CA Lyon, 8e ch., 28 mai 2025, n° 22/03666
LYON
Arrêt
Autre
N° RG 22/03666 - N° Portalis DBVX-V-B7G-OJ4D
Décision du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de [Localité 6]
au fond du 20 décembre 2021
RG : 11-19-0014
S.A.R.L. CPE
C/
[B]
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE LYON
8ème chambre
ARRÊT DU 28 Mai 2025
APPELANTE :
La société CPE, société à responsabilité limitée (SARL) au capital de 1 000 euros, immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de Lyon sous le numéro 792 431 009, code APE 4690Z, dont le siège social est situé [Adresse 3], prise en la personne de son gérant domicilié en cette qualité audit siège
Jugement du tribunal de commerce de Lyon du 28 juin 2023 convertissant la procédure de redressement judiciaire en liquidation judiciaire
Représentée par Me Maxime TAILLANTER, avocat au barreau de LYON, toque : 2954
INTIMÉ :
M. [S] [B]
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représenté par Me Christophe NEYRET de la SELARL CHRISTOPHE NEYRET AVOCATS, avocat au barreau de LYON, toque : 815
INTERVENANTE VOLONTAIRE :
La société [A], société d'exercice libéral à responsabilité limitée dont le siège social est situé au [Adresse 2], immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de Lyon sous le numéro 879 775 757, représentée par Maître [D] [A] agissant et ayant les pouvoirs nécessaires en tant que gérant, ès-qualités de liquidateur judiciaire de la société CPE, société à responsabilité limitée immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de Lyon sous le numéro 792 431 009, nommée à cette fonction suivant jugement de conversion d'une procédure de redressement judiciaire en liquidation judiciaire prononcé le 28 juin 2023 par le tribunal de commerce de Lyon
Représentée par Me Maxime TAILLANTER, avocat au barreau de LYON, toque : 2954
* * * * * *
Date de clôture de l'instruction : 05 Mars 2025
Date des plaidoiries tenues en audience publique : 02 Avril 2025
Date de mise à disposition : 28 Mai 2025
Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :
- Bénédicte BOISSELET, président
- Véronique DRAHI, conseiller
- Nathalie LAURENT, conseiller
assistés pendant les débats de William BOUKADIA, greffier
A l'audience, un membre de la cour a fait le rapport,
Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,
Signé par Bénédicte BOISSELET, président, et par William BOUKADIA, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
* * * *
EXPOSÉ DU LITIGE
Suivant devis du 12 juillet 2017 accepté le 20 juillet 2017, M. [S] [B] a confié à la SARL CPE la réalisation d'une piscine à débordement pour l'agrément de sa maison située à [Localité 5] au prix, hors options terrasses, de 69'369,60 euros TTC.
Prétendant que les travaux étaient achevés depuis janvier 2018 et que des travaux supplémentaires de couverture Covrex de la piscine, en sus du devis initial, avaient été réalisés, sans règlement de l'ensemble de ses factures, la société CPE a, par courrier de son conseil du 1er août 2018, adressé à M. [B] une mise en demeure de payer sous huitaine.
En l'absence de règlement, la société CPE a sollicité, par requête du 19 septembre 2018, et obtenu, par ordonnance d'injonction de payer rendue par le tribunal d'instance de Lyon le 10 février 2019, la condamnation de M. [S] [B] à lui payer la somme de 9'041,88 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 1er août 2018, outre les dépens.
Statuant sur opposition à cette ordonnance, le Tribunal Judiciaire de Lyon a, par jugement du 20 décembre 2021, statué ainsi':
Dit M. [S] [B] recevable en son opposition,
En conséquence, déclare non-avenue l'injonction de payer numéro 21-18-003730 rendue le 8 février 2019,
Constate que la réception de l'ouvrage convenu selon devis n°05836 bis daté du 12 juillet 2017 et signé le 20 juillet 2017 par M. [S] [B] et la SARL CPE représenté par son gérant M. [C] [E] est intervenue tacitement avec réserves le 20 juillet 2018,
Déboute la SARL CPE de sa demande en paiement de la somme de 9'041,88 euros,
Condamne la SARL CPE à payer à M. [S] [B] une somme de 2'916,39 euros à titre de dommages et intérêts,
Condamne la SARL CPE à payer à M. [S] [B] une somme de 1'500 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,
Déboute M. [S] [B] de toute autre demande,
Déboute la SARL CPE de sa demande au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,
Condamne la SARL CPE aux dépens,
Ordonne l'exécution provisoire.
Le tribunal a retenu en substance':
Sur la réception': Qu'aux termes du courriel du 20 juillet 2018, M. [B] indique sans équivoque que la piscine était enfin utilisable après plus d'un an'; qu'il en résulte qu'il a pris possession de la piscine le 20 juillet 2018 aux termes d'une réception tacite avec réserves puisqu'il maintient de manière constante, du moins à compter de cette date, une volonté de ne pas régler le solde des travaux tant qu'il n'aura pas été remédié aux désordres signalés';
Sur l'exception d'inexécution':
Que M. [B] n'invoque pas utilement l'exception d'inexécution concernant le retard de livraison en l'absence de date de livraison précise ou même déterminable en l'état du devis signé ; que dans ces conditions, le délai de la reprise de l'arase de la piscine en début d'année 2018 et à l'issue de l'hiver et du printemps ne paraît pas déraisonnable ;
Que concernant le grief de l'absence d'achèvement de la terrasse en raison d'un manque de bois « Accoya », les parties n'ont pas défini avec précision au devis la superficie exacte de cette terrasse au demeurant non-intégrée dans le prix ; qu'aucun document contractuel postérieur au devis n'est produit qui démontrerait sur quelle surface se sont effectivement engagés les parties, pas plus qu'il n'est produit de constat objectif de l'état actuel de la terrasse démontrant les griefs invoqués';
Qu'à tout le moins, il est permis de faire remarquer que la somme totale facturée à M. [B] s'élève à 89'585,88 euros dont il faut déduire un avoir pour la somme de 1'134 euros et la somme de 80'544 euros acquittée sur la base d'un devis de 69'369,60 euros hors frais de terrasses'; qu'en l'absence de contrat écrit sur les obligations réciproques convenues entre les parties, la société CPE est déboutée de sa demande en paiement de sa facture ;
Sur les dommages et intérêts à titre reconventionnel :
Que M. [B] n'apporte pas la preuve de ce que le bris de la baie vitrée serait la conséquence directe de l'intervention de la société CPE ; que la livraison de la bâch d'hivers de la pompe à chaleur ne figure pas dans les accessoires prévus au devis de sorte que la défaillance de la société CPE n'est pas établie ; qu'il en est de même du tuyau d'aspiration ;
Que le devis de l'entreprise Piscine Design du 17 octobre 2019 établit que les fixations de l'axe de la couverture immergée sont en acier galvanisé et non en inox et entraîne sa désolidarisation sur une extrémité, que le coffre d'habillage immergé présente également des traces de rouille en lien avec l'usage de fixation inadaptée à l'immersion et que des roulettes du guidage du tablier présentent une usure prématurée par rapport à la seconde en lien avec un aplomb ou un éclairage de l'axe non conforme'; que la société CPE a engagé sa responsabilité décennale et qu'il y a lieu d'allouer le coût du remplacement du matériel et du temps d'intervention ;
Qu'en revanche le désordre de fixation des pompes et de la pompe à chaleur au sol n'est pas suffisamment établi et ne sera pas indemnisé.
Par déclaration en date du 20 mai 2022, la SARL CPE a relevé appel de cette décision en tous ses chefs.
En cours de procédure, l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire de la société CPE a été prononcée par un jugement du tribunal de commerce de Lyon du 22 février 2023 désignant la SELARL [A] en qualité de mandataire judiciaire, ce dont la société CPE a, par message adressé au greffe par voie électronique le 6 mars 2023, informé la cour.
Par ordonnance du 26 avril 2023, le conseiller de la mise en état a constaté l'interruption de l'instance et dit qu'à défaut de diligences en vue de la reprise de l'instance, l'affaire serait radiée lors de l'audience de mise en état du 12 juin 2023.
La SELARL [A], en qualité de mandataire judiciaire à la procédure de redressement judiciaire de la société CPE, est intervenue volontairement à l'instance par voie de conclusions remises au greffe par voie électronique le 5 juin 2023.
Suite au jugement du tribunal de commerce du 28 juin 2023 ayant converti la procédure de redressement judiciaire de la société CPE en procédure liquidation judiciaire, la SELARL [A], en qualité de liquidateur judiciaire à la procédure de redressement judiciaire de la société CPE, est intervenue volontairement à l'instance par voie de conclusions remises au greffe par voie électronique le 28 février 2025.
***
Aux termes de ses écritures remises au greffe par voie électronique le 6 juin 2023 (conclusions d'appelant n°2 emportant reprise d'instance suite à interruption d'instance), la SARL CPE demande à la cour':
Infirmer le jugement rendu le 20 décembre 2021, en ce que le juge du pôle de la proximité et de la protection du Tribunal judiciaire de Lyon a (Jugement du 20/12/2021 ; RG : 11-19-001411) : (reprise du dispositif de la décision attaquée),
Ce faisant, statuant à nouveau,
Rejeter l'ensemble des demandes, fins et prétentions de M. [S] [B],
Condamner M. [S] [B] au paiement d'une somme de 9'041,88 euros à la société CPE en exécution de ses obligations contractuelles résultant du devis conclu entre les parties le 12 juillet 2017,
Condamner M. [S] [B] au paiement d'une somme de 5'000,00 euros à la société CPE au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,
Condamner le même aux entiers dépens.
Elle affirme que M. [B] a pris possession de l'ouvrage réalisé sans formuler la moindre réserve et que ce n'est qu'à réception de la cinquième relance que celui-ci a, pour la première fois, fait état de prétendus désordres affectant les travaux. Elle rappelle avoir immédiatement contesté l'existence de ces désordres. Elle en conclut qu'une réception tacite de l'ouvrage est intervenue dès janvier 2018, et ce, sans réserve. Elle rappelle que la réception de l'ouvrage sans réserve purge l'ouvrage de tous désordres et non-conformités apparents. Elle en conclut que M. [B] est mal fondé à se prévaloir de l'exception d'inexécution pour faire échec à la demande en paiement, sollicitant l'infirmation du jugement sur ce point.
Subsidiairement, si la cour considérait qu'une réception tacite est intervenue le 20 juillet 2018 avec des réserves, elle rappelle que l'entrepreneur n'est tenu de procéder à la reprise de réserves qu'autant que celle-ci sont avérées. Elle considère qu'aucune pièce versée au dossier ne permet d'établir que l'ouvrage réalisé était objectivement affecté de réserves légitimes. Elle relève l'absence de toute mise en 'uvre ultérieure de travaux de reprise, outre le fait que M. [B] n'a pas sollicité l'organisation d'une expertise judiciaire contradictoire, ni n'a pris la peine de faire constater par un commissaire de justice l'état des prétendus désordres. Elle relève que le défendeur s'est borné à produire des photographies, ainsi qu'un devis de prétendues reprises, non-réalisées, et qu'en réalité l'intéressé profite paisiblement de sa piscine depuis 2018. Elle en conclut que les prétendues inexécutions ne sont pas suffisamment graves pour justifier la mise en 'uvre de l'article 1219 du Code civil.
Concernant les demandes reconventionnelles formulées par M. [B], elle estime que ce dernier est défaillant dans l'administration de la preuve, tant de l'existence de désordres imaginaires, que du préjudice qui en résulterait.
***
Aux termes de ses écritures remises au greffe par voie électronique le 28 février 2025 (conclusions d'intervenant volontaire) signifiées le 28 mars 2025 à M. [S] [B] par un procès-verbal de remise à domicile, la SELARL [A], es qualité de liquidateur judiciaire de la SARL CPE, nommée à cette fonction suivant jugement de conversion d'une procédure de redressement judiciaire en liquidation judiciaire prononcé le 28 juin 2023 par le tribunal de commerce de Lyon, intervenant volontairement à l'instance, demande à la cour':
Infirmer le jugement rendu le 20 décembre 2021, en ce que le juge du pôle de la proximité et de la protection du Tribunal judiciaire de Lyon a (Jugement du 20/12/2021 ; RG : 11-19-001411) : (reprise du dispositif de la décision attaquée),
Ce faisant, statuant à nouveau,
Déclarer la créance revendiquée par M. [S] [B] comme étant inopposable à la procédure collective de la société CPE, faute d'avoir fait l'objet d'une déclaration de créance,
Rejeter l'ensemble des demandes, fins et prétentions de M. [S] [B],
Condamner M. [S] [B] au paiement d'une somme de 9'041,88 euros à la société [A], es-qualité de liquidateur judiciaire de la société CPE, en exécution de ses obligations contractuelles résultant du devis conclu entre les parties le 12 juillet 2017, outre intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 1er août 2018,
Condamner M. [S] [B] au paiement d'une somme de 5'000,00 euros à la société [A], es-qualité de liquidateur judiciaire de la société CPE au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,
Condamner le même aux entiers dépens.
Elle reprend globalement la même argumentation que la société CPE, invoquant, à titre principal, la réception tacite sans réserves, intervenue le 11 janvier 2018, ayant pour effet de purger les réserves alléguées.
A titre subsidiaire, elle invoque sur l'absence de preuve de l'existence des réserves et, par suite, d'une inexécution «'suffisamment grave'» de la société CPE au sens de l'article 1219 du Code civil.
Concernant les demandes reconventionnelles de M. [B], elle en souligne le mal fondé s'agissant de désordres imaginaires pour lesquels nul ne sait si des reprises ont été mises en 'uvre mais en tout état de cause, elle relève que M. [B] ne justifie d'aucune déclaration de créance entre les mains des organes de la procédure collective, si bien que sa prétendue créance est, en toutes hypothèses, inopposable à la liquidation judiciaire de la société CPE, demandant en conséquence à la cour d'infirmer le jugement attaqué ayant accueilli partiellement ces demandes.
***
M. [B], qui s'est vu signifier la déclaration d'appel par exploit du 22 juillet 2022, n'a pas constitué avocat dans le délai de quinze jours imparti par cette signification en application de l'article 902 du Code de procédure civile.
Toutefois pendant le délibéré et donc postérieurement à la clôture des débats, M. [B] a constitué avocat et il a, par deux courriers de son conseil constitué adressés au conseiller de la mise en état, sollicité la ré-ouverture des débats.
Il est renvoyé aux écritures des parties ayant constitué avocat avant la clôture pour un plus ample exposé des moyens venant à l'appui de leurs prétentions.
MOTIFS,
Il sera rappelé que le débiteur en liquidation judiciaire dispose d'un droit propre lui permettant de soutenir des conclusions d'appel, ce qui est le cas de la société CPE qui, avant son placement en redressement judiciaire, avait pris des écritures, auxquelles la cour doit répondre.
Sur la demande de ré-ouverture des débats':
L'article 803 du Code de procédure civile énonce':
«'L'ordonnance de clôture ne peut être révoquée que s'il se révèle une cause grave depuis qu'elle a été rendue'; la constitution d'avocat postérieurement à la clôture ne constitue pas, en soi, une cause de révocation.
Si une demande en intervention volontaire est formée après la clôture de l'instruction, l'ordonnance de clôture n'est révoquée que si le tribunal ne peut immédiatement statuer sur le tout.
L'ordonnance de clôture peut être révoquée, d'office ou à la demande des parties, soit par ordonnance motivée du juge de la mise en état, soit, après l'ouverture des débats, par décision du tribunal.'»
En l'espèce, la réouverture des débats sollicitée par M. [B] à tort auprès du conseiller de la mise en état suppose la révocation de l'ordonnance de clôture. Or, l'intéressé n'invoque aucune cause grave justifiant cette révocation.
En effet, il importe de relever que l'intimé a constitué avocat le 5 mai 2025, soit au delà du délai de quinze jours qui lui avait été imparti aux termes de la signification de la déclaration d'appel qui lui a été faite le 22 juillet 2022, mais également après l'ordonnance de clôture du 5 mars 2025 et après l'audience de plaidoirie du 2 avril 2025. Cette constitution d'avocat postérieure à la clôture ne constitue pas, en soi, une cause de révocation comme énoncé à l'article précité.
Par ailleurs, l'intervention volontaire à l'instance de la SELARL [A], es qualité de liquidateur judiciaire de la SARL CPE, n'a fait courir aucun nouveau délai pour conclure au bénéfice de l'intimé alors non-constitué. Il en est de même de la signification faite à M. [B] des conclusions d'intervention volontaire de la SELARL [A] par exploit du 28 mars 2025 qui n'a fait courir aucun nouveau délai pour conclure.
Dans ces conditions, cette intervention volontaire et la signification des conclusions de l'intervenant volontaire ne constituent pas, non plus, une cause de révocation de l'ordonnance de clôture.
Au final, la demande de ré-ouverture des débats présentée par M. [B] ne peut être accueillie, ni par le conseiller de la mise en état, laquelle lui est adressée, ce magistrat étant dessaisi depuis le 2 avril 2025, date de l'audience de plaidoirie, ni par la cour à défaut pour l'intimé de justifier d'une cause grave justifiant sa demande.
Sur la reprise de l'instance concernant la demande en paiement de la société CPE':
En application des articles 369 et 373 du Code de procédure civile, l'instance est interrompue par l'effet du jugement qui prononce la sauvegarde, le redressement judiciaire ou la liquidation judiciaire dans les causes où il emporte assistance ou dessaisissement du débiteur et elle peut être volontairement reprise dans les formes prévues pour la présentation des moyens de défense.
En l'espèce, le placement en redressement judiciaire de la société appelante a interrompu l'instance, comme constaté par le conseiller de la mise en état par ordonnance du 26 avril 2023. Cette société étant demanderesse à une action en paiement contre M. [B], l'intervention volontaire de la SELARL [A], d'abord comme mandataire judiciaire à la procédure de redressement judiciaire, puis comme liquidateur judiciaire, remplit les conditions de forme et de fond d'une reprise de l'instance relativement à la demande en paiement initiale de la société CPE.
La cour constate en conséquence que l'instance a régulièrement été reprise concernant cette demande en paiement.
Sur la reprise de l'instance concernant les demandes reconventionnelles de M. [B]':
Il sera rappelé qu'en vertu du dernier alinéa de l'article 954 du Code de procédure civile, la cour demeure saisie des demandes reconventionnelles de M. [B] qui est présumé demander la confirmation du jugement de première instance et s'en approprier les motifs.
Cela étant, l'article L.622-21 du Code de commerce pose le principe d'ordre public de l'interruption ou de l'interdiction de toute action en justice exercée par un créancier contre un débiteur faisant l'objet d'une procédure collective ayant pour objet la résolution d'un contrat pour défaut de paiement d'une somme d'argent, dont la créance est antérieure à la procédure collective.
En application de l'article L.622-22 du Code de commerce, l'interruption d'instance dure jusqu'à la déclaration de créance par le créancier et la mise en cause du mandataire judiciaire et, à défaut, jusqu'à la clôture de la procédure collective.
Par ailleurs, l'article 376 du Code de procédure civile précise que l'interruption de l'instance ne dessaisit pas le juge, lequel peut inviter les parties à lui faire part de leurs initiatives en vue de reprendre l'instance et radier l'affaire à défaut de diligences dans le délai par lui imparti.
En l'espèce, la demande reconventionnelle en dommages et intérêts de M. [B], qui a pour objet la condamnation de la société CPE au paiement d'une somme d'argent au titre d'une créance antérieure à l'ouverture de la procédure collective, se heurte au principe de l'arrêt des poursuites individuelles édicté par les articles précités et la reprise de l'instance est en conséquence subordonnée à une condition supplémentaire tenant à la justification par M. [B] d'une déclaration de créance valable.
Or, l'intimé, bien qu'il ait finalement constitué avocat, n'a pas justifié d'une éventuelle déclaration de sa créance auprès des organes de la procédure collective de la société CPE.
Au contraire, la SELARL [A], ès-qualités de liquidateur judiciaire de la société CPE affirme, sans être démentie, que M. [B] n'a régularisé aucune déclaration de créance. Il s'ensuit que, en l'absence de reprise de l'instance, la cour ne peut pas statuer sur les demandes reconventionnelles de M. [B], ni d'ailleurs sur le moyen présenté en défense tenant à l'inopposabilité de la créance revendiquée par M. [S] [B] à la procédure collective de la société CPE.
La cour constate en conséquence que l'instance demeure interrompue concernant les demandes reconventionnelles de M. [B].
Sur la disjonction':
Dès lors que la partie appelante remplit les conditions d'une reprise de l'instance et qu'elle dispose d'un droit à voir son appel examiné, l'intérêt d'une bonne justice commande, en application de l'article 367 du Code de procédure civile, que soit disjoint l'examen des demandes réciproques des parties, la demande reconventionnelle en dommages et intérêts de M. [B] étant ainsi incluse dans une instance distincte enrôlée sous le numéro de répertoire général'25/04219.
En outre et en l'absence de diligences de M. [B] malgré le délai imparti par le conseiller de la mise en état par ordonnance du 26 avril 2023, cette instance distincte, enrôlée sous le nouveau numéro de répertoire général'25/04219, est radiée du rôle des affaires en cours. Elle pourra être ré-inscrite en cas de justification d'une déclaration de créance valable et, à défaut, après la clôture de la procédure collective sous réserve de l'absence de péremption.
Sur la recevabilité de l'opposition à l'ordonnance portant injonction de payer':
En l'absence de tout moyen développé par la société CPE et son liquidateur judiciaire se rapportant à la recevabilité de l'opposition de M. [B] à l'ordonnance portant injonction de payer, le jugement attaqué, qui a déclaré cette opposition recevable et déclaré en conséquence l'ordonnance numéro 21-18-003730 du 8 février 2019 non-avenue, ne peut qu'être confirmé.
Sur la demande principale en paiement':
Aux termes de l'article 1353 du Code civil, celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver.
En l'espèce, la société CPE justifie d'abord d'un devis du 12 juillet 2017 accepté le 20 juillet 2017 par M. [B] pour la réalisation d'une piscine à débordement au prix de 69'369,60 euros TTC «'hors option terrasse'».
Elle produit ensuite le récapitulatif des factures et avoirs se rapportant au chantier, ce dont il résulte, comme exactement relevé par le premier juge, que les sommes totales facturées s'élèvent à 89'585,88 euros TTC. En revanche, la société CPE ne s'explique pas le prix des prestations se rapportant aux «'terrasses essence Accoya posées sur plots'», ni sur les travaux supplémentaires de couverture Covrex de la piscine qu'elle indique, aux termes du courrier de son conseil, avoir réalisés en sus du devis initial. Or, outre l'absence de preuve d'un accord préalable sur le prix de ces prestations hors devis, il ne résulte d'aucune des pièces produites un accord des parties sur les montants facturés en sus du devis. Au contraire, la circonstance que la société CPE ait été amenée en avril 2018 à établir, à la demande de M. [B], un récapitulatif des sommes facturées, démontre l'existence d'une discussion des parties à ce sujet. S'il est constant qu'en réponse à un courriel mentionnant en objet «'paiement en souffrance relance 2'», M. [B] a fait part, par un courriel du 3 juillet 2018, de divers désordres et non-finitions affectant la piscine, le maître de l'ouvrage ne fait aucune remarque concernant les sommes facturées. Ce silence, à défaut d'être non-équivoque, n'emporte ainsi aucun accord même tacite sur le prix des prestations hors devis de la société CPE.
En réalité, le premier juge a écarté l'exception d'inexécution soulevée par M. [B] mais il a néanmoins rejeté la demande en paiement de la société CPE en l'absence de preuve d'un accord des parties sur les prestations hors devis.
Il a plus particulièrement relevé que M. [B] s'était acquitté d'une somme totale de 80'544 euros sur la base d'un devis de 69'369,60 euros de sorte que la société CPE échouait à rapporter la preuve du quantum de sa créance.
A hauteur d'appel, la société CPE ne justifie d'aucune pièce nouvelle de nature à établir l'accord de M. [B] sur le prix des prestations hors devis. Dès lors, et sans qu'il soit besoin d'examiner les moyens de la société appelante se rapportant, à titre principal, à l'absence de désordres affectant les travaux et, à titre subsidiaire, à la gravité mineure desdits désordres, le jugement attaqué, en ce qu'il l'a déboutée de la demande en paiement de la somme de 9'041,88 euros, est confirmé.
Sur les demandes accessoires':
La cour confirme la décision attaquée qui a condamné la société CPE, partie perdante, aux dépens de première instance et à payer à M. [B] la somme de 1'500 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, montant justifié en équité.
La société CPE, partie perdante, est condamnée aux dépens à hauteur d'appel et elle est déboutée de sa demande au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Rejette la demande de ré-ouverture des débats,
Constate la reprise de l'instance concernant la demande en paiement de la SARL CPE, régulièrement représentée dans ses droits patrimoniaux par la SELARL [A], ès- qualités de liquidateur judiciaire,
Constate que l'instance demeure interrompue concernant la demande reconventionnelle en dommages et intérêts de M. [S] [B] qui ne justifie pas d'une déclaration de créance valable,
Ordonne la disjonction de l'instance, la demande reconventionnelle en dommages et intérêts présentée par M. [S] [B] étant incluse dans l'affaire enregistrée sous le numéro de répertoire général'25/04219,
Prononce la radiation de cette instance numéro de répertoire général 25/04219, l'affaire pouvant être rétablie au rôle des affaires en cours à la diligence de l'une des parties en cas de déclaration de créance valable ou en cas de clôture de la procédure collective, sous réserve de l'absence de péremption,
Confirme le jugement rendu le 20 décembre 2021 par le Tribunal Judiciaire de Lyon en en ce qu'il a':
dit M. [S] [B] recevable en son opposition,
déclaré non avenue l'injonction de payer numéro 21-18-003730 rendue le 8 février 2019,
débouté la SARL CPE de sa demande en paiement de la somme de 9'041,88 euros,
condamné la SARL CPE à payer à M. [S] [B] une somme de 1'500 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,
débouté la SARL CPE de sa demande au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,
condamné la SARL CPE aux dépens,
Y ajoutant,
Condamne la SELARL [A], ès-qualités de liquidateur judiciaire de la SARL CPE, nommée à cette fonction suivant jugement de conversion d'une procédure de redressement judiciaire en liquidation judiciaire prononcé le 28 juin 2023 par le tribunal de commerce de Lyon, aux dépens de l'instance d'appel,
Rejette la demande de la SELARL [A], ès-qualités de liquidateur judiciaire de la SARL CPE, nommée à cette fonction suivant jugement de conversion d'une procédure de redressement judiciaire en liquidation judiciaire prononcé le 28 juin 2023 par le tribunal de commerce de Lyon, au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRESIDENT
Décision du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de [Localité 6]
au fond du 20 décembre 2021
RG : 11-19-0014
S.A.R.L. CPE
C/
[B]
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE LYON
8ème chambre
ARRÊT DU 28 Mai 2025
APPELANTE :
La société CPE, société à responsabilité limitée (SARL) au capital de 1 000 euros, immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de Lyon sous le numéro 792 431 009, code APE 4690Z, dont le siège social est situé [Adresse 3], prise en la personne de son gérant domicilié en cette qualité audit siège
Jugement du tribunal de commerce de Lyon du 28 juin 2023 convertissant la procédure de redressement judiciaire en liquidation judiciaire
Représentée par Me Maxime TAILLANTER, avocat au barreau de LYON, toque : 2954
INTIMÉ :
M. [S] [B]
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représenté par Me Christophe NEYRET de la SELARL CHRISTOPHE NEYRET AVOCATS, avocat au barreau de LYON, toque : 815
INTERVENANTE VOLONTAIRE :
La société [A], société d'exercice libéral à responsabilité limitée dont le siège social est situé au [Adresse 2], immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de Lyon sous le numéro 879 775 757, représentée par Maître [D] [A] agissant et ayant les pouvoirs nécessaires en tant que gérant, ès-qualités de liquidateur judiciaire de la société CPE, société à responsabilité limitée immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de Lyon sous le numéro 792 431 009, nommée à cette fonction suivant jugement de conversion d'une procédure de redressement judiciaire en liquidation judiciaire prononcé le 28 juin 2023 par le tribunal de commerce de Lyon
Représentée par Me Maxime TAILLANTER, avocat au barreau de LYON, toque : 2954
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Date de clôture de l'instruction : 05 Mars 2025
Date des plaidoiries tenues en audience publique : 02 Avril 2025
Date de mise à disposition : 28 Mai 2025
Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :
- Bénédicte BOISSELET, président
- Véronique DRAHI, conseiller
- Nathalie LAURENT, conseiller
assistés pendant les débats de William BOUKADIA, greffier
A l'audience, un membre de la cour a fait le rapport,
Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,
Signé par Bénédicte BOISSELET, président, et par William BOUKADIA, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
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EXPOSÉ DU LITIGE
Suivant devis du 12 juillet 2017 accepté le 20 juillet 2017, M. [S] [B] a confié à la SARL CPE la réalisation d'une piscine à débordement pour l'agrément de sa maison située à [Localité 5] au prix, hors options terrasses, de 69'369,60 euros TTC.
Prétendant que les travaux étaient achevés depuis janvier 2018 et que des travaux supplémentaires de couverture Covrex de la piscine, en sus du devis initial, avaient été réalisés, sans règlement de l'ensemble de ses factures, la société CPE a, par courrier de son conseil du 1er août 2018, adressé à M. [B] une mise en demeure de payer sous huitaine.
En l'absence de règlement, la société CPE a sollicité, par requête du 19 septembre 2018, et obtenu, par ordonnance d'injonction de payer rendue par le tribunal d'instance de Lyon le 10 février 2019, la condamnation de M. [S] [B] à lui payer la somme de 9'041,88 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 1er août 2018, outre les dépens.
Statuant sur opposition à cette ordonnance, le Tribunal Judiciaire de Lyon a, par jugement du 20 décembre 2021, statué ainsi':
Dit M. [S] [B] recevable en son opposition,
En conséquence, déclare non-avenue l'injonction de payer numéro 21-18-003730 rendue le 8 février 2019,
Constate que la réception de l'ouvrage convenu selon devis n°05836 bis daté du 12 juillet 2017 et signé le 20 juillet 2017 par M. [S] [B] et la SARL CPE représenté par son gérant M. [C] [E] est intervenue tacitement avec réserves le 20 juillet 2018,
Déboute la SARL CPE de sa demande en paiement de la somme de 9'041,88 euros,
Condamne la SARL CPE à payer à M. [S] [B] une somme de 2'916,39 euros à titre de dommages et intérêts,
Condamne la SARL CPE à payer à M. [S] [B] une somme de 1'500 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,
Déboute M. [S] [B] de toute autre demande,
Déboute la SARL CPE de sa demande au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,
Condamne la SARL CPE aux dépens,
Ordonne l'exécution provisoire.
Le tribunal a retenu en substance':
Sur la réception': Qu'aux termes du courriel du 20 juillet 2018, M. [B] indique sans équivoque que la piscine était enfin utilisable après plus d'un an'; qu'il en résulte qu'il a pris possession de la piscine le 20 juillet 2018 aux termes d'une réception tacite avec réserves puisqu'il maintient de manière constante, du moins à compter de cette date, une volonté de ne pas régler le solde des travaux tant qu'il n'aura pas été remédié aux désordres signalés';
Sur l'exception d'inexécution':
Que M. [B] n'invoque pas utilement l'exception d'inexécution concernant le retard de livraison en l'absence de date de livraison précise ou même déterminable en l'état du devis signé ; que dans ces conditions, le délai de la reprise de l'arase de la piscine en début d'année 2018 et à l'issue de l'hiver et du printemps ne paraît pas déraisonnable ;
Que concernant le grief de l'absence d'achèvement de la terrasse en raison d'un manque de bois « Accoya », les parties n'ont pas défini avec précision au devis la superficie exacte de cette terrasse au demeurant non-intégrée dans le prix ; qu'aucun document contractuel postérieur au devis n'est produit qui démontrerait sur quelle surface se sont effectivement engagés les parties, pas plus qu'il n'est produit de constat objectif de l'état actuel de la terrasse démontrant les griefs invoqués';
Qu'à tout le moins, il est permis de faire remarquer que la somme totale facturée à M. [B] s'élève à 89'585,88 euros dont il faut déduire un avoir pour la somme de 1'134 euros et la somme de 80'544 euros acquittée sur la base d'un devis de 69'369,60 euros hors frais de terrasses'; qu'en l'absence de contrat écrit sur les obligations réciproques convenues entre les parties, la société CPE est déboutée de sa demande en paiement de sa facture ;
Sur les dommages et intérêts à titre reconventionnel :
Que M. [B] n'apporte pas la preuve de ce que le bris de la baie vitrée serait la conséquence directe de l'intervention de la société CPE ; que la livraison de la bâch d'hivers de la pompe à chaleur ne figure pas dans les accessoires prévus au devis de sorte que la défaillance de la société CPE n'est pas établie ; qu'il en est de même du tuyau d'aspiration ;
Que le devis de l'entreprise Piscine Design du 17 octobre 2019 établit que les fixations de l'axe de la couverture immergée sont en acier galvanisé et non en inox et entraîne sa désolidarisation sur une extrémité, que le coffre d'habillage immergé présente également des traces de rouille en lien avec l'usage de fixation inadaptée à l'immersion et que des roulettes du guidage du tablier présentent une usure prématurée par rapport à la seconde en lien avec un aplomb ou un éclairage de l'axe non conforme'; que la société CPE a engagé sa responsabilité décennale et qu'il y a lieu d'allouer le coût du remplacement du matériel et du temps d'intervention ;
Qu'en revanche le désordre de fixation des pompes et de la pompe à chaleur au sol n'est pas suffisamment établi et ne sera pas indemnisé.
Par déclaration en date du 20 mai 2022, la SARL CPE a relevé appel de cette décision en tous ses chefs.
En cours de procédure, l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire de la société CPE a été prononcée par un jugement du tribunal de commerce de Lyon du 22 février 2023 désignant la SELARL [A] en qualité de mandataire judiciaire, ce dont la société CPE a, par message adressé au greffe par voie électronique le 6 mars 2023, informé la cour.
Par ordonnance du 26 avril 2023, le conseiller de la mise en état a constaté l'interruption de l'instance et dit qu'à défaut de diligences en vue de la reprise de l'instance, l'affaire serait radiée lors de l'audience de mise en état du 12 juin 2023.
La SELARL [A], en qualité de mandataire judiciaire à la procédure de redressement judiciaire de la société CPE, est intervenue volontairement à l'instance par voie de conclusions remises au greffe par voie électronique le 5 juin 2023.
Suite au jugement du tribunal de commerce du 28 juin 2023 ayant converti la procédure de redressement judiciaire de la société CPE en procédure liquidation judiciaire, la SELARL [A], en qualité de liquidateur judiciaire à la procédure de redressement judiciaire de la société CPE, est intervenue volontairement à l'instance par voie de conclusions remises au greffe par voie électronique le 28 février 2025.
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Aux termes de ses écritures remises au greffe par voie électronique le 6 juin 2023 (conclusions d'appelant n°2 emportant reprise d'instance suite à interruption d'instance), la SARL CPE demande à la cour':
Infirmer le jugement rendu le 20 décembre 2021, en ce que le juge du pôle de la proximité et de la protection du Tribunal judiciaire de Lyon a (Jugement du 20/12/2021 ; RG : 11-19-001411) : (reprise du dispositif de la décision attaquée),
Ce faisant, statuant à nouveau,
Rejeter l'ensemble des demandes, fins et prétentions de M. [S] [B],
Condamner M. [S] [B] au paiement d'une somme de 9'041,88 euros à la société CPE en exécution de ses obligations contractuelles résultant du devis conclu entre les parties le 12 juillet 2017,
Condamner M. [S] [B] au paiement d'une somme de 5'000,00 euros à la société CPE au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,
Condamner le même aux entiers dépens.
Elle affirme que M. [B] a pris possession de l'ouvrage réalisé sans formuler la moindre réserve et que ce n'est qu'à réception de la cinquième relance que celui-ci a, pour la première fois, fait état de prétendus désordres affectant les travaux. Elle rappelle avoir immédiatement contesté l'existence de ces désordres. Elle en conclut qu'une réception tacite de l'ouvrage est intervenue dès janvier 2018, et ce, sans réserve. Elle rappelle que la réception de l'ouvrage sans réserve purge l'ouvrage de tous désordres et non-conformités apparents. Elle en conclut que M. [B] est mal fondé à se prévaloir de l'exception d'inexécution pour faire échec à la demande en paiement, sollicitant l'infirmation du jugement sur ce point.
Subsidiairement, si la cour considérait qu'une réception tacite est intervenue le 20 juillet 2018 avec des réserves, elle rappelle que l'entrepreneur n'est tenu de procéder à la reprise de réserves qu'autant que celle-ci sont avérées. Elle considère qu'aucune pièce versée au dossier ne permet d'établir que l'ouvrage réalisé était objectivement affecté de réserves légitimes. Elle relève l'absence de toute mise en 'uvre ultérieure de travaux de reprise, outre le fait que M. [B] n'a pas sollicité l'organisation d'une expertise judiciaire contradictoire, ni n'a pris la peine de faire constater par un commissaire de justice l'état des prétendus désordres. Elle relève que le défendeur s'est borné à produire des photographies, ainsi qu'un devis de prétendues reprises, non-réalisées, et qu'en réalité l'intéressé profite paisiblement de sa piscine depuis 2018. Elle en conclut que les prétendues inexécutions ne sont pas suffisamment graves pour justifier la mise en 'uvre de l'article 1219 du Code civil.
Concernant les demandes reconventionnelles formulées par M. [B], elle estime que ce dernier est défaillant dans l'administration de la preuve, tant de l'existence de désordres imaginaires, que du préjudice qui en résulterait.
***
Aux termes de ses écritures remises au greffe par voie électronique le 28 février 2025 (conclusions d'intervenant volontaire) signifiées le 28 mars 2025 à M. [S] [B] par un procès-verbal de remise à domicile, la SELARL [A], es qualité de liquidateur judiciaire de la SARL CPE, nommée à cette fonction suivant jugement de conversion d'une procédure de redressement judiciaire en liquidation judiciaire prononcé le 28 juin 2023 par le tribunal de commerce de Lyon, intervenant volontairement à l'instance, demande à la cour':
Infirmer le jugement rendu le 20 décembre 2021, en ce que le juge du pôle de la proximité et de la protection du Tribunal judiciaire de Lyon a (Jugement du 20/12/2021 ; RG : 11-19-001411) : (reprise du dispositif de la décision attaquée),
Ce faisant, statuant à nouveau,
Déclarer la créance revendiquée par M. [S] [B] comme étant inopposable à la procédure collective de la société CPE, faute d'avoir fait l'objet d'une déclaration de créance,
Rejeter l'ensemble des demandes, fins et prétentions de M. [S] [B],
Condamner M. [S] [B] au paiement d'une somme de 9'041,88 euros à la société [A], es-qualité de liquidateur judiciaire de la société CPE, en exécution de ses obligations contractuelles résultant du devis conclu entre les parties le 12 juillet 2017, outre intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 1er août 2018,
Condamner M. [S] [B] au paiement d'une somme de 5'000,00 euros à la société [A], es-qualité de liquidateur judiciaire de la société CPE au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,
Condamner le même aux entiers dépens.
Elle reprend globalement la même argumentation que la société CPE, invoquant, à titre principal, la réception tacite sans réserves, intervenue le 11 janvier 2018, ayant pour effet de purger les réserves alléguées.
A titre subsidiaire, elle invoque sur l'absence de preuve de l'existence des réserves et, par suite, d'une inexécution «'suffisamment grave'» de la société CPE au sens de l'article 1219 du Code civil.
Concernant les demandes reconventionnelles de M. [B], elle en souligne le mal fondé s'agissant de désordres imaginaires pour lesquels nul ne sait si des reprises ont été mises en 'uvre mais en tout état de cause, elle relève que M. [B] ne justifie d'aucune déclaration de créance entre les mains des organes de la procédure collective, si bien que sa prétendue créance est, en toutes hypothèses, inopposable à la liquidation judiciaire de la société CPE, demandant en conséquence à la cour d'infirmer le jugement attaqué ayant accueilli partiellement ces demandes.
***
M. [B], qui s'est vu signifier la déclaration d'appel par exploit du 22 juillet 2022, n'a pas constitué avocat dans le délai de quinze jours imparti par cette signification en application de l'article 902 du Code de procédure civile.
Toutefois pendant le délibéré et donc postérieurement à la clôture des débats, M. [B] a constitué avocat et il a, par deux courriers de son conseil constitué adressés au conseiller de la mise en état, sollicité la ré-ouverture des débats.
Il est renvoyé aux écritures des parties ayant constitué avocat avant la clôture pour un plus ample exposé des moyens venant à l'appui de leurs prétentions.
MOTIFS,
Il sera rappelé que le débiteur en liquidation judiciaire dispose d'un droit propre lui permettant de soutenir des conclusions d'appel, ce qui est le cas de la société CPE qui, avant son placement en redressement judiciaire, avait pris des écritures, auxquelles la cour doit répondre.
Sur la demande de ré-ouverture des débats':
L'article 803 du Code de procédure civile énonce':
«'L'ordonnance de clôture ne peut être révoquée que s'il se révèle une cause grave depuis qu'elle a été rendue'; la constitution d'avocat postérieurement à la clôture ne constitue pas, en soi, une cause de révocation.
Si une demande en intervention volontaire est formée après la clôture de l'instruction, l'ordonnance de clôture n'est révoquée que si le tribunal ne peut immédiatement statuer sur le tout.
L'ordonnance de clôture peut être révoquée, d'office ou à la demande des parties, soit par ordonnance motivée du juge de la mise en état, soit, après l'ouverture des débats, par décision du tribunal.'»
En l'espèce, la réouverture des débats sollicitée par M. [B] à tort auprès du conseiller de la mise en état suppose la révocation de l'ordonnance de clôture. Or, l'intéressé n'invoque aucune cause grave justifiant cette révocation.
En effet, il importe de relever que l'intimé a constitué avocat le 5 mai 2025, soit au delà du délai de quinze jours qui lui avait été imparti aux termes de la signification de la déclaration d'appel qui lui a été faite le 22 juillet 2022, mais également après l'ordonnance de clôture du 5 mars 2025 et après l'audience de plaidoirie du 2 avril 2025. Cette constitution d'avocat postérieure à la clôture ne constitue pas, en soi, une cause de révocation comme énoncé à l'article précité.
Par ailleurs, l'intervention volontaire à l'instance de la SELARL [A], es qualité de liquidateur judiciaire de la SARL CPE, n'a fait courir aucun nouveau délai pour conclure au bénéfice de l'intimé alors non-constitué. Il en est de même de la signification faite à M. [B] des conclusions d'intervention volontaire de la SELARL [A] par exploit du 28 mars 2025 qui n'a fait courir aucun nouveau délai pour conclure.
Dans ces conditions, cette intervention volontaire et la signification des conclusions de l'intervenant volontaire ne constituent pas, non plus, une cause de révocation de l'ordonnance de clôture.
Au final, la demande de ré-ouverture des débats présentée par M. [B] ne peut être accueillie, ni par le conseiller de la mise en état, laquelle lui est adressée, ce magistrat étant dessaisi depuis le 2 avril 2025, date de l'audience de plaidoirie, ni par la cour à défaut pour l'intimé de justifier d'une cause grave justifiant sa demande.
Sur la reprise de l'instance concernant la demande en paiement de la société CPE':
En application des articles 369 et 373 du Code de procédure civile, l'instance est interrompue par l'effet du jugement qui prononce la sauvegarde, le redressement judiciaire ou la liquidation judiciaire dans les causes où il emporte assistance ou dessaisissement du débiteur et elle peut être volontairement reprise dans les formes prévues pour la présentation des moyens de défense.
En l'espèce, le placement en redressement judiciaire de la société appelante a interrompu l'instance, comme constaté par le conseiller de la mise en état par ordonnance du 26 avril 2023. Cette société étant demanderesse à une action en paiement contre M. [B], l'intervention volontaire de la SELARL [A], d'abord comme mandataire judiciaire à la procédure de redressement judiciaire, puis comme liquidateur judiciaire, remplit les conditions de forme et de fond d'une reprise de l'instance relativement à la demande en paiement initiale de la société CPE.
La cour constate en conséquence que l'instance a régulièrement été reprise concernant cette demande en paiement.
Sur la reprise de l'instance concernant les demandes reconventionnelles de M. [B]':
Il sera rappelé qu'en vertu du dernier alinéa de l'article 954 du Code de procédure civile, la cour demeure saisie des demandes reconventionnelles de M. [B] qui est présumé demander la confirmation du jugement de première instance et s'en approprier les motifs.
Cela étant, l'article L.622-21 du Code de commerce pose le principe d'ordre public de l'interruption ou de l'interdiction de toute action en justice exercée par un créancier contre un débiteur faisant l'objet d'une procédure collective ayant pour objet la résolution d'un contrat pour défaut de paiement d'une somme d'argent, dont la créance est antérieure à la procédure collective.
En application de l'article L.622-22 du Code de commerce, l'interruption d'instance dure jusqu'à la déclaration de créance par le créancier et la mise en cause du mandataire judiciaire et, à défaut, jusqu'à la clôture de la procédure collective.
Par ailleurs, l'article 376 du Code de procédure civile précise que l'interruption de l'instance ne dessaisit pas le juge, lequel peut inviter les parties à lui faire part de leurs initiatives en vue de reprendre l'instance et radier l'affaire à défaut de diligences dans le délai par lui imparti.
En l'espèce, la demande reconventionnelle en dommages et intérêts de M. [B], qui a pour objet la condamnation de la société CPE au paiement d'une somme d'argent au titre d'une créance antérieure à l'ouverture de la procédure collective, se heurte au principe de l'arrêt des poursuites individuelles édicté par les articles précités et la reprise de l'instance est en conséquence subordonnée à une condition supplémentaire tenant à la justification par M. [B] d'une déclaration de créance valable.
Or, l'intimé, bien qu'il ait finalement constitué avocat, n'a pas justifié d'une éventuelle déclaration de sa créance auprès des organes de la procédure collective de la société CPE.
Au contraire, la SELARL [A], ès-qualités de liquidateur judiciaire de la société CPE affirme, sans être démentie, que M. [B] n'a régularisé aucune déclaration de créance. Il s'ensuit que, en l'absence de reprise de l'instance, la cour ne peut pas statuer sur les demandes reconventionnelles de M. [B], ni d'ailleurs sur le moyen présenté en défense tenant à l'inopposabilité de la créance revendiquée par M. [S] [B] à la procédure collective de la société CPE.
La cour constate en conséquence que l'instance demeure interrompue concernant les demandes reconventionnelles de M. [B].
Sur la disjonction':
Dès lors que la partie appelante remplit les conditions d'une reprise de l'instance et qu'elle dispose d'un droit à voir son appel examiné, l'intérêt d'une bonne justice commande, en application de l'article 367 du Code de procédure civile, que soit disjoint l'examen des demandes réciproques des parties, la demande reconventionnelle en dommages et intérêts de M. [B] étant ainsi incluse dans une instance distincte enrôlée sous le numéro de répertoire général'25/04219.
En outre et en l'absence de diligences de M. [B] malgré le délai imparti par le conseiller de la mise en état par ordonnance du 26 avril 2023, cette instance distincte, enrôlée sous le nouveau numéro de répertoire général'25/04219, est radiée du rôle des affaires en cours. Elle pourra être ré-inscrite en cas de justification d'une déclaration de créance valable et, à défaut, après la clôture de la procédure collective sous réserve de l'absence de péremption.
Sur la recevabilité de l'opposition à l'ordonnance portant injonction de payer':
En l'absence de tout moyen développé par la société CPE et son liquidateur judiciaire se rapportant à la recevabilité de l'opposition de M. [B] à l'ordonnance portant injonction de payer, le jugement attaqué, qui a déclaré cette opposition recevable et déclaré en conséquence l'ordonnance numéro 21-18-003730 du 8 février 2019 non-avenue, ne peut qu'être confirmé.
Sur la demande principale en paiement':
Aux termes de l'article 1353 du Code civil, celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver.
En l'espèce, la société CPE justifie d'abord d'un devis du 12 juillet 2017 accepté le 20 juillet 2017 par M. [B] pour la réalisation d'une piscine à débordement au prix de 69'369,60 euros TTC «'hors option terrasse'».
Elle produit ensuite le récapitulatif des factures et avoirs se rapportant au chantier, ce dont il résulte, comme exactement relevé par le premier juge, que les sommes totales facturées s'élèvent à 89'585,88 euros TTC. En revanche, la société CPE ne s'explique pas le prix des prestations se rapportant aux «'terrasses essence Accoya posées sur plots'», ni sur les travaux supplémentaires de couverture Covrex de la piscine qu'elle indique, aux termes du courrier de son conseil, avoir réalisés en sus du devis initial. Or, outre l'absence de preuve d'un accord préalable sur le prix de ces prestations hors devis, il ne résulte d'aucune des pièces produites un accord des parties sur les montants facturés en sus du devis. Au contraire, la circonstance que la société CPE ait été amenée en avril 2018 à établir, à la demande de M. [B], un récapitulatif des sommes facturées, démontre l'existence d'une discussion des parties à ce sujet. S'il est constant qu'en réponse à un courriel mentionnant en objet «'paiement en souffrance relance 2'», M. [B] a fait part, par un courriel du 3 juillet 2018, de divers désordres et non-finitions affectant la piscine, le maître de l'ouvrage ne fait aucune remarque concernant les sommes facturées. Ce silence, à défaut d'être non-équivoque, n'emporte ainsi aucun accord même tacite sur le prix des prestations hors devis de la société CPE.
En réalité, le premier juge a écarté l'exception d'inexécution soulevée par M. [B] mais il a néanmoins rejeté la demande en paiement de la société CPE en l'absence de preuve d'un accord des parties sur les prestations hors devis.
Il a plus particulièrement relevé que M. [B] s'était acquitté d'une somme totale de 80'544 euros sur la base d'un devis de 69'369,60 euros de sorte que la société CPE échouait à rapporter la preuve du quantum de sa créance.
A hauteur d'appel, la société CPE ne justifie d'aucune pièce nouvelle de nature à établir l'accord de M. [B] sur le prix des prestations hors devis. Dès lors, et sans qu'il soit besoin d'examiner les moyens de la société appelante se rapportant, à titre principal, à l'absence de désordres affectant les travaux et, à titre subsidiaire, à la gravité mineure desdits désordres, le jugement attaqué, en ce qu'il l'a déboutée de la demande en paiement de la somme de 9'041,88 euros, est confirmé.
Sur les demandes accessoires':
La cour confirme la décision attaquée qui a condamné la société CPE, partie perdante, aux dépens de première instance et à payer à M. [B] la somme de 1'500 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, montant justifié en équité.
La société CPE, partie perdante, est condamnée aux dépens à hauteur d'appel et elle est déboutée de sa demande au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Rejette la demande de ré-ouverture des débats,
Constate la reprise de l'instance concernant la demande en paiement de la SARL CPE, régulièrement représentée dans ses droits patrimoniaux par la SELARL [A], ès- qualités de liquidateur judiciaire,
Constate que l'instance demeure interrompue concernant la demande reconventionnelle en dommages et intérêts de M. [S] [B] qui ne justifie pas d'une déclaration de créance valable,
Ordonne la disjonction de l'instance, la demande reconventionnelle en dommages et intérêts présentée par M. [S] [B] étant incluse dans l'affaire enregistrée sous le numéro de répertoire général'25/04219,
Prononce la radiation de cette instance numéro de répertoire général 25/04219, l'affaire pouvant être rétablie au rôle des affaires en cours à la diligence de l'une des parties en cas de déclaration de créance valable ou en cas de clôture de la procédure collective, sous réserve de l'absence de péremption,
Confirme le jugement rendu le 20 décembre 2021 par le Tribunal Judiciaire de Lyon en en ce qu'il a':
dit M. [S] [B] recevable en son opposition,
déclaré non avenue l'injonction de payer numéro 21-18-003730 rendue le 8 février 2019,
débouté la SARL CPE de sa demande en paiement de la somme de 9'041,88 euros,
condamné la SARL CPE à payer à M. [S] [B] une somme de 1'500 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,
débouté la SARL CPE de sa demande au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,
condamné la SARL CPE aux dépens,
Y ajoutant,
Condamne la SELARL [A], ès-qualités de liquidateur judiciaire de la SARL CPE, nommée à cette fonction suivant jugement de conversion d'une procédure de redressement judiciaire en liquidation judiciaire prononcé le 28 juin 2023 par le tribunal de commerce de Lyon, aux dépens de l'instance d'appel,
Rejette la demande de la SELARL [A], ès-qualités de liquidateur judiciaire de la SARL CPE, nommée à cette fonction suivant jugement de conversion d'une procédure de redressement judiciaire en liquidation judiciaire prononcé le 28 juin 2023 par le tribunal de commerce de Lyon, au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRESIDENT