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Décisions

CA Paris, Pôle 5 - ch. 1, 11 juin 2025, n° 22/19632

PARIS

Arrêt

Autre

CA Paris n° 22/19632

11 juin 2025

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 1

ARRÊT DU 11 JUIN 2025

(n° 79/2025, 13 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/19632 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CGXJN

Décision déférée à la Cour : ordonnance du 13 septembre 2022 du juge de la mise en état du tribunal judiciaire de PARIS - RG n° 21/12470

APPELANTE

CANADA GOOSE INTERNATIONAL AG

Société anonyme de droit suisse inscrite au registre du commerce du canton de Zug sous le n° CHE-462.165.681, agissant en la personne de son représentant légaldomicilié en cette qualité en cette qualité au siège social situé

[Adresse 8]

[Localité 4]

SUISSE

Représentée en tant qu'avocat constitué par Me Marie-Catherine VIGNES de la SCP GRV ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque L 10

Ayant pour avocat plaidant Me Olympe VANNIER de la AARPI JACOBACCI AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque B 260

INTIMÉES

SWEET PANTS

Société par actions simplifiée immatriculée au RCS de [Localité 12] sous le n° 800 418 857, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social situé

[Adresse 3]

[Localité 5]

SWEET PANTS RETAIL

Société par actions simplifiée immatriculée au RCS de [Localité 12] sous le n° 820 333 185, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social situé

[Adresse 3]

[Localité 5]

Représentées en tant qu'avocat constitué et plaidant par Me Myriam WITUKIEWICZ SEBBAN, avocat au barreau de PARIS, toque E 510

PARTIES INTERVENANTES FORCÉES

FHB

Société d'exercice libéral à responsabilité limitée immatriculée au RCS de [Localité 12] sous le n° 491 975 041, prise en la personne de Me [R] [O], ès qualités de commissaire à l'exécution du plan de redressement de SWEET PANTS RETAIL en vertu d'un plan de redressement du 21 mars 2024, domiciliée en cette qualité au siège social situé

[Adresse 2]

[Localité 6]

Représentée en tant qu'avocat constitué et plaidant par Me Myriam WITUKIEWICZ SEBBAN, avocat au barreau de PARIS, toque E 510

BTSG

Société civile professionnelle immatriculée au RCS de [Localité 12] sous le n° 434 122 511 prise en la personne de Me [K] [E], ès qualités de mandataire judiciaire de SWEET PANTS RETAIL en vertu du jugement du 1er mars 2023 d'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire, domicilié en cette qualité au siège social situé

[Adresse 1]

[Localité 7]

Non représentée, n'ayant pas constitué avocat, assignée en intervention forcée le 11 janvier 2024 à personne morale

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 06 mai 2025, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme Isabelle DOUILLET, présidente de chambre, et Mme Déborah BOHEE, conseillère chargée d'instruire l'affaire, laquelle a préalablement été entendue en son rapport.

Mmes Isabelle DOUILLET et Déborah BOHEE ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

- Mme Isabelle DOUILLET, présidente,

- Mme Françoise BARUTEL, conseillère,

- Mme Déborah BOHEE, conseillère.

Greffier lors des débats : M. Soufiane HASSAOUI

ARRÊT :

réputé contradictoire ;

par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

signé par Mme Isabelle DOUILLET, présidente de chambre, et par Mme Carole TRÉJAUT, greffière présente lors de la mise à disposition et auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DU LITIGE

La société anonyme de droit suisse Canada Goose International AG (ci-après la société Canada Goose) exploite une activité de vente de vêtements et d'accessoires sous la marque éponyme. Proposant dans un premier temps des articles vestimentaires destinés au grand froid, et notamment des parkas au Canada, la société Canada Goose s'est diversifiée en élargissant sa gamme de vêtements et d'accessoires techniques à des articles de mode plus citadins.

La société Canada Goose est notamment titulaire des marques suivantes :

La marque de l'Union européenne n°010494979 (ci-après n°979), déposée le 15 décembre 2011 et enregistrée le 15 mai 2012 pour désigner des produits en classes 25 et 39, notamment des « vêtements, chaussures, chapellerie » :

La marque de l'Union européenne n°015731458 (ci-après n°458), déposée le 5 août 2018 et enregistrée le 22 septembre 2018 pour désigner des services en classe 35, soit des «services de magasins de vente au détail de vêtements de dessus, de vêtements, d'articles vestimentaires, de chaussures, de chapellerie ; Services de magasins de vente au détail en ligne de vêtements de dessus, de vêtements, d'articles vestimentaires, de chaussures, de chapellerie » :

La société Sweet Pants est une société française de prêt à porter immatriculée le 10 février 2014, qui crée et fait fabriquer ses collections sous la marque Sweet Pants, la société Sweet Pants Retail, immatriculée le 19 mai 2016, étant en charge de la distribution et se présentant comme spécialisée dans la vente en gros, demi-gros et au détail des produits vendus sous cette marque.

Elle est titulaire des trois marques suivantes :

- La marque française n°3905569 (ci-après n°569) déposée le 16 mars 2012 enregistrée le 6 juillet 2012 pour désigner des produits en classes 14, 18 et 25, notamment des 'vêtements, chaussures, chapellerie', par la société Freedom, qui l'a cédée le 22 septembre 2014 à la société Sweet Pants. Cette marque a également été déposée le 11 septembre 2012 et enregistrée le 14 janvier 2013 auprès de l'EUIPO sous le n°011179371 et constitue également une marque internationale n°1140976 enregistrée le 14 septembre 2012 sous priorité de la marque française:

La marque française n°4589269 (ci-après n°269) déposée le 10 octobre 2019 et enregistrée le 14 février 2020 pour désigner des produits et services en classes 3, 4, 9, 14, 16, 18, 20, 21, 24, 28 et 35, notamment les 'vêtements, chaussures, chapellerie' :

La marque française n°4589265 (ci-après n°265) déposée le 10 octobre 2019 et enregistrée le 14 février 2020 pour désigner des produits et services en classes 3, 4, 9, 14, 16, 18, 20, 21, 24, 28 et 35, notamment les 'vêtements, chaussures, chapellerie' :

Par lettre du 7 octobre 2016, le conseil de la société Canada Goose a mis en demeure la société Sweet Pants de cesser toute exploitation du logo SWEET PANTS sur des vêtements d'extérieurs et de modifier le libellé des dépôts de sa marque.

Par lettre du 28 octobre 2016, la société Sweet Pants a contesté le risque de confusion et proposé de s'abstenir d'utiliser les signes contestés pour des manteaux destinés à des conditions extrêmes, en échange de l'absence d'utilisation de la marque CANADA GOOSE pour des pantalons de jogging.

Après avoir fait procéder à des constats d'huissier de justice en janvier 2019, par lettre du 26 janvier 2021, la société Canada Goose a mis en demeure les sociétés Sweet Pants et Sweet Pants Retail de cesser d'utiliser leurs marques qu'elle estimait contrefaisantes de sa marque de l'Union Européenne et de renoncer à tout enregistrement de marques reprenant les signes litigieux en classe 25.

Par lettre du 15 février 2021, le conseil des sociétés Sweet Pants et Sweet Pants Retail a répondu que la société Canado Goose avait toléré l'usage des signes SWEET PANTS pendant plus de 5 ans, de telle sorte que la forclusion par tolérance était acquise, et qu'en tout état de cause, il n'existait aucun risque de confusion entre les signes en présence.

Par acte du 1er octobre 2021, la société Canada Goose a fait assigner les sociétés Sweet Pants et Sweet Pants Retail devant le tribunal judiciaire de Paris en nullité des trois marques françaises et contrefaçon.

Saisi d'un incident par les sociétés Sweet Pants et Sweet Pants Retail soulevant la fin de non-recevoir tirée de la connaissance par la société Canada Goose de l'usage de leurs marques depuis plus de 5 ans, par ordonnance rendue le 13 septembre 2022, dont appel, le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Paris a :

déclaré irrecevable la demande en nullité de la marque française 3 905 569 en ce qu'elle est enregistrée pour les vêtements ;

écarté la fin de non-recevoir visant la demande en nullité de cette marque en ce qu'elle est enregistrée pour les chaussures et la chapellerie ;

déclaré irrecevables les demandes en contrefaçon (interdiction, communication d'éléments comptables et commerciaux, provision, publication, destruction) dans la mesure où elles se fondent sur l'usage de cette marque, notamment sous la forme du signe reproduit ci-dessus au paragraphe 4, et ce pour désigner des vêtements ;

écarté la fin de non-recevoir visant les demandes en contrefaçon pour le surplus, c'est-à-dire dans la mesure où elles se fondent sur l'usage de cette marque mais pour désigner des services en classe 35 et des articles de chapellerie ;

écarté la fin de non-recevoir visant les demandes en nullité des marques françaises 4 589 269 et 4 589 265 ;

condamné la société Canada Goose à payer aux sociétés Sweet Pants et Sweet Pants Retail 5000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

renvoyé l'affaire à l'audience dématérialisée de mise en état du 20 octobre 2022 (section 2), pour conclusions au fond des sociétés Sweet Pants ; clôture envisagée en novembre ou décembre.

Par déclaration du 22 novembre 2022, la société Canada Goose a interjeté appel de l'ordonnance.

**

* Dans deux décisions rendues le 16 mars 2023, la division d'annulation de l'EUIPO a rejeté les demandes en nullité présentées par la société Canada Goose portant sur les marques de l'UE déposées en 2012 et 2019 par la société Sweet Pants protégeant les mêmes signes que les marques françaises déposées les mêmes années, la société Canada Goose invoquant sa marque de l'UE n° 979.

La société Canada Goose a également retiré, le 3 octobre 2023, l'opposition initiée devant l'Office des marques canadien contre le dépôt de marque effectué par la société Sweet Pant sur un signe identique à la marque 569.

**

* Par jugement rendu le 1er mars 2023 par le tribunal de commerce de Nanterre, la société Sweet Pants Retail a fait l'objet d'une procédure en redressement judiciaire.

Par jugement du 24 mars 2024, le tribunal de commerce de Nanterre a adopté un plan de redressement en nommant commissaire au plan la SELARL FHBX, prise en la personne de Maître [R] [O].

Par acte d'huissier du 8 août 2024, la société Canada Goose AG a assigné en intervention forcée la SELARL FHBX, prise en la personne de Maître [R] [O], en qualité d'administrateur au redressement judiciaire de la SAS Sweet Pants Retail, qui est intervenue ensuite en tant que commissaire à l'exécution du plan.

Dans ses dernières conclusions, transmises le 19 mars 2024, la société Canada Goose, appelante, demande à la cour de :

infirmer l'ordonnance du 13 septembre 2022 en ce qu'elle a :

« Déclare irrecevable la demande en nullité de la marque française 3 905 569 en ce qu'elle est enregistrée pour les vêtements ;

Déclare irrecevables les demandes en contrefaçon (interdiction, communication d'éléments comptables et commerciaux, provision, publication, destruction) dans la mesure où elles se fondent sur l'usage de cette marque, notamment sous la forme du signe reproduit ci-dessus au paragraphe 4 de l'ordonnance, et ce pour désigner des vêtements ;

Condamne la société Canada Goose à payer aux sociétés Sweet pants et Sweet pants retail 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ; »

Statuant à nouveau :

rejeter ou écarter les fins de non-recevoir soulevées par les sociétés Sweet Pants et Sweet Pants Retail, à l'encontre de la demande en nullité de la marque française 3 905 569 en ce qu'elle est enregistrée pour les vêtements, et à l'encontre des demandes en contrefaçon (interdiction, communication d'éléments comptables et commerciaux, provision, publication, destruction) dans la mesure où elles se fondent sur l'usage de cette marque, notamment sous la forme du signe reproduit au paragraphe 4 de l'ordonnance, et ce pour désigner des vêtements ;

débouter les sociétés Sweet Pants et Sweet Pants Retail de toutes leurs demandes, fins et conclusions.

Subsidiairement si l'irrecevabilité devait être confirmée :

limiter le prononcé de l'irrecevabilité à la demande en nullité de la société Canada Goose formée à l'encontre la marque française n°3905569pour les pantalons de jogging uniquement,

limiter la fin recevoir aux demandes en contrefaçon de la société Canada Goose à l'encontre de l'usage la marque française n°3905569 et le cas échéant de l'usage des marques françaises n°4589269 et n°4589265, pour les pantalons de jogging uniquement.

En tout état de cause,

débouter les sociétés Sweet Pants et Sweet Pants Retail de toutes leurs demandes, fins et conclusions.

condamner les sociétés Sweet Pants et Sweet Pants Retail conjointement et solidairement, au paiement à la somme de 15.000 (quinze mille) euros et à tout le moins fixer la créance de la société Canada Goose au passif de la société Sweet Pants Retail à cette même somme, et ce, au titre des frais irrépétibles exposés dans le cadre de l'incident et de l'appel sur l'incident en application des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

condamner solidairement les sociétés Sweet Pants et Sweet Pants Retail aux entiers dépens, dont distraction au profit de Maître Marie-Catherine Vignes en application des dispositions de l'article 699 du Code de Procédure Civile.

Dans leurs dernières conclusions numérotées 3, transmises le 10 octobre 2024, les sociétés Sweet Pants et Sweet Pants Retail et la Selarl FHB, prise en la personne de Maître [R] [O], es qualités de commissaire à l'exécution du plan, intimées, demandent à la cour de :

confirmer l'ordonnance entreprise le 13 septembre 2022 en ce qu'elle a :

déclaré irrecevable la demande en nullité de la marque française 3 905 569 en ce qu'elle est enregistrée pour les vêtements ;

déclaré irrecevables les demandes en contrefaçon (interdiction, communication d'éléments comptables et commerciaux, provision, publication, destruction) dans la mesure où elles se fondent sur l'usage de cette marque, notamment sous la forme (...) , et ce pour désigner des vêtements;

condamné la société Canada Goose à payer aux sociétés Sweet Pants et Sweet Pants Retail 5000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

débouter la société Canada Goose de l'intégralité de son appel, et de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;

infirmer l'ordonnance entreprise le 13 septembre 2022 en ce qu'elle a :

écarté la fin de non-recevoir visant la demande en nullité de cette marque (n°3 905 569) en ce qu'elle est enregistrée pour la chapellerie ;

écarté la fin de non-recevoir visant les demandes en contrefaçon pour le surplus, c'est-à-dire dans la mesure où elles se fondent sur l'usage de cette marque, mais pour désigner des services en classe 35 et des articles de chapellerie ;

écarté la fin de non-recevoir visant les demandes en nullité des marques françaises 4589269 et 4289265 ;

condamner la société Canada Goose à verser à chacune des sociétés Sweet Pants et Sweet Pants Retail, la somme de 15.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 28 janvier 2025.

MOTIFS DE LA DÉCISION

En application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est expressément renvoyé, pour un exposé exhaustif des prétentions et moyens des parties, aux conclusions écrites qu'elles ont transmises, telles que susvisées.

Sur le chef non contesté de l'ordonnance

L'ordonnance n'est pas contestée en ce qu'elle a écarté la fin de non-recevoir visant la demande en nullité de la marque n°569 en ce qu'elle est enregistrée pour les chaussures.

Elle est donc définitive de ce chef.

Sur l'irrecevabilité tirée de la forclusion par tolérance

La société Canada Goose soutient essentiellement que les conditions de la forclusion par tolérance ne sont pas réunies, qu'elle constitue une exception au monopole de marque et doit donc être interprétée strictement.

S'agissant des deux marques déposées en 2019 et enregistrées en 2020, elle constate que le délai quinquennal n'est pas acquis au jour où la forclusion a été soulevée.

Puis, s'agissant de la marque n°569 du 6 juillet 2012, elle fait valoir que les sociétés Sweet Pants ne l'ont jamais exploitée sous sa forme telle que déposée mais sous une forme modifiée qui a fait l'objet de l'enregistrement du 14 février 2020 et qui ne peut donc leur être opposée ; que les intimées ne sont pas fondées à revendiquer un usage de la marque 569 sous une forme modifiée n'en altérant pas le caractère distinctif, exception uniquement applicable en matière de déchéance, le juge de la mise en état ayant ainsi étendu la portée de la forclusion qui a seulement pour objectif de sanctionner une inaction du titulaire de la marque antérieure et non de protéger le titulaire de la marque postérieure et ainsi aggravé indûment la portée de la sanction du titulaire de la marque antérieure aboutissant à une solution contra legem.

La société Canada Goose soutient également qu'elle n'a eu connaissance de l'existence des sociétés Sweet Pants et de l'usage de leur marque éponyme en France qu'en octobre 2016 alors qu'elle ne s'est implantée en France que tardivement en 2018 et que la marque SWEET PANTS, créée en 2014, s'est d'abord concentrée sur un segment de produit spécifique, le pantalon de jogging, avant de diversifier son offre et que ce n'est que dans un contexte de rapprochement progressif des segments de produits des deux marques, au fur et à mesure de leur développement respectif, qu'elle a découvert son existence, ce qui a motivé l'envoi d'une mise en demeure le 7 octobre 2016. Elle considère que l'ensemble des éléments de preuve versé par les sociétés Sweet Pants est insuffisant à établir sa connaissance effective de cet usage avant le 1er octobre 2016, s'agissant de documents imprécis, non datés ou postérieurs à la période à prendre en compte.

Les sociétés Sweet Pants contestent cette analyse et soutiennent en premier lieu que les marques n°269 et n°265 ne sont que des déclinaisons mineures de la marque originelle n°569 déposée en 2012 ; que ces variations, notamment le passage à un dépôt en noir et blanc ou l'ajout de la mention «since 1982» en lieu et place de la répétition de « Sweet Pants », n'altèrent pas la quasi-identité des signes ; que ces marques déposées en 2019 et 2020 ont été exploitées de manière continue depuis 2012 pour des vêtements et des services de vente de vêtements, ce que la société Canada Goose a toléré en pleine connaissance, comme en témoignent notamment ses propres courriers de 2016 visant déjà le logo ultérieurement enregistré. Elles considèrent en conséquence que la forclusion par tolérance acquise au bénéfice de la marque de 2012 doit s'étendre aux marques de 2019, en raison de leur quasi-identité et de l'usage constant du signe.. Elles ajoutent que si l'usage d'un signe sous une forme très légèrement modifiée ne permettait pas de retenir la forclusion par tolérance, alors les textes et l'intention du législateur seraient privés d'effet et le titulaire des marques postérieures serait constamment défavorisé, en dépit de la négligence du titulaire de droits antérieurs.

En second lieu, les sociétés Sweet Pants plaident que le point de départ du délai de forclusion est la date à laquelle le titulaire de la marque antérieure a eu connaissance de l'usage de la marque postérieure, et non la date de son enregistrement, de sorte que les actions en nullité et en contrefaçon pour les produits et services concernés sont forcloses.

En troisième lieu, les sociétés Sweet Pants soulignent que leurs marques ont fait l'objet d'une exploitation continue, massive et visible depuis 2012, tant en France qu'à l'étranger ; que leurs produits ont été distribués à grande échelle via des points de vente multimarques, des boutiques, ainsi que sur des grandes plateformes de commerce en ligne et à travers leur propre site marchand, outre leur participation régulière à de nombreux salons professionnels internationaux et leur présence dans des enseignes renommées, parfois aux côtés de la société Canada Goose. Les sociétés Sweet Pants mettent également en avant des campagnes de communication importantes, la diffusion de leurs produits sur les réseaux sociaux et dans la presse spécialisée, ainsi que la conclusion de partenariats avec des marques reconnues. Elles estiment que ces éléments démontrent une forte visibilité de leur marque, tant auprès du public que des professionnels du secteur et que la société Canada Goose ne pouvait ignorer cette exploitation, compte tenu notamment de sa propre présence sur les mêmes marchés et événements. Elles en déduisent que la société Canada Goose a toléré l'usage de ces marques pendant plus de cinq ans, ce qui justifie l'application de la forclusion par tolérance et l'irrecevabilité des demandes.

L'article L. 716-4-5 du code de la propriété intellectuelle dans sa rédaction issue de l'ordonnance du n°2019-1169 du 13 novembre 2019, applicable à la présente instance, dispose que : ' Est irrecevable toute action en contrefaçon introduite par le titulaire d'une marque antérieure à l'encontre d'une marque postérieure :

1° Lorsque le titulaire de la marque antérieure a toléré pendant une période de cinq années consécutives l'usage de la marque postérieure en connaissance de cet usage et pour les produits ou les services pour lesquels l'usage a été toléré, à moins que son dépôt n'ait été effectué de mauvaise foi (')»

De même, en vertu de l'article L.716-2-8 du code de la propriété intellectuelle, « Le titulaire d'un droit antérieur qui a toléré pendant une période de cinq années consécutives l'usage d'une marque postérieure enregistrée en connaissance de cet usage n'est plus recevable à demander la nullité de la marque postérieure sur le fondement de l'article L. 711-3, pour les produits ou les services pour lesquels l'usage de la marque a été toléré, à moins que l'enregistrement de celle-ci ait été demandé de mauvaise foi. »

Ces dispositions correspondent à la transposition en droit français de l'article 9 de la directive 2015/2436 rapprochant les législations des Etats membres sur les marques.

La cour rappelle que quatre conditions doivent être réunies pour faire courir le délai de forclusion par tolérance qu'il incombe au juge national de vérifier : la marque postérieure doit être enregistrée, son dépôt doit avoir été fait de bonne foi, le titulaire de la marque postérieure doit faire usage de sa marque dans l'État membre où elle a été enregistrée et le titulaire de la marque antérieure doit avoir connaissance de l'enregistrement et de l'usage de cette marque postérieure après son enregistrement (arrêt de la CJUE du 22 septembre 2011, C-482/09, Budejovický Budvar, národní podnik c/ Anheuser-Busch Inc.).

La date pertinente permettant de calculer le point de départ du délai de forclusion est celle de la connaissance de l'usage de la marque postérieure, la simple publication de l'enregistrement étant insuffisante à caractériser la tolérance en connaissance de cause (Com 15 juin 2010 n°08-18.279)

La preuve de la connaissance par le titulaire de la marque antérieure de l'usage de la marque postérieure après son enregistrement peut résulter d'une connaissance générale, dans le secteur économique concerné, d'une telle utilisation, cette connaissance pouvant être déduite, notamment, de la durée de l'utilisation (Com., 5 juin 2024, pourvoi n° 23-15.380, 23-17.571).

S'agissant des marques n°265 et n°269 enregistrées depuis moins de 5 ans

C'est par de justes motifs approuvés par la cour que le premier juge, après avoir rappelé que la première condition pour faire courir le délai de forclusion par tolérance est l'enregistrement de la marque postérieure, a retenu que l'action en nullité introduite le 1er octobre 2021 portant sur les marques enregistrées le 14 février 2020 n'est pas forclose et a écarté la fin de non-recevoir soulevée sur ce point, les sociétés Sweet Pants ne pouvant être suivies lorsqu'elles affirment que l'exploitation débutée avant l'enregistrement de ces marques devrait être prise en compte pour apprécier la forclusion de l'action en nullité les visant, seul l'usage postérieur à l'enregistrement d'une marque étant pertinent pour apprécier la forclusion par tolérance.

L'ordonnance déférée doit en conséquence être confirmée de ce chef.

S'agissant de la marque n°569 enregistrée le 6 juillet 2012

Il n'est pas contesté par l'appelante que la marque n°569 a été déposée le 16 mars 2012 et enregistrée le 6 juillet 2012, soit plus de cinq avant l'introduction de son action en nullité. Et, il n'est nullement démontré que ce dépôt aurait été opéré de mauvaise foi.

Par contre, les parties débattent sur les deux autres conditions devant être réunies en matière de forclusion par tolérance qui vont être examinées comme suit.

Sur l'usage de la marque n°569

À titre liminaire, contrairement à ce que soutient l'appelante, le juge de la mise en état ne s'est pas basé sur l'usage de la marque n°269 enregistrée postérieurement mais sur l'usage, dès 2012, de la marque n°569 sous une forme quasi-identique, le fait que ce signe ait fait l'objet ensuite d'un dépôt de marque postérieur étant indifférent sur l'appréciation de l'usage de la marque première.

À cet égard, la cour constate, comme le premier juge, que les textes précités ne définissent pas la notion d'usage de la marque postérieure, qui constitue une des conditions de la forclusion par tolérance. Or, comme l'a rappelé la CJUE dans son arrêt du 22 septembre 2011, les dispositions de la directive 89/104 relatives au droit des marques européennes ( codifiée par la directive 2008/95/CE du 22 octobre 2008), « vise d'une manière générale à mettre en balance, d'une part, les intérêts du titulaire d'une marque à sauvegarder la fonction essentielle de celle-ci et, d'autre part, les intérêts d'autres opérateurs économiques à disposer des signes susceptibles de désigner leur produits et service. »

Ainsi, le considérant 29 de la directive UE 2015/2436 du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2015 énonce que « il importe, pour des raisons de sécurité juridique, de prévoir que, sans porter atteinte à ses intérêts en tant que titulaire d'une marque antérieure, ce dernier ne peut plus demander la nullité ou s'opposer à l'usage d'une marque postérieure à la sienne dont il a sciemment toléré l'usage pendant une longue période, sauf si la marque a été déposée de mauvaise foi. » Le considérant 32 ajoute que « une marque enregistrée ne devrait être protégée que dans la mesure où elle est effectivement utilisée », justifiant l'exigence d'un usage sérieux posé à l'article 16, qui précise que « sont considérés comme usage au sens du paragraphe 1, a) L'usage de la marque sous une forme qui diffère par des éléments n'altérant pas son caractère distinctif dans la forme sous laquelle elle a été enregistrée ».

La cour considère, en conséquence, comme le premier juge, que pour assurer l'équilibre entre les intérêts du titulaire d'une marque antérieure à sauvegarder ses droits et la sécurité juridique du titulaire d'une marque postérieure qui exploite un signe lui permettant de désigner ses services et produits, il convient que le titulaire de cette marque antérieure puisse identifier la marque postérieure et apprécier la gravité de l'atteinte que lui cause l'usage de celle-ci, cet objectif n'imposant pas nécessairement une identité parfaite entre la forme sous laquelle la marque est utilisée et celle sous laquelle elle est enregistrée, notamment quand il s'agit d'une exploitation de la marque sous une forme légèrement modifiée qui n'altère en rien son pouvoir distinctif, une exigence de stricte identité étant excessive dans la vie des affaires, qui peut amener à de minimes modifications des éléments de communication et d'identification d'une entreprise.

Contrairement à ce que soutient la société Canada Goose, cette interprétation n'aggrave pas la situation du titulaire de la marque antérieure puisque l'appréciation de l'usage de la marque postérieure est faite en fonction de la perception qu'il peut avoir du signe en cause, de son pouvoir distinctif et ainsi dans le respect de la fonction même de la marque, de telle sorte qu'il soit évident pour lui qu'il s'agit bien de la même marque.

Au cas présent, la cour constate que le signe exploité par les sociétés Sweet Pants est quasiment identique à la marque en cause : il reproduit à l'identique un écusson composé en son centre d'une feuille d'arbre blanche stylisée dessinée sur un disque sombre, cerclé de rouge, puis d'un anneau l'entourant également représenté en rouge, dans lequel s'inscrit sur fond blanc deux séries de trois étoiles rouges, entourant l'inscription SWEET PANTS® en lettres majuscules bleues sur un fond légèrement crème.

Il ne diffère de la marque qu'en ce que celle-ci est figurée sur un fond sombre de couleur identique au disque central et que le texte au bas de l'écusson n'est pas la répétition SWEET PANTS à l'envers mais la mention « since 1982 ». Or, comme l'a pertinemment relevé le premier juge, le texte mentionné en bas de l'écusson qui est la répétition du même élément verbal et est retranscrit à l'envers est peu susceptible d'attirer l'attention du public et n'est pas distinctif, ni davantage le fond sombre sur lequel est apposé l'écusson, destiné à s'intégrer sur la partie du vêtement sur lequel il est apposé.

Ainsi, la cour retient que les sociétés Sweet Pants titulaire de la marque n°569 justifient en avoir fait usage sous une forme qui ne diffère que par des éléments minimes n'en altérant pas son caractère distinctif, analyse au demeurant confortée par la lettre de mise en demeure adressée le 7 octobre 2016 par la société Canada Goose à la société Sweet Pants. En effet, dans ce courrier, par la voix de son conseil, c'est précisément l'usage de ce signe et son enregistrement qu'elle a reprochés à la société Sweet Pants en ces termes :

Ainsi, la société Canada Goose a elle-même considéré, dès l'origine, et avant les dépôts postérieurs du 15 février 2020, que c'était l'exploitation de la marque n°569 sous cette forme qu'elle jugeait contrefaisante, demandant notamment que soient retirés des produits désignés par celle-ci les produits « outwear » et avait, en tout état de cause, connaissance du dépôt de la marque française n° 569 qui a été suivi du dépôt d'une marque identique de l'UE le 11 septembre 2012.

Sur la date de la connaissance de l'usage par la société Canada Goose

Il convient en conséquence d'examiner, ensuite, à partir de quelle date la société Canada Goose a eu connaissance de l'exploitation de cette marque et si elle a ainsi été en mesure de faire valoir ses droits avant le 1er octobre 2016, l'assignation en nullité et en contrefaçon ayant été délivrée le 1er octobre 2021.

Les sociétés Sweet Pants démontrent que l'exploitation en France de la marque n°569 a débuté à compter du milieu de l'année 2012, d'abord par l'intermédiaire de la société Freedom, et qu'à compter de 2013, a été développée progressivement une intense campagne de communication pour faire connaître cette marque, par le biais notamment d'une agence de communication.

Il est ainsi établi, durant la période 2013-2014, qu'a été inauguré un site de vente en ligne, que 250 points de vente ont ouvert en France et à l'international, que le lancement de la marque a été mis en avant et relayé massivement sur les réseaux sociaux, et que la marque était présente dans des magazines de presse féminine très connus ([Localité 14], Elle, Gala, Biba), le journal du textile titrant ainsi le 6 mai 2014 que « Sweet Pants rend le jogging très mode », ajoutant en sous-titre « Lancée il y a deux ans, la marque est devenue un véritable phénomène, elle est diffusée dans 1.000 points de vente dans douze pays et crée le buzz sur les réseaux sociaux. »

Puis, à compter de 2015, les sociétés Sweet Pants démontrent avoir ouvert leurs premières boutiques en France, notamment à [Localité 13] et à [Localité 11], ouvertures accompagnées de campagnes publicitaires dans ces villes en novembre 2015 et février 2016 sur des lieux emblématiques, notamment les [Localité 9] Elysées, mais aussi sur le territoire national, les produits griffés étant proposés à la vente dans les grands magasins tels le Bon marché, le Printemps, Citadium, dès 2014, puis aux Galeries Lafayette ainsi que sur des sites de e-commerce très fréquentés, tel qu'Asos depuis 2013 et Zalando depuis 2014, accessibles depuis le territoire français.

Les sociétés intimées démontrent également leur participation, depuis juin 2012, à des salons professionnels internationaux en France, mais aussi en Allemagne, en Italie et aux Etats Unis.

Elles établissent également une communication très active sur les réseaux sociaux depuis 2013.

L'ensemble de ces éléments est conforté par la part du budget consacré par les sociétés Sweet Pants à la communication, soit 310.927€ en 2015 et 685.690€ en 2016.

Cette montée en puissance de la marque est à mettre en relation avec l'évolution des chiffres d'affaires réalisés, soit près de trois millions d'euros en 2014 pour la vente en gros (sans prendre en compte le chiffre d'affaires réalisé auparavant par la société Freedom pour 2,8 millions d'euros pour la première moitié de l'année 2014), puis de près de 6 millions d'euros pour la vente en gros et 404.292 euros pour la vente au détail en 2015 (dont plus de 305.000 euros dans les grands magasins français tels que cités ci-dessus), ces chiffres passant respectivement à plus de 8 et 1,1 millions d'euros en 2016.

Les sociétés Sweet Pants démontrent également que les pantalons de jogging revêtus de leur marque ont été commercialisés dans les mêmes enseignes que les produits de la société Canada Goose, durant par exemple la même saison hiver 2015-2016, chez Citadium à [Localité 13] ou encore au Bon [Localité 10] à compter de 2016 et que les deux marques étaient présentes au sein d'un même salon professionnel en Italie en juin 2015. Les deux marques sont au demeurant citées dans les mêmes articles de presse, comme par exemple dans le journal du textile du 21 juin 2016 présentant la rénovation du Bon marché et les grandes marques présentes au sein du nouveau rayon mode-sport.

Par ailleurs, si, comme le relève la société Canada Goose, certaines preuves d'exploitation sont postérieures à la période quinquennale à prendre compte, elles attestent cependant de la reconnaissance acquise par la marque auprès de partenaires prestigieux, telle que construite progressivement à compter de 2012.

De son côté, la société Canada Goose a déposé, dès 1999, sa première marque de l'UE et était titulaire d'un portefeuille de marques conséquent, soit plus d'une trentaine de marques de l'UE, à la date du mois d'octobre 2016, commençant à s'implanter sur le marché français à tout le moins à compter de l'année 2016. Il est également établi que la société Canada Goose a développé depuis plusieurs années une stratégie active dans la défense de ses droits, ayant intenté, entre 2010 et septembre 2016, plus d'une dizaine d'actions dans le monde et en Europe pour défendre sa marque, se présentant elle-même comme attentive à agir contre les contrefacteurs, ce qui atteste de sa vigilance s'agissant de la défense de son portefeuille de marques.

La cour considère, en conséquence, au regard de l'ensemble des circonstances spécifiques rappelées et, notamment, de l'exploitation continue et publique de la marque n°569 depuis 2012, devenue massive à compter de 2014, sur le même marché des vêtements et dans le même créneau spécifique des produits « sportswear » ou mode-sport, que la société Canada Goose avait connaissance de cet usage par les sociétés Sweet Pants, à tout le moins depuis le milieu de l'année 2016, et dès avant le 1er octobre 2016.

Sur les produits et services concernés par la forclusion

La marque n°569 est déposée pour désigner notamment les vêtements et la chapellerie.

S'agissant des vêtements, l'ensemble des preuves d'exploitation portant sur la période pertinente, soit avant le 1er octobre 2016, démontre l'usage de la marque en cause pour commercialiser des pantalons de jogging qui relèvent de cette catégorie.

La cour estime, contrairement à ce que soutient la société Canada Goose, qu'il n'y a pas lieu de considérer, au cas d'espèce, que la catégorie des vêtements visée à l'enregistrement est trop large et qu'il conviendrait de la diviser en sous-catégories autonomes pour retenir que la forclusion ne serait encourue que pour les seuls pantalons de joggings. En effet, aux fins de l'identification d'une sous-catégorie cohérente de produits ou de services susceptible d'être envisagée de manière autonome, le critère de la finalité et de la destination des produits ou des services en cause constitue le critère essentiel, ce qu'il convient d'apprécier de manière concrète (Com., 14 mai 2025, pourvoi n° 23-21.296). Or, rien ne justifie de considérer que les pantalons de jogging constitueraient une sous-catégorie autonome de vêtements, s'agissant de produits d'habillement destinés à être largement portés par une population de tous âges et par le grand public, et non uniquement en vue d'une pratique sportive, ces produits étant en outre commercialisés dans l'ensemble des magasins de prêt à porter.

S'agissant des produits de chapellerie, la cour considère que les quelques captures de pages Instagram datées à compter du mois de septembre 2016 versées par les sociétés Sweet Pants sont insuffisantes à démontrer la réalité et l'intensité de l'usage de la marque pour commercialiser des casquettes et, ainsi, la connaissance que la société Canda Goose avait de cet usage pour les produits de la chapellerie à compter de cette date et qu'elle l'ait ainsi toléré pendant une période de cinq ans.

La cour constate enfin que la marque n°569 n'est pas déposée pour les services de vente de la classe 35, de sorte que l'ensemble des débats portant sur l'usage de cette marque pour désigner des services de vente est sans objet.

Aussi, l'ordonnance déférée doit être confirmée en ce qu'elle a retenu que la forclusion n'était pas encourue pour les produits de la chapellerie, ainsi que pour les services de vente de la classe 35.

Sur les conséquences et la portée de la forclusion

En raison de la tolérance par la société Canada Goose pendant une période de cinq années consécutives de l'usage de la marque postérieure en connaissance de cet usage et pour les produits pour lesquels l'usage a été toléré, soit les vêtements, l'action en nullité et en contrefaçon introduite par cette dernière contre les sociétés Sweet Pants par assignation du 1er octobre 2021 concernant la marque n° 569 pour ces produits doit être déclarée irrecevable.

L'ordonnance déférée doit en conséquence être confirmée de ces chefs.

Sur les autres demandes

La société Canada Goose, partie perdante, sera condamnée aux dépens d'appel et gardera à sa charge les frais non compris dans les dépens qu'elle a exposés à l'occasion de la présente instance, les dispositions prises sur les dépens et frais irrépétibles de première instance étant confirmées.

Enfin, l'équité et la situation des parties commandent de condamner la société Canada Goose à verser à chacune des sociétés Sweet Pants, une somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

Confirme l'ordonnance déférée en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Condamne la société Canada Goose aux dépens d'appel,

Condamne la société Canada Goose à verser à la société Sweet Pants et à la société Sweet Pants Retail, chacune, une somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE

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