CA Paris, Pôle 4 - ch. 9 - a, 5 juin 2025, n° 24/04760
PARIS
Arrêt
Autre
Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 4 - Chambre 9 - A
ARRÊT DU 05 JUIN 2025
(n° , 10 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 24/04760 - N° Portalis 35L7-V-B7I-CJCCL
Décision déférée à la Cour : Jugement du 12 janvier 2024 - Juge des contentieux de la protection de [Localité 9] - RG n° 22/08785
APPELANTS
Madame [K] [N] épouse [E]
née le 20 mars 1980 à [Localité 7]
[Adresse 4]
[Localité 3]
représentée par Me Victoria ZAZA, avocat au barreau de PARIS
ayant pour avocat plaidant Me Jérémie BOULAIRE, avocat au barreau de DOUAI
Monsieur [P] [E]
né le 12 août 1980 à [Localité 8]
[Adresse 4]
[Localité 3]
représenté par Me Victoria ZAZA, avocat au barreau de PARIS
ayant pour avocat plaidant Me Jérémie BOULAIRE, avocat au barreau de DOUAI
INTIMÉES
La SELAFA MJA en la personne de Maître [O] [G] en qualité de mandataire liquidateur de la société ARTYS CONFORT, société par actions simplifiée prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 2]
[Localité 6]
DÉFAILLANTE
La société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE, société anonyme prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège, venant aux droits de la SA BANQUE SOLFEA, société anonyme prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
N° SIRET : 542 097 902 04319
[Adresse 1]
[Localité 5]
représentée et assistée de Me Edgard VINCENSINI, avocat au barreau de PARIS, toque : B0496
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 1er avril 2025, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Muriel DURAND, Présidente de chambre, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme Muriel DURAND, Présidente de chambre
Mme Laurence ARBELLOT, Conseillère
Mme Sophie COULIBEUF, Conseillère
Greffière, lors des débats : Mme Camille LEPAGE
ARRÊT :
- RÉPUTÉ CONTRADICTOIRE
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Mme Muriel DURAND, Présidente et par Mme Camille LEPAGE, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
Le 18 décembre 2012, dans le cadre d'un démarchage à domicile, M. [P] [E] a signé avec la société Artys Confort un bon de commande portant sur une installation photovoltaïque au prix de 23 000 euros.
Cet équipement a été financé au moyen d'un crédit affecté de même montant souscrit le même jour par M. [E] et Mme [K] [N] auprès de la société Banque Solfea aux droits de laquelle vient désormais la société BNP Paribas Personal Finance, remboursable sur 167 mois, soit après un différé en 156 mensualités de 222 euros hors assurance au taux contractuel annuel de 5,79 %, soit un TAEG de 5,95 %.
Les panneaux photovoltaïques ont été installés, le raccordement au réseau électrique a été effectué et de l'électricité est revendue, la première facture de revente d'électricité ayant été émise le 28 novembre 2013.
Par jugement en date du 12 mars 2013, le tribunal de commerce de Paris a prononcé l'ouverture de la liquidation judiciaire de la société Artys Confort et désigné la Selafa MJA en la personne de Maître [O] [M] en qualité de liquidateur judiciaire de cette société.
Par jugement en date du 7 décembre 2017, le tribunal de commerce de Paris a prononcé la clôture des opérations de liquidation judiciaire pour insuffisance d'actif et le même jour la société Artys Confort a fait l'objet d'une radiation du registre du commerce et des sociétés. La Selafa MJA en la personne de Maître [O] [M] a été désignée mandataire ad hoc.
Par acte du 9 août 2022, M. [E] et Mme [N] ont fait assigner le mandataire ad hoc du vendeur et la société BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de la société Banque Solfea devant le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité du tribunal judiciaire de Paris en nullité du contrat de vente et subséquemment du contrat de crédit, privation de cette dernière de sa créance de restitution au regard des fautes commises et condamnation à leur payer le prix de vente de l'installation, les intérêts et frais payés en exécution du contrat de prêt, les factures d'utilisation du réseau, 10 000 euros au titre de l'enlèvement de l'installation, 5 000 euros de dommages et intérêts pour préjudice moral et 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Par jugement réputé contradictoire du 12 janvier 2024, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Paris a :
- déclaré irrecevables comme prescrites les demandes de nullité du contrat de vente présentées par M. [E] et Mme [N] aux fins de nullité des contrats,
- débouté M. [E] et Mme [N] de leur demande de nullité du contrat de crédit,
- débouté M. [E] et Mme [N] de l'intégralité de leurs demandes contre la banque,
- condamné in solidum M. [E] et Mme [N] à payer à la société BNP Paribas Personal Finance la somme de 800 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné M. [E] et Mme [N] aux dépens.
Après avoir rappelé les dispositions de l'article 2224 du code civil prévoyant une prescription de cinq ans, le juge a relevé que la banque dont le sort du contrat de crédit était lié à celui du contrat de vente pouvait parfaitement soulever la prescription de l'action en nullité de la vente et que Maître [O] [M] en sa qualité de mandataire ad hoc l'avait aussi soulevé oralement à l'audience.
Il a relevé que les dates de point de départ de la prescription de l'action en nullité devait s'apprécier en fonction de la nature de la nullité.
S'agissant de la nullité formelle il a retenu que les acquéreurs étaient dès la signature du bon de commande en mesure de constater s'il était ou non complet de sorte que le délai de prescription était expiré depuis le 18 septembre 2017.
S'agissant du dol fondé sur une présentation fallacieuse de la rentabilité, d'un autofinancement, de la viabilité économique ou d'un partenariat mensonger valorisant l'électricité produite, il a considéré que la date à prendre en compte était celle de la première facture soit en novembre 2013 de telle sorte que la prescription était acquise depuis le mois de novembre 2018.
S'agissant de l'impossible réitération du consentement de M. [E] et Mme [N], il a développé les conditions de confirmation et a considéré qu'elles n'étaient pas remplies de sorte que l'action était prescrite.
Il a ensuite relevé que la nullité du contrat n'étant pas retenue, le contrat de crédit ne pouvait être annulé.
S'agissant de l'action en responsabilité à l'encontre de la banque, il a relevé que la banque aurait dû relever le fait que le bon de commande était sommaire et que ne l'ayant pas fait elle avait commis une faute.
Il a écarté toute participation de la banque à un dol commis par le vendeur.
Il a relevé que l'installation fonctionnait et qu'aucun des préjudices allégués n'était en lien avec les fautes reprochées à la banque et il a rejeté toutes les demandes présentées contre celle-ci.
Par déclaration électronique du 4 mars 2024, M. [E] et Mme [N] ont interjeté appel de ce jugement.
Aux termes de leurs dernières conclusions n° 2 déposées électroniquement le 19 novembre 2024 auxquelles il convient de se rapporter, ils demandent à la cour :
- d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il déclaré irrecevables comme prescrites leurs demandes en annulation du contrat de vente, en ce qu'il a rejeté leur demande de nullité du contrat de crédit et toutes celles formées contre la banque, en ce qu'il les a déboutés de leurs demandes et les a condamnés à payer la somme totale de 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens de l'instance, et statuant à nouveau,
- de déclarer leurs demandes recevables et bien fondées,
- de prononcer la nullité du contrat de vente conclu avec la société Artys Confort et la nullité subséquente du contrat de prêt,
- de condamner la société BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de la société Banque Solfea à leur restituer l'intégralité des mensualités du prêt versées entre les mains de la banque,
- de constater que la société BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de la société Banque Solfea a commis une faute dans le déblocage des fonds et doit être privée de sa créance de restitution du capital emprunté,
- de condamner la société BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de la société Banque Solfea à leur payer les sommes de :
- 23 000 euros correspondant à l'intégralité du prix de vente de l'installation,
- 11 632 euros correspondant aux intérêts conventionnels et frais payés par eux en exécution du prêt souscrit,
- à titre subsidiaire, de condamner la société BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de la société Banque Solfea à leur payer la somme de 34 632 euros à titre de dommages et intérêts compte tenu de la faute commise par elle,
- de prononcer la déchéance du droit aux intérêts contractuels à l'encontre de la société BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de la société Banque Solfea et,
- de condamner cette dernière à leur rembourser l'ensemble des intérêts versés par eux au titre de l'exécution normale du contrat de prêt en conséquence de la déchéance du droit aux intérêts prononcée et lui enjoindre de produire un nouveau tableau d'amortissement expurgé desdits intérêts,
- en tout état de cause, de condamner la société BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de la société Banque Solfea à leur payer les sommes de :
- 562,19 euros correspondant au montant des factures d'utilisation du réseau de distribution d'électricité entre 2013 et 2023,
- 10 000 euros au titre de l'enlèvement de l'installation et de la remise en état de l'immeuble,
- 5 000 euros au titre du préjudice moral,
- 6 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- de débouter la société BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de la société Banque Solfea de son appel incident,
- de débouter la société BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de la société Banque Solfea et la société Artys Confort de l'intégralité de leurs prétentions, fins et conclusions contraires,
- de condamner la société BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de la société Banque Solfea à supporter les dépens de l'instance.
Aux termes de ses conclusions déposées électroniquement le 21 août 2024 auxquelles il convient de se rapporter, la société BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de la société Banque Solfea demande à la cour :
- de confirmer le jugement en ce qu'il a déclaré prescrites les demandes d'annulation des contrats et en ce qu'il a débouté M. [E] et Mme [N] de toutes leurs demandes,
- sur l'appel incident, d'infirmer le jugement en ce qu'il a déclaré recevable la demande de M. [E] et Mme [N] tendant à voir engager sa responsabilité contractuelle,
- de déclarer irrecevable la demande de M. [E] et Mme [N] de déchéance de son droit aux intérêts contractuels,
- de débouter M. [E] et Mme [N] de leurs demandes au titre des frais irrépétibles et des dépens,
- de condamner M. [E] et Mme [N] solidairement à lui payer la somme de 4 500 euros au titre des frais irrépétibles de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens et admettre Me Edgard Vincensini, avocat, au bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
La déclaration d'appel et les conclusions de M. [E] et Mme [N] ont été signifiées au mandataire ad hoc de la société venderesse par acte du 14 mai 2024 délivré à personne morale et leurs conclusions lui ont été signifiées en leur premier état par acte du 5 juin 2024 délivré selon les mêmes modalités. Les conclusions de la société BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de la société Banque Solfea ont été signifiées au mandataire liquidateur de la société venderesse par acte du 26 août 2024 délivré à domicile. Il n'a pas constitué avocat.
Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions des parties, il est renvoyé aux écritures de celles-ci conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 18 février 2025 et l'affaire a été appelée à l'audience du 1er avril 2025.
MOTIFS DE LA DÉCISION
A titre liminaire, la cour constate :
- que le contrat de vente conclu le 18 décembre 2012 entre la société Artys Confort et M. [E] et Mme [N] est soumis aux dispositions des articles L. 121-21 et suivants du code de la consommation, dans leur rédaction en vigueur au jour du contrat, issue de la loi n° 93-949 du 26 juillet 1993, dès lors qu'il a été conclu dans le cadre d'un démarchage à domicile,
- que le contrat de crédit affecté conclu le même jour entre est soumis aux dispositions de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010, de sorte qu'il sera fait application des articles du code de la consommation dans leur rédaction en vigueur après le 1er mai 2011 et leur numérotation antérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016,
- qu'il convient de faire application des dispositions du code civil en leur version antérieure à l'entrée en vigueur au 1er octobre 2016 de l'ordonnance du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats.
Selon l'article 472 du code de procédure civile, lorsque le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond, le juge ne fait droit à la demande que s'il l'estime régulière, recevable et bien fondée.
Il résulte du dernier alinéa de l'article 954 du code de procédure civile que la partie qui ne conclut pas ou qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement est réputée s'en approprier les motifs.
Sur la recevabilité des demandes
En nullité des contrats
La banque soulève la prescription de l'action en nullité formelle comme de l'action en nullité pour dol ce à quoi M. [E] et Mme [N] s'opposent en faisant valoir que si le contrat a été conclu le 18 décembre 2012, ils sont des consommateurs profanes et :
- qu'ils n'ont jamais formulé de demande de nullité du contrat de vente pour « impossible réitération de leur consentement »,
- qu'ils ne sont pas en mesure de déceler par eux-mêmes les irrégularités dénoncées,
- qu'il résulte clairement de l'article 2224 du code civil que le point de départ de la prescription quinquennale extinctive de droit commun n'est pas fixé au jour des faits susceptibles de fonder une action en justice mais que par principe ce point de départ doit être reporté à la date à laquelle le titulaire du droit d'agir les a connus ou aurait dû les connaître, la loi présumant que le justiciable a nécessairement et légitimement ignoré les faits qui lui permettent d'agir, et se prévalent à cet égard d'une consultation des Professeurs [H] [Z] et [R] [L] ainsi que d'une formule du Professeur [V] selon laquelle le délai de prescription doit être un délai utile,
- que dès lors le point de départ ne peut être que le moment où le titulaire du droit d'agir a eu effectivement connaissance non seulement du préjudice subi et ce dans toute son ampleur, ou de son aggravation, mais encore de surcroît du fait générateur de responsabilité,
- qu'ils se sont engagés sur la base d'un contrat de vente irrégulier car ne comprenant pas toutes les mentions obligatoires, ce qui a entraîné pour eux un défaut d'information préjudiciable dont ils n'ont pu se rendre compte que bien après la signature du bon de commande et relèvent que si la loi impose à la banque de vérifier la régularité du bon de commande avant le déblocage des fonds, c'est précisément parce qu'un consommateur normalement diligent ne peut identifier les irrégularités que l'instrumentum pourrait renfermer,
- que pour que'le point de départ de la prescription soit la date du contrat, il eut fallu qu'ils aient été en mesure de déceler par eux-mêmes l'irrégularité affectant l'acte, c'est-à-dire sans l'intervention d'un tiers sachant ou d'un expert et que l'irrégularité ressorte de la seule lecture de l'acte, c'est-à-dire sans devoir procéder à des calculs ou des analyses et que tel n'était pas le cas et se prévalent de la jurisprudence relative à la confirmation, soulignant que dès lors que la Cour de cassation reconnaît que la reproduction des articles relatifs à la nullité ne suffit pas à permettre au consommateur de connaître les causes de nullité affectant l'acte et de le confirmer, le même raisonnement doit être retenu en ce qui concerne le point de départ de la prescription et soulignent qu'il est question de mentions absentes,
- que dès lors le point de départ de la prescription ne peut donc être, en matière de nullité formelle, la date de la signature du contrat d'autant que la banque ne leur a pas signalé les causes de nullité, ce qu'il lui appartenait pourtant de faire,
- que s'agissant de l'action en nullité fondée sur un dol, le dommage consiste au premier chef pour eux dans le fait d'avoir été engagés dans une opération désavantageuse sur la base de fausses promesses, que l'appréciation de la rentabilité d'une installation ou de biens d'équipement censés produire un gain ou une économie d'énergie sur de nombreuses années suppose nécessairement un tant soit peu de recul et qu'à supposer même que l'on puisse considérer, et ce de façon totalement artificielle, qu'ils auraient eu conscience du dommage dans toute son ampleur dès la signature des contrats, ou plutôt même dès le déblocage des fonds, ce qui n'est pas le cas en l'espèce, ce seul élément était insuffisant pour mettre en cause la responsabilité de la banque, puisqu'il fallait encore qu'une faute puisse lui être imputée, ce qu'ils ignoraient,
- que ce n'est en réalité qu'à la lecture du rapport d'expertise sur investissement que l'impossibilité pour les appelants d'autofinancer l'opération a été objectivée, et donc qu'ils ont été véritablement en mesure d'apprécier les performances réelles de leur centrale photovoltaïque et donc les mensonges de la société venderesse,
- qu'en application de ces principes solidement établis, aucune prescription ne saurait leur être opposée.
En application de l'article 1304 du code civil dans sa rédaction ancienne applicable au litige, dans tous les cas où l'action en nullité ou en rescision d'une convention n'est pas limitée à un moindre temps par une loi particulière, cette action dure cinq ans.
Selon l'article 2224 du même code, les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.
En application de l'article L. 110-4 du code de commerce, les obligations nées à l'occasion de leur commerce entre commerçants ou entre commerçants et non-commerçants se prescrivent par cinq ans si elles ne sont pas soumises à des prescriptions spéciales plus courtes.
Les contrats dont l'annulation est demandée ont été conclus le 18 décembre 2012 et M. [E] et Mme [N] ont engagé l'instance par une assignation délivrée le 9 août 2022 au mandataire ad hoc du vendeur et à la société BNP Paribas Personal Finance qui vient aux droits de la société Banque Solfea.
Toute l'argumentation des appelants qui se gardent d'ailleurs de donner une date concrète de point de départ de la prescription qui pourrait leur être opposée, vise en fait à voir repousser le point de départ du délai de prescription de leur action en nullité formelle du contrat à la date à laquelle ils ont pu avoir connaissance effective des conséquences juridiques des irrégularités de pure forme. Les suivre dans cette voie reviendrait en réalité à rendre imprescriptible une action en nullité purement formelle puisque seule la date à laquelle ils l'invoquent pourrait alors être retenue comme point de départ de la prescription.
En l'espèce le fait permettant d'agir en nullité est l'absence des mentions obligatoires sur le bon de commande et c'est donc la date de signature de ce bon de commande qui doit être retenue comme point de départ de prescription puisque cette absence y était parfaitement visible, et non la connaissance juridique des conséquences de cette absence. La jurisprudence de la Cour de cassation relative aux erreurs commises en matière de taux effectif global, selon laquelle le point de départ de la prescription quinquennale doit être reporté lorsque l'erreur n'était pas décelable lors de la conclusion du contrat n'est pas applicable, puisque précisément, en l'espèce, M. [E] et Mme [N] étaient en mesure de constater dès ce moment que ne figuraient pas les mentions dont ils déplorent l'omission sans avoir à se livrer à des calculs ou à une analyse complexe du bon litigieux. La jurisprudence relative à la confirmation du contrat n'est pas non plus transposable à la prescription, le mécanisme de la prescription et celui de la confirmation étant différents et répondant également à des objectifs différents. En effet la prescription répond à une exigence de sécurité juridique et a pour but d'éviter la remise en cause d'un contrat sans aucune limite de temps alors même qu'il est en cours depuis de très nombreuses années et que le matériel a été utilisé pendant une très longue durée et a de fait totalement épuisé sa valeur. Permettre de considérer comme il est finalement soutenu que l'ignorance des textes permet de repousser indéfiniment le point de départ de la prescription d'une action en nullité revient à supprimer la prescription de ce type d'action en nullité purement formelle alors même que la prescription d'une nullité pour dol ou pour erreur serait bien plus courte et effective puisque c'est au jour de la découverte du dol ou de l'erreur (et non du fait que le dol ou l'erreur sont en droit des causes de nullité) que commence le délai de prescription. Les seuls cas d'exclusion de toute prescription résultent soit de situations d'incapacité telles la tutelle ou la minorité qui empêchent la partie concernée d'exercer ses droits dans le délai imparti mais le fait de ne pas être juriste n'est pas une cause d'exclusion, soit de l'extrême gravité des faits poursuivis ce à quoi une nullité formelle, fût-elle prévue par le code de la consommation, ne peut en aucun cas être assimilée.
La cour relève en outre que s'il a pu être jugé dans le cadre du mécanisme de confirmation des contrats que les acheteurs pouvaient légitimement ignorer les vices du contrat c'est-à-dire concrètement le régime juridique des nullités, c'est que ce mécanisme répond à des exigences différentes puisqu'il consiste à tirer des conséquences du comportement du consommateur pour en déduire une volonté dont on peut donc légitimement exiger qu'elle soit particulièrement éclairée. La prescription ne résulte pas d'une volonté supposée des parties mais de l'écoulement du temps au-delà duquel les engagements ne peuvent pas être remis en cause.
Il ne résulte pas de la jurisprudence de la Cour de Justice de l'Union Européenne que le principe d'effectivité doive être interprété en ce sens qu'il impose à une juridiction nationale d'écarter les règles de prescription internes ou d'interdire le principe même de la prescription.
Les dispositions de droit interne relatives à la prescription sont conformes aux principes européens d'effectivité des droits, notamment ceux du consommateur, dans la mesure où il est prévu que le délai ne commence à courir à l'encontre du titulaire d'un droit qu'à partir du moment où il se trouve en possession de tous les éléments lui permettant d'évaluer sa situation au regard de ses droits, et qu'est aménagé un délai suffisamment long pour lui permettre de les mettre en 'uvre. En l'espèce, M. [E] et Mme [N] disposaient du bon de commande dès sa signature et l'absence de mentions qu'ils dénoncent n'était pas dissimulé.
Il n'y a pas non plus d'atteinte au principe d'égalité des armes, dès lors que les obligations dont l'emprunteur est créancier à l'égard du banquier dispensateur de crédit s'éteignent par la mise à disposition des fonds prêtés, alors que celles de l'emprunteur s'échelonnent pendant toute la durée de leur amortissement et qu'elles ne font pas obstacle à la faculté offerte au consommateur d'opposer ces mêmes droits au prêteur, par voie d'exception, pendant toute la durée de la relation contractuelle, étant observé que les obligations des parties à un contrat de crédit ne sont pas identiques, le versement des fonds par l'établissement bancaire étant une obligation à exécution instantanée, alors que le remboursement des mensualités par l'emprunteur est une obligation à exécution successive de sorte que le régime de la prescription est nécessairement différencié. Cette absence d'atteinte au principe d'égalité des armes est patente dans la mesure où les dispositions des articles L. 311-52 du code de la consommation reprises à l'article R. 312-35 prévoient un délai de prescription abrégé de deux années pour les actions en paiement engagées par le prêteur à l'occasion de la défaillance de l'emprunteur soit un délai plus court que celui prévu à l'article 2224 du code civil.
Plus de cinq années s'étant écoulées entre la date de signature du contrat et celle de l'action en nullité formelle qui n'était donc recevable que jusqu'au 17 décembre 2012 inclus, cette action est prescrite et M. [E] et Mme [N] sont irrecevables à solliciter l'annulation du contrat sur le fondement des articles L. 121-21 et suivants du code de la consommation dans leur version applicable au litige.
Le jugement doit donc être confirmé en ce qu'il a considéré que cette demande de nullité formelle était irrecevable.
S'agissant de la demande en nullité pour dol, commis par le vendeur ou la banque c'est à la date à laquelle le dol a été découvert et non là encore à la date à laquelle M. [E] et Mme [N] ont pu avoir connaissance de ses conséquences juridiques à savoir le fait que le dol est en droit une cause de nullité du contrat, que doit être fixé le point du délai du délai de prescription.
Dès lors qu'ils invoquent des man'uvres et tromperies destinées à leur faire croire que l'installation serait autofinancée et rentable financièrement, le point de départ de la prescription doit être fixée à la date à laquelle ils connaissaient la production réelle de leur installation.
Il résulte des propres écritures de M. [E] et Mme [N] qui se plaignent de la faiblesse des productions depuis 2012 et produisent les factures depuis la première de novembre 2013 qu'ils connaissaient cette production plus de cinq ans avant d'assigner le vendeur et le prêteur sans avoir aucunement besoin d'une expertise puisque les factures mentionnaient très précisément le montant que la société EDF allait leur reverser, dès lors cette demande est également prescrite, le jugement devant être confirmé sur ce point.
En responsabilité de la banque
M. [E] et Mme [N] imputent à la banque des fautes de participation au dol du vendeur du fait de l'existence d'un différé de remboursement destiné à entretenir leur croyance légitime d'une rentabilité de l'opération mais aussi dans le déblocage des fonds sans vérification du bon de commande comme sur la foi d'une attestation incomplète ce à quoi la banque oppose une prescription.
L'action pour dol étant prescrite, l'action en responsabilité pour participation au dol l'est aussi son point de départ étant également la date à la laquelle M. [E] et Mme [N] connaissaient la production de l'installation.
Pour le surplus, le fait générateur est celui du déblocage des fonds qui a été réalisé bien plus de cinq ans avant la délivrance de l'assignation la première mensualité ayant été payée en septembre 2013 et la banque ne faisant valoir aucun impayé de sorte que cette demande est donc également prescrite. Le jugement doit être infirmé en ce qu'il a rejeté les demandes lesquelles doivent aussi être déclarées irrecevables comme prescrites, étant au demeurant observé que M. [E] et Mme [N] ne pouvaient ignorer que les fonds avaient été débloqués puisqu'ils ont commencé à rembourser et ce bien plus de cinq ans avant d'avoir assigné.
En déchéance du droit aux intérêts contractuels
La banque fait valoir qu'il s'agit d'une demande nouvelle en cause d'appel et que cette demande est comme telle irrecevable ce à quoi M. [E] et Mme [N] répondent que leur demande est recevable en, application des dispositions de l'article 565 du même code puisqu'elle tend aux mêmes fins que celles soumises au premier juge, même si son fondement juridique est différent. Ils estiment que la finalité d'une demande de nullité est la restitution par la banque de l'ensemble des intérêts et frais versés par les emprunteurs dans le cadre de l'exécution du contrat, à charge pour eux de rembourser le montant du capital emprunté.
Il résulte de l'article 564 du code de procédure civile qu'à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait mais l'article 565 du même code permet effectivement aux parties de présenter des demandes nouvelles si elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge, même si leu fondement juridique est différent.
Il est constant qu'aucune demande de déchéance du droit aux intérêts contractuels n'a été présentée en première instance.
Une demande en nullité vise à l'anéantissement d'un contrat et à la remise en état antérieur. Une demande en déchéance du droit aux intérêts contractuels vise à rendre le crédit gratuit. Elle n'implique pas l'anéantissement du contrat et en conséquence aucune remise en l'état antérieur ni restitution du capital à la banque mais seulement la suppression des intérêts voire leur remboursement. Elle ne tend donc pas aux mêmes fins.
Elle est donc irrecevable de ce seul fait sans qu'il soit besoin d'examiner sa prescription.
Sur les frais irrépétibles et les dépens
Le jugement doit être confirmé en ses dispositions relatives aux dépens et frais irrépétibles de première instance.
M. [E] et Mme [N] qui succombent doivent être condamnés aux dépens d'appel.
Il apparaît en outre équitable de leur faire supporter in solidum la charge des frais irrépétibles engagés par la société BNP Paribas Personal Finance à hauteur de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Statuant publiquement par arrêt réputé contradictoire en dernier ressort,
Confirme le jugement sauf en ce qu'il a rejeté les demandes en responsabilité contractuelles contre la société BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de la société Banque Solfea ;
Déclare ces demandes irrecevables comme prescrites ;
Déclare la demande de déchéance du droit aux intérêts contractuels irrecevable comme nouvelle en appel ;
Condamne M. [E] et Mme [N] in solidum à payer la somme de 3 000 euros à la société BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de la société Banque Solfea sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne M. [E] et Mme [N] in solidum aux dépens d'appel ;
Rejette toute demande plus ample ou contraire.
La greffière La présidente
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 4 - Chambre 9 - A
ARRÊT DU 05 JUIN 2025
(n° , 10 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 24/04760 - N° Portalis 35L7-V-B7I-CJCCL
Décision déférée à la Cour : Jugement du 12 janvier 2024 - Juge des contentieux de la protection de [Localité 9] - RG n° 22/08785
APPELANTS
Madame [K] [N] épouse [E]
née le 20 mars 1980 à [Localité 7]
[Adresse 4]
[Localité 3]
représentée par Me Victoria ZAZA, avocat au barreau de PARIS
ayant pour avocat plaidant Me Jérémie BOULAIRE, avocat au barreau de DOUAI
Monsieur [P] [E]
né le 12 août 1980 à [Localité 8]
[Adresse 4]
[Localité 3]
représenté par Me Victoria ZAZA, avocat au barreau de PARIS
ayant pour avocat plaidant Me Jérémie BOULAIRE, avocat au barreau de DOUAI
INTIMÉES
La SELAFA MJA en la personne de Maître [O] [G] en qualité de mandataire liquidateur de la société ARTYS CONFORT, société par actions simplifiée prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 2]
[Localité 6]
DÉFAILLANTE
La société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE, société anonyme prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège, venant aux droits de la SA BANQUE SOLFEA, société anonyme prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
N° SIRET : 542 097 902 04319
[Adresse 1]
[Localité 5]
représentée et assistée de Me Edgard VINCENSINI, avocat au barreau de PARIS, toque : B0496
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 1er avril 2025, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Muriel DURAND, Présidente de chambre, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme Muriel DURAND, Présidente de chambre
Mme Laurence ARBELLOT, Conseillère
Mme Sophie COULIBEUF, Conseillère
Greffière, lors des débats : Mme Camille LEPAGE
ARRÊT :
- RÉPUTÉ CONTRADICTOIRE
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Mme Muriel DURAND, Présidente et par Mme Camille LEPAGE, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
Le 18 décembre 2012, dans le cadre d'un démarchage à domicile, M. [P] [E] a signé avec la société Artys Confort un bon de commande portant sur une installation photovoltaïque au prix de 23 000 euros.
Cet équipement a été financé au moyen d'un crédit affecté de même montant souscrit le même jour par M. [E] et Mme [K] [N] auprès de la société Banque Solfea aux droits de laquelle vient désormais la société BNP Paribas Personal Finance, remboursable sur 167 mois, soit après un différé en 156 mensualités de 222 euros hors assurance au taux contractuel annuel de 5,79 %, soit un TAEG de 5,95 %.
Les panneaux photovoltaïques ont été installés, le raccordement au réseau électrique a été effectué et de l'électricité est revendue, la première facture de revente d'électricité ayant été émise le 28 novembre 2013.
Par jugement en date du 12 mars 2013, le tribunal de commerce de Paris a prononcé l'ouverture de la liquidation judiciaire de la société Artys Confort et désigné la Selafa MJA en la personne de Maître [O] [M] en qualité de liquidateur judiciaire de cette société.
Par jugement en date du 7 décembre 2017, le tribunal de commerce de Paris a prononcé la clôture des opérations de liquidation judiciaire pour insuffisance d'actif et le même jour la société Artys Confort a fait l'objet d'une radiation du registre du commerce et des sociétés. La Selafa MJA en la personne de Maître [O] [M] a été désignée mandataire ad hoc.
Par acte du 9 août 2022, M. [E] et Mme [N] ont fait assigner le mandataire ad hoc du vendeur et la société BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de la société Banque Solfea devant le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité du tribunal judiciaire de Paris en nullité du contrat de vente et subséquemment du contrat de crédit, privation de cette dernière de sa créance de restitution au regard des fautes commises et condamnation à leur payer le prix de vente de l'installation, les intérêts et frais payés en exécution du contrat de prêt, les factures d'utilisation du réseau, 10 000 euros au titre de l'enlèvement de l'installation, 5 000 euros de dommages et intérêts pour préjudice moral et 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Par jugement réputé contradictoire du 12 janvier 2024, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Paris a :
- déclaré irrecevables comme prescrites les demandes de nullité du contrat de vente présentées par M. [E] et Mme [N] aux fins de nullité des contrats,
- débouté M. [E] et Mme [N] de leur demande de nullité du contrat de crédit,
- débouté M. [E] et Mme [N] de l'intégralité de leurs demandes contre la banque,
- condamné in solidum M. [E] et Mme [N] à payer à la société BNP Paribas Personal Finance la somme de 800 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné M. [E] et Mme [N] aux dépens.
Après avoir rappelé les dispositions de l'article 2224 du code civil prévoyant une prescription de cinq ans, le juge a relevé que la banque dont le sort du contrat de crédit était lié à celui du contrat de vente pouvait parfaitement soulever la prescription de l'action en nullité de la vente et que Maître [O] [M] en sa qualité de mandataire ad hoc l'avait aussi soulevé oralement à l'audience.
Il a relevé que les dates de point de départ de la prescription de l'action en nullité devait s'apprécier en fonction de la nature de la nullité.
S'agissant de la nullité formelle il a retenu que les acquéreurs étaient dès la signature du bon de commande en mesure de constater s'il était ou non complet de sorte que le délai de prescription était expiré depuis le 18 septembre 2017.
S'agissant du dol fondé sur une présentation fallacieuse de la rentabilité, d'un autofinancement, de la viabilité économique ou d'un partenariat mensonger valorisant l'électricité produite, il a considéré que la date à prendre en compte était celle de la première facture soit en novembre 2013 de telle sorte que la prescription était acquise depuis le mois de novembre 2018.
S'agissant de l'impossible réitération du consentement de M. [E] et Mme [N], il a développé les conditions de confirmation et a considéré qu'elles n'étaient pas remplies de sorte que l'action était prescrite.
Il a ensuite relevé que la nullité du contrat n'étant pas retenue, le contrat de crédit ne pouvait être annulé.
S'agissant de l'action en responsabilité à l'encontre de la banque, il a relevé que la banque aurait dû relever le fait que le bon de commande était sommaire et que ne l'ayant pas fait elle avait commis une faute.
Il a écarté toute participation de la banque à un dol commis par le vendeur.
Il a relevé que l'installation fonctionnait et qu'aucun des préjudices allégués n'était en lien avec les fautes reprochées à la banque et il a rejeté toutes les demandes présentées contre celle-ci.
Par déclaration électronique du 4 mars 2024, M. [E] et Mme [N] ont interjeté appel de ce jugement.
Aux termes de leurs dernières conclusions n° 2 déposées électroniquement le 19 novembre 2024 auxquelles il convient de se rapporter, ils demandent à la cour :
- d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il déclaré irrecevables comme prescrites leurs demandes en annulation du contrat de vente, en ce qu'il a rejeté leur demande de nullité du contrat de crédit et toutes celles formées contre la banque, en ce qu'il les a déboutés de leurs demandes et les a condamnés à payer la somme totale de 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens de l'instance, et statuant à nouveau,
- de déclarer leurs demandes recevables et bien fondées,
- de prononcer la nullité du contrat de vente conclu avec la société Artys Confort et la nullité subséquente du contrat de prêt,
- de condamner la société BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de la société Banque Solfea à leur restituer l'intégralité des mensualités du prêt versées entre les mains de la banque,
- de constater que la société BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de la société Banque Solfea a commis une faute dans le déblocage des fonds et doit être privée de sa créance de restitution du capital emprunté,
- de condamner la société BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de la société Banque Solfea à leur payer les sommes de :
- 23 000 euros correspondant à l'intégralité du prix de vente de l'installation,
- 11 632 euros correspondant aux intérêts conventionnels et frais payés par eux en exécution du prêt souscrit,
- à titre subsidiaire, de condamner la société BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de la société Banque Solfea à leur payer la somme de 34 632 euros à titre de dommages et intérêts compte tenu de la faute commise par elle,
- de prononcer la déchéance du droit aux intérêts contractuels à l'encontre de la société BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de la société Banque Solfea et,
- de condamner cette dernière à leur rembourser l'ensemble des intérêts versés par eux au titre de l'exécution normale du contrat de prêt en conséquence de la déchéance du droit aux intérêts prononcée et lui enjoindre de produire un nouveau tableau d'amortissement expurgé desdits intérêts,
- en tout état de cause, de condamner la société BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de la société Banque Solfea à leur payer les sommes de :
- 562,19 euros correspondant au montant des factures d'utilisation du réseau de distribution d'électricité entre 2013 et 2023,
- 10 000 euros au titre de l'enlèvement de l'installation et de la remise en état de l'immeuble,
- 5 000 euros au titre du préjudice moral,
- 6 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- de débouter la société BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de la société Banque Solfea de son appel incident,
- de débouter la société BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de la société Banque Solfea et la société Artys Confort de l'intégralité de leurs prétentions, fins et conclusions contraires,
- de condamner la société BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de la société Banque Solfea à supporter les dépens de l'instance.
Aux termes de ses conclusions déposées électroniquement le 21 août 2024 auxquelles il convient de se rapporter, la société BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de la société Banque Solfea demande à la cour :
- de confirmer le jugement en ce qu'il a déclaré prescrites les demandes d'annulation des contrats et en ce qu'il a débouté M. [E] et Mme [N] de toutes leurs demandes,
- sur l'appel incident, d'infirmer le jugement en ce qu'il a déclaré recevable la demande de M. [E] et Mme [N] tendant à voir engager sa responsabilité contractuelle,
- de déclarer irrecevable la demande de M. [E] et Mme [N] de déchéance de son droit aux intérêts contractuels,
- de débouter M. [E] et Mme [N] de leurs demandes au titre des frais irrépétibles et des dépens,
- de condamner M. [E] et Mme [N] solidairement à lui payer la somme de 4 500 euros au titre des frais irrépétibles de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens et admettre Me Edgard Vincensini, avocat, au bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
La déclaration d'appel et les conclusions de M. [E] et Mme [N] ont été signifiées au mandataire ad hoc de la société venderesse par acte du 14 mai 2024 délivré à personne morale et leurs conclusions lui ont été signifiées en leur premier état par acte du 5 juin 2024 délivré selon les mêmes modalités. Les conclusions de la société BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de la société Banque Solfea ont été signifiées au mandataire liquidateur de la société venderesse par acte du 26 août 2024 délivré à domicile. Il n'a pas constitué avocat.
Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions des parties, il est renvoyé aux écritures de celles-ci conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 18 février 2025 et l'affaire a été appelée à l'audience du 1er avril 2025.
MOTIFS DE LA DÉCISION
A titre liminaire, la cour constate :
- que le contrat de vente conclu le 18 décembre 2012 entre la société Artys Confort et M. [E] et Mme [N] est soumis aux dispositions des articles L. 121-21 et suivants du code de la consommation, dans leur rédaction en vigueur au jour du contrat, issue de la loi n° 93-949 du 26 juillet 1993, dès lors qu'il a été conclu dans le cadre d'un démarchage à domicile,
- que le contrat de crédit affecté conclu le même jour entre est soumis aux dispositions de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010, de sorte qu'il sera fait application des articles du code de la consommation dans leur rédaction en vigueur après le 1er mai 2011 et leur numérotation antérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016,
- qu'il convient de faire application des dispositions du code civil en leur version antérieure à l'entrée en vigueur au 1er octobre 2016 de l'ordonnance du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats.
Selon l'article 472 du code de procédure civile, lorsque le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond, le juge ne fait droit à la demande que s'il l'estime régulière, recevable et bien fondée.
Il résulte du dernier alinéa de l'article 954 du code de procédure civile que la partie qui ne conclut pas ou qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement est réputée s'en approprier les motifs.
Sur la recevabilité des demandes
En nullité des contrats
La banque soulève la prescription de l'action en nullité formelle comme de l'action en nullité pour dol ce à quoi M. [E] et Mme [N] s'opposent en faisant valoir que si le contrat a été conclu le 18 décembre 2012, ils sont des consommateurs profanes et :
- qu'ils n'ont jamais formulé de demande de nullité du contrat de vente pour « impossible réitération de leur consentement »,
- qu'ils ne sont pas en mesure de déceler par eux-mêmes les irrégularités dénoncées,
- qu'il résulte clairement de l'article 2224 du code civil que le point de départ de la prescription quinquennale extinctive de droit commun n'est pas fixé au jour des faits susceptibles de fonder une action en justice mais que par principe ce point de départ doit être reporté à la date à laquelle le titulaire du droit d'agir les a connus ou aurait dû les connaître, la loi présumant que le justiciable a nécessairement et légitimement ignoré les faits qui lui permettent d'agir, et se prévalent à cet égard d'une consultation des Professeurs [H] [Z] et [R] [L] ainsi que d'une formule du Professeur [V] selon laquelle le délai de prescription doit être un délai utile,
- que dès lors le point de départ ne peut être que le moment où le titulaire du droit d'agir a eu effectivement connaissance non seulement du préjudice subi et ce dans toute son ampleur, ou de son aggravation, mais encore de surcroît du fait générateur de responsabilité,
- qu'ils se sont engagés sur la base d'un contrat de vente irrégulier car ne comprenant pas toutes les mentions obligatoires, ce qui a entraîné pour eux un défaut d'information préjudiciable dont ils n'ont pu se rendre compte que bien après la signature du bon de commande et relèvent que si la loi impose à la banque de vérifier la régularité du bon de commande avant le déblocage des fonds, c'est précisément parce qu'un consommateur normalement diligent ne peut identifier les irrégularités que l'instrumentum pourrait renfermer,
- que pour que'le point de départ de la prescription soit la date du contrat, il eut fallu qu'ils aient été en mesure de déceler par eux-mêmes l'irrégularité affectant l'acte, c'est-à-dire sans l'intervention d'un tiers sachant ou d'un expert et que l'irrégularité ressorte de la seule lecture de l'acte, c'est-à-dire sans devoir procéder à des calculs ou des analyses et que tel n'était pas le cas et se prévalent de la jurisprudence relative à la confirmation, soulignant que dès lors que la Cour de cassation reconnaît que la reproduction des articles relatifs à la nullité ne suffit pas à permettre au consommateur de connaître les causes de nullité affectant l'acte et de le confirmer, le même raisonnement doit être retenu en ce qui concerne le point de départ de la prescription et soulignent qu'il est question de mentions absentes,
- que dès lors le point de départ de la prescription ne peut donc être, en matière de nullité formelle, la date de la signature du contrat d'autant que la banque ne leur a pas signalé les causes de nullité, ce qu'il lui appartenait pourtant de faire,
- que s'agissant de l'action en nullité fondée sur un dol, le dommage consiste au premier chef pour eux dans le fait d'avoir été engagés dans une opération désavantageuse sur la base de fausses promesses, que l'appréciation de la rentabilité d'une installation ou de biens d'équipement censés produire un gain ou une économie d'énergie sur de nombreuses années suppose nécessairement un tant soit peu de recul et qu'à supposer même que l'on puisse considérer, et ce de façon totalement artificielle, qu'ils auraient eu conscience du dommage dans toute son ampleur dès la signature des contrats, ou plutôt même dès le déblocage des fonds, ce qui n'est pas le cas en l'espèce, ce seul élément était insuffisant pour mettre en cause la responsabilité de la banque, puisqu'il fallait encore qu'une faute puisse lui être imputée, ce qu'ils ignoraient,
- que ce n'est en réalité qu'à la lecture du rapport d'expertise sur investissement que l'impossibilité pour les appelants d'autofinancer l'opération a été objectivée, et donc qu'ils ont été véritablement en mesure d'apprécier les performances réelles de leur centrale photovoltaïque et donc les mensonges de la société venderesse,
- qu'en application de ces principes solidement établis, aucune prescription ne saurait leur être opposée.
En application de l'article 1304 du code civil dans sa rédaction ancienne applicable au litige, dans tous les cas où l'action en nullité ou en rescision d'une convention n'est pas limitée à un moindre temps par une loi particulière, cette action dure cinq ans.
Selon l'article 2224 du même code, les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.
En application de l'article L. 110-4 du code de commerce, les obligations nées à l'occasion de leur commerce entre commerçants ou entre commerçants et non-commerçants se prescrivent par cinq ans si elles ne sont pas soumises à des prescriptions spéciales plus courtes.
Les contrats dont l'annulation est demandée ont été conclus le 18 décembre 2012 et M. [E] et Mme [N] ont engagé l'instance par une assignation délivrée le 9 août 2022 au mandataire ad hoc du vendeur et à la société BNP Paribas Personal Finance qui vient aux droits de la société Banque Solfea.
Toute l'argumentation des appelants qui se gardent d'ailleurs de donner une date concrète de point de départ de la prescription qui pourrait leur être opposée, vise en fait à voir repousser le point de départ du délai de prescription de leur action en nullité formelle du contrat à la date à laquelle ils ont pu avoir connaissance effective des conséquences juridiques des irrégularités de pure forme. Les suivre dans cette voie reviendrait en réalité à rendre imprescriptible une action en nullité purement formelle puisque seule la date à laquelle ils l'invoquent pourrait alors être retenue comme point de départ de la prescription.
En l'espèce le fait permettant d'agir en nullité est l'absence des mentions obligatoires sur le bon de commande et c'est donc la date de signature de ce bon de commande qui doit être retenue comme point de départ de prescription puisque cette absence y était parfaitement visible, et non la connaissance juridique des conséquences de cette absence. La jurisprudence de la Cour de cassation relative aux erreurs commises en matière de taux effectif global, selon laquelle le point de départ de la prescription quinquennale doit être reporté lorsque l'erreur n'était pas décelable lors de la conclusion du contrat n'est pas applicable, puisque précisément, en l'espèce, M. [E] et Mme [N] étaient en mesure de constater dès ce moment que ne figuraient pas les mentions dont ils déplorent l'omission sans avoir à se livrer à des calculs ou à une analyse complexe du bon litigieux. La jurisprudence relative à la confirmation du contrat n'est pas non plus transposable à la prescription, le mécanisme de la prescription et celui de la confirmation étant différents et répondant également à des objectifs différents. En effet la prescription répond à une exigence de sécurité juridique et a pour but d'éviter la remise en cause d'un contrat sans aucune limite de temps alors même qu'il est en cours depuis de très nombreuses années et que le matériel a été utilisé pendant une très longue durée et a de fait totalement épuisé sa valeur. Permettre de considérer comme il est finalement soutenu que l'ignorance des textes permet de repousser indéfiniment le point de départ de la prescription d'une action en nullité revient à supprimer la prescription de ce type d'action en nullité purement formelle alors même que la prescription d'une nullité pour dol ou pour erreur serait bien plus courte et effective puisque c'est au jour de la découverte du dol ou de l'erreur (et non du fait que le dol ou l'erreur sont en droit des causes de nullité) que commence le délai de prescription. Les seuls cas d'exclusion de toute prescription résultent soit de situations d'incapacité telles la tutelle ou la minorité qui empêchent la partie concernée d'exercer ses droits dans le délai imparti mais le fait de ne pas être juriste n'est pas une cause d'exclusion, soit de l'extrême gravité des faits poursuivis ce à quoi une nullité formelle, fût-elle prévue par le code de la consommation, ne peut en aucun cas être assimilée.
La cour relève en outre que s'il a pu être jugé dans le cadre du mécanisme de confirmation des contrats que les acheteurs pouvaient légitimement ignorer les vices du contrat c'est-à-dire concrètement le régime juridique des nullités, c'est que ce mécanisme répond à des exigences différentes puisqu'il consiste à tirer des conséquences du comportement du consommateur pour en déduire une volonté dont on peut donc légitimement exiger qu'elle soit particulièrement éclairée. La prescription ne résulte pas d'une volonté supposée des parties mais de l'écoulement du temps au-delà duquel les engagements ne peuvent pas être remis en cause.
Il ne résulte pas de la jurisprudence de la Cour de Justice de l'Union Européenne que le principe d'effectivité doive être interprété en ce sens qu'il impose à une juridiction nationale d'écarter les règles de prescription internes ou d'interdire le principe même de la prescription.
Les dispositions de droit interne relatives à la prescription sont conformes aux principes européens d'effectivité des droits, notamment ceux du consommateur, dans la mesure où il est prévu que le délai ne commence à courir à l'encontre du titulaire d'un droit qu'à partir du moment où il se trouve en possession de tous les éléments lui permettant d'évaluer sa situation au regard de ses droits, et qu'est aménagé un délai suffisamment long pour lui permettre de les mettre en 'uvre. En l'espèce, M. [E] et Mme [N] disposaient du bon de commande dès sa signature et l'absence de mentions qu'ils dénoncent n'était pas dissimulé.
Il n'y a pas non plus d'atteinte au principe d'égalité des armes, dès lors que les obligations dont l'emprunteur est créancier à l'égard du banquier dispensateur de crédit s'éteignent par la mise à disposition des fonds prêtés, alors que celles de l'emprunteur s'échelonnent pendant toute la durée de leur amortissement et qu'elles ne font pas obstacle à la faculté offerte au consommateur d'opposer ces mêmes droits au prêteur, par voie d'exception, pendant toute la durée de la relation contractuelle, étant observé que les obligations des parties à un contrat de crédit ne sont pas identiques, le versement des fonds par l'établissement bancaire étant une obligation à exécution instantanée, alors que le remboursement des mensualités par l'emprunteur est une obligation à exécution successive de sorte que le régime de la prescription est nécessairement différencié. Cette absence d'atteinte au principe d'égalité des armes est patente dans la mesure où les dispositions des articles L. 311-52 du code de la consommation reprises à l'article R. 312-35 prévoient un délai de prescription abrégé de deux années pour les actions en paiement engagées par le prêteur à l'occasion de la défaillance de l'emprunteur soit un délai plus court que celui prévu à l'article 2224 du code civil.
Plus de cinq années s'étant écoulées entre la date de signature du contrat et celle de l'action en nullité formelle qui n'était donc recevable que jusqu'au 17 décembre 2012 inclus, cette action est prescrite et M. [E] et Mme [N] sont irrecevables à solliciter l'annulation du contrat sur le fondement des articles L. 121-21 et suivants du code de la consommation dans leur version applicable au litige.
Le jugement doit donc être confirmé en ce qu'il a considéré que cette demande de nullité formelle était irrecevable.
S'agissant de la demande en nullité pour dol, commis par le vendeur ou la banque c'est à la date à laquelle le dol a été découvert et non là encore à la date à laquelle M. [E] et Mme [N] ont pu avoir connaissance de ses conséquences juridiques à savoir le fait que le dol est en droit une cause de nullité du contrat, que doit être fixé le point du délai du délai de prescription.
Dès lors qu'ils invoquent des man'uvres et tromperies destinées à leur faire croire que l'installation serait autofinancée et rentable financièrement, le point de départ de la prescription doit être fixée à la date à laquelle ils connaissaient la production réelle de leur installation.
Il résulte des propres écritures de M. [E] et Mme [N] qui se plaignent de la faiblesse des productions depuis 2012 et produisent les factures depuis la première de novembre 2013 qu'ils connaissaient cette production plus de cinq ans avant d'assigner le vendeur et le prêteur sans avoir aucunement besoin d'une expertise puisque les factures mentionnaient très précisément le montant que la société EDF allait leur reverser, dès lors cette demande est également prescrite, le jugement devant être confirmé sur ce point.
En responsabilité de la banque
M. [E] et Mme [N] imputent à la banque des fautes de participation au dol du vendeur du fait de l'existence d'un différé de remboursement destiné à entretenir leur croyance légitime d'une rentabilité de l'opération mais aussi dans le déblocage des fonds sans vérification du bon de commande comme sur la foi d'une attestation incomplète ce à quoi la banque oppose une prescription.
L'action pour dol étant prescrite, l'action en responsabilité pour participation au dol l'est aussi son point de départ étant également la date à la laquelle M. [E] et Mme [N] connaissaient la production de l'installation.
Pour le surplus, le fait générateur est celui du déblocage des fonds qui a été réalisé bien plus de cinq ans avant la délivrance de l'assignation la première mensualité ayant été payée en septembre 2013 et la banque ne faisant valoir aucun impayé de sorte que cette demande est donc également prescrite. Le jugement doit être infirmé en ce qu'il a rejeté les demandes lesquelles doivent aussi être déclarées irrecevables comme prescrites, étant au demeurant observé que M. [E] et Mme [N] ne pouvaient ignorer que les fonds avaient été débloqués puisqu'ils ont commencé à rembourser et ce bien plus de cinq ans avant d'avoir assigné.
En déchéance du droit aux intérêts contractuels
La banque fait valoir qu'il s'agit d'une demande nouvelle en cause d'appel et que cette demande est comme telle irrecevable ce à quoi M. [E] et Mme [N] répondent que leur demande est recevable en, application des dispositions de l'article 565 du même code puisqu'elle tend aux mêmes fins que celles soumises au premier juge, même si son fondement juridique est différent. Ils estiment que la finalité d'une demande de nullité est la restitution par la banque de l'ensemble des intérêts et frais versés par les emprunteurs dans le cadre de l'exécution du contrat, à charge pour eux de rembourser le montant du capital emprunté.
Il résulte de l'article 564 du code de procédure civile qu'à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait mais l'article 565 du même code permet effectivement aux parties de présenter des demandes nouvelles si elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge, même si leu fondement juridique est différent.
Il est constant qu'aucune demande de déchéance du droit aux intérêts contractuels n'a été présentée en première instance.
Une demande en nullité vise à l'anéantissement d'un contrat et à la remise en état antérieur. Une demande en déchéance du droit aux intérêts contractuels vise à rendre le crédit gratuit. Elle n'implique pas l'anéantissement du contrat et en conséquence aucune remise en l'état antérieur ni restitution du capital à la banque mais seulement la suppression des intérêts voire leur remboursement. Elle ne tend donc pas aux mêmes fins.
Elle est donc irrecevable de ce seul fait sans qu'il soit besoin d'examiner sa prescription.
Sur les frais irrépétibles et les dépens
Le jugement doit être confirmé en ses dispositions relatives aux dépens et frais irrépétibles de première instance.
M. [E] et Mme [N] qui succombent doivent être condamnés aux dépens d'appel.
Il apparaît en outre équitable de leur faire supporter in solidum la charge des frais irrépétibles engagés par la société BNP Paribas Personal Finance à hauteur de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Statuant publiquement par arrêt réputé contradictoire en dernier ressort,
Confirme le jugement sauf en ce qu'il a rejeté les demandes en responsabilité contractuelles contre la société BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de la société Banque Solfea ;
Déclare ces demandes irrecevables comme prescrites ;
Déclare la demande de déchéance du droit aux intérêts contractuels irrecevable comme nouvelle en appel ;
Condamne M. [E] et Mme [N] in solidum à payer la somme de 3 000 euros à la société BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de la société Banque Solfea sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne M. [E] et Mme [N] in solidum aux dépens d'appel ;
Rejette toute demande plus ample ou contraire.
La greffière La présidente