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Décisions

CA Aix-en-Provence, ch. 1-2, 12 juin 2025, n° 24/09374

AIX-EN-PROVENCE

Arrêt

Autre

CA Aix-en-Provence n° 24/09374

12 juin 2025

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-2

ARRÊT

DU 12 JUIN 2025

N° 2025/355

Rôle N° RG 24/09374 - N° Portalis DBVB-V-B7I-BNOKE

S.A.S.U. ETABLISSEMENTS SEBBAN

S.A.S.U. SAM REPUBLIQUE

C/

[G] [D]

[H] [D]

[X] [D]

[J] [O] épouse [D]

[Y] [D]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Olivier TARI de la SCP BBLM

Me Paul GUEDJ de la SCP COHEN GUEDJ - MONTERO - DAVAL GUEDJ

Me Cindy FRIGERIO

Décision déférée à la Cour :

Ordonnance de référé rendue par le Tribunal judiciaire d'AIX-EN-PROVENCE en date du 16 Juillet 2024 enregistrée au répertoire général sous le n° 24/01270.

APPELANTES

S.A.S.U. ETABLISSEMENTS SEBBAN

représentée par son représentant légal en exercice

dont le siège social est situé [Adresse 1]

représentée par Me Olivier TARI de la SCP BBLM, avocat au barreau de MARSEILLE substitué par Me Agathe PESTEL DEBORD, avocat au barreau de MARSEILLE, plaidant

S.A.S.U. SAM REPUBLIQUE

représentée par son représentant légal en exercice

dont le siège social est situé [Adresse 1]

représentée par Me Olivier TARI de la SCP BBLM, avocat au barreau de MARSEILLE substitué par Me Agathe PESTEL DEBORD, avocat au barreau de MARSEILLE, plaidant

INTIMES

Madame [G] [D]

née le 18 mai 1981 à [Localité 12], demeurant [Adresse 6]

représentée par Me Paul GUEDJ substitué par Me Maud DAVAL-GUEDJ de la SCP COHEN GUEDJ - MONTERO - DAVAL GUEDJ, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

et assistée de Me Benoît DERIEUX, avocat au barreau de PARIS, plaidant

Monsieur [X] [D]

né le 18 mai 1981 à [Localité 12], demeurant [Adresse 8] (Italie)

représenté par Me Paul GUEDJ substitué par Me Maud DAVAL-GUEDJ de la SCP COHEN GUEDJ - MONTERO - DAVAL GUEDJ, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

et assisté de Me Benoît DERIEUX, avocat au barreau de PARIS, plaidant

Madame [J] [O] épouse [D]

née le 08 mai 1944 à [Localité 15], demeurant [Adresse 5]) ITALIE

représentée par Me Paul GUEDJ substitué par Me Maud DAVAL-GUEDJ de la SCP COHEN GUEDJ - MONTERO - DAVAL GUEDJ, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

et assistée de Me Benoît DERIEUX, avocat au barreau de PARIS, plaidant

Madame [Y] [D]

née le 22 mars 1963 à [Localité 13] (ITALIE), demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Cindy FRIGERIO, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

et assistée de Me Nathalie BENHAMOU de la LEV LAW AVOCATS SELARLU, barreau de PARIS, plaidant

Monsieur [H] [D]

né le 14 février 1958 à [Localité 14], demeurant [Adresse 7]

représenté par Me Cindy FRIGERIO, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

et assisté de Me Nathalie BENHAMOU de la LEV LAW AVOCATS SELARLU, barreau de PARIS, plaidant

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 06 mai 2025 en audience publique. Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, Mme MOGILKA, Conseillère, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

M. Gilles PACAUD, Président

Mme Angélique NETO, Conseillère

Mme Séverine MOGILKA, Conseillère rapporteur

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Julie DESHAYE.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 12 juin 2025.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 12 juin 2025,

Signé par M. Gilles PACAUD, Président et Mme Caroline VAN-HULST, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSE DU LITIGE :

De leur vivant, [V] [D], en tant que nu-propriétaire, et [U] [D], en tant qu'usufruitière, d'un ensemble immobilier situé [Adresse 4] à [Localité 11], ont donné à bail commercial à :

- la société à responsabilité limitée (SARL) Max Guerin, aux droits de laquelle intervient la société par actions simplifiée (SAS) Apogon, exerçant sous l'enseigne Bricorama, suivant acte sous seing privé en date du 26 janvier 2005, des locaux se trouvant au rez-de-chaussée ;

- la société hôtelière d'[Localité 10] (SHAP), aux droits de laquelle intervient la société par actions simplifiée (SAS) Artea 2, suivant acte sous seing privé en date du 24 décembre 2005, des locaux situés aux 1er et 2ème étage ;

- la brasserie le Grenier de grand-mère des locaux situés au rez-de-chaussée ;

- un assureur exerçant sous l'enseigne Assu 2000 des locaux situés au rez-de-chaussée.

[U] [D] est décédée en janvier 2008.

[V] [D] est décédé le 5 octobre 2014 en laissant pour lui succéder :

- son épouse, Mme [J] [D] née [O] ;

- leurs deux enfants, Mme [G] [D] et M. [X] [D] ;

- deux enfants issus d'une précédente union, Mme [Y] [D] et M. [H] [D].

Mme [J] veuve [D] est devenue l'usufruitière de l'ensemble immobilier susvisé et les quatre enfants de feu M. [V] [D] les nus-propriétaires indivis.

Se plaignant d'un manquement des consorts [D] à leurs obligations de délivrance et d'entretien, la société Artea 2 les a fait assigner, par actes d'huissier en date du 6 novembre 2018, en référé-expertise.

Une expertise a été ordonnée par ordonnance en date du 18 juin 2018.

M. [F], expert désigné, a rendu son rapport le 22 décembre 2020. Il a notamment préconisé la remise en état de la toiture, la mise en sécurité des charpentes fragilisées et le confortement des planchers.

Un premier arrêté de péril a été pris par la commune d'[Localité 10] le 11 mars 2022.

Un deuxième arrêté de péril a été pris par la même commune le 17 février 2023.

Par jugement en date du 26 octobre 2023, le tribunal de commerce d'Aix en Provence a prononcé la liquidation judiciaire de la société Artea 2, placée précédemment sous sauvegarde puis en redressement judiciaire.

Par ordonnance en date du 20 décembre 2023, le juge commissaire du tribunal de commerce d'Aix en Provence a autorisé la cession du fonds de commerce exploité par la société Artea 2 à la société par actions simplifiée Foodaix, désormais dénommée Etablissements Sebban, ou toute autre personne que celle-ci entendait se substituer.

La société Sam République s'est substituée au cessionnaire initial.

Mme [J] [D] a exercé un recours à l'encontre de cette ordonnance du juge commissaire.

Par courrier en date du 18 mars 2024, les consorts [D] ont délivré congé avec refus de renouvellement, pour le 30 septembre 2024, à la société Artea 2 et en tant que de besoin et sous toutes réserves, à la société Foodaix, désormais dénommée Etablissement Sebban et à la société Sam République.

Par un troisième arrêté en date du 21 mars 2024, la commune d'[Localité 10] a interdit l'occupation de l'ensemble de l'immeuble et fait injonction à la société Artea 2 et aux consorts [D] d'étayer le plancher haut du rez-de-chaussée ou de procéder à son curage afin d'éliminer les surcharges qui le fragilisent.

Les consorts [D] ont chargé, le 29 mars 2024, le cabinet Ortis Architecture de leur proposer une mission à même de répondre aux prescriptions de la commune et d'obtenir la mainlevée du dernier arrêté qui a été pris.

Des échanges sont intervenus entre les conseils des consorts [D] et des sociétés Sam République et Etablissement Sebban.

Par ordonnance en date du 16 avril 2024, le juge des référés du tribunal judiciaire d'Aix en Provence a :

- condamné in solidum les consorts [D], à procéder ou faire procéder au curage du plancher haut du rez-de-chaussée de l'immeuble sis [Adresse 3] à [Localité 10] afin de permettre à la société Apogon de pouvoir à nouveau exploiter son activité dans le local donné à bail, et ce, sous le contrôle d'un bureau de contrôle dûment agréé, sous astreinte provisoire de 2 000 euros par jour de retard passé un délai de 48 heures suivant la signification de l'ordonnance à intervenir, pendant 3 mois ;

- condamné in solidum les consorts [D] à payer à la société Apogon, à titre de provision, la somme de 3 000 euros par jour, à compter du 21 mars 2024 et jusqu'au 16 avril 2024 ;

- condamné in solidum M. [H] [D], Mme [Y] [D], Mme [G] [D], M. [X] [D] et Mme [J] veuve [D] à payer à la société Apogon la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre aux dépens.

Les consorts [D] ont interjeté appel de cette décision.

Par acte de commissaire de justice en date du 24 mai 2024, les consorts [D] ont fait sommation aux sociétés Etablissements Sebban, anciennement Foodaix, et Sam république, de remettre au cabinet Ortis Architecture toutes clés lui permettant d'accéder ou faire accéder librement dans les lieux, de débarrasser ou faire débarrasser les locaux qu'elles occupent dans l'ensemble immobilier de tous les éléments occupant une emprise sur les surfaces de plancher concernées afin de permettre la réalisation des travaux prescrits par l'arrêté du 21 mars 2024 et l'ordonnance du 16 avril 2024 précité.

Par acte de commissaire de justice en date du 3 juillet 2024, Mmes [J], [Y] et [G] [D], MM. [H] et [X] [D] ont fait assigner les sociétés Etablissements Sebban, anciennement Foodaix, et Sam république, devant le président du tribunal judiciaire d'Aix en Provence, statuant en référé, aux fins de voir :

- condamner solidairement les sociétés à leur remettre ou à toute personne désignée par eux, tous clés, badges ou codes d'accès permettant au cabinet Ortis Architecture d'accéder librement ou de faire accéder librement, sous sa responsabilité, les entreprises et bureaux d'études missionnés afin de réaliser les travaux prescrits par l'arrêté du 21 mars 2024 et l'ordonnance du 16 avril 2024, aux locaux qu'elles occupent dans l'ensemble immobilier situé [Adresse 4] à [Localité 9] ;

- assortir cette condamnation d'une astreinte de 2 000 euros par jour de retard passé un délai de 48 heures suivant signification de l'ordonnance à intervenir et jusqu'à remise desdits clés, badges ou codes d'accès ;

- condamner solidairement les sociétés à débarrasser ou faire débarrasser les locaux qu'elles occupent dans l'ensemble immobilier situé [Adresse 4] à [Localité 9] de tous les éléments, mobiliers et équipements occupant une emprise sur les surfaces de plancher concernées, afin de permettre la réalisation des travaux prescrits par l'arrêté du 21 mars 2024 et l'ordonnance du 16 avril 2024 ;

- assortir cette condamnation d'une astreinte de 2 000 euros par jour de retard passé un délai de 48 heures suivant signification de l'ordonnance à intervenir et jusqu'à complet débarras ;

- condamner solidairement les sociétés à leur payer la somme de 15 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par ordonnance contradictoire en date du 16 juillet 2024, le juge des référés du tribunal judiciaire d'Aix en Provence a :

- condamné in solidum les sociétés Etablissements Sebban et Sam République à remettre ou à toute personne désignée par les consorts [D], tous clés, badges ou codes d'accès permettant au cabinet Ortis Architecture d'accéder librement ou de faire accéder librement, sous sa responsabilité, les entreprises et bureaux d'études missionnés afin de réaliser les travaux prescrits par l'arrêté du 21 mars 2024 et l'ordonnance du 16 avril 2024, aux locaux occupés dans l'ensemble immobilier situé [Adresse 4] à [Localité 9] ;

- condamné in solidum les sociétés Etablissements Sebban et Sam République à débarrasser ou faire débarrasser les locaux occupés dans l'ensemble immobilier situé [Adresse 4] à [Localité 9] de tous les éléments, mobiliers et équipements occupant une emprise sur les surfaces de plancher concernées, afin de permettre la réalisation des travaux prescrits par l'arrêté du 21 mars 2024 et l'ordonnance du 16 avril 2024 :

- condamné in solidum les sociétés Etablissements Sebban et Sam République à payer aux consorts [D] une astreinte totale de 500 euros par jour de retard passé un délai de cinq jours suivant la signification de l'ordonnance en cas d'inexécution d'au moins une des obligations mises ci-dessus à leur charge, et jusqu'à complet débarras ;

- rejeté la demande de provision ;

- débouté les sociétés Etablissements Sebban et Sam République de l'ensemble de leurs prétentions ;

- condamné in solidum les sociétés Etablissements Sebban et Sam République à payer aux consorts [D] la somme totale de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure

Civile, outre les dépens.

Ce magistrat a, notamment, considéré que :

- le bail mettait à la charge du preneur les obligations de laisser pénétrer le bailleur ou ses préposés dans les lieux et de déposer le mobilier dont l'enlèvement serait nécessaire pour l'exécution de travaux ;

- les demandes pour débuter les travaux étaient motivées par l'obligation des bailleurs résultant de l'ordonnance du 16 avril 2024 et le coût important résultant de la non-exécution ;

- la nécessité de débarrasser était justifiée par un rapport d'expertise.

Par déclaration en date du 19 juillet 2024, les sociétés Etablissements Sebban et Sam République ont interjeté appel de la décision, l'appel visant à la critiquer en toutes ses dispositions sauf en ce qu'elle a rejeté la demande de provision.

Le 23 juillet 2024, les sociétés Etablissements Sebban et Sam République ont remis les clés des locaux aux consorts [D].

Suite à la réalisation de travaux, le 28 novembre 2024, la mairie d'[Localité 9] a levé l'arrêté du 21 mars précédent.

Par arrêt en date du 5 décembre 2024, la cour d'appel d'Aix en Provence a infirmé l'ordonnance du 20 décembre 2023 du juge commissaire du tribunal de commerce et condamné la société Foodaix, dénommée désormais Etablissement Sebban, ainsi que tout occupant de son chef, à libérer les locaux.

Par courrier en date du 10 décembre 2024, la société Les Mandataires, ès qualité de liquidateur de la société Artea 2, a résilié le contrat de bail.

Par arrêt en date du 13 février 2025, la cour d'appel d'Aix en Provence a :

- infirmé l'ordonnance du juge des référés du tribunal judiciaire d'Aix en Provence du 16 avril 2024 en ce qu'elle a condamné in solidum les consorts [D] à payer à la société Apogon, à titre de provision, la somme de 3 000 euros par jour, à compter du 21 mars 2024 et jusqu'au 16 avril 2024 ;

- confirmé cette ordonnance en toutes ses autres dispositions ;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

- condamné in solidum les consorts [D] à payer à la société Apogon, à titre de provision, la somme de 360 000 euros à valoir sur la réparation du préjudice de jouissance subi pendant 8 mois ;

- dit n'y avoir de statuer sur les demandes de restitutions formées par M. [X] [D] et Mme [J] veuve [D] ;

- condamné in solidum les consorts [D] à payer à la société Apogon la somme de 5 000 euros pour les frais exposés en appel non compris dans les dépens en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- débouté les consorts [D] de leurs demandes formées sur le même fondement ;

- condamné in solidum les consorts [D] aux dépens de la procédure d'appel.

Par conclusions transmises le 18 avril 2025, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des prétentions et moyens, les sociétés Etablissements Sebban et Sam République demandent à la cour de :

- infirmer l'ordonnance déférée en ce qu'elle a :

- condamné in solidum les sociétés Etablissements Sebban et Sam République à remettre ou à toute personne désignée par les consorts [D] tous clés, badges ou codes d'accès permettant au cabinet Ortis Architecture d'accéder librement ou de faire accéder librement, sous sa responsabilité, les entreprises et bureaux d'études missionnés afin de réaliser les travaux prescrits par l'arrêté du 21 mars 2024 et l'ordonnance du 16 avril 2024, aux locaux occupés dans l'ensemble immobilier situé [Adresse 4] à [Localité 9] ;

- condamné in solidum les sociétés Etablissements Sebban et Sam République à débarrasser ou faire débarrasser les locaux occupés dans l'ensemble immobilier situé [Adresse 4] à [Localité 9] de tous les éléments, mobiliers et équipements occupant une emprise sur les surfaces de plancher concernées, afin de permettre la réalisation des travaux prescrits par l'arrêté du 21 mars 2024 et l'ordonnance du 16 avril 2024 ;

- condamné in solidum les sociétés Etablissements Sebban et Sam République à payer aux consorts [D] une astreinte totale de 500 euros par jour de retard passé un délai de cinq jours suivant la signification de l'ordonnance en cas d'inexécution d'au moins une des obligations mises ci-dessus à leur charge, et jusqu'à complet débarras ;

- débouté les sociétés Etablissements Sabban et Sam République de l'ensemble de leurs prétentions ;

Statuant à nouveau :

- constater l'absence de résistance abusive de la part des défenderesses ;

Par conséquent :

- débouter de l'ensemble de leur demandes, fins et prétentions les consorts [D] ;

En tout état de cause :

- condamner in solidum les consorts [D] à payer aux sociétés Etablissements Sebban et Sam République la somme de 20.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens distraits au profit de la SCP BBLM par le ministère de Me Olivier Tari sur son affirmation de droits.

Au soutien de leurs prétentions, les sociétés Etablissements Sebban et Sam République exposent, notamment, que :

- elles ne se sont jamais opposées à la réalisation des travaux ;

- les consorts [D] ont laissé l'immeuble se dégrader et n'ont agi qu'après le troisième arrêté de mise en sécurité et leur condamnation au paiement d'une provision à la société Apogon ;

- leur proposition d'acquérir le bail en connaissance de l'état de l'immeuble n'était pas de nature à dispenser les bailleurs de la réalisation des travaux permettant l'exploitation du fonds ;

- elles ont sollicité des garanties légitimes pour permettre l'accès aux lieux compte tenu du fait que :

- les bailleurs ont laissé l'immeuble se dégrader ;

- seule la levée des trois arrêtés de péril devait permettre la jouissance paisible des lieux ;

- elles ont évacué le mobilier en exécution de l'ordonnance entreprise ;

- elles n'étaient pas encore propriétaires du mobilier ;

- la clause contractuelle leur faisant supporter les travaux de réparation et les frais de dépose succombe devant l'absence de respect par les bailleurs de leur obligation de délivrance ;

- n'étant plus attributaires de la vente du fonds de commerce de la société Artea 2 et n'occupant plus les locaux, elles se désistent de leur demande de condamnation des consorts [D] à réaliser des travaux en vue de la levée des arrêtés de mise en sécurité.

Par conclusions transmises le 10 avril 2025, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des prétentions et moyens, Mme [G] et [J] [D], M. [X] [D] demandent à la cour de :

- confirmer l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a :

- condamné in solidum les sociétés Etablissements Sebban et Sam République à remettre ou à toute personne désignée par les consorts [D] tous clés, badges ou codes d'accès permettant au cabinet Ortis Architecture d'accéder librement ou de faire accéder librement, sous sa responsabilité, les entreprises et bureaux d'études missionnés afin de réaliser les travaux prescrits par l'arrêté du 21 mars 2024 et l'ordonnance du 16 avril 2024, aux locaux occupés dans l'ensemble immobilier situé [Adresse 4] à [Localité 9] ;

- condamné in solidum les sociétés Etablissements Sebban et Sam République à débarrasser ou faire débarrasser les locaux occupés dans l'ensemble immobilier situé [Adresse 4] à [Localité 9] de tous les éléments, mobiliers et équipements occupant une emprise sur les surfaces de plancher concernées, afin de permettre la réalisation des travaux prescrits par l'arrêté du 21 mars 2024 et l'ordonnance du 16 avril 2024 ;

- condamné in solidum les sociétés Etablissements Sebban et Sam République à payer aux consorts [D] une astreinte totale de 500 euros par jour de retard passé un délai de cinq jours suivant la signification de l'ordonnance en cas d'inexécution d'au moins une des obligations mises ci-dessus à leur charge, et jusqu'à complet débarras ;

- débouté les sociétés Etablissements Sebban et Sam République de l'ensemble de leurs prétentions ;

- condamné in solidum les sociétés Etablissements Sebban et Sam République à payer

aux consorts [D] une somme au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné in solidum les sociétés Etablissements Sebban et Sam République aux dépens.

- infirmer l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a :

- rejeté la demande de provision ;

- cantonné la condamnation in solidum les sociétés Etablissements Sebban et Sam République au titre de l'article 700 du Code de procédure civile à la somme de 2.000 euros ; Statuant à nouveau :

- condamner solidairement la société Foodaix, désormais dénommée Etablissements Sebban et la société Sam république au paiement d'une provision de 200 000 euros à valoir sur dommages-intérêts ;

- condamner solidairement les sociétés Etablissements Sebban et Sam République au paiement de la somme de 20 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile couvrant les frais exposés en première instance puis en appel, ces derniers distraits au profit de la SCP Cohen Guedj Montero Daval Guedj sur son offre de droit ;

- condamner les sociétés Etablissements Sebban et Sam République aux entiers dépens de l'appel ;

- débouter les sociétés Etablissements Sebban et Sam République de l'intégralité de leurs demandes.

A l'appui de leurs demandes, Mme [G] et [J] [D], M. [X] [D] font, notamment, valoir que :

- il y avait urgence à entreprendre les travaux en raison de l'arrêté du 21 mars 2024 et de l'ordonnance du 16 avril 2024 du juge des référés du tribunal judiciaire d'Aix en Provence ;

- la société Apogon souhaite voir augmenter l'astreinte assortissant la condamnation à la réalisation des travaux, ce qui confirme l'urgence ;

- aucune contestation sérieuse ne peut être opposée au principe de la réalisation de travaux ;

- en application du contrat de bail, le preneur devait laisser l'accès aux locaux pour la réalisation des travaux et les débarrasser de tous éléments mobiliers et équipements occupant une emprise sur les surfaces de plancher ;

- le péril pesant sur l'immeuble au sens de l'arrêté constitue un dommage imminent tout comme la situation financière des bailleurs sur lesquels pèse une astreinte ;

- la résistance des appelants constitue un trouble manifestement illicite ;

- la résistance des appelants leur a causé un préjudice équivalent au montant des sommes qui sont réclamées par la société Apogon qui a obtenu une provision de 360 000 euros sur son préjudice d'exploitation ;

- la première sollicitation pour obtenir la remise des clés ayant eu lieu le 19 avril 2024 et les travaux n'ayant pu débuter que le 23 septembre suivant, après remise des clés le 23 juillet, la perte d'exploitation de la société Apogon devant être indemnisée par les bailleurs s'élevait au cours de cette période à la somme de 193 500 euros, par application du barème journalier de 1 500 euros retenu par la cour dans son arrêt du 13 février 2025 ;

- le désencombrement des lieux est intervenu postérieurement de telle sorte que la provision peut être fixée à 200 000 euros.

Par conclusions transmises le 21 avril 2025, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des prétentions et moyens, M. [H] et Mme [Y] [D] demandent à la cour de confirmer l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions sauf en ce qui concerne la provision sur les dommages et intérêts pour résistance abusive et les articles 699 et 700 du code de procédure civile.

Statuant à nouveau, ils sollicitent :

- le débouté des sociétés de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions ;

- la condamnation solidaire des sociétés Etablissements Sebban et Sam République au paiement de la somme de 200 000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive en empêchant M. [H] et Mme [Y] [D] de débuter les travaux en raison de l'absence de remise des clefs et l'évacuation des locaux de la totalité des biens meubles ;

- la confirmation du principe de condamnation des sociétés Etablissements Sebban et Sam République aux frais et dépens de première instance mais l'infirmation de l'ordonnance sur le quantum de la condamnation ;

- la condamnation solidaire des sociétés Etablissements Sebban et Sam République à verser à M. [H] et Mme [Y] [D] :

- la somme de 20.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre aux entiers dépens de première instance ;

- la somme de 20.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;

- la condamnation solidaire des sociétés Etablissements Sebban et Sam République aux entiers dépens dont distraction sera faite au profit de Me Cindy Frigerio conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Au soutien de leurs demandes, M. [H] et Mme [Y] [D] expliquent, notamment, que :

- les consorts [D] ont sollicité les sociétés appelantes pour permettre l'accès aux locaux et la réalisation des travaux ;

- face à l'inertie des sociétés, ils ont dû recourir à une procédure de référé d'heure à heure ;

- les sociétés appelantes se sont octroyées le droit de mettre des conditions à la remise des clés et pour débarrasser les locaux, ce qui constitue une résistance abusive ;

- ils ont subi un préjudice grave suite à cette résistance des sociétés Etablissements Sebban et Sam république.

L'instruction de l'affaire a été close par ordonnance en date du 22 avril 2025.

Par soit transmis en date du 9 mai 2025, la cour a informé les conseils des parties qu'elle entendait soulever d'office la difficulté en lien avec la formulation à titre définitif et non provisionnel de la demande en paiement d'une somme de 200 000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive empêchant M. [H] et Mme [Y] [D] de débuter les travaux en raison de l'absence de remise des clés et de l'évacuation des locaux de la totalité des biens meubles. Elle leur a donc imparti un délai, expirant le 19 mai 2025, à minuit, pour lui faire parvenir leurs observations sur ce point de droit, par le truchement d'une note en délibéré.

Par note transmise le 15 mai 2025, le conseil des sociétés Etablissements Sebban et Sam République souligne que les consorts [D] sollicitent la condamnation des appelants à payer la somme de 200 000 euros, sans préciser à qui et que faute d'avoir précisé le caractère provisionnel, la demande de dommages et intérêts est irrecevable.

Par note transmise le 16 mai 2025, le conseil de M. [H] et Mme [Y] [D] indique à la cour que la demande de dommages et intérêts doit être considérée comme étant formulée à titre provisionnel dans la mesure où le dispositif des conclusions comporte une demande de confirmation de l'ordonnance en date du 16 juillet 2024 « sauf en ce qui concerne la demande de provision sur dommages et intérêts pour résistance abusive » et vise les dispositions de l'article 835 du code de procédure civile, où lors de l'audience de plaidoirie, la demande a été formulée à titre provisionnel et où dans l'esprit des parties adverses, la demande est également formulée à titre provisionnel.

MOTIFS DE LA DECISION :

A titre liminaire, il doit être relevé que si la déclaration d'appel critique le débouté des sociétés Etablissements Sebban et Sam République de l'ensemble de leurs prétentions et que le dispositif des dernières conclusions de ces sociétés sollicite l'infirmation de l'ordonnance déférée de ce chef, ces dernières ne formulent plus de demande de condamnation des consorts [D] à faire procéder à des travaux.

Dès lors, la cour doit confirmer l'ordonnance déférée en ce qu'elle a débouté les sociétés Etablissements Sebban et Sam République de leurs demandes de réalisation de travaux.

- Sur la remise des clés, badges ou codes d'accès et le débarrassage des locaux, sous astreinte :

En application des dispositions de l'article 835 alinéa 2 du code de procédure civile, dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, le président du tribunal judiciaire ou le juge du contentieux de la protection dans les limites de sa compétence peuvent accorder une provision au créancier ou ordonner l'exécution d'une obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire.

L'absence de contestation sérieuse implique l'évidence de la solution qu'appelle le point contesté. Il appartient au demandeur d'établir l'existence de l'obligation qui fonde sa demande tant en son principe qu'en ses modalités d'exécution.

Une contestation sérieuse survient lorsque l'un des moyens de défense opposés à ses prétentions laisse subsister un doute sur le sens de la décision au fond qui pourrait intervenir par la suite sur ce point. A l'inverse, sera écartée une contestation qui serait à l'évidence superficielle ou artificielle. C'est enfin au moment où la cour statue qu'elle doit apprécier l'existence d'une contestation sérieuse, le litige n'étant pas figé par les positions initiale ou antérieures des parties dans l'articulation de ce moyen.

En vertu de l'article L 642-19 du code de commerce, le juge-commissaire soit ordonne la vente aux enchères publiques, soit autorise, aux prix et conditions qu'il détermine, la vente de gré à gré des autres biens du débiteur lorsqu'elle est de nature à garantir les intérêts de celui-ci. Lorsque la vente a lieu aux enchères publiques, il y est procédé dans les conditions prévues, selon le cas, au second alinéa de l'article L. 322-2 ou aux articles L. 322-4 ou L. 322-7. Le juge-commissaire peut demander que le projet de vente amiable lui soit soumis afin de vérifier si les conditions qu'il a fixées ont été respectées.

En l'espèce, par ordonnance en date du 20 décembre 2023, le juge commissaire a autorisé la cession du fonds de commerce connu sous l'enseigne Hôtel Artea sis [Adresse 3] à [Localité 9] comprenant la clientèle et l'achalandage y attachée, le droit pour le temps qui reste à courir du bail commercial et le matériel et mobilier commercial y attachés, au bénéfice de la société Foodaix aux droits de laquelle interviennent les Etablissements Sebban et la société Sam république. Cette ordonnance précise que le cessionnaire désigné bénéficie d'une entrée en jouissance anticipée du fonds de commerce à compter de la décision et que le liquidateur est chargé d'accomplir les actes nécessaires à la réalisation de la cession.

Ainsi, les sociétés Etablissements Sebban et Sam République, dès lors qu'elles interviennent aux droits de la société Foodaix, ont bénéficié de la jouissance des locaux à compter du 20 décembre 2023 et ont, subséquemment, disposé des clés, badges ou codes d'accès. D'ailleurs, ce point n'est pas contesté par les appelants.

Disposant de la jouissance des locaux, ces sociétés ont été soumises aux stipulations du contrat de bail. Elles devaient donc respecter les articles II.9 du contrat qui prévoient que le preneur devra « supporter tous les travaux d'entretien, de réparations, de modernisation ou de construction que le bailleur jugera utile de faire dans l'immeuble et les immeubles voisins, quelle qu'en soit la durée », « laissera pénétrer dans les locaux qu'il occupe tout préposé du bailleur », devra « déposer à ses frais et sans délai, tous agencements, mobiliers ou matériels et installations quelconques dont l'enlèvement sera utile pour l'exécution de tous travaux par le bailleur ou un quelconque occupant de l'immeuble » et « laisser en outre en toute époque libre accès aux conduites d'eau, de gaz et d'électricité, gaines de ventilation et autres ».

Or, alors que par courrier du 12 avril 2024, les sociétés Foodaix et Sam République ont mis en demeure Mme [J] [D] de faire réaliser les travaux sur l'immeuble afin de permettre la levée des arrêtés de mise en sécurité et que les Consorts [D] ont sollicité que « aucune entrave ne soit faite à la bonne exécution des travaux et de leurs formalités préparatoires », outre le débarrassage de tous les éléments mobiliers et équipements occupant une emprise sur les surfaces de plancher, par courrier du 19 avril 2024, les appelantes n'ont procédé à la remise des clés permettant l'accès aux locaux que le 23 juillet 2024 soit plus de trois mois plus tard, en exécution de l'ordonnance de référé du 16 juillet 2024, sans avoir débarrassé le mobilier et les équipements.

Dans ce délai, les sociétés ont posé des conditions au débarrassage des locaux, sans même évoquer la remise des clés, par courriel officiel du 16 mai 2024, à savoir que :

- l'évacuation, le stockage et le réacheminent soient garantis et effectués aux frais des consorts [D] ;

- les consorts [D] produisent un rapport complémentaire attestant que l'ensemble des réseau, fluides, tuyauteries seront rétablis à leurs frais et que le premier étage sera exploitable.

Elles ont maintenu ce positionnement, par courriel en date du 21 juin 2024, malgré la délivrance d'une sommation de remettre les clés et débarrasser les locaux délivrée le 24 mai 2024, reprenant les dispositions du contrat de bail précitées.

Ce conditionnement du débarrassage des locaux et l'absence de remise des clés permettant l'accès aux locaux est manifestement contraire aux stipulations du contrat de bail qui sont claires et insusceptibles d'une quelconque interprétation.

L'exécution des clauses II.9 et 10 du contrat de bail ne s'avère nullement soumise à une délivrance préalable des locaux dans un état permettant leur exploitation puisque la société Foodaix a présenté une offre de reprise au liquidateur en toute connaissance de cause de l'état du fonds de commerce et des locaux. L'ordonnance du juge commissaire du 20 décembre 2023 précise que la société a justifié la faiblesse du prix proposé, notamment, en raison des travaux à réaliser préalablement à la levée de l'arrêté de péril et des différents aménagements sur site à réaliser. Elle rappelle qu'en l'état de l'arrêté de mise en péril et du contentieux opposant la société Artea 2 aux consorts [D], le fond de commerce ne présente aucune valeur.

Il est ainsi évident que la société Foodaix aux droits de laquelle interviennent les sociétés Etablissements Sebban et Sam République a présenté une offre de reprise impliquant la soumission aux dispositions du contrat de bail en toute connaissance des difficultés existantes en lien avec l'arrêté de péril et de l'impossibilité d'exploiter.

Les sociétés ne pouvaient donc conditionner l'exécution des clauses du contrat de bail comportant obligation pour le preneur de permettre l'accès aux locaux pour la réalisation de travaux et débarrasser le mobilier et les équipements.

Eu égard à l'entrée en jouissance anticipée du fonds de commerce qui inclut, suivant le dispositif de l'ordonnance du juge commissaire, le matériel et mobilier commercial, l'absence de réalisation des actes de cession, subséquemment à l'arrêt de la cour d'appel d'Aix en Provence en date du 5 décembre 2024 qui infirme ladite ordonnance, est indifférente. Les sociétés disposaient de la jouissance du matériel et mobilier et devaient respecter les clauses du contrat de bail de telle sorte que le débarrassage des locaux leur incombait.

De tels éléments permettent de caractériser, avec l'évidence requise en référé, un trouble manifestement illicite en lien avec le non-respect des dispositions du contrat de bail.

Au surplus, au vu de l'arrêté de péril en date du 21 mars 2024 qui comporte obligation d'évacuer les occupants de l'immeuble et étayer le plancher haut du rez-de-chaussée ou procéder au curage de celui-ci pour éliminer les surcharges le fragilisant et qui mentionne le risque d'effondrement du plancher haut du rez-de-chaussée, l'accès aux locaux et le débarrassage des lieux étaient indispensables pour prévenir un dommage imminent.

Dès lors, l'ordonnance déférée doit être confirmée en ce qu'elle a :

- condamné in solidum les sociétés Etablissements Sebban et Sam République à remettre ou à toute personne désignée par les consorts [D], tous clés, badges ou codes d'accès permettant au cabinet Ortis Architecture d'accéder librement ou de faire accéder librement, sous sa responsabilité, les entreprises et bureaux d'études missionnés afin de réaliser les travaux prescrits par l'arrêté du 21 mars 2024 et l'ordonnance du 16 avril 2024, aux locaux occupés dans l'ensemble immobilier situé [Adresse 4] à [Localité 9] ;

- condamné in solidum les sociétés Etablissements Sebban et Sam République à débarrasser ou faire débarrasser les locaux occupés dans l'ensemble immobilier situé [Adresse 4] à [Localité 9] de tous les éléments, mobiliers et équipements occupant une emprise sur les surfaces de plancher concernées, afin de permettre la réalisation des travaux prescrits par l'arrêté du 21 mars 2024 et l'ordonnance du 16 avril 2024 :

- condamné in solidum les sociétés Etablissements Sebban et Sam République à payer aux consorts [D] une astreinte totale de 500 euros par jour de retard passé un délai de cinq jours suivant la signification de l'ordonnance en cas d'inexécution d'au moins une des obligations mises ci-dessus à leur charge, et jusqu'à complet débarras.

- Sur la demande de dommages et intérêts pour résistance abusive :

1 ) Sur la demande présentée à titre définitif par M. [H] et Mme [Y] [D] :

Aux termes de l'article 835 alinéa 2 du code de procédure civile, dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, le président du tribunal judiciaire ou le juge du contentieux de la protection dans les limites de sa compétence, peuvent accorder une provision au créancier ou ordonner l'exécution d'une obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire.

Sur le fondement des dispositions de ce texte, et donc à titre seulement provisionnel, le juge des référés peut allouer à une partie une somme d'argent à valoir sur l'indemnisation d'un préjudice.

En l'espèce, M. [H] et Mme [Y] [D] sollicitent, dans le dispositif de leurs conclusions, le paiement de la somme de 200 000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive du fait qu'ils ont été empêchés de débuter les travaux en raison de l'absence de remise des clefs et l'évacuation des locaux de la totalité des biens meubles.

Cette prétention qui est précisément explicitée et ne peut être assimilée à des dommages et intérêts pour procédure abusive est formulée à titre définitif et non provisionnel alors que la cour statuant en référé ne peut qu'accorder des provisions. Même si M. [H] et Mme [Y] [D] ont formé appel incident à l'égard de la demande de provision qui a été rejetée par le premier juge et si le visa du dispositif de leurs conclusions mentionne l'article 835 du code de procédure civile, la demande de dommages et intérêts n'en demeure pas moins formulée à titre définitif.

En outre, l'esprit des parties, visé dans la note transmise à la cour le 16 mai 2025, ou l'audience de plaidoirie ne peuvent venir corriger la formulation de la demande dans la mesure où la procédure devant la cour est écrite.

La demande de dommages et intérêts présentée par M. [H] et Mme [Y] [D]

s'avère donc irrecevable.

Une telle demande ne peut être modifiée, complétée ou amendée par une note en délibéré, sollicitée par la cour, qui ne vise qu'à permettre aux parties de faire valoir leurs observations sur un point de droit soulevé d'office et non à corriger des prétentions formulées par voie de conclusions.

L'ordonnance entreprise sera donc réformée en ce qu'elle a rejeté la demande de provision présentée par M. [H] et Mme [Y] [D].

Une telle demande doit être déclarée purement et simplement irrecevable.

2 ) Sur la demande présentée à titre provisionnel par M. [X], Mmes [G] et [J] [D] :

En application des dispositions de l'article 835 alinéa 2 du code de procédure civile, il appartient au demandeur d'établir l'existence de l'obligation qui fonde sa demande de provision tant en son principe qu'en son montant, qui n'a d'autre limite que le montant non sérieusement contestable de la créance alléguée.

Aux termes de l'article 1240 du code civil, tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.

La résistance abusive se définit par la contrainte pour une partie d'intenter une action en justice pour parvenir à ses fins. Elle ne se traduit pas par une simple résistance.

Il résulte de l'article précité que l'octroi de dommages-intérêts sur le fondement de la résistance abusive et injustifiée suppose que soit caractérisée l'existence d'un abus dans l'exercice du droit de résister et d'un préjudice subi en conséquence de cet abus.

En l'espèce, comme mentionné précédemment, les consorts [D] ont délivré aux sociétés Etablissements Sebban et Sam République une mise en demeure, le 19 avril 2024, puis une sommation de remettre les clés et débarrasser les locaux, le 24 mai suivant. Ils n'ont obtenu la remise des clés que le 23 juillet 2024, après l'ordonnance de référé du 16 juillet 2024, sans débarrassage du mobilier et des équipements.

Il doit être relevé que cette mise en demeure et cette sommation de faire sont intervenues alors que la société Foodaix avait mis en demeure, le 12 avril 2024, les consorts [D] de réaliser des travaux dans les locaux en visant les arrêtés de mise en péril, ceux-ci étant joints au courrier de mise en demeure.

Alors même qu'elle sollicitait la réalisation de travaux, la société n'a pas remis les clés aux bailleurs pour permettre l'accès aux locaux, préalable indispensable, et a conditionné l'enlèvement du mobilier et des équipements.

Un tel comportement caractérise, à l'évidence, une résistance de la société Foodaix aux droits de laquelle interviennent les sociétés Etablissements Sebban et Sam République.

Compte tenu de la clarté des clauses du contrat de bail imposant de laisser l'accès aux locaux pour la réalisation de travaux et de débarrasser les éléments mobiliers pour permettre les travaux, outre une proposition de reprise du fonds de commerce en toute connaissance de l'état des locaux, la résistance des sociétés appelantes s'avère indéniablement abusive.

Cette résistance abusive est source de préjudice pour M. [X], Mmes [G] et [J] [D] qui ont été condamnés :

- par le juge des référés du tribunal judiciaire d'Aix en Provence suivant ordonnance du 16 avril 2024, à procéder ou faire procéder au curage du plancher haut du rez-de-chaussée de l'immeuble, sous astreinte provisoire de 2 000 euros par jour de retard passé un délai de 48 heures suivant la signification de l'ordonnance, pendant 3 mois, condamnation confirmée en appel ;

- par la cour d'appel de céans suivant arrêt du 13 février 2025 au paiement d'une provision de 360 000 euros à valoir sur la réparation du préjudice de jouissance subi par la société Apogon pendant 8 mois (entre l'arrêté de péril du 21 mars 2024 et la levée de l'arrêté intervenue le 28 novembre 2024), provision calculée sur la base d'une perte journalière de 1 500 euros par jour.

La résistance abusive de la société Foodaix a, à l'évidence, contribué à ralentir la réalisation des travaux et donc allongé les délais d'exécution et subséquemment, la durée du préjudice d'exploitation de la société Apogon devant être indemnisé par les consorts [D].

Cependant, cette résistance n'est pas la cause exclusive de la non-réalisation des travaux générant le préjudice d'exploitation de la société Apogon, indemnisé à titre provisionnel par les intimés et plus généralement, des sommes mises à la charge des consorts [D] au bénéfice de cette société. Il doit être rappelé que l'immeuble a fait l'objet de deux arrêtés de péril, antérieurement à celui du 21 mars 2024, que dès 2018, une procédure de référé-expertise a été engagée par la société Artea 2 et que le rapport d'expertise rendu en décembre 2020 a préconisé des travaux de remise en état de la toiture, de mise en sécurité des charpentes fragilisées et le confortement des planchers. Ainsi, l'immeuble souffre de désordres structurels depuis de nombreuses années sans que les bailleurs, informés, aient pris des mesures pour y remédier totalement avant le dernier arrêté de péril. L'arrêt de la cour d'appel de céans en date du 13 février 2025 fait d'ailleurs référence à des désordres constatés au sein de l'hôtel Artea 2 depuis 2015 en raison de rechargements importants effectués sur les planchers.

Par ailleurs, M. [X], Mmes [G] et [J] [D] visent la période du 22 mars au 29 juillet 2024 ainsi que quelques jours supplémentaires pour déterminer le montant de la provision au titre de la résistance abusive.

Toutefois, il ne peut être retenu une résistance abusive des sociétés antérieurement à la première mise en demeure du 19 avril 2024. En l'absence d'élément précis sur la date à laquelle le mobilier a été débarrassé, le préjudice non sérieusement contestable en lien avec la résistance abusive a cessé au 29 juillet 2024, date à laquelle par le courriel de l'architecte il est fait état pour la dernière fois de la présence d'une grande partie du mobilier, les pièces postérieures ne comportant aucune référence au mobilier.

Ainsi, la résistance abusive des sociétés appelantes a généré un préjudice non sérieusement contestable pour M. [X], Mmes [G] et [J] [D] entre les 19 avril et 29 juillet 2024.

Cette résistance n'étant pas la cause exclusive de la non-réalisation des travaux ayant généré la perte d'exploitation de la société Apogon, indemnisée par provision par les consorts [D], et n'ayant causé qu'un retard dans l'exécution desdits travaux, le préjudice non sérieusement contestable subi par M. [X], Mmes [G] et [J] [D] doit être évalué, en tenant compte de l'évaluation précédemment faite par la cour (dans la procédure achevée par l'arrêt en date du 13 février 2025 ) de la perte d'exploitation de la société Apogon, à la somme de 300 euros par jour soit une somme globale de 30 600 euros.

Par conséquent, l'ordonnance déférée doit être infirmée en ce qu'elle a rejetée la demande de provision présentée par M. [X], Mmes [G] et [J] [D].

Les sociétés Etablissements Sebban et Sam République doivent être condamnées in solidum à verser à M. [X], Mmes [G] et [J] [D] une provision de 30 600 euros au titre de la résistance abusive.

- Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens :

L'ordonnance déférée doit être confirmée en ce qu'elle a condamné in solidum les sociétés Etablissements Sebban et Sam République à payer aux consorts [D] la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

Les sociétés Etablissements Sebban et Sam République doivent être déboutés de leur demande présentée sur ce même fondement. Il serait en revanche inéquitable de laisser à la charge des intimés les frais non compris dans les dépens, qu'ils ont exposés pour leur défense. Il sera donc alloué une somme de 2 000 euros en cause d'appel à M. [X], Mmes [G] et [J] [D], d'une part, et M. [H] et Mme [Y] [D], d'autre part.

Les sociétés Etablissements Sebban et Sam République supporteront, en outre, les dépens de la procédure d'appel avec distraction au profit de Me Frigerio, en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

La cour,

Confirme l'ordonnance déférée en ce qu'elle a :

- condamné in solidum les sociétés Etablissements Sebban et Sam République à remettre ou à toute personne désignée par les consorts [D], tous clés, badges ou codes d'accès permettant au cabinet Ortis Architecture d'accéder librement ou de faire accéder librement, sous sa responsabilité, les entreprises et bureaux d'études missionnés afin de réaliser les travaux prescrits par l'arrêté du 21 mars 2024 et l'ordonnance du 16 avril 2024, aux locaux occupés dans l'ensemble immobilier situé [Adresse 4] à [Localité 9] ;

- condamné in solidum les sociétés Etablissements Sebban et Sam République à débarrasser ou faire débarrasser les locaux occupés dans l'ensemble immobilier situé [Adresse 4] à [Localité 9] de tous les éléments, mobiliers et équipements occupant une emprise sur les surfaces de plancher concernées, afin de permettre la réalisation des travaux prescrits par l'arrêté du 21 mars 2024 et l'ordonnance du 16 avril 2024 :

- condamné in solidum les sociétés Etablissements Sebban et Sam République à payer aux consorts [D] une astreinte totale de 500 euros par jour de retard passé un délai de cinq jours suivant la signification de l'ordonnance en cas d'inexécution d'au moins une des obligations mises ci-dessus à leur charge, et jusqu'à complet débarras ;

- débouté les sociétés Etablissements Sebban et Sam République de l'ensemble de leurs prétentions ;

- condamné in solidum les sociétés Etablissements Sebban et Sam République à payer aux consorts [D] la somme totale de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens ;

Infirme l'ordonnance déférée en ce qu'elle a rejeté la demande de provision ;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Déclare irrecevable la demande de dommages et intérêts pour résistance abusive présentée par M. [H] et Mme [Y] [D] ;

Condamne in solidum les sociétés Etablissements Sebban et Sam République à verser à M. [X], Mmes [G] et [J] [D] une provision de 30 600 euros au titre de la résistance abusive ;

Condamne in solidum les sociétés Etablissements Sebban et Sam République à verser à M. [X], Mmes [G] et [J] [D], d'une part, et M. [H] et Mme [Y] [D], d'autre part, la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Déboute les sociétés Etablissements Sebban et Sam République de leur demande présentée sur le même fondement ;

Condamne in solidum les sociétés Etablissements Sebban et Sam République aux dépens d'appel avec distraction au profit de Me Frigerio.

La greffière Le président

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