CA Montpellier, ch. com., 24 juin 2025, n° 24/04990
MONTPELLIER
Arrêt
Autre
ARRÊT n°
Grosse + copie
délivrées le
à
JONCTION DES RG 24/0[Immatriculation 7]/00416
COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
Chambre commerciale
ARRET DU 24 JUIN 2025
Numéro d'inscription au répertoire général :
N° RG 24/04990 - N° Portalis DBVK-V-B7I-QM2F
Décision déférée à la Cour :
Ordonnance du 16 SEPTEMBRE 2024
JUGE COMMISSAIRE DE [Localité 9]
N° RG 2024006764
DOSSIER RG 24.4990
APPELANTES :
Madame [C] [U] [B] es-qualité de gérante de la société DRISS HABITAT
née le [Date naissance 2] 1982 à [Localité 10]
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représentée par Me Alexandre SALVIGNOL de la SARL SALVIGNOL ET ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER substitué par Me Andie FULACHIER, avocat au barreau de MONTPELLIER
DOSSIER RG 25-00416
APPELANTES :
S.A.S. DRISS HABITAT prise en la personne de sa gérante en exercice Mme [C] [M] domiciliée es qualité au siège social sis
[Adresse 8]
[Localité 4]
Représentée par Me Alexandre SALVIGNOL de la SARL SALVIGNOL ET ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER substitué par Me Andie FULACHIER, avocat au barreau de MONTPELLIER
INTIMEES :
S.E.L.A.R.L. [V] [T] [H] prise en la personne de Me [L] [H] pris en sa q
ualité de liquidateur judiciaire de la société DRISS HABITAT
[Adresse 12]
[Localité 5]
Représentée par Me Emily APOLLIS de la SELARL SAFRAN AVOCATS, avocat au barreau de MONTPELLIER
Organisme URSSAF DE LANGUEDOC [Localité 13] prise en la personne de son représentant légal domicilié en
cette qualité au siège situé
[Adresse 11]
[Localité 6]
Représentée par Me François BORIE de la SCP DORIA AVOCATS, avocat au barreau de MONTPELLIER substitué par Me CLERMONT Jean-Denis, avocat au barreau de MONTPELLIER
Ordonnance de clôture du 15 mai 2025
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 906-5 et 914-5 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 22 mai 2025,en audience publique, devant M. Jean-Luc PROUZAT, Magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles, chargé du rapport, les avocats ne s'y étant pas opposés.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Mme Danielle DEMONT, présidente de chambre
M. Thibault GRAFFIN, conseiller
Monsieur Jean-Luc PROUZAT, conseiller désigné par ordonnance pour assurer la Présidence
Greffier lors des débats : Mme Gaëlle DELAGE
Ministère public :
L'affaire a été communiquée au ministère public.
ARRET :
- Contradictoire ;
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;
- signé par Mme Danielle DEMONT, présidente de chambre, et par Mme Gaëlle DELAGE, greffière.
*
* *
FAITS et PROCEDURE - PRETENTIONS et MOYENS DES PARTIES :
La SASU Driss Habitat ayant notamment pour activité la maçonnerie générale, les travaux de charpente-couverture et de second 'uvre, et dont Mme [C] [M] est la présidente, a fait l'objet d'une procédure de redressement judiciaire ouverte par jugement du tribunal de commerce de Béziers en date du 11 octobre 2023 publié le 18 octobre 2023 au Bodacc.
L'URSSAF de Languedoc-[Localité 13] a déclaré, le 8 novembre 2023, une créance de 122 961,78 € à la procédure collective pour les sommes de :
' 24 642,78 euros à titre chirographaire et définitif correspondant aux cotisations impayées de décembre 2019 à novembre 2022,
' 98 319 € à titre privilégié, dont 53 319 € à titre définitif correspondant aux cotisations impayées de décembre 2022 à septembre 2023 et 45 000 € à titre provisionnel, soit 15 000 € au titre des cotisations à échoir pendant la période d'observation du redressement judiciaire et 30 000 € au titre de diverses régularisations.
La procédure de redressement judiciaire de la société Driss Habitat a été convertie en liquidation judiciaire par un jugement du tribunal de commerce de Béziers du 17 janvier 2024, la Selarl [L] [H] étant désignée en qualité de liquidateur.
L'URSSAF de Languedoc-[Localité 13] a alors ramené sa créance à la somme de 60 710 € à titre définitif et privilégié correspondant aux cotisations impayées sur la période de décembre 2019 à octobre 2023 et, par lettre du 17 juillet 2024, la Selarl [L] [H] ès qualités a demandé au greffier du tribunal de commerce de modifier en en ce sens l'état des créances.
Par ordonnance du 16 septembre 2024, le juge-commissaire en charge de la procédure collective a notamment dit que la créance n° 5 (de l'URSSAF de Languedoc-[Localité 13]) sera portée sur l'état des créances pour la somme de 60 710 € à titre privilégié.
Mme [M] en sa qualité de « gérante de la société Driss Habitat », par déclaration du 7 octobre 2024, relevé appel de cette ordonnance, qui lui avait été notifiée le 26 septembre 2024 ; cette procédure a été enrôlée sous le n° 24/4990.
Par une nouvelle déclaration du 17 janvier 2025, la société Driss Habitat prise en la personne de « sa gérante », Mme [M], a relevé appel de la même ordonnance, la procédure étant alors enrôlée sous le n° 25/416.
Les deux instances ont été instruites conformément aux dispositions de l'article 906 du code de procédure civile.
La présidente de la chambre, qui avait été entre-temps saisie par l'URSSAF de Languedoc-[Localité 13] d'une demande d'irrecevabilité de l'appel formé par Mme [M] à titre personnel pour défaut de qualité à agir, par une ordonnance du 5 mars 2025 qui n'a pas été déférée à la cour, a rejeté la fin de non-recevoir ainsi soulevée, et ordonné la jonction de la procédure enregistrée sous le n° RG 24/04990 avec celle enregistrée sous le n° RG 25/00416.
La société Driss Habitat, par conclusions du 28 février 2025, demande à la cour de:
Vu les articles R. 622-24 et R. 624-7 du code de commerce,
Vu l'article L. 131-1 du code des procédures civiles d'exécution,
Vu l'article 700 du code de procédure civile,
- accueillir le recours présenté,
- réformer l'ordonnance du 5 septembre 2024 (') en ce qu'elle a dit que la créance n° 5 sera portée sur l'état des créances comme suit : créance n° 5 : 60 710 € à titre privilégié,
- ordonner à la Selarl [L] [H] (') et l'URSSAF de Languedoc-[Localité 13] de communiquer et ce sous astreintes de 150 € par jour de retard le décompte actualisé de l'URSSAF et de communiquer un extrait K bis de la société Driss Habitat à jour de la mention de la formalité,
- juger que la juridiction de céans sera compétente pour liquider l'éventuelle astreinte,
Statuant à nouveau,
- annuler la créance de l'URSSAF portant le n° 5 portée sur l'état des créances tenu par M. [H] pris en sa qualité de liquidateur judiciaire,
En tout état de cause,
- condamner solidairement l'URSSAF et la Selarl [L] [H], prise en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société Driss Habitat, à payer une somme de 1200 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens d'appel.
Au soutien de son appel, elle fait valoir pour l'essentiel que :
- aucun décompte n'est produit du montant de la créance déclarée à titre privilégié et définitif à hauteur de 60 710 €,
- le courrier du 16 juillet 2024 de l'URSSAF adressé au liquidateur aux fins de déclaration de cette créance de 60 710 € est hors délai puisqu'il intervient six mois après la publication au Bodacc du jugement de liquidation judiciaire (le 17 janvier 2024) en méconnaissance des dispositions de l'article R. 622-24, alinéa 1er, du code de commerce,
- le registre du commerce et des sociétés mentionne que l'activité artisanale de la société a été enregistrée sous condition suspensive de l'immatriculation au répertoire des métiers,
- le liquidateur n'a pas vérifié que cette formalité avait été accomplie en sorte que Mme [M] ne peut être considérée comme présidente de la société et donc, responsable.
L'URSSAF de Languedoc-[Localité 13], par dernières conclusions du 21 mars 2025, sollicite de voir confirmer l'ordonnance rendue le 5 septembre 2024 par le juge-commissaire, et condamner Mme [M] à payer la somme de 2 000 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Il soutient en substance que :
- la société Driss Habitat ne justifie pas avoir porté à la connaissance du mandataire judiciaire ou du juge-commissaire les contestations dont elle fait désormais état,
- sa créance a été régulièrement déclarée dans le délai de deux mois suivant la publication au Bodacc du jugement d'ouverture et elle avait la possibilité, conformément aux dispositions de l'article L. 622 -24 du code de commerce, de convertir sa créance initialement déclarée à titre provisionnel en créance définitive dans le délai d'un an à compter de la publication au Bodacc de la procédure collective,
- les décomptes afférents aux déclarations de créance ont été annexés à celles-ci et la demande de production sous astreintes de l'extrait K bis la société est sans rapport avec l'ordonnance d'admission de la créance dont la cour se trouve saisie.
La Selarl [L] [H] prise en sa qualité de liquidateur à la liquidation judiciaire de la société Driss Habitat, par dernières conclusions du 24 mars 2025, demande également à la cour de confirmer l'ordonnance dont appel, par des moyens sensiblement identiques à ceux développés par l'organisme de sécurité sociale.
Le ministère public auquel le dossier de l'affaire a été communiqué s'en rapporte à l'appréciation de la cour.
La procédure a été clôturée par ordonnance du 15 mai 2025.
Lors des débats à l'audience, la cour a relevé d'office l'irrecevabilité de l'appel au motif que l'ordonnance rendue le 16 septembre 2024 par le juge-commissaire ne constituait pas une décision d'admission de la créance de l'URSSAF dont le recours était susceptible d'être porté directement devant la cour d'appel en application de l'article R. 624-7 du code de commerce ; les parties ont donc été invitées à fournir leurs observations sur le moyen d'irrecevabilité ainsi soulevé par une note en délibéré à déposer sous huitaine.
Par note reçue le 27 mai 2025 par le RPVA, la société Driss Habitat, après avoir cité in extenso les dispositions de l'article R. 624-3 du code de commerce, a sollicité une réouverture des débats, soulignant en particulier que sa dirigeante, Mme [M], n'avait pas été en mesure de présenter ses observations (sur la contestation des créances) ou de prendre connaissance des observations du mandataire judiciaire.
Les intimés n'ont pas, pour leur part, déposé de note dans le délai prescrit.
MOTIFS de la DECISION :
Les parties, invitées à déposer une note en délibéré, ont été mises en mesure de s'expliquer sur le moyen d'irrecevabilité relevé d'office par la cour, sans qu'il y ait lieu d'ordonner une réouverture des débats.
Dans le droit des procédures collectives, la nature de l'ordonnance rendue par le juge-commissaire détermine la voie de recours qui lui est applicable.
En l'espèce, l'ordonnance rendue le 16 septembre 2024 par le juge-commissaire, qui a notamment dit que la créance n° 5 de l'URSSAF de Languedoc-[Localité 13] sera portée sur l'état des créances pour la somme de 62 710 € à titre privilégié, ne vise qu'à compléter la liste des créances déposée au greffe du tribunal de commerce une fois définitivement chiffrée la créance de l'organisme de sécurité sociale, qui initialement avait été déclarée à titre provisoire, du moins en partie, conformément à l'article L. 622-24, alinéa 3, du code de commerce.
Il ne s'agit donc pas d'une décision d'admission de la créance de l'URSSAF au sens des dispositions des articles L. 624-2, L. 624-3 et R. 624-3 du même code, décision qui n'aurait pu être prise par le juge-commissaire qu'à l'issue de la vérification des créances privilégiées, après que le mandataire judiciaire eut recueilli les observations du débiteur.
Il doit d'ailleurs être rappelé que l'URSSAF, après avoir déclaré, le 8 novembre 2023, une créance de 122 961,78 €, dont 45 000 € à titre provisionnel, a ensuite ramené sa créance à la somme de 62 710 € à titre définitif et privilégié et que par lettre du 17 juillet 2024, la Selarl [L] [H] ès qualités, par référence aux dispositions du dernier alinéa de l'article R. 624-2 du code de commerce, a demandé au greffier du tribunal de commerce de compléter la liste des créances déposée entre-temps au greffe.
Le recours ouvert contre les ordonnances du juge-commissaire doit être porté devant le tribunal conformément au principe posé à l'article R. 621-21, alinéa 4, du code de commerce et ce n'est qu'exceptionnellement que le recours contre certaines ordonnances du juge-commissaire est porté devant la cour d'appel ; tel est le cas des ordonnances statuant sur l'admission ou le rejet des créances déclarées, ou encore celles habilitant le liquidateur à réaliser les actifs du débiteur ; les recours contre de telles ordonnances sont en effet portés devant la cour d'appel, à titre d'exception, du fait que des textes spéciaux le prévoient, comme l'article R. 624-7 pour l'admission des créances, l'article R. 642-37-1 pour la réalisation des actifs immobiliers et l'article R. 642-37-3 pour celle des actifs mobiliers.
Or, aucun texte ne prévoit que l'ordonnance du juge-commissaire, qui se borne à compléter la liste des créances déposée au greffe par l'inscription des créances définitivement fixées, puisse être directement frappée d'appel devant la cour ; doit dès lors être déclaré irrecevable l'appel formé en l'espèce contre l'ordonnance du juge-commissaire en date du 16 septembre 2024 disant que la créance n° 5 de l'URSSAF de Languedoc-[Localité 13] sera portée sur l'état des créances pour la somme de 62 710 € à titre privilégié.
Il importe peu que la notification de l'ordonnance faite à la société Driss Habitat par lettre recommandée du 26 septembre 2024 mentionne que la décision est susceptible de faire l'objet d'un appel devant la cour d'appel de Montpellier si la créance déclarée est supérieure à 5000 €, une telle mention n'ayant pas pour effet d'ouvrir une voie de recours inexistante.
PAR CES MOTIFS :
La cour,
Statuant publiquement et contradictoirement,
Rejette la demande de réouverture des débats,
Déclare irrecevable l'appel formé par la société Driss Habitat contre l'ordonnance rendue le 16 septembre 2024 par le juge-commissaire,
Fixe les dépens d'appel au passif de la société Driss Habitat,
Dit n'y avoir lieu de faire application de l'article 700 du code de procédure civile au profit de l'URSSAF de Languedoc-[Localité 13].
La greffière La présidente
Grosse + copie
délivrées le
à
JONCTION DES RG 24/0[Immatriculation 7]/00416
COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
Chambre commerciale
ARRET DU 24 JUIN 2025
Numéro d'inscription au répertoire général :
N° RG 24/04990 - N° Portalis DBVK-V-B7I-QM2F
Décision déférée à la Cour :
Ordonnance du 16 SEPTEMBRE 2024
JUGE COMMISSAIRE DE [Localité 9]
N° RG 2024006764
DOSSIER RG 24.4990
APPELANTES :
Madame [C] [U] [B] es-qualité de gérante de la société DRISS HABITAT
née le [Date naissance 2] 1982 à [Localité 10]
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représentée par Me Alexandre SALVIGNOL de la SARL SALVIGNOL ET ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER substitué par Me Andie FULACHIER, avocat au barreau de MONTPELLIER
DOSSIER RG 25-00416
APPELANTES :
S.A.S. DRISS HABITAT prise en la personne de sa gérante en exercice Mme [C] [M] domiciliée es qualité au siège social sis
[Adresse 8]
[Localité 4]
Représentée par Me Alexandre SALVIGNOL de la SARL SALVIGNOL ET ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER substitué par Me Andie FULACHIER, avocat au barreau de MONTPELLIER
INTIMEES :
S.E.L.A.R.L. [V] [T] [H] prise en la personne de Me [L] [H] pris en sa q
ualité de liquidateur judiciaire de la société DRISS HABITAT
[Adresse 12]
[Localité 5]
Représentée par Me Emily APOLLIS de la SELARL SAFRAN AVOCATS, avocat au barreau de MONTPELLIER
Organisme URSSAF DE LANGUEDOC [Localité 13] prise en la personne de son représentant légal domicilié en
cette qualité au siège situé
[Adresse 11]
[Localité 6]
Représentée par Me François BORIE de la SCP DORIA AVOCATS, avocat au barreau de MONTPELLIER substitué par Me CLERMONT Jean-Denis, avocat au barreau de MONTPELLIER
Ordonnance de clôture du 15 mai 2025
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 906-5 et 914-5 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 22 mai 2025,en audience publique, devant M. Jean-Luc PROUZAT, Magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles, chargé du rapport, les avocats ne s'y étant pas opposés.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Mme Danielle DEMONT, présidente de chambre
M. Thibault GRAFFIN, conseiller
Monsieur Jean-Luc PROUZAT, conseiller désigné par ordonnance pour assurer la Présidence
Greffier lors des débats : Mme Gaëlle DELAGE
Ministère public :
L'affaire a été communiquée au ministère public.
ARRET :
- Contradictoire ;
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;
- signé par Mme Danielle DEMONT, présidente de chambre, et par Mme Gaëlle DELAGE, greffière.
*
* *
FAITS et PROCEDURE - PRETENTIONS et MOYENS DES PARTIES :
La SASU Driss Habitat ayant notamment pour activité la maçonnerie générale, les travaux de charpente-couverture et de second 'uvre, et dont Mme [C] [M] est la présidente, a fait l'objet d'une procédure de redressement judiciaire ouverte par jugement du tribunal de commerce de Béziers en date du 11 octobre 2023 publié le 18 octobre 2023 au Bodacc.
L'URSSAF de Languedoc-[Localité 13] a déclaré, le 8 novembre 2023, une créance de 122 961,78 € à la procédure collective pour les sommes de :
' 24 642,78 euros à titre chirographaire et définitif correspondant aux cotisations impayées de décembre 2019 à novembre 2022,
' 98 319 € à titre privilégié, dont 53 319 € à titre définitif correspondant aux cotisations impayées de décembre 2022 à septembre 2023 et 45 000 € à titre provisionnel, soit 15 000 € au titre des cotisations à échoir pendant la période d'observation du redressement judiciaire et 30 000 € au titre de diverses régularisations.
La procédure de redressement judiciaire de la société Driss Habitat a été convertie en liquidation judiciaire par un jugement du tribunal de commerce de Béziers du 17 janvier 2024, la Selarl [L] [H] étant désignée en qualité de liquidateur.
L'URSSAF de Languedoc-[Localité 13] a alors ramené sa créance à la somme de 60 710 € à titre définitif et privilégié correspondant aux cotisations impayées sur la période de décembre 2019 à octobre 2023 et, par lettre du 17 juillet 2024, la Selarl [L] [H] ès qualités a demandé au greffier du tribunal de commerce de modifier en en ce sens l'état des créances.
Par ordonnance du 16 septembre 2024, le juge-commissaire en charge de la procédure collective a notamment dit que la créance n° 5 (de l'URSSAF de Languedoc-[Localité 13]) sera portée sur l'état des créances pour la somme de 60 710 € à titre privilégié.
Mme [M] en sa qualité de « gérante de la société Driss Habitat », par déclaration du 7 octobre 2024, relevé appel de cette ordonnance, qui lui avait été notifiée le 26 septembre 2024 ; cette procédure a été enrôlée sous le n° 24/4990.
Par une nouvelle déclaration du 17 janvier 2025, la société Driss Habitat prise en la personne de « sa gérante », Mme [M], a relevé appel de la même ordonnance, la procédure étant alors enrôlée sous le n° 25/416.
Les deux instances ont été instruites conformément aux dispositions de l'article 906 du code de procédure civile.
La présidente de la chambre, qui avait été entre-temps saisie par l'URSSAF de Languedoc-[Localité 13] d'une demande d'irrecevabilité de l'appel formé par Mme [M] à titre personnel pour défaut de qualité à agir, par une ordonnance du 5 mars 2025 qui n'a pas été déférée à la cour, a rejeté la fin de non-recevoir ainsi soulevée, et ordonné la jonction de la procédure enregistrée sous le n° RG 24/04990 avec celle enregistrée sous le n° RG 25/00416.
La société Driss Habitat, par conclusions du 28 février 2025, demande à la cour de:
Vu les articles R. 622-24 et R. 624-7 du code de commerce,
Vu l'article L. 131-1 du code des procédures civiles d'exécution,
Vu l'article 700 du code de procédure civile,
- accueillir le recours présenté,
- réformer l'ordonnance du 5 septembre 2024 (') en ce qu'elle a dit que la créance n° 5 sera portée sur l'état des créances comme suit : créance n° 5 : 60 710 € à titre privilégié,
- ordonner à la Selarl [L] [H] (') et l'URSSAF de Languedoc-[Localité 13] de communiquer et ce sous astreintes de 150 € par jour de retard le décompte actualisé de l'URSSAF et de communiquer un extrait K bis de la société Driss Habitat à jour de la mention de la formalité,
- juger que la juridiction de céans sera compétente pour liquider l'éventuelle astreinte,
Statuant à nouveau,
- annuler la créance de l'URSSAF portant le n° 5 portée sur l'état des créances tenu par M. [H] pris en sa qualité de liquidateur judiciaire,
En tout état de cause,
- condamner solidairement l'URSSAF et la Selarl [L] [H], prise en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société Driss Habitat, à payer une somme de 1200 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens d'appel.
Au soutien de son appel, elle fait valoir pour l'essentiel que :
- aucun décompte n'est produit du montant de la créance déclarée à titre privilégié et définitif à hauteur de 60 710 €,
- le courrier du 16 juillet 2024 de l'URSSAF adressé au liquidateur aux fins de déclaration de cette créance de 60 710 € est hors délai puisqu'il intervient six mois après la publication au Bodacc du jugement de liquidation judiciaire (le 17 janvier 2024) en méconnaissance des dispositions de l'article R. 622-24, alinéa 1er, du code de commerce,
- le registre du commerce et des sociétés mentionne que l'activité artisanale de la société a été enregistrée sous condition suspensive de l'immatriculation au répertoire des métiers,
- le liquidateur n'a pas vérifié que cette formalité avait été accomplie en sorte que Mme [M] ne peut être considérée comme présidente de la société et donc, responsable.
L'URSSAF de Languedoc-[Localité 13], par dernières conclusions du 21 mars 2025, sollicite de voir confirmer l'ordonnance rendue le 5 septembre 2024 par le juge-commissaire, et condamner Mme [M] à payer la somme de 2 000 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Il soutient en substance que :
- la société Driss Habitat ne justifie pas avoir porté à la connaissance du mandataire judiciaire ou du juge-commissaire les contestations dont elle fait désormais état,
- sa créance a été régulièrement déclarée dans le délai de deux mois suivant la publication au Bodacc du jugement d'ouverture et elle avait la possibilité, conformément aux dispositions de l'article L. 622 -24 du code de commerce, de convertir sa créance initialement déclarée à titre provisionnel en créance définitive dans le délai d'un an à compter de la publication au Bodacc de la procédure collective,
- les décomptes afférents aux déclarations de créance ont été annexés à celles-ci et la demande de production sous astreintes de l'extrait K bis la société est sans rapport avec l'ordonnance d'admission de la créance dont la cour se trouve saisie.
La Selarl [L] [H] prise en sa qualité de liquidateur à la liquidation judiciaire de la société Driss Habitat, par dernières conclusions du 24 mars 2025, demande également à la cour de confirmer l'ordonnance dont appel, par des moyens sensiblement identiques à ceux développés par l'organisme de sécurité sociale.
Le ministère public auquel le dossier de l'affaire a été communiqué s'en rapporte à l'appréciation de la cour.
La procédure a été clôturée par ordonnance du 15 mai 2025.
Lors des débats à l'audience, la cour a relevé d'office l'irrecevabilité de l'appel au motif que l'ordonnance rendue le 16 septembre 2024 par le juge-commissaire ne constituait pas une décision d'admission de la créance de l'URSSAF dont le recours était susceptible d'être porté directement devant la cour d'appel en application de l'article R. 624-7 du code de commerce ; les parties ont donc été invitées à fournir leurs observations sur le moyen d'irrecevabilité ainsi soulevé par une note en délibéré à déposer sous huitaine.
Par note reçue le 27 mai 2025 par le RPVA, la société Driss Habitat, après avoir cité in extenso les dispositions de l'article R. 624-3 du code de commerce, a sollicité une réouverture des débats, soulignant en particulier que sa dirigeante, Mme [M], n'avait pas été en mesure de présenter ses observations (sur la contestation des créances) ou de prendre connaissance des observations du mandataire judiciaire.
Les intimés n'ont pas, pour leur part, déposé de note dans le délai prescrit.
MOTIFS de la DECISION :
Les parties, invitées à déposer une note en délibéré, ont été mises en mesure de s'expliquer sur le moyen d'irrecevabilité relevé d'office par la cour, sans qu'il y ait lieu d'ordonner une réouverture des débats.
Dans le droit des procédures collectives, la nature de l'ordonnance rendue par le juge-commissaire détermine la voie de recours qui lui est applicable.
En l'espèce, l'ordonnance rendue le 16 septembre 2024 par le juge-commissaire, qui a notamment dit que la créance n° 5 de l'URSSAF de Languedoc-[Localité 13] sera portée sur l'état des créances pour la somme de 62 710 € à titre privilégié, ne vise qu'à compléter la liste des créances déposée au greffe du tribunal de commerce une fois définitivement chiffrée la créance de l'organisme de sécurité sociale, qui initialement avait été déclarée à titre provisoire, du moins en partie, conformément à l'article L. 622-24, alinéa 3, du code de commerce.
Il ne s'agit donc pas d'une décision d'admission de la créance de l'URSSAF au sens des dispositions des articles L. 624-2, L. 624-3 et R. 624-3 du même code, décision qui n'aurait pu être prise par le juge-commissaire qu'à l'issue de la vérification des créances privilégiées, après que le mandataire judiciaire eut recueilli les observations du débiteur.
Il doit d'ailleurs être rappelé que l'URSSAF, après avoir déclaré, le 8 novembre 2023, une créance de 122 961,78 €, dont 45 000 € à titre provisionnel, a ensuite ramené sa créance à la somme de 62 710 € à titre définitif et privilégié et que par lettre du 17 juillet 2024, la Selarl [L] [H] ès qualités, par référence aux dispositions du dernier alinéa de l'article R. 624-2 du code de commerce, a demandé au greffier du tribunal de commerce de compléter la liste des créances déposée entre-temps au greffe.
Le recours ouvert contre les ordonnances du juge-commissaire doit être porté devant le tribunal conformément au principe posé à l'article R. 621-21, alinéa 4, du code de commerce et ce n'est qu'exceptionnellement que le recours contre certaines ordonnances du juge-commissaire est porté devant la cour d'appel ; tel est le cas des ordonnances statuant sur l'admission ou le rejet des créances déclarées, ou encore celles habilitant le liquidateur à réaliser les actifs du débiteur ; les recours contre de telles ordonnances sont en effet portés devant la cour d'appel, à titre d'exception, du fait que des textes spéciaux le prévoient, comme l'article R. 624-7 pour l'admission des créances, l'article R. 642-37-1 pour la réalisation des actifs immobiliers et l'article R. 642-37-3 pour celle des actifs mobiliers.
Or, aucun texte ne prévoit que l'ordonnance du juge-commissaire, qui se borne à compléter la liste des créances déposée au greffe par l'inscription des créances définitivement fixées, puisse être directement frappée d'appel devant la cour ; doit dès lors être déclaré irrecevable l'appel formé en l'espèce contre l'ordonnance du juge-commissaire en date du 16 septembre 2024 disant que la créance n° 5 de l'URSSAF de Languedoc-[Localité 13] sera portée sur l'état des créances pour la somme de 62 710 € à titre privilégié.
Il importe peu que la notification de l'ordonnance faite à la société Driss Habitat par lettre recommandée du 26 septembre 2024 mentionne que la décision est susceptible de faire l'objet d'un appel devant la cour d'appel de Montpellier si la créance déclarée est supérieure à 5000 €, une telle mention n'ayant pas pour effet d'ouvrir une voie de recours inexistante.
PAR CES MOTIFS :
La cour,
Statuant publiquement et contradictoirement,
Rejette la demande de réouverture des débats,
Déclare irrecevable l'appel formé par la société Driss Habitat contre l'ordonnance rendue le 16 septembre 2024 par le juge-commissaire,
Fixe les dépens d'appel au passif de la société Driss Habitat,
Dit n'y avoir lieu de faire application de l'article 700 du code de procédure civile au profit de l'URSSAF de Languedoc-[Localité 13].
La greffière La présidente