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Décisions

CA Riom, ch. com., 28 mai 2025, n° 24/01485

RIOM

Arrêt

Infirmation partielle

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Dubled-Vacheron

Conseillers :

Mme Noir, Mme Berger

Avocats :

Me Labarthe Lenhof, SCP Vial-Pech de Laclause-Escale-Knoepffler-Huot-Piret-Joubes, Me Bonnet-Marquis, Me Roche

TJ Puy-en-Velay, du 17 sept. 2024, n° 23…

17 septembre 2024

ARRET :

Prononcé publiquement le 28 Mai 2025, par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

Signé par Mme Annette DUBLED-VACHERON, Présidente de chambre, et par Mme Valérie SOUILLAT, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

M. [Y] a relevé appel devant la cour d'appel de Riom d'un jugement de départage rendu le 16 février 2018 par le conseil de prud'hommes de Clermont-Ferrand, suivant déclaration d'appel formalisée.

Par ordonnance du 4 septembre 2018, le conseiller de la mise en état a prononcé la caducité de la déclaration d'appel et condamné l'appelant aux dépens.

Par acte du 30 août 2023, M. [Y] a fait assigner la SA [10], Me [R] et la SCP d'avocats [9] ( Ci-après SCP d'avocats), pour voir condamner ces derniers à l'indemniser de la perte de chance d'obtenir une juste application du plan de sauvegarde de l'emploi et le versement d'une indemnité correspondant à ce préjudice.

Par ordonnance du 17 septembre 2024, le juge de la mise en état du tribunal judiciaire du Puy en Velay a jugé irrecevable pour défaut de droit d'agir, l'action introduite par M. [K] [Y] à l'encontre de la SCP d'avocats , de Me [J] [R] et de la SA [10]. M. [Y] a été condamné aux dépens.

Le juge de la mise en état a considéré que M. [Y] avait mandaté la SCP d'avocats et non Me [R] pour assurer sa défense dans le cadre d'une instance prud'homale ; que le fait que la [10], assureur de Me [R] ait présenté une offre d'indemnisation ne permettait pas d'affirmer que l'intéressé avait agi en son nom personnel et non comme associé.

M. [Y] a relevé appel de cette ordonnance le 20 septembre 2024.

Par ordonnance du 23 octobre 2024 l'affaire a été fixée à l'audience du 13 février 2025.

Aux termes de conclusions N° 2 notifiées le XX, la SCP d'avocats [9], Me [R] et la société d'assurance [10], intervenante volontaire, demandent à la cour de :

- déclarer recevable l'intervention des [10] ;

A tire principal, de confirmer l'ordonnance critiquée ;

- de juger que Me [R] n'a jamais été mandaté à titre individuel par M. [Y] mais comme associé de la SCP ;

- de juger qu'aucun des griefs énoncés ne vise un acte accompli par Me [R] à titre individuel mais bien par la SCP ;

- de juger que M. [Y] n'a aucun intérêt ni qualité à agir contre Me [R] en son nom personnel et à titre individuel

- de juger en conséquence son action irrecevable

- de mettre hors de cause Me [R]

- de juger que la SCP d'avocats n'a plus d'existence légale car elle a fait l'objet d'une opération de fusion absorption avec la SELARL [11] devenue effective le 31 décembre 2020 ;

- qu'elle est donc dépourvue de capacité à agir et que M. [Y] est irrecevable à agir contre elle.

- de mettre la SCP [9] hors de cause

En tout état de cause

- de rejeter l'ensemble des demandes de M. [Y] et de condamner ce dernier aux dépens ainsi qu'au versement d'une somme de 2 500 euros à chacun.

- de dire que les dépens seront distraits au profit de la SELARL Bonnet Eymard Navarro.

Il sera renvoyé aux conclusions des parties pour plus ample exposé des moyens développés au soutien de leurs prétentions.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 12 mars 2025.

Motivation :

Les intimés soulèvent au visa de l'article 122 du code de procédure civile une fin de non-recevoir et non une exception de nullité. Il n'est donc pas nécessaire de démontrer l'existence d'un grief.

M. [Y] fait observer que la SCP d'avocats [9] et pour elle « son représentant légal » est constituée en cause d'appel et a déposé des conclusions conjointes avec les [10]. Pour autant il n'en tire aucunes conclusions en termes de recevabilité des demandes présentées par cette SCP à l'encontre de laquelle il forme effectivement des demandes.

Il soutient par ailleurs au visa des dispositions de l'article L 123-9 alinéa 1er, L 237-2 et R 123-69 du code de commerce qu'en cas de fusion -absorption, la dissolution de la société absorbée n'est opposable aux tiers que par sa mention au registre du commerce et des sociétés, dans un journal d'annonces légales et au BODACC.

L'article L 237-2 du code de commerce traite des sociétés en liquidation ce qui n'est pas le cas en l'espèce, la société ayant été dissoute par l'effet de la fusion-absorption sans liquidation.

En application des articles L 236-1 à L 236-6 du code de commerce sont applicables. En l'espèce, il est justifié du dépôt au registre du commerce et des sociétés du traité de fusion absorption le 18 novembre 2020. L'opération de fusion a bien été publiée au registre du commerce et des sociétés le 21 janvier 2021. La radiation de la SCP apparaît sur l'extrait INPI de la société absorbante comme ayant été effectuée le 1er décembre 2020 avec effet au 31 mars 2020.

Cependant, il appartenait à la société absorbée de réaliser les mesures de publicité liées normalement à la dissolution de la société, à savoir, l'insertion de l'avis de dissolution dans un journal d'annonces légales, le dépôt au greffe des procès-verbaux des assemblées générales relatifs à la dissolution, la demande d'inscription modificative au RCS en vue de sa radiation et une insertion au BODACC.

Il n'est effectivement pas justifié de l'ensemble de ces diligences. Cependant, il est jugé que c'est à compter de la publicité au registre du commerce et des sociétés que la fusion absorption est opposable aux tiers (article L 123-9 du code de commerce- Cass com 23 janvier 2007- N° 05-16-460).

La fusion -absorption de la SCP d'avocats est donc opposable à M. [Y].

Une société dissoute par fusion absorption n'a plus d'existence légale et se trouve donc privée de la capacitée d'ester en justice. L'action de M. [Y] dirigée à l'encontre de la SCP [9] est donc irrecevable. L'ordonnance sera confirmée sur ce point.

S'agissant de l'action dirigée contre Me [R], il doit être rappelé que ce dernier a exercé comme associé au sein de la SCP [9] jusqu'au 31 octobre 2018.

Lorsque la société, pourvue de la personnalité morale est inscrite comme avocat, comme en l'espèce, elle est indéfiniment et solidairement responsable des conséquences des actes dommageables commis par les avocats associés qui répondent toutefois personnellement de leurs actes professionnels sur l'ensemble de leur patrimoine. Il en résulte que l'action en responsabilité peut être indifféremment dirigée contre la société, contre l'associé ou contre les deux (Civ 1, 28 mars 2008, N° 07-12.196). L'ensemble des actes de procédure produits permet de constater que Me [R], associé de la SCP d'avocats a assisté M. [Y] au cours de son instance prud'hommale et devant la cour.

IL en résulte que l'action dirigée contre Me [R] est recevable.

L'ordonnance sera infirmée sur ce point.

Les [10] et Me [R] seront condamnés in solidum et non solidairement (la solidarité étant légale ou contractuelle) aux dépens.

L'équité commande de ne pas laisser à M. [Y] la charge de ses frais de défense.

Me [R] et las [10] seront condamnés in solidum et non solidairement (la solidarité étant légale ou contractuelle) à lui verser la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Par ces motifs :

La cour, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort, par mise à disposition de l'arrêt au greffe

Confirme l'ordonnance en ce qu'elle a déclaré irrecevable l'action engagée par M. [K] [Y] à l'encontre de la SCP [9] ;

L'infirme pour le surplus ;

Statuant à nouveau,

Déclare recevable l'action de M. [K] [Y] à l'encontre de Me [J] [R] et de la SA [10] ;

Condamne in solidum Me [J] [R] et la SA [10] à verser à M. [K] [Y] la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne in solidum Me [J] [R] et la SA [10] aux dépens d'appel et de première instance.

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