CA Paris, Pôle 5 - ch. 8, 10 juin 2025, n° 24/18891
PARIS
Arrêt
Autre
Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 8
ARRÊT DU 10 JUIN 2025
(n° / 2025 , 9 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 24/18891 - N° Portalis 35L7-V-B7I-CKKZ4
Décision déférée à la Cour : Jugement du 31 octobre 2024 -Tribunal de commerce de PARIS - RG n° 2024056398
APPELANTE
S.A.S.U. NP CONSULTING, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège,
Immatriculée au registre du commerce et des sociétés de PARIS sous le numéro 887 500 882,
Dont le siège social est situé [Adresse 3]
[Localité 9]
Représentée et assistée de Me Jessica CHUQUET de la SELEURL CABINET CHUQUET, avocate au barreau de PARIS, toque : E0595 substituée par Me Adeline VIETTE, avocate au barreau de PARIS, toque : E 0595,
INTIMÉS
MONSIEUR LE COMPTABLE PUBLIC DU PÔLE DE RECOUVREMENT SPÉCIALISÉ (PRS) PARISIEN 2, comptable chargé du recouvrement,
Dont les bureaux sont situés [Adresse 1]
[Localité 8]
Représenté par Me Philippe MARION de la SELEURL AD LEGEM AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : T E 2181,
Assisté de Me Giovani VYDEELINGUM de la SELEURL AD LEGEM AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque T E 2181,
S.E.L.A.F.A. MJA, prise en la personne de Maître [U] [W], en qualité de mandataire liquidateur de la société NP CONSULTING,
Immatriculée au registre du commerce et des sociétés de PARIS sous le numéro 440 672 509,
Dont le siège social est situé [Adresse 2]
[Localité 11]
Représentée et assistée de Me [U] [W], en qualité de mandataire liquidateur de la SELAFA MJA,
LE PROCUREUR GÉNÉRAL - SERVICE FINANCIER ET COMMERCIAL
[Adresse 6]
[Localité 10]
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 906 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 13 mai 2025, en audience publique, devant la cour, composée de:
Madame Marie-Christine HÉBERT-PAGEOT, présidente de chambre,
Madame Constance LACHEZE, conseillère,
Monsieur François VARICHON, conseiller,
qui en ont délibéré.
Un rapport a été présenté à l'audience par Monsieur François VARICHON dans le respect des conditions prévues à l'article 804 du code de procédure civile.
Greffier, lors des débats : Madame Liselotte FENOUIL
ARRÊT :
- Contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Marie-Christine HÉBERT-PAGEOT, présidente de chambre et par Liselotte FENOUIL, greffière, présente lors de la mise à disposition.
***
FAITS ET PROCÉDURE
La société par actions simplifiée NP Consulting exerce une activité de conseil et d'assistance en gestion et organisation des entreprises.
Par acte du 10 septembre 2024 signifié par l'huissier des finances publiques selon les modalités des articles 655 à 657 du code de procédure civile, le comptable du Pôle de recouvrement spécialisé parisien 2, qui se prévalait d'une créance impayée de 76.708,58 euros, a fait assigner la société NP Consulting devant le tribunal de commerce de Paris aux fins d'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire. Le même jour, l'acte a été signifié selon les mêmes modalités au président de la société, M. [X] [Z].
Par jugement réputé contradictoire du 31 octobre 2024, le tribunal a ouvert une procédure de liquidation judiciaire à l'égard de la société NP Consulting, fixé la date de cessation des paiements au 10 septembre 2024 correspondant à la date de signification de l'assignation, désigné la société MJA prise en la personne de Maître [W] en qualité de mandataire liquidateur et dit que les dépens seront portés en frais de liquidation judiciaire.
Le 7 novembre 2024, la société NP Consulting a relevé appel de ce jugement en intimant le ministère public, le comptable du Pôle de recouvrement spécialisé parisien 2 et la société MJA ès qualités.
Par ordonnance du 30 janvier 2025, le premier président a arrêté l'exécution provisoire du jugement dont appel.
Par courriel du 7 mai 2025, la société MJA ès qualités a adressé au greffe de la cour une note comportant ses observations sur la procédure ouverte à l'égard de la société NP Consulting. Par message RPVA du même jour, le greffe a transmis ladite note aux conseils de la société NP Consulting et du comptable du Pôle de recouvrement spécialisé parisien 2 ainsi qu'au ministère public.
Aux termes de ses dernières conclusions déposées au greffe et notifiées par voie électronique le 12 mai 2025, la société NP Consulting demande à la cour de:
- infirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions;
- annuler l'assignation délivrée le 10 septembre 2024 à la société NP Consulting et à M. [Z], les actes de procédure subséquents et le jugement dont appel;
- juger irrecevables les observations déposées le 7 mai 2025 par la société MJA ès qualités;
- subsidiairement, constater l'absence d'état de cessation des paiements de la société NP Consulting et débouter le comptable du Pôle de recouvrement spécialisé parisien 2 de sa demande d'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire;
- à titre infiniment subsidiaire, prononcer le redressement judiciaire de la société NP Consulting;
- en tout état de cause, condamner le comptable du Pôle de recouvrement spécialisé parisien 2 à lui payer 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
Aux termes de ses dernières conclusions déposées au greffe et notifiées par voie électronique le 2 mai 2025, le comptable du Pôle de recouvrement spécialisé parisien 2 demande à la cour de:
- débouter la société NP Consulting de son appel;
- confirmer le jugement entrepris;
- dire que les dépens seront employés en frais privilégiés de liquidation judiciaire.
La société MJA ès qualités, à laquelle l'appelante a fait signifier sa déclaration d'appel et ses conclusions par actes respectivement délivrés les 10 décembre 2024 et 5 février 2025, n'a pas constitué avocat.
Le ministère public n'a pas fait connaître son avis.
L'instruction de l'affaire a été clôturée par ordonnance du 6 mai 2025.
Par deux ordonnances du 13 mai 2025, la présidente de la chambre a révoqué l'ordonnance de clôture compte tenu de la communication aux parties de la note précitée du liquidateur intervenue le 7 mai 2025, puis a prononcé la clôture de l'instruction.
SUR CE,
Sur la demande aux fins de voir dire irrecevables les observations du liquidateur transmises à la cour le 7 mai 2025
A l'appui de sa demande, la société NP Consulting explique que la société MJA ès qualités a transmis ses observations à la cour sans toutefois les communiquer contradictoirement aux parties à l'instance; qu'en outre, la constitution d'avocat est obligatoire et le liquidateur disposait d'un délai courant jusqu'au 5 avril 2025 pour conclure dans la mesure où elle lui avait signifié ses conclusions d'appelante le 5 février 2025.
Sur ce,
Il entre dans la mission du mandataire liquidateur de rendre compte de l'état de la procédure collective dans laquelle il a été désigné à la juridiction devant statuer sur celle-ci. Il n'est pas tenu, pour ce faire, de constituer avocat et de conclure dès lors qu'il se borne à dresser un compte-rendu objectif de sa mission et de la situation du débiteur sans formuler aucune prétention. Il appartient néanmoins à la juridiction de vérifier que les observations du mandataire et les pièces éventuellement transmises à l'appui ont bien été communiquées en temps utile aux conseils des parties ainsi qu'au ministère public afin qu'ils puissent en avoir connaissance et les discuter le cas échéant dans le cadre d'un débat contradictoire.
En l'espèce, la note que la société MJA ès qualités a adressée au greffe de la cour le 7 mai 2025 rend compte de l'état de la procédure collective ouverte à l'égard de la société NP Consulting. Ainsi qu'il a été exposé ci-dessus, la formulation de ces observations par le liquidateur ne requiert pas la constitution d'avocat et la notification de conclusions. Toutefois, aux termes de cette note, la société MJA ès qualités prend également position sur le bien-fondé de la demande d'annulation de l'assignation et du jugement dont appel formée par la société NP Consulting. Cet avis excède le simple compte rendu du déroulement de sa mission par le liquidateur et ne peut par conséquent être régulièrement exprimé hors le cadre de conclusions en bonne et due forme. Il convient donc de dire irrecevables les développements de la note de la société MJA ès qualités consacrés à ce point de droit.
Par ailleurs, le jour même de sa réception, le greffe de la cour a transmis la note du liquidateur aux conseils de la société NP Consulting et du comptable du Pôle de recouvrement spécialisé parisien 2 ainsi qu'au ministère public. Ainsi, les éléments qu'elle comporte ont été contradictoirement portés à la connaissance des parties, lesquelles, du fait de la révocation de l'ordonnance du clôture, ont été à même d'y répondre, ainsi que l'appelante l'a d'ailleurs fait dans son dernier jeu de conclusions notifié le 12 mai 2025. Le grief de la société NP Consulting fondé sur le non-respect du principe du contradictoire est donc inopérant.
Sur la demande principale d'annulation de l'assignation, des 'actes de procédure subséquents' et du jugement du 31 octobre 2024
A l'appui de sa demande, la société NP Consulting fait valoir:
- que l'assignation devant le tribunal de commerce que l'administration fiscale lui a fait signifier, ainsi qu'à son dirigeant M. [Z], est nulle en application de l'article 114 et du code de procédure civile pour avoir été délivrée à l'adresse du [Adresse 7] à [Localité 9], qui ne correspond plus depuis plusieurs années au siège social de la première et au domicile du second; que l'administration le savait puisqu'elle produit des accusés de réception 'NPAI' correspondant à des courriers qu'elle a envoyés à cette adresse à la société NP Consulting depuis 2023; qu'elle ne peut se prévaloir du fait que l'extrait Kbis de l'entreprise ne mentionne pas de transfert de siège social dans la mesure où l'adresse précitée était celle d'une domiciliation chez le dirigeant de l'entreprise; qu'une simple recherche sur le site Papers aurait permis à l'huissier de constater que M. [Z] est le dirigeant d'autres sociétés dont le siège social n'est pas situé à cette adresse mais [Adresse 4] à [Localité 9]; qu'il est impossible que le gardien de l'immeuble ait confirmé à l'huissier des finances publiques la réalité de l'adresse du [Adresse 7], ainsi que cela est mentionné dans l'acte; que l'huissier a fait preuve de légèreté et d'un manque de diligence évidents;
- qu'il en a résulté pour elle un grief puisqu'elle a été privée de la possibilité de se défendre en première instance;
- que l'assignation, les 'actes de procédure subséquents' et le jugement doivent donc être annulés.
Le comptable du Pôle de recouvrement spécialisé parisien 2 réplique:
- que les assignations ont été délivrées par l'huissier des finances publiques conformément aux articles 655 à 657 du code de procédure civile;
- que l'huissier n'avait pas d'autre obligation que celle de signifier l'acte à l'adresse du siège social de la société NP Consulting telle que mentionnée sur son extrait Kbis, soit [Adresse 7] à [Localité 9]; que l'appelante, qui prétend avoir quitté les lieux en 2020, n'a entrepris aucune démarche auprès du registre du commerce et des sociétés pour changer l'adresse de son siège social; que la réalité du siège social a été confirmée à l'huissier par le gardien de l'immeuble rencontré sur les lieux;
- qu'alors que rien ne l'y obligeait, l'huissier a entrepris des diligences pour signifier l'acte également à M. [Z], dont la réalité du domicile a également été confirmée par le gardien de l'immeuble.
L'article 655 du code de procédure civile dispose que si la signification à personne s'avère impossible, l'acte peut être délivré soit à domicile, soit, à défaut de domicile connu, à résidence. L'article 690 du même code précise que la notification destinée à une personne morale de droit privé ou à un établissement public à caractère industriel ou commercial est faite au lieu de son établissement.
L'article 656 dispose que si personne ne peut ou ne veut recevoir la copie de l'acte et s'il résulte des vérifications faites par l'huissier de justice, dont il sera fait mention dans l'acte de signification, que le destinataire demeure bien à l'adresse indiquée, la signification est faite à domicile.
En l'espèce, l'assignation introductive d'instance a été signifiée à la société NP Consulting par l'huissier des finances publiques selon acte du 10 septembre 2024 délivré à l'adresse du [Adresse 7] à [Localité 9] qui correspond à l'adresse du siège social de l'entreprise telle qu'elle figure sur son extrait Kbis du 24 avril 2024. L'acte comporte la mention suivante, qui fait foi jusqu'à inscription de faux: 'Le destinataire de l'acte est absent. (...). Vérification du domicile ou de la résidence du destinataire de l'acte et confirmation par: gardien'.
La société NP Consulting, qui soutient qu'elle a quitté les lieux depuis plusieurs années, ne démontre pas qu'elle a communiqué au comptable du Pôle de recouvrement spécialisé, avant la signification des actes litigieux, une adresse distincte de celle figurant sur son extrait Kbis.
Il lui appartenait d'effectuer en temps utile les formalités de publicité nécessaires auprès du registre du commerce et des sociétés afin de porter à la connaissance des tiers l'existence d'un éventuel nouveau siège social. Il est indifférent à cet égard qu'elle ait choisi d'établir son siège social au domicile de son dirigeant. Or, il apparaît qu'elle n'avait entrepris aucune démarche à cette fin avant le prononcé du jugement litigieux puisque les deux autres extraits Kbis produits par le comptable du Pôle de recouvrement spécialisé parisien 2, datés des 8 janvier et 24 février 2025, mentionnent toujours que son siège social est établi [Adresse 7] à [Localité 9].
Au demeurant, l'appelante ne démontre pas qu'elle s'est effectivement établie à l'adresse du [Adresse 3] à [Localité 9] mentionnée dans l'entête de ses conclusions. En effet, le bail (non signé) du 22 avril 2020 à effet du 15 septembre 2022 qu'elle verse aux débats, portant sur un local situé à l'adresse précitée, a été consenti à une autre société dénommée Smart Solutions International. Par ailleurs, ainsi que le relève l'intimé, l'adresse du [Adresse 7] figure toujours sur ses liasses fiscales des années 2021 à 2023.
L'huissier des finances publiques, auquel la réalité du siège social de la société NP Consulting avait été confirmée par le gardien de l'immeuble, n'était nullement tenu de signifier de surcroît l'assignation au domicile du représentant légal de la société, ce qu'il a fait néanmoins aux termes d'un acte dont la régularité ne peut être remise en cause par l'appelante dès lors que l'acte a été délivré à l'adresse de M. [Z] figurant sur l'extrait Kbis de la société NP Consulting, soit [Adresse 7] à [Localité 9], et que la réalité du domicile de l'intéressé a été confirmée à l'huissier par le gardien de l'immeuble selon les indications portées dans l'acte.
La société NP Consulting sera donc déboutée de sa demande d'annulation de l'assignation délivrée le 10 septembre 2024. Partant, elle sera également déboutée de demande d'annulation du jugement dont appel. Enfin, il n'y a pas lieu de statuer sur sa demande d'annulation portant sur 'les actes de procédure subséquent' à défaut de précision sur la nature exacte des actes en cause.
Sur la demande subsidiaire d'infirmation du jugement du 31 octobre 2024
A l'appui de sa demande, la société NP Consulting fait valoir:
- qu'elle fait face à une situation financière passagère difficile mais n'est pas en état de cessation des paiements; que la créance de 38.000 euros déclarée à titre provisionnel par l'administration fiscale ne constitue pas un passif exigible; que les contrats de leasing ne sont pas résiliés à ce jour et que leur montant est contesté; qu'elle a réalisé chaque année, de 2021 à 2023, un bénéfice d'un montant supérieur à la créance déclarée par le comptable du Pôle de recouvrement spécialisé parisien 2, d'un montant de 68.268,39 euros, qui constitue a priori la seule créance exigible, sous réserve que l'administration fiscale ait bien adressé ses mises en demeure et titres à la bonne adresse du siège social;
- qu'elle dispose d'un actif circulant constitué majoritairement de créances clients et de disponibilités bancaires permettant de faire face à son passif exigible;
- qu'à titre infiniment subsidiaire, son redressement judiciaire est envisageable compte tenu des éléments comptables qu'elle communique relatifs à ses derniers chiffres d'affaires et bénéfices.
Le comptable du Pôle de recouvrement spécialisé parisien 2 réplique:
- qu'il a déclaré au passif de la société NP Consulting une créance de TVA de 68.268,39 euros à titre définitif, après remise des pénalités, ainsi qu'une créance de TVA de 37.065 euros à titre provisionnel; que l'intéressée n'a jamais contesté les avis de mise en recouvrement qui lui ont été adressés et n'a pas engagé de procédure contentieuse ni demandé de sursis à paiement; qu'elle n'explique nullement les raisons pour lesquelles elle s'est abstenue de payer cette dette déjà ancienne; que les avis à tiers détenteurs qu'elle a fait délivrer démontrent que la société NP Consulting n'a aucune surface financière et se trouve dans un état de cessation des paiements;
- que s'agissant de sa capacité de redressement, l'appelante ne produit que des liasses fiscales, insuffisantes pour connaître sa situation, mais aucun élément pour justifier de son activité et aucun prévisionnel; qu'elle a pris le parti, de façon récurrente, de ne pas reverser la TVA qu'elle a collectée pour le compte du trésor public.
Aux termes de sa note du 7 mai 2025, la société MJC2A ès qualités indique que la cessation des paiements de la société NP Consulting est caractérisée et que cette dernière n'apporte en l'état pas d'éléments permettant de justifier de sa capacité à présenter un plan d'apurement du passif.
Aux termes de l'article L. 640-1 du code de commerce, il est institué une procédure de liquidation judiciaire ouverte à tout débiteur mentionné à l'article L. 640-2 en cessation des paiements et dont le redressement est manifestement impossible.
L'article L. 631-1 du code de commerce définit la cessation des paiements comme l'impossibilité pour le débiteur de faire face au passif exigible avec son actif disponible. Le débiteur qui établit que les réserves de crédit ou les moratoires dont il bénéficie de la part de ses créanciers lui permettent de faire face au passif exigible avec son actif disponible n'est pas en cessation des paiements.
La preuve de l'état de cessation des paiements doit être rapportée par celui qui demande l'ouverture de la procédure alors que la preuve de l'existence de réserves de crédit ou de moratoires lui permettant de faire face à son passif exigible incombe au débiteur.
En cas d'appel, l'état de cessation des paiements s'apprécie au jour où la cour statue.
Sur l'état de cessation des paiements
Il résulte de la note de la société MJA ès qualités que le montant des créances déclarées au passif de la société NP Consulting s'élève à la somme totale de 138.835,56 euros.
Le comptable du Pôle de recouvrement spécialisé parisien 2 a déclaré pour sa part une créance de 68.268,39 euros à titre définitif et une créance de 37.065 euros à titre provisionnel. Cette dernière ne constitue pas un élément du passif devant être pris en considération pour la détermination du passif exigible.
Par ailleurs, les deux créances déclarées par la société BNP Paribas Lease Group portent, à hauteur de 19.339,32 euros, sur des sommes devenues exigibles du seul fait du prononcé de la liquidation judiciaire (indemnités de résiliation et pénalités). Il s'ensuit qu'elles n'ont pas à être prises en considération pour la détermination du passif exigible. Il en est de même de la créance de 4.821,30 euros déclarée par la société Peac Solutions qui, au vu des explications du liquidateur, ne correspond pas à un passif échu.
La société NP Consulting ne justifie d'aucune contestation concernant les créances déclarées, notamment fiscales.
Au vu de ces éléments, il convient de chiffrer le passif exigible de l'appelante à la somme de 77.609,94 euros (138.835,56 euros - 37.065 euros - 19.339,32 euros - 4.821,30 euros).
Face à ce passif exigible, la société NP Consulting ne dispose que de la somme de 1.085,49 euros correspondant au solde créditeur de son compte bancaire selon les indications non contestées de la société MJA ès qualités. Contrairement à ce que soutient l'appelante, les créances qu'elle détient à l'égard de tiers ne constituent pas un élément de son actif disponible.
Le passif exigible (66.846 euros) étant supérieur à l'actif disponible (1.085,49 euros), la société NP Consulting est en cessation des paiements et relève d'une procédure collective.
Sur la demande subsidiaire d'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire
Selon les indications de la société MJA ès qualités, les difficultés de la société NP Consulting ont pour origine la mise en oeuvre d'une procédure de vérification de comptabilité portant sur la période de juillet 2020 au mois de décembre 2021 ayant conduit à une proposition de rectification suivie de l'établissement d'avis de mise en recouvrement que l'appelante n'a pas exécutés.
Il ressort des éléments chiffrés figurant dans la note établie par le liquidateur que la société NP Consulting, créée en 2020, est parvenue à dégager un résultat bénéficiaire non négligeable au cours des exercices 2021 à 2023 inclus (résultat net de 163.828 euros en 2021, 168.185 euros en 2022 et 224.486 euros en 2023). L'actif de l'entreprise est essentiellement constitué de créances à recouvrer, d'un montant total de 321.919 euros.
Au vu de ces éléments, la société NP Consulting apparaît en mesure de poursuivre son activité tout en acquittant le passif dans le cadre d'un plan.
Le redressement de la société NP Consulting n'étant pas manifestement impossible, il convient d'infirmer le jugement et, statuant à nouveau, d'ouvrir un redressement judiciaire.
Le chiffre d'affaires et le nombre de salariés de la société NP Consulting sont inférieurs aux seuils prévus aux articles L. 621-4 et R. 621-11 du code de commerce et il n'y a pas lieu d'user de la faculté offerte par le premier texte de désigner néanmoins un administrateur judiciaire.
Sur la date de cessation des paiements
La date de cessation des paiements sera fixée au 10 septembre 2024, date de l'assignation introductive d'instance délivrée par le comptable du Pôle de recouvrement spécialisé parisien 2.
Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile
Les dépens de première instance et d'appel seront employés en frais privilégiés de procédure collective.
L'équité ne commande pas de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile. La société NP Consulting sera donc déboutée de sa demande de ce chef.
PAR CES MOTIFS,
Dit irrevevables les observations de la société MJA ès qualités figurant dans sa note communiquée au greffe de la cour le 7 mai 2025 relatives aux demandes de la société NP Consulting d'annulation de l'assignation délivrée par le comptable du Pôle de recouvrement spécialisé parisien 2 et d'annulation du jugement dont appel,
Dit recevables pour le surplus les observations de la société MJA ès qualités figurant dans la note précitée,
Déboute la société NP Consulting de sa demande d'annulation de l'assignation délivrée le 10 septembre 2024 à sa personne ainsi qu'à M. [Z],
Déboute la société NP Consulting de sa demande d'annulation du jugement dont appel,
Infirme le jugement du 31 octobre 2024 en toutes ses dispositions,
Et, statuant nouveau et y ajoutant,
Ouvre une procédure de redressement judiciaire à l'égard de la société NP Consulting, immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Paris sous le numéro 887 500 882, dont le siège social est [Adresse 7] à [Localité 9],
Fixe la date de cessation des paiements au 10 septembre 2024,
Ouvre une période d'observation de six mois à compter du présent arrêt,
Désigne la société MJA en la personne de Maître [U] [W], [Adresse 2] en qualité de mandataire judiciaire,
Désigne Maître [S] [C], [Adresse 5], en qualité de commissaire-priseur afin de réaliser, s'il y a lieu, l'inventaire prévu par l'article L. 622-6 du code de commerce et la prisée de l'actif du débiteur,
Invite les délégués du personnel ou les salariés s'il en existe à désigner un représentant dans les conditions prévues par les articles L. 621-4 et L. 621-6 du code de commerce et à en communiquer le nom et l'adresse au greffe du tribunal de commerce de Paris,
Fixe à huit mois à compter du présent arrêt le délai de dépôt, par le mandataire judiciaire, de la liste des créances mentionnée à l'article L. 624-1 du code de commerce,
Renvoie l'affaire devant le tribunal de commerce de Paris pour la poursuite de la procédure et la désignation du juge-commissaire,
Rappelle que le greffe du tribunal de commerce de Paris devra procéder aux mentions et publicités prévues par la loi,
Déboute la société NP Consulting de sa demande au titre des frais irrépétibles,
Ordonne l'emploi des dépens de première instance et d'appel en frais privilégiés de procédure collective.
Liselotte FENOUIL
Greffière
Marie-Christine HÉBERT-PAGEOT
Présidente
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 8
ARRÊT DU 10 JUIN 2025
(n° / 2025 , 9 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 24/18891 - N° Portalis 35L7-V-B7I-CKKZ4
Décision déférée à la Cour : Jugement du 31 octobre 2024 -Tribunal de commerce de PARIS - RG n° 2024056398
APPELANTE
S.A.S.U. NP CONSULTING, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège,
Immatriculée au registre du commerce et des sociétés de PARIS sous le numéro 887 500 882,
Dont le siège social est situé [Adresse 3]
[Localité 9]
Représentée et assistée de Me Jessica CHUQUET de la SELEURL CABINET CHUQUET, avocate au barreau de PARIS, toque : E0595 substituée par Me Adeline VIETTE, avocate au barreau de PARIS, toque : E 0595,
INTIMÉS
MONSIEUR LE COMPTABLE PUBLIC DU PÔLE DE RECOUVREMENT SPÉCIALISÉ (PRS) PARISIEN 2, comptable chargé du recouvrement,
Dont les bureaux sont situés [Adresse 1]
[Localité 8]
Représenté par Me Philippe MARION de la SELEURL AD LEGEM AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : T E 2181,
Assisté de Me Giovani VYDEELINGUM de la SELEURL AD LEGEM AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque T E 2181,
S.E.L.A.F.A. MJA, prise en la personne de Maître [U] [W], en qualité de mandataire liquidateur de la société NP CONSULTING,
Immatriculée au registre du commerce et des sociétés de PARIS sous le numéro 440 672 509,
Dont le siège social est situé [Adresse 2]
[Localité 11]
Représentée et assistée de Me [U] [W], en qualité de mandataire liquidateur de la SELAFA MJA,
LE PROCUREUR GÉNÉRAL - SERVICE FINANCIER ET COMMERCIAL
[Adresse 6]
[Localité 10]
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 906 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 13 mai 2025, en audience publique, devant la cour, composée de:
Madame Marie-Christine HÉBERT-PAGEOT, présidente de chambre,
Madame Constance LACHEZE, conseillère,
Monsieur François VARICHON, conseiller,
qui en ont délibéré.
Un rapport a été présenté à l'audience par Monsieur François VARICHON dans le respect des conditions prévues à l'article 804 du code de procédure civile.
Greffier, lors des débats : Madame Liselotte FENOUIL
ARRÊT :
- Contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Marie-Christine HÉBERT-PAGEOT, présidente de chambre et par Liselotte FENOUIL, greffière, présente lors de la mise à disposition.
***
FAITS ET PROCÉDURE
La société par actions simplifiée NP Consulting exerce une activité de conseil et d'assistance en gestion et organisation des entreprises.
Par acte du 10 septembre 2024 signifié par l'huissier des finances publiques selon les modalités des articles 655 à 657 du code de procédure civile, le comptable du Pôle de recouvrement spécialisé parisien 2, qui se prévalait d'une créance impayée de 76.708,58 euros, a fait assigner la société NP Consulting devant le tribunal de commerce de Paris aux fins d'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire. Le même jour, l'acte a été signifié selon les mêmes modalités au président de la société, M. [X] [Z].
Par jugement réputé contradictoire du 31 octobre 2024, le tribunal a ouvert une procédure de liquidation judiciaire à l'égard de la société NP Consulting, fixé la date de cessation des paiements au 10 septembre 2024 correspondant à la date de signification de l'assignation, désigné la société MJA prise en la personne de Maître [W] en qualité de mandataire liquidateur et dit que les dépens seront portés en frais de liquidation judiciaire.
Le 7 novembre 2024, la société NP Consulting a relevé appel de ce jugement en intimant le ministère public, le comptable du Pôle de recouvrement spécialisé parisien 2 et la société MJA ès qualités.
Par ordonnance du 30 janvier 2025, le premier président a arrêté l'exécution provisoire du jugement dont appel.
Par courriel du 7 mai 2025, la société MJA ès qualités a adressé au greffe de la cour une note comportant ses observations sur la procédure ouverte à l'égard de la société NP Consulting. Par message RPVA du même jour, le greffe a transmis ladite note aux conseils de la société NP Consulting et du comptable du Pôle de recouvrement spécialisé parisien 2 ainsi qu'au ministère public.
Aux termes de ses dernières conclusions déposées au greffe et notifiées par voie électronique le 12 mai 2025, la société NP Consulting demande à la cour de:
- infirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions;
- annuler l'assignation délivrée le 10 septembre 2024 à la société NP Consulting et à M. [Z], les actes de procédure subséquents et le jugement dont appel;
- juger irrecevables les observations déposées le 7 mai 2025 par la société MJA ès qualités;
- subsidiairement, constater l'absence d'état de cessation des paiements de la société NP Consulting et débouter le comptable du Pôle de recouvrement spécialisé parisien 2 de sa demande d'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire;
- à titre infiniment subsidiaire, prononcer le redressement judiciaire de la société NP Consulting;
- en tout état de cause, condamner le comptable du Pôle de recouvrement spécialisé parisien 2 à lui payer 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
Aux termes de ses dernières conclusions déposées au greffe et notifiées par voie électronique le 2 mai 2025, le comptable du Pôle de recouvrement spécialisé parisien 2 demande à la cour de:
- débouter la société NP Consulting de son appel;
- confirmer le jugement entrepris;
- dire que les dépens seront employés en frais privilégiés de liquidation judiciaire.
La société MJA ès qualités, à laquelle l'appelante a fait signifier sa déclaration d'appel et ses conclusions par actes respectivement délivrés les 10 décembre 2024 et 5 février 2025, n'a pas constitué avocat.
Le ministère public n'a pas fait connaître son avis.
L'instruction de l'affaire a été clôturée par ordonnance du 6 mai 2025.
Par deux ordonnances du 13 mai 2025, la présidente de la chambre a révoqué l'ordonnance de clôture compte tenu de la communication aux parties de la note précitée du liquidateur intervenue le 7 mai 2025, puis a prononcé la clôture de l'instruction.
SUR CE,
Sur la demande aux fins de voir dire irrecevables les observations du liquidateur transmises à la cour le 7 mai 2025
A l'appui de sa demande, la société NP Consulting explique que la société MJA ès qualités a transmis ses observations à la cour sans toutefois les communiquer contradictoirement aux parties à l'instance; qu'en outre, la constitution d'avocat est obligatoire et le liquidateur disposait d'un délai courant jusqu'au 5 avril 2025 pour conclure dans la mesure où elle lui avait signifié ses conclusions d'appelante le 5 février 2025.
Sur ce,
Il entre dans la mission du mandataire liquidateur de rendre compte de l'état de la procédure collective dans laquelle il a été désigné à la juridiction devant statuer sur celle-ci. Il n'est pas tenu, pour ce faire, de constituer avocat et de conclure dès lors qu'il se borne à dresser un compte-rendu objectif de sa mission et de la situation du débiteur sans formuler aucune prétention. Il appartient néanmoins à la juridiction de vérifier que les observations du mandataire et les pièces éventuellement transmises à l'appui ont bien été communiquées en temps utile aux conseils des parties ainsi qu'au ministère public afin qu'ils puissent en avoir connaissance et les discuter le cas échéant dans le cadre d'un débat contradictoire.
En l'espèce, la note que la société MJA ès qualités a adressée au greffe de la cour le 7 mai 2025 rend compte de l'état de la procédure collective ouverte à l'égard de la société NP Consulting. Ainsi qu'il a été exposé ci-dessus, la formulation de ces observations par le liquidateur ne requiert pas la constitution d'avocat et la notification de conclusions. Toutefois, aux termes de cette note, la société MJA ès qualités prend également position sur le bien-fondé de la demande d'annulation de l'assignation et du jugement dont appel formée par la société NP Consulting. Cet avis excède le simple compte rendu du déroulement de sa mission par le liquidateur et ne peut par conséquent être régulièrement exprimé hors le cadre de conclusions en bonne et due forme. Il convient donc de dire irrecevables les développements de la note de la société MJA ès qualités consacrés à ce point de droit.
Par ailleurs, le jour même de sa réception, le greffe de la cour a transmis la note du liquidateur aux conseils de la société NP Consulting et du comptable du Pôle de recouvrement spécialisé parisien 2 ainsi qu'au ministère public. Ainsi, les éléments qu'elle comporte ont été contradictoirement portés à la connaissance des parties, lesquelles, du fait de la révocation de l'ordonnance du clôture, ont été à même d'y répondre, ainsi que l'appelante l'a d'ailleurs fait dans son dernier jeu de conclusions notifié le 12 mai 2025. Le grief de la société NP Consulting fondé sur le non-respect du principe du contradictoire est donc inopérant.
Sur la demande principale d'annulation de l'assignation, des 'actes de procédure subséquents' et du jugement du 31 octobre 2024
A l'appui de sa demande, la société NP Consulting fait valoir:
- que l'assignation devant le tribunal de commerce que l'administration fiscale lui a fait signifier, ainsi qu'à son dirigeant M. [Z], est nulle en application de l'article 114 et du code de procédure civile pour avoir été délivrée à l'adresse du [Adresse 7] à [Localité 9], qui ne correspond plus depuis plusieurs années au siège social de la première et au domicile du second; que l'administration le savait puisqu'elle produit des accusés de réception 'NPAI' correspondant à des courriers qu'elle a envoyés à cette adresse à la société NP Consulting depuis 2023; qu'elle ne peut se prévaloir du fait que l'extrait Kbis de l'entreprise ne mentionne pas de transfert de siège social dans la mesure où l'adresse précitée était celle d'une domiciliation chez le dirigeant de l'entreprise; qu'une simple recherche sur le site Papers aurait permis à l'huissier de constater que M. [Z] est le dirigeant d'autres sociétés dont le siège social n'est pas situé à cette adresse mais [Adresse 4] à [Localité 9]; qu'il est impossible que le gardien de l'immeuble ait confirmé à l'huissier des finances publiques la réalité de l'adresse du [Adresse 7], ainsi que cela est mentionné dans l'acte; que l'huissier a fait preuve de légèreté et d'un manque de diligence évidents;
- qu'il en a résulté pour elle un grief puisqu'elle a été privée de la possibilité de se défendre en première instance;
- que l'assignation, les 'actes de procédure subséquents' et le jugement doivent donc être annulés.
Le comptable du Pôle de recouvrement spécialisé parisien 2 réplique:
- que les assignations ont été délivrées par l'huissier des finances publiques conformément aux articles 655 à 657 du code de procédure civile;
- que l'huissier n'avait pas d'autre obligation que celle de signifier l'acte à l'adresse du siège social de la société NP Consulting telle que mentionnée sur son extrait Kbis, soit [Adresse 7] à [Localité 9]; que l'appelante, qui prétend avoir quitté les lieux en 2020, n'a entrepris aucune démarche auprès du registre du commerce et des sociétés pour changer l'adresse de son siège social; que la réalité du siège social a été confirmée à l'huissier par le gardien de l'immeuble rencontré sur les lieux;
- qu'alors que rien ne l'y obligeait, l'huissier a entrepris des diligences pour signifier l'acte également à M. [Z], dont la réalité du domicile a également été confirmée par le gardien de l'immeuble.
L'article 655 du code de procédure civile dispose que si la signification à personne s'avère impossible, l'acte peut être délivré soit à domicile, soit, à défaut de domicile connu, à résidence. L'article 690 du même code précise que la notification destinée à une personne morale de droit privé ou à un établissement public à caractère industriel ou commercial est faite au lieu de son établissement.
L'article 656 dispose que si personne ne peut ou ne veut recevoir la copie de l'acte et s'il résulte des vérifications faites par l'huissier de justice, dont il sera fait mention dans l'acte de signification, que le destinataire demeure bien à l'adresse indiquée, la signification est faite à domicile.
En l'espèce, l'assignation introductive d'instance a été signifiée à la société NP Consulting par l'huissier des finances publiques selon acte du 10 septembre 2024 délivré à l'adresse du [Adresse 7] à [Localité 9] qui correspond à l'adresse du siège social de l'entreprise telle qu'elle figure sur son extrait Kbis du 24 avril 2024. L'acte comporte la mention suivante, qui fait foi jusqu'à inscription de faux: 'Le destinataire de l'acte est absent. (...). Vérification du domicile ou de la résidence du destinataire de l'acte et confirmation par: gardien'.
La société NP Consulting, qui soutient qu'elle a quitté les lieux depuis plusieurs années, ne démontre pas qu'elle a communiqué au comptable du Pôle de recouvrement spécialisé, avant la signification des actes litigieux, une adresse distincte de celle figurant sur son extrait Kbis.
Il lui appartenait d'effectuer en temps utile les formalités de publicité nécessaires auprès du registre du commerce et des sociétés afin de porter à la connaissance des tiers l'existence d'un éventuel nouveau siège social. Il est indifférent à cet égard qu'elle ait choisi d'établir son siège social au domicile de son dirigeant. Or, il apparaît qu'elle n'avait entrepris aucune démarche à cette fin avant le prononcé du jugement litigieux puisque les deux autres extraits Kbis produits par le comptable du Pôle de recouvrement spécialisé parisien 2, datés des 8 janvier et 24 février 2025, mentionnent toujours que son siège social est établi [Adresse 7] à [Localité 9].
Au demeurant, l'appelante ne démontre pas qu'elle s'est effectivement établie à l'adresse du [Adresse 3] à [Localité 9] mentionnée dans l'entête de ses conclusions. En effet, le bail (non signé) du 22 avril 2020 à effet du 15 septembre 2022 qu'elle verse aux débats, portant sur un local situé à l'adresse précitée, a été consenti à une autre société dénommée Smart Solutions International. Par ailleurs, ainsi que le relève l'intimé, l'adresse du [Adresse 7] figure toujours sur ses liasses fiscales des années 2021 à 2023.
L'huissier des finances publiques, auquel la réalité du siège social de la société NP Consulting avait été confirmée par le gardien de l'immeuble, n'était nullement tenu de signifier de surcroît l'assignation au domicile du représentant légal de la société, ce qu'il a fait néanmoins aux termes d'un acte dont la régularité ne peut être remise en cause par l'appelante dès lors que l'acte a été délivré à l'adresse de M. [Z] figurant sur l'extrait Kbis de la société NP Consulting, soit [Adresse 7] à [Localité 9], et que la réalité du domicile de l'intéressé a été confirmée à l'huissier par le gardien de l'immeuble selon les indications portées dans l'acte.
La société NP Consulting sera donc déboutée de sa demande d'annulation de l'assignation délivrée le 10 septembre 2024. Partant, elle sera également déboutée de demande d'annulation du jugement dont appel. Enfin, il n'y a pas lieu de statuer sur sa demande d'annulation portant sur 'les actes de procédure subséquent' à défaut de précision sur la nature exacte des actes en cause.
Sur la demande subsidiaire d'infirmation du jugement du 31 octobre 2024
A l'appui de sa demande, la société NP Consulting fait valoir:
- qu'elle fait face à une situation financière passagère difficile mais n'est pas en état de cessation des paiements; que la créance de 38.000 euros déclarée à titre provisionnel par l'administration fiscale ne constitue pas un passif exigible; que les contrats de leasing ne sont pas résiliés à ce jour et que leur montant est contesté; qu'elle a réalisé chaque année, de 2021 à 2023, un bénéfice d'un montant supérieur à la créance déclarée par le comptable du Pôle de recouvrement spécialisé parisien 2, d'un montant de 68.268,39 euros, qui constitue a priori la seule créance exigible, sous réserve que l'administration fiscale ait bien adressé ses mises en demeure et titres à la bonne adresse du siège social;
- qu'elle dispose d'un actif circulant constitué majoritairement de créances clients et de disponibilités bancaires permettant de faire face à son passif exigible;
- qu'à titre infiniment subsidiaire, son redressement judiciaire est envisageable compte tenu des éléments comptables qu'elle communique relatifs à ses derniers chiffres d'affaires et bénéfices.
Le comptable du Pôle de recouvrement spécialisé parisien 2 réplique:
- qu'il a déclaré au passif de la société NP Consulting une créance de TVA de 68.268,39 euros à titre définitif, après remise des pénalités, ainsi qu'une créance de TVA de 37.065 euros à titre provisionnel; que l'intéressée n'a jamais contesté les avis de mise en recouvrement qui lui ont été adressés et n'a pas engagé de procédure contentieuse ni demandé de sursis à paiement; qu'elle n'explique nullement les raisons pour lesquelles elle s'est abstenue de payer cette dette déjà ancienne; que les avis à tiers détenteurs qu'elle a fait délivrer démontrent que la société NP Consulting n'a aucune surface financière et se trouve dans un état de cessation des paiements;
- que s'agissant de sa capacité de redressement, l'appelante ne produit que des liasses fiscales, insuffisantes pour connaître sa situation, mais aucun élément pour justifier de son activité et aucun prévisionnel; qu'elle a pris le parti, de façon récurrente, de ne pas reverser la TVA qu'elle a collectée pour le compte du trésor public.
Aux termes de sa note du 7 mai 2025, la société MJC2A ès qualités indique que la cessation des paiements de la société NP Consulting est caractérisée et que cette dernière n'apporte en l'état pas d'éléments permettant de justifier de sa capacité à présenter un plan d'apurement du passif.
Aux termes de l'article L. 640-1 du code de commerce, il est institué une procédure de liquidation judiciaire ouverte à tout débiteur mentionné à l'article L. 640-2 en cessation des paiements et dont le redressement est manifestement impossible.
L'article L. 631-1 du code de commerce définit la cessation des paiements comme l'impossibilité pour le débiteur de faire face au passif exigible avec son actif disponible. Le débiteur qui établit que les réserves de crédit ou les moratoires dont il bénéficie de la part de ses créanciers lui permettent de faire face au passif exigible avec son actif disponible n'est pas en cessation des paiements.
La preuve de l'état de cessation des paiements doit être rapportée par celui qui demande l'ouverture de la procédure alors que la preuve de l'existence de réserves de crédit ou de moratoires lui permettant de faire face à son passif exigible incombe au débiteur.
En cas d'appel, l'état de cessation des paiements s'apprécie au jour où la cour statue.
Sur l'état de cessation des paiements
Il résulte de la note de la société MJA ès qualités que le montant des créances déclarées au passif de la société NP Consulting s'élève à la somme totale de 138.835,56 euros.
Le comptable du Pôle de recouvrement spécialisé parisien 2 a déclaré pour sa part une créance de 68.268,39 euros à titre définitif et une créance de 37.065 euros à titre provisionnel. Cette dernière ne constitue pas un élément du passif devant être pris en considération pour la détermination du passif exigible.
Par ailleurs, les deux créances déclarées par la société BNP Paribas Lease Group portent, à hauteur de 19.339,32 euros, sur des sommes devenues exigibles du seul fait du prononcé de la liquidation judiciaire (indemnités de résiliation et pénalités). Il s'ensuit qu'elles n'ont pas à être prises en considération pour la détermination du passif exigible. Il en est de même de la créance de 4.821,30 euros déclarée par la société Peac Solutions qui, au vu des explications du liquidateur, ne correspond pas à un passif échu.
La société NP Consulting ne justifie d'aucune contestation concernant les créances déclarées, notamment fiscales.
Au vu de ces éléments, il convient de chiffrer le passif exigible de l'appelante à la somme de 77.609,94 euros (138.835,56 euros - 37.065 euros - 19.339,32 euros - 4.821,30 euros).
Face à ce passif exigible, la société NP Consulting ne dispose que de la somme de 1.085,49 euros correspondant au solde créditeur de son compte bancaire selon les indications non contestées de la société MJA ès qualités. Contrairement à ce que soutient l'appelante, les créances qu'elle détient à l'égard de tiers ne constituent pas un élément de son actif disponible.
Le passif exigible (66.846 euros) étant supérieur à l'actif disponible (1.085,49 euros), la société NP Consulting est en cessation des paiements et relève d'une procédure collective.
Sur la demande subsidiaire d'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire
Selon les indications de la société MJA ès qualités, les difficultés de la société NP Consulting ont pour origine la mise en oeuvre d'une procédure de vérification de comptabilité portant sur la période de juillet 2020 au mois de décembre 2021 ayant conduit à une proposition de rectification suivie de l'établissement d'avis de mise en recouvrement que l'appelante n'a pas exécutés.
Il ressort des éléments chiffrés figurant dans la note établie par le liquidateur que la société NP Consulting, créée en 2020, est parvenue à dégager un résultat bénéficiaire non négligeable au cours des exercices 2021 à 2023 inclus (résultat net de 163.828 euros en 2021, 168.185 euros en 2022 et 224.486 euros en 2023). L'actif de l'entreprise est essentiellement constitué de créances à recouvrer, d'un montant total de 321.919 euros.
Au vu de ces éléments, la société NP Consulting apparaît en mesure de poursuivre son activité tout en acquittant le passif dans le cadre d'un plan.
Le redressement de la société NP Consulting n'étant pas manifestement impossible, il convient d'infirmer le jugement et, statuant à nouveau, d'ouvrir un redressement judiciaire.
Le chiffre d'affaires et le nombre de salariés de la société NP Consulting sont inférieurs aux seuils prévus aux articles L. 621-4 et R. 621-11 du code de commerce et il n'y a pas lieu d'user de la faculté offerte par le premier texte de désigner néanmoins un administrateur judiciaire.
Sur la date de cessation des paiements
La date de cessation des paiements sera fixée au 10 septembre 2024, date de l'assignation introductive d'instance délivrée par le comptable du Pôle de recouvrement spécialisé parisien 2.
Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile
Les dépens de première instance et d'appel seront employés en frais privilégiés de procédure collective.
L'équité ne commande pas de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile. La société NP Consulting sera donc déboutée de sa demande de ce chef.
PAR CES MOTIFS,
Dit irrevevables les observations de la société MJA ès qualités figurant dans sa note communiquée au greffe de la cour le 7 mai 2025 relatives aux demandes de la société NP Consulting d'annulation de l'assignation délivrée par le comptable du Pôle de recouvrement spécialisé parisien 2 et d'annulation du jugement dont appel,
Dit recevables pour le surplus les observations de la société MJA ès qualités figurant dans la note précitée,
Déboute la société NP Consulting de sa demande d'annulation de l'assignation délivrée le 10 septembre 2024 à sa personne ainsi qu'à M. [Z],
Déboute la société NP Consulting de sa demande d'annulation du jugement dont appel,
Infirme le jugement du 31 octobre 2024 en toutes ses dispositions,
Et, statuant nouveau et y ajoutant,
Ouvre une procédure de redressement judiciaire à l'égard de la société NP Consulting, immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Paris sous le numéro 887 500 882, dont le siège social est [Adresse 7] à [Localité 9],
Fixe la date de cessation des paiements au 10 septembre 2024,
Ouvre une période d'observation de six mois à compter du présent arrêt,
Désigne la société MJA en la personne de Maître [U] [W], [Adresse 2] en qualité de mandataire judiciaire,
Désigne Maître [S] [C], [Adresse 5], en qualité de commissaire-priseur afin de réaliser, s'il y a lieu, l'inventaire prévu par l'article L. 622-6 du code de commerce et la prisée de l'actif du débiteur,
Invite les délégués du personnel ou les salariés s'il en existe à désigner un représentant dans les conditions prévues par les articles L. 621-4 et L. 621-6 du code de commerce et à en communiquer le nom et l'adresse au greffe du tribunal de commerce de Paris,
Fixe à huit mois à compter du présent arrêt le délai de dépôt, par le mandataire judiciaire, de la liste des créances mentionnée à l'article L. 624-1 du code de commerce,
Renvoie l'affaire devant le tribunal de commerce de Paris pour la poursuite de la procédure et la désignation du juge-commissaire,
Rappelle que le greffe du tribunal de commerce de Paris devra procéder aux mentions et publicités prévues par la loi,
Déboute la société NP Consulting de sa demande au titre des frais irrépétibles,
Ordonne l'emploi des dépens de première instance et d'appel en frais privilégiés de procédure collective.
Liselotte FENOUIL
Greffière
Marie-Christine HÉBERT-PAGEOT
Présidente