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CA Paris, Pôle 5 - ch. 8, 10 juin 2025, n° 24/18637

PARIS

Arrêt

Autre

CA Paris n° 24/18637

10 juin 2025

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 8

ARRÊT DU 10 JUIN 2025

(n° / 2025 , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 24/18637 - N° Portalis 35L7-V-B7I-CKKC2

Décision déférée à la Cour : Jugement du 24 octobre 2024 - Tribunal Judiciaire de Bobigny - RG n° 24/00055

APPELANTE

S.C.I. ZS IMMO, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège,

Immatriculée au registre du commerce et des sociétés de BOBIGNY sous le numéro 511 681 397,

Dont le siège social est situé [Adresse 1]

[Localité 6]

Représentée par Me Emilie TADEO, avocat au barreau de PARIS, toque : C752

Assistée de Me Stéphanie LE ROY, avocat au barreau de PARIS, toque : E929,

INTIMES

Maître [N] [M], en qualité de liquidateur judiciaire de la SCI ZS IMMO, société civile immobilière,

Né le [Date naissance 3] 1965 à [Localité 8]

Dont l'étude est située [Adresse 7]

[Localité 4]

Représenté par Me Caroline HATET-SAUVAL de la SELARL CAROLINE HATET AVOCAT, avocate au barreau de PARIS, toque : L0046,

Assisté de Me Mathilde DE CASTRO, avocate au barreau de PARIS, toque : C1515,

L'URSSAF ILE DE FRANCE

Située [Adresse 2]

[Localité 5]

Représentée et assistée de Me Vincent DONY, avocat au barreau de PARIS, toque : B0005,

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 906 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 13 mai 2025, en audience publique, devant la cour, composée de:

Madame Marie-Christine HÉBERT-PAGEOT, présidente de chambre,

Madame Constance LACHEZE, conseillère, chargée du rapport,

Monsieur François VARICHON, conseiller,

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Mme Liselotte FENOUIL

ARRÊT :

- Contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Marie-Christine HÉBERT-PAGEOT, présidente de chambre et par Liselotte FENOUIL, greffière, présente lors de la mise à disposition.

***

FAITS CONSTANTS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS

La société civile immobilière ZS Immo a été créée en 2009 pour exercer une activité d'acquisition de biens immobiliers (immeuble, appartement ou commerce) et d'administration des dits biens par bail, location ou autrement. Elle est actuellement propriétaire de deux immeubles à [Localité 9] et à [Localité 10].

Elle est détenue par M. [P] [E] et Mme [Y] [X]. M. [E] en est le gérant.

Sur assignation de l'URSSAF se prévalant d'une créance d'un montant de 13 081,72 euros et par jugement du 24 octobre 2024, le tribunal judiciaire de Bobigny a ouvert à son égard une procédure de liquidation judiciaire, nommé Me [N] [M] en qualité de liquidateur judiciaire et fixé provisoirement la date de cessation des paiements au 17 juillet 2024, et ce au vu de la créance de l'URSSAF et de l'absence de justificatifs produits par la SCI.

Par déclaration du 31 octobre 2024, la SCI ZS Immo a relevé appel de ce jugement.

Par dernières conclusions remises au greffe et notifiées par voie électronique le 24 janvier 2025, la SCI ZS Immo demande à la cour :

- d'infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

- statuant à nouveau, de dire et juger qu'elle n'était pas état de cessation des paiements ;

- de dire n'y avoir lieu à ouverture d'une procédure collective à son égard ;

- de débouter l'URSSAF d'Île-de-France de l'ensemble de ses fins et prétentions ;

- de condamner l'URSSAF d'Île-de-France à lui verser la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

La SCI ZS Immo explique avoir accumulé des retards de paiements de cotisations sociales mais elle conteste être en état de cessation des paiements. Elle indique qu'elle s'est toujours acquittée de ses obligations fiscales, qu'elle affiche des résultats positifs, avec un résultat net de 12 814 euros (date non précisée), qu'à première demande, elle peut faire l'objet d'un apport en compte courant d'associés ou d'un prêt pour apurer ses dettes éventuelles, que sa balance comptable est positive sur la période comprise entre le 1er janvier 2024 et le 31 janvier 2025 ainsi qu'en atteste son expert-comptable et qu'elle n'était donc pas en état de cessation des paiements au jour du jugement d'ouverture.

Par dernières conclusions remises au greffe et notifiées par voie électronique le 28 avril 2025, l'URSSAF d'Île-de-France demande à la cour :

- de lui donner acte qu'elle s'en rapporte à justice concernant la demande d'infirmation du jugement du 24 octobre 2024 ;

- dans l'hypothèse où le jugement du 24 octobre 2024 serait infirmé, de déclarer la société ZS Immo mal fondée en ses demandes au titre des frais irrépétibles et des dépens et l'en débouter ;

- de condamner la société ZS Immo à lui payer la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- de condamner la société ZS Immo aux entiers dépens d'instance et d'appel dont le recouvrement pourra être effectué directement par Me Dony, Avocat à la Cour, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

L'URSSAF d'Île-de-France explique que selon bordereau du 18 décembre 2024, elle a déclaré au passif de la société ZS Immo une créance totale de 16 635,90 euros dont 12 356,90 euros de parts salariales, que la dette est ancienne puisqu'elle remonte à juillet 2021, que les tentatives pour recouvrer sa créance ont échoué, qu'après vérifications, elle confirme qu'à la suite de dysfonctionnements informatiques, sa déclaration de créance n'a pas été réceptionnée par le mandataire liquidateur, que dans ces conditions, elle s'en rapporte à justice sur la demande d'infirmation présentée par la société ZS Immo, que néanmoins la carence de la société ZS Immo à payer ses dettes sociales et l'échec des procédures d'exécution initiées à son encontre l'ont contrainte à avoir recours à la voie judiciaire de sorte que la société ZS Immo est seule responsable de la présente procédure.

Par dernières conclusions remises au greffe et notifiées par voie électronique le 24 mars 2025, Me [N] [M] agissant en qualité de liquidateur judiciaire de la société ZS Immo demande à la cour :

- de statuer ce que de droit, s'en rapportant à justice ;

- de juger que les dépens seront passés en frais privilégiés de la procédure collective.

Le liquidateur judiciaire indique que le délai de déclaration de créance est expiré et qu'il a reçu une seule déclaration de créance, de la part du Crédit immobilier de France, prêteur de deniers, pour un montant de 69 824,85 euros à titre privilégié, correspondant au capital restant dû sur le prêt consenti en 2009 pour l'acquisition du bien immobilier situé à [Localité 9] et à l'indemnité d'exigibilité anticipée, que s'agissant de l'actif disponible, il détient la somme de 50 856 euros, correspondant au solde du compte bancaire (22 048,13 euros) et au recouvrement des loyers (29 030 euros).

L'instruction a été clôturée le 06 mai 2025.

SUR CE,

Selon l'article L. 640-1 du code de commerce, l'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire suppose qu'un débiteur mentionné à l'article L. 640-2 soit en état de cessation des paiements et que son redressement soit manifestement impossible.

Il résulte des termes de l'article L. 631-1 du code de commerce qu'est en état de cessation des paiements tout débiteur qui est dans l'impossibilité de faire face au passif exigible avec son actif disponible et que le débiteur qui établit que les réserves de crédit ou les moratoires dont il bénéficie de la part de ses créanciers lui permettent de faire face au passif exigible avec son actif disponible n'est pas en cessation des paiements.

La preuve de l'état de cessation des paiements doit être rapportée par celui qui demande l'ouverture de la procédure alors que la preuve de l'existence de réserves de crédit lui permettant de faire face à son passif exigible incombe au débiteur.

En cas d'appel, l'état de cessation des paiements s'apprécie au jour où la cour statue.

En l'espèce, l'état des créances déclarées montre, à l'expiration du délai de déclaration, une seule créance, celle du Crédit Immobilier de France Développement, d'un montant de 39 824,85 euros, à titre privilégié en vertu du privilège du prêteur de deniers. Cette somme correspond au capital restant dû au 24 octobre 2024 et à une indemnité d'exigibilité anticipée de 7 %. En l'absence de mensualités échues impayées, elle n'est devenue exigible que du fait de l'ouverture de la procédure de liquidation judiciaire et n'entre pas dans le passif exigible devant être pris en compte pour apprécier l'état de cessation des paiements.

Devant la cour, la créance de l'URSSAF n'est pas contestée par la société ZS Immo mais il est constant qu'elle n'a pas été valablement déclarée à la procédure collective. La cour observe que l'URSSAF ne produit pas les mêmes pièces qu'en première instance et se limite à un procès-verbal de carence du 6 septembre 2023 faisant suite à diverses mises en demeure de payer, manquant à établir le caractère certain et exigible de sa créance à ce jour. Elle ne peut donc plus être considérée comme un passif exigible au sens de l'article L. 631-1 du code de commerce. Quand bien même l'URSSAF justifierait de l'exigibilité de la créance alléguée d'un montant de 13 081,72 euros, le passif exigible demeurerait inférieur à l'actif disponible qui s'élève selon le liquidateur à la somme de 50 856 euros.

Il en résulte que la société ZS Immo n'est pas en état de cessation des paiements.

En conséquence, le jugement sera infirmé en toutes ses dispositions et, statuant à nouveau, la cour déboutera l'URSSAF de sa demande d'ouverture d'une procédure collective.

La SCI ZS Immo, à l'origine de la présente procédure en l'absence de paiement de ses cotisations sociales, sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel.

L'équité ne commande pas de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant par arrêt contradictoire,

Infirme le jugement en toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Dit n'y avoir lieu à ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire ou de redressement judiciaire ;

Déboute l'URSSAF d'Île-de-France de sa demande à cet effet ;

Condamne la SCI ZS Immo aux dépens de première instance et d'appel et accorde aux avocats qui peuvent y prétendre le bénéfice du recouvrement direct conformément à l'article 699 du code de procédure civile ;

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile.

Liselotte FENOUIL

Greffière

Marie-Christine HÉBERT-PAGEOT

Présidente

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