CA Aix-en-Provence, ch. 1-5, 5 juin 2025, n° 19/05819
AIX-EN-PROVENCE
Arrêt
Autre
COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
Chambre 1-5
ARRÊT AU FOND
DU 05 JUIN 2025
mm
N° 2025/ 196
Rôle N° RG 19/05819 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BEC5D
[V] [E]
Société EIRL [E] [J]
C/
[K] [X] épouse [G]
[L] [G]
[T] [G]
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
SCP ERMENEUX - CAUCHI & ASSOCIES
SCP COHEN GUEDJ - MONTERO - DAVAL GUEDJ
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Grande Instance de TOULON en date du 21 Mars 2019 enregistré au répertoire général sous le n° 15/01442.
APPELANTS
Monsieur [V] [E]
[Adresse 2]
représenté par Me Agnès ERMENEUX de la SCP ERMENEUX - CAUCHI & ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assisté de Me Sandrine BELTRA, avocat au barreau de DRAGUIGNAN, plaidant
L' EIRL [E] [J], dont le nom commercial est L'OUSTAOU DE [Localité 6], exerçant à l'enseigne AUBERGE LOU PÉTOULET, venant aux droits de la S.A.R.L. L'OUSTAOU DE [Localité 6], prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité au siège social sis, [Adresse 1]
représentée par Me Agnès ERMENEUX de la SCP ERMENEUX - CAUCHI & ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assistée de Me Sandrine BELTRA, avocat au barreau de DRAGUIGNAN, plaidant
INTIMEES
Madame [K] [X] épouse [G]
demeurant [Adresse 3]
représentée par Me Maud DAVAL-GUEDJ de la SCP COHEN GUEDJ - MONTERO - DAVAL GUEDJ, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assistée de Me Jérôme COUTELIER-TAFANI de l'ASSOCIATION COUTELIER, avocat au barreau de DRAGUIGNAN, plaidant
Madame [L] [G]
demeurant [Adresse 3]
représentée par Me Maud DAVAL-GUEDJ de la SCP COHEN GUEDJ - MONTERO - DAVAL GUEDJ, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assistée de Me Jérôme COUTELIER-TAFANI de l'ASSOCIATION COUTELIER, avocat au barreau de DRAGUIGNAN, plaidant
Madame [T] [G]
demeurant [Adresse 3]
représentée par Me Maud DAVAL-GUEDJ de la SCP COHEN GUEDJ - MONTERO - DAVAL GUEDJ, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assistée de Me Jérôme COUTELIER-TAFANI de l'ASSOCIATION COUTELIER, avocat au barreau de DRAGUIGNAN, plaidant
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 18 Mars 2025 en audience publique. Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, Monsieur Marc MAGNON, Président, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Monsieur Marc MAGNON, Président
Madame Patricia HOARAU, Conseiller
Madame Audrey CARPENTIER, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Danielle PANDOLFI.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 05 Juin 2025.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 05 Juin 2025,
Signé par Monsieur Marc MAGNON, Président et Madame Danielle PANDOLFI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
EXPOSÉ DES FAITS ET PROCÉDURE :
M. [V] [E] est locataire suivant bail commercial en date du 27 mars 1984 d' un local situé à [Localité 5], [Adresse 7], dans lequel il exploite un restaurant.
Par acte du 30 juin 2010, M. [V] [E] a donné en location gérance son fonds de commerce de restauration à la SARL l' OUSTAOU DE [Localité 6], représentée par son fils [J] [E].
Les consorts [G], bailleurs, par exploit du 2 mars 2012 ont signifié à M. [E] un congé pour le 30 septembre 2012, avec refus de renouvellement et de paiement d' une indemnité d'éviction, au motif qu'il ne remplissait pas les conditions posées par l'article L 145-1 du code de commerce, par suite de sa radiation du registre du commerce et des sociétés en date du 8 février 2011 et de la non immatriculation du locataire-gérant.
Par acte d' huissier du 26 septembre 2012, M. [V] CASAN1 et la SARL l' OUSTAOU DE [Localité 6] ont fait assigner Mme [K] [G], Melle [L] [G] et M. [T] [G] devant le tribunal de grande instance de TOULON aux fins de voir déclarer nul le congé du 2 mars 2012.
Par jugement du 18 avril 2014, le tribunal a notamment constaté la résiliation du bail commercial liant les parties à la date du 30 septembre 2012, fixé le montant de l' indemnité d' occupation depuis le 30 septembre 2012 au montant du dernier loyer, dit que M. [E] avait droit à une indemnité d' éviction et au maintien dans les lieux jusqu'au paiement de ladite indemnité, et ordonné une expertise confiée à M. [R], aux fins d'en déterminer le montant.
Les consorts [G] ont relevé appel de ce jugement et la Cour d'appe1 d'A1X-EN-PROVENCE par arrêt du 10 septembre 2015 a notamment déclaré recevable mais non fondée l' exception de nullité du congé soulevée par M. [E] et la SARL L' OUSTAOU DE [Localité 6], débouté les consorts [G] de leur demande tendant au constat d' acquisition de la clause résolutoire, condamné M. [E] à payer la somme de 984 euros pour la taxe d'ordures ménagères des années 2012 à 2014 et rejeté la demande de dommages et intérêts de M. [E] et de la SARL L'OUSTAOU DE [Localité 6] pour procédure abusive.
Dans le prolongement de cet arrêt, les consorts [G] ont signifié le 6 octobre 2015 leur droit de repentir. Le Conseil de M. [E] et de la SARL L'OUSTAOU DE [Localité 6] a demandé la remise au rôle de l' affaire pour exécution de la mesure d'expertise.
Auparavant, les bailleurs avaient fait délivrer les 23 et 27 janvier 2015 un commandement de payer la somme de 2488 euros au titre des loyers des mois d'octobre et novembre 2014 au visa de la clause résolutoire.
Par acte d' huissier du 20 février 2015, M. [V] [E] et la SARL L'OUSTAOU DE [Localité 6] ont de nouveau fait assigner Mme [K] [G], Melle [L] [G] et M. [S] [G] devant le tribunal de grande instance de Toulon, au principal aux fins de voir déclarer nul le commandement de payer du 23 janvier 2015.
Par conclusions signifiées le 5 février 2016, M. [V] CASAN1 et la SARL L' OUSTAOU DE [Localité 6] ont saisi le juge de la mise en état d'un incident tendant à faire constater que la cour d' appel d'[Localité 4], par arrêt du 10 septembre 2015, avait tranché le litige lié au commandement délivré les 23 et 27 janvier 2015, et ainsi faire constater l' extinction de l'instance. Le juge de la mise en état par décision du 3 mai 2016 s' est déclaré incompétent.
Les deux procédures, suite aux deux assignations, ont été jointes par ordonnance du juge de la mise en état du 4 octobre 2016.
M. [V] [E] et l' EIRL L'OUSTAOU DE [Localité 6] ont demandé au tribunal':
Au principal, de:
Constater l' intervention volontaire de 1'EIRL L'OUSTAOU DE [Localité 6], venant aux droits de la SARL L' OUSTAOU DE [Localité 6],
Débouter les consorts [G] de l'ensemble de leurs demandes,
Condamner solidairement les consorts [G] à verser à l'EIRL L'OUSTAOU DE [Localité 6] la somme de 300 000 euros au titre du préjudice matériel, à verser à M. [E] la somme de 50 000 euros au titre du préjudice moral, à verser aux deux demandeurs celle de 20 000 euros pour procédure abusive,
Les condamner à une amende civile,
A titre subsidiaire, si le tribunal estimait par extraordinaire qu'i1 n'y a pas autorité de la chose jugée sur la clause résolutoire et les arriérés de loyers et charges :
Déclarer nul le commandement de payer délivré le 23 janvier 2015,
Accorder les plus larges délais de paiement si par extraordinaire des sommes seraient dues et suspendre les effets de la clause résolutoire pour les deux commandements de payer,
Condamner les défendeurs à une amende civile,
Condamner solidairement les consorts [G] à verser à M. [E] et 1'EIRL
L' OUSTAOU DE [Localité 6] Ia somme de 20 000 euros pour procédure abusive,
En tout état de cause :
Condamner solidairement les consorts [G] à payer la somme de 6 000 euros au titre de l' article 700 du code de procédure civile et à payer les entiers dépens.
Monsieur [V] CASAN1 et 1' EIRL L' OUSTAOU DE [Localité 6] exposaient notamment que la Cour d'appel d'AIX EN PROVENCE, par arrêt du 10 septembre 2015, avait déclaré recevables les demandes des consorts [G] concernant le commandement de payer en date des 23 et 27 janvier 2015, les avaient déboutés de leur demande d' acquisition de la clause résolutoire et avait tranché le litige lié au commandement de payer délivré les 23 et 27 janvier 2015. D'où l'autorité de la chose jugée au visa de l'article 480 du code de procédure civile.
Subsidiairement sur le fond, ils soutenaient la nullité du commandement délivré le 23 janvier 2015. M. [V] CASAN1 et L'EIRL L' OUSTAOU DE [Localité 6] précisant qu' en exerçant son droit de repentir par acte du 6 octobre 2015, le bailleur avait offert un nouveau bail et l'élément nouveau du droit de repentir ne saurait faire renaitre la clause résolutoire d' un commandement délivré antérieurement.
Ils ont fait valoir également les moyens suivants':
- De manière intentionnelle, aux fins de nuire, le bailleur a fait délivrer le commandement à une adresse erronée, celle de l'ancienne épouse de M. [E], celle-ci n'ayant jamais exploité le fonds.
- La somme réclamée de 2488 euros pour les loyers des mois d' octobre et novembre 2014 a été régulièrement payée en début de mois.
- L'exercice du droit de repentir entraîne l' obligation pour le bailleur de supporter les frais de la procédure,
- Du fait des procédures intentées, l' établissement a notamment dû refuser des mariages pour les saisons 2013, 2014 et 2015 en raison de l'ignorance de l' issue de la procédure. En conséquence, ils justifient d' un préjudice matériel chiffré à la somme de 300 000 euros, suivant l' attestation comptable produite.
- Ces procédures ont eu un impact sur la santé de M. [E], personne âgée, justifiant une réparation à hauteur de la somme de 50 000 euros au titre du préjudice moral
- Ces multiples procédures destinées à obtenir 1' expulsion du preneur sont caractéristiques de procédures abusives justifiant une réparation à hauteur de la somme de 20 000 euros au titre du préjudice subi.
- Un nouveau commandement de payer la somme de 1244 euros, relative au loyer du mois d'août 2016 et à la taxe d'ordure ménagère des années 2015 et 2016, a été délivré par le bailleur le 10 avril 2017'; les sommes dues ont été réglées dans le délai d`un mois, suivant reçu de la SCP CARROZZA-LEGRAND, en l' espèce le 4 mai 2017. Les sommes ayant été payées dans le délai d'un mois après le commandement de payer, Ia clause résolutoire n'est pas acquise.
- Concernant le mur de clôture, le dépôt d' une demande d'autorisation auprès des services de l'urbanisme a été régularisée et 1'artic1e 5 du bail stipule que le bailleur a pour obligation de tenir les lieux clos. Le bailleur n'a jamais respecté cette obligation contractuelle et M. [E] a dû suppléer la carence de celui-ci. Les bailleurs sont malvenus de demander la destruction du mur sous astreinte
Les consorts [K] [G], [L][G] et [T] [G] ont demandé au tribunal de :
Déclarer la SARL L'OUSTAOU DE [Localité 6] irrecevable en ses demandes,
DECLARER irrecevab1e l' EIRL L'OUSTAOU DE [Localité 6] en ses demandes,
DECLARER recevable la demande des consorts [G] tendant à l' acquisition de la clause résolutoire,
JUGER que le commandement de payer en date des 23 et 27 janvier 2015 est parfaitement régulier et que M. [V] [E] et la SARL L' OUSTAOU DE [Localité 6] ne se sont toujours pas acquittés de la somme correspondante,
CONSTATER la résiliation du bail par application de la clause résolutoire un mois après le commandement de payer, soit le 27 février 2015,
FIXER une indemnité d'occupation à dater du 27 février 2015 à hauteur du loyer en cours et dans les mêmes conditions,
Subsidiairement, prononcer la résiliation judiciaire du bail commercial en date du 27 mars 1984
En toute hypothèse,
CONDAMNER M. CASAN1à payer1a somme de 2488 euros au titre des loyers impayés pour les deux mois de l' année 2014,
CONDAMNER in solidum M. [V] [E] et la SARL L4 OUSTAOU DE [Localité 6] à démolir le mur de clôture édifié illégalement par leurs soins sur la propriété des consorts [G], et ce sous astreinte de 500 euros par jour de retard à compter de la signification de la décision à intervenir,
DEBOUTER M. [V] [E] et la SARL L'OUSTAOU DE [Localité 6] de l' ensemble de leurs demandes,
Condamner M. [V] [E] et la SARL IJOUSTAOU DE [Localité 6] à payer la somme de 5000 euros au titre de l' article 700 du code de procédure civile et à payer les entiers dépens distraits au profit de Me LACOMBE-BRISOU.
Les consorts [G] ont notamment fait état des moyens et arguments suivants':
- La SARL L'OUSTAOU DE [Localité 6] a été radiée du registre du commerce et des sociétés le 8 juin 2017'; elle est donc dépourvue du droit d'agir et doit être déclarée irrecevable en ses demandes. Aucun élément n'' est fourni aux fins de justifier le fait que l' EIRL viendrait aux droits de la SARL. L' EIRL L'OUSTAOU DE [Localité 6] est également irrecevable en ses demandes.
- L' autorité de la chose jugée n' est pas fondée, un élément nouveau étant intervenu postérieurement à l'arrêt de la cour d' appel d'[Localité 4]-EN- PROVENCE du 10 septembre 2015, l'exercice du droit de repentir. Leur demande de résiliation judiciaire du bail est fondée, le locataire ne s' étant pas acquitté des sommes mentionnées dans le commandement de payer des 23 et 27 janvier 2015.
- Le moyen tiré de la nullité du commandement de payer est contestable car le commandement n'avait pas à être notifié au locataire-gérant, le bailleur n' étant pas lié contractuellement à ce dernier.
- Les différentes demandes à caractère indemnitaire de la SARL L' OUSTAOU DE [Localité 6] ne sont justifiées ni dans leur principe ni dans leur quantum, d'autant que le bailleur n'est pas lié contractuellement à la SARL L' OUSTAOU DE [Localité 6].
- Un nouveau commandement de payer du 10 avril 2017 a été délivré pour non-paiement d'un arriéré de loyer et taxes d'ordures ménagères qui justifie la résiliation du bail par le jeu de la clause résolutoire.
- La SARL L'OUSTAOU DE [Localité 6] a construit sans autorisation un mur de clôture constaté par un PV d' infraction du 14 avril 2017, en contradiction avec l' article 5 du bail, qui devra être démoli sous astreinte.
Par jugement du 21 mars 2019, le tribunal de grande instance de TOULON a'statué comme suit:
CONSTATE l' intervention volontaire de l' EIRL L' OUSTAOU DE [Localité 6], venant aux droits de la SARL L'OUSTAOU DE [Localité 6], et la déclare recevable en ses demandes ;
DECLARE irrecevables les demandes des consorts [G] d' acquisition de la clause résolutoire, de résiliation du bail, de paiement d' arriérés de loyers et de fixation d' une indemnité d' occupation sur le fondement du commandement de payer en date des 23 et 27 janvier 2015';
DECLARE irrecevable la demande des consorts [G] de paiement de la somme de 2 488 euros au titre des loyers impayés pour les deux mois de l'année 2014;
DEBOUTE les consorts [G] de leur demande de résiliation judiciaire du bail sur le fondement du commandement de payer en date du 10 avril 2017 ;
CONDAMNE in solidum M. [V] [E] et L'EIRL L' OUSTAOU DE [Localité 6] à démolir le mur de clôture édifié par leurs soins sur la propriété des consorts [G], et ce sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la signification du jugement ;
DIT n' y avoir lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
DIT que chaque partie supportera la charge des dépens qu'elle a engendrés.
Aux motifs que':
- L' EIRL L'OUSTAOU DE [Localité 6], société régulièrement constituée, représentée par M. [J] [E], vient aux droits de la SARL L' OUSTAOU DE [Localité 6], et est intervenue volontairement dans la procédure suivant conclusions signifiées le 12 décembre 2017 et le 16 janvier 2018'; ses demandes sont recevables.
- Sur le commandement de payer en date des 23 et 27 janvier 2015': la lecture de l'arrêt montre que la cour a reçu la demande des consorts [G] de «' constater la résiliation du bail par application de 1a clause résolutoire notifiée les 23 et 27 janvier 2015'». Cependant la cour a débouté les consorts [G] de la demande tendant au constat d'acquisition de cette clause résolutoire.
- Sur la demande de paiement de la somme de 2 488 euros au titre des loyers impayés pour les deux mois de l'année 2014, reçue par la cour en son arrêt, cette dernière n'a accordé aucune somme aux consorts [G] en la matière.
- Le litige relatif au commandement de payer des 23 et 27 janvier 2015, et à ses conséquences juridiques, a été tranché par la cour et au regard de 1'autorité de la chose jugée, les demandes des consorts [G] d' acquisition de la clause résolutoire, de résiliation de bail, de paiement d'arriérés de loyer et de fixation d' indemnité d'occupation sur le fondement du commandement de payer en date des 23 et 27 janvier 2015 sont irrecevables, de même que la demande, en toute hypothèse, de paiement de la somme de 2 488 euros au titre des loyers impayés pour les deux mois de l' année 2014.
- Le caractère abusif dans l'exercice de leurs droits par les consorts [G] n' est pas suffisamment démontré, même s'i1 apparaît au vu des relevés de comptes bancaires de la Banque Populaire que Mme [K] [G] a perçu en temps voulu les loyers d'octobre et novembre 2014 et qu'ainsi le commandement de payer qui a suivi n' est pas fondé. Les demandeurs cependant ne contestent pas qu' i1 y a eu un retard dans le paiement du loyer du mois d'août 2016, suite auquel un commandement de payer a été délivré le 10 avril 2017, une régularisation étant cependant intervenue le 4 mai 2017, dans le délai d'un mois, entre les mains de l'huissier ( pièce 26). La clause résolutoire n'est pas acquise.
- S'agissant des demandes indemnitaires de M [E] et de l'EIRL L'OUSTAOU DE [Localité 6], le caractère abusif du commandement de payer délivré n'est pas suffisamment caractérisé.
- En termes de réparations, les demandeurs sollicitent des sommes exorbitantes pour lesquelles les justificatifs font défaut : la seule attestation comptable pour les années 2012 à 2014 présentée en demande pour étayer un préjudice financier ne permet pas de savoir si la baisse du chiffre d'affaires n'est pas liée à une conjoncture économique difficile. Par ailleurs cette attestation, au vu des baisses de chiffre d'affaires mentionnées, ne permet pas de retrouver la somme de 300 000 euros réclamée à titre de réparation.
Le préjudice moral invoqué par M. [E], avec une demande de réparation à hauteur de 50 000 euros, ne repose sur aucune pièce probante.
- Sur le mur de clôture': il ressort d' un procès-verbal d'infraction dressé par la commune de [Localité 5] le 14 avril 2017 et produit aux débats que M. [E] a dressé un mur de clôture sans déclaration préalable. L'artic1e 5 du bail stipule que les travaux réalisés par le locataire ne doivent pas nuire à 1'aspect extérieur de l'immeuble. Un mur de clôture entre dans la catégorie des ouvrages susceptibles de nuire à l'aspect extérieur de l'immeuble. Par conséquent, l' autorisation du bailleur était nécessaire, nonobstant la régularisation administrative obtenue par le locataire. La demande de destruction du mur sous astreinte est donc fondée.
Par déclaration du 9 avril 2019, [V] [E] et l'EIRL [E] [J] ont relevé appel de cette décision.
Par ordonnance d'incident du 21 octobre 2022, le conseiller de la mise en état s'est déclaré incompétent pour connaître de l'irrecevabilité des demandes des consorts [G] au visa des articles 564 et 910-4 du code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture de la mise en état est intervenue le 4 mars 2025.
Au-delà de ce qui sera repris pour les besoins de la discussion et faisant application en l'espèce des dispositions de l'article 455 du Code de procédure civile, la cour entend se référer pour l'exposé plus ample des moyens et prétentions des parties aux dernières de leurs écritures visées ci-dessous.
PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES:
Vu les conclusions notifiées par [V] [E] et l'EIRL [E] [J] le 28 février 2025 tendant à':
Vu l'article 564 du code de procédure civile et 909, 910-4 du code de procédure civile
Déclarer irrecevables des demandes nouvelles présentées par les consorts [G] quant à la demande de nullité du droit de repentir, la demande de prescription du paiement d'une indemnité d'éviction et la demande de résiliation du bail commercial en lien avec la construction du mur de clôture.
A Titre principal
Débouter les consorts [G] de l'ensemble de leurs demandes de résiliation de bail et d'acquisition de la clause résolutoire.
CONFIRMER LE JUGEMENT DU 21 MARS 2019 sur les chefs de demandes suivants :
- Constate l'intervention volontaire de l'EIRL L'OUSTAOU DE [Localité 6] venant aux droits de la SARL L'OUSTAOU DE [Localité 6] et la déclare recevable en ses demandes
- Déclare irrecevables les demandes des consorts [G] d'acquisition de la clause résolutoire, de résiliation de bail, de paiement d'arriérés de loyer et de fixation d'indemnité d'occupation sur le fondement du commandement de payer en date des 23 et 27 janvier 2015.
- Déclare irrecevable la demande des consorts [G] de paiement de la somme de 2488 euros au titre des loyers impayés pour les deux mois de l'année 2014.
- Déboute les consorts [G] de leur demande de résiliation judiciaire du bail sur le fondement du commandement de payer en date du 10 avril 2017.
INFIRMER la décision querellée sur les demandes indemnitaires et sur l'édification du mur de soutènement ;
Condamner solidairement les consorts [G] à la somme de 20.000 euros pour procédure abusive ;
Condamner solidairement les consorts [G] à la somme de 50.000 euros pour le préjudice financier correspondant à l'ensemble des frais liés à l'exercice du droit de repentir ;
Condamner solidairement les consorts [G] a la somme de 20.000 euros au profit de Monsieur [V] [E] pour préjudice moral ;
INFIRMER la décision querellée quant à l'astreinte sur le mur de clôture et à la destruction du mur de soutènement
DECLARER qu'il n' y a pas lieu à destruction du mur de soutènement.
DECLARER que le mur de soutènement ne porte pas atteinte à l'aspect extérieur et que l'autorisation du bailleur n'était pas nécessaire ;
Confirmer l' autorité de la chose jugée sur le règlement des loyers et des taxes d'ordures ménagères, concernant l'année 2014.
Débouter les consorts [G] de leurs demandes concernant la nullité du droit de repentir et de résiliation du bail concernant l'édification du mur de clôture et la résiliation concernant les loyers de 2014.
A TITRE SUBSIDIAIRE
Si la nullité du droit de repentir devait être ordonnée,
Condamner solidairement les consorts [G] à verser une indemnité d'éviction de 600.000 euros à Monsieur [V] [E] et l'EIRL L'OUSTAOU DE [Localité 6].
A TITRE SUBSIDIAIRE Si la démolition du mur de soutènement devait être confirmée,
ACCORDER un délai de six mois pour la destruction du mur de soutènement, concernant uniquement la partie rénovée.
EN TOUTES HYPOTHESES
Condamner solidairement les consorts [G] à la somme de 6.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Les condamner aux entiers dépens.
Vu les conclusions d'appel incident notifiées par les consorts [G] le 18 décembre 2024 tendant à':
Vu les articles L.145-1 et suivants du Code de commerce ;
Vu le contrat de bail du 27 mars 1984 ;
Vu le commandement de payer délivré les 23 et 27 janvier 2015 ;
Vu l'article 700 du Code de procédure civile ;
JUGER IRRECEVABLE l'action de l'EIRL L'OUSTAOU DE [Localité 6].
CONFIRMER le jugement du Tribunal de grande instance de Toulon en ce qu'il a :
1 Rejeté les demandes indemnitaires de Monsieur [E] et de l'EIRL L'OUSTAOU DE [Localité 6] ;
2 Condamné in solidum Monsieur [E] et l'EIRL L'OUSTAOU DE [Localité 6] à démolir le mur clôture édifié par leurs soins sur la propriété des consorts [G], sous astreinte de 100€ par jour de retard à compter de la signification du jugement ;
L'INFIRMER POUR LE SURPLUS, Y AJOUTANT,
Pour le cas où la Cour d'appel considérerait que le droit de repentir est valable :
A titre principal :
CONSTATER l'acquisition de la clause résolutoire pour défaut de paiement du commandement de payer délivré les 23 et 27 janvier 2015, et subsidiairement PRONONCER la résiliation du bail à compter de la décision à intervenir en l'état de l'infraction du preneur à son obligation de payer les loyers et charges.
En conséquence, JUGER que le droit de repentir exercé sous réserve de la présente procédure est sans effet.
JUGER que Monsieur [E] est occupant sans droit ni titre.
A titre subsidiaire :
PRONONCER la résiliation du bail commercial renouvelé le 7 octobre 2015 à compter de la décision à intervenir en l'état de l'infraction du preneur pour avoir réalisé un mur de clôture sans avoir sollicité l'autorisation du bailleur,
Pour le cas où la Cour d'appel considérerait que le droit de repentir devrait être annulé:
A titre principal :
JUGER que le droit de repentir exercé sous réserve de la procédure en cours est nul et de nul effet.
JUGER que le preneur est occupant sans droit ni titre par l'effet du congé délivré le 2 mars 2012.
JUGER prescrite l'action en paiement d'une indemnité d'éviction.
En conséquence,
JUGER que Monsieur [E] est occupant sans droit ni titre et a perdu son droit au paiement d'une indemnité d'éviction.
A titre subsidiaire :
PRONONCER la résiliation du bail à compter de la décision à intervenir en l'état des infractions du preneur à son obligation de payer les loyers et charges d'une part, et pour avoir réalisé un mur de clôture sans avoir sollicité l'autorisation du bailleur.
JUGER que Monsieur [E] a perdu son droit au paiement d'une indemnité d'éviction et partant qu'il est occupant sans droit ni titre.
En toute hypothèse :
ORDONNER l'expulsion de Monsieur [E] et de tout occupant les lieux de son chef avec le concours de la force publique et d'un serrurier, sous astreinte de 500€ par jour de retard à compter du prononcé de l'arrêt jusqu'au départ définitif.
ORDONNER le transport des meubles garnissant les lieux loués dans un garde-meuble désigné par le bailleur en garantie des sommes dues.
CONDAMNER Monsieur [E] à verser la somme de 2.488€ au titre des loyers impayés ou indemnités d'éviction de 2014
FIXER le montant de l'indemnité d'occupation à la somme de 1.244€.
CONDAMNER in solidum Monsieur [E] et l'EIRL L'OUSTAOU DE [Localité 6] au paiement de la somme de 4.000€ aux consorts [G] au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
Les CONDAMNER aux entiers dépens, ceux d'appel distraits au profit de la SCP COHEN GUEDJ MONTERO DAVAL-GUEDJ sur son offre de droit.
MOTIVATION':
Sur la saisine de la cour :
A titre liminaire, il convient de rappeler que selon les dispositions de l'article 954 alinéas 1 à 3 du code de procédure civile, les conclusions d'appel doivent formuler expressément les prétentions des parties et les moyens de fait et de droit sur lesquels chacune de ces prétentions est fondée; que les prétentions sont récapitulées sous forme de dispositif et que la cour ne statue que sur celles qui y sont énoncées.
Les demandes de «constater» «'déclarer'» ou même «'juger» lorsqu'elles s'analysent en rappels de moyens ne constituent pas de telles prétentions et ne saisissent pas la cour qui examinera en revanche les seuls moyens invoqués dans la discussion au soutien des prétentions figurant au dispositif des conclusions.
Sur la recevabilité de l'action de l'EIRL L'OUSTAOU DE [Localité 6]:
Les consorts [G] soulèvent l'irrecevabilité de l'action de l'EIRL ( entreprise individuelle à responsabilité limitée) l'OUSTAOU DE [Localité 6], dès lors qu'il n'existe aucun lien juridique entre cette entité, locataire-gérant, et les intimés, qui sont uniquement liés par un bail commercial avec Monsieur [V] [E].
Les appelants répliquent que l'EIRL L'OUSTAOU DE [Localité 6] vient aux droits de la SARL L'OUSTAOU DE [Localité 6] toutes les deux représentées par Monsieur [J] [E] , fils de Monsieur [V] [E].
Force est de constater qu' un premier contrat de location gérance a été passé entre M. [V] [E] et la SARL L'OUSTAOU DE [Localité 6], le 30 juin 2010'; que ladite société a cessé son activité'et a été dissoute le 31 août 2016'; qu'un nouveau contrat de location gérance a été signé le 21 octobre 2016 entre l'EIRL [E] [J] et M [V] [E]'; que selon l'extrait K bis du 19 janvier 2017 versé aux débats, le nom commercial de l'EIRL [E] [J] est L' OUSTAOU DE [Localité 6]'; que c'est bien l'EIRL [E] [J], immatriculée au registre du commerce et des sociétés sous le numéro 523'665'925 depuis le 8 novembre 2016 et qui a pour raison commerciale L' OUSTAOU DE [Localité 6] qui est titulaire du contrat de location gérance du 21 octobre 2016.
L' EIRL ( entreprise individuelle à responsabilité limitée) [E] [J] exerçant son activité sous le nom commercial L' OUSTAOU DE [Localité 6] forme des demandes indemnitaires à l'encontre des bailleurs. Toutefois, l'EIRL n'est pas une société individuelle et n'a pas la personnalité morale, comme le rappelle l'article L 526-6 du code de commerce . L'EIRL permet à une personne physique d'exercer une activité professionnelle individuelle en son nom propre, tout en séparant son patrimoine personnel de son patrimoine professionnel, en créant un patrimoine d'affectation. Dès lors, l'action ou la défense à l'action ne peuvent être exercées que par l'entrepreneur individuel lui-même. En conséquence, «'l'EIRL L'OUSTAOU DE [Localité 6]'», pas plus d'ailleurs que «'l'EIRL [E] [J]'», ne sauraient venir aux droits de la SARL L'OUSTAOU DE [Localité 6].
Il convient dans ces conditions de déclarer irrecevable l'intervention volontaire de l'EIRL L'OUSTAOU DE [Localité 6] et d'infirmer le jugement de ce chef.
Sur l'irrecevabilité des demandes nouvelles:
M [V] [E] et l'EIRL [E] [J] soulèvent l'irrecevabilité des demandes nouvelles portées par les consorts [G] dans leur deuxième jeu de conclusions en date du 29 avril 2020, à la fois sur le fondement de l'ancien article 910-4 du code de procédure civile et sur le fondement de l'article 564 du même code.
Il s'agit selon les appelants des demandes des intimés tendant à voir juger que le droit de repentir exercé sous réserve de la procédure en cours est nul et de nul effet, à voir juger prescrite l'action en paiement d'une indemnité d'éviction et de la demande tendant à voir prononcer la résiliation du bail pour construction d'un mur de clôture, sans autorisation du bailleur.
Les consorts [G] répliquent que la demande résiliation du bail pour construction d'un mur de clôture sans autorisation du bailleur n'est pas nouvelle , en application de l'article 565 du code de procédure civile , puisqu'elle tend aux mêmes fins que la demande de résiliation du bail pour défaut de paiement de loyers.
S'agissant de la demande d'annulation de l'exercice du droit de repentir , les bailleurs font valoir qu'ils n'ont pas véritablement formulé de demande en ce sens'; que dans leur commandement du mois de janvier 2015, ils ont indiqué qu'ils exerçaient leur droit de repentir «' sous réserve de l'instance en cours par devant le tribunal de grande instance de Toulon sous le RG n° 15/01442'» instance relative au commandement de payer des 23 et 27 janvier 2015'; que si la cour devait estimer que les concluants ne pouvaient exercer un droit de repentir assorti d'une réserve, en raison de son caractère irrévocable, les consorts [G] demandent simplement de tirer les conséquences de l'argumentation des appelants et, partant, d'annuler le droit de repentir et de remettre les parties dans la situation antérieure, à savoir en l'état du congé sans offre de renouvellement délivré .
Les intimés ajoutent que les appelants ne peuvent valablement fonder leur argumentation sur le droit de repentir en faisant abstraction de la réserve qui était expressément indiquée à l'acte.
Ils considèrent que les articles 564 et 910-4 du code de procédure civile suivant lesquels les parties doivent, à peine d'irrecevabilité , présenter l'ensemble de leurs prétentions sur le fond dès leurs premières conclusions , ne sauraient valablement faire échec à leur demande de résiliation, ainsi qu'à la demande d'expulsion, peu importe que ces derniers développent un moyen nouveau, tiré de la nullité du droit de repentir, au soutien de leurs prétentions, ce qui n'est pas prohibé par les articles susvisés'; qu'en outre, les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge'; la demande de nullité du droit de repentir tend à la même fin que les demandes originaires, mettre fin au bail. Par ailleurs, il a été jugé que les moyens tirés de la nullité d'un acte constituent une défense au fond pouvant être invoquée en tout état de cause ( Cassation com. 26 novembre 2002, n° 99-12.611).
S'agissant de la demande de prescription de la demande d'indemnité d'éviction, en cas d'annulation du droit de repentir, ils font valoir que les dispositions de l'article 566 du code de procédure civile permettent aux parties d'ajouter à la demande originaire les demandes qui en sont l'accessoire, la conséquence ou le complément, seule la prescription de la demande d'indemnité d'éviction étant de nature à fonder la demande d' expulsion du preneur formée d'ores et déjà en première instance , car, sans cela, le preneur aurait droit au maintien dans les lieux jusqu'au paiement de l'indemnité d'éviction.
Enfin , les intimés se prévalent des dispositions de l'article 563 du code de procédure civile pour estimer que l'article 910-4 ne fait aucunement obstacle à ce que les parties invoquent des moyens nouveaux au cours de la procédure d'appel.
SUR CE':
En droit, selon l'article 563 du code de procédure civile, pour justifier en appel les prétentions qu'elles avaient soumises au premier juge, les parties peuvent invoquer des moyens nouveaux, produire de nouvelles pièces ou proposer de nouvelles preuves.
Selon l'article 564 du même code, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait.
Aux termes de l'article 565 du même code, les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge même si leur fondement juridique est différent.
L' article 566 précise que les parties ne peuvent ajouter aux prétentions soumises au premier juge que les demandes qui en sont l'accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire.
Aux termes de l'article 567, les demandes reconventionnelles sont également recevables en appel.
L'article 910-4 ajoute qu' à peine d'irrecevabilité, relevée d'office, les parties doivent présenter, dès les conclusions mentionnées aux articles 905-2 et 908'à 910, l'ensemble de leurs prétentions sur le fond. L'irrecevabilité peut également être invoquée par la partie contre laquelle sont formées des prétentions ultérieures.
Néanmoins, et sans préjudice de l'alinéa 2 de l'article 802, demeurent recevables, dans les limites des chefs du jugement critiqués, les prétentions destinées à répliquer aux conclusions et pièces adverses ou à faire juger les questions nées, postérieurement aux premières conclusions, de l'intervention d'un tiers ou de la survenance ou de la révélation d'un fait.
Ce texte ne fait pas obstacle à la présentation de moyens nouveaux dans des conclusions postérieures.
En l'espèce, devant le premier juge, les bailleurs ont notamment demandé de constater la résiliation du bail, la clause résolutoire ayant produit ses effets un mois après le commandement de payer du 27 janvier 2015, soit à compter du 27 février 2015, le preneur ne s'étant pas acquitté des causes du commandement de payer'; subsidiairement de prononcer la résiliation judiciaire du bail commercial, pour le même motif. Ils ont demandé également de condamner in solidum M [V] [E] et la SARL L'OUSTAOU DE [Localité 6] à démolir le mur de clôture édifié illégalement par leurs soins sur la propriété des consorts [G], et ce sous astreinte de 500 euros par jour de retard.
Dans leurs premières conclusions d'intimés, en date du 17 septembre 2019, les consorts [G] ont maintenu leur demandes de résolution du bail par le jeu de la clause résolutoire et, à défaut, de résiliation du bail pour impayé de loyers, et de démolition du mur de clôture construit par le preneur sans autorisation. Dans leurs conclusions du 29 avril 2020, en réponse à celles des appelants du 16 décembre 2019, les consorts [G] ont reformulé leurs prétentions en réponse au moyen soulevé par les appelants tenant à l'irrévocabilité du droit de repentir et à la demande de paiement d'une indemnité d'éviction en cas d' invalidation du droit de repentir.
Leurs conclusions étaient ainsi modifiées':
Pour le cas où la cour d'appel considérerait que le droit de repentir est valable :
A titre principal :
CONSTATER l' acquisition de la clause résolutoire pour défaut de paiement du commandement de payer délivré les 23 et 27 janvier 2015, et subsidiairement PRONONCER la résiliation du bail à compter de la décision a intervenir en l' état de 1' infraction du preneur à son obligation de payer les loyers et charges,
En conséquence,
DIRE ET JUGER que le droit de repentir exercé sous réserve de la présente procédure est sans effet ;
DIRE ET JUGER que Monsieur [E] est occupant sans droit ni titre
A titre subsidiaire :
PRONONCER la résiliation du bail commercial renouvelé le 7 octobre 2015 à compter de la décision à intervenir en l' état de 1'infraction du preneur pour avoir réalisé un mur de clôture sans avoir sollicité 1' autorisation du bailleur,
Pour le cas où la Cour d'appel considérerait que le droit de repentir devrait être annulé:
A titre principal :
DIRE ET JUGER que le droit de repentir exercé sous réserve de la procédure en cours est nul et de nul effet ;
DIRE ET JUGER que le preneur est occupant sans droit ni titre par l'effet du congé délivré le 2 mars 2012 ;
JUGER prescrite l'action en paiement d'une indemnité d'éviction ;
En conséquence, DIRE ET JUGER que Monsieur [E], occupant sans droit ni titre, a perdu son droit au paiement d'une indemnité d'éviction ;
A titre subsidiaire :
PRONONCER la résiliation du bail à compter de la décision à intervenir en l'état des infractions du preneur à son obligation de payer les loyers et charges d'une part, et pour avoir réalisé un mur de clôture sans avoir sollicité l'autorisation du bailleur ;
DIRE ET JUGER que Monsieur [E] a perdu son droit au paiement d'une indemnité d'éviction et, partant, qu'il est occupant sans droit ni titre ;
Ainsi, la demande formulée à hauteur d'appel tendant à voir prononcer la résiliation du bail en raison de la construction du mur de clôture sans autorisation du bailleur n'est pas nouvelle et tend aux mêmes fins que la demande de résolution ou résiliation du bail pour non régularisation du commandement de payer dans le délai d'un mois et loyers impayés .
S'agissant de la nullité du droit de repentir, il s'agit non d'une prétention , mais d'un moyen opposé par les intimés au moyen des appelants tendant à faire juger que le caractère irrévocable du droit de repentir fait obstacle au jeu de la clause résolutoire sur la base du commandement de payer délivré pour des arriérés de loyers antérieurs à l'exercice de ce droit. Il ne s'agit donc pas d'une demande nouvelle , mais d'une défense au fond opposée aux appelants.
De même, pour le cas où la cour invaliderait le droit de repentir, les parties seraient replacées dans la situation de rapports de droit issue de l'arrêt du 10 septembre 2015 qui a confirmé le jugement du 18 avril 2014 en toutes ses dispositions, notamment en ce qu'il a jugé que M. [V] [E] avait droit à une indemnité d'éviction.
Dans cette hypothèse, le preneur sollicite, à titre subsidiaire, la condamnation des bailleurs à lui verser une indemnité d'éviction de 600'000,00 euros, prétention à laquelle les bailleurs opposent la prescription biennale de l'article L 145-60 du code de commerce qui a recommencé à courir à compter de l'arrêt de la cour d'appel du 10 septembre 2015. Or, la prescription constitue une fin de non-recevoir qui peut être proposée en tout état de cause et ne peut être qualifiée de demande nouvelle, au sens de l'article 564 du code de procédure civile.
Le moyen soulevé par les appelants tiré de l'irrecevabilité des demandes nouvelles et/ou tardives des consorts [G] est en conséquence rejeté.
Sur l'effet de l'exercice par les bailleurs de leur droit de repentir sur la poursuite d'une instance en résolution ou résiliation du bail renouvelé':
Selon l'article L 145-58 du code de commerce, le propriétaire peut, jusqu'à l'expiration d'un délai de quinze jours à compter de la date à laquelle la décision est passée en force de chose jugée, se soustraire au paiement de l'indemnité due en cas d'éviction, à charge pour lui de supporter les frais de l'instance et de consentir au renouvellement du bail dont les conditions, en cas de désaccord, sont fixées conformément aux dispositions réglementaires prises à cet effet. Ce droit ne peut être exercé qu'autant que le locataire est encore dans les lieux et n'a pas déjà loué ou acheté un autre immeuble destiné à sa réinstallation.
En application de l'article L145-59 du même code, la décision du propriétaire de se soustraire au paiement de l'indemnité d'éviction, dans les conditions prévues au dernier alinéa de l'article'L. 145-58, est irrévocable.
Il s'ensuit que l'exercice sans réserve du droit de repentir, impliquant l'acceptation irrévocable du renouvellement du bail, fait obstacle à la poursuite d'une instance en résiliation engagée avant l'exercice de ce droit, (Cassation 3ème chambre civile 24 janvier 2019, Pourvoi n° 17-11.010).
Les appelants soutiennent ainsi, au visa de l'article L 145-59, que le droit de repentir une fois exercé est irrévocable et fait obstacle à la poursuite de l'action en résolution ou résiliation du bail, d'autant que la demande de résolution du bail par le jeu de la clause résolutoire se heurte à l'autorité de la chose jugée, la cour ayant reçu mais débouté les consorts [G] de cette demande.
Les consorts [G] répliquent notamment que la notification du droit de repentir était assortie d'une réserve tenant à l'issue de la procédure en cours devant le tribunal de grande instance de Toulon, suite au commandement de payer délivré les 23 et 27 janvier 2015, et qu'en outre l'autorité de la chose jugée attachée à l'arrêt de la cour d'appel du 10 septembre 2015, se heurte à l'exercice , postérieurement à cette décision, du droit de repentir des intimés qui constitue un élément nouveau'; qu'en outre, ils sollicitent à titre subsidiaire la résiliation judiciaire du bail sur le fondement de l'article 1184 ancien du code civil en raison des impayés, demande à laquelle il ne saurait être opposé une quelconque autorité de la chose jugée.
Au cas d'espèce , les consorts [G] ont par acte d'huissier du 6 octobre 2015 exercé leur droit de repentir dans les termes suivants':
«' Conformément à l'article L 145-58 du code de commerce, le bailleur entend exercer son droit de repentir et accepte ainsi de consentir au renouvellement du bail, sous réserve de l'instance en cours par devant le tribunal de grande instance de TOULON sous le RG n° 15/01442.
En conséquence , il offre au locataire de renouveler le bail des locaux commerciaux qu'il lui avait loués, et ce aux conditions suivantes':
Le nouveau bail prend effet du jour de la présente notification pour une durée de neuf ans , en application de l'article L 145-12 du code de commerce';
Le loyer proposé est de 36.000,00 euros par an , soit 3000 euros par mois, à compter de ce jour, et, à défaut d'accord sur cette proposition, fixé judiciairement selon la procédure prévue aux articles R 145-24 et suivants du code de commerce, le bailleur se réservant la faculté de notifier un mémoire préalable justifiant le chiffre demandé';
Les clauses du bail expiré sont reportées dans le nouveau bail, sauf celle relative au prix du loyer.
En outre, le bailleur accepte de prendre en charge tous les frais de l'instance en indemnité d'éviction'».
Par courrier de son conseil du 21 octobre 2015, le preneur a accepté le principe du renouvellement du bail mais refusé le montant du loyer, au motif que le loyer du bail renouvelé ne pouvait être déplafonné. Aucune des parties n'a saisi le juge des loyers commerciaux pour faire fixer le loyer du bail renouvelé, à un niveau différent de celui du bail expiré, en application des articles R 145-24 et suivants du code de commerce. Par la suite, le loyer du bail renouvelé a été révisé pour être porté à la somme de 1442,50 euros, à compter du mois de juillet 2022, par accord des parties, comme l'indique la pièce n° 55 des appelants.
Etant rappelé que l'exercice par le propriétaire de son droit de repentir entraîne le renouvellement du bail dont il demandait la résiliation et que la notification du repentir constitue, à compter de sa date, un renouvellement du bail expiré et non une simple offre de renouvellement, l' acte de notification du 6 octobre 2015, confirme la décision irrévocable des propriétaires bailleurs de se soustraire au paiement de l'indemnité d'éviction, par le renouvellement du bail, en dépit de la réserve tenant à la procédure ouverte devant le tribunal sur le commandement de payer délivré les 23 et 27 janvier 2015.
Le caractère irrévocable de l'exercice du droit de repentir fait ainsi obstacle à la poursuite de l'action en résolution ou résiliation du bail expiré pour non-paiement des loyers visés par le commandement de payer délivré les 23 et 27 janvier 2015 à [V] [E] et à son ex épouse, et portant sur la somme de 2488,00 euros, montant des loyers d'octobre et novembre 2014, et sur la somme de 984 euros ( 323+329 + 332 euros), montant des taxes d'ordures ménagères des années 2012, 2013 et 2014.
En outre, s'agissant de la demande de paiement des loyers des mois d' octobre et novembre 2014, la demande des intimés de constat de la résolution du bail par le jeu de la clause résolutoire se heurte à l'autorité de la chose jugée, puisque les consorts [G] ont porté cette demande devant la cour , au cours de l'instance ouverte sur appel du jugement du 18 avril 2014.
En droit, aux termes de l'article Article 1355 du code civil, dans sa rédaction applicable depuis l'entrée en vigueur de l'ordonnance 2016-131 du 10 février 2016, pour que l'autorité de la chose jugée puisse être opposée, il faut, selon ces dispositions , que la chose demandée soit la même, que la demande soit fondée sur la même cause et que la demande soit entre les mêmes parties et formée par elles ou contre elles en la même qualité.
D'autre part, et conformément à l'article 480 du code de procédure civile, l'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui fait l'objet d' un jugement et a été tranché dans son dispositif (Cass. Ass. plén., 13 mars 2009, Bull. Ass. plén., n°3).
Par arrêt du 10 septembre 2015, la cour d'appel d'Aix en Provence a déclaré recevable la demande des consorts [G] tendant à constater la résiliation du bail, par application de la clause résolutoire notifiée par le commandement de payer des 23 et 27 janvier 2015. La cour a relevé que cette demande qui vise à mettre fin au bail sans paiement d'indemnité, était recevable par application de l'article 565 du code de procédure civile mais a débouté le bailleur de cette prétention au motif que le bail, ayant été résilié à la date d'effet du congé, soit le 30 septembre 2012, M [V] [E] était depuis cette date occupant bénéficiant du droit au maintien dans les lieux , dans l'attente du paiement de l'indemnité d'éviction et non plus locataire, de sorte que les loyers n'étant plus dus, la clause résolutoire contractuelle ne pouvait plus être utilement mise en 'uvre. La cour a ainsi rejeté la demande tendant au constat de la résiliation du bail par l'effet de cette clause, pour non-paiement des loyers et de la taxe d'enlèvement des ordures ménagères visés par le commandement de payer de janvier 2015.
Les consorts [G] qui formulent la même demande dans le cadre de la présente instance ne peuvent à cet égard invoquer le fait nouveau que constituerait l'exercice du droit de repentir du bailleur pour faire échec à l'autorité de la chose jugée sur ce point, la chose demandée étant la même, la demande étant fondée sur la même cause entre les mêmes parties et formée par elles ou contre elles en la même qualité.
En effet, le droit de repentir fait naitre un nouveau bail et ne fait pas revivre le bail expiré, de sorte que le nouveau bail ne peut être résilié sur la base d'un arriéré de loyers afférent à la période du bail expiré. Ainsi , l'exercice du droit de repentir ne saurait rendre recevable la demande tendant à voire prononcer la résiliation du bail par le jeu de la clause résolutoire notifiée avec le commandement de payer des 23 et 27 janvier 2015.
Le caractère irrévocable de l'exercice du droit de repentir fait également obstacle à la résiliation judiciaire du bail pour non-paiement de loyers échus en 2014.
Dès lors , les consorts [G] doivent être déclarés irrecevables en leurs demandes tendant à faire constater l'acquisition de la clause résolutoire pour défaut de paiement du commandement de payer délivré les 23 et 27 janvier 2015 et subsidiairement à voir prononcer la résiliation du bail pour non-paiement des loyers et charges de 2014
Sur la demande en paiement de la somme de 2488 euros au titre des loyers ou indemnités d'occupation ( et non d'éviction comme mentionné par erreur dans les conclusions des intimés) de 2014.
Les bailleurs réclament le paiement d'une somme de 2488 euros au titre de l'année 2014. La cour , dans le dispositif de l'arrêt du 10 septembre 2015, n'a pas statué sur cette prétention qui figurait pourtant dans les conclusions des consorts [G].
Cette demande n'est donc pas atteinte par la fin de non-recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée.
La comparaison des relevés de comptes du preneur ( pièces 14 et 15) et ceux de Mme [K] [G] ( pièce 10) permet de vérifier que les termes visés par le commandement de payer des 23 et 27 janvier 2015 ont bien été réglés.
Cependant, par application des principes d'imputation des paiements reçus du débiteur, définis par l'article 1256 ancien du code civil, les bailleurs soutiennent que les règlements effectués par le preneur entre mai et décembre 2014 se sont imputés sur une dette de loyer de février, mars et avril 2014, laissant subsister un impayé pour octobre et novembre 2014, justifiant le commandement de payer délivré.
Ce moyen s'appuie sur les relevés de compte produits par les consorts [G] pour la période comprise entre le 1er mars 2014 et le 2 février 2015, lesquels ne font pas apparaître en écritures portées au crédit du compte pour les mois de mars et avril 2014, le montant des loyers dus.
Si Monsieur [E] réplique qu' il est à jour du paiement des termes de l'année 2014, il lui appartient d'en justifier.
En effet, en application de l'article 1315 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance 2016-131 du 10 février 2016, devenu l'article 1353 nouveau du même code, il appartient à celui qui se prétend libéré d'une obligation de justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation.
Or, M [E] s' il justifie de paiements d'octobre et novembre 2014, correspondant au montant du loyer, devenu indemnité d'occupation à compter de la date d'effet du congé délivré, n' établit pas être à jour des termes échus entre février et septembre 2014 inclus, de sorte qu'il ne démontre pas s' être libéré de la dette invoquée par le bailleur.
M. [V] [E] sera en conséquence condamné au paiement de la somme de 2488 euros correspondant à l'arriéré des indemnités d'occupation dues au titre de l'année 2014, le jugement étant infirmé de ce chef.
Sur la demande de résiliation du bail pour construction d'un mur de clôture sans autorisation du bailleur':
Les consorts [G] sollicitent la confirmation du jugement déféré en ce qu'il a condamné in solidum M [V] [E] et l'EIRL L'OUSTAOU DE [Localité 6] à démolir le mur de clôture édifié par leurs soins sur la propriété des consorts [G], sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la signification du jugement.
Ils soutiennent que suite à la visite des services de la ville de de [Localité 5], ils ont découvert que l'EIRL l'OUSTAOU DE [Localité 6] avait érigé sur leur propriété un mur de clôture en agglo surmonté de poteaux en béton , sans la moindre autorisation administrative, de sorte qu'un procès-verbal d'infraction a été dressé le 14 avril 2017.
M [V] [E] réplique que la construction de ce mur a été régularisée par une déclaration en mairie qui n'a pas donné lieu à opposition'; que le preneur, afin d'améliorer l'immeuble, a changé le vieux portail brinquebalant et la clôture vétuste en un mur de clôture de grand qualité , dans le prolongement du mur existant, pour pouvoir exploiter au mieux son fonds de commerce'; que l'ouvrage réalisé ne nuit pas à l'aspect extérieur de l'immeuble'; qu'il s'agit d'un mur de soutènement qui a pour fonction de retenir des terres afin d'éviter qu'elles se retrouvent sur la chaussée.
Il ajoute qu'avec le locataire gérant , ils ont fait intervenir un ingénieur qui dans son rapport du 29 mai 2024 qualifie le mur de mur de soutènement'; que le terrain est une colline avec un dénivelé important entre le bâtiment et la route.
Il considère que ces travaux de conservation du bien n'avaient pas à être autorisés par le bailleur et qu'ils auraient dû être réalisés par ce dernier sur qui le bail fait peser l'obligation de tenir les lieux clos et couverts. Au contraire, le bailleur a laissé le mur de clôture se détériorer.
Cependant, il n'est pas établi que l'entretien du mur qui ne relève pas des grosses réparations incombait au bailleur. En outre, au vu des photographies versées aux débats, les travaux d'édification réalisés au niveau du portail d'accès, présentent une réduction de l'ouverture, la pose d'une porte métallique, sous linteau, en remplacement d'un portail à doubles vantaux, la surélévation du mur préexistant, de plus d'un mètre, la pose de poteaux raidisseurs dont le sommet dépasse la crête du mur de plus d'un mètre également, et la réalisation d'un mur en retrait du mur préexistant à la jonction du second poteau raidisseur à droite de la porte d'entrée.
Cette réalisation a manifestement modifié l'aspect extérieur du mur de clôture de manière non harmonieuse, en créant un ouvrage beaucoup plus massif qui dénote avec la hauteur et le volume du bâtiment d'exploitation. Ces travaux nuisent ainsi à l'aspect extérieur de l'immeuble au sens de l'article 5 du bail «' changement de distribution-travaux'», ce qui justifie la remise en état des lieux et la démolition de l'ouvrage réalisé sans l'autorisation du bailleur. Cependant, la faute commise n'est pas de nature à justifier la résiliation du bail renouvelé, la remise en état ordonnée étant de nature à réparer l'atteinte portée temporairement à l'aspect extérieur de l' immeuble.
Le jugement est en conséquence confirmé, mais seulement en ce qu'il a condamné le preneur M. [V] [E] à démolir le mur de clôture édifié par ses soins ou ceux de son locataire-gérant, sur la propriété des consorts [G], sous astreinte de 100 euros par jour de retard et d'ajouter que l'astreinte sera due au-delà d'un délai de six mois passé la signification du présent arrêt. En effet, l'EIRL L'OUSTAOU DE [Localité 6], dépourvue de personnalité juridique, ne peut être condamnée aux lieu et place du locataire-gérant qui est [J] [E]. Il convient également d'accorder au preneur un délai utile pour procéder à la démolition du mur construit irrégulièrement.
Les consorts [G] sont en revanche déboutés de leur demande de résiliation du bail renouvelé fondée sur la construction de ce mur.
Par suite , il convient de les débouter de leurs demandes subséquentes tendant à voir ordonner l'expulsion de Monsieur [V] [E] et de tout occupant des lieux de son chef, le transport des meubles garnissant les lieux loués dans un garde-meuble, en garantie des sommes dues au bailleur et à voir fixer le montant de l'indemnité d'occupation à la somme de 1244 euros.
Sur les demandes indemnitaires des appelants':
Etant observé que l'EIRL [E] [J] n'a pas de personnalité juridique, que le locataire gérant [J] [E] n'est pas en tant que tel partie à l'instance et qu'aucune demande indemnitaire n'est formée au bénéfice de ce dernier, il convient d'en déduire que les demandes de dommages et intérêts sont formées par le preneur [V] [E] qui a l'obligation de justifier d'un préjudice personnel en lien avec les fautes qu'il impute au bailleur
Sur la demande de condamnation à une somme de 20'000,00 euros pour procédure abusive, il convient de rappeler que le droit d'agir en justice, y compris en appel, ne dégénère en abus pouvant donner naissance à une dette de dommages et intérêts que dans le cas de malice, de mauvaise foi ou d'erreur grossière équipollente au dol, ce qui n'est pas démontré , au stade de la présente instance, compte tenu de la position respective des parties. En effet , des retards de paiement du loyer ont été enregistrés qui ont justifié les commandements de payer délivrés. Si le locataire gérant est à jour du paiement du loyer au preneur selon les liasses comptables des exercices 2012 à 2014, en revanche M [V] [E] ne justifie pas avoir reversé au bailleur la totalité du loyer dû au titre de l'année 2014. En outre, un nouveau commandement de payer lui a été délivré le 10 avril 2017 qui a été régularisé, cette fois, dans le mois suivant sa délivrance faisant obstacle au jeu de la clause résolutoire. Enfin , même si la résiliation du bail n'est pas prononcée de ce chef, il convient de rappeler que la construction d'un mur de clôture portant atteinte à l'aspect extérieur de l'immeuble constitue un manquement du preneur à l' une des obligations qui pèsent sur lui en exécution du bail.
Dans ces conditions, le caractère abusif de la procédure suivie par les consorts [G] n'est nullement caractérisé, le reproche ne pouvant leur être fait d'avoir refusé le renouvellement du bail avant d'exercer leur droit de repentir.
S'agissant de la somme de 50'000,00 euros à titre forfaitaire, réparant d' une part une baisse de chiffre d'affaires de l'exploitant, soit le locataire gérant, et les frais de procédure exposés devant le tribunal en 2014, devant la cour d'appel en 2015 et devant le tribunal de grande instance au cours de la procédure initiée en mars 2015, cette demande ne peut être que rejetée. En effet, le preneur ne justifie pas d'un préjudice financier personnel et les demandes de remboursement des frais de procédure engagés ont déjà été examinées par les différentes juridictions saisies, au travers du filtre de l' équité, en réponse aux demandes formées en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Enfin, s'agissant de la demande de réparation d'un préjudice moral à hauteur de 20'000,00 euros, force est de constater que le preneur se contente d'invoquer son âge sans justifier d'une quelconque atteinte d'ordre moral, ni de son lien avec le comportement procédural des intimés.
Le jugement est en conséquence confirmé en ce qu'il a rejeté ces demandes indemnitaires.
Sur les demandes annexes':
Chacune des parties succombant partiellement, conservera la charge de ses dépens de première instance et d'appel.
Par suite , l'équité ne justifie pas de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS':
La cour, statuant par arrêt mis à disposition au greffe , contradictoirement et en dernier ressort,
Rejette les fins de non-recevoir soulevées par les appelants en application des articles 564 et suivants et 910-4 du code de procédure civile, pour demandes nouvelles ou tardives,
Infirme le jugement en ce qu'il a':
- jugé recevable l'EIRL L'OUSTAOU DE [Localité 6], venant aux droits de la SARL L'OUSTAOU DE [Localité 6] en son intervention volontaire et en ses demandes,
- déclaré irrecevable la demande de paiement d'une somme de 2488 euros correspondant à deux mois d'arriérés de loyers de l'année 2014,
- condamné in solidum [V] [E] et l'EIRL L'OUSTAOU DE [Localité 6] à démolir le mur de clôture édifié sur la propriété des consorts [G] objet du bail commercial , sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la signification du jugement.
Statuant à nouveau des chefs infirmés,
Déclare irrecevable l'EIRL L'OUSTAOU DE [Localité 6] en son intervention et en ses demandes,
Reçoit les consorts [G] en leur demande de condamnation de M. [V] [E] à leur payer la somme de 2488 euros au titre d' un arriéré de deux mois d'indemnité d'occupation impayés sur l'exercice 2014,
Condamne M. [V] [E] à payer aux consorts [G] la somme de 2488 euros au titre d' un arriéré de deux mois d'indemnité d'occupation impayés sur l'exercice 2014,
Déclare irrecevable la même demande dirigée contre l'EIRL L'OUSTAOU DE [Localité 6],
Déclare irrecevable les consorts [G] en leur demande de condamnation de l'EIRL L'OUSTAOU DE [Localité 6] à démolir le mur de clôture édifié sur la propriété des consorts [G], objet du bail commercial, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la signification du jugement.
Condamne [V] [E] à démolir le mur édifié sans autorisation du bailleur, sur la propriété objet du bail commercial, et à remettre les lieux dans leur état antérieur, sous astreinte de 100 euros par jour de retard passé le délai de six mois suivant la signification du présent arrêt.
Confirme le jugement pour le surplus de ses dispositions,
Y ajoutant,
Déclare régulier l'exercice du droit de repentir aboutissant à la conclusion d'un nouveau bail,
Déboute les consorts [G] de leur demande de résiliation du bail renouvelé fondée sur la réalisation d' un mur de clôture sans autorisation, et des demandes subséquentes aux fins de fixation d'une indemnité d'occupation, d'expulsion et de vidange des lieux loués,
Dit que chacune des parties conservera la charge des dépens qu'elle a exposés au cours de l'instance,
Déboute les parties de leur demande respective fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRESIDENT
Chambre 1-5
ARRÊT AU FOND
DU 05 JUIN 2025
mm
N° 2025/ 196
Rôle N° RG 19/05819 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BEC5D
[V] [E]
Société EIRL [E] [J]
C/
[K] [X] épouse [G]
[L] [G]
[T] [G]
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
SCP ERMENEUX - CAUCHI & ASSOCIES
SCP COHEN GUEDJ - MONTERO - DAVAL GUEDJ
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Grande Instance de TOULON en date du 21 Mars 2019 enregistré au répertoire général sous le n° 15/01442.
APPELANTS
Monsieur [V] [E]
[Adresse 2]
représenté par Me Agnès ERMENEUX de la SCP ERMENEUX - CAUCHI & ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assisté de Me Sandrine BELTRA, avocat au barreau de DRAGUIGNAN, plaidant
L' EIRL [E] [J], dont le nom commercial est L'OUSTAOU DE [Localité 6], exerçant à l'enseigne AUBERGE LOU PÉTOULET, venant aux droits de la S.A.R.L. L'OUSTAOU DE [Localité 6], prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité au siège social sis, [Adresse 1]
représentée par Me Agnès ERMENEUX de la SCP ERMENEUX - CAUCHI & ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assistée de Me Sandrine BELTRA, avocat au barreau de DRAGUIGNAN, plaidant
INTIMEES
Madame [K] [X] épouse [G]
demeurant [Adresse 3]
représentée par Me Maud DAVAL-GUEDJ de la SCP COHEN GUEDJ - MONTERO - DAVAL GUEDJ, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assistée de Me Jérôme COUTELIER-TAFANI de l'ASSOCIATION COUTELIER, avocat au barreau de DRAGUIGNAN, plaidant
Madame [L] [G]
demeurant [Adresse 3]
représentée par Me Maud DAVAL-GUEDJ de la SCP COHEN GUEDJ - MONTERO - DAVAL GUEDJ, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assistée de Me Jérôme COUTELIER-TAFANI de l'ASSOCIATION COUTELIER, avocat au barreau de DRAGUIGNAN, plaidant
Madame [T] [G]
demeurant [Adresse 3]
représentée par Me Maud DAVAL-GUEDJ de la SCP COHEN GUEDJ - MONTERO - DAVAL GUEDJ, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assistée de Me Jérôme COUTELIER-TAFANI de l'ASSOCIATION COUTELIER, avocat au barreau de DRAGUIGNAN, plaidant
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 18 Mars 2025 en audience publique. Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, Monsieur Marc MAGNON, Président, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Monsieur Marc MAGNON, Président
Madame Patricia HOARAU, Conseiller
Madame Audrey CARPENTIER, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Danielle PANDOLFI.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 05 Juin 2025.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 05 Juin 2025,
Signé par Monsieur Marc MAGNON, Président et Madame Danielle PANDOLFI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
EXPOSÉ DES FAITS ET PROCÉDURE :
M. [V] [E] est locataire suivant bail commercial en date du 27 mars 1984 d' un local situé à [Localité 5], [Adresse 7], dans lequel il exploite un restaurant.
Par acte du 30 juin 2010, M. [V] [E] a donné en location gérance son fonds de commerce de restauration à la SARL l' OUSTAOU DE [Localité 6], représentée par son fils [J] [E].
Les consorts [G], bailleurs, par exploit du 2 mars 2012 ont signifié à M. [E] un congé pour le 30 septembre 2012, avec refus de renouvellement et de paiement d' une indemnité d'éviction, au motif qu'il ne remplissait pas les conditions posées par l'article L 145-1 du code de commerce, par suite de sa radiation du registre du commerce et des sociétés en date du 8 février 2011 et de la non immatriculation du locataire-gérant.
Par acte d' huissier du 26 septembre 2012, M. [V] CASAN1 et la SARL l' OUSTAOU DE [Localité 6] ont fait assigner Mme [K] [G], Melle [L] [G] et M. [T] [G] devant le tribunal de grande instance de TOULON aux fins de voir déclarer nul le congé du 2 mars 2012.
Par jugement du 18 avril 2014, le tribunal a notamment constaté la résiliation du bail commercial liant les parties à la date du 30 septembre 2012, fixé le montant de l' indemnité d' occupation depuis le 30 septembre 2012 au montant du dernier loyer, dit que M. [E] avait droit à une indemnité d' éviction et au maintien dans les lieux jusqu'au paiement de ladite indemnité, et ordonné une expertise confiée à M. [R], aux fins d'en déterminer le montant.
Les consorts [G] ont relevé appel de ce jugement et la Cour d'appe1 d'A1X-EN-PROVENCE par arrêt du 10 septembre 2015 a notamment déclaré recevable mais non fondée l' exception de nullité du congé soulevée par M. [E] et la SARL L' OUSTAOU DE [Localité 6], débouté les consorts [G] de leur demande tendant au constat d' acquisition de la clause résolutoire, condamné M. [E] à payer la somme de 984 euros pour la taxe d'ordures ménagères des années 2012 à 2014 et rejeté la demande de dommages et intérêts de M. [E] et de la SARL L'OUSTAOU DE [Localité 6] pour procédure abusive.
Dans le prolongement de cet arrêt, les consorts [G] ont signifié le 6 octobre 2015 leur droit de repentir. Le Conseil de M. [E] et de la SARL L'OUSTAOU DE [Localité 6] a demandé la remise au rôle de l' affaire pour exécution de la mesure d'expertise.
Auparavant, les bailleurs avaient fait délivrer les 23 et 27 janvier 2015 un commandement de payer la somme de 2488 euros au titre des loyers des mois d'octobre et novembre 2014 au visa de la clause résolutoire.
Par acte d' huissier du 20 février 2015, M. [V] [E] et la SARL L'OUSTAOU DE [Localité 6] ont de nouveau fait assigner Mme [K] [G], Melle [L] [G] et M. [S] [G] devant le tribunal de grande instance de Toulon, au principal aux fins de voir déclarer nul le commandement de payer du 23 janvier 2015.
Par conclusions signifiées le 5 février 2016, M. [V] CASAN1 et la SARL L' OUSTAOU DE [Localité 6] ont saisi le juge de la mise en état d'un incident tendant à faire constater que la cour d' appel d'[Localité 4], par arrêt du 10 septembre 2015, avait tranché le litige lié au commandement délivré les 23 et 27 janvier 2015, et ainsi faire constater l' extinction de l'instance. Le juge de la mise en état par décision du 3 mai 2016 s' est déclaré incompétent.
Les deux procédures, suite aux deux assignations, ont été jointes par ordonnance du juge de la mise en état du 4 octobre 2016.
M. [V] [E] et l' EIRL L'OUSTAOU DE [Localité 6] ont demandé au tribunal':
Au principal, de:
Constater l' intervention volontaire de 1'EIRL L'OUSTAOU DE [Localité 6], venant aux droits de la SARL L' OUSTAOU DE [Localité 6],
Débouter les consorts [G] de l'ensemble de leurs demandes,
Condamner solidairement les consorts [G] à verser à l'EIRL L'OUSTAOU DE [Localité 6] la somme de 300 000 euros au titre du préjudice matériel, à verser à M. [E] la somme de 50 000 euros au titre du préjudice moral, à verser aux deux demandeurs celle de 20 000 euros pour procédure abusive,
Les condamner à une amende civile,
A titre subsidiaire, si le tribunal estimait par extraordinaire qu'i1 n'y a pas autorité de la chose jugée sur la clause résolutoire et les arriérés de loyers et charges :
Déclarer nul le commandement de payer délivré le 23 janvier 2015,
Accorder les plus larges délais de paiement si par extraordinaire des sommes seraient dues et suspendre les effets de la clause résolutoire pour les deux commandements de payer,
Condamner les défendeurs à une amende civile,
Condamner solidairement les consorts [G] à verser à M. [E] et 1'EIRL
L' OUSTAOU DE [Localité 6] Ia somme de 20 000 euros pour procédure abusive,
En tout état de cause :
Condamner solidairement les consorts [G] à payer la somme de 6 000 euros au titre de l' article 700 du code de procédure civile et à payer les entiers dépens.
Monsieur [V] CASAN1 et 1' EIRL L' OUSTAOU DE [Localité 6] exposaient notamment que la Cour d'appel d'AIX EN PROVENCE, par arrêt du 10 septembre 2015, avait déclaré recevables les demandes des consorts [G] concernant le commandement de payer en date des 23 et 27 janvier 2015, les avaient déboutés de leur demande d' acquisition de la clause résolutoire et avait tranché le litige lié au commandement de payer délivré les 23 et 27 janvier 2015. D'où l'autorité de la chose jugée au visa de l'article 480 du code de procédure civile.
Subsidiairement sur le fond, ils soutenaient la nullité du commandement délivré le 23 janvier 2015. M. [V] CASAN1 et L'EIRL L' OUSTAOU DE [Localité 6] précisant qu' en exerçant son droit de repentir par acte du 6 octobre 2015, le bailleur avait offert un nouveau bail et l'élément nouveau du droit de repentir ne saurait faire renaitre la clause résolutoire d' un commandement délivré antérieurement.
Ils ont fait valoir également les moyens suivants':
- De manière intentionnelle, aux fins de nuire, le bailleur a fait délivrer le commandement à une adresse erronée, celle de l'ancienne épouse de M. [E], celle-ci n'ayant jamais exploité le fonds.
- La somme réclamée de 2488 euros pour les loyers des mois d' octobre et novembre 2014 a été régulièrement payée en début de mois.
- L'exercice du droit de repentir entraîne l' obligation pour le bailleur de supporter les frais de la procédure,
- Du fait des procédures intentées, l' établissement a notamment dû refuser des mariages pour les saisons 2013, 2014 et 2015 en raison de l'ignorance de l' issue de la procédure. En conséquence, ils justifient d' un préjudice matériel chiffré à la somme de 300 000 euros, suivant l' attestation comptable produite.
- Ces procédures ont eu un impact sur la santé de M. [E], personne âgée, justifiant une réparation à hauteur de la somme de 50 000 euros au titre du préjudice moral
- Ces multiples procédures destinées à obtenir 1' expulsion du preneur sont caractéristiques de procédures abusives justifiant une réparation à hauteur de la somme de 20 000 euros au titre du préjudice subi.
- Un nouveau commandement de payer la somme de 1244 euros, relative au loyer du mois d'août 2016 et à la taxe d'ordure ménagère des années 2015 et 2016, a été délivré par le bailleur le 10 avril 2017'; les sommes dues ont été réglées dans le délai d`un mois, suivant reçu de la SCP CARROZZA-LEGRAND, en l' espèce le 4 mai 2017. Les sommes ayant été payées dans le délai d'un mois après le commandement de payer, Ia clause résolutoire n'est pas acquise.
- Concernant le mur de clôture, le dépôt d' une demande d'autorisation auprès des services de l'urbanisme a été régularisée et 1'artic1e 5 du bail stipule que le bailleur a pour obligation de tenir les lieux clos. Le bailleur n'a jamais respecté cette obligation contractuelle et M. [E] a dû suppléer la carence de celui-ci. Les bailleurs sont malvenus de demander la destruction du mur sous astreinte
Les consorts [K] [G], [L][G] et [T] [G] ont demandé au tribunal de :
Déclarer la SARL L'OUSTAOU DE [Localité 6] irrecevable en ses demandes,
DECLARER irrecevab1e l' EIRL L'OUSTAOU DE [Localité 6] en ses demandes,
DECLARER recevable la demande des consorts [G] tendant à l' acquisition de la clause résolutoire,
JUGER que le commandement de payer en date des 23 et 27 janvier 2015 est parfaitement régulier et que M. [V] [E] et la SARL L' OUSTAOU DE [Localité 6] ne se sont toujours pas acquittés de la somme correspondante,
CONSTATER la résiliation du bail par application de la clause résolutoire un mois après le commandement de payer, soit le 27 février 2015,
FIXER une indemnité d'occupation à dater du 27 février 2015 à hauteur du loyer en cours et dans les mêmes conditions,
Subsidiairement, prononcer la résiliation judiciaire du bail commercial en date du 27 mars 1984
En toute hypothèse,
CONDAMNER M. CASAN1à payer1a somme de 2488 euros au titre des loyers impayés pour les deux mois de l' année 2014,
CONDAMNER in solidum M. [V] [E] et la SARL L4 OUSTAOU DE [Localité 6] à démolir le mur de clôture édifié illégalement par leurs soins sur la propriété des consorts [G], et ce sous astreinte de 500 euros par jour de retard à compter de la signification de la décision à intervenir,
DEBOUTER M. [V] [E] et la SARL L'OUSTAOU DE [Localité 6] de l' ensemble de leurs demandes,
Condamner M. [V] [E] et la SARL IJOUSTAOU DE [Localité 6] à payer la somme de 5000 euros au titre de l' article 700 du code de procédure civile et à payer les entiers dépens distraits au profit de Me LACOMBE-BRISOU.
Les consorts [G] ont notamment fait état des moyens et arguments suivants':
- La SARL L'OUSTAOU DE [Localité 6] a été radiée du registre du commerce et des sociétés le 8 juin 2017'; elle est donc dépourvue du droit d'agir et doit être déclarée irrecevable en ses demandes. Aucun élément n'' est fourni aux fins de justifier le fait que l' EIRL viendrait aux droits de la SARL. L' EIRL L'OUSTAOU DE [Localité 6] est également irrecevable en ses demandes.
- L' autorité de la chose jugée n' est pas fondée, un élément nouveau étant intervenu postérieurement à l'arrêt de la cour d' appel d'[Localité 4]-EN- PROVENCE du 10 septembre 2015, l'exercice du droit de repentir. Leur demande de résiliation judiciaire du bail est fondée, le locataire ne s' étant pas acquitté des sommes mentionnées dans le commandement de payer des 23 et 27 janvier 2015.
- Le moyen tiré de la nullité du commandement de payer est contestable car le commandement n'avait pas à être notifié au locataire-gérant, le bailleur n' étant pas lié contractuellement à ce dernier.
- Les différentes demandes à caractère indemnitaire de la SARL L' OUSTAOU DE [Localité 6] ne sont justifiées ni dans leur principe ni dans leur quantum, d'autant que le bailleur n'est pas lié contractuellement à la SARL L' OUSTAOU DE [Localité 6].
- Un nouveau commandement de payer du 10 avril 2017 a été délivré pour non-paiement d'un arriéré de loyer et taxes d'ordures ménagères qui justifie la résiliation du bail par le jeu de la clause résolutoire.
- La SARL L'OUSTAOU DE [Localité 6] a construit sans autorisation un mur de clôture constaté par un PV d' infraction du 14 avril 2017, en contradiction avec l' article 5 du bail, qui devra être démoli sous astreinte.
Par jugement du 21 mars 2019, le tribunal de grande instance de TOULON a'statué comme suit:
CONSTATE l' intervention volontaire de l' EIRL L' OUSTAOU DE [Localité 6], venant aux droits de la SARL L'OUSTAOU DE [Localité 6], et la déclare recevable en ses demandes ;
DECLARE irrecevables les demandes des consorts [G] d' acquisition de la clause résolutoire, de résiliation du bail, de paiement d' arriérés de loyers et de fixation d' une indemnité d' occupation sur le fondement du commandement de payer en date des 23 et 27 janvier 2015';
DECLARE irrecevable la demande des consorts [G] de paiement de la somme de 2 488 euros au titre des loyers impayés pour les deux mois de l'année 2014;
DEBOUTE les consorts [G] de leur demande de résiliation judiciaire du bail sur le fondement du commandement de payer en date du 10 avril 2017 ;
CONDAMNE in solidum M. [V] [E] et L'EIRL L' OUSTAOU DE [Localité 6] à démolir le mur de clôture édifié par leurs soins sur la propriété des consorts [G], et ce sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la signification du jugement ;
DIT n' y avoir lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
DIT que chaque partie supportera la charge des dépens qu'elle a engendrés.
Aux motifs que':
- L' EIRL L'OUSTAOU DE [Localité 6], société régulièrement constituée, représentée par M. [J] [E], vient aux droits de la SARL L' OUSTAOU DE [Localité 6], et est intervenue volontairement dans la procédure suivant conclusions signifiées le 12 décembre 2017 et le 16 janvier 2018'; ses demandes sont recevables.
- Sur le commandement de payer en date des 23 et 27 janvier 2015': la lecture de l'arrêt montre que la cour a reçu la demande des consorts [G] de «' constater la résiliation du bail par application de 1a clause résolutoire notifiée les 23 et 27 janvier 2015'». Cependant la cour a débouté les consorts [G] de la demande tendant au constat d'acquisition de cette clause résolutoire.
- Sur la demande de paiement de la somme de 2 488 euros au titre des loyers impayés pour les deux mois de l'année 2014, reçue par la cour en son arrêt, cette dernière n'a accordé aucune somme aux consorts [G] en la matière.
- Le litige relatif au commandement de payer des 23 et 27 janvier 2015, et à ses conséquences juridiques, a été tranché par la cour et au regard de 1'autorité de la chose jugée, les demandes des consorts [G] d' acquisition de la clause résolutoire, de résiliation de bail, de paiement d'arriérés de loyer et de fixation d' indemnité d'occupation sur le fondement du commandement de payer en date des 23 et 27 janvier 2015 sont irrecevables, de même que la demande, en toute hypothèse, de paiement de la somme de 2 488 euros au titre des loyers impayés pour les deux mois de l' année 2014.
- Le caractère abusif dans l'exercice de leurs droits par les consorts [G] n' est pas suffisamment démontré, même s'i1 apparaît au vu des relevés de comptes bancaires de la Banque Populaire que Mme [K] [G] a perçu en temps voulu les loyers d'octobre et novembre 2014 et qu'ainsi le commandement de payer qui a suivi n' est pas fondé. Les demandeurs cependant ne contestent pas qu' i1 y a eu un retard dans le paiement du loyer du mois d'août 2016, suite auquel un commandement de payer a été délivré le 10 avril 2017, une régularisation étant cependant intervenue le 4 mai 2017, dans le délai d'un mois, entre les mains de l'huissier ( pièce 26). La clause résolutoire n'est pas acquise.
- S'agissant des demandes indemnitaires de M [E] et de l'EIRL L'OUSTAOU DE [Localité 6], le caractère abusif du commandement de payer délivré n'est pas suffisamment caractérisé.
- En termes de réparations, les demandeurs sollicitent des sommes exorbitantes pour lesquelles les justificatifs font défaut : la seule attestation comptable pour les années 2012 à 2014 présentée en demande pour étayer un préjudice financier ne permet pas de savoir si la baisse du chiffre d'affaires n'est pas liée à une conjoncture économique difficile. Par ailleurs cette attestation, au vu des baisses de chiffre d'affaires mentionnées, ne permet pas de retrouver la somme de 300 000 euros réclamée à titre de réparation.
Le préjudice moral invoqué par M. [E], avec une demande de réparation à hauteur de 50 000 euros, ne repose sur aucune pièce probante.
- Sur le mur de clôture': il ressort d' un procès-verbal d'infraction dressé par la commune de [Localité 5] le 14 avril 2017 et produit aux débats que M. [E] a dressé un mur de clôture sans déclaration préalable. L'artic1e 5 du bail stipule que les travaux réalisés par le locataire ne doivent pas nuire à 1'aspect extérieur de l'immeuble. Un mur de clôture entre dans la catégorie des ouvrages susceptibles de nuire à l'aspect extérieur de l'immeuble. Par conséquent, l' autorisation du bailleur était nécessaire, nonobstant la régularisation administrative obtenue par le locataire. La demande de destruction du mur sous astreinte est donc fondée.
Par déclaration du 9 avril 2019, [V] [E] et l'EIRL [E] [J] ont relevé appel de cette décision.
Par ordonnance d'incident du 21 octobre 2022, le conseiller de la mise en état s'est déclaré incompétent pour connaître de l'irrecevabilité des demandes des consorts [G] au visa des articles 564 et 910-4 du code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture de la mise en état est intervenue le 4 mars 2025.
Au-delà de ce qui sera repris pour les besoins de la discussion et faisant application en l'espèce des dispositions de l'article 455 du Code de procédure civile, la cour entend se référer pour l'exposé plus ample des moyens et prétentions des parties aux dernières de leurs écritures visées ci-dessous.
PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES:
Vu les conclusions notifiées par [V] [E] et l'EIRL [E] [J] le 28 février 2025 tendant à':
Vu l'article 564 du code de procédure civile et 909, 910-4 du code de procédure civile
Déclarer irrecevables des demandes nouvelles présentées par les consorts [G] quant à la demande de nullité du droit de repentir, la demande de prescription du paiement d'une indemnité d'éviction et la demande de résiliation du bail commercial en lien avec la construction du mur de clôture.
A Titre principal
Débouter les consorts [G] de l'ensemble de leurs demandes de résiliation de bail et d'acquisition de la clause résolutoire.
CONFIRMER LE JUGEMENT DU 21 MARS 2019 sur les chefs de demandes suivants :
- Constate l'intervention volontaire de l'EIRL L'OUSTAOU DE [Localité 6] venant aux droits de la SARL L'OUSTAOU DE [Localité 6] et la déclare recevable en ses demandes
- Déclare irrecevables les demandes des consorts [G] d'acquisition de la clause résolutoire, de résiliation de bail, de paiement d'arriérés de loyer et de fixation d'indemnité d'occupation sur le fondement du commandement de payer en date des 23 et 27 janvier 2015.
- Déclare irrecevable la demande des consorts [G] de paiement de la somme de 2488 euros au titre des loyers impayés pour les deux mois de l'année 2014.
- Déboute les consorts [G] de leur demande de résiliation judiciaire du bail sur le fondement du commandement de payer en date du 10 avril 2017.
INFIRMER la décision querellée sur les demandes indemnitaires et sur l'édification du mur de soutènement ;
Condamner solidairement les consorts [G] à la somme de 20.000 euros pour procédure abusive ;
Condamner solidairement les consorts [G] à la somme de 50.000 euros pour le préjudice financier correspondant à l'ensemble des frais liés à l'exercice du droit de repentir ;
Condamner solidairement les consorts [G] a la somme de 20.000 euros au profit de Monsieur [V] [E] pour préjudice moral ;
INFIRMER la décision querellée quant à l'astreinte sur le mur de clôture et à la destruction du mur de soutènement
DECLARER qu'il n' y a pas lieu à destruction du mur de soutènement.
DECLARER que le mur de soutènement ne porte pas atteinte à l'aspect extérieur et que l'autorisation du bailleur n'était pas nécessaire ;
Confirmer l' autorité de la chose jugée sur le règlement des loyers et des taxes d'ordures ménagères, concernant l'année 2014.
Débouter les consorts [G] de leurs demandes concernant la nullité du droit de repentir et de résiliation du bail concernant l'édification du mur de clôture et la résiliation concernant les loyers de 2014.
A TITRE SUBSIDIAIRE
Si la nullité du droit de repentir devait être ordonnée,
Condamner solidairement les consorts [G] à verser une indemnité d'éviction de 600.000 euros à Monsieur [V] [E] et l'EIRL L'OUSTAOU DE [Localité 6].
A TITRE SUBSIDIAIRE Si la démolition du mur de soutènement devait être confirmée,
ACCORDER un délai de six mois pour la destruction du mur de soutènement, concernant uniquement la partie rénovée.
EN TOUTES HYPOTHESES
Condamner solidairement les consorts [G] à la somme de 6.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Les condamner aux entiers dépens.
Vu les conclusions d'appel incident notifiées par les consorts [G] le 18 décembre 2024 tendant à':
Vu les articles L.145-1 et suivants du Code de commerce ;
Vu le contrat de bail du 27 mars 1984 ;
Vu le commandement de payer délivré les 23 et 27 janvier 2015 ;
Vu l'article 700 du Code de procédure civile ;
JUGER IRRECEVABLE l'action de l'EIRL L'OUSTAOU DE [Localité 6].
CONFIRMER le jugement du Tribunal de grande instance de Toulon en ce qu'il a :
1 Rejeté les demandes indemnitaires de Monsieur [E] et de l'EIRL L'OUSTAOU DE [Localité 6] ;
2 Condamné in solidum Monsieur [E] et l'EIRL L'OUSTAOU DE [Localité 6] à démolir le mur clôture édifié par leurs soins sur la propriété des consorts [G], sous astreinte de 100€ par jour de retard à compter de la signification du jugement ;
L'INFIRMER POUR LE SURPLUS, Y AJOUTANT,
Pour le cas où la Cour d'appel considérerait que le droit de repentir est valable :
A titre principal :
CONSTATER l'acquisition de la clause résolutoire pour défaut de paiement du commandement de payer délivré les 23 et 27 janvier 2015, et subsidiairement PRONONCER la résiliation du bail à compter de la décision à intervenir en l'état de l'infraction du preneur à son obligation de payer les loyers et charges.
En conséquence, JUGER que le droit de repentir exercé sous réserve de la présente procédure est sans effet.
JUGER que Monsieur [E] est occupant sans droit ni titre.
A titre subsidiaire :
PRONONCER la résiliation du bail commercial renouvelé le 7 octobre 2015 à compter de la décision à intervenir en l'état de l'infraction du preneur pour avoir réalisé un mur de clôture sans avoir sollicité l'autorisation du bailleur,
Pour le cas où la Cour d'appel considérerait que le droit de repentir devrait être annulé:
A titre principal :
JUGER que le droit de repentir exercé sous réserve de la procédure en cours est nul et de nul effet.
JUGER que le preneur est occupant sans droit ni titre par l'effet du congé délivré le 2 mars 2012.
JUGER prescrite l'action en paiement d'une indemnité d'éviction.
En conséquence,
JUGER que Monsieur [E] est occupant sans droit ni titre et a perdu son droit au paiement d'une indemnité d'éviction.
A titre subsidiaire :
PRONONCER la résiliation du bail à compter de la décision à intervenir en l'état des infractions du preneur à son obligation de payer les loyers et charges d'une part, et pour avoir réalisé un mur de clôture sans avoir sollicité l'autorisation du bailleur.
JUGER que Monsieur [E] a perdu son droit au paiement d'une indemnité d'éviction et partant qu'il est occupant sans droit ni titre.
En toute hypothèse :
ORDONNER l'expulsion de Monsieur [E] et de tout occupant les lieux de son chef avec le concours de la force publique et d'un serrurier, sous astreinte de 500€ par jour de retard à compter du prononcé de l'arrêt jusqu'au départ définitif.
ORDONNER le transport des meubles garnissant les lieux loués dans un garde-meuble désigné par le bailleur en garantie des sommes dues.
CONDAMNER Monsieur [E] à verser la somme de 2.488€ au titre des loyers impayés ou indemnités d'éviction de 2014
FIXER le montant de l'indemnité d'occupation à la somme de 1.244€.
CONDAMNER in solidum Monsieur [E] et l'EIRL L'OUSTAOU DE [Localité 6] au paiement de la somme de 4.000€ aux consorts [G] au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
Les CONDAMNER aux entiers dépens, ceux d'appel distraits au profit de la SCP COHEN GUEDJ MONTERO DAVAL-GUEDJ sur son offre de droit.
MOTIVATION':
Sur la saisine de la cour :
A titre liminaire, il convient de rappeler que selon les dispositions de l'article 954 alinéas 1 à 3 du code de procédure civile, les conclusions d'appel doivent formuler expressément les prétentions des parties et les moyens de fait et de droit sur lesquels chacune de ces prétentions est fondée; que les prétentions sont récapitulées sous forme de dispositif et que la cour ne statue que sur celles qui y sont énoncées.
Les demandes de «constater» «'déclarer'» ou même «'juger» lorsqu'elles s'analysent en rappels de moyens ne constituent pas de telles prétentions et ne saisissent pas la cour qui examinera en revanche les seuls moyens invoqués dans la discussion au soutien des prétentions figurant au dispositif des conclusions.
Sur la recevabilité de l'action de l'EIRL L'OUSTAOU DE [Localité 6]:
Les consorts [G] soulèvent l'irrecevabilité de l'action de l'EIRL ( entreprise individuelle à responsabilité limitée) l'OUSTAOU DE [Localité 6], dès lors qu'il n'existe aucun lien juridique entre cette entité, locataire-gérant, et les intimés, qui sont uniquement liés par un bail commercial avec Monsieur [V] [E].
Les appelants répliquent que l'EIRL L'OUSTAOU DE [Localité 6] vient aux droits de la SARL L'OUSTAOU DE [Localité 6] toutes les deux représentées par Monsieur [J] [E] , fils de Monsieur [V] [E].
Force est de constater qu' un premier contrat de location gérance a été passé entre M. [V] [E] et la SARL L'OUSTAOU DE [Localité 6], le 30 juin 2010'; que ladite société a cessé son activité'et a été dissoute le 31 août 2016'; qu'un nouveau contrat de location gérance a été signé le 21 octobre 2016 entre l'EIRL [E] [J] et M [V] [E]'; que selon l'extrait K bis du 19 janvier 2017 versé aux débats, le nom commercial de l'EIRL [E] [J] est L' OUSTAOU DE [Localité 6]'; que c'est bien l'EIRL [E] [J], immatriculée au registre du commerce et des sociétés sous le numéro 523'665'925 depuis le 8 novembre 2016 et qui a pour raison commerciale L' OUSTAOU DE [Localité 6] qui est titulaire du contrat de location gérance du 21 octobre 2016.
L' EIRL ( entreprise individuelle à responsabilité limitée) [E] [J] exerçant son activité sous le nom commercial L' OUSTAOU DE [Localité 6] forme des demandes indemnitaires à l'encontre des bailleurs. Toutefois, l'EIRL n'est pas une société individuelle et n'a pas la personnalité morale, comme le rappelle l'article L 526-6 du code de commerce . L'EIRL permet à une personne physique d'exercer une activité professionnelle individuelle en son nom propre, tout en séparant son patrimoine personnel de son patrimoine professionnel, en créant un patrimoine d'affectation. Dès lors, l'action ou la défense à l'action ne peuvent être exercées que par l'entrepreneur individuel lui-même. En conséquence, «'l'EIRL L'OUSTAOU DE [Localité 6]'», pas plus d'ailleurs que «'l'EIRL [E] [J]'», ne sauraient venir aux droits de la SARL L'OUSTAOU DE [Localité 6].
Il convient dans ces conditions de déclarer irrecevable l'intervention volontaire de l'EIRL L'OUSTAOU DE [Localité 6] et d'infirmer le jugement de ce chef.
Sur l'irrecevabilité des demandes nouvelles:
M [V] [E] et l'EIRL [E] [J] soulèvent l'irrecevabilité des demandes nouvelles portées par les consorts [G] dans leur deuxième jeu de conclusions en date du 29 avril 2020, à la fois sur le fondement de l'ancien article 910-4 du code de procédure civile et sur le fondement de l'article 564 du même code.
Il s'agit selon les appelants des demandes des intimés tendant à voir juger que le droit de repentir exercé sous réserve de la procédure en cours est nul et de nul effet, à voir juger prescrite l'action en paiement d'une indemnité d'éviction et de la demande tendant à voir prononcer la résiliation du bail pour construction d'un mur de clôture, sans autorisation du bailleur.
Les consorts [G] répliquent que la demande résiliation du bail pour construction d'un mur de clôture sans autorisation du bailleur n'est pas nouvelle , en application de l'article 565 du code de procédure civile , puisqu'elle tend aux mêmes fins que la demande de résiliation du bail pour défaut de paiement de loyers.
S'agissant de la demande d'annulation de l'exercice du droit de repentir , les bailleurs font valoir qu'ils n'ont pas véritablement formulé de demande en ce sens'; que dans leur commandement du mois de janvier 2015, ils ont indiqué qu'ils exerçaient leur droit de repentir «' sous réserve de l'instance en cours par devant le tribunal de grande instance de Toulon sous le RG n° 15/01442'» instance relative au commandement de payer des 23 et 27 janvier 2015'; que si la cour devait estimer que les concluants ne pouvaient exercer un droit de repentir assorti d'une réserve, en raison de son caractère irrévocable, les consorts [G] demandent simplement de tirer les conséquences de l'argumentation des appelants et, partant, d'annuler le droit de repentir et de remettre les parties dans la situation antérieure, à savoir en l'état du congé sans offre de renouvellement délivré .
Les intimés ajoutent que les appelants ne peuvent valablement fonder leur argumentation sur le droit de repentir en faisant abstraction de la réserve qui était expressément indiquée à l'acte.
Ils considèrent que les articles 564 et 910-4 du code de procédure civile suivant lesquels les parties doivent, à peine d'irrecevabilité , présenter l'ensemble de leurs prétentions sur le fond dès leurs premières conclusions , ne sauraient valablement faire échec à leur demande de résiliation, ainsi qu'à la demande d'expulsion, peu importe que ces derniers développent un moyen nouveau, tiré de la nullité du droit de repentir, au soutien de leurs prétentions, ce qui n'est pas prohibé par les articles susvisés'; qu'en outre, les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge'; la demande de nullité du droit de repentir tend à la même fin que les demandes originaires, mettre fin au bail. Par ailleurs, il a été jugé que les moyens tirés de la nullité d'un acte constituent une défense au fond pouvant être invoquée en tout état de cause ( Cassation com. 26 novembre 2002, n° 99-12.611).
S'agissant de la demande de prescription de la demande d'indemnité d'éviction, en cas d'annulation du droit de repentir, ils font valoir que les dispositions de l'article 566 du code de procédure civile permettent aux parties d'ajouter à la demande originaire les demandes qui en sont l'accessoire, la conséquence ou le complément, seule la prescription de la demande d'indemnité d'éviction étant de nature à fonder la demande d' expulsion du preneur formée d'ores et déjà en première instance , car, sans cela, le preneur aurait droit au maintien dans les lieux jusqu'au paiement de l'indemnité d'éviction.
Enfin , les intimés se prévalent des dispositions de l'article 563 du code de procédure civile pour estimer que l'article 910-4 ne fait aucunement obstacle à ce que les parties invoquent des moyens nouveaux au cours de la procédure d'appel.
SUR CE':
En droit, selon l'article 563 du code de procédure civile, pour justifier en appel les prétentions qu'elles avaient soumises au premier juge, les parties peuvent invoquer des moyens nouveaux, produire de nouvelles pièces ou proposer de nouvelles preuves.
Selon l'article 564 du même code, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait.
Aux termes de l'article 565 du même code, les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge même si leur fondement juridique est différent.
L' article 566 précise que les parties ne peuvent ajouter aux prétentions soumises au premier juge que les demandes qui en sont l'accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire.
Aux termes de l'article 567, les demandes reconventionnelles sont également recevables en appel.
L'article 910-4 ajoute qu' à peine d'irrecevabilité, relevée d'office, les parties doivent présenter, dès les conclusions mentionnées aux articles 905-2 et 908'à 910, l'ensemble de leurs prétentions sur le fond. L'irrecevabilité peut également être invoquée par la partie contre laquelle sont formées des prétentions ultérieures.
Néanmoins, et sans préjudice de l'alinéa 2 de l'article 802, demeurent recevables, dans les limites des chefs du jugement critiqués, les prétentions destinées à répliquer aux conclusions et pièces adverses ou à faire juger les questions nées, postérieurement aux premières conclusions, de l'intervention d'un tiers ou de la survenance ou de la révélation d'un fait.
Ce texte ne fait pas obstacle à la présentation de moyens nouveaux dans des conclusions postérieures.
En l'espèce, devant le premier juge, les bailleurs ont notamment demandé de constater la résiliation du bail, la clause résolutoire ayant produit ses effets un mois après le commandement de payer du 27 janvier 2015, soit à compter du 27 février 2015, le preneur ne s'étant pas acquitté des causes du commandement de payer'; subsidiairement de prononcer la résiliation judiciaire du bail commercial, pour le même motif. Ils ont demandé également de condamner in solidum M [V] [E] et la SARL L'OUSTAOU DE [Localité 6] à démolir le mur de clôture édifié illégalement par leurs soins sur la propriété des consorts [G], et ce sous astreinte de 500 euros par jour de retard.
Dans leurs premières conclusions d'intimés, en date du 17 septembre 2019, les consorts [G] ont maintenu leur demandes de résolution du bail par le jeu de la clause résolutoire et, à défaut, de résiliation du bail pour impayé de loyers, et de démolition du mur de clôture construit par le preneur sans autorisation. Dans leurs conclusions du 29 avril 2020, en réponse à celles des appelants du 16 décembre 2019, les consorts [G] ont reformulé leurs prétentions en réponse au moyen soulevé par les appelants tenant à l'irrévocabilité du droit de repentir et à la demande de paiement d'une indemnité d'éviction en cas d' invalidation du droit de repentir.
Leurs conclusions étaient ainsi modifiées':
Pour le cas où la cour d'appel considérerait que le droit de repentir est valable :
A titre principal :
CONSTATER l' acquisition de la clause résolutoire pour défaut de paiement du commandement de payer délivré les 23 et 27 janvier 2015, et subsidiairement PRONONCER la résiliation du bail à compter de la décision a intervenir en l' état de 1' infraction du preneur à son obligation de payer les loyers et charges,
En conséquence,
DIRE ET JUGER que le droit de repentir exercé sous réserve de la présente procédure est sans effet ;
DIRE ET JUGER que Monsieur [E] est occupant sans droit ni titre
A titre subsidiaire :
PRONONCER la résiliation du bail commercial renouvelé le 7 octobre 2015 à compter de la décision à intervenir en l' état de 1'infraction du preneur pour avoir réalisé un mur de clôture sans avoir sollicité 1' autorisation du bailleur,
Pour le cas où la Cour d'appel considérerait que le droit de repentir devrait être annulé:
A titre principal :
DIRE ET JUGER que le droit de repentir exercé sous réserve de la procédure en cours est nul et de nul effet ;
DIRE ET JUGER que le preneur est occupant sans droit ni titre par l'effet du congé délivré le 2 mars 2012 ;
JUGER prescrite l'action en paiement d'une indemnité d'éviction ;
En conséquence, DIRE ET JUGER que Monsieur [E], occupant sans droit ni titre, a perdu son droit au paiement d'une indemnité d'éviction ;
A titre subsidiaire :
PRONONCER la résiliation du bail à compter de la décision à intervenir en l'état des infractions du preneur à son obligation de payer les loyers et charges d'une part, et pour avoir réalisé un mur de clôture sans avoir sollicité l'autorisation du bailleur ;
DIRE ET JUGER que Monsieur [E] a perdu son droit au paiement d'une indemnité d'éviction et, partant, qu'il est occupant sans droit ni titre ;
Ainsi, la demande formulée à hauteur d'appel tendant à voir prononcer la résiliation du bail en raison de la construction du mur de clôture sans autorisation du bailleur n'est pas nouvelle et tend aux mêmes fins que la demande de résolution ou résiliation du bail pour non régularisation du commandement de payer dans le délai d'un mois et loyers impayés .
S'agissant de la nullité du droit de repentir, il s'agit non d'une prétention , mais d'un moyen opposé par les intimés au moyen des appelants tendant à faire juger que le caractère irrévocable du droit de repentir fait obstacle au jeu de la clause résolutoire sur la base du commandement de payer délivré pour des arriérés de loyers antérieurs à l'exercice de ce droit. Il ne s'agit donc pas d'une demande nouvelle , mais d'une défense au fond opposée aux appelants.
De même, pour le cas où la cour invaliderait le droit de repentir, les parties seraient replacées dans la situation de rapports de droit issue de l'arrêt du 10 septembre 2015 qui a confirmé le jugement du 18 avril 2014 en toutes ses dispositions, notamment en ce qu'il a jugé que M. [V] [E] avait droit à une indemnité d'éviction.
Dans cette hypothèse, le preneur sollicite, à titre subsidiaire, la condamnation des bailleurs à lui verser une indemnité d'éviction de 600'000,00 euros, prétention à laquelle les bailleurs opposent la prescription biennale de l'article L 145-60 du code de commerce qui a recommencé à courir à compter de l'arrêt de la cour d'appel du 10 septembre 2015. Or, la prescription constitue une fin de non-recevoir qui peut être proposée en tout état de cause et ne peut être qualifiée de demande nouvelle, au sens de l'article 564 du code de procédure civile.
Le moyen soulevé par les appelants tiré de l'irrecevabilité des demandes nouvelles et/ou tardives des consorts [G] est en conséquence rejeté.
Sur l'effet de l'exercice par les bailleurs de leur droit de repentir sur la poursuite d'une instance en résolution ou résiliation du bail renouvelé':
Selon l'article L 145-58 du code de commerce, le propriétaire peut, jusqu'à l'expiration d'un délai de quinze jours à compter de la date à laquelle la décision est passée en force de chose jugée, se soustraire au paiement de l'indemnité due en cas d'éviction, à charge pour lui de supporter les frais de l'instance et de consentir au renouvellement du bail dont les conditions, en cas de désaccord, sont fixées conformément aux dispositions réglementaires prises à cet effet. Ce droit ne peut être exercé qu'autant que le locataire est encore dans les lieux et n'a pas déjà loué ou acheté un autre immeuble destiné à sa réinstallation.
En application de l'article L145-59 du même code, la décision du propriétaire de se soustraire au paiement de l'indemnité d'éviction, dans les conditions prévues au dernier alinéa de l'article'L. 145-58, est irrévocable.
Il s'ensuit que l'exercice sans réserve du droit de repentir, impliquant l'acceptation irrévocable du renouvellement du bail, fait obstacle à la poursuite d'une instance en résiliation engagée avant l'exercice de ce droit, (Cassation 3ème chambre civile 24 janvier 2019, Pourvoi n° 17-11.010).
Les appelants soutiennent ainsi, au visa de l'article L 145-59, que le droit de repentir une fois exercé est irrévocable et fait obstacle à la poursuite de l'action en résolution ou résiliation du bail, d'autant que la demande de résolution du bail par le jeu de la clause résolutoire se heurte à l'autorité de la chose jugée, la cour ayant reçu mais débouté les consorts [G] de cette demande.
Les consorts [G] répliquent notamment que la notification du droit de repentir était assortie d'une réserve tenant à l'issue de la procédure en cours devant le tribunal de grande instance de Toulon, suite au commandement de payer délivré les 23 et 27 janvier 2015, et qu'en outre l'autorité de la chose jugée attachée à l'arrêt de la cour d'appel du 10 septembre 2015, se heurte à l'exercice , postérieurement à cette décision, du droit de repentir des intimés qui constitue un élément nouveau'; qu'en outre, ils sollicitent à titre subsidiaire la résiliation judiciaire du bail sur le fondement de l'article 1184 ancien du code civil en raison des impayés, demande à laquelle il ne saurait être opposé une quelconque autorité de la chose jugée.
Au cas d'espèce , les consorts [G] ont par acte d'huissier du 6 octobre 2015 exercé leur droit de repentir dans les termes suivants':
«' Conformément à l'article L 145-58 du code de commerce, le bailleur entend exercer son droit de repentir et accepte ainsi de consentir au renouvellement du bail, sous réserve de l'instance en cours par devant le tribunal de grande instance de TOULON sous le RG n° 15/01442.
En conséquence , il offre au locataire de renouveler le bail des locaux commerciaux qu'il lui avait loués, et ce aux conditions suivantes':
Le nouveau bail prend effet du jour de la présente notification pour une durée de neuf ans , en application de l'article L 145-12 du code de commerce';
Le loyer proposé est de 36.000,00 euros par an , soit 3000 euros par mois, à compter de ce jour, et, à défaut d'accord sur cette proposition, fixé judiciairement selon la procédure prévue aux articles R 145-24 et suivants du code de commerce, le bailleur se réservant la faculté de notifier un mémoire préalable justifiant le chiffre demandé';
Les clauses du bail expiré sont reportées dans le nouveau bail, sauf celle relative au prix du loyer.
En outre, le bailleur accepte de prendre en charge tous les frais de l'instance en indemnité d'éviction'».
Par courrier de son conseil du 21 octobre 2015, le preneur a accepté le principe du renouvellement du bail mais refusé le montant du loyer, au motif que le loyer du bail renouvelé ne pouvait être déplafonné. Aucune des parties n'a saisi le juge des loyers commerciaux pour faire fixer le loyer du bail renouvelé, à un niveau différent de celui du bail expiré, en application des articles R 145-24 et suivants du code de commerce. Par la suite, le loyer du bail renouvelé a été révisé pour être porté à la somme de 1442,50 euros, à compter du mois de juillet 2022, par accord des parties, comme l'indique la pièce n° 55 des appelants.
Etant rappelé que l'exercice par le propriétaire de son droit de repentir entraîne le renouvellement du bail dont il demandait la résiliation et que la notification du repentir constitue, à compter de sa date, un renouvellement du bail expiré et non une simple offre de renouvellement, l' acte de notification du 6 octobre 2015, confirme la décision irrévocable des propriétaires bailleurs de se soustraire au paiement de l'indemnité d'éviction, par le renouvellement du bail, en dépit de la réserve tenant à la procédure ouverte devant le tribunal sur le commandement de payer délivré les 23 et 27 janvier 2015.
Le caractère irrévocable de l'exercice du droit de repentir fait ainsi obstacle à la poursuite de l'action en résolution ou résiliation du bail expiré pour non-paiement des loyers visés par le commandement de payer délivré les 23 et 27 janvier 2015 à [V] [E] et à son ex épouse, et portant sur la somme de 2488,00 euros, montant des loyers d'octobre et novembre 2014, et sur la somme de 984 euros ( 323+329 + 332 euros), montant des taxes d'ordures ménagères des années 2012, 2013 et 2014.
En outre, s'agissant de la demande de paiement des loyers des mois d' octobre et novembre 2014, la demande des intimés de constat de la résolution du bail par le jeu de la clause résolutoire se heurte à l'autorité de la chose jugée, puisque les consorts [G] ont porté cette demande devant la cour , au cours de l'instance ouverte sur appel du jugement du 18 avril 2014.
En droit, aux termes de l'article Article 1355 du code civil, dans sa rédaction applicable depuis l'entrée en vigueur de l'ordonnance 2016-131 du 10 février 2016, pour que l'autorité de la chose jugée puisse être opposée, il faut, selon ces dispositions , que la chose demandée soit la même, que la demande soit fondée sur la même cause et que la demande soit entre les mêmes parties et formée par elles ou contre elles en la même qualité.
D'autre part, et conformément à l'article 480 du code de procédure civile, l'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui fait l'objet d' un jugement et a été tranché dans son dispositif (Cass. Ass. plén., 13 mars 2009, Bull. Ass. plén., n°3).
Par arrêt du 10 septembre 2015, la cour d'appel d'Aix en Provence a déclaré recevable la demande des consorts [G] tendant à constater la résiliation du bail, par application de la clause résolutoire notifiée par le commandement de payer des 23 et 27 janvier 2015. La cour a relevé que cette demande qui vise à mettre fin au bail sans paiement d'indemnité, était recevable par application de l'article 565 du code de procédure civile mais a débouté le bailleur de cette prétention au motif que le bail, ayant été résilié à la date d'effet du congé, soit le 30 septembre 2012, M [V] [E] était depuis cette date occupant bénéficiant du droit au maintien dans les lieux , dans l'attente du paiement de l'indemnité d'éviction et non plus locataire, de sorte que les loyers n'étant plus dus, la clause résolutoire contractuelle ne pouvait plus être utilement mise en 'uvre. La cour a ainsi rejeté la demande tendant au constat de la résiliation du bail par l'effet de cette clause, pour non-paiement des loyers et de la taxe d'enlèvement des ordures ménagères visés par le commandement de payer de janvier 2015.
Les consorts [G] qui formulent la même demande dans le cadre de la présente instance ne peuvent à cet égard invoquer le fait nouveau que constituerait l'exercice du droit de repentir du bailleur pour faire échec à l'autorité de la chose jugée sur ce point, la chose demandée étant la même, la demande étant fondée sur la même cause entre les mêmes parties et formée par elles ou contre elles en la même qualité.
En effet, le droit de repentir fait naitre un nouveau bail et ne fait pas revivre le bail expiré, de sorte que le nouveau bail ne peut être résilié sur la base d'un arriéré de loyers afférent à la période du bail expiré. Ainsi , l'exercice du droit de repentir ne saurait rendre recevable la demande tendant à voire prononcer la résiliation du bail par le jeu de la clause résolutoire notifiée avec le commandement de payer des 23 et 27 janvier 2015.
Le caractère irrévocable de l'exercice du droit de repentir fait également obstacle à la résiliation judiciaire du bail pour non-paiement de loyers échus en 2014.
Dès lors , les consorts [G] doivent être déclarés irrecevables en leurs demandes tendant à faire constater l'acquisition de la clause résolutoire pour défaut de paiement du commandement de payer délivré les 23 et 27 janvier 2015 et subsidiairement à voir prononcer la résiliation du bail pour non-paiement des loyers et charges de 2014
Sur la demande en paiement de la somme de 2488 euros au titre des loyers ou indemnités d'occupation ( et non d'éviction comme mentionné par erreur dans les conclusions des intimés) de 2014.
Les bailleurs réclament le paiement d'une somme de 2488 euros au titre de l'année 2014. La cour , dans le dispositif de l'arrêt du 10 septembre 2015, n'a pas statué sur cette prétention qui figurait pourtant dans les conclusions des consorts [G].
Cette demande n'est donc pas atteinte par la fin de non-recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée.
La comparaison des relevés de comptes du preneur ( pièces 14 et 15) et ceux de Mme [K] [G] ( pièce 10) permet de vérifier que les termes visés par le commandement de payer des 23 et 27 janvier 2015 ont bien été réglés.
Cependant, par application des principes d'imputation des paiements reçus du débiteur, définis par l'article 1256 ancien du code civil, les bailleurs soutiennent que les règlements effectués par le preneur entre mai et décembre 2014 se sont imputés sur une dette de loyer de février, mars et avril 2014, laissant subsister un impayé pour octobre et novembre 2014, justifiant le commandement de payer délivré.
Ce moyen s'appuie sur les relevés de compte produits par les consorts [G] pour la période comprise entre le 1er mars 2014 et le 2 février 2015, lesquels ne font pas apparaître en écritures portées au crédit du compte pour les mois de mars et avril 2014, le montant des loyers dus.
Si Monsieur [E] réplique qu' il est à jour du paiement des termes de l'année 2014, il lui appartient d'en justifier.
En effet, en application de l'article 1315 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance 2016-131 du 10 février 2016, devenu l'article 1353 nouveau du même code, il appartient à celui qui se prétend libéré d'une obligation de justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation.
Or, M [E] s' il justifie de paiements d'octobre et novembre 2014, correspondant au montant du loyer, devenu indemnité d'occupation à compter de la date d'effet du congé délivré, n' établit pas être à jour des termes échus entre février et septembre 2014 inclus, de sorte qu'il ne démontre pas s' être libéré de la dette invoquée par le bailleur.
M. [V] [E] sera en conséquence condamné au paiement de la somme de 2488 euros correspondant à l'arriéré des indemnités d'occupation dues au titre de l'année 2014, le jugement étant infirmé de ce chef.
Sur la demande de résiliation du bail pour construction d'un mur de clôture sans autorisation du bailleur':
Les consorts [G] sollicitent la confirmation du jugement déféré en ce qu'il a condamné in solidum M [V] [E] et l'EIRL L'OUSTAOU DE [Localité 6] à démolir le mur de clôture édifié par leurs soins sur la propriété des consorts [G], sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la signification du jugement.
Ils soutiennent que suite à la visite des services de la ville de de [Localité 5], ils ont découvert que l'EIRL l'OUSTAOU DE [Localité 6] avait érigé sur leur propriété un mur de clôture en agglo surmonté de poteaux en béton , sans la moindre autorisation administrative, de sorte qu'un procès-verbal d'infraction a été dressé le 14 avril 2017.
M [V] [E] réplique que la construction de ce mur a été régularisée par une déclaration en mairie qui n'a pas donné lieu à opposition'; que le preneur, afin d'améliorer l'immeuble, a changé le vieux portail brinquebalant et la clôture vétuste en un mur de clôture de grand qualité , dans le prolongement du mur existant, pour pouvoir exploiter au mieux son fonds de commerce'; que l'ouvrage réalisé ne nuit pas à l'aspect extérieur de l'immeuble'; qu'il s'agit d'un mur de soutènement qui a pour fonction de retenir des terres afin d'éviter qu'elles se retrouvent sur la chaussée.
Il ajoute qu'avec le locataire gérant , ils ont fait intervenir un ingénieur qui dans son rapport du 29 mai 2024 qualifie le mur de mur de soutènement'; que le terrain est une colline avec un dénivelé important entre le bâtiment et la route.
Il considère que ces travaux de conservation du bien n'avaient pas à être autorisés par le bailleur et qu'ils auraient dû être réalisés par ce dernier sur qui le bail fait peser l'obligation de tenir les lieux clos et couverts. Au contraire, le bailleur a laissé le mur de clôture se détériorer.
Cependant, il n'est pas établi que l'entretien du mur qui ne relève pas des grosses réparations incombait au bailleur. En outre, au vu des photographies versées aux débats, les travaux d'édification réalisés au niveau du portail d'accès, présentent une réduction de l'ouverture, la pose d'une porte métallique, sous linteau, en remplacement d'un portail à doubles vantaux, la surélévation du mur préexistant, de plus d'un mètre, la pose de poteaux raidisseurs dont le sommet dépasse la crête du mur de plus d'un mètre également, et la réalisation d'un mur en retrait du mur préexistant à la jonction du second poteau raidisseur à droite de la porte d'entrée.
Cette réalisation a manifestement modifié l'aspect extérieur du mur de clôture de manière non harmonieuse, en créant un ouvrage beaucoup plus massif qui dénote avec la hauteur et le volume du bâtiment d'exploitation. Ces travaux nuisent ainsi à l'aspect extérieur de l'immeuble au sens de l'article 5 du bail «' changement de distribution-travaux'», ce qui justifie la remise en état des lieux et la démolition de l'ouvrage réalisé sans l'autorisation du bailleur. Cependant, la faute commise n'est pas de nature à justifier la résiliation du bail renouvelé, la remise en état ordonnée étant de nature à réparer l'atteinte portée temporairement à l'aspect extérieur de l' immeuble.
Le jugement est en conséquence confirmé, mais seulement en ce qu'il a condamné le preneur M. [V] [E] à démolir le mur de clôture édifié par ses soins ou ceux de son locataire-gérant, sur la propriété des consorts [G], sous astreinte de 100 euros par jour de retard et d'ajouter que l'astreinte sera due au-delà d'un délai de six mois passé la signification du présent arrêt. En effet, l'EIRL L'OUSTAOU DE [Localité 6], dépourvue de personnalité juridique, ne peut être condamnée aux lieu et place du locataire-gérant qui est [J] [E]. Il convient également d'accorder au preneur un délai utile pour procéder à la démolition du mur construit irrégulièrement.
Les consorts [G] sont en revanche déboutés de leur demande de résiliation du bail renouvelé fondée sur la construction de ce mur.
Par suite , il convient de les débouter de leurs demandes subséquentes tendant à voir ordonner l'expulsion de Monsieur [V] [E] et de tout occupant des lieux de son chef, le transport des meubles garnissant les lieux loués dans un garde-meuble, en garantie des sommes dues au bailleur et à voir fixer le montant de l'indemnité d'occupation à la somme de 1244 euros.
Sur les demandes indemnitaires des appelants':
Etant observé que l'EIRL [E] [J] n'a pas de personnalité juridique, que le locataire gérant [J] [E] n'est pas en tant que tel partie à l'instance et qu'aucune demande indemnitaire n'est formée au bénéfice de ce dernier, il convient d'en déduire que les demandes de dommages et intérêts sont formées par le preneur [V] [E] qui a l'obligation de justifier d'un préjudice personnel en lien avec les fautes qu'il impute au bailleur
Sur la demande de condamnation à une somme de 20'000,00 euros pour procédure abusive, il convient de rappeler que le droit d'agir en justice, y compris en appel, ne dégénère en abus pouvant donner naissance à une dette de dommages et intérêts que dans le cas de malice, de mauvaise foi ou d'erreur grossière équipollente au dol, ce qui n'est pas démontré , au stade de la présente instance, compte tenu de la position respective des parties. En effet , des retards de paiement du loyer ont été enregistrés qui ont justifié les commandements de payer délivrés. Si le locataire gérant est à jour du paiement du loyer au preneur selon les liasses comptables des exercices 2012 à 2014, en revanche M [V] [E] ne justifie pas avoir reversé au bailleur la totalité du loyer dû au titre de l'année 2014. En outre, un nouveau commandement de payer lui a été délivré le 10 avril 2017 qui a été régularisé, cette fois, dans le mois suivant sa délivrance faisant obstacle au jeu de la clause résolutoire. Enfin , même si la résiliation du bail n'est pas prononcée de ce chef, il convient de rappeler que la construction d'un mur de clôture portant atteinte à l'aspect extérieur de l'immeuble constitue un manquement du preneur à l' une des obligations qui pèsent sur lui en exécution du bail.
Dans ces conditions, le caractère abusif de la procédure suivie par les consorts [G] n'est nullement caractérisé, le reproche ne pouvant leur être fait d'avoir refusé le renouvellement du bail avant d'exercer leur droit de repentir.
S'agissant de la somme de 50'000,00 euros à titre forfaitaire, réparant d' une part une baisse de chiffre d'affaires de l'exploitant, soit le locataire gérant, et les frais de procédure exposés devant le tribunal en 2014, devant la cour d'appel en 2015 et devant le tribunal de grande instance au cours de la procédure initiée en mars 2015, cette demande ne peut être que rejetée. En effet, le preneur ne justifie pas d'un préjudice financier personnel et les demandes de remboursement des frais de procédure engagés ont déjà été examinées par les différentes juridictions saisies, au travers du filtre de l' équité, en réponse aux demandes formées en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Enfin, s'agissant de la demande de réparation d'un préjudice moral à hauteur de 20'000,00 euros, force est de constater que le preneur se contente d'invoquer son âge sans justifier d'une quelconque atteinte d'ordre moral, ni de son lien avec le comportement procédural des intimés.
Le jugement est en conséquence confirmé en ce qu'il a rejeté ces demandes indemnitaires.
Sur les demandes annexes':
Chacune des parties succombant partiellement, conservera la charge de ses dépens de première instance et d'appel.
Par suite , l'équité ne justifie pas de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS':
La cour, statuant par arrêt mis à disposition au greffe , contradictoirement et en dernier ressort,
Rejette les fins de non-recevoir soulevées par les appelants en application des articles 564 et suivants et 910-4 du code de procédure civile, pour demandes nouvelles ou tardives,
Infirme le jugement en ce qu'il a':
- jugé recevable l'EIRL L'OUSTAOU DE [Localité 6], venant aux droits de la SARL L'OUSTAOU DE [Localité 6] en son intervention volontaire et en ses demandes,
- déclaré irrecevable la demande de paiement d'une somme de 2488 euros correspondant à deux mois d'arriérés de loyers de l'année 2014,
- condamné in solidum [V] [E] et l'EIRL L'OUSTAOU DE [Localité 6] à démolir le mur de clôture édifié sur la propriété des consorts [G] objet du bail commercial , sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la signification du jugement.
Statuant à nouveau des chefs infirmés,
Déclare irrecevable l'EIRL L'OUSTAOU DE [Localité 6] en son intervention et en ses demandes,
Reçoit les consorts [G] en leur demande de condamnation de M. [V] [E] à leur payer la somme de 2488 euros au titre d' un arriéré de deux mois d'indemnité d'occupation impayés sur l'exercice 2014,
Condamne M. [V] [E] à payer aux consorts [G] la somme de 2488 euros au titre d' un arriéré de deux mois d'indemnité d'occupation impayés sur l'exercice 2014,
Déclare irrecevable la même demande dirigée contre l'EIRL L'OUSTAOU DE [Localité 6],
Déclare irrecevable les consorts [G] en leur demande de condamnation de l'EIRL L'OUSTAOU DE [Localité 6] à démolir le mur de clôture édifié sur la propriété des consorts [G], objet du bail commercial, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la signification du jugement.
Condamne [V] [E] à démolir le mur édifié sans autorisation du bailleur, sur la propriété objet du bail commercial, et à remettre les lieux dans leur état antérieur, sous astreinte de 100 euros par jour de retard passé le délai de six mois suivant la signification du présent arrêt.
Confirme le jugement pour le surplus de ses dispositions,
Y ajoutant,
Déclare régulier l'exercice du droit de repentir aboutissant à la conclusion d'un nouveau bail,
Déboute les consorts [G] de leur demande de résiliation du bail renouvelé fondée sur la réalisation d' un mur de clôture sans autorisation, et des demandes subséquentes aux fins de fixation d'une indemnité d'occupation, d'expulsion et de vidange des lieux loués,
Dit que chacune des parties conservera la charge des dépens qu'elle a exposés au cours de l'instance,
Déboute les parties de leur demande respective fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRESIDENT