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Décisions

CA Toulouse, 2e ch., 10 juin 2025, n° 23/02095

TOULOUSE

Arrêt

Autre

CA Toulouse n° 23/02095

10 juin 2025

10/06/2025

ARRÊT N°2025/

N° RG 23/02095 - N° Portalis DBVI-V-B7H-PQFC

MN CG

Décision déférée du 22 Mai 2023

Tribunal de Commerce de CASTRES

( 2021001755)

M. BAILLET

S.A.S.U. LN ESTATE

C/

S.A.S. INSTITUT INTERNATIONAL DES EXPERTS

AVANT DIRE DROIT

RENVOI A UNE AUDIENCE

Copie certifiée conforme délivrée

le

à Me LAURENT

Me ALRAN

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

2ème chambre

***

ARRÊT DU DIX JUIN DEUX MILLE VINGT CINQ

***

APPELANTE

S.A.S.U. LN ESTATE

agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège.

[Adresse 3]

[Localité 1]

Représentée par Me Jean christophe LAURENT de la SCP SCP BOONSTOPPEL LAURENT, avocat postulant au barreau de CASTRES

Représentée par Me Laurent VILLEGAS de la SELARL ACT AVOCATS ASSOCIES, avocat plaidant au barreau d'ALPES DE HAUTE-PROVENCE

INTIMEE

S.A.S. INSTITUT INTERNATIONAL DES EXPERTS

agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège.

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me Loïc ALRAN de la SCP ALRAN PERES RENIER, avocat postulant au barreau de TOULOUSE

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 805 et 907 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 3 Juin 2025, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant V. SALMERON, présidente et M. NORGUET, conseillère, chargée du rapport. Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

V. SALMERON, présidente

M. NORGUET, conseillère

I. MARTIN DE LA MOUTTE, conseillère

Greffier, lors des débats : A. CAVAN

ARRET :

- Contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

- signé par V. SALMERON, présidente, et par A. CAVAN, greffier de chambre

Faits et procédure :

La Sasu Ln Estate, dont la dirigeante est [G] [L], exerce une activité d'agence immobilière.

La Sas Institut International des Experts, dont la dirigeante est [I] [N], a pour activité la formation professionnelle pour adultes et anime un réseau d'experts en pathologies des bâtis sous le nom « les experts [Localité 5] » par la signature de contrats de licence de marque.

En date du 13 septembre 2020, [G] [L] a conclu, en son nom, un contrat de licence de marque avec la Sas Institut International des Experts portant sur la marque « [Localité 5] Structure d'Origine contrôlée » N°4329442 pour une durée d'un an à compter du 1er octobre 2020, renouvelable par tacite reconduction et possibilité de dénonciation trois mois avant l'échéance par lettre recommandée avec accusé de réception.

Le contrat a concédé à la Sasu Ln Estate une licence d'exploitation de la marque outre la mise à disposition de la signalétique, de moyens informatiques, notamment d'un logiciel d'expertise et d'un site internet et diverses prestations complémentaires, notamment de formation, moyennant le versement d'une redevance mensuelle de 350 euros ht.

La Sasu Ln Estate estimant rencontrer des difficultés dans l'exécution du contrat et notamment l'absence de dépôt à l'INPI de la marque « les Experts [Localité 5] », l'absence de mise à disposition des moyens informatiques et numériques prévus au contrat et l'absence de formation sanctionnée par un diplôme d'état assurée par la Sas Institut International des Experts a, par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 23 novembre 2020, dénoncé le contrat de licence de marque et sollicité le remboursement intégral des frais avancés comprenant le versement du dépôt de garantie, le pack d'entrée, les redevances d'octobre et novembre 2020, les frais de diverses formations et la création de la page internet sur le site du concédant, pour un montant total de 3 500 euros TTC.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 26 novembre 2020, la Sas Institut International des Experts a pris acte de la résolution du contrat bien qu'elle soit formulée au nom de la Sasu Ln Estate et non d'[G] [L] mais a refusé de faire droit à la demande de remboursement formulée.

Dès lors, par exploit d'huissier en date du 10 août 2021, la Sasu Ln Estate a assigné la Sas Institut International des Experts devant le tribunal de commerce de Castres en nullité du contrat de licence de marque et condamnation au remboursement des sommes avancées outre l'allocation de dommages et intérêts pour préjudice moral.

Par jugement du 22 mai 2023, le tribunal de commerce de Castres a :

dit que le contrat de licence de marque du 13 septembre 2020 signé entre la société Institut International des Experts et Mme [L] dirigeante de la société Ln Estate est valide,

rejeté la demande de nullité du dit contrat introduite par la société Ln Estate,

débouté la société Ln Estate de l'ensemble de ses demandes,

débouté la société Institut International des Experts de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive et injustifiée,

condamné la société Ln Estate à payer à la société Institut International des Experts la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

condamné la société Ln Estate aux entiers dépens dont frais de greffe taxés et liquidés à la somme de 60,22 euros ttc.

Par déclaration en date du 12 juin 2023, la Sasu Ln Estate a relevé appel du jugement du tribunal de commerce aux fins de le voir réformé en intégralité, à l'exception du chef de dispositif ayant débouté la société Institut International des Experts de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive et injustifiée.

Par voie de conclusions, la Sas Institut International des Experts a formé appel incident du chef de dispositif l'ayant déboutée de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive et injustifiée,

La clôture de l'affaire est intervenue le 5 mai 2025. L'affaire a été fixée à l'audience du 3 juin 2025.

Prétentions et moyens des parties :

Vu les conclusions récapitulatives notifiées le 2 mai 2025 auxquelles il est fait expressément référence pour l'énoncé du détail de l'argumentation, et dans lesquelles la Sasu Ln Estate demande, au visa des articles 1103, 1112-1, 1128, 1137, 1231-1, 1231-2 et 1163 du code civil, et les articles L330-3 et R330-1 du code de commerce :

l'infirmation du jugement du tribunal de commerce dans toutes ses dispositions, à l'exception des dispositions rejetant la demande de dommages et intérêts de la société Institut International des Experts en ce qu'il :

dit que le contrat de licence de marque du 13 septembre 2020 signé entre la société Institut International des Experts et Mme [L] dirigeante de la société Ln Estate est valide,

rejeté la demande de nullité dudit contrat introduite par la société Ln Estate,

débouté la société Ln Estate de l'ensemble de ses demandes,

débouté la société Institut International Des Experts de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive et injustifiée,

condamné la société Ln Estate à payer à la société Institut International des Experts la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

condamné la société Ln Estate aux entiers dépens,

statuant à nouveau, à titre principal, que soit prononcée la nullité du contrat de licence de marque conclu le 13 septembre 2020,

à titre subsidiaire, qu'il soit constaté que la société Institut International des Experts a manqué à ses obligations contractuelles et a adopté un comportement déloyal dans l'exécution du contrat,

qu'il soit reconnu que la société Institut International des Experts est entièrement responsable du préjudice subi par la société Ln Estate,

en tout état de cause et en conséquence, la condamnation de la société Institut International des Experts à payer à la société Ln Estate la somme de 3 500 euros au titre du dépôt de garantie, du pack d'entrée, des redevances mensuelles d'octobre et novembre 2021, des frais de formation et des frais pour la création de la page internet,

la condamnation de la société Institut International des Experts à payer à la société Ln Estate la somme de 4 000 euros en réparation du préjudice moral,

la condamnation de la société Institut International des Experts à payer à la société Ln Estate la somme de :

2.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles engagés en première instance,

2.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles engagés en première instance,

la condamnation de la société Institut International des Experts aux entiers dépens engagés en première instance et en cause d'appel,

la confirmation du jugement du tribunal de commerce en ce qu'il a débouté la société Institut International des Experts de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive et injustifiée.

En réponse, vu les conclusions n°2 d'intimée devant la cour d'appel de Toulouse emportant appel incident notifiées le 21 mars 2024 auxquelles il est fait expressément référence pour l'énoncé du détail de l'argumentation, et dans lesquelles la Sas Institut International des Experts demande, au visa des articles 1103 et 1240 du code civil et l'article 9 du code de procédure civile :

la confirmation du jugement du Tribunal de commerce de Castres en date du 22 mai 2023, en ce qu'il a :

dit que le contrat de licence de marque du 13 septembre 2020 signé entre la société Institut International des Experts et Mme [L] Dirigeante de la Société Ln Estate est valide,

rejeté la demande de nullité dudit contrat introduite par la société Ln Estate,

débouté la société Ln Estate de l'ensemble de ses demandes,

condamné la société Ln Estate à payer à la société Institut International des Experts la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

condamné la société Ln Estate aux entiers dépens dont frais de greffe taxés et liquidés à la somme de 60,22 euros ttc,

la réformation du jugement du Tribunal de commerce de Castres en date du 22 mai 2023, sur le point suivant sur lequel la concluante relève appel incident, en ce qu'il a :

débouté la société Institut International des Experts de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive et injustifiée,

et, statuant à nouveau sur ce point, la condamnation de la société Ln Estate au paiement au profit de la société Institut International des Experts, de la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et injustifiée,

la condamnation de la société Ln Estate au paiement de la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel, dont distraction au profit de l'avocat soussigné.

MOTIFS

La cour est saisie d'un litige relatif à un contrat de licence de marque dont il est soutenu au premier chef par l'appelante la nullité pour défaut de titularité de l'intimée sur la marque concédée dans le contrat en cause.

Dès lors, se pose la question de la compétence du tribunal de commerce de Castres.

En effet, l'article 716-5 du code de la propriété intellectuelle dispose que les autres actions civiles et les demandes relatives aux marques autres que celles mentionnées au I, y compris lorsqu'elles portent également sur une question connexe de concurrence déloyale, sont exclusivement portées devant des tribunaux de grande instance, déterminés par voie réglementaire.

Les tribunaux mentionnés à l'alinéa précédent sont en outre exclusivement compétents dans les cas suivants : 1° Lorsque les demandes mentionnées aux 1° et 2° du I sont formées à titre principal ou reconventionnel par les parties de façon connexe à toute autre demande relevant de la compétence du tribunal et notamment à l'occasion d'une action introduite sur le fondement des articles L. 716-4, L. 716-4-6, L. 716-4-7 et L. 716-4-9 ou à l'occasion d'une action en concurrence déloyale ; 2° Lorsque les demandes mentionnées aux 1° et 2° du I sont formées alors que soit des mesures probatoires, soit des mesures provisoires ou conservatoires ordonnées afin de faire cesser une atteinte à un droit de marque sont en cours d'exécution avant l'engagement d'une action au fond.

Pour l'application de ce texte, l'article R716-21 du code de la propriété intellectuelle dispose que le siège et le ressort des tribunaux judiciaires ayant compétence exclusive pour connaître des actions en matière de marques en application de l'article L. 716-5 du code de la propriété intellectuelle sont fixés conformément au tableau VI annexé à l'article D. 211-6-1 du code de l'organisation judiciaire.

L'article D211-6-1 du Code de l'organisation judiciaire renvoie à un tableau IV figurant en annexe indiquant que le siège est fixé à Bordeaux s'agissant des actions introduites dans le ressort de la cour d'appel de Toulouse.

La cour s'interroge sur la compétence du tribunal de commerce de Castres pour trancher le litige qui lui était soumis et par voie de conséquence, celle de la cour d'appel de Toulouse.

De plus, l'action a été initiée en première instance par la Sasu Ln Estate, laquelle a assigné la Sas Institut International des Experts, concédante de la marque, devant le tribunal de commerce de Castres.

Or, l'analyse du contrat litigieux, produit aux dossiers par les deux parties, permet de constater que ce n'est pas la Sasu Ln Estate qui en est signataire, ni [G] [L] en sa qualité de dirigeante de la Sasu Ln estate, en son nom et pour son compte, mais [G] [L] en son nom personnel.

L'article 125 du Code de procédure civile dispose que le juge peut relever d'office la fin de non-recevoir tirée du défaut d'intérêt, du défaut de qualité ou de la chose jugée.

La cour s'interroge donc également sur l'intérêt à agir de la Sasu Ln Estate dans le présent litige.

Avant dire droit, la cour invite donc les parties à présenter leurs observations sur la compétence du tribunal de commerce de Castres et de la cour d'appel de Toulouse pour statuer sur le présent litige au vu des dispositions combinées des articles L716-5 et R716-21 du code de la propriété intellectuelle et D211-6-1 du Code de l'organisation judiciaire ainsi que sur l'intérêt à agir de la Sasu Ln Estate dans le litige.

L'affaire est renvoyée à la date mentionnée dans le dispositif ci-dessous et les demandes des parties sont réservées ainsi que les dépens jusqu'à l'arrêt au fond.

PAR CES MOTIFS,

La Cour,

Avant dire-droit,

Invite les parties à présenter leurs observations sur la compétence du tribunal de commerce de Castres et de la cour d'appel de Toulouse pour statuer sur le présent litige au vu des dispositions combinées des articles L716-5 et R716-21 du code de la propriété intellectuelle et D211-6-1 du Code de l'organisation judiciaire ainsi que sur l'intérêt à agir de la Sasu Ln Estate dans le litige,

Renvoie l'examen de l'affaire à l'audience du 22 octobre 2025 à 14h,

Réserve les demandes des parties et les dépens.

Le greffier La présidente

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