CA Grenoble, ch. com., 22 mai 2025, n° 23/03807
GRENOBLE
Arrêt
Autre
N° RG 23/03807 - N° Portalis DBVM-V-B7H-MAH2
C8
Minute N°
Copie exécutoire
délivrée le :
la SELARL CABINET JP
la SELARL [5]
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE GRENOBLE
CHAMBRE COMMERCIALE
ARRÊT DU JEUDI 22 MAI 2025
Appel d'un jugement (N° RG 2022F629)
rendu par le Tribunal de Commerce de ROMANS SUR ISERE
en date du 28 juin 2023
suivant déclaration d'appel du 02 novembre 2023
APPELANT :
M. [B] [Y]
né le [Date naissance 1] 1968 à [Localité 12]
de nationalité Française
[Adresse 15]
[Localité 3]
représenté par Me Jean POLLARD de la SELARL CABINET JP, avocat au barreau de VALENCE
INTIMÉE :
S.E.L.A.R.L. [16] société d'exercice libéral à responsabilité limitée au capital de 917.400 euros, immatriculée au registre du commerce et des sociétés de CHERBOURG sous le numéro 504 384 504, représentée par son gérant en exercice, Maître [M] [F], ès qualité de liquidateur judiciaire suivant jugement rendu par le Tribunal de Commerce de ROMANS SUR ISERE du 29 avril 2021, de la société [6], société à responsabilité limitée au capital de 8 000 euros, immatriculée au registre du commerce et des sociétés de ROMANS sous le numéro 493 088 611
[Adresse 2]
[Localité 4]
représentée et plaidant par Me Sandrine CUVIER de la SELARL AEGIS, avocat au barreau de VALENCE
COMPOSITION DE LA COUR :
LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Madame Marie-Pierre FIGUET, Président,
M. Lionel [M], Conseiller,
Mme Raphaële FAIVRE, Conseillère,
Assistés lors des débats de Alice richet, greffier.
MINISTERE PUBLIC :
Auquel l'affaire a été régulièrement communiquée et représentée lors des débats par Mme Françoise BENEZECH, avocate générale, qui a fait connaître son avis.
DÉBATS :
A l'audience publique du 13 mars 2025, Mme FIGUET, Présidente, a été entendue en son rapport,
Les avocats ont été entendus en leurs conclusions et Me CUVIER en sa plaidoirie,
Puis l'affaire a été mise en délibéré pour que l'arrêt soit rendu ce jour,
Faits et procédure
La société [6] dont M. [B] [Y] était le gérant exerçait une activité de maîtrise d'oeuvre et de coordination des travaux tant dans le gros oeuvre que dans le second oeuvre.
Sur l'assignation délivrée par la Sci [9], le tribunal de commerce de Romans sur Isère a prononcé la liquidation judiciaire de la société [6], a nommé la Selarl [16] en la personne de Me [F] en qualité de liquidateur judiciaire et a fixé la date de cessation des paiements au 5 mars 2021 par jugement du 29 avril 2021.
Par acte du 26 septembre 2022, la Selarl [16] a assigné M. [B] [Y] devant le tribunal de commerce de Romans sur Isère en responsabilité pour insuffisance d'actif et en interdiction de gérer.
Par jugement du 28 juin 2023, le tribunal de commerce de Romans sur Isère a:
- déclaré recevable l'action engagée à l'encontre de M. [B] [Y] sur le fondement des articles L.651-1 et L.653-3 du code de commerce,
- débouté la Selarl [16] en la personne de Me [F] de sa demande d'interdiction de gérer à l'encontre de M. [B] [Y],
- condamné M. [B] [Y] en sa qualité de dirigeant de droit au titre de sa contribution à l'insuffisance d'actif de la société [11] (sic)à payer entre les mains du liquidateur judiciaire la somme de 27.929,70 euros,
- condamné M. [B] [Y] à verser à la Selarl [16] agissant par Me [F] la somme de 1.500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- ordonné l'exécution provisoire du jugement,
- ordonné les dépens en frais privilégiés de procédure.
Par déclaration du 2 novembre 2023, M. [B] [Y] a interjeté appel de ce jugement en ce qu'il a condamné M. [B] [Y] en sa qualité de dirigeant de droit au titre de sa contribution à l'insuffisance d'actif de la société [11] à payer entre les mains du liquidateur judiciaire la somme de 27.929,70 euros et en ce qu'il a condamné M. [B] [Y] à verser à la Selarl [16] agissant par Me [F] la somme de 1.500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
La clôture de l'instruction a été ordonnée le 20 février 2025.
Prétentions et moyens de M. [B] [Y]
Dans ses conclusions remises le 4 septembre 2024, il demande à la cour de :
- déclarer son appel recevable et bien fondé,
- infirmer le jugement du tribunal de commerce de Romans sur Isère dans ses dispositions qui :
* condamne M. [B] [Y] en sa qualité de dirigeant de droit de la société [11] à payer entre les mains du liquidateur judiciaire la somme de 27.929,70 euros,
* condamne M. [B] [Y] à verser à la Selarl [16] agissant par Me [F] la somme de 1.500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
Statuant à nouveau :
- débouter la Selarl [16] de l'ensemble de ses demandes et par conséquent de son appel incident,
A titre subsidiaire :
- fixer le montant de comblement du passif à de plus justes proportions,
- condamner la Selarl [16] à payer à M. [B] [Y] la somme de 3.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner la Selarl [16] aux entiers dépens.
Sur l'absence d'une faute de gestion, il fait valoir que :
- s'agissant de l'assurance souscrite, si la Selarl [16] affirme que l'absence de souscription d'une assurance pour l'activité de maîtrise d'oeuvre constitue une faute de gestion, l'absence de prise en charge par la compagnie l'Auxiliaire des condamnations prononcées à l'encontre de la société [6] résulte d'une absence de réception de l'ouvrage et non pas d'une absence de contrat; en effet il avait bien souscrit un contrat d'assurance décennale au titre de son activité, à savoir l'ordonnancement, le pilotage et la coordination (OPC) qui comprend des missions de maîtrise d'oeuvre, la distinction entre OPC et maîtrise d'oeuvre est très difficilement perceptible pour une personne n'ayant pas de compétence en matière d'assurance, M. [B] [Y] a exercé son activité en pensant être légitimement couvert, en tout état de cause la garantie légale ne pouvait être invoquée pour solliciter la garantie de l'assurance en l'absence d'une réception, seule la responsabilité contractuelle de la société [6] ayant été retenue,
- s'agissant de la société [13], celle-ci n'a pas été créé le 9 juin 2011 pour tenter de se soustraire à ses obligations mais en raison du refus de son assureur d'assurer la société [6] pour la poursuite de l'activité compte tenu du litige en cours concernant la société [8] au parfum, il a donc été dans l'obligation de créer une nouvelle société pour poursuivre son activité en toute sécurité, les premières condamnations datent du 3 décembre 2013, soit 18 mois après la création de la société [13], et l'arrêt de la cour d'appel a été signifié plus de 10 ans après cette création,
- sa responsabilité ne peut être engagée en cas de simple négligence,
- sur la cessation des paiements, celle-ci n'a pu être constatée que le 9 février 2021 lors de la délivrance du commandement de payer, il avait jusqu'au 26 mars 2021 pour déclarer la cessation des paiements, or il a été assigné avant cette date, au demeurant le tribunal a fixé la date de cessation des paiement au 5 mars 2021,
- le créancier n'a aucunement été impacté par un quelconque retard dans la déclaration de cessation des paiements, le seul passif est constitué par la créance de la Sci [8] au parfum et il n'y a pas eu d'aggravation du passif.
- n'ayant commis aucune faute de gestion, il n'a pas à payer une somme au titre de l'insuffisance d'actif, étant relevé que le tribunal a manifestement commis une erreur matérielle en mentionnant la société [11] au lieu de la société [6],
- il n'a jamais indiqué ne pas être opposé à régler la somme de 27.929,70 euros.
Prétentions et moyens de la Selarl [16]
Dans ses conclusions remises le 6 novembre 2024, elle demande à la cour de:
- rejeter toutes fins et conclusions contraires,
- débouter M. [B] [Y] de l'intégralité de ses demandes,
- confirmer le jugement rendu le 28 juin 2023 par le tribunal de commerce de Romans sur Isère en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a débouté la Selarl [16] agissant par Me [M] [F] ès qualité de
liquidateur judiciaire de la société [6] de sa demande d'interdiction de gérer à l'encontre de M. [B] [Y],
- infirmer le jugement rendu le 28 juin 2023 par le tribunal de commerce de Romans sur Isère en ce qu'il a débouté la Selarl [16], agissant par Me [M] [F] ès qualité de liquidateur judiciaire de la société [6], de sa demande d'interdiction de gérer à l'encontre de M. [B] [Y],
Statuant à nouveau et faisant droit à l'appel incident:
- prononcer une mesure d'interdiction de gérer pendant 8 ans à l'encontre de M. [B] [Y],
- condamner M. [B] [Y] à verser à la Selarl [16] ès qualité de liquidateur judiciaire de la société [6] la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens de l'instance.
Sur l'action en responsabilité pour insuffisance d'actif, elle fait valoir que :
- l'insuffisance d'actif s'élève à la somme de 27.929,72 euros,
- s'agissant des fautes de gestion, la société [6] a effectué des prestations sans que son dirigeant n'ait souscrit une assurance au titre de ses prestations de maîtrise d'oeuvre, la police d'assurance ne couvrant que les missions Ordonnancement, Pilotage et Coordination (OPC) et Coordination Sécurité et Protection de la Santé (CSPS) à l'exclusion des missions de maîtrise d'oeuvre,
- le tribunal a bien rejeté la demande en garantie formée à l'encontre de la compagnie l'Auxiliaire au motif que celle-ci ne couvrait que les missions OPC et [7] alors que la faute de conception générale et l'absence de toute étude technique et de tout CCTP imputés à la société [6] relevaient de la mission DCE, non assurée,
- si la société [6] avait été assurée au titre de l'activité DCE, la société [9] aurait été indemnisée par l'assurance,
- la société [6] n'a jamais recherché la responsabilité de son assureur pour défaut de conseil et M. [B] [Y] ne peut se dédouaner au motif d'un manquement de l'assureur à son obligation de conseil,
- en outre, dès la connaissance du litige, M. [B] [Y] a créé une nouvelle société le 18 mai 2011, soit au cours des opérations d'expertise, avec le même objet social et la même adresse de siège social, cette création a eu pour effet de laisser la société [6] sans activité et a ainsi contribué à l'insuffisance d'actif,
- les fautes de gestion sont bien en relation avec l'insuffisance d'actif.
Sur la mesure d'interdiction de gérer, elle relève que :
- la société [6] ne pouvait ignorer son état de cessation des paiements eu égard à la force exécutoire attachée aux décisions de justice et à l'absence de toute activité depuis de nombreuses années,
- M. [B] [Y] n'a pas sollicité l'ouverture d'une procédure collective dans les 45 jours et ce sciemment.
Le 11 mars 2025, le ministère public a requis l'infirmation du jugement en soulignant la motivation contradictoire de la décision qui tout en retenant l'absence de faute de gestion condamne néanmoins M. [Y] au titre de la contribution à l'insuffisance d'actif et en faisant observer qu'une simple négligence ne peut entraîner la responsabilité du dirigeant.
Pour le surplus des demandes et des moyens développés, il convient de se reporter aux dernières écritures des parties en application de l'article 455 du code de procédure civile.
Motifs de la décision
1/ Sur l'action en responsabilité pour insuffisance d'actif
Aux termes de l'article L.651-2 du code de commerce, lorsque la liquidation judiciaire d'une personne morale fait apparaître une insuffisance d'actif, le tribunal peut, en cas de faute de gestion ayant contribué à cette insuffisance d'actif décider que le montant de cette insuffisance sera supporté en tout ou partie par le dirigeant de droit ou de fait ayant contribué à la faute de gestion. Toutefois, en cas de simple négligence du dirigeant de droit ou de fait dans la gestion de la personne morale, sa responsabilité au titre de l'insuffisance d'actif ne peut être engagée.
Sur l'insuffisance d'actif
En l'espèce, il est justifié que le montant de l'insuffisance d'actif de la société s'élève à 27.929,70 résultant d'un passif admis à hauteur de 28.704,72 euros et d'un actif de 775,29 euros.
Sur les fautes de gestion
Il est reproché à M. [Y] d'avoir fait effectuer par la société [6] dont il était le gérant des prestations pour lesquelles elle n'était pas assurée.
Il résulte du jugement rendu le 14 juin 2016 par le tribunal de grande instance de Valence confirmée par arrêt de la cour d'appel de Grenoble du 12 décembre 2018 que par contrats du 4 décembre 2009, la Sarl [6] s'est vue confier une mission de maîtrise d'oeuvre portant sur une mission de Documents de Consultation des Entreprises (DCE), une mission d'Ordonnancement, Pilotage Coordination (OPC) et une mission de Coordination Sécurité Protection de la santé (CSPS) en phases conception et réalisation, que les désordres constatés se rattachent à la mission DCE, effectivement confiée à la Sarl [6], que la police souscrite par la Sarl [6] couvre uniquement les missions OPC et [7] pour les chantiers ouverts entre le 1er janvier et le 31 décembre 2010 et que dès lors, la garantie de la compagnie l'Auxiliaire n'est pas due au titre des condamnations prononcées pour les travaux de modification de l'implantation du ballon [10] et les travaux de reprise des hammams.
En conséquence, contrairement à ce qu'allègue M. [Y], l'absence de garantie par la compagnie l'Auxiliaire résulte bien d'une absence d'assurance pour l'activité réellement exercée et non du fait qu'il n'y a pas eu de réception de l'ouvrage, l'assureur ayant uniquement soutenu dans ses écritures que l'activité exercée n'était pas assurée.
M. [Y] qui oeuvre dans le domaine du bâtiment connaît nécessairement l'intitulé des différentes missions qui peuvent lui être confiées. En faisant souscrire à la Sarl [6] une assurance limitée à deux missions, à savoir OPC et [7], alors qu'il a accepté expressément que la SARL [6] se voit confier une mission portant aussi sur une mission Documents de Consultation des Entreprises (DCE), il a fait réaliser par la société [6] une activité sans qu'elle soit assurée pour celle-ci et a commis ainsi une faute de gestion qui ne peut être considérée comme une simple négligence.
En outre, cette faute a bien contribué à l'insuffisance d'actif puisque le passif de la société [6] est uniquement constitué des condamnations prononcées par le tribunal de grande instance de Valence par jugement du 14 juin 2016 que cette société n'aurait pas eu à assumer en présence d'une assurance garantissant son activité.
Par ailleurs, il est établi que M. [Y] a créé dès le 1er mai 2011 la Sarl [14] d'oeuvre ayant une activité de maîtrise d'oeuvre globale, conception, réalisation de maîtrise d'oeuvre, une activité de bureaux d'études fluides et structures et une activité de programmiste.
Cette création a été effectuée alors même que M. [Y] avait connaissance des désordres survenus sur le chantier de la SCI [8] au parfum, objet du litige tranché par le tribunal de grande instance de Valence par jugement du 14 juin 2016, puisqu'une expertise a été ordonnée le 22 décembre 2010 et le rapport déposé le 25 octobre 2011.
Il indique d'ailleurs dans ses conclusions que conscient de la fragilité de l'assurance souscrite auprès de la compagnie l'Auxiliaire, il a créé une nouvelle société pour la poursuite de son activité. Il a ainsi laissé la société [6] sans activité.
Il ne peut sérieusement soutenir que la création d'une nouvelle société s'imposait afin d'être correctement assuré alors qu'il lui appartenait d'assurer correctement la société [6], au besoin en changeant d'assureur.
En transférant son activité d'une société à l'autre alors que la société [6] était exposée à devoir indemniser des désordres signalés, M. [Y] a commis une faute de gestion ayant contribué à l'insuffisance d'actif.
Sur le montant de la contribution
Le montant de la contribution du dirigeant à l'insuffisance d'actif qui ne peut excéder celui de l'insuffisance d'actif certaine au jour où le juge statue doit être proportionnée au nombre et à la gravité des fautes de gestion et tenir compte de la situation personnelle du dirigeant.
En l'espèce, M. [Y] a commis deux fautes de gestion d'une gravité certaine. Celles-ci ont contribué entièrement à l'insuffisance d'actif.
M. [Y] est marié et a trois enfants âgés de 30 ans, 27 ans et 22 ans. Il ne précise pas le montant de ses ressources.
Au regard de ces éléments, le montant de la contribution à l'insuffisance d'actif a été fixé à bon droit à la somme de 27.929,70 euros.
En conséquence, le jugement du 28 juin 2023 sera confirmé par substitution de motifs en ce qu'il a condamné M. [Y] en sa qualité de dirigeant de droit à payer entre les mains du liquidateur judiciaire la somme de 27.929,70 euros au titre de sa contribution à l'insuffisance d'actif, sauf à rectifier le dit chef en indiquant qu'il s'agit de l'insuffisance d'actif de la société [6] et non pas de la société [11].
2/ Sur l'interdiction de gérer
En application de l'article L.553-8 du même code, dans les cas prévus aux articles L.653-3 à L.653-6, le tribunal peut prononcer, à la place de la faillite personnelle, l'interdiction de diriger, gérer, administrer ou contrôler, directement ou indirectement, soit toute entreprise commerciale ou artisanale, toute exploitation agricole et toute personne morale, soit une ou plusieurs de celles-ci. Elle peut également être prononcée à l'encontre de toute personne mentionnée à l'article L. 653-1 qui a omis sciemment de demander l'ouverture d'une procédure de redressement ou de liquidation judiciaire dans le délai de 45 jours à compter de la cessation des paiements, sans avoir par ailleurs demandé l'ouverture d'une procédure de conciliation.
Il n'est pas justifié de la signification de l'arrêt du 12 décembre 2018 à la société [6].
Celle-ci s'est vue délivrer un commandement aux fins de saisie-vente le 9 février 2021.
C'est donc à cette date que M. [Y] avait nécessaireemnt conscience de l'état de cessation des paiements.
La société [6] a été assignée en redressement judiciaire par la Sci [8] au parfum par acte du 5 mars 2021, avant même l'expiration du délai de 45 jours.
Il ne peut donc être reproché à M. [Y] de ne pas avoir demandé l'ouverture d'une procédure de redressement ou de liquidation judiciaire dans le délai de 45 jours à compter de la cessation des paiements alors même qu'il s'est trouvé assigné en redressement judiciaire avant l'expiration de ce délai.
La Selarl [16] n'a pas invoqué d'autres cas que celui du défaut de déclaration de cessation des paiements.
Dès lors, le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté la Selarl [16] en la personne de Me [F] de sa demande d'interdiction de gérer à l'encontre de M. [B] [Y].
3/ Sur les mesures accessoires
M. [Y] qui succombe dans son appel sera condamné aux entiers dépens d'appel et à payer à la Selarl [16] en la personne de Me [F] en qualité de liquidateur judiciaire de la société [6] la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La Cour statuant publiquement, contradictoirement, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile, après en avoir délibéré conformément à la loi,
Confirme le jugement en toutes ses dispositions soumises à la cour sauf à le rectifier en indiquant qu'il s'agit de l'insuffisance d'actif de la société [6] et non pas de la société [11].
Ajoutant,
Condamne M. [Y] aux dépens d'appel.
Condamne M. [Y] à payer à la Selarl [16] en la personne de Me [F] en qualité de liquidateur judiciaire de la société [6] la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Déboute M. [Y] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
SIGNÉ par Mme FIGUET, Présidente et par Mme Solène ROUX, Greffière présente lors de la mise à disposition à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La Greffière La Présidente
C8
Minute N°
Copie exécutoire
délivrée le :
la SELARL CABINET JP
la SELARL [5]
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE GRENOBLE
CHAMBRE COMMERCIALE
ARRÊT DU JEUDI 22 MAI 2025
Appel d'un jugement (N° RG 2022F629)
rendu par le Tribunal de Commerce de ROMANS SUR ISERE
en date du 28 juin 2023
suivant déclaration d'appel du 02 novembre 2023
APPELANT :
M. [B] [Y]
né le [Date naissance 1] 1968 à [Localité 12]
de nationalité Française
[Adresse 15]
[Localité 3]
représenté par Me Jean POLLARD de la SELARL CABINET JP, avocat au barreau de VALENCE
INTIMÉE :
S.E.L.A.R.L. [16] société d'exercice libéral à responsabilité limitée au capital de 917.400 euros, immatriculée au registre du commerce et des sociétés de CHERBOURG sous le numéro 504 384 504, représentée par son gérant en exercice, Maître [M] [F], ès qualité de liquidateur judiciaire suivant jugement rendu par le Tribunal de Commerce de ROMANS SUR ISERE du 29 avril 2021, de la société [6], société à responsabilité limitée au capital de 8 000 euros, immatriculée au registre du commerce et des sociétés de ROMANS sous le numéro 493 088 611
[Adresse 2]
[Localité 4]
représentée et plaidant par Me Sandrine CUVIER de la SELARL AEGIS, avocat au barreau de VALENCE
COMPOSITION DE LA COUR :
LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Madame Marie-Pierre FIGUET, Président,
M. Lionel [M], Conseiller,
Mme Raphaële FAIVRE, Conseillère,
Assistés lors des débats de Alice richet, greffier.
MINISTERE PUBLIC :
Auquel l'affaire a été régulièrement communiquée et représentée lors des débats par Mme Françoise BENEZECH, avocate générale, qui a fait connaître son avis.
DÉBATS :
A l'audience publique du 13 mars 2025, Mme FIGUET, Présidente, a été entendue en son rapport,
Les avocats ont été entendus en leurs conclusions et Me CUVIER en sa plaidoirie,
Puis l'affaire a été mise en délibéré pour que l'arrêt soit rendu ce jour,
Faits et procédure
La société [6] dont M. [B] [Y] était le gérant exerçait une activité de maîtrise d'oeuvre et de coordination des travaux tant dans le gros oeuvre que dans le second oeuvre.
Sur l'assignation délivrée par la Sci [9], le tribunal de commerce de Romans sur Isère a prononcé la liquidation judiciaire de la société [6], a nommé la Selarl [16] en la personne de Me [F] en qualité de liquidateur judiciaire et a fixé la date de cessation des paiements au 5 mars 2021 par jugement du 29 avril 2021.
Par acte du 26 septembre 2022, la Selarl [16] a assigné M. [B] [Y] devant le tribunal de commerce de Romans sur Isère en responsabilité pour insuffisance d'actif et en interdiction de gérer.
Par jugement du 28 juin 2023, le tribunal de commerce de Romans sur Isère a:
- déclaré recevable l'action engagée à l'encontre de M. [B] [Y] sur le fondement des articles L.651-1 et L.653-3 du code de commerce,
- débouté la Selarl [16] en la personne de Me [F] de sa demande d'interdiction de gérer à l'encontre de M. [B] [Y],
- condamné M. [B] [Y] en sa qualité de dirigeant de droit au titre de sa contribution à l'insuffisance d'actif de la société [11] (sic)à payer entre les mains du liquidateur judiciaire la somme de 27.929,70 euros,
- condamné M. [B] [Y] à verser à la Selarl [16] agissant par Me [F] la somme de 1.500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- ordonné l'exécution provisoire du jugement,
- ordonné les dépens en frais privilégiés de procédure.
Par déclaration du 2 novembre 2023, M. [B] [Y] a interjeté appel de ce jugement en ce qu'il a condamné M. [B] [Y] en sa qualité de dirigeant de droit au titre de sa contribution à l'insuffisance d'actif de la société [11] à payer entre les mains du liquidateur judiciaire la somme de 27.929,70 euros et en ce qu'il a condamné M. [B] [Y] à verser à la Selarl [16] agissant par Me [F] la somme de 1.500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
La clôture de l'instruction a été ordonnée le 20 février 2025.
Prétentions et moyens de M. [B] [Y]
Dans ses conclusions remises le 4 septembre 2024, il demande à la cour de :
- déclarer son appel recevable et bien fondé,
- infirmer le jugement du tribunal de commerce de Romans sur Isère dans ses dispositions qui :
* condamne M. [B] [Y] en sa qualité de dirigeant de droit de la société [11] à payer entre les mains du liquidateur judiciaire la somme de 27.929,70 euros,
* condamne M. [B] [Y] à verser à la Selarl [16] agissant par Me [F] la somme de 1.500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
Statuant à nouveau :
- débouter la Selarl [16] de l'ensemble de ses demandes et par conséquent de son appel incident,
A titre subsidiaire :
- fixer le montant de comblement du passif à de plus justes proportions,
- condamner la Selarl [16] à payer à M. [B] [Y] la somme de 3.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner la Selarl [16] aux entiers dépens.
Sur l'absence d'une faute de gestion, il fait valoir que :
- s'agissant de l'assurance souscrite, si la Selarl [16] affirme que l'absence de souscription d'une assurance pour l'activité de maîtrise d'oeuvre constitue une faute de gestion, l'absence de prise en charge par la compagnie l'Auxiliaire des condamnations prononcées à l'encontre de la société [6] résulte d'une absence de réception de l'ouvrage et non pas d'une absence de contrat; en effet il avait bien souscrit un contrat d'assurance décennale au titre de son activité, à savoir l'ordonnancement, le pilotage et la coordination (OPC) qui comprend des missions de maîtrise d'oeuvre, la distinction entre OPC et maîtrise d'oeuvre est très difficilement perceptible pour une personne n'ayant pas de compétence en matière d'assurance, M. [B] [Y] a exercé son activité en pensant être légitimement couvert, en tout état de cause la garantie légale ne pouvait être invoquée pour solliciter la garantie de l'assurance en l'absence d'une réception, seule la responsabilité contractuelle de la société [6] ayant été retenue,
- s'agissant de la société [13], celle-ci n'a pas été créé le 9 juin 2011 pour tenter de se soustraire à ses obligations mais en raison du refus de son assureur d'assurer la société [6] pour la poursuite de l'activité compte tenu du litige en cours concernant la société [8] au parfum, il a donc été dans l'obligation de créer une nouvelle société pour poursuivre son activité en toute sécurité, les premières condamnations datent du 3 décembre 2013, soit 18 mois après la création de la société [13], et l'arrêt de la cour d'appel a été signifié plus de 10 ans après cette création,
- sa responsabilité ne peut être engagée en cas de simple négligence,
- sur la cessation des paiements, celle-ci n'a pu être constatée que le 9 février 2021 lors de la délivrance du commandement de payer, il avait jusqu'au 26 mars 2021 pour déclarer la cessation des paiements, or il a été assigné avant cette date, au demeurant le tribunal a fixé la date de cessation des paiement au 5 mars 2021,
- le créancier n'a aucunement été impacté par un quelconque retard dans la déclaration de cessation des paiements, le seul passif est constitué par la créance de la Sci [8] au parfum et il n'y a pas eu d'aggravation du passif.
- n'ayant commis aucune faute de gestion, il n'a pas à payer une somme au titre de l'insuffisance d'actif, étant relevé que le tribunal a manifestement commis une erreur matérielle en mentionnant la société [11] au lieu de la société [6],
- il n'a jamais indiqué ne pas être opposé à régler la somme de 27.929,70 euros.
Prétentions et moyens de la Selarl [16]
Dans ses conclusions remises le 6 novembre 2024, elle demande à la cour de:
- rejeter toutes fins et conclusions contraires,
- débouter M. [B] [Y] de l'intégralité de ses demandes,
- confirmer le jugement rendu le 28 juin 2023 par le tribunal de commerce de Romans sur Isère en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a débouté la Selarl [16] agissant par Me [M] [F] ès qualité de
liquidateur judiciaire de la société [6] de sa demande d'interdiction de gérer à l'encontre de M. [B] [Y],
- infirmer le jugement rendu le 28 juin 2023 par le tribunal de commerce de Romans sur Isère en ce qu'il a débouté la Selarl [16], agissant par Me [M] [F] ès qualité de liquidateur judiciaire de la société [6], de sa demande d'interdiction de gérer à l'encontre de M. [B] [Y],
Statuant à nouveau et faisant droit à l'appel incident:
- prononcer une mesure d'interdiction de gérer pendant 8 ans à l'encontre de M. [B] [Y],
- condamner M. [B] [Y] à verser à la Selarl [16] ès qualité de liquidateur judiciaire de la société [6] la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens de l'instance.
Sur l'action en responsabilité pour insuffisance d'actif, elle fait valoir que :
- l'insuffisance d'actif s'élève à la somme de 27.929,72 euros,
- s'agissant des fautes de gestion, la société [6] a effectué des prestations sans que son dirigeant n'ait souscrit une assurance au titre de ses prestations de maîtrise d'oeuvre, la police d'assurance ne couvrant que les missions Ordonnancement, Pilotage et Coordination (OPC) et Coordination Sécurité et Protection de la Santé (CSPS) à l'exclusion des missions de maîtrise d'oeuvre,
- le tribunal a bien rejeté la demande en garantie formée à l'encontre de la compagnie l'Auxiliaire au motif que celle-ci ne couvrait que les missions OPC et [7] alors que la faute de conception générale et l'absence de toute étude technique et de tout CCTP imputés à la société [6] relevaient de la mission DCE, non assurée,
- si la société [6] avait été assurée au titre de l'activité DCE, la société [9] aurait été indemnisée par l'assurance,
- la société [6] n'a jamais recherché la responsabilité de son assureur pour défaut de conseil et M. [B] [Y] ne peut se dédouaner au motif d'un manquement de l'assureur à son obligation de conseil,
- en outre, dès la connaissance du litige, M. [B] [Y] a créé une nouvelle société le 18 mai 2011, soit au cours des opérations d'expertise, avec le même objet social et la même adresse de siège social, cette création a eu pour effet de laisser la société [6] sans activité et a ainsi contribué à l'insuffisance d'actif,
- les fautes de gestion sont bien en relation avec l'insuffisance d'actif.
Sur la mesure d'interdiction de gérer, elle relève que :
- la société [6] ne pouvait ignorer son état de cessation des paiements eu égard à la force exécutoire attachée aux décisions de justice et à l'absence de toute activité depuis de nombreuses années,
- M. [B] [Y] n'a pas sollicité l'ouverture d'une procédure collective dans les 45 jours et ce sciemment.
Le 11 mars 2025, le ministère public a requis l'infirmation du jugement en soulignant la motivation contradictoire de la décision qui tout en retenant l'absence de faute de gestion condamne néanmoins M. [Y] au titre de la contribution à l'insuffisance d'actif et en faisant observer qu'une simple négligence ne peut entraîner la responsabilité du dirigeant.
Pour le surplus des demandes et des moyens développés, il convient de se reporter aux dernières écritures des parties en application de l'article 455 du code de procédure civile.
Motifs de la décision
1/ Sur l'action en responsabilité pour insuffisance d'actif
Aux termes de l'article L.651-2 du code de commerce, lorsque la liquidation judiciaire d'une personne morale fait apparaître une insuffisance d'actif, le tribunal peut, en cas de faute de gestion ayant contribué à cette insuffisance d'actif décider que le montant de cette insuffisance sera supporté en tout ou partie par le dirigeant de droit ou de fait ayant contribué à la faute de gestion. Toutefois, en cas de simple négligence du dirigeant de droit ou de fait dans la gestion de la personne morale, sa responsabilité au titre de l'insuffisance d'actif ne peut être engagée.
Sur l'insuffisance d'actif
En l'espèce, il est justifié que le montant de l'insuffisance d'actif de la société s'élève à 27.929,70 résultant d'un passif admis à hauteur de 28.704,72 euros et d'un actif de 775,29 euros.
Sur les fautes de gestion
Il est reproché à M. [Y] d'avoir fait effectuer par la société [6] dont il était le gérant des prestations pour lesquelles elle n'était pas assurée.
Il résulte du jugement rendu le 14 juin 2016 par le tribunal de grande instance de Valence confirmée par arrêt de la cour d'appel de Grenoble du 12 décembre 2018 que par contrats du 4 décembre 2009, la Sarl [6] s'est vue confier une mission de maîtrise d'oeuvre portant sur une mission de Documents de Consultation des Entreprises (DCE), une mission d'Ordonnancement, Pilotage Coordination (OPC) et une mission de Coordination Sécurité Protection de la santé (CSPS) en phases conception et réalisation, que les désordres constatés se rattachent à la mission DCE, effectivement confiée à la Sarl [6], que la police souscrite par la Sarl [6] couvre uniquement les missions OPC et [7] pour les chantiers ouverts entre le 1er janvier et le 31 décembre 2010 et que dès lors, la garantie de la compagnie l'Auxiliaire n'est pas due au titre des condamnations prononcées pour les travaux de modification de l'implantation du ballon [10] et les travaux de reprise des hammams.
En conséquence, contrairement à ce qu'allègue M. [Y], l'absence de garantie par la compagnie l'Auxiliaire résulte bien d'une absence d'assurance pour l'activité réellement exercée et non du fait qu'il n'y a pas eu de réception de l'ouvrage, l'assureur ayant uniquement soutenu dans ses écritures que l'activité exercée n'était pas assurée.
M. [Y] qui oeuvre dans le domaine du bâtiment connaît nécessairement l'intitulé des différentes missions qui peuvent lui être confiées. En faisant souscrire à la Sarl [6] une assurance limitée à deux missions, à savoir OPC et [7], alors qu'il a accepté expressément que la SARL [6] se voit confier une mission portant aussi sur une mission Documents de Consultation des Entreprises (DCE), il a fait réaliser par la société [6] une activité sans qu'elle soit assurée pour celle-ci et a commis ainsi une faute de gestion qui ne peut être considérée comme une simple négligence.
En outre, cette faute a bien contribué à l'insuffisance d'actif puisque le passif de la société [6] est uniquement constitué des condamnations prononcées par le tribunal de grande instance de Valence par jugement du 14 juin 2016 que cette société n'aurait pas eu à assumer en présence d'une assurance garantissant son activité.
Par ailleurs, il est établi que M. [Y] a créé dès le 1er mai 2011 la Sarl [14] d'oeuvre ayant une activité de maîtrise d'oeuvre globale, conception, réalisation de maîtrise d'oeuvre, une activité de bureaux d'études fluides et structures et une activité de programmiste.
Cette création a été effectuée alors même que M. [Y] avait connaissance des désordres survenus sur le chantier de la SCI [8] au parfum, objet du litige tranché par le tribunal de grande instance de Valence par jugement du 14 juin 2016, puisqu'une expertise a été ordonnée le 22 décembre 2010 et le rapport déposé le 25 octobre 2011.
Il indique d'ailleurs dans ses conclusions que conscient de la fragilité de l'assurance souscrite auprès de la compagnie l'Auxiliaire, il a créé une nouvelle société pour la poursuite de son activité. Il a ainsi laissé la société [6] sans activité.
Il ne peut sérieusement soutenir que la création d'une nouvelle société s'imposait afin d'être correctement assuré alors qu'il lui appartenait d'assurer correctement la société [6], au besoin en changeant d'assureur.
En transférant son activité d'une société à l'autre alors que la société [6] était exposée à devoir indemniser des désordres signalés, M. [Y] a commis une faute de gestion ayant contribué à l'insuffisance d'actif.
Sur le montant de la contribution
Le montant de la contribution du dirigeant à l'insuffisance d'actif qui ne peut excéder celui de l'insuffisance d'actif certaine au jour où le juge statue doit être proportionnée au nombre et à la gravité des fautes de gestion et tenir compte de la situation personnelle du dirigeant.
En l'espèce, M. [Y] a commis deux fautes de gestion d'une gravité certaine. Celles-ci ont contribué entièrement à l'insuffisance d'actif.
M. [Y] est marié et a trois enfants âgés de 30 ans, 27 ans et 22 ans. Il ne précise pas le montant de ses ressources.
Au regard de ces éléments, le montant de la contribution à l'insuffisance d'actif a été fixé à bon droit à la somme de 27.929,70 euros.
En conséquence, le jugement du 28 juin 2023 sera confirmé par substitution de motifs en ce qu'il a condamné M. [Y] en sa qualité de dirigeant de droit à payer entre les mains du liquidateur judiciaire la somme de 27.929,70 euros au titre de sa contribution à l'insuffisance d'actif, sauf à rectifier le dit chef en indiquant qu'il s'agit de l'insuffisance d'actif de la société [6] et non pas de la société [11].
2/ Sur l'interdiction de gérer
En application de l'article L.553-8 du même code, dans les cas prévus aux articles L.653-3 à L.653-6, le tribunal peut prononcer, à la place de la faillite personnelle, l'interdiction de diriger, gérer, administrer ou contrôler, directement ou indirectement, soit toute entreprise commerciale ou artisanale, toute exploitation agricole et toute personne morale, soit une ou plusieurs de celles-ci. Elle peut également être prononcée à l'encontre de toute personne mentionnée à l'article L. 653-1 qui a omis sciemment de demander l'ouverture d'une procédure de redressement ou de liquidation judiciaire dans le délai de 45 jours à compter de la cessation des paiements, sans avoir par ailleurs demandé l'ouverture d'une procédure de conciliation.
Il n'est pas justifié de la signification de l'arrêt du 12 décembre 2018 à la société [6].
Celle-ci s'est vue délivrer un commandement aux fins de saisie-vente le 9 février 2021.
C'est donc à cette date que M. [Y] avait nécessaireemnt conscience de l'état de cessation des paiements.
La société [6] a été assignée en redressement judiciaire par la Sci [8] au parfum par acte du 5 mars 2021, avant même l'expiration du délai de 45 jours.
Il ne peut donc être reproché à M. [Y] de ne pas avoir demandé l'ouverture d'une procédure de redressement ou de liquidation judiciaire dans le délai de 45 jours à compter de la cessation des paiements alors même qu'il s'est trouvé assigné en redressement judiciaire avant l'expiration de ce délai.
La Selarl [16] n'a pas invoqué d'autres cas que celui du défaut de déclaration de cessation des paiements.
Dès lors, le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté la Selarl [16] en la personne de Me [F] de sa demande d'interdiction de gérer à l'encontre de M. [B] [Y].
3/ Sur les mesures accessoires
M. [Y] qui succombe dans son appel sera condamné aux entiers dépens d'appel et à payer à la Selarl [16] en la personne de Me [F] en qualité de liquidateur judiciaire de la société [6] la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La Cour statuant publiquement, contradictoirement, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile, après en avoir délibéré conformément à la loi,
Confirme le jugement en toutes ses dispositions soumises à la cour sauf à le rectifier en indiquant qu'il s'agit de l'insuffisance d'actif de la société [6] et non pas de la société [11].
Ajoutant,
Condamne M. [Y] aux dépens d'appel.
Condamne M. [Y] à payer à la Selarl [16] en la personne de Me [F] en qualité de liquidateur judiciaire de la société [6] la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Déboute M. [Y] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
SIGNÉ par Mme FIGUET, Présidente et par Mme Solène ROUX, Greffière présente lors de la mise à disposition à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La Greffière La Présidente