qu'elle est donc dans l'impossibilité de payer les sommes prononcées par le tribunal judiciaire d'Alès aux termes de sa décision du 10 janvier 2025, étant relevé que celle-ci a été placée en redressement judiciaire.

Par ailleurs, la situation financière de M. et Mme [X], en qualité de cautions, est obérée, ayant mis toutes leurs économies dans la SAS Secrets Intimes.

La société Isma dans ses écritures transmises par RPVA le 23 avril 2025, sollicite de voir :

- DECLARER IRRECEVABLES et dans tous les cas non fondées, les demandes de monsieur [X], de madame [M] épouse [X], de la SA SECRETS INTIMES et de maître [K] ;

- ECARTER des débats la pièce n°37 renumérotée 36 communiquée par monsieur [X], madame [M] épouse [X], la SAS SECRETS INTIMES et maître [K] ;

- FIXER à l'encontre de la SAS SECRETS INTIMES, une créance au profit de la SCI ISMA de 2 500 ' à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive ;

- CONDAMNER in solidum madame [M] épouse [X] et monsieur [X] à payer à la SCI ISMA, la somme de 2 500 ' à titre de dommages et intérêts chacun pour procédure abusive ;

- FIXER à l'encontre de la SAS SECRETS INTIMES, une créance au profit de la SCI ISMA de 2 500 ' sur le fondement de l'article 700 du code de procédure judiciaire ;

- CONDAMNER in solidum madame [M] épouse [X] et monsieur [X] à payer à la SCI ISMA, la somme de 2 500 ' chacun sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- FIXER à l'encontre de la SAS SECRETS INTIMES, une créance au profit de la SCI ISMA correspondant au montant des entiers dépens sur le fondement de l'article 696 du code de procédure civile ET au titre des droits proportionnels de recouvrement et d'encaissement prévus à l'article L 111'8 du code des procédures civiles d'exécution et à l'article A 444-31 et A 444 32 du code de commerce qui seront dus pour la présente procédure ;

- CONDAMNER in solidum madame [M] épouse [X] et monsieur [X] aux entiers dépens sur le fondement de l'article 696 du code de procédure civile ET au titre des droits proportionnels de recouvrement et d'encaissement prévus à l'article L 111'8 du code des procédures civiles d'exécution et à l'article A 444-31 et A 444-32 du code de commerce ;

- CONDAMNER in solidum monsieur et madame [X] aux entiers dépens sur le fondement de l'article 696 du code de procédure civile ET au titre des droits proportionnels de recouvrement et d'encaissement prévus à l'article L 111'8 du code des procédures civiles d'exécution et à l'article A 444-31 et A 444-32 du code de commerce .

Elle soulève l'irrecevabilité des demandes formées par Monsieur et Madame [X] en ce que le jugement ne leur est pas applicable.

Elle soulève en outre l'irrecevabilité des demandes des demandeurs et de Maître [K] en raison des dispositions de l'article L622-21 du code de commerce qui interdit toute action injustice de la part de tous les créanciers dont la créance n'est pas mentionnée au 3.I de l'article L.622-17, et des dispositions de l'article L.622-28 du code de commerce qui prévoit que le jugement d'ouverture arrête le cours des intérêts légaux et conventionnels ainsi que de tout intérêt de retard et majorations ainsi que toute action contre les personnes physiques co-obligées ou ayant consenti une sûreté personnelle.

Elle en déduit que la procédure de redressement judiciaire ouverte enlève tout intérêt au demandeur de solliciter l'arrêt de l'exécution provisoire, et conclut au caractère inutile et abusif de la présente procédure.

Par référence à l'article 455 du code de procédure civile, il est expressément renvoyé aux conclusions déposées par chacune des parties pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions.

SUR CE :

- Sur l'arrêt de l'exécution provisoire :

En l'espèce, le jugement du 10 janvier 2025 dont appel est assorti de l'exécution provisoire de droit. A ce titre, l'article 514-3 du code de procédure civile dispose :

'En cas d'appel, le premier président peut être saisi afin de d'arrêter l'exécution provisoire de la décision lorsqu'il existe un moyen sérieux d'annulation ou de réformation et que l'exécution risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives.

La demande de la partie qui a comparu en première instance sans faire valoir d'observations sur l'exécution provisoire n'est recevable que si, outre l'existence d'un moyen sérieux d'annulation de réformation, l'exécution provisoire risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives qui se sont révélées postérieurement à la décision de première instance. »

Ainsi, pour obtenir gain de cause devant le premier président, les appelants doivent rapporter la preuve que les deux conditions cumulatives du premier alinéa de l'article précité sont réunies.

Sur la recevabilité de la demande

Aux termes des dispositions de l'article 122 du code de procédure civile, constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfixe, la chose jugée.

Aux termes des dispositions de l'article L 622-21 du code de commerce :

« I - Le jugement d'ouverture interrompt ou interdit toute action en justice de la part de tous les créanciers dont la créance n'est pas mentionnée au I de l'article L. 622-17 et tendant :

1° A la condamnation du débiteur au paiement d'une somme d'argent ;

2° A la résolution d'un contrat pour défaut de paiement d'une somme d'argent.

II - Sans préjudice des droits des créanciers dont la créance est mentionnée au I de l'article L. 622-17, le jugement d'ouverture arrête ou interdit toute procédure d'exécution tant sur les meubles que sur les immeubles ainsi que toute procédure de distribution n'ayant pas produit un effet attributif avant le jugement d'ouverture' »

En vertu de l'article L622-28 du code de commerce :

« 'Le jugement d'ouverture suspend jusqu'au jugement arrêtant le plan ou prononçant la liquidation toute action contre les personnes physiques coobligées ou ayant consenti une sûreté personnelle ou ayant affecté ou cédé un bien en garantie. Le tribunal peut ensuite leur accorder des délais ou un différé de paiement dans la limite de deux ans.

Les créanciers bénéficiaires de ces garanties peuvent prendre des mesures conservatoires. »

Il résulte de ce qui précède que l'ensemble des parties dont on ne connaît pas véritablement la qualité à agir, ne dispose d'aucun intérêt à solliciter la suspension de l'exécution provisoire de la décision appelée puisque par l'effet de l'ouverture de la procédure collective, cette suspension est automatique par application des dispositions du code de commerce.

En conséquence de quoi, la présente demande de suspension de l'exécution provisoire de la décision rendue par le tribunal judiciaire d'Alès le 10 janvier 2025 est déclaré irrecevable.

Sur la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive

La demande de dommages et intérêts doit être examinée au regard des dispositions de l'article 1382 devenu 1240 du Code civil.

Or, en application des dispositions dudit article, l'exercice d'une action en justice de même que la défense à une action constitue un droit et cet exercice ne dégénère en abus que s'il constitue un acte de malice ou de mauvaise foi ou s'il s'agit d'une erreur grossière équipollente au dol.

Les pièces produites aux débats ne permettent pas d'établir une faute commise par les défendeurs de nature à entraîner une quelconque indemnisation de la SCI Isma sur ce fondement, étant au surplus rappelé que le simple fait d'ester en justice n'est pas constitutif d'un abus de droit en l'absence d'intention de nuire ou de légèreté blâmable.

En conséquence, il convient de débouter la SCI Isma de sa demande de dommages et intérêts.

Sur les frais irrépétibles et les dépens

Les circonstances de la cause et l'équité justifient de condamner in solidum Madame [G] [M] épouse [X] et Monsieur [B] [X] à payer à la SCI Isma la somme de 3 000 ' sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ces mêmes circonstances justifiant qu'il ne soit pas fait application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile à l'endroit de la SAS Secrets Intimes.

Madame [G] [M] épouse [X] et Monsieur [B] [X] qui succombent supporteront la charge des entiers dépens de la présente procédure.

PAR CES MOTIFS

Nous S. Dodivers statuant sur délégation du premier président de la cour d'appel de Nîmes, en référé, par ordonnance contradictoire, en dernier ressort et mise à disposition au greffe,

DECLARONS la demande de suspension de l'exécution provisoire de la décision rendue par le tribunal judiciaire d'Alès le 10 janvier 2025 irrecevable,

DEBOUTONS la SCI Isma de sa demande de dommages et intérêts,

DEBOUTONS la SCI Isma de sa demande d'application des dispositions de l'article 700 à l'endroit de la société Secrets Intimes,

CONDAMNONS Madame [G] [M] épouse [X] et Monsieur [B] [X] in solidum à payer à la SCI Isma la somme de 3 000 ' sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamnons Madame [G] [M] épouse [X] et Monsieur [B] [X] in solidum aux dépens de la présente procédure.

Ordonnance signée par Madame S. DODIVERS, Présidente de Chambre, et par Madame Véronique PELLISSIER, Greffière, présente lors du prononcé.

LA GREFFIERE

LA PRÉSIDENTE

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