CA Lyon, 8e ch., 28 mai 2025, n° 24/03323
LYON
Arrêt
Autre
N° RG 24/03323 - N° Portalis DBVX-V-B7I-PTUB
Décision du Tribunal de Grande Instance de Lyon en référé du 25 mars 2024
RG : 23/01045
Association EGLISE EVANGELIQUE GALATES 3V28
C/
S.C.I. JEAN BAPTISTE
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE LYON
8ème chambre
ARRÊT DU 28 Mai 2025
APPELANTE :
Association EGLISE EVANGELIQUE GALATES 3V28, Association régie par la loi du 1er juillet 1901, déclarée en Préfecture du Rhône le 14 mars 2000, référence RNA W691086298, dont le siège social est sis [Adresse 1] à [Localité 4], prise en la personne de son représentant légal en exercice, domicilié en cette qualité audit siège
Représentée par Me Malik NEKAA de la SELARL NEKAA ALLARD, avocat au barreau de LYON, toque : 476
INTIMÉE :
SCI JEAN BAPTISTE, Société civile immobilière au capital de 58 540,42 ' immatriculée au RCS de LYON sous le n° 339 211 310 dont le siège social est sis [Adresse 2] (France), prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
Représentée par Me Lydie DREZET de la SELARL DREZET - PELET, avocat au barreau de LYON, toque : 485
* * * * * *
Date de clôture de l'instruction : 02 Avril 2025
Date des plaidoiries tenues en audience publique : 02 Avril 2025
Date de mise à disposition : 28 Mai 2025
Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :
- Bénédicte BOISSELET, président
- Véronique DRAHI, conseiller
- Nathalie LAURENT, conseiller
assistés pendant les débats de William BOUKADIA, greffier
A l'audience, un membre de la cour a fait le rapport,
Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,
Signé par Bénédicte BOISSELET, président, et par William BOUKADIA, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
* * * *
EXPOSÉ DU LITIGE
L'association Eglise Evangélique Galates 3V28 a pris à bail un local commercial situé [Adresse 1], appartenant à la SCI Jean-Baptiste.
Ce bail a été renouvelé le 11 mars 2009 pour une durée de 9 ans, moyennant un loyer annuel de 11.250 ', payable par mois d'avance, outre provision sur charges forfaitaire, fixée contractuellement à hauteur de 4 % du montant du loyer, sans possibilité de révision du mode de calcul.
Par acte du 18 avril 2023, la SCI Jean Baptiste a fait commandement à la locataire de payer la somme de 6.453,70 ' au titre d'un arriéré locatif, ce commandement visant la clause résolutoire insérée au bail.
Par exploit du 8 juin 2023, la SCI Jean-Baptiste a fait assigner l'association Eglise Evangélique Galates 3V28 devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Lyon, en constat de la résiliation du bail.
Par ordonnance du 25 mars 2024, le juge des référés du tribunal judiciaire de Lyon a :
Constaté qu'à la suite du commandement en date du 18 avril 2023, le jeu de la clause résolutoire est acquis au bénéfice de la SCI Jean-Baptiste à compter du 18 mai 2023 ;
Dit que l'association Eglise Evangélique Galates 3V28 et tous les occupants de son chef devront avoir quitté les lieux qu'elle occupe sis [Adresse 1], dans un délai d'un mois à compter de la signification de la présente et que passé cette date elle pourra être expulsée avec le concours de la force publique ;
Condamné l'association Eglise Evangélique Galates 3V28 au paiement de la somme provisionnelle de 5.840,19 ' au titre des loyers et charges impayés au 6 novembre 2023, échéance de novembre incluse, outre intérêts au taux légal à compter du commandement ;
Débouté l'association Eglise Evangélique Galates 3V28 de ses contestations, de même que de ses demandes de délais de paiement/suspension des effets de la clause résolutoire ;
Condamné l'association Eglise Evangélique Galates 3V28 à verser à la SCI Jean-Baptiste une indemnité d'occupation mensuelle équivalente au montant du loyer et des charges en cours à compter du 1er décembre 2023 et jusqu'à la libération effective des lieux ;
Condamné l'association Eglise Evangélique Galates 3V28 à verser à la SCI Jean-Baptiste la somme de 800 ', sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;
Condamné l'association Eglise Evangélique Galates 3V28 aux dépens de l'instance en ce compris le coût du commandement de payer ;
Par déclaration enregistrée le 16 avril 2024, l'association Eglise Evangélique Galates 3V28 a interjeté appel de ce jugement.
Par conclusions enregistrées au RPVA le 19 mars 2025, l'association Eglise Evangélique Galates 3V28 demande à la cour :
Infirmer l'ordonnance du 25 décembre 2024 en toutes ses dispositions ;
Statuant à nouveau,
A titre principal,
Débouter en conséquence la SCI Jean-Baptiste de l'intégralité de ses demandes notamment tendant à la constatation de la clause résolutoire, au versement de loyer et de charges et/ou d'indemnité d'occupation dû au 1er juin 2024, et au titre de l'article 700 du code de procédure civile et des dépens, en raison de contestations sérieuses ;
A titre subsidiaire,
Prononcer à tout le moins la suspension des effets de la clause résolutoire pendant une durée de 12 mois ;
Accorder les plus larges délais à l'association Eglise Evangélique Galates 3V28 compte tenu de sa bonne foi en lui permettant de s'acquitter de sa dette dans un délai d'un an, en 12 mensualités égales ;
En tout état de cause,
Débouter la SCI Jean-Baptiste de toutes ses demandes ;
Condamner la SCI Jean-Baptiste à verser à l'association Eglise Evangélique Galates 3V28 la somme de 3.000 ' en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamner la SCI Jean-Baptiste aux entiers dépens de la présente instance ;
Par conclusions régularisées au RPVA le 27 mars 2025, la SCI Jean Baptiste demande à la cour :
Confirmer la décision attaquée en toutes ses dispositions ;
Débouter l'association Eglise Evangélique Galates 3V28 de l'intégralité de ses demandes, fins et prétentions ;
Y ajoutant,
Condamner l'association Eglise Evangélique Galates 3V28 à régler à titre de provision à la SCI Jean Baptiste la somme de 1.736.40 ' au titre de l'arriéré de loyer et de charges et/ou d'indemnité d'occupation dû au 24 mars 2025, appel de mars 2025 compris ;
Condamner l'association Eglise Evangélique Galates 3V28 à régler à la SCI Jean Baptiste la somme de 3.000 ' sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles d'appel ;
Condamner la même aux entiers dépens de l'instance d'appel ;
MOTIFS DE LA DECISION
Sur la demande de constat de la résiliation de plein droit du bail :
Le premier alinéa de l'article 835 du Code de procédure civile dispose que le juge des référés, même en présence d'une contestation sérieuse, les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.
Selon le second alinéa de ce texte, il peut, dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, accorder une provision au créancier.
Aux termes de l'article L.145-41 alinéa 1 du Code de commerce, toute clause insérée dans le bail prévoyant la résiliation de plein droit ne produit effet qu'un mois après un commandement demeuré infructueux. Le commandement doit, à peine de nullité, mentionner ce délai.
En application de ces textes, il est possible, en référé, de constater la résiliation de plein droit d'un contrat de bail en application d'une clause résolutoire, sans qu'il soit besoin de caractériser une quelconque urgence ou un trouble manifestement illicite, s'agissant du simple constat de l'application d'une clause claire et précise qui, sauf preuve du contraire, ne se heurte à aucune contestation sérieuse.
En effet, si le prononcé de la résiliation d'un contrat suppose une appréciation relevant des juges du fond, le constat de l'acquisition d'une clause résolutoire entre dans les pouvoirs du juge des référés qui s'assure uniquement de l'existence de ladite clause et de la régularité de sa mise en oeuvre.
L'association Eglise Evangélique Galates 3V28 invoque la mauvaise foi du bailleur quant à la mise en oeuvre de la clause résolutoire. Elle lui reproche un manquement à ses propres obligations, notamment à son obligation de délivrance, des coupures d'eau récurrentes ayant lieu rendant l'immeuble impropre à son usage, dont le bailleur avait parfaitement connaissance, comme en témoignent les échanges de mails versés aux débats et dont il est vraisemblablement à l'origine. Elle ajoute que le bailleur ne lui délivre aucune quittance de loyer depuis le début du bail.
Elle fait en outre état de ce que le bailleur est passé du jour au lendemain et unilatéralement de charges forfaitaires prévues au bail à un système de remboursement réel, ne respectant pas les dispositions d'ordre public de la loi Pinel, ne justifiant pas du montant des provisions sur charges, n'opérant aucune répartition entre bailleur et preneur et ne les régularisant pas annuellement, tout en multipliant les factures et semant ainsi la confusion.
Elle précise notamment que la SCI Jean Baptiste ne justifie nullement de ses méthodes de calcul du prorata au titre de l'assurance et de la taxe foncière et que le bail prévoit une refacturation de l'électricité par le bailleur au locataire qui est illégale, chaque locataire devant bénéficier d'un compteur.
Elle conteste le commandement de payer dont elle ne comprend pas le montant, alors qu'elle a payé tous les mois sans discontinuer le loyer depuis 22 ans et toutes les factures qui lui ont été adressées, y compris celles qui ne sont pas fondées, étant précisé le caractère totalement fantaisiste du décompte joint au commandement, démontrant que le bailleur appelle des sommes illégalement ce qu'elle dénonce depuis 2014.
Elle soutient au final que l'impayé provient :
d'un bail non conforme aux dispositions d'ordre public de la loi Pinel imposant une répartition claire des charges entre bailleur et locataire, une régularisation et une justification annuelle,
d'une modification unilatérale et illicite du bailleur du système de calcul des charges, étant passé d'un système forfaitaire tel que prévu par le bail à une refacturation au réel de charges dont certaines ne sont pas à la charge de la locataire en application du bail et d'autres n'ont aucune réalité (ainsi les prétendus honoraires de renouvellement de bail, le contrat d'entretien d'espaces verts '),
d'une facturation abusive et aléatoire de frais non justifiés,
de l'absence de toute justification annuelle des charges et de toute régularisation,
de l'absence de toute quittance de loyer remise mensuellement à la locataire de 2017 à 2023, combinée à l'absence de toute justification des charges appelées, plongeant la locataire dans la plus grande confusion face aux montants appelés chaque mois,
de l'absence de toute explication claire donnée à la locataire malgré ses nombreuses demandes en ce sens.
Elle invoque enfin les nombreux aléas affectant la sincérité du décompte produit, qui n'est pas à jour puisqu'il est arrêté au 04/11/2024, ce qui permet au bailleur de soutenir que la locataire serait encore redevable d'un solde de 6.817,96 ', alors même que l'appelante a versé des sommes depuis cette date.
La SCI Jean Baptiste soutient que l'arriéré locatif réclamé depuis de nombreux mois n'est pas sérieusement contestable, étant conforme au bail lequel rappelle que :
le loyer est payable par mois d'avance dans les bureaux du mandataire du bailleur,
il est indexable chaque année sans aucune formalité de façon automatique en fonction de la variation de l'ICC,
lors de chaque révision de loyer, le dépôt de garantie sera réajusté de façon à toujours correspondre à 3 mois de loyer TTC,
le locataire est tenu de payer les charges selon un forfait de 4 %.
Elle fait valoir que les sommes exigibles en vertu du bail n'ayant pas été payées, elle a légitimement fait notifier à son locataire un commandement de payer visant la clause résolutoire, accompagné d'un décompte clair, dans lequel les paiements effectués ont bien été imputés.
S'agissant des charges, elle soutient que la forfaitisation exclut la régularisation annuelle et que :
la taxe foncière comprenant la taxe d'ordures ménagères est à la charge du locataire,
l'entretien des espaces verts, l'eau et l'électricité des abords sont refacturés au locataire au prorata des surfaces louées dès réception par le propriétaire des factures d'entretien et d'EDF.
Elle précise que conformément aux dispositions de la loi Pinel, elle est passée à une facturation au réel en juillet 2018, dont le règlement est demandé au locataire à chaque facture en fonction de sa quote-part qui est de 280/3470, sans avenant ce qu'elle ne conteste pas s'agissant d'une obligation légale et sans régularisation annuelle dès lors que les charges ne sont pas payées sous forme de provision, ce qui nécessiterait une clause à cet effet dans le bail. Elle s'étonne de ce que l'appelante lui reproche cette modification qui lui est pourtant favorable.
Elle soutient encore qu'il ne peut pas lui être reproché de ne pas s'être conformée aux dispositions de l'article L145-40-2 du Code de commerce introduit par la loi Pinel et relatif à la répartition des charges, ce texte étant applicable aux contrats conclus ou renouvelés après, ce qui n'est pas le cas, le renouvellement étant intervenu en 2009.
S'agissant de l'électricité, elle rappelle que selon la Cour de cassation, la clause du contrat de location relative à la refacturation d'électricité est nulle et souligne néanmoins que le locataire qui a bénéficié d'une prestation en nature qu'il ne peut pas restituer, doit payer une indemnité équivalente à cette prestation.
Elle fait par ailleurs valoir que par mail officiel du 29 septembre 2024, le conseil du bailleur a rappelé que l'ensemble des quittances étaient accessibles via l'intranet du gestionnaire et que cette demande ne relève pas d'une obligation du bailleur en matière de bail commercial.
Elle estime enfin avoir produit tous les justificatifs permettant de vérifier sa créance, qu'elle reprend poste par poste et actualise au 24 mars 2025, à la somme de 1.736.40 ', compte tenu des paiements intervenus entre temps et de la déduction des dépens et frais irrépétibles.
Au titre de sa bonne foi, elle fait observer que l'appelante est incapable d'indiquer depuis quand le local se trouverait privé d'eau potable et qu'à part des attestations signées par des membres de l'association manquant d'impartialité, il n'y a aucun courrier qui ait été adressé au bailleur s'agissant de cette prétendue difficulté avant le dépôt des conclusions par le locataire en première instance, rien ne démontrant que le bailleur est responsable du problème d'alimentation en eau et alors même que le locataire ne le lui a jamais signalé, cela n'ayant du reste rien à voir avec le loyer, et ne justifie pas le défaut de paiement des charges.
Sur ce,
Le contrat de bail du 11 mars 2009 liant les parties contient une clause résolutoire et un commandement de payer visant cette clause a été signifié le 18 avril 2023 pour la somme en principal de 6.453,70 '.
Toutefois, la mise en oeuvre de la clause résolutoire doit être faite de bonne foi par le bailleur, la bonne foi ne pouvant être mise en cause que pour des motifs liés à la délivrance du commandement de payer et à l'obligation du bailleur d'information loyale et complète de son locataire.
Une attitude destinée à causer un préjudice au preneur, même si elle repose sur la mise en 'uvre d'un droit par le bailleur, peut constituer la mauvaise foi rendant la mise en demeure inopérante.
Au cas présent, le bail a été renouvelé le 11 mars 2009 pour se terminer le 14 mars 2018, s'étant depuis prolongé tacitement en application de l'article L 145-9 du Code de commerce, à défaut de congé ou de demande de renouvellement, en sorte qu'il y a lieu d'appliquer les stipulations de ce bail auquel, sauf exception, les dispositions de la loi Pinel, même d'ordre public ne sont pas applicables, en particulier celles de l'article L 145-40-2 du Code de commerce. En effet, les dispositions relatives aux charges, travaux, impôts, taxes et redevances de cette loi sont applicables aux contrats conclus ou renouvelés à compter du 5 novembre 2014, en sorte que les baux conclus ou renouvelés avant cette date sont soumis à l'ancien régime.
S'agissant des charges, le bail stipule que :
le preneur devra supporter notamment sa quote-part de charges dont il se libérera entre les mains du bailleur,
le pourcentage forfaitaire est fixé à 4 % du montant du loyer,
la taxe foncière comprenant la taxe d'ordures ménagères est à la charge du locataire,
l'entretien des espaces verts, l'eau et l'électricité des abords seront refacturés au locataire, au prorata des surfaces louées, dès réception par le propriétaire des factures d'entretien et d'EDF.
Le contrat prévoit en outre :
le remboursement au bailleur et au prorata de la surface occupée, du montant de la prime d'assurance payée par lui,
que toutes les réparations d'entretien qui pourraient devenir nécessaires sont supportées par le preneur, seules les grosses réparations au sens de l'article 606, incombant au bailleur.
Le commandement de payer contient un décompte commençant au 1er avril 2018 dans lequel figure une somme de 739,55 ', à titre d'honoraires de renouvellement du bail qui se heurte, comme le soutient à juste titre l'appelante, à une contestation sérieuse, à défaut de renouvellement du-dit bail dont la bailleresse se prévaut d'ailleurs pour justifier la non-application de l'article L 145-40-2 du Code de commerce issue de la loi Pinel.
En outre, si ce commandement n'est pas contestable quant aux primes d'assurance et frais d'entretien des réseaux et de la toiture qui ne relèvent pas des grosses réparations et dont les factures sont versées aux débats, il y est en revanche fait application depuis juillet 2018 de la facturation au réel des charges notamment de la taxe foncière et de la taxe sur les ordures ménagères, des frais d'entretien des espaces verts et des charges d'eau et d'électricité au prorata de la surface louée, au lieu et place du forfait de 4 % et ce sans avenant au bail, la bailleresse se prévalant des dispositions d'ordre public de la loi Pinel dont elle a entendu faire une application immédiate et unilatérale, alors même qu'elle invoque la non-applicabilité immédiate du texte concerné s'agissant de l'obligation du bailleur d'indiquer la répartition des charges entre le bailleur et le preneur et le récapitulatif annuel, faisant ainsi une application distributive de cette loi, non conforme à ses dispositions transitoires et sans avenant, pourtant obligatoire pour appliquer les dispositions de la loi Pinel lorsqu'elles doivent l'être.
Ainsi, bien qu'il soit établi que l'association Eglise Evangélique Galates 3V28 ne s'est pas acquittée des causes du commandement de payer dans le délai d'un mois et que les charges imputées à la locataire sont prévues au bail, la cour retient néanmoins que la clause résolutoire a été mise en oeuvre de mauvaise foi, la délivrance du commandement de payer survenant après 22 ans d'exécution de bonne foi du bail par l'appelante, qui malgré les demandes réitérées d'explication afférentes aux charges appelées et factures reçues à partir de juillet 2018, ainsi qu'au prorata appliqué, demeurées systématiquement sans réponse s'en est finalement acquittées à chaque fois, y compris en application de l'ordonnance critiquée, alors même que son incompréhension résulte de cette modification unilatérale du mode de calcul contractuel des charges, dont l'intimée prétend au surplus qu'elle est favorable à l'appelante, sans nullement en justifier, au contraire.
Par ailleurs, la SCI Jean Baptiste n'a pas hésité à faire application de la clause de refacturation de l'électricité en connaissance de la nullité d'ordre public d'une telle clause, se prévalant de l'impossibilité de restituer cette prestation en nature, ce qui témoigne là encore de sa mauvaise foi.
Enfin, même si cet élément est postérieur au commandement de payer et ne relève pas directement de la mauvaise foi de la bailleresse dans la mise en oeuvre de la clause résolutoire, il résulte des pièces versées aux débats qu'alors qu'elle avait été alertée par l'appelante en mai 2023 et par les services de l'Eau du Grand [Localité 3] le 17 novembre 2023 de ce que la locataire était privée d'eau courante depuis plusieurs semaines, il n'est justifié d'aucune réaction de sa part malgré l'obligation de délivrance à laquelle elle est tenue, ce qui ajoute à sa mauvaise foi.
Au vu de l'ensemble de ces éléments, il apparaît que le commandement de payer du 18 avril 2023, faisant suite au défaut total d'information de la locataire quant aux modifications des clauses contractuelles témoigne du manquement de la bailleresse à son obligation d'information loyale et complète et ne permet pas à la locataire d'être informée de manière claire des sommes dont elle doit s'acquitter, en sorte qu'il n'a pas pour effet d'entraîner le jeu de la clause résolutoire.
En conséquence, le jugement entrepris est infirmé en toutes ses dispositions.
Statuant à nouveau, la SCI Jean Baptiste est déboutée de ses demandes fondées sur un commandement de payer de nul effet.
Sur les mesures accessoires
La décision déférée est infirmée en ses dispositions relatives aux dépens et frais irrépétibles de première instance.
Succombant, la SCI Jean Baptiste supportera les dépens de première instance et d'appel ;
L'équité commande en outre de la condamner à payer à l'association Eglise Evangélique Galates 3V28 la somme totale de 2.000 ', en application de l'article 700 du Code de procédure civile en première instance et à hauteur d'appel et de la débouter de sa demande à ce titre.
PAR CES MOTIFS
La cour d'appel,
Statuant dans les limites de l'appel,
Infirme la décision attaquée en toutes ses dispositions ;
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Déboute la SCI Jean Baptiste de ses demandes ;
Condamne la SCI Jean Baptiste aux dépens de première instance et d'appel ;
Condamne la SCI Jean Baptiste à payer à l'association Eglise Evangélique Galates 3V28 la somme totale de 2.000 ', en application de l'article 700 du Code de procédure civile, en première instance et à hauteur d'appel ;
Déboute la SCI Jean Baptiste de sa demande sur ce fondement ;
LE GREFFIER LE PRESIDENT
Décision du Tribunal de Grande Instance de Lyon en référé du 25 mars 2024
RG : 23/01045
Association EGLISE EVANGELIQUE GALATES 3V28
C/
S.C.I. JEAN BAPTISTE
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE LYON
8ème chambre
ARRÊT DU 28 Mai 2025
APPELANTE :
Association EGLISE EVANGELIQUE GALATES 3V28, Association régie par la loi du 1er juillet 1901, déclarée en Préfecture du Rhône le 14 mars 2000, référence RNA W691086298, dont le siège social est sis [Adresse 1] à [Localité 4], prise en la personne de son représentant légal en exercice, domicilié en cette qualité audit siège
Représentée par Me Malik NEKAA de la SELARL NEKAA ALLARD, avocat au barreau de LYON, toque : 476
INTIMÉE :
SCI JEAN BAPTISTE, Société civile immobilière au capital de 58 540,42 ' immatriculée au RCS de LYON sous le n° 339 211 310 dont le siège social est sis [Adresse 2] (France), prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
Représentée par Me Lydie DREZET de la SELARL DREZET - PELET, avocat au barreau de LYON, toque : 485
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Date de clôture de l'instruction : 02 Avril 2025
Date des plaidoiries tenues en audience publique : 02 Avril 2025
Date de mise à disposition : 28 Mai 2025
Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :
- Bénédicte BOISSELET, président
- Véronique DRAHI, conseiller
- Nathalie LAURENT, conseiller
assistés pendant les débats de William BOUKADIA, greffier
A l'audience, un membre de la cour a fait le rapport,
Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,
Signé par Bénédicte BOISSELET, président, et par William BOUKADIA, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
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EXPOSÉ DU LITIGE
L'association Eglise Evangélique Galates 3V28 a pris à bail un local commercial situé [Adresse 1], appartenant à la SCI Jean-Baptiste.
Ce bail a été renouvelé le 11 mars 2009 pour une durée de 9 ans, moyennant un loyer annuel de 11.250 ', payable par mois d'avance, outre provision sur charges forfaitaire, fixée contractuellement à hauteur de 4 % du montant du loyer, sans possibilité de révision du mode de calcul.
Par acte du 18 avril 2023, la SCI Jean Baptiste a fait commandement à la locataire de payer la somme de 6.453,70 ' au titre d'un arriéré locatif, ce commandement visant la clause résolutoire insérée au bail.
Par exploit du 8 juin 2023, la SCI Jean-Baptiste a fait assigner l'association Eglise Evangélique Galates 3V28 devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Lyon, en constat de la résiliation du bail.
Par ordonnance du 25 mars 2024, le juge des référés du tribunal judiciaire de Lyon a :
Constaté qu'à la suite du commandement en date du 18 avril 2023, le jeu de la clause résolutoire est acquis au bénéfice de la SCI Jean-Baptiste à compter du 18 mai 2023 ;
Dit que l'association Eglise Evangélique Galates 3V28 et tous les occupants de son chef devront avoir quitté les lieux qu'elle occupe sis [Adresse 1], dans un délai d'un mois à compter de la signification de la présente et que passé cette date elle pourra être expulsée avec le concours de la force publique ;
Condamné l'association Eglise Evangélique Galates 3V28 au paiement de la somme provisionnelle de 5.840,19 ' au titre des loyers et charges impayés au 6 novembre 2023, échéance de novembre incluse, outre intérêts au taux légal à compter du commandement ;
Débouté l'association Eglise Evangélique Galates 3V28 de ses contestations, de même que de ses demandes de délais de paiement/suspension des effets de la clause résolutoire ;
Condamné l'association Eglise Evangélique Galates 3V28 à verser à la SCI Jean-Baptiste une indemnité d'occupation mensuelle équivalente au montant du loyer et des charges en cours à compter du 1er décembre 2023 et jusqu'à la libération effective des lieux ;
Condamné l'association Eglise Evangélique Galates 3V28 à verser à la SCI Jean-Baptiste la somme de 800 ', sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;
Condamné l'association Eglise Evangélique Galates 3V28 aux dépens de l'instance en ce compris le coût du commandement de payer ;
Par déclaration enregistrée le 16 avril 2024, l'association Eglise Evangélique Galates 3V28 a interjeté appel de ce jugement.
Par conclusions enregistrées au RPVA le 19 mars 2025, l'association Eglise Evangélique Galates 3V28 demande à la cour :
Infirmer l'ordonnance du 25 décembre 2024 en toutes ses dispositions ;
Statuant à nouveau,
A titre principal,
Débouter en conséquence la SCI Jean-Baptiste de l'intégralité de ses demandes notamment tendant à la constatation de la clause résolutoire, au versement de loyer et de charges et/ou d'indemnité d'occupation dû au 1er juin 2024, et au titre de l'article 700 du code de procédure civile et des dépens, en raison de contestations sérieuses ;
A titre subsidiaire,
Prononcer à tout le moins la suspension des effets de la clause résolutoire pendant une durée de 12 mois ;
Accorder les plus larges délais à l'association Eglise Evangélique Galates 3V28 compte tenu de sa bonne foi en lui permettant de s'acquitter de sa dette dans un délai d'un an, en 12 mensualités égales ;
En tout état de cause,
Débouter la SCI Jean-Baptiste de toutes ses demandes ;
Condamner la SCI Jean-Baptiste à verser à l'association Eglise Evangélique Galates 3V28 la somme de 3.000 ' en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamner la SCI Jean-Baptiste aux entiers dépens de la présente instance ;
Par conclusions régularisées au RPVA le 27 mars 2025, la SCI Jean Baptiste demande à la cour :
Confirmer la décision attaquée en toutes ses dispositions ;
Débouter l'association Eglise Evangélique Galates 3V28 de l'intégralité de ses demandes, fins et prétentions ;
Y ajoutant,
Condamner l'association Eglise Evangélique Galates 3V28 à régler à titre de provision à la SCI Jean Baptiste la somme de 1.736.40 ' au titre de l'arriéré de loyer et de charges et/ou d'indemnité d'occupation dû au 24 mars 2025, appel de mars 2025 compris ;
Condamner l'association Eglise Evangélique Galates 3V28 à régler à la SCI Jean Baptiste la somme de 3.000 ' sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles d'appel ;
Condamner la même aux entiers dépens de l'instance d'appel ;
MOTIFS DE LA DECISION
Sur la demande de constat de la résiliation de plein droit du bail :
Le premier alinéa de l'article 835 du Code de procédure civile dispose que le juge des référés, même en présence d'une contestation sérieuse, les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.
Selon le second alinéa de ce texte, il peut, dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, accorder une provision au créancier.
Aux termes de l'article L.145-41 alinéa 1 du Code de commerce, toute clause insérée dans le bail prévoyant la résiliation de plein droit ne produit effet qu'un mois après un commandement demeuré infructueux. Le commandement doit, à peine de nullité, mentionner ce délai.
En application de ces textes, il est possible, en référé, de constater la résiliation de plein droit d'un contrat de bail en application d'une clause résolutoire, sans qu'il soit besoin de caractériser une quelconque urgence ou un trouble manifestement illicite, s'agissant du simple constat de l'application d'une clause claire et précise qui, sauf preuve du contraire, ne se heurte à aucune contestation sérieuse.
En effet, si le prononcé de la résiliation d'un contrat suppose une appréciation relevant des juges du fond, le constat de l'acquisition d'une clause résolutoire entre dans les pouvoirs du juge des référés qui s'assure uniquement de l'existence de ladite clause et de la régularité de sa mise en oeuvre.
L'association Eglise Evangélique Galates 3V28 invoque la mauvaise foi du bailleur quant à la mise en oeuvre de la clause résolutoire. Elle lui reproche un manquement à ses propres obligations, notamment à son obligation de délivrance, des coupures d'eau récurrentes ayant lieu rendant l'immeuble impropre à son usage, dont le bailleur avait parfaitement connaissance, comme en témoignent les échanges de mails versés aux débats et dont il est vraisemblablement à l'origine. Elle ajoute que le bailleur ne lui délivre aucune quittance de loyer depuis le début du bail.
Elle fait en outre état de ce que le bailleur est passé du jour au lendemain et unilatéralement de charges forfaitaires prévues au bail à un système de remboursement réel, ne respectant pas les dispositions d'ordre public de la loi Pinel, ne justifiant pas du montant des provisions sur charges, n'opérant aucune répartition entre bailleur et preneur et ne les régularisant pas annuellement, tout en multipliant les factures et semant ainsi la confusion.
Elle précise notamment que la SCI Jean Baptiste ne justifie nullement de ses méthodes de calcul du prorata au titre de l'assurance et de la taxe foncière et que le bail prévoit une refacturation de l'électricité par le bailleur au locataire qui est illégale, chaque locataire devant bénéficier d'un compteur.
Elle conteste le commandement de payer dont elle ne comprend pas le montant, alors qu'elle a payé tous les mois sans discontinuer le loyer depuis 22 ans et toutes les factures qui lui ont été adressées, y compris celles qui ne sont pas fondées, étant précisé le caractère totalement fantaisiste du décompte joint au commandement, démontrant que le bailleur appelle des sommes illégalement ce qu'elle dénonce depuis 2014.
Elle soutient au final que l'impayé provient :
d'un bail non conforme aux dispositions d'ordre public de la loi Pinel imposant une répartition claire des charges entre bailleur et locataire, une régularisation et une justification annuelle,
d'une modification unilatérale et illicite du bailleur du système de calcul des charges, étant passé d'un système forfaitaire tel que prévu par le bail à une refacturation au réel de charges dont certaines ne sont pas à la charge de la locataire en application du bail et d'autres n'ont aucune réalité (ainsi les prétendus honoraires de renouvellement de bail, le contrat d'entretien d'espaces verts '),
d'une facturation abusive et aléatoire de frais non justifiés,
de l'absence de toute justification annuelle des charges et de toute régularisation,
de l'absence de toute quittance de loyer remise mensuellement à la locataire de 2017 à 2023, combinée à l'absence de toute justification des charges appelées, plongeant la locataire dans la plus grande confusion face aux montants appelés chaque mois,
de l'absence de toute explication claire donnée à la locataire malgré ses nombreuses demandes en ce sens.
Elle invoque enfin les nombreux aléas affectant la sincérité du décompte produit, qui n'est pas à jour puisqu'il est arrêté au 04/11/2024, ce qui permet au bailleur de soutenir que la locataire serait encore redevable d'un solde de 6.817,96 ', alors même que l'appelante a versé des sommes depuis cette date.
La SCI Jean Baptiste soutient que l'arriéré locatif réclamé depuis de nombreux mois n'est pas sérieusement contestable, étant conforme au bail lequel rappelle que :
le loyer est payable par mois d'avance dans les bureaux du mandataire du bailleur,
il est indexable chaque année sans aucune formalité de façon automatique en fonction de la variation de l'ICC,
lors de chaque révision de loyer, le dépôt de garantie sera réajusté de façon à toujours correspondre à 3 mois de loyer TTC,
le locataire est tenu de payer les charges selon un forfait de 4 %.
Elle fait valoir que les sommes exigibles en vertu du bail n'ayant pas été payées, elle a légitimement fait notifier à son locataire un commandement de payer visant la clause résolutoire, accompagné d'un décompte clair, dans lequel les paiements effectués ont bien été imputés.
S'agissant des charges, elle soutient que la forfaitisation exclut la régularisation annuelle et que :
la taxe foncière comprenant la taxe d'ordures ménagères est à la charge du locataire,
l'entretien des espaces verts, l'eau et l'électricité des abords sont refacturés au locataire au prorata des surfaces louées dès réception par le propriétaire des factures d'entretien et d'EDF.
Elle précise que conformément aux dispositions de la loi Pinel, elle est passée à une facturation au réel en juillet 2018, dont le règlement est demandé au locataire à chaque facture en fonction de sa quote-part qui est de 280/3470, sans avenant ce qu'elle ne conteste pas s'agissant d'une obligation légale et sans régularisation annuelle dès lors que les charges ne sont pas payées sous forme de provision, ce qui nécessiterait une clause à cet effet dans le bail. Elle s'étonne de ce que l'appelante lui reproche cette modification qui lui est pourtant favorable.
Elle soutient encore qu'il ne peut pas lui être reproché de ne pas s'être conformée aux dispositions de l'article L145-40-2 du Code de commerce introduit par la loi Pinel et relatif à la répartition des charges, ce texte étant applicable aux contrats conclus ou renouvelés après, ce qui n'est pas le cas, le renouvellement étant intervenu en 2009.
S'agissant de l'électricité, elle rappelle que selon la Cour de cassation, la clause du contrat de location relative à la refacturation d'électricité est nulle et souligne néanmoins que le locataire qui a bénéficié d'une prestation en nature qu'il ne peut pas restituer, doit payer une indemnité équivalente à cette prestation.
Elle fait par ailleurs valoir que par mail officiel du 29 septembre 2024, le conseil du bailleur a rappelé que l'ensemble des quittances étaient accessibles via l'intranet du gestionnaire et que cette demande ne relève pas d'une obligation du bailleur en matière de bail commercial.
Elle estime enfin avoir produit tous les justificatifs permettant de vérifier sa créance, qu'elle reprend poste par poste et actualise au 24 mars 2025, à la somme de 1.736.40 ', compte tenu des paiements intervenus entre temps et de la déduction des dépens et frais irrépétibles.
Au titre de sa bonne foi, elle fait observer que l'appelante est incapable d'indiquer depuis quand le local se trouverait privé d'eau potable et qu'à part des attestations signées par des membres de l'association manquant d'impartialité, il n'y a aucun courrier qui ait été adressé au bailleur s'agissant de cette prétendue difficulté avant le dépôt des conclusions par le locataire en première instance, rien ne démontrant que le bailleur est responsable du problème d'alimentation en eau et alors même que le locataire ne le lui a jamais signalé, cela n'ayant du reste rien à voir avec le loyer, et ne justifie pas le défaut de paiement des charges.
Sur ce,
Le contrat de bail du 11 mars 2009 liant les parties contient une clause résolutoire et un commandement de payer visant cette clause a été signifié le 18 avril 2023 pour la somme en principal de 6.453,70 '.
Toutefois, la mise en oeuvre de la clause résolutoire doit être faite de bonne foi par le bailleur, la bonne foi ne pouvant être mise en cause que pour des motifs liés à la délivrance du commandement de payer et à l'obligation du bailleur d'information loyale et complète de son locataire.
Une attitude destinée à causer un préjudice au preneur, même si elle repose sur la mise en 'uvre d'un droit par le bailleur, peut constituer la mauvaise foi rendant la mise en demeure inopérante.
Au cas présent, le bail a été renouvelé le 11 mars 2009 pour se terminer le 14 mars 2018, s'étant depuis prolongé tacitement en application de l'article L 145-9 du Code de commerce, à défaut de congé ou de demande de renouvellement, en sorte qu'il y a lieu d'appliquer les stipulations de ce bail auquel, sauf exception, les dispositions de la loi Pinel, même d'ordre public ne sont pas applicables, en particulier celles de l'article L 145-40-2 du Code de commerce. En effet, les dispositions relatives aux charges, travaux, impôts, taxes et redevances de cette loi sont applicables aux contrats conclus ou renouvelés à compter du 5 novembre 2014, en sorte que les baux conclus ou renouvelés avant cette date sont soumis à l'ancien régime.
S'agissant des charges, le bail stipule que :
le preneur devra supporter notamment sa quote-part de charges dont il se libérera entre les mains du bailleur,
le pourcentage forfaitaire est fixé à 4 % du montant du loyer,
la taxe foncière comprenant la taxe d'ordures ménagères est à la charge du locataire,
l'entretien des espaces verts, l'eau et l'électricité des abords seront refacturés au locataire, au prorata des surfaces louées, dès réception par le propriétaire des factures d'entretien et d'EDF.
Le contrat prévoit en outre :
le remboursement au bailleur et au prorata de la surface occupée, du montant de la prime d'assurance payée par lui,
que toutes les réparations d'entretien qui pourraient devenir nécessaires sont supportées par le preneur, seules les grosses réparations au sens de l'article 606, incombant au bailleur.
Le commandement de payer contient un décompte commençant au 1er avril 2018 dans lequel figure une somme de 739,55 ', à titre d'honoraires de renouvellement du bail qui se heurte, comme le soutient à juste titre l'appelante, à une contestation sérieuse, à défaut de renouvellement du-dit bail dont la bailleresse se prévaut d'ailleurs pour justifier la non-application de l'article L 145-40-2 du Code de commerce issue de la loi Pinel.
En outre, si ce commandement n'est pas contestable quant aux primes d'assurance et frais d'entretien des réseaux et de la toiture qui ne relèvent pas des grosses réparations et dont les factures sont versées aux débats, il y est en revanche fait application depuis juillet 2018 de la facturation au réel des charges notamment de la taxe foncière et de la taxe sur les ordures ménagères, des frais d'entretien des espaces verts et des charges d'eau et d'électricité au prorata de la surface louée, au lieu et place du forfait de 4 % et ce sans avenant au bail, la bailleresse se prévalant des dispositions d'ordre public de la loi Pinel dont elle a entendu faire une application immédiate et unilatérale, alors même qu'elle invoque la non-applicabilité immédiate du texte concerné s'agissant de l'obligation du bailleur d'indiquer la répartition des charges entre le bailleur et le preneur et le récapitulatif annuel, faisant ainsi une application distributive de cette loi, non conforme à ses dispositions transitoires et sans avenant, pourtant obligatoire pour appliquer les dispositions de la loi Pinel lorsqu'elles doivent l'être.
Ainsi, bien qu'il soit établi que l'association Eglise Evangélique Galates 3V28 ne s'est pas acquittée des causes du commandement de payer dans le délai d'un mois et que les charges imputées à la locataire sont prévues au bail, la cour retient néanmoins que la clause résolutoire a été mise en oeuvre de mauvaise foi, la délivrance du commandement de payer survenant après 22 ans d'exécution de bonne foi du bail par l'appelante, qui malgré les demandes réitérées d'explication afférentes aux charges appelées et factures reçues à partir de juillet 2018, ainsi qu'au prorata appliqué, demeurées systématiquement sans réponse s'en est finalement acquittées à chaque fois, y compris en application de l'ordonnance critiquée, alors même que son incompréhension résulte de cette modification unilatérale du mode de calcul contractuel des charges, dont l'intimée prétend au surplus qu'elle est favorable à l'appelante, sans nullement en justifier, au contraire.
Par ailleurs, la SCI Jean Baptiste n'a pas hésité à faire application de la clause de refacturation de l'électricité en connaissance de la nullité d'ordre public d'une telle clause, se prévalant de l'impossibilité de restituer cette prestation en nature, ce qui témoigne là encore de sa mauvaise foi.
Enfin, même si cet élément est postérieur au commandement de payer et ne relève pas directement de la mauvaise foi de la bailleresse dans la mise en oeuvre de la clause résolutoire, il résulte des pièces versées aux débats qu'alors qu'elle avait été alertée par l'appelante en mai 2023 et par les services de l'Eau du Grand [Localité 3] le 17 novembre 2023 de ce que la locataire était privée d'eau courante depuis plusieurs semaines, il n'est justifié d'aucune réaction de sa part malgré l'obligation de délivrance à laquelle elle est tenue, ce qui ajoute à sa mauvaise foi.
Au vu de l'ensemble de ces éléments, il apparaît que le commandement de payer du 18 avril 2023, faisant suite au défaut total d'information de la locataire quant aux modifications des clauses contractuelles témoigne du manquement de la bailleresse à son obligation d'information loyale et complète et ne permet pas à la locataire d'être informée de manière claire des sommes dont elle doit s'acquitter, en sorte qu'il n'a pas pour effet d'entraîner le jeu de la clause résolutoire.
En conséquence, le jugement entrepris est infirmé en toutes ses dispositions.
Statuant à nouveau, la SCI Jean Baptiste est déboutée de ses demandes fondées sur un commandement de payer de nul effet.
Sur les mesures accessoires
La décision déférée est infirmée en ses dispositions relatives aux dépens et frais irrépétibles de première instance.
Succombant, la SCI Jean Baptiste supportera les dépens de première instance et d'appel ;
L'équité commande en outre de la condamner à payer à l'association Eglise Evangélique Galates 3V28 la somme totale de 2.000 ', en application de l'article 700 du Code de procédure civile en première instance et à hauteur d'appel et de la débouter de sa demande à ce titre.
PAR CES MOTIFS
La cour d'appel,
Statuant dans les limites de l'appel,
Infirme la décision attaquée en toutes ses dispositions ;
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Déboute la SCI Jean Baptiste de ses demandes ;
Condamne la SCI Jean Baptiste aux dépens de première instance et d'appel ;
Condamne la SCI Jean Baptiste à payer à l'association Eglise Evangélique Galates 3V28 la somme totale de 2.000 ', en application de l'article 700 du Code de procédure civile, en première instance et à hauteur d'appel ;
Déboute la SCI Jean Baptiste de sa demande sur ce fondement ;
LE GREFFIER LE PRESIDENT