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Décisions

CA Versailles, ch. com. 3-2, 24 juin 2025, n° 24/07347

VERSAILLES

Arrêt

Autre

CA Versailles n° 24/07347

24 juin 2025

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 4AF

Chambre commerciale 3-2

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 24 JUIN 2025

N° RG 24/07347 - N° Portalis DBV3-V-B7I-W4MA

AFFAIRE :

S.A.R.L. HORIZON BATIMENT

C/

LE PROCUREUR GENERAL

...

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 07 Novembre 2024 par le Tribunal de Commerce de NANTERRE

N° Chambre : 9

N° RG : 2024P01311

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Asma MZE

Me Franck LAFON

Me Christophe DEBRAY

PG

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE VINGT QUATRE JUIN DEUX MILLE VINGT CINQ,

La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

APPELANT :

S.A.R.L. HORIZON BATIMENT

Ayant son siège

[Adresse 2]

[Localité 7]

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social

Représentant : Me Asma MZE de la SELARL LX PARIS-VERSAILLES-REIMS, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 699 - N° du dossier 2474965

Plaidant : Me Richard RONDOU, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : E 878

****************

INTIME :

LE PROCUREUR GENERAL

POLE ECOFI - COUR D'APPEL DE VERSAILLES

[Adresse 4]

[Localité 5]

Société [I]-PECOU société de mandataires judiciaires prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège mission conduite par Maître [Y] [I], es qualité de liquidateur judiciaire de la SARL HORIZON BATIMENT

Ayant son siège

[Adresse 1]

[Localité 6]

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social

Représentant : Me Franck LAFON, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 618 - N° du dossier 20240331

Plaidant : Me Francis PIERREPONT de la SCP SCP PIERREPONT AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0527 -

UNION DE RECOUVREMENT DES COTISATIONS DE SECURITE SOCIALE ET D'ALLOCATIONS FAMILIALES - URSSAF IDF

Ayant son siège

[Adresse 3]

[Localité 8]

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social

Représentant : Me Christophe DEBRAY, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 627 - N° du dossier 25046

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 12 Mai 2025 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Ronan GUERLOT, Président chargé du rapport, et Monsieur Cyril ROTH, GUERLOT, président.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Ronan GUERLOT, Président de chambre,

Monsieur Cyril ROTH, Président de chambre,

Madame Gwenael COUGARD, Conseillère,

Greffier, lors des débats : Madame Françoise DUCAMIN,

En la présence du Ministère Public, représenté par Madame Anne CHEVALIER, Avocat Général dont l'avis du 27 mars 2025 a été transmis le 27 mars 2025 au greffe par la voie électronique.

EXPOSE DU LITIGE

Le 16 octobre 2024, l'Union de Recouvrement des Cotisations de Sécurité Sociale et d'Allocations Familiales d'Île-de-France (URSSAF) a assigné la SARL Horizon Bâtiment devant le tribunal de commerce de Nanterre afin de voir ouvrir à son égard une procédure collective.

Le 7 novembre 2024, par jugement réputé contradictoire, le tribunal de commerce de Nanterre a notamment :

- ouvert la procédure de liquidation judiciaire de la société Horizon Bâtiment ;

- désigné la SELARL [I]-Pécou, mission conduite par M. [I], en qualité de liquidateur judiciaire ;

- fixé provisoirement au 8 mai 2023 la date de cessation des paiements compte tenu du non-paiement des cotisations sociales ;

- dit que le présent jugement est exécutoire à titre provisoire de plein droit ;

- dit que les dépens seront employés en frais de liquidation judiciaire.

Le 22 novembre 2024, la société Horizon Bâtiment a interjeté appel de ce jugement en tous ses chefs de disposition.

Par ordonnance du 2 janvier 2025, le premier président de la cour d'appel de Versailles a suspendu les effets provisoires du jugement.

Par dernières conclusions notifiées le 6 avril 2025, la société Horizon Bâtiment demande à la cour de :

- la déclarer recevable et bien fondée en son appel et ses demandes ;

Y faisant droit,

- infirmer le jugement du 7 novembre 2024 en tous ses chefs de disposition ;

Et, statuant à nouveau,

A titre principal,

- juger qu'il n'y a pas lieu d'ouvrir une liquidation judiciaire ;

- débouter l'URSSAF d'Ile de France de ses demandes, fins et conclusions ;

A titre subsidiaire,

- ouvrir sa procédure de redressement judiciaire ;

- fixer la date de cessation des paiements au 1er novembre 2024 ;

- désigner le ou les organes de la procédure collective ;

- fixer une période d'observation de trois mois ;

- renvoyer la cause et les parties devant le tribunal de commerce de Nanterre afin de poursuite de la procédure ;

En tout état de cause,

- condamner l'URSSAF d'Ile de France à lui payer une indemnité de 4 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner l'URSSAF d'Ile de France aux dépens.

Par dernières conclusions notifiées le 18 février 2025, la société [I]-Pécou, ès qualité, demande à la cour de :

- prendre acte de son rapport à justice quant à l'appel formé par la société Horizon Bâtiment à l'encontre du jugement du 7 novembre 2024 ;

- dire que les dépens seront employés en frais de procédure collective.

Par dernières conclusions notifiées le 28 mars 2025, l'URSSAF d'Ile de France demande à la cour de :

- lui donner acte de ce qu'elle s'en rapporte sur le mérite de cet appel, ayant été désintéressée de sa créance à la date du 27 mars 2025, postérieurement au jugement ouvrant la procédure de liquidation judiciaire ;

En conséquence,

- il y aura lieu de condamner la société Horizon Bâtiment aux dépens qui seront recouvrés en frais privilégiés de procédure collective.

Le 27 mars 2025, le ministère public a émis un avis tendant à ce que la cour d'appel confirme le jugement entrepris et ouvre une procédure de redressement judiciaire.

La clôture de l'instruction a été prononcée le 28 avril 2025.

Pour plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, il est renvoyé aux conclusions susvisées.

MOTIFS

I. Sur l'état de cessation des paiements

La société Horizon Bâtiment soutient, à titre principal, qu'elle n'est pas en état de cessation des paiements. Elle fait valoir que son compte est créditeur ; qu'elle a conclu deux bons de commande. En réponse au ministère public, elle expose que l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire la mettrait en grande difficulté par rapport à son donneur d'ordre actuel.

Le liquidateur indique s'en rapporter à justice. Il fait valoir qu'un redressement n'est pas envisageable, l'activité de la société ayant cessé avant le jugement d'ouverture et qu'elle ne dispose d'aucun salarié. Il indique qu'elle a, à ce jour, trois dettes d'un montant respectif de 5 579 euros, 477 euros et 38 758 euros, outre le fait que son solde bancaire est quasi-nul.

L'URSSAF demande à ce qu'il lui soit donné acte que sa créance a été acquittée le 27 mars 2025 et s'en rapporte donc à justice sur le mérite de l'appel.

Le ministère public souligne que, selon le liquidateur l'appelante a arrêté son activité, que la conclusion de bons de commande n'est pas suffisant à démontrer que sa situation n'est pas définitivement obérée même si elle parvient à obtenir une partie des marchés. Il ajoute qu'à défaut de preuve que son activité n'est pas définitivement arrêtée et faute d'état prévisionnel certifié par un expert-comptable au moins pendant la période d'observation attestant que la société ne produira pas de nouvelles dettes la liquidation de la société ne pourra être que confirmée.

Réponse de la cour

L'article L. 631-1 du code de commerce définit la cessation des paiements comme la situation dans laquelle le débiteur est dans l'impossibilité de faire face au passif exigible avec l'actif disponible.

L'actif disponible est l'actif réalisable à bref délai. En cas d'appel, l'état de cessation des paiements est apprécié par la cour au jour où elle statue.

Il ressort d'un tableau de synthèse versé aux débats par le liquidateur que le passif déclaré de la société Horizon Bâtiment se compose des créances suivantes :

- Alpro Agirc Arrco et BTP Prévoyance : 5 579 euros ; 477 et 38 756 euros ;

A ces créances, il faut ajouter celle de l'URSSAF s'élevant à 8 756 euros dont 4 280 de parts salariales ainsi que cela résulte de son bordereau de déclaration de créance établi le 16 novembre 2024.

Toutefois, l'URSSAF établit, à hauteur de cour, que sa créance a été réglée après le jugement d'ouverture le 24 février 2025 (lettre du 13 mars 2025 et relevé du compte du 6 mars 2025).

Dès lors, au jour du présent arrêt, la société Horizon Bâtiment reste débitrice des sommes de 5 579 euros et 477 euros susvisées, aucune preuve de leur paiement n'étant rapportée.

S'agissant de son actif, la société Bâtiment horizon verse aux débats :

- des relevés bancaire de compte Qonto couvrant la période du 1er janvier au 30 novembre 2024, laissant apparaitre un solde créditeur oscillant entre 0 euro et 1 377,81 euros ; le solde étant nul au 30 novembre 2024 ;

- deux bons de commande signés le 4 novembre 2024 de la société BPVR, soit trois jours d'ouverture, pour un montant total de 108 000 euros.

Aucun relevé de compte de la débitrice plus récent n'est produit.

Il convient de rappeler que les créances à recouvrer ne constituent pas de l'actif disponible sauf à être certaines et quasi immédiates, de sorte que les bons de commandes ne caractérisent pas l'actif disponible exigé par l'article L 631-1 susvisé.

Au regard de ces éléments, en l'absence de trésorerie, l'appelante ne peut pas à ce jour faire face avec son actif disponible à son passif exigible. Son état de cessation des paiements est donc avéré.

2- Sur la possibilité d'un redressement

Selon les articles L. 640-1 et L. 640-2 du code de commerce, la liquidation judiciaire est une procédure collective ouverte à toute personne morale exerçant une activité commerciale en cessation des paiements et dont le redressement est manifestement impossible.

La société appelante verse aux débats verse aux débats :

- un procès-verbal de mise à disposition et vérification avant mise en service d'échafaudage du 4 décembre 2024 dont il résulte qu'elle a installé un échafaudage pour l'installation d'un chantier de ravalement ;

- les bons de commandes susvisés portant précisément sur l'installation de l'échafaudage ;

- un document prévisionnel de trésorerie de janvier à avril 2025 non signé par un expert-comptable ;

La cour relève que, selon son extrait K bis, la société Horizon Bâtiment a cessé totalement son activité depuis le 4 mars 2024, sans disparition de la personnalité morale, ce qui au demeurant n'est pas cohérent avec la date postérieure du PV de réception de l'échafaudage.

En dépit du caractère ténu des éléments fournis sur l'activité de la société et ses contrats prévisibles, le redressement de l'appelante ne semble pas manifestement impossible compte tenu de l'apurement de la dette de l'URSAFF postérieurement au jugement entrepris et du marché attesté par les bons de commande et le PV de réception.

Le jugement sera donc infirmé, une procédure de redressement judiciaire ouverte et une période d'observation fixée à trois mois.

Il n'y a pas lieu à désignation d'un administrateur judiciaire pour l'établissement du plan, en application des articles L. 621-4 alinéa 4 et R. 621-11 du code de commerce.

- Sur la date de cessation des paiements :

La cour ouvrant, par arrêt de ce jour, une procédure de redressement judiciaire après arrêt de l'exécution provisoire du jugement de liquidation, la date de cessation des paiements ne peut être fixée avant le 12 janvier 2024, par application des articles L. 641-1 IV et L. 631-8 du code de commerce.

L'appelante est débitrice à l'égard d'Alpro Agirc Arrco et BTP Prévoyance selon déclaration du 27 novembre 2024. A cette date, l'état de cessation est constitué. Elle sera retenue comme date de cessation des paiements.

3- Sur les demandes accessoires

Les dépens de première instance et d'appel seront passés en frais privilégiés de la procédure de redressement judiciaire.

L'équité commande de ne pas faire application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, par arrêt contradictoire,

Infirme le jugement en toutes ses dispositions,

Ouvre une procédure de redressement judiciaire à l'égard de la SARL [Adresse 9], inscrite au registre du commerce et des sociétés de Nanterre sous le N° 888776796 -2020 B 775 ;

Ouvre une période d'observation de trois mois à compter du présent arrêt,

Désigne M. [R] [V] en qualité de juge-commissaire ;

Désigne la SELARL [I]-Pecou, en la personne de M. [Y] [I], demeurant à [Adresse 10], en qualité de mandataire judiciaire ;

Fixe la date de la cessation des paiements au 27 novembre 2024 ;

Invite les délégués du personnel ou les salariés s'il en existe à désigner un représentant dans les conditions prévues par les articles L. 621-4 et L. 621-6 du code de commerce et à en communiquer le nom et l'adresse au greffe du tribunal de commerce de Pontoise ;

Fixe à huit mois à compter du présent arrêt le délai de dépôt, par le mandataire judiciaire, de la liste des créances mentionnée à l'article L. 624-1 du code de commerce ;

Renvoie l'affaire devant le tribunal de commerce de Pontoise pour la poursuite de la procédure ;

Rappelle que le greffe du tribunal de commerce de Pontoise devra procéder aux mentions et publicités prévues par la loi ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Horizon Bâtiment ;

Dit que les dépens d'appel seront employés en frais de procédure.

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Ronan GUERLOT, Président, et par Madame Françoise DUCAMIN, Greffière, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT

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