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Décisions

CA Aix-en-Provence, ch. 3-4, 28 mai 2025, n° 21/09738

AIX-EN-PROVENCE

Arrêt

Autre

CA Aix-en-Provence n° 21/09738

28 mai 2025

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 3-4

ARRÊT AU FOND

DU 28 MAI 2025

Rôle N° RG 21/09738 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BHW6D

S.A.R.L. SIWI

C/

[U] [O]

S.A.S. L'ACOUSTIK

Copie exécutoire délivrée

le : 28 Mai 2025

à :

Me Olivier FERRI

Me Lisa ARCHIPPE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de TOULON en date du 15 Avril 2021 enregistré au répertoire général sous le n° 20/00021.

APPELANTE

S.A.R.L. SIWI

, demeurant [Adresse 2] - [Localité 5]

représentée par Me Olivier FERRI de la SARL FERRI & KERJAN AVOCATS, avocat au barreau de TOULON

INTIMES

Monsieur [U] [O]

né le 05 Novembre 1954 à [Localité 4], demeurant [Adresse 3] - [Localité 5]

représenté par Me Lisa ARCHIPPE de la SELAS ARCHIPPE TRAVART VILLALARD ET ASSOCIES, avocat au barreau de TOULON

S.A.S. L'ACOUSTIK

, demeurant [Adresse 2] - [Localité 5]

représentée par Me Olivier FERRI de la SARL FERRI & KERJAN AVOCATS, avocat au barreau de TOULON

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804, 806 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 25 Mars 2025 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant:

Madame Laetitia VIGNON, Conseiller Rapporteur,

et Madame Gaëlle MARTIN, conseiller- rapporteur,

chargés du rapport qui en ont rendu compte dans le délibéré de la cour composée de :

Madame Anne-Laurence CHALBOS, Présidente

Madame Laetitia VIGNON, Conseillère

Madame Gaëlle MARTIN, Conseillère

Greffier lors des débats : Monsieur Achille TAMPREAU.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 28 Mai 2025.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 28 Mai 2025.

Signé par Madame Anne-Laurence CHALBOS, Présidente et Monsieur Achille TAMPREAU, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSE DU LITIGE

Par acte notarié en date du 16 octobre 2001, M. [W] [O], aux droits duquel se trouve désormais M. [U] [O], a consenti à la SARL Siwi un bail commercial portant sur des locaux sis [Adresse 2] à [Localité 5] pour une durée de neuf années à compter du 1er octobre 2001.

Ledit bail a été renouvelé suivant acte authentique du 30 mars 2010 pour une nouvelle période courant du 1er octobre 2010 au 30 septembre 2019.

Par acte à effet du 1er mai 2018, contresigné par M. [O], ce bail a fait l'objet d'une sous-location au profit de M. [K], représentant de la SAS l'Acoustik, société en cours de formation.

Le 23 mars 2019, M. [O] a délivré un congé avec refus de renouvellement et refus de paiement d'une indemnité d'éviction, en visant le motif légitime.

Par acte d'huissier en date du 9 décembre 2019, M. [U] [O] a fait assigner la SARL Siwi et la SAS l'Acoustik devant le tribunal de grande instance de Toulon aux fins d'expulsion et de condamnation au paiement de la dette locative ainsi que d'une indemnité d'occupation.

Par jugement en date du 15 avril 2021, le tribunal judiciaire de Toulon a :

- déclaré valide le congé délivré le 23 mars 2019 à la SARL Siwi et la SAS l'Acoustik par M. [U] [O],

- ordonné la restitution du local, objet du bail commercial, par la SARL Siwi, sous astreinte de 50 ' par jour de retard passé un déli d'un mois après la signification du présent jugement,

- ordonné l'expulsion de la SARL Siwi ou de tous occupants de son chef, si besoin est avec le concours de la force publique et d'un serrurier,

- condamné la SARL Siwi à une indemnité d'occupation de 650 ' par mois à compter du 1er octobre 2019,

- condamné la SARL Siwi à payer à M. [U] [O] la somme de 2.738,96 ' en deniers ou quittance, avec intérêts au taux légal à compter du 9 août 2019,

- rejeter le surplus de la demande en paiement,

- rejeté la demande de dommages et intérêts complémentaires,

- condamné la SARL Siwi à payer la somme de 2.000 ' au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la SARL Siwi aux dépens,

- ordonné l'exécution provisoire.

Le tribunal a retenu, pour l'essentiel, que:

- le congé avec refus de renouvellement signifié par le bailleur vise deux motifs, qui correspondent à ceux mentionnés dans la mise en demeure préalable au congé: les nuisances sonores en raison de concerts 'live' et l'absence de justification de la licence d'entrepreneur de spectacle,

- la réalité des nuisances sonores est suffisamment établie par les dépôts de plainte de la voisine immédiate de la locataire, le rapport de l'APAVE du 28 mars 2019 pointant des émergences sonores en période nocturne non conformes aux valeurs maximales autorisées, ainsi que de la condamnation de la SAS l'Acoustik pour tapage nocturne sur la période du 1er juillet 2018 au 10 février 2019,

- la récurrence du problème sans qu'il soit démontré de tentative d'amélioration de la situation, conduit à légitimer le caractère grave du motif invoqué,

- sur le second motif, la SAS l'Acoustik relève du régime de l'entrepreneur de spectacles vivants à titre principal et doit effectuer une déclaration donnant lieu à la délivrance d'un récépissé valant licence,

- or, le sous-locataire n'est pas en mesure de justifier du respect de ces normes, le motif grave étant également constitué,

- le congé avec refus de renouvellement et refus d'indemnité d'éviction est donc fondée.

Par déclaration en date du 29 juin 2021, la SARL Siwi a interjeté appel de ce jugement, intimant M. [U] [O] et la SAS l'Acoustik.

Aux termes de leurs dernières conclusions déposées et notifiées le 20 mars 2022, la SARL Siwi et la SAS l'Acoustik demandent à la cour de:

Vu les articles 914, 910-4, 542 et 954 du code de procédure civile,

Vu les articles L 145-17 et suivants du code de commerce,

- prononcer l'irrecevabilité de l'appel incident formé par M. [U] [O],

- à défaut, déclarer irrecevable l'appel incident formé par M. [U] [O],

- infirmer le jugement rendu le 15 avril 2021 par la 1ère chambre baux commerciaux du tribunal judiciaire de Toulon:

* 1er chef de jugement critiqué: en ce qu'il a déclaré valide le congé délivré le 23 mars 2019 à la SAS l'Acoustik et la SARL Siwi par M. [U] [O],

* 2ème chef de jugement critiqué: en ce qu'il a en conséquence débouté la SARL Siwi de sa demande tendant à annuler le congé pour motif grave et légitime signifié aux sociétés Siwi et

l'Acoustik,

* 3ème chef de jugement critiqué: en ce qu'il a ordonné la restitution du local objet du bail commercial par la SARL Siwi, sous astreinte de 50, euros par jour de retard passé un délai d'un mois après la signification du jugement,

* 4ème chef de jugement critiqué: en ce qu'il a ordonné l'expulsion de la SARL Siwi ou de tous occupants de son chef, si besoin est avec le concours de la force publique et d'un serrurier,

* 5ème chef de jugement critiqué: en ce qu'il a condamné la SARL Siwi à une indemnité d'occupation de 650 ' par mois à compter du ler octobre 2019,

* 6ème chef de jugement critiqué: en ce qu'il a condamné la SARL Siwi à payer à M. [U] [O] la somme de 2.738,96 ' en deniers ou quittance, avec intérêt au taux légal à compter du 9 août 2019,

* 7 ème chef de jugement critiqué: en ce qu'il a condamné la SARL Siwi à payer à la somme de 2.000 ' au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

* 8 ème chef de jugement critiqué: en ce qu'il a condamné la SARL Siwi aux dépens,

* 9ème chef de jugement critiqué: en ce qu'il a débouté en conséquence la SARL Siwi de sa demande visant à voir juger et dire que M. [O] doit l'indemnité d'éviction aux sociétés Siwi et l'Acoustik,

* 10 ème chef de jugement critiqué: en ce qu'il a débouté en conséquence la SARL Siwi de sa demande d'expertise visant à évaluer l'indemnité d'éviction due aux sociétés Siwi et l'Acoustik,

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté M. [O] de la demande de dommages et intérêts formulée au titre d'un prétendu comportement dilatoire,

Statuant à nouveau:

- débouter M. [O] de ses demandes, fins et prétentions,

- annuler le congé pour motif grave et légitime signifié aux sociétés Siwi et l'Acoustik,

- condamner M. [O] au paiement de l'indemnité d'éviction due aux sociétés Siwi et l'Acoustik,

- désigner à cette fin tel expert qu'il plaira afin de déterminer l'indemnité d'éviction dues aux sociétés Siwi et l'Acoustik et renvoyer par devant le tribunal judiciaire afin qu'il soit statué sur son montant,

- débouter M. [O] de sa demande d'indemnité d'occupation formulée à hauteur de 4550 ' outre au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner M. [O] à payer la somme de 2500 ' à la société SIWI au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens, distraits au profit de Me Olivier Ferri, avocat, sur son offre de droits,

- condamner M. [O] à payer la somme de 2500 ' à la société l'Acoustik au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens, distraits au profit de Me Olivier Ferri, avocat, sur son offre de droits.

M. [U] [O], suivant ses dernières conclusions déposées et notifiées par RPVA le 20 décembre 2021, demande à la cour de:

Vu les articles L 145-17 1° et L 145-9 du code de commerce,

- confirmer le jugement rendu le 15 avril 2021 par le tribunal judiciaire de Toulon en ce qu'il a:

* ordonné la restitution du local, objet du bail commercial, par la SARL Siwi, sous astreinte de 50 ' par jour de retard passé un délai d'un mois après la signification du présent jugement,

* ordonné l'expulsion de la SARL Siwi ou de tous occupants de son chef, si besoin est avec le concours de la force publique et d'un serrurier,

* condamné la SARL Siwi à une indemnité d'occupation de 650 ' par mois à compter du 1er octobre 2019,

* condamné la SARL Siwi à payer à M. [U] [O] la somme de 2.738,96 ' en deniers ou quittance, avec intérêts au taux légal à compter du 9 août 2019,

* condamné la SARL Siwi à payer la somme de 2.000 ' au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

* condamné la SARL Siwi aux dépens,

Statuant à nouveau,

- condamner la société Siwi à payer à M. [U] [O] la somme de 2.500 ' correspondant aux dommages et intérêts dus au titre de son comportement dilatoire,

- condamner la société Siwi à payer à M. [U] [O] la somme de 4.550 ' au titre de l'indemnité d'occupation due du mois de décembre 2019 au mois de juin 2020,

- condamner la société Siwi à payer à M. [U] [O] la somme de 2.000 ' au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de la présente instance.

La procédure a été clôturée par ordonnance en date du 11 mars 2025.

MOTIFS

Sur l'irrecevabilité de l'appel incident

Au visa des articles 910-4, 954 et 542 du code de procédure civile, les sociétés Siwi et l'Acoustik opposent à M. [O] l'irrecevabilité de son appel incident en ce que le dispositif de ses conclusions d'intimés ne comporte pas la prétention tendant à l'infirmation du jugement.

En vertu de l'article 542 du Code de procédure civile, l'appel tend, par la critique de la décision de première instance querellée, à sa réformation ou à son annulation.

En outre, l'article 954 alinéa 3 du code de procédure civile dispose que la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion.

Il résulte de la combinaison de ces deux articles que lorsque l'appelant ne demande dans le dispositif de ses conclusions, ni l'infirmation, ni l'annulation du jugement, la cour d'appel ne peut que confirmer le jugement.

Il convient de préciser que l'application immédiate de cette règle de procédure, posée par la Cour de cassation dans son arrêt publié du 17 septembre 2020 ( 2ème chambre civile n° 18-23.626 P), et qui résulte de l'interprétation nouvelle d'une disposition au regard de la réforme de la procédure d'appel avec représentation obligatoire issue du décret n° 2017-891 du 6 mai 2017, ne peut concerner que les appels formés à compter de la date de cet arrêt publié, pour éviter de priver les parties de leur accès à un procès équitable.

Enfin, l'appel incident n'étant pas différent de l'appel principal par sa nature ou son objet, le dispositif des conclusions de l'intimé appelant incident doit également comporter la prétention tendant à l'infirmation du jugement, de sorte toute partie qui poursuit l'annulation ou l'infirmation du jugement doit impérativement le préciser dans le dispositif de ses conclusions, sous peine d'être sanctionnée.

En l'espèce, le dispositif des conclusions d'intimé et d'appel incident de M. [O] ne comporte pas de demande d'infirmation du jugement entrepris en ce qu'il l'a débouté de sa demande de dommages et intérêts.

En revanche, il n'y a pas lieu de prononcer et/ ou déclarer irrecevable l'appel incident de M. [O] comme le réclament les sociétés appelantes. Il suffit de constater que l'effet dévolutif n'a pas opéré et la cour ne peut que confirmer le jugement en ce qu'il a rejeté la demande de dommages et intérêts complémentaire présentée par M. [O].

Sur la validité du congé délivré le 23 mars 2019 à l'initiative du bailleur

Par acte sous seing privé en date du 30 mars 2010, le bail initialement conclu entre M. [O] et la SARL Siwi a fait l'objet d'un renouvellement pour une durée de neuf années à compter du 1er octobre 2010 pour se terminer le 30 septembre 2019, sous les mêmes charges et garanties que le précédent contrat et notamment s'agissant de la destination des lieux loués, il est rappelé que ' Les locaux faisant l'objet du présent bail devront exclusivement être consacrés par le preneur à l'exploitation d'un fonds de commerce TOUT COMMERCE (...)'.

Il est par ailleurs précisé que les locaux pourront faire l'objet d'une sous-location, dont a fait usage la société Siwi.

Par acte à effet du 1er mai 2018, contresigné par le bailleur, la SARL Siwi a sous-loué l'ensemble des locaux litigieux à M. [X] [K], représentant de la société l'Acoustik en cours de formation ' d'une surface de 150 m² sur deux niveaux et deux pièces sous-sol d'une surface de 20 m² pour l'exploitation d'une scène ouverte, salon de thé, snacking' , aux fins d'exercer une activité de ' restauration avec animation, salon de thé musical, expositions diverses etc...'.

Le contrat de sous-location comporte un article 9 intitulé ' Bruit' et ainsi libellé ' Il est rappelé au locataire que le bruit est strictement réglementé durant les horaires d'ouverture de l'établissement. Il a été posé un limiteur et des travaux d'insonorisations ont été réalisés. Il est donc strictement interdit de débrancher celui-ci. Le bailleur ne pourra en aucun cas être responsable en cas d'inobservation de ces règles.'

En vertu de l'article L 145-17 I du code de commerce, le bailleur peut refuser le renouvellement du bail sans être tenu au paiement d'aucune indemnité :

1° S'il justifie d'un motif grave et légitime à l'encontre du locataire sortant. Toutefois, s'il s'agit soit de l'inexécution d'une obligation, soit de la cessation sans raison sérieuse et légitime de l'exploitation du fonds, compte tenu des dispositions de l'article L. 145-8, l'infraction commise par le preneur ne peut être invoquée que si elle s'est poursuivie ou renouvelée plus d'un mois après mise en demeure du bailleur d'avoir à la faire cesser. Cette mise en demeure doit, à peine de nullité, être effectuée par acte extrajudiciaire, préciser le motif invoqué et reproduire les termes du présent alinéa (...)

Par acte extra-judiciaire en date du 23 mars 2019, M. [U] [O] a fait signifier aux sociétés Siwi et l'Acoustik, un congé avec refus de renouvellement du bail commercial pour motif grave et légitime pour la date du 30 septembre 2019, sans paiement d'une indemnité d'éviction, se prévalant des dispositions de l'article L 145-17 susvisé, faisant état de ' Nuisances sonores en raison de concerts live et absence de justification de la licence d'entrepreneur de spectacle'.

Il n'est pas contesté que ce congé a fait l'objet d'une mise en demeure préalable notifiée par huissier le 13 février 2019, toujours en application de l'article L 145-17, aux sociétés appelantes, pour les mêmes motifs.

Ces dernières contestent l'existence des motifs graves et légitimes de refus de renouvellement tels que retenus par le tribunal.

Sur les nuisances sonores

Les sociétés appelantes soulignent que sur une période de 2010 à 2019, seules huit plaintes et deux mains courantes ont été déposées, émanant toutes de la même personne, étant relevé qu'une seule main courante est postérieure à la prise d'effet du bail de sous-location de la société l'Acoustik. Elles allèguent en outre que M. [O] s'était engagé à ne pas louer l'appartement du 1er étage à des fins d'habitation et qu'en rompant cet accord, le bailleur a placé l'occupant du local commercial, exploitant d'une discothèque-club en position délicate. Elles ajoutent que l'on ignore tout de la fréquence des interventions ou leur date, la sous-locataire n'ayant fait l'objet d'aucune poursuite de fermeture et qu'elles produisent des attestations qui sont contraires aux éléments apportés par le bailleur.

Il convient de rappeler qu'une utilisation paisible du bien fait partie des obligations du locataire et les troubles de voisinage, comme les troubles sonores ou le tapage nocturne, sont considérés comme des motifs légitime et sérieux pour ne pas renouveler le bail.

Il ressort des pièces du dossier que depuis la prise d'effet du contrat de sous-location le 1er mai 2018, M. [V] [K] et la SAS l'Acoustik ont été condamnés pour des faits de bruit ou tapage nocturne troublant la tranquillité d'autrui commis entre le 1er juillet 2018 et le 10 février 2019, confirmant ainsi la réalité des nuisances sonores sur la période antérieure à la délivrance tant de la mise en demeure que du congé.

Il est également produit par M. [O] un dépôt de plainte et trois déclarations de main courante pour des faits postérieurs à la décision du tribunal de police émanant de Mme [F] [E] et Mme [D] [B] à l'encontre de la société l'Acoustik pour des troubles sonores jusqu'à tard dans la nuit ( 3 heures du matin), mettant en évidence la persistance des troubles.

L'intimé communique, en outre, un courrier de la mairie de la commune d'[Localité 5] en date du 4 novembre 2019, rappelant que la société l'Acoustik a fait l'objet de plusieurs constatations par la police municipale pour:

- occupation du domaine public non autorisée résultant de l'installation deux tonneaux avec tabourets sur le trottoir, qui ont rapidement servi de table pour les clients sortant dehors pour fumer,

- émission de bruit portant atteinte à la tranquillité du voisinage, suite à des plaintes provenant d'une personne demeurant au [Adresse 1] ( l'établissement étant situé au [Adresse 2]) et d'un autre habitant au-dessus du bar, les agents municipaux qui se sont rendus sur place ayant constaté des nuisances sonores émanant du bar ainsi que des personnes regroupées sur le trottoir.

Il est indiqué que le responsable de l'établissement a fait l'objet de procès-verbaux par la police municipale pour occupation illégale du domaine public et pour les nuisances sonores constatées.

Ces éléments sont corroborés par les attestations de mesdames [L] [C] et [D] [B] établies les 7, 8 et 10 octobre 2019 relatant être régulièrement réveillées, ainsi que leurs enfants, par les nuisances sonores, les fenêtres étant souvent ouvertes ainsi que par le bruit commis par les clients continuant à discuter voir crier sur le trottoir en sortant.

Il est enfin versé un rapport de l'APAVE faisant suite à une visite le 28 mars 2019 concluant qu'à cette date, ' les émergences évaluées en période nocturne à proximité des habitations les plus proches sont non conformes aux valeurs maximales autorisée, au sens du décret du 7 août 2017" et qu'au sens de ce décret, ' il existe un risque de nuisances sonores pour le voisinage', préconisant pour y mettre un terme, plusieurs mesures:

- équipement de la salle sonorisée d'un limiteur permettant de gérer les niveaux par bandes de fréquences et avec une connexion des musiciens à la sonorisation du local lors des concerts,

- l'établissement doit être exploité toutes portes fermées, la gestion des entrées et sorties étant donc à adapter.

En considération de ces éléments, il est suffisamment établi que la société l'Acoustik, sous-locataire, n'use pas paisiblement des locaux, en troublant régulièrement depuis son entrée dans les lieux, le voisinage de façon anormale, étant précisé que postérieurement à la mise en demeure notifiée par le bailleur le 13 février 2019, il est justifié d'une part, que les nuisances ont persisté et, d'autre part, que les émergences sonores en période nocturnes ne sont pas conformes aux valeurs maximales autorisées, imposant la réalisation de différents travaux de mises en conformité dont il n'est aucunement démontré qu'ils ont été effectués, la société l'Acoustik ayant manifestement ignoré le diagnostic acoustique dressé par l'APAVE, expliquant les nouveaux faits dénoncés postérieurement par le voisinage.

Les parties appelantes allèguent qu'un accord aurait été passé entre l'ancien gérant de la société Siwi et M. [O] pour que l'appartement situé au-dessus et occupé par Mme [E] ne soit pas donné à bail d'habitation, mais ne produisent aucun élément venant étayer une telle affirmation à l'exception de l'attestation de M. [Y] [A] qui est beaucoup trop vague et ne comporte aucune précision sur l'adresse des locaux concernés, étant de surcroît relevé que Mme [E] n'est pas la seule habitante du quartier à se plaindre des troubles sonores.

La récurrence des troubles sonores avant et après la mise en demeure signifiée par M. [O] et l'absence de tentative d'amélioration de la part de la locataire et de la sous-locataire constituent un motif légitime et sérieux au sens de l'article L 145-17 du code de commerce.

Par ailleurs et comme l'a retenu à juste titre le premier juge, le fait pour la société l'Acoustik d'avoir résilié le contrat de sous-location à effet du 30 avril 2020, soit sept mois après la prise d'effet du congé donné part M. [O], est sans emport.

Sur la licence d'entrepreneur de spectacle

Les parties appelantes rappellent que cette licence n'est exigée que lorsqu'il s'agit de l'activité unique de la société alors qu'en l'espèce les statuts de la SAS l'Acoustik démontrent qu'il ne s'agit que d'une activité accessoire, avec pour conséquence que la licence n'est exigée qu'en cas de dépassement de 7 spectacles par an, ce qui n'est pas le cas en l'espèce, la charge de la preuve de la nécessité d'une telle licence reposant en toute hypothèse sur le bailleur.

La mise en demeure signifiée par huissier le 13 février 2019 mentionne que ' Il semblerait que la société l'Acoustik ne soit pas titulaire de la licence d'entrepreneur de spectacle. Celle-ci étant obligatoire pour l'organisation de spectacles vivants, même si cette activité n'est qu'accessoire à celle de restauration, dès lors que plus de 7 spectacles sont organisés par an'.

L'article L7122-3 du code du travail dispose que toute personne établie sur le territoire national qui exerce l'activité d'entrepreneur de spectacles vivants doit détenir une licence d'entrepreneur de spectacles vivants d'une ou plusieurs des catégories mentionnées à l'article L. 7122-2, sous réserve des dispositions de l'article L. 7122-10.

En vertu de l'article R 7122-13 du code du travail, le plafond annuel permettant d'exercer l'activité d'entrepreneur de spectacles vivants sans être soumis aux obligations de déclaration mentionnées à l'article L. 7122-3 est fixé à six représentations.

Ainsi, si l'organisation de spectacles n'est pas l'activité principale de l'entreprise, la licence est obligatoire uniquement à partir de sept représentations annuelles.

L'attestation individuelle de fin de formation obtenue par M. [X] [K] relative à ' obtenir le certificat sécurité des spectacles' ne saurait se substituer à la délivrance de la licence susvisée, qui relève de la seule compétence du ministère de la culture et est obligatoire si le nombre de représentation annuelle est supérieur à six.

L'APAVE, dans son rapport, décrit ainsi l'établissement l'Acoustik: ' L'exploitation est de type bar-concert avec l'installation d'une sonorisation fixe. La programmation prévoit l'organisation de concerts et de soirées animées par des DJ.'

M. [O] verse des extraits de la page facebook de la société l'Acoustik en 2019 qui met en évidence que celle-ci organise plus de six concerts annuels puisque sur les quelques pièces produites il est fait état:

- d'un concert de musique ' blind test' le 7 juin,

- d'un concert de jazz manouche le 13 juin,

- d'un concert ' live jam cession' le 16 juin,

- de deux autres concerts ' blind test' le 18 juillet et le 13 septembre,

- d'un concert de jazz manouche le 14 septembre,

- d'un concert de ' soul connexion live session' le 20 septembre,

- de la venue du DJ [N] le 20 septembre,

- d'un concert de reggae le 5 octobre,

soit 9 concerts sur une période d'à peine quatre mois.

La société l'Acoustik ne peut nier l'activité secondaire d'organisation de spectacles, qui dépasse à l'évidence le nombre de six par an, de sorte qu'elle est tenue de détenir la licence prévue à l'article L 7122-3 du code du travail et qu'elle n'a pas été en mesure d'en justifier en dépit de la mise en demeure du 13 février 2019 visant précisément ce motif.

Or, il y a lieu de préciser que cette licence est une autorisation administrative gratuite mais obligatoire et dont l'objectif est de s'assurer du respect des droits sociaux des salariés du spectacle, de la propriété littéraire et artistique ainsi que d'assurer la sécurité des salariés et du public. L'exercice de l'activité sans la licence est passible d'une amende administrative de 7.500 ' pour une personne morale, qui peut être assortie d'une astreinte, voire d'une décision de fermeture de l'établissement en cas de récidive.

Faute pour la sous-locataire de justifier de l'obtention de cette licence, le motif légitime et sérieux est également justifié.

Le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré valide le congé avec refus de renouvellement du bail et refus d'indemnité d'éviction signifié le 23 mars 2019 par M. [O] doit donc être confirmé

Par voie de conséquence, le jugement sera également confirmé s'agissant des conséquences attachées à ce congé, à savoir:

- l'expulsion de la société Siwi et celle de tous occupants de son chef des locaux loués, sous astreinte de 50 ' par jour de retard passé le délai d'un mois à compter de la signification du jugement, étant précisé qu'il ressort des conclusions des parties que les locaux auraient été libérés en juin 2020,

- la condamnation de la société Siwi, à compter du 1er octobre 2019, date de la prise d'effet du congé, au paiement d'une indemnité mensuelle d'occupation de 650 ' par mois jusqu'à la restitution effective des locaux.

En revanche, il n'y pas lieu de condamner la société Siwi au paiement d'une somme de 4.550 ' correspondant aux indemnités d'occupation dues jusqu'au mois de juin 2020 inclus, le présent arrêt confirmatif sur la condamnation de la société Siwi, à compter du 1er octobre 2019, date de la prise d'effet du congé, au paiement d'une indemnité mensuelle d'occupation de 650 ' par mois jusqu'à la restitution effective des locaux, constituant le titre exécutoire permettant au bailleur de recouvrer les sommes qui lui sont dues à ce titre.

Au regard de la solution apportée au présent litige, les appelantes ne peuvent qu'être déboutées de leurs demandes relatives à l'octroi d'une indemnité d'éviction et notamment d'organisation d'une mesure expertale aux fins de déterminer le montant de cette indemnité.

Sur les loyers impayés

Le premier juge a condamné la société Siwi à payer à M. [O] une somme de 2.738,96 ' en derniers ou quittance au titre des loyers impayés comme correspondant au mois de juillet et août 2019.

La preneuse conteste formellement être redevable de cette somme.

La cour observe que:

- M. [O] ne produit aucun relevé de compte et ne justifie pas du montant des charges appelées pour les années 2018 et 2019,

- la société Siwi, aux termes du bail, est redevable d'un loyer de 650 ' par mois, de sorte la condamnation prononcée par le tribunal à hauteur de 2.738,96 ' au titre des mois de juillet et août 2019 qui n'auraient pas été réglés, est erronée.

Le jugement sera donc infirmé de ce chef et M. [O], qui n'apporte pas davantage de précision et d'élément en cause d'appel, sera déboutée de sa demande au titre d'un arriéré de loyers qui n'est pas justifié.

Vu l'article 700 du code de procédure civile,

Vu l'article 696 du code de procédure civile;

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par mise à disposition au greffe et par arrêt contradictoire,

Confirme le jugement du tribunal judiciaire de Toulon déféré en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a condamné la SARL Siwi à payer à M. [U] [O] la somme de 2.738,96 ' en derniers ou quittance, avec intérêts au taux légal à compter du 9 août 2019,

Statuant à nouveau sur ce point,

Déboute M. [U] [O] de sa demande de condamnation de la SARL Siwi au titre des loyers impayés,

Y ajoutant,

Précise que le présent arrêt confirmatif sur la condamnation de la société Siwi, à compter du 1er octobre 2019, date de la prise d'effet du congé, au paiement d'une indemnité mensuelle d'occupation de 650 ' par mois jusqu'à la restitution effective des locaux, constitue le titre exécutoire permettant au bailleur de recouvrer les sommes qui lui sont dues à ce titre,

Condamne la SARL Siwi à payer à M. [U] [O] la somme de 2.000 ' sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la SARL Siwi aux dépens de la procédure d'appel.

Le Greffier, La Présidente,

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