CA Grenoble, 1re ch., 17 juin 2025, n° 24/00806
GRENOBLE
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Inolys (SASU)
Défendeur :
BNP Paribas Personal Finance (SA)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Clerc
Conseillers :
Mme Blatry, Mme Lamoine
Avocats :
Me Santoni, Me Boulloud
FAITS, PROCÉDURE ET MOYENS DES PARTIES
Dans le cadre d'une vente hors établissement par un représentant de la société Inolys, les époux [J] [C]/[S] [Z] ont, suivant bon de commande du 19 juin 2017 contracté avec cette société pour la fourniture et la pose d'une centrale photovoltaïque moyennant le prix de 15.200€.
Le 21 juin 2017, les époux [Z] ont contracté un prêt de même montant avec la société Cetelem aux droits de laquelle vient la société BNP Paribas Personal Finance.
Suivant exploits de commissaire de justice du 19 avril 2023, les époux [Z] ont fait citer la SELARLU [T] en qualité de liquidateur judiciaire de la société Inolys et la société BNP Paribas Personal Finance en annulation des contrats de vente et de crédit.
Par jugement du 6 décembre 2023 assorti de l'exécution provisoire de droit, le tribunal judiciaire de Valence a :
déclaré irrecevables comme prescrites les demandes des époux [Z],
débouté les parties du surplus de leurs prétentions,
condamné solidairement les époux [Z] à payer à la société BNP Paribas Personal Finance la somme de 500€ d'indemnité de procédure, ainsi qu'aux dépens de l'instance.
Suivant déclaration du 18 février 2024, M. et Mme [Z] ont relevé appel de cette décision.
Par conclusions récapitulatives du 16 septembre 2024, M. et Mme [Z] demandent à la cour d'infirmer le jugement déféré et de :
les déclarer recevables en leurs demandes,
prononcer la nullité du contrat de vente conclu avec la société Inolys,
mettre à la charge de la liquidation judiciaire de la société Inolys l'enlèvement de l'installation litigieuse et la remise en état des lieux,
dire qu'à défaut de reprise dans le délai de deux mois suivant la signification de la décision, ils pourront en disposer librement,
prononcer en conséquence la nullité du contrat de prêt conclu avec la société BNP Paribas Personal Finance,
priver la société BNP Paribas Personal Finance de son droit à restitution du capital emprunté et la condamner à lui rembourser les mensualités acquittées,
enjoindre la société BNP Paribas Personal Finance à produire un nouveau décompte expurgé des intérêts,
condamner la société BNP Paribas Personal Finance à leur payer les sommes de:
15.200€ au titre du prix de vente,
6.421,60€ au titre des intérêts conventionnels et frais payés par eux,
5.000€ au titre de leur préjudice moral,
6.000€ d'indemnité de procédure,
prononcer la déchéance du droit aux intérêts de la banque,
débouter la société BNP Paribas Personal Finance de l'intégralité de ses demandes,
condamner la société BNP Paribas Personal Finance à supporter les entiers dépens de l'instance.
Ils expliquent que :
le point de départ du délai de prescription doit être fixé à la date à laquelle ils ont connu les faits pouvant fonder une action en justice,
l'appréciation de la rentabilité d'une installation suppose nécessairement du recul,
en outre, la date de signature du contrat ne peut constituer le point de départ du délai de prescription qu'à la condition de démontrer que le consommateur avait connaissance à cette date de l'ensemble des irrégularités du contrat,
le contrat principal est nul pour dol,
la promesse de rentabilité résulte des documents contractuels ainsi que de la nature même de la chose vendue,
la promesse d'autofinancement de l'installation est complètement fausse,
le contrat de vente, insuffisamment précis, est contraire aux dispositions du code de la consommation,
certaines caractéristiques essentielles du bien vendu sont omises,
faute de conscience des irrégularités, ils n'ont jamais couvert la nullité relative du contrat de vente,
les contrats, principal et accessoire, sont interdépendants,
la banque a participé au dol commis par le vendeur,
elle commis diverses fautes en ne s'assurant pas de l'installation intégrale de la centrale, en finançant un contrat de vente nul et en accordant son concours à des opérations nécessairement ruineuses.
Par dernières conclusions du 18 juin 2024, la société BNP Paribas Personal Finance demande à la cour de :
à titre principal, confirmer le jugement déféré sauf sur le rejet de sa demande en dommages-intérêts qu'elle forme à hauteur de la somme de 5.000€,
subsidiairement, si la cour venait à annuler ou résoudre les contrats, débouter les époux [Z] de leur demande en remboursement des sommes acquittées au titre du contrat de prêt, des intérêts ou encore de toutes autres sommes nées du contrat de crédit et de son exécution à titre de dommages-intérêts,
en tout état de cause, condamner solidairement les époux [Z] à lui payer une indemnité de procédure de 6.000€, ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance.
Elle indique que :
les époux [Z] ont exercé leur action plus de 5 années après la conclusion des contrats,
le non respect du code de la consommation était particulièrement évident alors même que les dispositions litigieuses étaient reproduites au contrat de vente,
concernant le prétendu dol, la première facturation permettaient aux époux [Z] d'apprécier les man'uvres alléguées,
concernant sa responsabilité, le point de départ se situe à la date du déblocage des fonds,
à défaut, il sera relevé qu'aucune rentabilité n'a été contractualisée,
le code de la consommation a été respecté,
en tout état de cause, une éventuelle nullité aurait été couverte par les époux [Z],
elle n'a commis aucune faute,
aucun lien de causalité ni aucun préjudice ne sont démontrés.
La SELARLU [T] ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Inolys, citée par acte délivré le 10 avril 2024 à personne habilitée à le recevoir, n'a pas constitué avocat.
La décision sera réputée contradictoire.
La clôture de la procédure est intervenue le 8 avril 2025.
MOTIFS
sur la recevabilité des demandes de M. et Mme [U]
Les époux [Z] forment une demande en nullité de la vente du 28 janvier 2015 pour non respect des dispositions du code de la consommation en cas de démarchage à domicile, ou au titre d'un dol pour défaut de rentabilité de l'installation photovoltaïque, ou encore pour responsabilité du prêteur.
Les parties s'accordent sur l'application de la prescription quinquennale de l'article 2224 du code civil mais sont en désaccord sur le point de départ de ce délai de prescription.
Concernant la nullité du bon de commande pour non conformité aux dispositions du code de la consommation, le délai de prescription court à compter de la signature du contrat de vente critiqué, soit au 19 juin 2017, étant observé que l'installation fonctionne parfaitement depuis 8 années.
Par application des articles 2224 et 1116 ancien du code civil, le point de départ du délai quinquennal de prescription concernant le dol court à compter de la connaissance du défaut de rentabilité allégué.
En l'espèce, les époux [Z] qui disposaient d'une installation en auto-consommation ont eu connaissance du défaut de rentabilité allégué dès l'émission de la première facture EDF de régularisation pour l'année 2017 sans qu'il soit besoin de recourir à une expertise pour constater que le rachat de l'électricité était inférieur au montant des sommes acquittées au titre du prêt.
Sur la responsabilité du prêteur, le délai de prescription court à compter du déblocage des fonds le 2 septembre 2017.
En toutes hypothèses, les époux [Z], qui ont assigné 5 ans et demi après la date de régularisation des prélèvements EDF en décembre 2017, date la plus favorable pour eux, ont formé leur demande en nullité hors du délai de prescription.
Ils ont été à bon droit déclarés irrecevables en leur action par le tribunal et le jugement déféré sera confirmé sur ce point.
sur la demande en dommages-intérêts de la société BNP Paribas Personal Finance
En l'absence de démonstration de la mauvaise foi alléguée par la banque à l'encontre des époux [Z], le jugement déféré, qui déboute la société BNP Paribas Personal Finance de sa demande en dommages-intérêts, sera confirmé sur ce point.
Par voie de conséquence, le jugement déféré sera confirmé en toutes ses dispositions.
sur les mesures accessoires
L'équité commande de faire application en appel des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au seul bénéfice de la société BNP Paribas Personal Finance.
Enfin, les dépens de la procédure d'appel seront supportés par les époux [Z] et les mesures accessoires de première instance sont confirmées.
PAR CES MOTIFS
La cour statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire,
Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
Condamne in solidum M. [S] [Z] et Mme [J] [C] épouse [Z] à payer à la société BNP Paribas Personal Finance la somme de 1.500€ par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en appel,
Condamne in solidum M. [S] [Z] et Mme [J] [C] épouse [Z] aux dépens de la procédure d'appel.
Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de la procédure civile,