CA Dijon, 2e ch. civ., 22 mai 2025, n° 22/00599
DIJON
Arrêt
Infirmation partielle
PARTIES
Demandeur :
Allwork (SASU)
Défendeur :
Ddgi (SARL)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Blanchard
Conseillers :
Mme Bailly, Mme Charbonnier
Avocats :
Me Campanaud, Me Caldara, SCP Soulard-Raimbault, Me Soulard, Me Grammont
EXPOSE DU LITIGE :
La société DDGI exploite sous l'enseigne VIP Studio 360 une activité de visites virtuelles à 360° et photos.
Depuis 2014, elle a développé un réseau de franchisés pour l'exploitation de quatre marques déposées : VIP Studio 360°, VIP Premium 360, VIP Luxury 360 et Groupe VIP 360.
Par acte sous seing privé en date du 23 décembre 2016, M. [E] [S] a conclu avec la société DDGI un contrat de franchise d'une durée de cinq ans à compter du 1er septembre 2017, sur la zone géographique du département de l'Isère, moyennant un droit d'entrée de 36.000 euros HT et assorti d'une clause de substitution au profit de toutes personnes morales dont il serait dirigeant et associé.
Le contrat stipulait :
- le versement de redevances mensuelles égale à 15 % HT du chiffre d'affaires mensuel au titre de la concession des marques,
- le paiement d'une rémunération égale à 20 % HT du chiffre d'affaires mensuel au titre des prestations techniques de post- production,
ainsi que l'engagement du franchisé de verser au franchiseur un minimum de 700 euros HT par mois.
Le 14 août 2017, M. [S] a immatriculé la SAS Allwork dont il assure la présidence, pour une activité de consulting en marketing digital.
Estimant que le site internet de la société Allwork ne se conformait pas à plusieurs règles fondamentales de son réseau de franchisés, la société DDGI lui a adressé, le 7 novembre 2018, une mise en demeure de régulariser la situation.
A la fin de l'année 2018, les relations se sont dégradées entre la société DDGI et sept de ses franchisés, dont M. [S], qui ont sollicité une réunion avec le franchiseur aux fins de lui soumettre diverses questions relatives au fonctionnement du réseau et qui ont ensuite initié diverses procédures à son encontre.
Par courrier du 22 mars 2019, la société DDGI a résilié le contrat de franchise en application de l'article 19.1 du contrat, compte tenu de la réalisation par la société Allwork
d'un chiffre d'affaires annuel inférieur à 30.000 euros sur la période du 1er mars 2018 au 28 février 2019.
Par jugement du 30 juillet 2019, le tribunal de commerce d'Antibes a ouvert une procédure de sauvegarde à l'égard de la société DDGI, désignant Me [G] en qualité de mandataire judiciaire.
Le 7 août 2019, la société Allwork a déclaré une créance de 51.178,51 euros au passif de la société DDGI.
Par acte d'huissier du 5 mars 2020, la société Allwork a assigné la société DDGI en nullité, subsidiairement en résiliation, du contrat de franchise et en fixation de sa créance au passif de la société DDGI pour un montant total de 45.905,29 euros.
Par un jugement en date du 24 mars 2022, le tribunal de commerce de Dijon a :
- condamné la SASU Allwork au paiement de la somme de 1.585,80 euros au titre des factures de redevances impayées, augmentée des intérêts de retard égal à trois fois le taux de l'intérêt légal à compter de leur date d'échéance ;
- condamné la SASU Allwork au paiement de la somme de 8.400 euros au titre de la facture émise en réparation de la restitution tardive du matériel, augmentée des intérêts de retard égal à trois fois le taux de l'intérêt légal à compter de sa date d'échéance ;
- condamné la SASU Allwork au paiement de la somme de 40 euros par facture impayée au titre de l'indemnité forfaitaire de recouvrement, soit 160 euros ;
- condamné la SASU Allwork à payer la somme de 28.700 euros à la société en réparation de la rupture anticipée du contrat de franchise à ses torts ;
- débouté la SASU Allwork de sa demande de paiement de la somme de 14.300 euros en réparation de la violation de la clause de non- concurrence prévue à l'article 21 du contrat de franchise ;
- ordonné à la SASU Allwork de cesser d'utiliser toute référence aux réalisations effectuées sous l'offre VIP 360 et de cesser toute confusion avec le réseau et les offres VIP 360 ;
- dit que l'exécution provisoire de la présente décision est de droit et ne l'a pas écartée;
- condamné la SASU Allwork au paiement de la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamné la SASU Allwork aux entiers dépens, en ce compris les frais de greffe ;
- dit toutes autres demandes, fins et conclusions des parties injustifiées et en tout cas mal fondées, et les en a débouté.
Par déclaration au greffe du 11 mai 2022, la SASU Allwork a relevé appel de cette décision, sauf en ce qu'elle a rejeté la demande en paiement de la somme de 14.300 euros en réparation de la violation de la clause de non-concurrence prévue à l'article 21 du contrat de franchise.
Par ordonnance du 25 octobre 2022, la première présidente de cette cour a arrêté l'exécution provisoire attachée au jugement dont appel.
Selon les termes de ses dernières écritures (n°2) notifiées le 9 septembre 2024, la SASU Allwork demande à la cour , au visa des articles 1103 et 1104, 1128, 1130 du code civil, L.330-1 et R.330-1 alinéa 4 du code de commerce,
- infirmer le jugement du 24 mars 2022 en ce qu'il a rejeté les demandes formulées par la société Allwork à l'encontre de la société DDGI ;
- le confirmer en ce qu'il a rejeté la demande de la société DDGI de voir condamnée la société Allwork au paiement d'une somme de 14.300 euros en réparation de la violation de la clause de non-concurrence prévue à l'article 21 du contrat de franchise;
statuant à nouveau,
à titre principal :
- juger que le prétendu savoir-faire de la société DDGI, devant présenter un caractère secret et substantiel, faisait défaut ;
- juger que le document d'information pré-contractuelle remis par la société DDGI à la société Allwork ne contenait pas toutes les informations requises par le décret n°91-337 du 4 avril 1991 ;
- juger que le consentement de la société Allwork a été vicié ;
- prononcer la nullité du contrat de franchise en date du 23 décembre 2016 entre la société Allwork et la société DDGI ;
- fixer au passif de la société DDGI la somme de 45.905,29 euros au titre de la restitution des droits d'entrée et redevances acquittés par la société Allwork,
à titre subsidiaire :
- juger que la société DDGI a manqué à son obligation de bonne foi et de loyauté;
- juger que la société DDGI a manqué à ses obligations contractuelles et notamment à son obligation d'assistance ;
- juger qu'elle a engagé sa responsabilité ;
- fixer au passif de la société DDGI la somme de 45.905,29 euros à titre de dommages et intérêts au bénéfice de la société Allwork ;
en toutes hypothèses :
- infirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société Allwork au paiement des sommes suivantes :
1.585,80 euros au titre des factures de redevances impayées, augmentée des intérêts de retard égal à 3 fois le taux de l'intérêt légal à compter de leur date d'échéance ;
8.400 euros au titre de la facture émise en réparation de la restitution tardive du matériel, augmentée des intérêts de retard égal à 3 fois le taux de l'intérêt légal à compter de leur date d'échéance ;
40 euros par facture impayée au titre de l'indemnité forfaitaire de recouvrement, soit 160 euros ;
28.700 euros au titre de la réparation de la rupture anticipée du contrat de franchise à ses torts ;
5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
aux entiers dépens de l'instance et ce compris les frais de greffe ;
statuant à nouveau,
- juger que la société DDGI a inexécuté des obligations contractuelles et que la société Allwork est fondée à invoquer l'exception d'inexécution ;
- juger que la société DDGI est infondée à réclamer quelque somme que ce soit au titre de la restitution tardive du matériel ;
- juger que la société DDGI a rompu de sa propre initiative le contrat de franchise et ne peut prétendre solliciter la condamnation de la société Allwork à des dommages et intérêts ;
- juger qu'il est inéquitable de faire supporter à la société Allwork la charge des frais engagés par la société DDGI en première instance ;
- rejeter toutes les demandes de la société DDGI comme étant infondées ;
- condamner la société DDGI à verser à la société Allwork la somme de 6.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
Par dernières conclusions (n°2) notifiées le 16 septembre 2024, la société DDGI entendent voir, sur le fondement des articles 910-4 du code de procédure civile, 1134, 1147 'anciens' du code civil, 1315 devenu 1353, 1217 et 1240 du code civil, de :
- juger les demandes de la société Allwork irrecevables,
- réformer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Dijon le 24 mars 2022 en ce qu'il a débouté la société DDGI de sa demande de paiement de la somme de 14.300 euros en réparation de la violation de la clause de non-concurrence prévue à l'article 21 du contrat de franchise ;
- confirmer ledit jugement en toutes ses autres dispositions ;
statuant à nouveau,
- condamner la société Allwork à payer à la société DDGI la somme de 14.300 euros en réparation de la violation de la clause non-concurrence prévue à l'article 21 du contrat de franchise ;
en tout état de cause :
- débouter la société Allwork de toutes ses demandes, fins et conclusions ;
- condamner la société Allwork à verser à la société DDGI la somme de 5.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles d'appel ;
- la condamner aux entiers dépens d'appel.
Bien que constitué devant la cour, Maître [G] n'a pas déposé de conclusions.
En application de l'article 455 du code de procédure civile, il convient de se référer aux conclusions susvisées pour l'exposé des moyens des parties.
La procédure a été clôturée par ordonnance du 17 septembre 2024.
MOTIFS DE LA DECISION :
1°) sur la fin de non-recevoir :
La société DDGI soulève l'irrecevabilité des demandes formées à son encontre par la société Allwork aux motifs que dans ses premières écritures, elles tendaient à sa condamnation alors qu'une procédure collective ayant été antérieurement ouverte à son encontre, elles ne peuvent aboutir qu'à la fixation au passif et que cette fin de non-recevoir ne peut être régularisée par des conclusions postérieures en violation des dispositions de l'article 910-4 du code de procédure civile.
La société Allwork n'a pas répliqué sur ce point.
La procédure de sauvegarde a été ouverte le 30 juillet 2019 et un plan de sauvegarde a été arrêté le 12 janvier 2021.
En vertu de l'article L.622-22 du code de commerce, l'instance engagée à l'encontre de la société DDGI ne pouvait tendre qu'à la constatation de la créance et à la fixation de son montant.
L'article 910-4 du code de procédure civile dispose qu'à peine d'irrecevabilité, relevée d'office, les parties doivent présenter, dès les conclusions mentionnées aux articles 905-2 et 908 à 910, l'ensemble de leurs prétentions sur le fond. Néanmoins, et sans préjudice de l'alinéa 2 de l'article 802, demeurent recevables, dans les limites des chefs du jugement critiqués, les prétentions destinées à répliquer aux conclusions et pièces adverses ou à faire juger les questions nées, postérieurement aux premières conclusions, de l'intervention d'un tiers ou de la survenance ou de la révélation d'un fait.
La société Allwork a relevé appel le 11 mai 2022 et selon les termes de ses premières conclusions déposées le 21 juillet 2022 dans le délai de l'article 908 du code de procédure civile, elle a sollicité la condamnation de la société DDGI à lui payer la somme 45.905,29 euros à titre de dommages et intérêts.
Si dans ses dernières écritures, elle a sollicité la fixation de cette somme au passif de la procédure collective, cette prétention qui ne répliquait pas aux conclusions de l'intimée est en conséquence irrecevable.
2°) sur la nullité du contrat de franchise :
L'article 1128 du code civil, dans sa rédaction issue de l'ordonnance du 10 février 2016, dispose que : « Sont nécessaires à la validité d'un contrat : 1° Le consentement des parties ; 2° Leur capacité de contracter ; 3° Un contenu licite et certain. »
Selon les termes du contrat de franchise signé le 23 décembre 2016, la société DDGI a concédé au franchisé l'usage des marques et du savoir-faire, ainsi que le droit d'exploitation de l'Offre VIP 360° à titre exclusif sur le département de l'Isère.
La société Allwork se prévaut de la nullité du contrat de franchise aux motifs que :
- le franchiseur ne lui a transmis aucun savoir-faire commercial et technique de nature à leur procurer un avantage concurrentiel,
- le savoir- faire allegué est dépourvu de caractère substantiel et de rentabilité,
- son consentement a été vicié en raison d'un document d'information pré- contractuel trop succinct, ne présentant pas de manière suffisante l'état du marché et la part occupée par le franchiseur et ne fournissant aucune information relative au marché local.
La société DDGI considère qu'elle a mis à la disposition de son franchisé un savoir-faire commercial, administratif et technique de consultant en marketing numérique décrit dans la « bible » qu'elle lui a fournie et dont le contenu a été enrichi au cours de l'exécution du contrat, ainsi que d'outils que les franchisés ne pouvaient acquérir seuls.
Elle conteste être tenue d'une obligation de garantir le succès et la rentabilité de l'activité et considère d'une part que le consentement du franchisé n'a pas été vicié, le document d'information pré-contractuel comportant une analyse suffisante du marché local et lui conseillant de procéder à la réalisation d'une étude et d'un prévisionnel, d'autre part que le caractère déterminant des informations manquantes n'est pas démontré.
a) sur l'existence d'un savoir-faire substantiel :
La société DDGI se présente comme une spécialiste de la visite virtuelle, activité qu'elle exerce depuis 2012, et, selon les captures d'écran de son site web, experte en marketing digital et réalité virtuelle, proposant « grâce à un savoir-faire unique à 360° », de capter de nouveaux clients : « en leur offrant une expérience immersive, attractive et ludique ».
Une coupure de presse la présente comme distinguée au palmarès des entreprises techs françaises établi par le média Frenchweb.
Dans le document d'information pré-contractuel qu'elle a remis à M. [S], la société DDGI présente la technique de la visite virtuelle 360° comme un moyen incontournable de visibilité et d'une efficacité qui : « peut être redoutable si la qualité est élevée ».
La société DDGI précise encore que : « selon notre concept du 360°, l'atteinte d'un haut niveau de qualité et de services impose de respecter certaines règles : temps de chargement très rapide, qualité Full HD, produit unique et personnalisé (nombreuses options),scénario métier bien réfléchi, temps de réalisation très rapide, compatibilité totale sur tous les supports... »
Demanderesse à la nullité, la société Allwork supporte la charge de la preuve de l'absence, malgré ce descriptif, d'un réel savoir-faire, défini comme un ensemble d'informations pratiques non brevetées, résultant de l'expérience du franchiseur et testées par celui-ci, ayant un caractère secret, substantiel et identifié.
Si les différents éléments du savoir-faire exposées dans la « bible » du franchiseur, qu'ils soient technologiques, commerciaux ou administratifs, ne présentent séparément aucune originalité et pouvaient être connus du franchisé par leur diffusion dans le public qu'il s'agisse de techniques commerciales connues, de logiciels informatiques ou de matériels photographiques, il ressort des éléments soumis à la cour que la société DDGI a développé, à partir de sa propre expérience de consultant en web-marketing spécialisé en visite virtuelle, une méthodologie issue de la combinaison des techniques digitale et commerciale ainsi que de la détermination des options technologiques les plus adaptées à la qualité du résultat qu'elle a souhaité offrir à sa clientèle.
Contrairement à ce qu'affirme la société Allwork, il s'agit bien d'un savoir-faire reproduisant les techniques ayant permis la réussite de la société DDGI qui, par la mise à disposition d'un process 'clef-en-mains', permet à ses franchisés d'exercer une activité de consultant en marketing digital en bénéficiant du support d'une marque établie (VIP 360°), d'un plateau technique constitué d'un prêt de matériel photographique, d'un service de traitement des images et de standards de qualité du produit fini, en les dispensant de l'acquisition préalable de la maîtrise des technologies digitales requises et des tâtonnements dans le choix et la mise en 'uvre des matériels.
En les rendant, par ces supports, immédiatement autonomes dans leur démarche commerciale, ce savoir-faire confère bien aux franchisés un avantage concurrentiel, facilitant le démarrage de leur activité.
Si le franchiseur s'oblige à la transmission d'un savoir-faire, il n'est pas garant des résultats de l'activité de son franchisé, entrepreneur indépendant, libre d'organiser son activité, et c'est à tort que la société Allwork entend déduire de la clause de résiliation anticipée du contrat en cas de réalisation par le franchisé d'un chiffre d'affaires annuel inférieur à 30.000 euros HT, que la société DDGI lui garantissait un volume d'affaires au moins égal à cette somme, alors que cette stipulation ne vise manifestement qu'à caractériser un manquement du franchisé dans son obligation de participer au développement du réseau.
La cour relève que ni le contrat, ni le document d'information pré-contractuel ne contiennent de prévisions de chiffre d'affaires, mais que c'est M. [S] qui a fait réaliser par un expert comptable un prévisionnel d'activité déterminant un chiffre d'affaires de 75.000 euros la première année et de 100.000 euros la seconde.
En conséquence, le contenu du contrat de franchise portant sur la transmission d'un savoir-faire substantiel procurant au franchisé un avantage concurrentiel, la nullité ne saurait être prononcée.
b) sur le document d'information pré-contractuel :
L'article L.330-3 du code de commerce impose à toute personne mettant à la disposition d'une autre un nom commercial, une marque ou une enseigne, en exigeant d'elle un engagement d'exclusivité ou de quasi-exclusivité pour l'exercice de son activité, préalablement à la signature de tout contrat, de lui fournir un document donnant des informations sincères, qui lui permette de s'engager en connaissance de cause.
L'article R.330-1 du même code dresse la liste des informations que doit contenir le document d'information pré-contractuel, au rang desquelles l'identité, l'ancienneté, l'expérience du franchiseur, l'état et les perspectives de développement du marché concerné, l'importance du réseau d'exploitants, ainsi que les principales clauses du contrat de franchise dont la conclusion est envisagée.
Il est de principe que la violation de l'obligation pré-contractuelle d'information définie par ces dispositions peut entraîner la nullité du contrat de franchise, si elle a provoqué un vice du consentement du candidat à l'affiliation au réseau.
Le document d'information pré-contractuel décrit le marché dans lequel s'inscrit l'activité de la société DDGI comme constitué de la plupart des professionnels en recherche de visibilité sur internet et au travers des nouvelles technologies. Il chiffre le potentiel à 100.000 cibles en immobilier et 35.000 cibles en hôtellerie traditionnelle, précisant que la technique de visite virtuelle est adaptable à presque toutes les activités, dont il dresse une liste exhaustive.
Il dresse également un état de la concurrence tant nationale que locale constituée des photographes indépendants, du réseau Google, de HDMedias et de différents réseaux.
Le document précise les perspectives de développement du marché par segments géographiques basées sur le critère des activités d'hébergement touristique et de l'immobilier et renvoie à une annexe 6 intitulée : « zone d'implantation géographique » que la société Allwork ne verse pas aux débats, ayant limité sa production aux trois premières annexes.
La cour ne peut en conséquence que constater que le document d'information pré-contractuel comportait bien une présentation du marché local que le franchisé avait néanmoins la responsabilité, en sa qualité d'entrepreneur indépendant, de compléter d'une étude de marché plus approfondie et d'un prévisionnel d'activité qu'elle a fait réaliser par la société d'expertise comptable Axea.
La société Allwork ne démontre pas que le document d'information pré-contractuel l'a privée d'éléments déterminants de son consentement de sorte que la nullité pour vice du consentement n'est pas encourue.
3°) sur les manquements de la société DDGI :
La société Allwork soutient que la société DDGI n'a pas rempli ses obligations contractuelles lui imputant :
- un défaut d'assistance en l'absence de propositions de formation, d'animation du réseau et d'intervention face aux difficultés rencontrées dans la mise en 'uvre de la franchise,
- la facturation d'une rémunération de prestations techniques sans réelle contrepartie et constituant une redevance déguisée d'un montant excessif privant le franchisé d'une part raisonnable de ses bénéfices,
- l'exécution par le franchiseur de prestations dans la zone d'implantation exclusive du franchisé.
La société DDGI conteste les manquements qui lui sont reprochés aux motifs que :
- l'assistance du franchiseur n'est qu'une obligation de moyen et elle a fait le nécessaire en proposant des formations, des réunions et en animant son réseau ,
- elle n'a commis aucun abus dans le montant des redevances qui laissaient une marge de 65% au franchisé,
- elle n'a commis aucune faute dans sa gestion du conflit qui l'a opposée à sept franchisés.
Dans un courrier qu'il a co-signé le 9 octobre 2018, M. [S], dirigeant de la société Allwork, a fait part à la société DDGI de ses doléances parmi lesquelles figuraient, le défaut d'assistance du franchiseur, l'absence de formation technique continue et d'informations et l'absence d'un véritable réseau.
Selon les termes du contrat de franchise, la société DDGI s'est engagée à proposer en cours de contrat des formations complémentaires s'il le juge utile et l'article 7 consacre succinctement son assistance technique et commerciale en la limitant : « aux prestations prévues à sa charge dans le mode opératoire ou « process » figurant dans la Bible ».
La société DDGI justifie que son site internet est alimenté d'une offre de : « formations technique et réseaux sociaux » , sous forme de dossiers thématiques, ainsi que de fiches métiers présentant des argumentaires de vente par catégories de clients cibles, de messages types, tutoriels, plans de prise de vues et de montage, mis en ligne sur son site entre 2016 et 2021.
Elle justifie également de la mise en 'uvre de modules de formations et de réunions régionales de formation en 2017, 2019 et 2020.
Si aucune ne fait apparaître la société Allwork et son dirigeant, M.[S], ce dernier ne rapporte pas la preuve d'avoir, pendant l'exécution du contrat de franchise, sollicité de formation, d'aide ou de conseils de la part de la société DDGI, dont l'obligation d'assistance ne peut s'envisager que de manière personnalisée, dès lors qu'elle vise à apporter au franchisé une individualisation du savoir -faire à la situation particulière de son fonds de commerce.
Les revendications portées par le courrier du 9 octobre 2018 ne concernaient donc pas l'obligation d'assistance du franchiseur et visaient en réalité par leur nature à remettre en cause le modèle économique du contrat de franchise proposé par la société DDGI, ce que rejoignent les doléances exprimées par la société Allwork quant au montant des redevances contractuelles qu'elle estime abusives.
A ce titre, si elle ne peut valablement rechercher la responsabilité contractuelle de la société DDGI à raison d'une inadéquation du prix à la prestation fournie créant un déséquilibre significatif, le contrôle du contenu du contrat n'étant pas permis sur les clauses de prix.
Enfin, si la société Allwork se prévaut d'une violation par le franchiseur de la clause d'exclusivité contractuelle qu'il lui a consentie sur tout le département de l'Isère, moyen sur lequel la société DDGI ne s'explique pas, la cour relèvera dans un premier temps que la capture d'écran de la publication, le 18 décembre 2017, d'une annonce proposant la visite virtuelle de locaux situés à [Localité 6], sur le compte Facebook « vipstudio360 » ne permet pas avec certitude d'identifier l'annonceur comme étant la société DDGI dont l'adresse mail est «groupe-vip360 » et dans un second temps, à la lecture de la clause, que l'exclusivité est concédée en contrepartie de la réalisation d'un chiffre d'affaires annuel minimum de 40.000 HT et qu'à défaut, le franchiseur se réserve le droit de concéder des droits équivalents et /ou d'agir directement au sein de la zone d'implantation du franchisé, alors que la société Allwork admet dans ses écritures n'avoir jamais atteint un chiffre d'affaires de plus de 30.000 euros HT par an.
Ce grief n'apparaît donc pas constitué.
En conséquence, les manquements allégués ne sont pas établis et ne peuvent fonder ni une demande indemnitaire de la société Allwork, ni l'exception d'inexécution qu'elle oppose aux demandes en paiement de la société DDGI.
4°) sur la demande en paiement :
a) sur les redevances impayées et l'indemnité forfaitaire de recouvrement:
La société DDGI réclame paiement des redevances contractuelles des mois de mars et avril 2019, au titre de trois factures émises.
Sauf à se prévaloir vainement de l'exception d'inexécution, la société Allwork ne conteste pas le principe et les montants de ces redevances.
Le jugement devra être confirmé en ce qu'il a condamné la société Allwork à payer la somme de 1585,80 euros, ainsi que la somme de 40 euros par facture impayée par application de l'article L.441-10 du code de commerce, soit 120 euros.
b) sur la réparation de la restitution tardive du matériel :
La société DDGI soutient qu'en vertu des stipulations contractuelles, elle est en droit d'obtenir paiement d'une somme de 200 euros par jour de retard au titre de la rétention abusive pendant 42 jours après résiliation du contrat, du matériel technique mis à la disposition du franchisé.
La société Allwork conteste cette lecture de la convention estimant qu'elle autorisait uniquement le franchiseur à voir fixer une astreinte définitive par le juge des référés et fait valoir qu'à défaut d'avoir saisi cette juridiction, la société DDGI ne peut lui facturer elle-même cette astreinte.
L'article 20.6 du contrat de franchise prévoit qu'à défaut pour le franchisé de respecter l'une des obligations énoncées par les articles 20.1 à 20.5 relatifs aux conséquences de la cessation des contrats, il pourra y être contraint sous une astreinte définitive de 200 euros par jour de retard par une ordonnance du juge des référés du tribunal de commerce de Dijon.
Il n'est pas contesté que la société DDGI n'a pas saisi le juge des référés pour contraindre la société Allwork à lui restituer le matériel photographique mis à sa disposition et que cette restitution est bien intervenue.
L'objectif de l'astreinte même contractuelle est de contraindre à l'exécution d'une obligation et sa nature de sanction est indépendante des dommages-intérêts de sorte que sans avoir préalablement obtenu la décision prévue, la société DDGI ne peut facturer une somme au titre de cette astreinte que la restitution prive de tout intérêt.
Le jugement sera infirmé en ce qu'il a condamné la société Allwork à payer la somme de 8400 euros , outre l'indemnité forfaitaire de recouvrement 40 euros.
c) sur l'indemnité de rupture anticipée :
La société DDGI entend obtenir indemnisation de son préjudice résultant de la résiliation du contrat de franchise intervenue aux torts de la franchisée et considère qu'il est constitué par la perte des redevances minimales de 700 euros par mois qu'elle aurait perçues jusqu'au terme le 31 août 2022.
La société Allwork fait valoir que le franchiseur ne peut prétendre à l'indemnisation d'une rupture dont il a pris l'initiative et qui lui est imputable, le motif réel étant constitué par ses réclamations ; que les manquements invoqués à son encontre ne sont pas caractérisés et que le préjudice ne correspond qu'à une perte de chance.
Le contrat prévoit, dans son article 19, les hypothèses autorisant le franchiseur à résilier le contrat à tout moment avant son terme, sans indemnités au profit du franchisé et sans préjudice des dommages-intérêts, dont la réalisation d'un chiffre d'affaires annuel inférieur à 30.000 euros HT et l'existence de manquement du franchisé à l'une des obligations contractuelles.
Le courrier recommandé de notification de la résiliation du contrat en date du 22 mars 2019, fonde cette décision de la société DDGI sur l'insuffisance du chiffre d'affaires annuel et sur la non-conformité du site de la société Allwork ainsi que ses commentaires insultants auprès de l'équipe technique.
Si la société Allwork conteste que la résiliation lui soit imputable, le défaut de conformité de son site avec les prescriptions du franchiseur a donné lieu à une mise en demeure du 7 novembre 2018, à laquelle il n'est pas justifié qu'elle a répondu.
Par ailleurs, la société Allwork conclut elle-même qu'elle n'a jamais réalisé un chiffre d'affaires annuel de 30.000 euros.
Les motifs invoqués autorisaient donc la résiliation anticipée et l'indemnisation éventuelle du franchiseur.
Ce dernier a effectivement perdu le gain de la redevance minimale mensuelle de 700 euros HT contractuellement prévue et ce jusqu'au terme fixé au 31 août 2022. Par son degré de certitude, ce préjudice ne constitue pas une perte de chance entendue comme la disparition d'une éventualité favorable et doit être intégralement réparé, ce qui conduira la cour à confirmer le jugement qui a condamné la société Allwork à payer à la société DDGI la somme de 28.700 euros.
5°) sur la violation de la clause de non-concurence :
L'article 21 du contrat de franchise énonce une clause de non-concurrence interdisant au franchisé, pendant la durée du contrat pour la France entière et durant 12 mois suivant la date de cessation du contrat dans la zone d'implantation, de proposer ou de représenter des offres concurrentes à l'offre VIP 360°, en particulier l'adhésion, la création,ou la participation directe ou indirecte à un réseau concurrent, ou encore la représentation ou le partenariat le liant à tout groupement, organisme ou société en concurrence réelle ou potentielle avec le franchiseur.
Si la société DDGI affirme que la société Allwork a enfreint cette interdiction en poursuivant, après la résiliation du contrat, une activité concurrente dans la zone d'implantation qu'elle lui avait concédée, ce que l'intéressée conteste, elle n'en rapporte aucune preuve, la seule poursuite par la société Allwork d'une activité étant insuffisante dès lors que son Kbis fait état, outre l'activité de consulting en marketing digital, de celles de traitement des données, hébergement et activités connexes, services aux particuliers et aux entreprises.
C'est donc avec raison que les premiers juges ont rejeté la prétention indemnitaire de la société DDGI et leur décision sera confirmée sur ce point.
6°) sur les dépens :
Chaque partie succombant partiellement aux prétentions de son adversaire, elles conserveront chacune la charge des dépens de l'instance d'appel dont elles ont fait l'avance.
PAR CES MOTIFS :
Déclare irrecevable la demande de la SAS Allwork en fixation du montant de ses créances de restitution et indemnitaires au passif de la procédure collective de la SARLU DDGI,
Déboute la SAS Allwork de ses demandes en nullité du contrat de franchise ;
Dit que la SARLU DDGI n'a pas manqué à ses obligations contractuelles ;
Infirme le jugement du tribunal de commerce de Dijon en date du 24 mars 2022, en ce qu'il a :
- condamné la SASU Allwork au paiement de la somme de 8.400 euros au titre de la facture émise en réparation de la restitution tardive du matériel, augmentée des intérêts de retard égal à trois fois le taux de l'intérêt légal à compter de sa date d'échéance ;
- condamné la SASU Allwork au paiement de la somme de 40 euros par facture impayée au titre de l'indemnité forfaitaire de recouvrement, soit 160 euros ;
statuant à nouveau,
Déboute la SARLU DDGI de sa demande en paiement de la somme de 8.400 euros, outre la somme de 40 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de recouvrement ;
Condamne la SASU Allwork à payer à la SARLU DDGI la somme de 120 euros (40x3) au titre de l'indemnité forfaitaire de recouvrement de l'article L.441-10 du code de commerce ;
Confirme le jugement pour le surplus de ses dispositions ;
y ajoutant ;
Laisse à chaque partie la charge des dépens d'appel dont elle a fait l'avance ;
Rejette les demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile.