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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 4, 4 juin 2025, n° 22/06185

PARIS

Arrêt

Infirmation partielle

PARTIES

Demandeur :

Naturhouse (SAS)

Défendeur :

Carodiet (SARL), Celidiet (SARL), LM Dietetique 3 (SARL), LM Dietetique 5 (SARL), LM Dietetique 6 (SARL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Brun-Lallemand

Conseillers :

Mme Depelley, Mme Dallery

Avocats :

Me Regnier, SCP Caroline Regnier Aubert - Bruno Regnier, Me Vignes, SCP GRV Associes

T. com. Bordeaux, du 21 janv. 2022, n° 2…

21 janvier 2022

FAITS ET PROCÉDURE

La SAS Naturhouse, filiale de la société de droit espagnol éponyme, est le franchiseur en France du réseau exploité sous l'enseigne Naturhouse qui a pour activité la vente de produits diététiques, cosmétiques naturels et herboristerie et le conseil professionnel en matière de nutrition et de diététique. Le concept de l'enseigne repose d'une part sur des consultations gratuites de produits diététiques en magasins auprès d'un diététicien, d'autre part sur la vente de produits notamment de type compléments alimentaires de la marque Naturehouse.

Entre 2014 et 2017, la société Naturhouse a conclu 7 contrats de franchise d'une durée de 5 ans chacun pour l'ouverture de 7 établissements dans des villes du sud-ouest de la France :

- en avril 2012 avec la société Celidiet, contrat renouvelé le 25 avril 2017, pour un établissement situé à [Localité 6],

- en juillet 2012 avec la société LM Diététique 3, contrat renouvelé le 28 juillet 2017, pour un établissement situé à [Localité 2],

- le 16 janvier 2014 avec la société Carodiet, avec un terme prévu au 16 janvier 2019, non renouvelé, pour un établissement situé à [Localité 8],

- le 28 février 2015 avec la société Marjodiet, pour un établissement situé à [Localité 3], :

- le 1er février 2016 avec la société LM Diététique 5, pour un établissement situé à [Localité 4],

- le 22 février 2016 avec la société Marjodiet, pour un établissement situé à [Localité 5],

- le 1er janvier 2017 avec la société Carodiet, pour un établissement situé à [Localité 7].

M. [S] [X] est l'associé commun de ces sociétés franchisées.

Par courrier recommandé du 22 janvier 2019, les sociétés Carodiet, Celidiet, LM Diététique 3, LM Diététique 5 et Marjodiet (devenue LM Diététique 6) ont mis en demeure la société Naturhouse d'avoir à remédier à certains manquements contractuels sous un délai d'un mois, sans quoi elles quitteraient le réseau de franchise Naturhouse.

Par courrier recommandé du 15 février 2019, la société Naturhouse a contesté les manquements contractuels allégués par les sociétés franchisées.

Par courrier recommandé avec accusé de réception du 25 février 2019, les franchisées ont informé la société Naturhouse qu'elles mettaient en 'uvre la clause résolutoire stipulée dans les contrats de franchise, prenant ainsi acte de la résiliation aux torts exclusifs de la société Naturhouse desdits contrats, à compter du 11 mars 2019.

Le même jour, la société Carodiet au titre du centre de [Localité 8], dont le contrat de franchise était arrivé à expiration le mois précédent, a indiqué ne pas souhaiter renouveler le contrat de franchise.

Les sociétés Carodiet, Celidiet, LM Diététique 3, LM Diététique 5 et Marjodiet (devenue LM Diététique 6), ont ensuite poursuivi leur activité sous l'enseigne Le Comptoir Diététique, élaborée par M. [S] [X].

Par ordonnance du 23 avril 2019, le juge des référés du tribunal de commerce d'Albi, à qui Naturhouse demandait que soit constaté la violation de la clause de non concurrence et le détournement de clientèle et que soit ordonné le retrait sous astreinte de l'enseigne Le Comptoir diététique et la fermeture sous astreinte des établissements exploitant précédemment l'enseigne Naturhouse, s'est déclaré incompétent, considérant qu'aucun trouble manifestement illicite n'était caractérisé.

Par acte du 27 juin 2019, la société Naturhouse a assigné les sociétés Carodiet, Celidiet, LM Diététique 3, LM Diététique 5 et LM Diététique 6 devant le tribunal de commerce de Bordeaux au titre de leur responsabilité contractuelle, pour rupture unilatérale des contrats de franchise et violation de la clause de non concurrence, et de leur responsabilité délictuelle, à titre principal pour actes de parasitisme et à titre subsidiaire pour actes de confusion.

A titre reconventionnel, les franchisées ont demandé l'annulation des contrats de franchise et à titre subsidiaire qu'il soit jugé que les contrats avaient été rompus aux torts exclusifs de Naturhouse.

Par jugement du 21 janvier 2022, le tribunal de commerce de Bordeaux a :

- Prononcé la résiliation des contrats de franchise aux torts exclusifs de la société Naturhouse,

- Débouté la société Naturhouse de l'ensemble de ses demandes,

- Débouté les sociétés Carodiet, Celidiet, LM Diététique 3, LM Diététique 5 et Marjodiet du surplus de leurs demandes,

- Condamné la société Naturhouse à verser à chacun des sociétés Carodiet, Celidiet, LM Diététique 3, LM Diététique 5 et Marjodiet appelés à la cause la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamné la société Naturhouse aux dépens.

La société Naturhouse a interjeté appel de ce jugement par déclaration reçue au greffe de la Cour le 23 mars 2022, intimant les sociétés Carodiet, Celidiet, LM Diététique 3, LM Diététique 5 et LM Diététique 6.

Par jugements du tribunal de commerce de Carcassonne du 15 juin 2022, la société Carodiet a été placée en sauvegarde judiciaire et la SELARL [F] [L] [I], représentée par Me [F]-[L] [I], a été désignée par le tribunal comme mandataire à la sauvegarde.

Par jugements du tribunal de commerce de Carcassonne du 28 septembre 2022, 30 novembre 2022 et du 1er février 2023, la société Cediet, puis la société LM Diététique 6 et enfin la société LM Diététique 5 ont été tour à tour été placées en liquidation judiciaire et la SELARL [F] [L] [I], représentée par Mes [F]-[L] [I], en a été désignée liquidateur.

Aux termes de ses dernières conclusions, déposées et notifiées par la voie électronique le 4 mars 2025, la société Naturhouse demande à la Cour de :

Vu le contrat de franchise,

Vu la clause de non-concurrence,

Vu les articles 1240 et 1241 du code civil,

Infirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Bordeaux en date du 21 janvier 2022 en ce qu'il a :

- Prononcé la résiliation des contrats de franchise aux torts exclusifs de la société Naturhouse,

- Débouté la société Naturhouse de l'ensemble de ses demandes,

- Condamné la société Naturhouse à verser à chacune des sociétés Carodiet, Celidiet, LM Diététique 3 et LM Diététique 5 et Marjodiet, la somme de trois mille euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamné la société Naturhouse aux dépens,

En conséquence, statuant à nouveau :

A titre principal :

Sur la résiliation aux torts exclusifs de la société Naturhouse :

Prononcer la rupture fautive des contrats de franchise aux torts exclusifs des sociétés Carodiet, LM Diététique 6 anciennement Marjodiet, Celidiet, Lm Diététique 3 et LM Diététique 5,

En conséquence,

Fixer au passif de la procédure de liquidation judiciaire de la société LM Diététique 3, la somme de 193 914 euros au profit de la société Naturhouse, au titre du préjudice financier résultant de la fermeture du centre de [Localité 2],

Fixer au passif de la procédure de sauvegarde judiciaire de la société Carodiet, la somme de 261 334 euros au profit de la société Naturhouse, au titre du préjudice financier résultant de la fermeture du centre de [Localité 7],

Fixer au passif de la procédure de liquidation judiciaire de la société LM Diététique 6 anciennement Marjodiet, la somme de 146 024 euros au profit de la société Naturhouse, au titre du préjudice financier résultant de la fermeture des centres de [Localité 5] et [Localité 3],

Fixer au passif de la procédure de liquidation judiciaire de la société Celidiet, la somme de 154 377 euros au profit de la société Naturhouse, au titre du préjudice financier résultant de la fermeture du centre de [Localité 6],

Fixer au passif de la procédure de liquidation judiciaire de la société LM Diététique 5, la somme de 81 023 euros au profit de la société Naturhouse, au titre du préjudice financier résultant de la fermeture du centre de [Localité 4],

Sur la violation de la clause de non-concurrence :

Déclarer valable la clause de non-concurrence insérée à l'article 11.4 des contrats de franchise,

Constater la violation de la clause de non-concurrence par les sociétés Carodiet, LM Diététique 6 anciennement Marjodiet, Celidiet, LM Diététique 3 et LM Diététique 5 depuis le 11 mars 2019,

Ordonner aux frais des sociétés Carodiet, LM Diététique 6 anciennement Marjodiet, Celidiet, LM Diététique 3 et LM Diététique 5, la publication du dispositif de la décision à intervenir sur : les vitrines de chacun des établissements, ainsi que sur le site internet www.lecomptoirdietetique.fr et dans des journaux de franchise spécialisés et sites internet spécialisés au choix de la société Naturhouse,

Fixer au passif de la procédure de sauvegarde judiciaire de la société LM Diététique 3, la somme de 81 648 euros au profit de la société Naturhouse, au titre du préjudice financier résultant de la violation de la clause de non-concurrence d'une durée d'un an du centre de [Localité 2],

Fixer au passif de la procédure de sauvegarde judiciaire de la société Carodiet, la somme de 177 456 euros au profit de la société Naturhouse, au titre du préjudice financier résultant de la violation de la clause de non-concurrence d'une durée d'un an des centres de [Localité 7] et de [Localité 8],

Fixer au passif de la procédure de liquidation judiciaire de la société LM Diététique 6 anciennement Marjodiet, la somme de 115 308 euros au profit de la société Naturhouse, au titre du préjudice financier résultant de la violation de la clause de non-concurrence depuis le 11 mars 2019 pour les centres de [Localité 5] et [Localité 3],

Fixer au passif de la procédure de liquidation judiciaire de la société Celidiet, la somme de 72 648 euros au profit de la société Naturhouse, au titre du préjudice financier résultant de la violation de la clause de non-concurrence depuis le 11 mars 2019 pour le centre de [Localité 6],

Fixer au passif de la procédure de liquidation judiciaire de la société LM Diététique 5, la somme de 43 212 euros au profit de la société Naturhouse, au titre du préjudice financier résultant de la violation de la clause de non-concurrence depuis le 11 mars 2019 pour le centre de [Localité 4],

A titre subsidiaire :

Sur la responsabilité délictuelle des sociétés intimées :

Constater que les agissements déloyaux des sociétés Carodiet, LM Diététique 6 anciennement Marjodiet, Celidiet, LM Diététique 3 et LM Diététique 5 sont constitutifs de parasitisme,

A défaut,

Constater que les agissements déloyaux des sociétés Carodiet, LM Diététique 6 anciennement Marjodiet, Celidiet, LM Diététique 3 et LM Diététique 5 sont constitutifs de confusion,

En tout état de cause,

Fixer au passif de la procédure de sauvegarde judiciaire de la société Carodiet, la somme de 177 456 euros au profit de la société Naturhouse, au titre du préjudice économique résultant de la concurrence déloyale pour les centres de [Localité 7] et de [Localité 8] et à la somme de 13 377,50 euros au titre des frais générés pour la réinstallation d'un centre à [Localité 2],

Fixer au passif de la procédure de liquidation judiciaire de la société LM Diététique 6 anciennement Marjodiet, la somme de 139 330,5 euros au profit de la société Naturhouse au titre du préjudice résultant de ses agissements déloyaux sur [Localité 3] et [Localité 5] et la somme de 17.035,30 euros au titre des frais générés pour la réinstallation d'un centre à [Localité 3],

Fixer au passif de la procédure de liquidation judiciaire de la société Celidiet, la somme de 87 783 euros au profit de la société Naturhouse au titre du préjudice résultant de ses agissements déloyaux sur [Localité 6],

Fixer au passif de la procédure de liquidation judiciaire de la société LM Diététique 3, la somme de 13 489 euros au profit de la société Naturhouse au titre du préjudice résultant de ses agissements déloyaux sur [Localité 2],

Fixer au passif de la procédure de liquidation judiciaire de la société LM Diététique 5, la somme de 52 214,5 euros au profit de la société Naturhouse au titre du préjudice résultant de ses agissements déloyaux sur [Localité 4],

Ordonner aux frais des sociétés Carodiet, LM Diététique 6 anciennement Marjodiet, Celidiet, LM Diététique 3 et LM Diététique 5, la publication du dispositif de la décision à intervenir sur : les vitrines de chacun des établissements, ainsi que sur le site internet www.lecomptoirdietetique.fr et dans des journaux de franchise spécialisés et sites internet spécialisés au choix de la société Naturhouse,

En tout état de cause,

Confirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Bordeaux en date du 21 janvier 2022 en ce qu'il a débouté les sociétés Carodiet, Celidiet, LM Diététique 3, LM Diététique 5 et Marjodiet du surplus de leurs demandes,

Rejeter l'ensemble des demandes des sociétés Carodiet, LM Diététique 6 anciennement Marjodiet, Celidiet, LM Diététique 3 et LM Diététique 5,

Condamner la SELARL [F] [L] [I], prise en la personne de Maître [F] [L] [I], ès qualité de liquidateur de la société LM Diététique 3 au paiement de la somme de 10 000 euros à la société Naturhouse au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens,

Condamner la SELARL [F] [L] [I], prise en la personne de Maître [F] [L] [I], ès qualité de mandataire judiciaire de la société Carodiet au paiement de la somme de 10 000 euros à la société Naturhouse au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamner la SELARL [F] [L] [I], prise en la personne de Maître [F] [L] [I], ès qualité de liquidateur de la société LM Diététique 6 anciennement Marjodiet au paiement de la somme de 10 000 euros à la société Naturhouse au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamner la SELARL [F] [L] [I], prise en la personne de Maître [F] [L] [I], ès qualité de liquidateur de la société Celidiet au paiement de la somme de 10 000 euros à la société Naturhouse au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamner la SELARL [F] [L] [I], prise en la personne de Maître [F] [L] [I], ès qualité de liquidateur de la société LM Diététique 5 au paiement de la somme de 10 000 euros à la société Naturhouse au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Ordonner l'emploi des dépens de première instance et d'appel en frais privilégiés de la procédure de sauvegarde judiciaire de la société Carodiet et des procédures de liquidation judiciaire des sociétés LM Diététique 6 anciennement Marjodiet, Celidiet et LM Diététique 5 et LM Diététique 3.

Aux termes de ses dernières conclusions, déposées et notifiées par la voie électronique le 30 mai 2023, les sociétés Carodiet, Celidiet, LM Diététique 5 et LM Diététique 6, la société LM Diététique 3, et la SELARL [F] [L] [I], ès qualités de liquidateur de la sociétés Carodiet et ès qualités de mandataire judiciaire des quatre autres intimées, demandent à la Cour de :

Vu les sept contrats de franchise conclus,

Vu les articles 10, 11, 73, 138, 139, 142 et 700 du code de procédure civile,

Vu les articles 1 103, 1104, 1353 et 1986 du code civil,

Vu les articles L. 341-1, L. 341-2, L. 420-1 et suivants, R. 420-3, L. 441-3, L. 442-1 (nouveau) et suivants, L. 442-5 (ancien), D. 442-3 et les annexes 4-2 et 4-2-1 du code de commerce,

Vu l'article 101 du traité sur le fonctionnement de l'union européenne,

Vu les articles 1, d et 4 du règlement d'exemption n°330/2010,

Vu les lignes directrices du règlement d'exemption n°330/2010,

Vu l'article 1240 du code civil,

A titre liminaire :

Dire que la SELARL [F] [L] [I] ès-qualité de mandataire de la société Carodiet est valablement intervenue à la présente instance,

Dire que la SELARL [F] [L] [I], ès-qualité de liquidateur des sociétés Celidiet, LM Diététique 5 et LM Diététique 6 est intervenue à la présente instance,

Donner acte à Maître Jean-Philippe Autier de ce qu'il se constitue sur la présente intervention volontaire et ses suites,

Lui accorder en conséquence le bénéfice des motifs et demandes contenus dans les présentes conclusions,

Sur le fond :

Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :

- Prononcé la rupture des contrats de franchise aux torts exclusifs de la société Naturhouse,

- Débouté la société Naturhouse de l'ensemble de ses demandes,

- Condamné la société Naturhouse à verser à chacune des sociétés Carodiet, Celidiet, LM Diététique 3, LM Diététique 5 et Marjodiet la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamné la société Naturhouse aux dépens,

Infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté les sociétés Carodiet, Celidiet, LM Diététique 3, LM Diététique 5 et Marjodiet du surplus de leurs demandes, soit les demandes suivantes :

Déclarer les sociétés Carodiet, Celidiet, LM Diététique 3, LM Diététique 5 et Marjodiet recevables en toutes leurs demandes,

A titre principal :

Déclarer nulles les clauses des articles 2 et 6, F et 6, C contenues dans les contrats de franchise conclus entre les sociétés Carodiet, Celidiet, LM Diététique 3, LM Diététique 5 et Marjodiet et la société Naturhouse France,

Constater l'illicéité manifeste de la clause de non-concurrence contenue à l'article 11-4 de ces mêmes contrats,

Déclarer nuls les contrats de franchise conclus entre les sociétés Carodiet, Celidiet, LM Diététique 3, LM Diététique 5 et Marjodiet et la société Naturhouse France,

Constater, en tout état de cause, l'absence de détournement de clientèle de la part des sociétés Carodiet, Celidiet, LM Diététique 3, LM Diététique 5 et Marjodiet.

En conséquence :

Condamner la société Naturhouse à restituer à la société Carodiet la somme de 508 274,99 euros, correspondant aux sommes qui lui ont été versées dans le cadre de l'exécution du contrat de franchise,

Condamner la société Naturhouse à restituer à la société Marjodiet la somme de 390267, 66 euros correspondant aux sommes qui lui ont été versées dans le cadre de l'exécution du contrat de franchise,

Condamner la société Naturhouse à restituer à la société Celidiet la somme de 173 665, 26 euros, correspondant aux sommes qui lui ont été versées dans le cadre de l'exécution du contrat de franchise,

Condamner la société Naturhouse à restituer à la société LM Diététique 3 la somme de 179 401, 22 euros, correspondant aux sommes qui lui ont été versées dans le cadre de l'exécution du contrat de franchise,

Condamner la société Naturhouse à restituer à la société LM Diététique 5 la somme de 130 622, 82 euros, correspondant aux sommes qui lui ont été versées dans le cadre de l'exécution du contrat de franchise,

A titre subsidiaire :

Prononcer la résiliation des contrats de franchise aux torts exclusifs de la société Naturhouse,

En conséquence,

Condamner la société Naturhouse à verser à la société Carodiet la somme de 467 739, 93 euros, en réparation du préjudice subi,

Condamner la société Naturhouse à restituer à la société Marjodiet la somme de 325792,24 euros, en réparation du préjudice subi,

Condamner la société Naturhouse à restituer à la société Celidiet la somme de 135 325, 67 euros, en réparation du préjudice subi,

Condamner la société Naturhouse à restituer à la société LM Diététique 3 la somme de 118486, 17 euros, en réparation du préjudice subi,

Condamner la société Naturhouse à restituer à la société LM Diététique 5 la somme de 83275, 28 euros, en réparation du préjudice subi.

En tout état de cause :

Déclarer les sociétés Carodiet, Celidiet, LM Diététique 3, LM Diététique 5 et Marjodiet recevables en toutes leurs demandes,

Débouter purement et simplement la société Naturhouse de toutes ses prétentions,

Condamner la société Naturhouse France à communiquer, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard à compter de la signification du jugement à intervenir, aux sociétés Carodiet, Celidiet, LM Diététique 3, LM Diététique 5 et Marjodiet, l'ensemble de ses grands livres fournisseurs et de ses grands livres clients, ainsi que l'ensemble des accords conclus avec ses fournisseurs, des prix de vente produit par produit de la société Kiluva à la société Naturhouse, de l'ensemble des factures afférentes pour les exercices 2014 à 2019 inclus,

Ordonner la publication du jugement à intervenir sur la page d'accueil du site https://www.naturhouse.fr et dans deux journaux économiques au choix des sociétés Carodiet, Celidiet, LM Diététique 3, LM Diététique 5 et Marjodiet, dans la limite de 10 000 euros,

Condamner la société Naturhouse France à verser aux sociétés Carodiet, Celidiet, LM Diététique 3, LM Diététique 5 et Marjodiet 10 000 euros chacune de dommages et intérêts pour procédure abusive,

Condamner la société Naturhouse au versement d'une amende civile de 10 000 euros,

Condamner la société Naturhouse France au paiement aux sociétés Carodiet, Celidiet, LM Diététique 3, LM Diététique 5 et Marjodiet de la somme de 5 000 euros chacune sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamner la société Naturhouse France au paiement des entiers dépens,

Statuant à nouveau :

Déclarer les sociétés Carodiet et LM Diététique 3 ainsi que les sociétés Celidiet, LM Diététique 5 et LM Diététique 6 (anciennement dénommée Marjodiet) représentées par leur mandataire, la SELARL [F] [L] [I] représentée par Me [F]-[L] [I] ès-qualité de liquidateur des sociétés Celidiet, LM Diététique 5 et LM Diététique 6 recevables en toutes leurs demandes, fins et conclusions,

Débouter purement et simplement la société Naturhouse de toutes ses prétentions,

A titre principal :

Déclarer nulles les clauses des articles 2 et 6, F et 6, C contenues dans les contrats de franchise conclus entre les sociétés Carodiet, Celidiet, LM Diététique 3, LM Diététique 5 et Marjodiet (désormais LM Diététique 6) et la société Naturhouse France,

Constater l'illicéité manifeste de la clause de non-concurrence contenue à l'article 11-4 de ces mêmes contrats,

Déclarer nuls les contrats de franchise conclus entre les sociétés Carodiet, Celidiet, LM Diététique 3, LM Diététique 5 et Marjodiet (désormais LM Diététique 6) et la société Naturhouse France,

Constater, en tout état de cause, l'absence de détournement de clientèle de la part des sociétés Carodiet, Celidiet, LM Diététique 3, LM Diététique 5 et Marjodiet (désormais LM Diététique 6),

En conséquence :

Condamner la société Naturhouse à restituer à la société Carodiet, la somme de 508 274, 99 euros, correspondant aux sommes qui lui ont été versées dans le cadre de l'exécution du contrat de franchise,

Condamner la société Naturhouse à restituer à la société LM Diététique 6 (anciennement dénommée Marjodiet) représentée par son mandataire, la SELARL [F] [L] [I] représentée par Me [F]-[L] [I] ès-qualité de liquidateur de la société LM Diététique 6, la somme de 390 267, 66 euros correspondant aux sommes qui lui ont été versées dans le cadre de l'exécution du contrat de franchise,

Condamner la société Naturhouse à restituer à la société Celidiet représentée par son mandataire, la SELARL [F] [L] [I] représentée par Me [F]-[L] [I] ès-qualité de liquidateur de la société Celidiet la somme de 173 665, 26 euros, correspondant aux sommes qui lui ont été versées dans le cadre de l'exécution du contrat de franchise,

Condamner la société Naturhouse à restituer à la société LM Diététique 3 la somme de 179 401, 22 euros, correspondant aux sommes qui lui ont été versées dans le cadre de l'exécution du contrat de franchise,

Condamner la société Naturhouse à restituer à la société LM Diététique 5 représentée par son mandataire, la SELARL [F] [L] [I] représentée par Me [F]-[L] [I] ès-qualité de liquidateur de la société LM Diététique 5 la somme de 130 622, 82 euros, correspondant aux sommes qui lui ont été versées dans le cadre de l'exécution du contrat de franchise,

A titre subsidiaire :

Prononcer la résiliation des contrats de franchise aux torts exclusifs de la société Naturhouse,

En conséquence,

Condamner la société Naturhouse à verser à la société Carodiet, la somme de 467 739, 93 euros, en réparation du préjudice subi,

Condamner la société Naturhouse à restituer à la société LM Diététique 6 (anciennement dénommée Marjodiet) représentée par son mandataire, la SELARL [F] [L] [I] représentée par Me [F]-[L] [I] ès-qualité de liquidateur de la société LM Diététique 6, la somme de 325 792, 24 euros, en réparation du préjudice subi,

Condamner la société Naturhouse à restituer à la société Celidiet représentée par son mandataire, la SELARL [F] [L] [I] représentée par Me [F]-[L] [I] ès-qualité de liquidateur de la société Celidiet, la somme de 135 325, 67 euros, en réparation du préjudice subi,

Condamner la société Naturhouse à restituer à la société LM Diététique 3 la somme de 118 486, 17 euros, en réparation du préjudice subi,

Condamner la société Naturhouse à restituer à la société LM Diététique 5 représentée par son mandataire, la SELARL [F] [L] [I] représentée par Me [F]-[L] [I] ès-qualité de liquidateur de la société LM Diététique 5, la somme de 83 275, 28 euros, en réparation du préjudice subi,

En tout état de cause :

Déclarer les sociétés Carodiet et LM Diététique 3 ainsi que les sociétés Celidiet, LM Diététique 5 et LM Diététique 6 (anciennement dénommée Marjodiet) représentées par leur mandataire, la SELARL [F] [L] [I] représentée par Me [F]-[L] [I] ès qualité de liquidateur des sociétés Celidiet, LM Diététique 5 et LM Diététique 6 recevables en toutes leurs demandes, fins et conclusions,

Débouter purement et simplement la société Naturhouse de toutes ses prétentions,

Condamner la société Naturhouse France à communiquer, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard à compter de la signification du jugement à intervenir, aux sociétés Carodiet et LM Diététique 3 ainsi qu'aux sociétés Celidiet, LM Diététique 5 et LM Diététique 6 (anciennement dénommée Marjodiet) représentées par leur mandataire, la SELARL [F] [L] [I] représentée par Me [F]-[L] [I] ès-qualité de liquidateur des sociétés Celidiet, LM Diététique 5 et LM Diététique 6, l'ensemble de ses grands livres fournisseurs et de ses grands livres clients, ainsi que l'ensemble des accords conclus avec ses fournisseurs, des prix de vente produit par produit de la société Kiluva à la société Naturhouse, de l'ensemble des factures afférentes pour les exercices 2014 à 2019 inclus,

Ordonner la publication du jugement à intervenir sur la page d'accueil du site https://www.naturhouse.fr et dans deux journaux économiques au choix des sociétés Carodiet et LM Diététique 3 ainsi qu'aux sociétés Celidiet, LM Diététique 5 et LM Diététique 6 (anciennement dénommée Marjodiet) représentées par leur mandataire, la SELARL [F] [L] [I] représentée par Me [F]-[L] [I] ès qualité de liquidateur des sociétés Celidiet, LM Diététique 5 et LM Diététique 6, dans la limite de 10 000 euros,

Condamner la société Naturhouse France à verser aux sociétés Carodiet et LM Diététique 3 ainsi qu'aux sociétés Celidiet, LM Diététique 5 et LM Diététique 6 (anciennement dénommée Marjodiet) représentées par leur mandataire, la SELARL [F] [L] [I] représentée par Me [F]-[L] [I] ès-qualité de liquidateur des sociétés Celidiet, LM Diététique 5 et LM Diététique 6 la somme de 10 000 euros chacune de dommages et intérêts pour procédure abusive,

Condamner la société Naturhouse au versement d'une amende civile de 10 000 euros,

Condamner la société Naturhouse France au paiement aux sociétés Carodiet et LM Diététique 3 ainsi qu'aux sociétés Celidiet, LM Diététique 5 et LM Diététique 6 (anciennement dénommée Marjodiet) représentées par leur mandataire, la SELARL [F] [L] [I] représentée par Me [F]-[L] [I] ès-qualité de liquidateur des sociétés Celidiet, LM Diététique 5 et LM Diététique 6 de la somme de 5 000 euros chacune sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,Condamner la société Naturhouse France au paiement des entiers dépens.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 5 mars 2025.

La Cour renvoie à la décision entreprise et aux conclusions susvisées pour un exposé détaillé du litige et des prétentions des parties, conformément à l'article 455 du code de procédure civile.

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I - A titre liminaire, sur l'intervention volontaire de la SELARL [F]-[L] [I]

La SELARL [F]-[L] [I], représentée par Me [F]-[L] [I], fait valoir qu'elle a, en qualité de mandataire à la sauvegarde de la société Carodiet et, en qualité de liquidateur des sociétés Celidiet, LM Diététique 5 et LM Diététique 6, intérêt à intervenir à la présente procédure, conformément à l'article 31 du code de procédure civile. La société Naturhouse ne s'y oppose pas dans ses écritures.

Les conditions légales étant réunies, il y a lieu de déclarer recevable cette demande d'intervention volontaire.

II - Sur la nullité de certaines dispositions des contrats de franchise

1- Sur l'application du droit de l'Union européenne

Moyens des parties

La société Naturhouse soutient que le règlement n°330/2010 du 20 avril 2010 invoqué par les sociétés franchisées concerne l'application de l'article 101 du Traité de fonctionnement de l'Union Européenne, lequel ne s'applique qu'aux accords horizontaux et verticaux ainsi qu'aux pratiques susceptibles d'affecter le commerce entre états membres de l'Union Européenne. Elle considère que le présent litige ne concerne que des sociétés implantées sur le territoire français et que dès lors, les sociétés franchisées ne démontrent pas en quoi les contrats de franchise seraient susceptibles d'affecter le commerce entre états membres.

Sur ce,

L'article 101 TFUE ne s'applique que dans la mesure où la pratique illicite est "susceptible d'affecter le commerce entre Etats membres".

Il ressort des lignes directrices de la Commission européenne ainsi que de la jurisprudence des juridictions de l'Union que la démonstration de l'affectation sensible du commerce impose la réunion de trois éléments : l'existence d'un courant d'échanges entre Etats membres portant sur les produits en cause, l'existence de pratiques susceptibles d'affecter ces échanges et le caractère sensible de cette affectation.

La circonstance que les pratiques d'ententes ne soient commises que sur le territoire d'un seul Etat membre ne fait pas obstacle à ce que les deux premières conditions soient remplies. En effet, une entente s'étendant à l'ensemble du territoire d'un Etat membre ayant, par sa nature même, pour effet de consolider des cloisonnements de caractère national, induit une forte présomption d'affection du commerce entre les Etats membres qui ne peut être écartée que si l'analyse des caractéristiques de l'accord et du contexte économique dans lequel il s'insère démontre le contraire (CJUE 24 septembre 2009 Erste Group Bank/Commission C-125/07 P, C-133/07 P, C-135/07 P et C-137/07 , points 36 et s ; 4 septembre 2014, C-184/13 point 44 ; Com., 7 octobre 2014, pourvoi n° 13-19.476). Ensuite, s'agissant du troisième élément, le caractère sensible de l'affectation directe ou indirecte, potentielle ou actuelle, du commerce intracommunautaire résulte d'un ensemble de critères, parmi lesquels la nature des pratiques, la nature des produits concernés et la position de marché des entreprises en cause (en ce sens Com.31 janvier 2012, n°10-25.772).

En l'espèce, les pratiques alléguées ont été mises en 'uvre par la société Naturhouse et l'ensemble de ses franchisés au sein de son réseau couvrant l'intégralité du territoire national, et de par leur nature (interdiction de vente sur internet, approvisionnement exclusif, interdiction de revente à d'autres franchisés) celles-ci aboutissent à cloisonner le marché en entravant le développement direct d'échanges intracommunautaires à partir des différents canaux de distribution mis à la disposition des franchisés.

S'agissant du caractère sensible de l'affectation, la société Naturhouse, qui a ouvert 47 centres en France en 2017 (pièce intimées n°36), se présente elle-même, de par sa grande notoriété, comme " leader " sur son marché et compte en France plus de 400 centres dont la majorité est exploitée par des franchisées outre une présence dans 20 pays dans le monde avec 2 000 centres exploités par des franchisés ou succursales.

Ainsi, eu égard à leur nature, à leur économie et à leur ampleur géographique, les pratiques en cause dans la présente affaire sont susceptibles d'avoir affecté de manière sensible le commerce entre États membres. En conséquence, les pratiques mises en 'uvre doivent être examinées au regard à la fois du droit européen et du droit national, notamment des articles 101, paragraphe 1 du TFUE et L. 420-1 du code de commerce.

Selon l'article 101, paragraphe 1, du TFUE, "sont incompatibles avec le marché intérieur et interdits tous accords entre entreprises, toutes décisions d'associations d'entreprises et toutes pratiques concertées, qui sont susceptibles d'affecter le commerce entre États membres et qui ont pour objet ou pour effet d'empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence dans le marché intérieur".

De même, l'article L. 420-1 du code de commerce prohibe les actions concertées, conventions, ententes expresses ou tacites entre les entreprises lorsqu'elles ont pour objet ou peuvent avoir pour effet d'empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence sur un marché, notamment lorsqu'elles tendent à faire obstacle à la fixation des prix par le libre jeu du marché en favorisant artificiellement leur hausse ou leur baisse.

2- Sur la clause d'interdiction de vente en ligne

Moyens des parties

Les sociétés Carodiet, Celidiet, LM Diététique 3, LM Diététique 5, LM Diététique 6 et [F] [L] [I] font valoir à titre reconventionnel que l'insertion d'une clause portant interdiction de vente sur internet à l'article 2 et 6F des contrats de franchise constitue une violation des dispositions du droit interne et communautaire en la matière. Elles considèrent qu'une telle clause constitue une entente illicite au sens de l'article L. 420-1 du code de commerce et l'article 101 c) du Traité de fonctionnement de l'Union Européenne, ne bénéficiant pas, selon l'article 4 c) du règlement européen d°330/2010 du 20 avril 2010 de l'exemption prévue par ledit règlement dès lors qu'étant un accord vertical, elle aurait pour objet de restreindre le territoire sur lequel, ou la clientèle sur laquelle, un acheteur partie à l'accord, peut vendre les biens ou services contractuels sans préjudice d'une restriction quant à son lieu d'établissement. Elles indiquent, en outre, que la clause de répond pas non plus aux exceptions listées à l'article L. 420-4 du code de commerce.

En substance, elles soutiennent que la clause portant interdiction de vente sur internet n'est pas justifiée, la réglementation en vigueur n'obligeant pas à ce que ces produits soient vendus uniquement par des diététiciens et l'exigence de traçabilité des produits n'étant pas sérieusement opposable, dans la mesure où les franchisés sont des personnes liées au franchiseur par un contrat de franchise, lequel les soumet à un certain nombre d'obligations. Aussi, elles affirment que la prohibition générale et absolue des ventes sur internet emporte, par application de l'article 101 du Traité de fonctionnement de l'Union Européenne, la nullité automatique de l'accord de franchise.

En réponse, la société Naturhouse affirme que la restriction de vente en ligne stipulée aux articles 2 et 6F des contrats de franchise est, en l'espèce, justifiée par la nature et la propriété des produits en cause et est proportionnée à l'objectif vise et soutient qu'une telle clause doit être, en ce sens, autorisée. Elle expose que les compléments alimentaires font l'objet d'une règlementation européenne et française encadrant strictement sa fabrication, de sorte à surveiller la traçabilité du produit et assurer la sécurité du consommateur final. Elle fait valoir que le développement d'un complément alimentaire intègre les exigences de qualité et de sécurité qui conditionnent la pérennité du produit. Elle ajoute que la commercialisation des compléments alimentaires n'est possible qu'après avoir effectué une déclaration de première mise sur le marché auprès de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF).

En substance, elle expose que l'exigence de traçabilité des compléments alimentaires implique d'identifier l'ensemble des acteurs intervenant dans la chaîne de mise sur le marché d'une denrée alimentaire. Or, la vente de tels produits sur internet, par des franchisés, ne permettrait pas selon elle de satisfaire aux exigences relatives à la parfaite maitrise du circuit de distribution des produits et la parfaite connaissance de l'intégralité des acteurs de ce circuit. Elle en déduit que l'interdiction de revente sur internet insérée aux articles 2 et E.1 des contrats de franchise est justifiée, compte tenu des exigences propres à la commercialisation de tels produits et des spécificités caractérisant le réseau de franchise Naturhouse.

Elle rappelle en outre que les sociétés franchisées ne peuvent invoquer l'évolution du concept et de la méthode Naturhouse intervenue en 2020 pour démontrer que la vente en ligne était réalisable dans la mesure où, ayant quitté le réseau le 11 mars 2019, les faits ainsi reprochés sont postérieurs aux relations contractuelles litigieuses et doivent donc être, en ce sens, exclus des débats.

Réponse de la Cour

L'article 2 des contrats de franchise, relatif à l'objet du contrat dispose que :

"Le Franchiseur consent au Franchisé qui accepte, le droit d'exploiter un Centre en vue de la distribution des Produits sous la Marque ci-dessus, en qualité de Franchisé exclusif pour le Territoire défini en annexe, conformément aux conditions du Contrat et notamment du Kit d'ouverture.

Le Franchisé s'engage à installer, gérer et exploiter dans un local situé au (') un Centre NATURHOUSE sous la direction et les conseils du Franchiseur dans le but de réaliser la vente, en exclusivité, des produits HOUSEDIET.

Le Franchisé, pourra également vendre les produits KILUVA sans exclusivité.

Est strictement interdit l'exercice de l'activité, directe ou indirectement, en dehors des limites géographiques signalées ainsi que la vente ou l'achat de produits auprès d'autres centres.

La vente des produits par internet est également interdite, seule la vente directe en magasin est autorisée, compte tenu de la spécificité du concept et des produits.

Il est expressément entendu que le Centre sera affecté exclusivement à la vente au détail des produits HOUSEDIET et KILUVA ou de tous autres produits ou services fournis par le Franchiseur conformément au contrat."

L'article F.1 relatif à la publicité et promotion-internet précise que :

"(') Il est strictement interdit au Franchisé de créer sa propre page Web.

En outre toute vente internet, participation à des promotions ou remises via internet, promotion sur des sites d'achat groupés sont formellement interdits (')"

La Cour retient que ces dispositions instaurent une restriction verticale sur le marché de la diététique résultant, d'une part, de l'édition de contrats de franchise contenant la clause d'interdiction et traduisant la sollicitation du franchiseur et, d'autre part, de l'acquiescement des franchisés aux clauses restrictives de vente par internet par la signature des contrats de franchise et les demandes faites au franchiseur de faire respecter cette politique commerciale.

Pour relever de l'interdiction énoncée à l'article 101 du TFUE et à l'article L. 420-1 du code de commerce, un accord doit avoir "pour objet ou pour effet" d'empêcher, de restreindre ou de fausser la concurrence dans le marché intérieur.

S'agissant des contrats de franchise de distribution en vertu desquels le franchisé se borne à vendre certains produits dans un magasin qui porte l'enseigne du franchiseur, la Cour de justice a eu l'occasion d'indiquer que : "un tel système [de franchise], qui permet au franchiseur de tirer parti de sa réussite, ne porte pas atteinte en soi à la concurrence." Elle ajoute que "pour qu'[un tel système] puisse fonctionner ['] le franchiseur doit [notamment] pouvoir prendre les mesures propres à préserver l'identité et la réputation du réseau qui est symbolisé par l'enseigne. Il en résulte que les clauses qui organisent le contrôle indispensable à cette fin ne constituent pas non plus des restrictions de concurrence au sens de l'article [101], paragraphe 1 [du TFUE] ". Elle considère cependant que "loin d'être nécessaire à la protection du savoir-faire transmis ou à la préservation de l'identité et de la réputation du réseau, certaines clauses restreignent la concurrence entre les membres de celui-ci. Tel est le cas des clauses qui réalisent un partage des marchés entre franchiseur et franchisés ou entre franchisés ou qui empêchent ceux-ci de se livrer à une concurrence de prix entre eux" (CJUE, arrêt du 28 janvier 1986, C-161/84, Pronuptia, points 13 à 23).

L'article 2 du règlement d'exemption n°330/2010 prévoit que conformément à l'article 101, paragraphe 3, du traité, et sous réserve des dispositions du présent règlement, l'article 101, paragraphe 1, du traité est déclaré inapplicable aux accords verticaux.

Aux termes des lignes directrices de 2010/C 130/01 de la Commission sur les restrictions verticales, constitue un accord vertical, "un accord ou une pratique concertée entre deux ou plusieurs entreprises opérant chacune, aux fins de l'accord ou de la pratique concertée, à un niveau différent de la chaîne de production ou de distribution, et relatif aux conditions auxquelles les parties peuvent acheter, vendre ou revendre certains biens ou services" (point 23).

Si les accords de franchise ne sont pas directement visés par le règlement d'exemption n°330/2010, les lignes directrices précisent que :

"(point 189) Les accords de franchise comportent des licences de droits de propriété intellectuelle relatifs notamment à des marques ou à des signes distinctifs et à un savoir- faire pour l'utilisation et la distribution de biens ou de services. Outre une licence de droits de propriété intellectuels, le franchiseur fournit normalement au franchisé, pendant la période d'application de l'accord, une assistance commerciale ou technique. La licence et cette assistance font partie intégrante de la méthode commerciale franchisée. Le franchiseur perçoit en règle générale une redevance du franchisé pour l'utilisation de cette méthode commerciale. La franchise peut permettre au franchiseur de mettre en place, moyennant des investissements limités, un réseau uniforme pour la distribution de ses produits. Outre la concession de la méthode commerciale, les accords de franchise contiennent généralement une combinaison de restrictions verticales portant sur les produits distribués, en particulier la distribution sélective et/ou une obligation de non-concurrence et/ou la distribution exclusive ou des formes adoucies de ces restrictions.

(point 190) L'applicabilité du règlement d'exemption par catégorie à l'octroi d'une licence relative à des droits de propriété intellectuelle prévu dans un accord de franchise est traitée aux points 24 à 46. En ce qui concerne les restrictions verticales à l'achat, à la vente et à la revente de biens et services relevant d'un accord de franchise, telles que la distribution sélective, une obligation de non- concurrence ou la distribution exclusive, l'exemption par catégorie s'applique lorsque la part de marché ne dépasse pas 30 %. Les orientations fournies en relation avec ces types de restrictions s'appliquent également aux accords de franchise, (')."

Cependant l'article 4 du règlement d'exemption par catégorie n°330/2010 énumère une liste de restrictions caractérisées qui entraînent l'exclusion de l'intégralité de l'accord vertical du champ d'application dudit règlement.

Lorsqu'une telle restriction caractérisée est incluse dans un accord, il est présumé que cet accord relève de l'article 101, paragraphe 1. Il est également présumé qu'il est peu probable que cet accord remplisse les conditions énoncées à l'article 101, paragraphe 3, raison pour laquelle l'exemption par catégorie ne s'applique pas (lignes directrices point 47).

Les lignes directrices mentionnent, notamment, que "[l]a restriction caractérisée visée à l'article 4, point b), du règlement d'exemption par catégorie concerne les accords et pratiques concertées qui ont directement ou indirectement pour objet de restreindre les ventes réalisées par un acheteur partie à l'accord ou par ses clients, pour autant que la restriction porte sur le territoire sur lequel, ou sur la clientèle à laquelle, l'acheteur ou ses clients peuvent vendre les biens ou services contractuels. Cette restriction caractérisée est liée au partage du marché en territoires ou en clientèles" (point 50).

En ce qui concerne les restrictions à la vente sur internet, les lignes directrices précitées précisent (point 52) :

"Internet est un instrument puissant qui permet d'atteindre un plus grand nombre et une plus grande variété de clients que par les seules méthodes de vente plus traditionnelles, ce qui explique pourquoi certaines restrictions à son utilisation sont considérées comme une restriction des (re)ventes. En principe, tout distributeur doit être autorisé à utiliser internet pour vendre ses produits (')."

Aussi, selon ces lignes directrices constitue en particulier une restriction caractérisée retirant le bénéfice de l'exemption par catégorie prévue à l'article 4, point b), du règlement n° 330/2010272 tout accord consistant à convenir, d'une part, que "le distributeur (exclusif) empêche les clients situés sur un autre territoire (exclusif) de consulter son site internet ou les renvoie automatiquement vers les sites du fabricant ou d'autres distributeurs (exclusifs)" et, d'autre part, que "le distributeur limite la part de ses ventes réalisées par internet" (points 50, 52 a) et c).

Dans le cadre d'un contrat de distribution sélective, s'agissant spécifiquement d'une clause ayant pour conséquence une interdiction de vente en ligne, la Cour de justice a jugé, dans son arrêt du 13 octobre 2011, [F] [D] que :

"l'article 101, paragraphe 1, TFUE doit être interprété en ce sens qu'une clause contractuelle, dans le cadre d'un système de distribution sélective, exigeant que les ventes de produits cosmétiques et d'hygiène corporelle soient effectuées dans un espace physique en présence obligatoire d'un pharmacien diplômé, ayant pour conséquence l'interdiction de l'utilisation d'Internet pour ces ventes, constitue une restriction par objet au sens de cette disposition si, à la suite d'un examen individuel et concret de la teneur et de l'objectif de cette clause contractuelle et du contexte juridique et économique dans lequel elle s'inscrit, il apparaît que, eu égard aux propriétés des produits en cause, cette clause n'est pas objectivement justifiée".

En l'espèce, les clauses précitées des articles 2 et 6 F.1 du contrat de franchise du réseau Naturhouse interdisent la vente par internet des produits Naturhouse.

La spécificité du concept Naturhouse repose sur la vente de compléments alimentaires associés à des conseils personnalisés prodigués par un diététicien formé par Naturhouse. Or si une telle spécificité relève de la politique commerciale et du savoir-faire du réseau Naturhouse favorisant la vente directe en magasin, il n'est pas démontré qu'elle soit imposée par une réglementation particulière impliquant de facto la vente des produits par internet. Au demeurant, durant la période d'exécution des contrats, ces biens étaient vendus notamment sur le site carethy.fr se trouvant en Espagne (pièce intimées n°11).

Par ailleurs, la société Naturhouse ne démontre pas en quoi l'exigence de traçabilité des compléments alimentaires impose d'interdire la vente de ces produits sur internet, ni que cette interdiction découle d'une réglementation relative aux contraintes sanitaires des compléments alimentaires ou toute autre réglementation spécifique.

Dès lors, il n'est pas démontré par la société Naturhouse que cette clause d'interdiction de vente sur internet est objectivement justifiée au regard des produits en cause.

Aussi, il résulte de l'ensemble de ces éléments, que la société Naturhouse s'est entendue avec ses franchisés pour limiter leur activité de vente en ligne au motif que ses produits ne pouvaient être commercialisés on line et cloisonner et se partager le marché, et qu'une telle pratique constitue, de par sa nocivité, une restriction de concurrence par objet au sens des articles 101, paragraphe 1, du TFUE et L.420-1 du code de commerce.

Enfin, la société Naturhouse ne démontre ni même allègue que cette restriction de concurrence peut bénéficier d'une exemption individuelle au titre de l'article 101, paragraphe 3 du TFUE ou sur le fondement de l'article L.420-4 du code de commerce, et notamment qu'elle serait imposée par un texte législatif ou réglementaire ou ayant pour effet d'améliorer la production ou la distribution des produits ou d'assurer un progrès économique.

S'agissant de la sanction, selon l'article 101, paragraphe 2 TFUE, les accords ou décisions interdits en vertu du présent article sont nuls de plein droit. L'article L. 420-3 du code de commerce sanctionne par la nullité tout engagement convention ou clause contractuelle se rapportant à une pratique prohibée par l'article L. 420-1 du code de commerce.

En application de ces articles, dès lors que le système de franchise, qui permet au franchiseur de tirer parti de sa réussite, ne porte pas atteinte en soi à la concurrence (CJUE, arrêt du 28 janvier 1986, C-161/84, Pronuptia), le contrat de franchise n'est pas en lui-même nul mais seulement la clause d'interdiction de vente sur internet constituant une restriction de concurrence par objet.

En conséquence, il y a lieu de prononcer la nullité de la clause figurant à l'article 2 alinéa 5 et à l'article 6 F.1 alinéa 4 du contrat de franchise en ce qu'elle interdit la vente des produits par internet.

Le jugement sera infirmé de ce chef de demande.

3 - Sur la clause d'approvisionnement exclusif

Moyens des parties

Les sociétés Carodiet, Celidiet, LM Diététique 3, LM Diététique 5 et LM Diététique 6 et [F] [L] [I] font valoir que la clause insérée à l'article 6C des contrats de franchise imposant aux franchisés de s'approvisionner exclusivement auprès du franchiseur constitue, au sens de l'article L. 420-1 du code de commerce et de l'article 101 c) du Traité de fonctionnement de l'Union Européenne, une entente illicite ne bénéficiant ni des exceptions prévues à l'article L. 420-4 du code de commerce, ni des exemptions prévues au règlement n°330/2010. Elles observent que la clause d'approvisionnement exclusif n'est pas limitée, puisqu'elle vise indistinctement "les produits ou services qui ne soient pas ceux agréés par le franchiseur", et est injustifiée, dès lors que la société Naturhouse commercialise auprès de tiers extérieurs au réseau les produits du contrat et ne peut donc opposer la nécessité de maintenir l'identité commune du réseau. Aussi, elles soutiennent qu'en l'absence de justification d'une telle clause, celle-ci est nulle et emporte, par voie de conséquence, l'anéantissement rétroactif du contrat.

En réponse, la société Naturhouse soutient que cette clause d'approvisionnement exclusif est conforme au droit de la concurrence pour être indispensable à la préservation de l'identité et de la réputation du réseau. Elle affirme ainsi que l'insertion d'une telle clause est justifiée au regard tant de la nécessité de garantir l'homogénéité des gammes de produits au sein du réseau, que de la nécessité de garantir une parfaite adéquation entre les méthodes techniques mises en place par le franchiseur au fil du temps et les produits qui y sont associés. Elle expose, à ce titre, que les méthodes Naturhouse ont été réfléchies et conçues selon un savoir-faire qui lui est propre consistant en la vente de produits aux termes d'une prescription personnalisée établie par un diététicien formé auprès d'elle et l'établissement d'un suivi-clients après la vente des produits concernés. Par ailleurs, elle indique qu'une telle clause permet d'assurer la sécurité sanitaire des compléments alimentaires qu'elle fabrique dans la mesure où la multiplication des canaux de distribution ne permet pas de remplir l'exigence de traçabilité imposée par la réglementation française et européenne en vigueur. Elle ajoute que cette clause a été portée à la connaissance des sociétés franchisées dès la remise du document d'information précontractuelle, n'ayant ainsi pas été imposée à ces dernières.

Réponse de la Cour

L'article 6, C sur l'exclusivité d'approvisionnement dispose :

"C.1 - Le Franchisé s'engage à s'approvisionner en produits, uniquement auprès du Franchiseur, ceci afin de garantir l'homogénéité des gammes de produits au sein du réseau ainsi que la parfaite adéquation entre les méthodes techniques mises ne place par le Franchiseur depuis des années et les produits qui y sont associés. Le Franchiseur se réserve le droit de modifier à son gré, éventuellement sur suggestion du Franchisé, la liste des référencements figurant dans le Kit d'ouverture.

C.2 - Le Franchisé ne commercialisera pas, ni ne fera la promotion d'autres produits ou services qui ne soient pas ceux autorisés par le Franchiseur.

C.3 - Le Franchisé s'engage à disposer d'un stock suffisant, en quantité, qualité et variété, pour répondre aux nécessités de la clientèle et pour approvisionner de manière adéquate et maintenir assorties les étagères et autres espaces dédiés à l'exposition des produits. La Quantité et la Composition du stock s'établiront d'un commun accord entre les parties. Le stock minimum disponible doit avoir une valeur d'environ 5 000 euros."

En droit européen de la concurrence, l'obligation d'approvisionnement exclusif est assimilée à une obligation de non-concurrence (article 1 d du règlement d'exemption n°330/2010).

Selon la Cour de Justice (CJUE, arrêt du 28 janvier 1986, C-161/84, Pronuptia, point 21), "grâce au contrôle exercé par le franchiseur sur l'assortiment offert par le franchisé, le public pourra trouver auprès de chaque franchisé des marchandises de même qualité. Il peut être impraticable dans certains cas, comme dans le domaine des articles de mode, de formuler des spécifications de qualité objectives. Veiller au respect de ces spécifications peut également, en raison du grand nombre de franchisés, entraîner un coût trop élevé. Une clause prescrivant au franchisé de ne vendre que des produits provenant du franchiseur ou de fournisseurs sélectionnés par lui doit, dans de telles conditions, être considérée comme nécessaire à la protection de la réputation du réseau."

De même selon les lignes directrices de 2010 (point 190) "une obligation de non-concurrence relative aux biens ou services achetés par le franchisé ne relèvera pas de l'article 101, paragraphe 1, lorsqu'elle est nécessaire au maintien de l'identité commune et de la réputation du réseau franchisé. Dans de tels cas, la durée de l'obligation de non-concurrence n'est pas un facteur pertinent au regard de l'article 101, paragraphe 1, pour autant qu'elle n'excède pas celle de l'accord de franchise lui-même."

Aussi, en matière de franchise, les clauses qui organisent le contrôle indispensable à la préservation de l'identité et de la réputation du réseau, symbolisé par l'enseigne, ne constituent pas des restrictions de concurrence au sens des articles 101, paragraphe 1, du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne et L. 420-1 du code de commerce (en ce sens Com., 20 décembre 2017, pourvoi n° 16-20.500).

La société Naturhouse justifie, contrat de franchise et du document d'information précontractuelle à l'appui, que son concept repose sur le conseil diététique et nutritionnel personnalisés et la vente de compléments alimentaires conçus par le groupe Kiluva auquel elle appartient. Il n'est pas utilement contesté que les méthodes de suivi-diététique Naturhouse fournies aux franchisés sont modélisées et formatées par rapport aux produits Naturhouse, et que la clause d'approvisionnement exclusive est indispensable pour préserver le savoir-faire et l'identité du réseau fondé sur une adéquation entre les méthodes techniques mises au point par le franchiseur en conseil diététique et les produits qui y sont associés.

L'illiceité de la clause d'approvisionnement exclusive n'est donc pas démontrée.

Le jugement est confirmé pour ces motifs substitués.

4 - Sur la clause portant interdiction de revente à d'autres centres

Moyens des parties

Les sociétés Carodiet, Celidiet, LM Diététique 3, LM Diététique 5 et LM Diététique 6 et [F] [L] [I] affirment que la clause portant interdiction de reventes à d'autres centres insérée à l'article 2 des contrats de franchise méconnait les dispositions de l'article L. 420-1 du code de commerce et de l'article 101 c) du Traité de fonctionnement de l'Union Européenne en ce qu'elle constitue une entente illicite. Au même titre que la clause portant interdiction de vente sur internet, elles soutiennent que ladite clause ne bénéficie pas de l'exemption prévue par le règlement européen n°330/210, puisqu'il s'agit d'une restriction caractérisée, au sens de l'article 4 d), ni des exceptions listées à l'article L. 420-4 du code de commerce. Par ailleurs, elles affirment que l'insertion d'une telle clause n'est aucunement justifiée par la société Naturhouse. Aussi, elles indiquent que la clause portant interdiction de revente à d'autres centres emporte la nullité automatique de l'accord de franchise.

En réponse, la société Naturhouse affirme que l'article 2 des contrats de franchise, portant interdiction de revente et d'achat des produits auprès d'autres centres est justifiée par la volonté d'assurer la protection du savoir-faire et donc de l'identité de la franchise, ainsi que celle d'assurer la sécurité sanitaire des produits vendus.

Réponse de la Cour

L'article 4 du règlement d'exemption n°330/2010 prévoit que l'exemption à l'article 2 ne s'applique pas aux accords verticaux qui, directement ou indirectement, isolément ou cumulés avec d'autres facteurs sur lesquels les parties peuvent influer, ont pour objet d) de restreindre les fournitures croisées entre distributeurs à l'intérieur d'un système de distribution sélective, y compris entre des distributeurs agissant à des stades commerciaux différents.

Les lignes directrices de 2010 mentionnent (point 58) que :

"La restriction caractérisée visée à l'article 4, point d), du règlement d'exemption par catégorie concerne la restriction des fournitures croisées entre distributeurs désignés à l'intérieur d'un système de distribution sélective. Par conséquent, un accord ou une pratique concertée ne peut avoir directement ou indirectement pour objet d'empêcher ou de restreindre les ventes actives ou passives des produits contractuels entre les distributeurs sélectionnés. Ces derniers doivent rester libres d'acheter les produits contractuels aux autres distributeurs désignés, membres du réseau, qui agissent au même stade commercial ou à un stade différent. Il en résulte que la distribution sélective ne peut être combinée avec des restrictions verticales visant à contraindre les distributeurs à s'approvisionner en produits contractuels exclusivement auprès d'un fournisseur donné. Cela signifie également qu'à l'intérieur d'un réseau de distribution sélective, aucune restriction ne peut être imposée aux grossistes désignés en ce qui concerne leurs ventes du produit contractuel aux détaillants désignés."

La Cour de Justice a relevé qu'" une clause prescrivant au franchisé de ne vendre que des produits provenant du franchiseur ou de fournisseurs sélectionnés par lui doit, dans de telles conditions, être considérée comme nécessaire à la protection de la réputation du réseau. Elle ne peut toutefois aboutir à empêcher le franchisé de se procurer ces produits auprès d'autres franchisés. " (CJUE, arrêt du 28 janvier 1986, C-161/84, Pronuptia, point 21)

En l'espèce, la société Naturhouse se borne à justifier l'existence de la clause d'interdiction par le fait de maîtriser la provenance des produits vendus afin de protéger le savoir-faire et l'identité du réseau ainsi que la sécurité sanitaire des produits vendus.

Cependant, dès lors que les franchisés ne peuvent vendre que des produits fournis ou déterminés par la société Naturhouse au regard de l'article 2 du contrat de franchise, celle-ci n'explique pas en quoi l'interdiction de revente de ces produits entre franchisés appliquant le savoir-faire du réseau est objectivement justifié.

Dès lors, une telle pratique, visant à cloisonner et partager le marché, constitue, de par sa nocivité, une restriction de concurrence par objet au sens des articles 101, paragraphe 1, du TFUE et L.420-1 du code de commerce.

Enfin, la société Naturhouse ne démontre ni même allègue que cette restriction de concurrence peut bénéficier d'une exemption individuelle au titre de l'article 101, paragraphe 3 du TFUE ou sur le fondement de l'article L. 420-4 du code de commerce, et notamment qu'elle serait imposée par un texte législatif ou réglementaire ou ayant pour effet d'améliorer la production ou la distribution des produits ou d'assurer un progrès économique.

S'agissant de la sanction, selon l'article 101, paragraphe 2 TFUE, les accords ou décisions interdits en vertu du présent article sont nuls de plein droit. L'article L. 420-3 du code de commerce sanctionne par la nullité tout engagement convention ou clause contractuelle se rapportant à une pratique prohibée par l'article L. 420-1 du code de commerce.

En application de ces articles, dès lors que le système de franchise, qui permet au franchiseur de tirer parti de sa réussite, ne porte pas atteinte en soi à la concurrence (CJUE, arrêt du 28 janvier 1986, C-161/84, Pronuptia), le contrat de franchise n'est pas en lui-même nul mais seulement la clause d'interdiction de revente à d'autres centres constituant une restriction de concurrence par objet.

En conséquence, il y a lieu de prononcer la nullité de la clause figurant à l'article 2 alinéa 4 du contrat de franchise en ce qu'elle interdit la vente ou l'achat de produits auprès d'autres centres.

Le jugement sera infirmé de ce chef de demande.

5- Sur la clause de non-concurrence

Les sociétés Carodiet, Celidiet, LM Diététique 3, LM Diététique 5 et LM Diététique 6 et [F] [L] [I] affirment que les conditions de validité d'une clause de non-concurrence, énoncées à l'article L. 341-2 du code de commerce, font en l'espèce défaut, de sorte que la clause de non-concurrence insérée à l'article 11-4 des contrats de franchise est nulle. Pour démontrer le caractère illicite de cette clause, les sociétés franchisées soutiennent que celle-ci ne seraient ni délimitée géographiquement, ni indispensable à la protection du savoir-faire substantiel, spécifique et secret transmis dans le cadre du contrat. Elles contestent le moyen soutenu par la société Naturhouse selon lequel le critère de limitation géographique de la clause doit être apprécié en tenant compte du rayonnement géographique de l'activité du franchiseur, faisant ainsi valoir que la clause de non-concurrence, étendue au territoire national, est automatiquement nulle.

Elles font enfin valoir que les articles L. 341-1 et L. 341-2 du code de commerce sont applicables aux contrats litigieux dès lors qu'en vertu de l'article 31 de la loi Macron du 6 aout 2015, ils se sont appliqués aux contrats en cours à l'expiration d'un délai d'un an à compter de la date de promulgation de la loi, soit depuis le 6 aout 2016. Indiquant avoir délivré une assignation par acte du 27 juin 2019, elles affirment que les dispositions précitées sont applicables, le fait que les contrats aient été conclus à une date antérieure à l'entrée en vigueur de la loi étant indifférent. Compte tenu de l'ensemble de ces éléments, les sociétés franchisées font valoir que la clause de non-concurrence intégrée dans les contrats de franchise doit être réputée non écrite.

En réponse, la société Naturhouse affirme que, conformément à l'article L. 341-2 du code de commerce, la clause de non-concurrence insérée à l'article 11-4 des contrats de franchise est valable en ce qu'elle n'excède pas la durée d'un an après le terme du contrat, concerne des biens et services en concurrence avec ceux du franchiseur à savoir le conseil diététique personnalisé allié à la vente de compléments alimentaires, et est indispensable à la protection du savoir-faire substantiel, spécifique et secret transmis dans le cadre du contrat de franchise. S'agissant de sa délimitation géographique, la société Naturhouse fait valoir que l'étendue géographique de son activité doit nécessairement être prise en compte. A ce titre, elle expose avoir étendu son réseau de franchise sur l'ensemble du territoire national. En tout état de cause, elle indique que les manquements allégués à l'obligation de non-concurrence concernent des activités exercées au sein des mêmes locaux que ceux exploités sous l'enseigne Naturhouse et que, ce faisant, la condition relative à la délimitation géographique est satisfaite, dès lors que seuls ces manquements sont invoqués.

Réponse de la Cour

L'article 11.4 des contrats de franchise dispose que :

"Le Franchisé s'engage pour une période d'un an (1) à partir de la fin du contrat présent, et sans tenir en compte la cause pour laquelle il a été mis fin à celui-ci, à ne pas :

- Créer, directement ou indirectement, aucun autre établissement en France consacré à la même activité que celle du Franchiseur.

- Détourner ou tenter de détourner des clients vers un autre établissement en concurrence avec le Franchiseur.

- Employer ou tenter d'employer, en incitant directement ou indirectement à abandonner son emploi, une personne qui au moment de la rupture soit employée d'un autre local appartenant au Franchiseur."

L'article L. 341-2 du code de commerce, qui répute non écrites les clauses restrictives de concurrence post-contractuelles en droit de la distribution, sauf démonstration qu'elles remplissent certaines conditions cumulatives, a été créé par la loi du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques, laquelle dispose, dans son article 31-II, qu'elle s'applique à l'expiration d'un délai d'un an à compter de sa promulgation. Or la loi nouvelle ne peut, sauf rétroactivité expressément stipulée par le législateur, inexistante en l'espèce remettre en cause la validité d'une clause contractuelle régie par les dispositions en vigueur à la date où le contrat a été passé (Cass. com., 16 février 2022, n°20-20.429 publié).

La clause de non-concurrence litigieuse est stipulée dans le contrat de franchise signé entre les parties le 13 août 2014, l'article L.341-2 du code de commerce n'est donc pas applicable au présent litige.

Il est cependant de jurisprudence constante qu'une clause de non-concurrence, en ce qu'elle porte atteinte au principe de la liberté du commerce, doit être justifiée par la protection des intérêts légitimes de son créancier et ne pas porter une atteinte excessive à la liberté de son débiteur, c'est-à-dire être limitée quant à l'activité, l'espace et le lieu qu'elle vise ; elle ne peut, par exemple, empêcher le débiteur d'exercer toute activité professionnelle ; enfin, elle doit, au regard de la mise en balance de l'intérêt légitime du créancier de non-concurrence et de l'atteinte qui est apportée au libre exercice de l'activité professionnelle du débiteur de non-concurrence, être proportionnée (en ce sens Com.24 novembre 2009 n°08-17.650 ; Com. 16 février 2022 n°20.12.885).

La clause de non-concurrence post-contractuelle peut être considérée comme inhérente à la franchise dans la mesure où elle permet d'assurer la protection du savoir-faire transmis qui ne doit profiter qu'aux membres du réseau et de laisser au franchiseur le temps de réinstaller un franchisé dans la zone d'exclusivité. En ce sens, la clause litigieuse insérée au contrat de franchise Naturhouse est destinée à la protection des intérêts légitimes de la société franchiseur Naturhouse dont la réalité du savoir-faire transmis n'est pas utilement contestée par les intimées. Cette clause est par ailleurs limitée dans le temps. Néanmoins cette clause doit rester proportionnée à l'objectif qu'elle poursuit.

La clause de non-concurrence post contractuelle prévoit d'abord l'interdiction de " Créer, directement ou indirectement, aucun autre établissement en France consacré à la même activité que celle du Franchiseur ". Pour justifier cette interdiction d'exercer la même activité sur toute la France, la société Naturhouse se borne à affirmer que son activité s'étendant sur l'ensemble du territoire national (en 2014, année de la signature du contrat par la société Carodiet, 392 centres franchisés et 4 succursales), ce rayonnement géographique justifie l'étendue de la clause de non-concurrence. Or cette considération ne permet pas de justifier à elle seule une atteinte à la liberté d'exercer une telle activité sur tout le territoire national pour le franchisé. La société Naturhouse ne justifie ni même explicite en quoi la spécificité du savoir-faire implique une protection sur l'ensemble du territoire national.

Dès lors, la clause de non-concurrence post-contractuelle, telle que libellée à l'alinéa 2 de l'article 11.4 du contrat de franchise, est disproportionnée par rapport aux intérêts légitimes de la société Naturhouse au regard de l'objet du contrat, et qu'il y a lieu de l'annuler.

Le jugement ayant omis de statuer spécifiquement sur cette demande mais ayant rejeté l'ensemble des demandes sociétés Carodiet, Celidiet, LM Diététique 3, LM Diététique 5 et LM Diététique 6, il est confirmé pour ces motifs substitués.

6 - Sur les demandes de remboursement formulées en conséquence

Moyens des parties

Les sociétés Carodiet, Celidiet, LM Diététique 3, LM Diététique 5 et LM Diététique 6 et [F] [L] [I] prétendent que la nullité des contrats de franchise, entraine, par voie de conséquence, leur anéantissement rétroactif de sorte qu'elles sont fondées à solliciter le remboursement de l'intégralité des sommes engagées pour le développement de la franchise. Aussi, elles sollicitent le remboursement des sommes suivantes : 508 274,99 euros pour la société Carodiet, 390 267, 66 euros pour la société LM Diététique 6 (anciennement Marjodiet), 173 665, 26 euros pour la société Celidiet, 179 401, 22 euros pour la société LM Diététique 3, et enfin 130 622,82 euros pour la société LM Diététique 5, soit un montant total de 1 382 231,95 euros.

En réponse, la société Naturhouse soutient que les sociétés franchisées sont malvenues à solliciter le remboursement des frais liés à la franchise pendant la durée d'exécution des contrats dans la mesure où les sociétés ont pu dégager d'importants chiffre d'affaires grâce auxdits contrats.

Réponse de la Cour

Au regard des motifs qui précèdent, le contrat de franchise souscrit entre les parties n'est pas nul en application des articles 101 TFUE et L.420-1 du code de commerce, mais seulement les clauses interdisant la vente des produits sur internet et entre franchisés ainsi que la clause de non-concurrence post-contractuelle. Le caractère essentiel de ces clauses au regard de l'économie du contrat n'est pas allégué.

Lorsqu'un contrat a déjà été exécuté, en tout ou partie, l'effet rétroactif d'une nullité implique remise en cause de ses effets passés. Indépendamment de l'annulation des clauses litigieuses, la partie lésée peut donc demander réparation du dommage subi dans les conditions du droit commun. Cependant, au cas présent, les intimées sollicitent à titre de réparation la restitution de sommes qui sont dépourvues de lien avec le dommage subi du fait de l'insertion dans les contrats de franchise des trois clauses annulées.

Les données fournies à l'appui par ces parties portent sur les redevances, les marges prélevées par le franchiseur sur les achats, les aménagements, les frais matériel informatique, les dépenses de publicité et communication et les frais de formation, soit des sommes qui ne concernent pas les clauses annulées.

Aucune des pièces versées au débat ne permet de fixer le préjudice réparable en lien avec leurs gains manqués, leurs pertes subies, ainsi que la perte de chance (soit la probabilité de l'évènement favorable empêché par le fait générateur).

Le jugement est confirmé par ces motifs substitués.

III - Sur la résiliation des contrats de franchise

Moyens des parties

La société Naturhouse fait valoir que les sociétés intimées ont, de façon fautive, rompu le 25 février 2019 les contrats de franchise conclus, dans le but d'exploiter une enseigne concurrente, Le Comptoir Diététique. Elle ajoute que les manquements qui lui ont été reprochés au moment de la résiliation à l'initiative des franchisées n'avaient jamais été portés à sa connaissance. Elle soutient que la mise en demeure du 22 janvier 2019 fait états de manquements différents que ceux invoqués dans le courrier de résiliation du contrat. Elle expose, en outre, n'avoir jamais manqué à son obligation d'aide et d'assistance, ayant mis en place divers procédés pour être à l'écoute et répondre quotidiennement aux attentes de ses franchisés. Elle prétend qu'aucune irrégularité d'approvisionnement ne peut être constatée. Elle affirme, de surcroit, que les sociétés Carodiet, Celidiet, LM Diététique 3, LM Diététique 5 et LM Diététique 6 ne rapportent pas la preuve qu'elle aurait prélevé, pendant l'exécution des contrats de franchise, une marge sur les chiffres d'affaires des sociétés.

Elle soutient que les manquements contractuels allégués ne sont qu'un prétexte pour justifier la résiliation desdits contrats, chacune des sociétés ayant été autorisées, le 25 février 2019, date de la dénonciation du contrat, à procéder à la signature du contrat de licence de marque venant à l'exploitation de leur activité sous l'enseigne Le Comptoir Diététique, appartenant à la société Aubrac Capital, nouveau franchiseur des sociétés intimées, détenue à 99 pourcents par M. [S] [X] (pièce n°6-1 à 6-5 et 7-1 à 7-5 de Naturhouse). Elle dénonce la création concomitante d'un réseau de franchise concurrent, acté dès le 25 février 2019 pour une mise en place prévue au 11 mars 2019. Elle fait par ailleurs observer que M. [S] [X] a déposé, dès le 21 février 2019, la marque Le Comptoir Diététique (pièce n°9-1 et 9-2 de Naturhouse), soulignant ainsi l'antériorité des démarches liées à la création d'un réseau de franchise concurrent, par rapport à la date de la mise en demeure adressée et celle de la notification de la rupture des contrats de franchise. Au regard de ces éléments, elle soutient que les sociétés Carodiet, Celidiet, LM Diététique 3, LM Diététique 5 et Marjodiet (devenue LM Diététique 6) ont, à leurs torts exclusifs, rompu les contrats de franchise.

Les sociétés Carodiet, Celidiet, LM Diététique 3, LM Diététique 5 et LM Diététique 6 et [F] [L] [I] répondent que la rupture des contrats de franchise est intervenue aux torts exclusifs de la société Naturhouse, agissant en qualité de centrale d'achat, celle-ci ayant adopté un comportement particulièrement déloyal dans l'exécution des contrats de franchise. Elles font état de manquements à l'obligation de bonne foi, d'assistance, d'information quant à la renégociation des tarifs, et enfin des irrégularités dans l'approvisionnement des produits.

S'agissant du manquement à l'obligation de bonne foi, les sociétés reprochent à la société Naturhouse de les avoir empêchées de s'ouvrir à un nouveau mode de distribution en vendant les produits Naturhouse sur internet, alors qu'elle-même procédait à la vente des produits sur le web. Elles soutiennent avoir aussi été contraintes de commercialiser des produits sans rapport avec le concept de la franchise ("Pack Express").

S'agissant du manquement à l'obligation d'assistance stipulée aux articles 5, A.7, A.5, B.5 et B.6, les sociétés franchisées déplorent n'avoir reçu que très peu de visites de la part de la société Naturhouse, laquelle n'auraient fourni, à l'occasion de rares visites, que des conseils sommaires. Elles soulignent aussi que la formation des équipes ne s'est plus faite que par e-learning, que le suivi du traitement des clients est resté archaïque (support papier), poussant la clientèle à utiliser les applications mobiles des concurrents. Elles pointent par ailleurs l'absence de promotion d'un visuel en terme de marketing depuis 2017.

S'agissant des irrégularités dans l'approvisionnement, les sociétés franchisées soutiennent que la société Naturhouse a manqué à son obligation d'approvisionnement prévue à l'article 5 B.1 des contrats de franchise dans la mesure où elles auraient connu des ruptures de stock répétées, le franchiseur faisant valoir être elle-même en attente du retour de ses fournisseurs (pièce intimées n°21).

S'agissant des manquements à l'obligation d'information des franchisés quant aux accords conclus avec les fournisseurs, elles reprochent à la société Naturhouse de ne jamais leur avoir transmis de documents relatifs à une renégociation des tarifs auprès des fournisseurs, celles-ci déplorant l'augmentation de certains produits vendus.

Dans ces circonstances, elles affirment avoir été en droit de déterminer elles-mêmes la date de dénonciation du contrat. En outre, elles exposent que le délai de 14 jours laissé à compter de la constatation de l'acquisition de la clause résolutoire correspond au temps nécessaire pour qu'elles puissent réorganiser leur activité. Elles indiquent ne pas avoir, par la suite, exercé une nouvelle activité dans le cadre d'une nouvelle franchise, mais dans le cadre d'une nouvelle enseigne intitulée Le Comptoir Diététique.

En tout état de cause, elles font valoir que la rupture ne saurait être intervenue à leurs torts dans la mesure où les contrats contenait des clauses irrégulières et créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties. Elles produisent par ailleurs les avis très positifs consultables sur internet laissés par la clientèle de l'ensemble de leurs centres (pièce intimées n°15). Elles observent, enfin, que par arrêt confirmatif du 5 avril 2023 de la cour d'appel de Toulouse, la résiliation aux torts exclusifs de la société Naturhouse de 42 contrats de franchise signés par d'autres franchisés a été prononcée.

En réparation du préjudice résultant de la rupture, aux torts exclusifs du franchiseur, des contrats de franchise, les intimées sollicitent le remboursement de l'intégralité des sommes engagées pour le développement de la franchise : soit la somme de 467 739, 93 euros pour la société Carodiet, la somme de 325 792, 24 euros pour la société LM Diététique 6 (anciennement Marjodiet), la somme de 135 325,67 euros pour la société Celidiet, la somme de 118 486,17 euros pour la société LM Diététique 3 et la somme de 83 275,28 euros pour la société LM Diététique 5.

Réponse de la Cour

Conformément à l'article 1134 du code civil (devenu 1103, 1104 et 1193), les conventions légalement formées, qui tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites et ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel ou pour les causes que la loi autorise, doivent être exécutées de bonne foi.

En outre, en vertu des dispositions des articles 1147, 1149 et 1150 du code civil (devenus 1231-1 à 3), le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts, soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, toutes les fois qu'il ne justifie pas que l'inexécution provient d'une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu'il n'y ait aucune mauvaise foi de sa part, les dommages et intérêts dus au créancier étant, en général, de la perte qu'il a faite et du gain dont il a été privé et le débiteur n'étant tenu que des dommages et intérêts qui ont été prévus ou qu'on a pu prévoir lors du contrat, lorsque ce n'est point par son dol que l'obligation n'est point exécutée.

1- Sur la résiliation fautive des contrats de franchise

L'article 9 des contrats de franchise stipule que le contrat pourra être résilié par anticipation, par l'une ou l'autre des parties, en cas d'inexécution de l'une quelconque des obligations y figurant et/ou l'une quelconque des obligations inhérentes à l'activité exercée.

Il est constant que les intimées ont adressé une mise en demeure à la société Naturhouse le 22 janvier 2019, dans les conditions de forme prévues au contrat, et qu'un délai d'un mois s'est ensuite écoulé, conformément à l'alinéa 2 de l'article 9 susvisé.

C'est à raison que le tribunal, dans la décision attaquée, a observé que le franchiseur avait, pendant la période d'exécution des contrats, entendu développer la vente sur internet et transmis, à ce titre, un article du journal El Pais du 5 novembre 2018 dont le titre est " Nous avons conclu un accord avec Amazon " (pièce intimées n°22 du dossier d'appel), la teneur du message de Naturhouse qui l'accompagnait manifestant une confusion dans ses méthodes commerciales.

Le tribunal en a justement déduit, en substance, que si les clients des franchisés s'approvisionnaient par le biais du commerce en ligne, il serait difficile aux franchisés, cantonnés à la vente en magasin par décision du franchiseur, de commercialiser leur produit de proximité, étant par ailleurs relevé que le concept connaissait parallèlement un changement important, puisqu'il reposait jusqu'alors sur la présence d'une diététicienne au sein du centre.

Y ajoutant, la Cour constate que l'article 5.B.6 des contrats impose au franchiseur de " visiter régulièrement le centre, par le moyen de ses représentants, dans le but d'analyser ensemble tous les aspects relatifs au centre ". Or il peut être observé qu'en réponse aux allégations des intimées sur le manque d'assistance, Naturhouse se limite à évoquer une assistance apportée par le responsable de zone, la tenue de réunions d'informations et la fourniture de divers outils, en ne fournit aucun élément de preuve relatif à l'un au moins de ces éléments, alors que les franchisés ont lors du débat contradictoire (p. 48 de leurs écritures), spécifiquement pointé cette carence probatoire.

Le jugement est confirmé en ce qu'il a prononcé la résiliation du contrat de franchise aux torts exclusifs de la société Naturhouse.

2- Sur l'indemnisation du préjudice subi

La Cour retient, tout d'abord, que les intimées ne demandent pas que soient écartée l'application de l'article 10.1 des contrats de franchise aux termes duquel aucune indemnité ne sera due au franchisé à l'expiration ou à la résiliation du contrat.

Elle relève, en outre, qu'il est constant qu'au cas présent, les sociétés franchisées ont poursuivi une activité dans le local duquel elles exerçaient jusqu'alors sous l'enseigne Naturhouse, activité qu'elles n'auraient pu exploiter si les contrats n'avaient pas été résiliés. Or les intimées, en ne produisant aucune pièce, ne justifient que le profit tiré de la nouvelle activité s'était révélé inférieur au gain manqué du fait de la résiliation du contrat de franchise.

Les intimées sollicitant le remboursement de sommes qui sont dépourvues de lieu avec le dommage subi, le jugement qui les a déboutées de leurs demandes est confirmé pour ces motifs substitués.

IV. Sur la concurrence déloyale et le parasitisme

Moyens des parties

La société Naturhouse estime en premier lieu que des faits de parasitisme sont caractérisés.

S'agissant de l'atteinte portée à une valeur économique, elle affirme que les sociétés intimées se sont placées volontairement dans son sillage pour profiter de sa notoriété et de ses investissements. Elle précise proposer à sa clientèle une prise en charge hebdomadaire, par un professionnel de santé présent en magasin, au travers d'un plan diététique personnalisé. La spécificité de son activité réside ainsi dans l'association entre conseils prodigués par un diététicien diplômé et la préconisation de compléments alimentaires ciblés de la marque Naturhouse, fabriqués selon un cahier des charges et un procédé qui lui est propre. Elle explique aussi avoir été la seule entreprise à, jusqu'alors, adjoindre à la vente de compléments alimentaires le conseil diététique réalisé par un professionnel de santé et avoir transmis son savoir-faire aux sociétés intimées, anciennes franchisées, dans le cadre des différents contrats de franchise conclus entre 2011 et 2019.

S'agissant de l'usurpation de notoriété, la société Naturhouse reproche aux sociétés intimées d'avoir imité son savoir-faire en exerçant, après la rupture du contrat, la même activité sous une nouvelle enseigne Le Comptoir Diététique pour avoir proposé, dans les centres anciennement exploités sous l'enseigne Naturhouse, des consultations diététiques par un professionnel de santé et la vente de compléments alimentaires sous la marque Le Comptoir Diététique (pièces n°12-1 à 12,7 et 13-1 à 13-7 de Naturhouse). Elle considère que les sociétés intimées ont bénéficié, dans le cadre de leur nouvelle activité, de sa renommée et d'un profit illégitime.

S'agissant enfin de la volonté de se placer dans le sillage du parasité, la société Naturhouse affirme que les sociétés Carodiet, Celidiet, LM Diététique 3, LM Diététique 5 et Marjodiet (devenue LM Diététique 6) ont prémédité leurs agissements dans la mesure où elles n'auraient rompu les contrats de franchise que pour mettre en place un réseau concurrent. Elle expose que les sociétés intimées ont, dès le 25 février 2019, date de la notification de rupture du contrat par mise en 'uvre de la clause résolutoire, procédé à la modification de leur objet social, ajouté l'enseigne Le Comptoir Diététique et modifié corrélativement leurs statuts, ainsi que procédé à la signature du contrat de licence de marque venant à l'exploitation de leur activité sous l'enseigne précitée. Elle reproche ainsi aux sociétés intimées d'avoir prétexté des manquements contractuels pour s'extraire du réseau de franchise, dès lors que le même jour, soit le 25 février 2019, elles ont constaté l'acquisition de la clause résolutoire des contrats de franchise et décidé de changer de réseau de franchise, alors même que la création d'un tel réseau suppose un long travail qui ne peut être accompli en si peu de temps. Compte tenu de ces éléments, la société Naturhouse soutient que les sociétés Carodiet, Celidiet, LM Diététique 3, LM Diététique 5 et Marjodiet (devenue LM Diététique 6) se sont volontairement placées dans son sillage.

La société Naturhouse soutient, en second lieu, que les intimées ont commis des agissements constitutifs de confusion en ce qu'elles ont développé son savoir-faire au sein d'un autre réseau de franchise. Précisément, elle indique que les sociétés intimées ont, au sein des mêmes locaux que ceux au sein desquels elles exerçaient leur activité de franchisée, par ailleurs rattachés aux mêmes lignes téléphoniques, développé une activité commerciale ayant pour objet la vente de compléments alimentaires et la fourniture de services de conseils diététiques par un professionnel de santé. Elle expose que cette activité correspond strictement à celle qui était précédemment exercée sous l'enseigne Naturhouse. Elle ajoute que les anciens clients Naturhouse ont vu leur suivi diététique poursuivi dans le cadre de l'exploitation de la nouvelle enseigne Le Comptoir Diététique. Elle fait valoir qu'en conservant ainsi les mêmes locaux et les mêmes numéros de téléphone affiliés, les sociétés intimées ont nécessairement créé une confusion chez sa clientèle, redirigée vers de nouveaux centres placés sous enseigne Le Comptoir Diététique. Au regard de ces éléments, elle prétend que les sociétés intimées ont créé une confusion en profitant de l'identité de lieu d'activité et de professionnels pour détourner la clientèle acquise dans le contrat des contrats de franchise Naturhouse.

Les sociétés Carodiet, Celidiet, LM Diététique 3, LM Diététique 5 et LM Diététique 6 répondent qu'elles ont été en droit d'exercer une activité similaire à l'instar d'autres enseignes concurrentes, compte tenu notamment du fait que la société Naturhouse n'est pas propriétaire de sa clientèle.

Elles ajoutent que la volonté de se placer dans le sillage de Naturhouse n'est pas rapportée.

Réponse de la Cour

En vertu des dispositions des articles 1240 et 1241 (anciennement 1382 et 1383) du code civil, tout fait quelconque de l'homme qui cause à autrui un dommage oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer, chacun étant responsable du dommage qu'il a causé non seulement par son fait, mais encore par sa négligence ou par son imprudence.

L'action en concurrence déloyale est une modalité particulière de mise en 'uvre de la responsabilité civile délictuelle pour fait personnel de droit commun. Elle suppose ainsi la caractérisation d'une faute, d'une déloyauté appréciée à l'aune de la liberté du commerce et de l'industrie et du principe la libre concurrence, ainsi que d'un préjudice et d'un lien de causalité les unissant. Si le préjudice s'infère d'un acte de concurrence déloyale, la victime doit prouver l'étendue de son entier préjudice (en ce sens, Com. 12 février 2020, n° 17-31.614). Dans ce cadre, le juge, tenu de réparer intégralement tout préjudice dont il constate le principe (en ce sens, Com., 10 janvier 2018, n° 16-21.500), apprécie souverainement son montant dont il justifie l'existence par la seule évaluation qu'il en fait sans être tenu d'en préciser les divers éléments (en ce sens, Ass. plén., 26 mars 1999, n° 95-20.640).

Le parasitisme s'apprécie dans le même cadre que la concurrence déloyale dont il est une déclinaison mais dont la constitution, appréciée sans égard pour la situation de concurrence effective à raison de sa nature (en ce sens, Com., 15 novembre 2011, n° 10-25-473), est indifférente au risque de confusion (en ce sens, Com. 20 mai 2014, n° 13-16.943). Il consiste dans le fait pour une personne physique ou morale de profiter volontairement et déloyalement sans bourse délier des investissements, d'un savoir-faire ou d'un travail intellectuel d'autrui produisant une valeur économique individualisée et générant un avantage concurrentiel (même arrêt).

Au cas présent, la Cour retient que les pièces fournies sont manifestement insuffisantes pour établir que le concept Naturehouse disposait d'une valeur économique en lui-même, individualisé et procurant un avantage concurrentiel sur un savoir-faire bien spécifique, alors que les intimées font état de plusieurs enseignes ou réseaux (Diet Plus, Comme J'aime, Medial, Body Sano, Diet Success), proposant des conseils individualisés et experts de professionnels de santé, pour une meilleure alimentation et perte de poids, associés à des prescriptions de compléments alimentaires. Ainsi, si la société Naturehouse justifie d'une certaine notoriété dans ce type d'activité, elle n'apparait pas comme la seule à proposer un tel concept.

Il ressort des débats que le concept Naturhouse n'implique pour être maitrisé aucun investissement financier, intellectuel ou commercial, sinon la création d'un réseau dont le franchisé ne peut plus tirer partie du fait du changement d'enseigne. Naturhouse ne démontre pas non plus l'existence d'une clientèle qui lui serait propre.

Le seul fait que l'activité similaire exercée sous une autre enseigne soit située dans les mêmes locaux, et que les anciennes franchisées aient pu utiliser le fichier client qu'elles avaient développé dans le cadre du contrat de franchise, sans que d'autres éléments d'information sur l'exploitation de cette activité ne soient fournis, ne permet pas à Naturhouse de démontrer un détournement de sa notoriété ou d'investissement, ni des actes de concurrence déloyale par confusion dans l'esprit de la clientèle.

Le jugement est confirmé pour ces motifs substitués.

V - Sur les autres demandes

1- Sur le déséquilibre significatif allégué entre les droits et obligations des parties résultant des clauses annulées

Moyens des parties

Les sociétés Carodiet, Celidiet, LM Diététique 3, LM Diététique 5 et LM Diététique 6 prétendent que l'insertion des clauses dont l'annulation est ordonnée a pour effet d'engendrer un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties, conformément à l'article L442-1 du code de commerce.

La société Naturhouse répond que de telles clauses n'ont jamais été imposées aux sociétés franchisées et indique que celles-ci échouent à démontrer en quoi les obligations imposées au titre notamment de la clause d'approvisionnement exclusif étaient déséquilibrées.

Réponse de la Cour

Aux termes de l'article L. 442-6 I 2° du code de commerce dans sa version applicable aux faits litigieux, engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers, de soumettre ou de tenter de soumettre un partenaire commercial à des obligations créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties.

La caractérisation de cette pratique restrictive suppose ainsi la réunion de deux éléments : d'une part la soumission à des obligations, ou sa tentative, et d'autre part l'existence d'obligations créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties.

La soumission, ou sa tentative, implique la démonstration par tous moyens par la société Naturehouse, conformément à l'article 9 du code de procédure civile, de l'absence de négociation effective, ou de sa possibilité, des clauses ou obligations incriminées. L'appréciation de cette première condition est réalisée en considération du contexte matériel et économique de la conclusion proposée ou effective, l'insertion de clauses dans une convention type ou un contrat d'adhésion ou les conditions concrètes de souscription (en ce sens, Com. 6 avril 2022, n° 20-20.887) pouvant constituer des critères pertinents de la soumission ou de sa tentative. Si l'analyse de la contrepartie participe prioritairement de l'appréciation du déséquilibre significatif, celle de son existence, plutôt que de sa suffisance, demeure utile pour caractériser une éventuelle soumission ou tentative de soumission en ce que l'absence d'avantage attendu par le cocontractant ou de réciprocité des obligations est de nature à éclairer subjectivement, à raison de la dimension purement unilatérale de la démarche, une volonté d'assujettissement.

L'appréciation du déséquilibre significatif, qui peut être économique comme juridique, est globale, au regard de l'économie du contrat, et concrète. L'existence d'obligations créant un déséquilibre significatif peut notamment se déduire d'une absence totale de réciprocité ou de contrepartie à une obligation, ou encore d'une disproportion importante entre les obligations respectives des parties, les effets des pratiques n'ayant en revanche pas à être pris en compte ou recherchés (en ce sens, Com., 3 mars 2015, n° 14-10.907). En l'absence de toute présomption légale, la preuve du déséquilibre significatif incombe à l'appelante, tandis que celle d'un éventuel rééquilibrage du contrat par une ou plusieurs autres clauses repose sur les intimées.

Au cas présent, les intimées échouent, par la caractérisation d'éléments factuels en lien, à démonter les faits nécessaires au succès de la prétention qu'elles élèvent sur le fondement du déséquilibre significatif.

2- Sur la demande de production de pièces

Moyens des parties

Les sociétés Carodiet, Celidiet, LM Diététique 3, LM Diététique 5 et LM Diététique 6 sollicitent la communication des documents attestant des marges précisément prélevées par le franchiseur chaque mois tout au long de sa relation contractuelle avec les sociétés intimées, du détail des accords commerciaux conclus avec les fournisseurs, et plus particulièrement la société Kiluva, tête de réseau, des prix de vente produit par produit de la société Kiluva à la société Naturhouse, factures à l'appui. Pour motiver cette demande, les sociétés franchisées exposent que la société Naturhouse, ne bénéficiant que d'une redevance de 600 euros annuelle HT, prélève des marges non autorisées à la revente, alors même que l'article 1986 du code civil, supplétif de volonté, prévoit la gratuité du mandat. En outre, elle sollicite la communication de l'ensemble des accords conclus par la société Naturhouse avec ses fournisseurs, son grand livre fournisseurs et son grand livre clients pour les exercices 2014 à 2019 inclus, sous astreinte de 1000 euros par jour de retard à compter du prononcé du jugement.

En réponse, la société Naturhouse expose que l'obligation faite aux sociétés franchisées de verser un dépôt de garantie d'un montant de 7 000 euros à la date de signature du contrat et une redevance annuelle de 600 euros HT a été portée à leur connaissance dès la signature du document d'information précontractuelle. Aussi, elle affirme que le schéma d'organisation de la franchise a toujours été un élément clair, parfaitement expliqué en préambule des contrats de franchise aux sociétés franchisées. Dans ces conditions, elle prétend qu'il est malvenu de réclamer désormais les éléments comptables pour déterminer sa marge sur achat. Elle explique, en outre, que le faible montant des redevances annuelles permet aux sociétés franchisées de disposer des moyens suffisants pour investir dans la promotion de leurs centres respectifs. Aussi, elle expose que ses revenus se composent des redevances versées par les franchisés et des commandes passés par ceux-ci.

La société Naturhouse soutient qu'une telle demande de communication d'informations entrainerait, au sens de l'article L. 442-1 du code de commerce, un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties. En effet, elle estime qu'elle n'a pas à rendre des comptes à ses franchisés concernant le contenu de ses contrats d'achats. Elle évoque à ce titre que la Commission d'examen des pratiques commerciales (CEPC) avait pu considérer, dans un avis n°08121926 du 22 décembre 2008, que les demandes d'un distributeur tendant à obtenir de son fournisseur des informations concernant ses prix d'achat et sa marge peut être illicite sur le fondement des dispositions de l'article L442-1 du code de commerce.

La société Naturhouse souligne également que la communication des informations sollicitées porterait atteinte au secret des affaires consacré à l'article L151-1 du code de commerce, dès lors que désormais, les sociétés exercent une activité concurrente de la sienne.

En outre, elle affirme qu'une telle demande est nécessairement opportuniste, compte tenu de l'absence de contestation formulée par les sociétés franchisées pendant l'exécution des contrats de franchise.

Réponse de la Cour

Faute pour les intimées d'expliciter en quoi la solution du présent litige dépend des pièces dont la production est sollicitée, il n'y sera pas fait droit.

3- Sur la demande de condamnation pour procédure abusive et l'amende civile

Moyen des parties

Les sociétés Carodiet, Celidiet, LM Diététique 3, LM Diététique 5 et LM Diététique 6 sollicitent, sur le fondement de l'article 1240 du code civil, la condamnation de la société Naturhouse en raison du caractère abusif de la procédure. Elles soutiennent que le franchiseur instrumentalise le présent litige pour susciter la crainte chez ses franchisés et les dissuader de tirer les conséquences de manquements contractuels. Ce faisant, elles sollicitent une indemnité de 10 000 euros chacune en réparation du préjudice subi au titre d'une procédure abusive. En outre, elles demandent à la Cour de condamner la société Naturhouse au versement d'une amende civile de 10 000 euros.

La société Naturhouse répond que la demande de condamnation pour procédure abusive formulée par les sociétés Carodiet, Celidiet, LM Diététique 3, LM Diététique 5 et LM Diététique 6 n'est pas fondée, compte tenu de l'ensemble des éléments invoqués à l'appui de son appel.

Réponse de la Cour

En application de l'article 32-1 du code de procédure civile, celui qui agit en justice de manière dilatoire ou abusive peut être condamné à des dommages-intérêts ainsi qu'à une amende civile.

Au cas présent, la Cour observe que :

- la légitimité de la présente l'action en justice de Naturhouse n'a pas été reconnue par la juridiction du premier degré, laquelle a débouté cette société de toutes ses demandes ;

- un jugement du même jour du tribunal de commerce de Bordeaux, la déboutant de demandes de même nature formulées contre un autre franchisé, a été confirmé par la cour d'appel de Paris le 15 mai 2024, par un arrêt contre lequel aucun pourvoi n'a été formé ;

- les intimées ont versé (pièces n°51) des " exemples " d'arrêts rendus le 5 avril 2023 par la cour d'appel de Toulouse confirmant les décisions du tribunal de commerce d'Albi en ce qu'il a constaté la révocation des contrats de franchise aux torts exclusifs de la société Naturehouse et débouté cette société de sa demande tendant à engager la responsabilité du franchisé au titre de la violation de la clause de non concurrence.

Cependant, force est de constater que l'action en justice s'est poursuivie également en raison des demandes reconventionnelles formulées, y compris à hauteur d'appel, par les sociétés Carodiet, Celidiet, LM Diététique 3, LM Diététique 5 et LM Diététique 6.

Les circonstances de nature à faire dégénérer en faute l'exercice de Naturhouse de son droit d'appel ne sont en conséquence pas réunies.

VI - Sur la demande de publication, l'application de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens

Il n'y a pas lieu de faire droit à la demande de publication formulée à hauteur d'appel par les intimées, qui n'est évoquée dans leurs écritures qu'au stade du dispositif et n'est pas motivée.

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a condamné la société Naturhouse aux dépens de première instance et à payer aux sociétés Carodiet, Celidiet, LM Diététique 3, LM Diététique 5 et LM Diététique 6 la somme de 3000 euros chacune au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La société Naturhouse succombant en son appel, sera condamnée aux dépens d'appel.

En application de l'article 700 du code de procédure civile, la société Naturhouse sera condamnée à verser à la société Carodiet, prise en la personne Me [F]-[L] [I], en qualité de mandataire à la sauvegarde de et aux sociétés Celidiet, LM Diététique 5 et LM Diététique 6, prise en la personne Me [F]-[L] [I], en qualité de liquidateur de ces trois sociétés la somme de 10 000 euros chacune.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Déclare recevable l'intervention volontaire Me [F]-[L] [I], ès qualités de mandataire à la sauvegarde de la société Carodiet, et de mandataire liquidateur des sociétés Celidiet, LM Diététique 5 et LM Diététique 6 ;

Confirme le jugement en ses dispositions soumises à la Cour, sauf en ce qu'il a débouté les sociétés Carodiet, Celidiet, LM Diététique 3, LM Diététique 5, LM Diététique 6 et [F] [L] [I] de leurs demandes d'annulation des clauses de non concurrence, d'interdiction de vente sur internet et de revente entre franchisé contenues aux articles 2 et 6 F et 11-4 du contrat de franchise ;

Statuant à nouveau sur ces chefs infirmés et y ajoutant,

Annule les clauses du contrat de franchise conclut entre la société Naturhouse et les sociétés Carodiet, Celidiet, LM Diététique 3, LM Diététique 5, LM Diététique 6, suivantes

- A l'article 2 alinéa 5 et à l'article 6 F.1 alinéa 4, la clause interdisant la vente des produits par internet,

- A l'article 2 alinéa 4, la clause interdisant la vente et l'achat de produits auprès d'autres centres,

- A l'article 11-4, la clause de non-concurrence post-contractuelle en ce qu'elle prévoit l'interdiction de "Créer, directement ou indirectement, aucun autre établissement en France consacré à la même activité que celle du Franchiseur" ;

Condamne la société Naturhouse aux dépens d'appel ;

Condamne la société Naturhouse à payer à la société Carodiet, prise en la personne Me [F]-[L] [I], ès qualités de mandataire à la sauvegarde de cette société, la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la société Naturhouse à payer à la société Celidiet, prise en la personne Me [F]-[L] [I], ès qualités de mandataire liquidateur de cette société, la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la société Naturhouse à payer à la société LM Diététique 5, prise en la personne Me [F]-[L] [I], ès qualités de mandataire liquidateur de cette société, la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la société Naturhouse à payer à la société LM Diététique 6, prise en la personne Me [F]-[L] [I], ès qualités de mandataire liquidateur de cette société, la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Rejette toute autre demande.

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