CA Orléans, ch. civ., 24 juin 2025, n° 23/00816
ORLÉANS
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
CNP Assurances (SA)
Défendeur :
X
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Collomp
Vice-président :
M. Sousa
Conseiller :
Mme Grua
Avocats :
Me Charron, Me Motto, SARL Arcole, SELARL Egeria-Saint-Cricq & Associes
FAITS ET PROCÉDURE
Pour garantir un contrat de prêt immobilier de 70 000 euros, Mme [Y] a adhéré, le 26 février 2014, à un contrat d'assurance de groupe souscrit par la [Adresse 6] auprès de la société CNP assurances afin que les échéances du prêt soient prises en charge en totalité en cas de décès, de perte totale et irréversible d'autonomie, d'invalidité temporaire et définitive, d'invalidité, d'incapacité temporaire totale ou d'invalidité permanente totale.
En arrêt de travail depuis le 9 janvier 2015 du fait d'une maladie dégénérative des yeux, Mme [Y] a demandé à la société CNP assurances la prise en charge des échéances de son prêt immobilier au titre de la garantie en cas d'incapacité temporaire totale. L'assureur, après application d'un délai de carence de 90 jours, a pris en charge les mensualités du prêt à compter du 8 janvier 2016.
La société CNP assurances a effectué la compensation d'un trop perçu d'un montant total de 4 257,66 euros au titre des échéances sur la période du 5 août 2017 au 5 juin 2018 sur les sommes dues à Mme [Y] au titre des échéances courant à compter du 3 octobre 2018.
Mme [Y] a sollicité la désignation d'un expert judiciaire qui a été désigné en référé le 18 septembre 2020 afin de déterminer si elle était, du 5 août 2017 au 5 juin 2018, dans l'impossibilité absolue médicalement constatée d'exercer une activité professionnelle quelconque à temps plein ou à temps partiel correspondant à la catégorie 2 de la sécurité sociale.
Par acte d'huissier de justice en date du 27 avril 2022, Mme [Y] a fait assigner la société CNP assurances devant le tribunal judiciaire de Tours aux fins de voir restituer la somme prétendument indue que l'assureur a compensée, une somme au titre des 90 jours de carence qui n'auraient pas dû être appliqués, et l'indemnisation des préjudices subis.
Par jugement en date du 19 janvier 2023, assorti de l'exécution provisoire, le tribunal judiciaire de Tours a :
- condamné la SA CNP assurances à payer à Mme [Y] la somme de 4 256,17 € en restitution de l'indu ;
- condamné la SA CNP assurances à payer à Mme [Y] la somme de 1 243,86 € sur le fondement de sa responsabilité contractuelle ;
- débouté Mme [Y] de sa demande en indemnisation de son préjudice moral ;
- débouté la SA CNP assurances de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamné la SA CNP assurances à payer à Mme [Y] la somme de 87,90 € au titre du remboursement des frais de transport en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamné la SA CNP assurances aux dépens de l'instance ;
- débouté la SA CNP assurances de sa demande aux fins de voir écarter l'exécution provisoire ;
- rejeté le surplus des demandes des parties.
Par déclaration en date du 22 mars 2023, la société CNP assurances a interjeté appel de tous les chefs jugement sauf en ce qu'il a débouté Mme [Y] de sa demande en indemnisation de son préjudice moral.
Suivant conclusions notifiées par voie électronique le 29 janvier 2025, la société CNP assurances demande à la cour de :
- infirmer le jugement en ce qu'il a : condamné la SA CNP assurances à payer à Mme [Y] la somme de 4 256,17 € en restitution de l'indu ; condamné la SA CNP assurances à payer à Mme [Y] la somme de 1 243,86 € sur le fondement de sa responsabilité contractuelle ; débouté la SA CNP assurances de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ; condamné la SA CNP assurances à payer à Mme [Y] la somme de 87,90 € au titre du remboursement des frais de transport en application de l'article 700 du code de procédure civile ; condamné la SA CNP assurances aux dépens de l'instance ;
Statuant à nouveau,
A titre principal :
- débouter Mme [Y] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;
- condamner Mme [Y] à lui verser, à titre de remboursement, la somme de 5 587,93 euros correspondant aux sommes versées au titre de l'exécution provisoire du jugement rendu le 19 janvier 2023 par le tribunal judiciaire de Tours se décomposant comme suit : 4 256,17 € en restitution de l'indu ; 1 243,86 € sur le fondement de la responsabilité contractuelle ; 87,90 € au titre du remboursement des frais de transport en application de l'article 700 ;
Y ajoutant :
- condamner Mme [Y] à lui rembourser l'ensemble des sommes versées indûment ;
- condamner Mme [Y] à lui verser la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile au titre du jugement de première instance et la somme de 2 000 euros en cause d'appel en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel ;
A titre subsidiaire, si par extraordinaire la cour s'estimait insuffisamment informée,
- ordonner une mesure d'expertise judiciaire médicale d'expertise complémentaire, aux frais avancés de Mme [Y], dans le cadre de laquelle le médecin expert aurait pour mission de :
- se faire communiquer l'entier dossier de Mme [Y],
- se faire communiquer tant par les médecins que par les caisses de sécurité sociale et par les établissements hospitaliers concernés tous les documents médicaux qu'il jugerait utiles aux opérations d'expertise,
- déterminer la nature de la ou les pathologies à l'origine de l'invalidité de l'assurée et leur évolution,
- déterminer la date d'apparition de tous ses antécédents,
- retracer ses antécédents médicaux et traitements suivis par Mme [Y],
- dire si elle se trouve, à la suite d'un accident ou d'une maladie, dans l'incapacité, reconnue médicalement, d'exercer une activité professionnelle quelconque, même à temps partiel ; si oui depuis quelle date,
- rédiger un pré-rapport afin de permettre aux parties de transmettre les observations ou réclamations éventuelles, en application de l'article 276 du code de procédure civile.
Suivant conclusions notifiées par voie électronique le 19 avril 2024, Mme [Y] demande à la cour de :
- confirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Tours en date du 19 janvier 2023 ;
Y ajoutant,
- condamner la SA CNP assurances à lui payer la somme de 1 000 € au titre de son préjudice moral ;
- condamner la SA CNP assurances aux entiers dépens d'appel, de première instance et du référé ;
- débouter la SA CNP assurances de ses plus amples demandes ou contraires.
Pour un plus ample exposé des faits et des moyens des parties, il convient de se reporter à leurs dernières conclusions.
MOTIFS
I- Sur les sommes dues au titre du contrat d'assurance
A- Sur la nullité du contrat d'assurance
Moyens des parties
L'assureur soutient que la prise en charge des échéances a été acceptée à tort pour les périodes du 8 janvier 2016 au 5 mars 2017 puis du 4 avril 2017 au 5 février 2018 et enfin du 28 mars 2018 jusqu'à ce jour, compte-tenu du caractère intentionnel de l'omission de graves antécédents médicaux par Mme [Y] ; qu'en février 2014, lors des formalités d'adhésion au contrat d'assurance de groupe n°9882R pour la couverture de son prêt immobilier, Mme [Y] a répondu de manière fausse aux questions posées dans le questionnaire santé qui lui était soumis, en particulier en répondant « non » aux questions 6 à 11 du questionnaire de santé portant sur ses antécédents médicaux ; que dans l'attestation médicale d'incapacité-invalidité de février 2016, Mme [Y] a indiqué avoir été hospitalisée le 24 août 2009 pour cause d'abdomonoplastie et avoir été placée en arrêt de travail pendant 83 jours à compter de cette même date ; que la fausse déclaration à la question n° 6 est corroborée par l'attestation d'arrêts de travail délivrée par la CPAM de [Localité 10], qui atteste que Mme [Y] a été placée en arrêt de travail pour maladie du 24 août 2009 au 15 novembre 2009 ; qu'avec la plus grande mauvaise foi, Mme [Y] prétend que cette opération est assimilée à la grossesse, mais il n'en est rien, dans la mesure où le délai minimum recommandé avant toute abdominoplastie est d'un an après accouchement ; que son abdominoplastie a eu lieu en 2009 sachant que dans le rapport d'expertise judiciaire, elle déclare à l'expert avoir deux enfants âgés de 30 ans et de 27 ans ; qu'en outre, l'expert judiciaire relève que l'assurée est myope depuis l'âge de 7 ans et a une acuité visuelle de l''il gauche très faible ; que le docteur [R] [S], dans son certificat médical établi le 26 février 2016, indique que l'acuité visuelle de l'oeil gauche de Mme [Y] est inférieure à 1/20e ; que sans le questionnaire de santé qu'elle a rempli en février 2014, Mme [Y] n'a pas répondu à la question n° 1 dudit questionnaire portant sur son acuité visuelle, et s'est également abstenue de déclarer sa maladie myopique ; que la matérialité des fausses déclarations est par conséquent établie ; que les fausses déclarations de Mme [Y] doivent être considérées comme intentionnelles dans la mesure où en signant le questionnaire de santé, elle a reconnu avoir été avertie des conséquences d'une fausse déclaration ; qu'en omettant purement et simplement de déclarer ses antécédents médicaux, Mme [Y] a eu manifestement l'intention de dissimuler son état de santé ; que dans ses conclusions en première instance, Mme [Y] a reconnu expressément avoir fait une fausse déclaration, et il est de jurisprudence constante que le fait qu'après sinistre l'assuré reconnaisse qu'il avait inexactement déclaré le risque lors de la souscription ne saurait avoir la moindre influence sur l'appréciation de sa mauvaise foi ; que la mauvaise foi de Mme [Y], qui exerçait les fonctions de secrétaire comptable, découle de façon évidente des réponses négatives à des questions simples, claires et sans ambiguïté relatives à des antécédents dont elle ne pouvait ignorer ni l'existence ni le caractère sérieux ; que les fausses déclarations de Mme [Y] ont diminué l'opinion que l'assureur pouvait avoir du risque qu'il allait garantir ; que c'est à l'assureur et non au candidat à l'assurance qu'il appartient de juger si une circonstance a une influence sur l'appréciation du risque, d'autant plus que l'assurance souscrite couvre l'incapacité temporaire totale de travail ; qu'il est donc totalement vain de s'interroger sur un quelconque lien entre une abdominoplastie et une maladie des yeux ; qu'il est de jurisprudence constante en application de l'article L.113-8 du code des assurances que la sanction de la nullité est encourue même en l'absence d'incidence de la fausse déclaration sur le sinistre ; que l'indemnisation partielle de l'assurée au titre de la garantie ITT ne peut s'analyser comme une renonciation au droit de se prévaloir de la nullité du contrat ; qu'il n'existait pas pour elle d'obligation de procéder au rapprochement des deux déclarations reçues à plus de deux années d'intervalle, soit le questionnaire de santé de 2014 et l'attestation médicale d'incapacité-invalidité établie en 2016 ; qu'elle n'avait en outre pas la possibilité de procéder au rapprochement des deux déclarations reçues à plus de deux années d'intervalle, car son service de gestion n'a pas accès aux réponses du questionnaire médical, adressées à son service médical ; que lors du contrôle médical réalisé en mai 2017 par médecin contrôleur mandaté par elle, Mme [Y] s'est bien gardée de déclarer ses antécédents médicaux ; qu'elle a découvert et opposé pour la première fois la nullité du contrat d'assurance dans ses conclusions de première instance notifiées en septembre 2022 ; que la nullité d'un contrat peut toujours être invoquée par voie d'exception par le défendeur à la demande d'exécution par l'autre partie même lorsque le délai de prescription est acquis ; que la prescription biennale établie par l'article L.114-1 du code des assurances n'atteint que l'action dérivant du contrat d'assurance et ne peut être étendue au moyen de défense opposé à une telle action ; qu'elle est en conséquence bien fondée à opposer l'exception de nullité et de voir infirmer la décision de première instance ; que la cour prononcera la nullité de l'adhésion de Mme [Y] au contrat d'assurance de groupe n° 9882R ; que les faits établis en défense sont non seulement qualifiables de fausse déclaration intentionnelles au sens de l'article L.113-8 du code des assurances mais sont également dolosifs au sens de l'ancien article 1116 du code civil ; que la prescription prévue à l'article L.114-1 du code des assurances ne s'applique pas aux demandes d'annulation pour dol du contrat d'assurance et de ses avenants ; que l'action en répétition de l'indu intentée par un assureur contre son assuré se prescrit selon le délai de droit commun ; qu'en effet, sa demande tendant à obtenir la restitution de prestations indûment versées, en application de l'article L.113-8 du code des assurances, ne tend pas seulement à opposer un moyen de défense à la demande en paiement de Mme [Y] mais s'analyse en une demande reconventionnelle en répétition de prestations indues ; que selon l'article 2241 du code civil, la demande en justice, même en référé, interrompt le délai de prescription ainsi que le délai de forclusion ; que la cour déboutera donc Mme [Y] de l'ensemble de ses demandes et la condamnera à lui rembourser l'ensemble des sommes versées indûment.
Mme [Y] réplique que le positionnement récent de la société CNP assurances ne manque pas de surprendre puisque, conformément aux termes du contrat d'assurance souscrit, elle a pris en charge les échéances mensuelles du prêt Caisse d'épargne du 9 janvier 2015 au 5 août 2017 et du 5 juin 2018 jusqu'à ce jour ; qu'elle a rempli en toute honnêteté et toute bonne foi le questionnaire de santé en date du 26 février 2014 ; que ses premiers troubles visuels sont apparus le 13 mai 2014 ; qu'elle a déclaré postérieurement avoir été hospitalisée le 24 août 2009 pour une abdominoplastie suite à une césarienne mal faite, avoir été opérée de ce fait et avoir eu des arrêts de travail courant 2009 et 2010 ; que la case « ou » est bien cochée de sorte que l'on ne perçoit pas bien l'intérêt des allégations de CNP assurances ; qu'en tout état de cause, sa maladie ophtalmique du 13 mai 2014 n'a strictement aucun lien avec l'abdominoplastie suite à une césarienne du 24 août 2009 ; qu'il s'agissait des suites d'une grossesse qui est un des cas d'exc1usion comme motif autre à déclarer ; qu'il s'agit tout au plus, d'un simple oubli, ou d'une erreur, sans aucune conséquence possible sur les termes du contrat de nature à modifier l'opinion des risques à assurer ; que lors de la souscription, elle n'avait pas noté son abdominoplastie - suite à la césarienne du 24 août 2009 - puisque la question portait sur une opération précédente pour un motif autre que la grossesse ; que par la suite, elle a cru bon de le mentionner dans les dossiers à remplir et à adresser tous les 6 mois à l'assurance ; que le jugement devra donc être confirmé.
Réponse de la cour
L'article L.113-8 du code des assurances dispose : « Indépendamment des causes ordinaires de nullité, et sous réserve des dispositions de l'article L.132-26, le contrat d'assurance est nul en cas de réticence ou de fausse déclaration intentionnelle de la part de l'assuré, quand cette réticence ou cette fausse déclaration change l'objet du risque ou en diminue l'opinion pour l'assureur, alors même que le risque omis ou dénaturé par l'assuré a été sans influence sur le sinistre ».
L'article L.113-2 du code des assurances, dans sa rédaction alors applicable, dispose que « L'assuré est obligé : [']
2° De répondre exactement aux questions posées par l'assureur, notamment dans le formulaire de déclaration du risque par lequel l'assureur l'interroge lors de la conclusion du contrat, sur les circonstances qui sont de nature à faire apprécier par l'assureur les risques qu'il prend en charge ».
Il appartient à l'assureur qui invoque la nullité du contrat de rapporter la preuve du défaut ou de la fausseté de la déclaration du risque. Par ailleurs, la bonne foi étant présumée, il incombe à l'assureur de démontrer la mauvaise foi de l'assuré lors de la souscription du contrat.
Si, en application de l'article L.113-2, 2° du code des assurances, l'assuré est obligé de répondre exactement aux questions précises posées par l'assureur, notamment dans le formulaire de déclaration du risque par lequel celui-ci l'interroge, lors de la conclusion du contrat, sur les circonstances qui sont de nature à lui faire apprécier les risques qu'il prend en charge, l'assureur ne peut se prévaloir de la réticence ou de la fausse déclaration intentionnelle de l'assuré que si celles-ci procèdent des réponses qu'il a apportées auxdites questions, ainsi que l'a d'ailleurs jugé la Cour de cassation (Ch. mixte, 7 février 2014, n° 12-85.107 ; Civ. 2e, 11 juin 2015, n° 14-14.336 ; 2e Civ. 4 octobre 2018, n° 17-24.643).
En l'espèce, la société CNP assurances a fait remplir à Mme [Y] un questionnaire de santé, lors de l'adhésion au contrat d'assurance groupe. Le 26 février 2014, Mme [Y] a répondu par la négative à l'ensemble des questions, en particulier aux questions n° 6 à 11 suivantes :
6- Avez-vous durant les cinq dernières années, interrompu votre travail pour raison de santé sur une période de 30 jours consécutifs '
7- Avez-vous été hospitalisé au cours de votre existence pour un motif autre que l'ablation des amygdales, végétations, dents de sagesse, appendicite, grossesse '
8- Avez-vous subi au cours de votre existence : une intervention chirurgicale pour un motif autre que l'ablation des amygdales, végétations, dents de sagesse, appendicite, grossesse '
9- Etes-vous atteint ou avez-vous été atteint d'une maladie chronique, d'une in'rmité, d'affections récidivantes ou de séquelles (accident ou maladie) '
10- Etes-vous : sous surveillance médicale ' En cours de traitement médical '
11- Hors médecine préventive, médecine du travail ou grossesse, votre état de santé actuel nécessite-t-il dans les 12 prochains mois de :
- réaliser des examens de laboratoire ou d'autres examens '
- être hospitalisé '
- traité '
- opéré '
Le 22 février 2016, Mme [Y] a rempli une demande de prise en charge initiale au titre des garanties incapacité-invalidité du contrat d'assurance, dans laquelle elle a indiqué avoir été hospitalisée le 24 août 2009 pour une abdominoplastie « suite à césarienne mal faite » et opérée pour le même motif le lendemain. Elle précisait également avoir eu les arrêts de travail suivants pour raison de santé :
- 7 avril 2009 : 4 jours pour maladie
- 24 août 2009 : 83 jours pour abdominoplastie
- 18 février 2010 : 15 jours pour maladie
Il est donc établi que Mme [Y] n'a pas déclaré à l'assureur, lors de son adhésion, l'opération pour abdominoplastie et l'arrêt de travail de plus de 30 jours consécutifs afférent à cette opération.
Toutefois, en ce qui concerne l'arrêt de travail, le questionnaire de santé visait une interruption pour « raison de santé », alors que l'abominoplastie est une opération de chirurgie esthétique visant à réparer la peau lésée de l'abdomen, qui n'est pas causée par une maladie. Mme [Y] pouvait donc légitimement penser qu'elle n'était pas tenue de déclarer, lors de l'adhésion, cet arrêt de travail de 83 jours non causé par un problème de santé. La mauvaise foi de Mme [Y] n'est donc pas établie au titre du défaut de mention de cet arrêt de travail.
En ce qui concerne le défaut de déclaration de l'abdominoplastie, Mme [Y] explique avoir pensé qu'elle était en lien avec ses grossesses précédentes. Il résulte effectivement du questionnaire de santé rempli en 2016 qu'elle établissait un lien entre cette intervention et une grossesse précédente en indiquant qu'elle avait été réalisée suite à une césarienne « mal faite ». Il ne peut être considéré que Mme [Y] était de mauvaise foi lors de l'adhésion en 2014 alors qu'elle n'a pas dissimulé cette intervention chirurgicale lors de la demande de prise en charge de l'incapacité de travail en 2016, liée à son affection des yeux.
En outre, il n'apparaît pas que l'omission de déclarer l'abdominoplastie en 2009 aurait changé l'objet du risque ou diminué l'opinion du risque pour l'assureur lors de la conclusion du contrat d'assurance en 2014, dès lors qu'aucun risque afférent à cette intervention de chirurgie esthétique ne s'est réalisé postérieurement à celle-ci et qu'il s'était déjà passé presque 5 ans depuis l'opération.
En conséquence, l'assureur n'est pas fondé à se prévaloir de la nullité du contrat sur le fondement de l'article L.113-8 du code des assurances, au titre des omissions de déclaration portant sur l'abdominoplastie et l'arrêt de travail afférent.
L'assureur se prévaut également du fait que l'assurée n'aurait pas déclaré sa « maladie myopique » lors de la souscription du contrat.
Le rapport d'expertise judiciaire de M. [B] mentionne l'histoire clinique suivante :
« Madame [D] [Y] est myope depuis l'âge de 7 ans et semble présenter depuis de nombreuses années une acuité visuelle gauche très faible sans qu'il soit possible d'en préciser le degré.
L'acuité visuelle de Madame [D] [Y] s'est lentement aggravée avec le temps, surtout au niveau de l''il droit, puis s'est franchement dégradée en 2014. Son ophtalmologiste a diagnostiqué la présence d'un trou maculaire droit, lésion dégénérative aggravée par la myopie. Le Dr [K] l'a opéré de ce trou maculaire droit avec pelage membranaire et injection de gaz intravitréen le 27 janvier 2015. Il est réintervenu le 28 janvier 2016 pour procéder à l'ablation d'une cataracte induite.
Depuis cette intervention, l'acuité visuelle droite de Madame [D] [Y] est chiffrée à 3/10 hormis durant une courte période du fait de la survenue d'une cataracte secondaire traitée par laser Yag en novembre 2018 ».
La myopie n'étant pas une maladie mais un trouble de la vision, Mme [Y] n'était pas tenue de la déclarer à l'assureur dans le questionnaire de santé, en particulier au titre de la question n° 9 visant une maladie chronique, une in'rmité, des affections récidivantes ou des séquelles. La correction de la myopie ne constitue en outre pas un traitement médical au sens des questions n° 10 et 11. Au demeurant, il convient de souligner qu'au regard de la forte prévalence de la myopie dans la population, le défaut de déclaration de celle-ci par Mme [Y] n'était pas de nature à changer l'objet du risque ou à diminuer l'opinion du risque pour l'assureur lors de la conclusion du contrat d'assurance.
Enfin, l'assureur évoque une question n° 2 sur l'acuité visuelle du questionnaire de santé de 2014 à laquelle Mme [Y] n'a pas répondu. Cette question est ainsi rédigée :
« Si votre acuité visuelle avant correction est inférieure à 2 dixièmes (sinon passez à la question 3)
Indiquez la : 'il droit /10 'il gauche /10
- et dans ce cas, indiquez votre correction en dioptries »
Aucun élément ne permet d'établir que Mme [Y] présentait une acuité visuelle inférieure à 2 dixièmes à l'un de ses yeux lors de la conclusion du contrat d'assurance. L'expert judiciaire a lui-même indiqué que si Mme [Y] semblait présenter depuis de nombreuses années une acuité visuelle gauche très faible, il n'était pas possible d'en préciser le degré. Ainsi, en l'absence de toute certitude sur le niveau de l'acuité visuelle de Mme [Y], celle-ci était fondée à ne pas répondre à la question n° 2.
Par ailleurs, aucun élément ne permet d'établir que Mme [Y] se serait vue diagnostiquée une pathologie de l'oeil gauche avant la souscription du contrat d'assurance, ayant au contraire expliqué à l'expert mandaté par l'assureur que la faible acuité visuelle de l''il gauche était attribuée à une forte myopie. Il ne peut donc être considéré que Mme [Y] avait connaissance d'une maladie chronique dégénérative atteignant l''il gauche lors de la souscription du contrat d'assurance, avant que celle-ci n'atteigne l''il droit.
L'assureur est donc également infondé à soutenir que le contrat d'assurance est nul, en application de l'article L.113-8 du code des assurances, au titre de la myopie de Mme [Y].
L'article 1116 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, dispose : « Le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les manoeuvres pratiquées par l'une des parties sont telles, qu'il est évident que, sans ces manoeuvres, l'autre partie n'aurait pas contracté. Il ne se présume pas et doit être prouvé ».
Ainsi qu'il a été précédemment exposé, l'assureur n'établit pas que Mme [Y] n'aurait pas déclaré l'abdominoplastie avec mauvaise foi, dans l'intention de déterminer l'assureur à lui accorder le bénéficie de la police d'assurance. En outre, la mention de cette intervention chirurgicale cinq ans avant la souscription du contrat d'assurance n'était pas déterminante du consentement de l'assureur.
La société CNP assurances ne démontrant pas l'existence d'un dol commis par Mme [Y], son moyen de défense relatif à la nullité du contrat pour dol est également infondé.
B- Sur les conditions de garantie
Moyens des parties
L'assureur soutient qu'il appartient à l'assurée d'établir la survenance du sinistre ; qu'à la suite d'un arrêt de travail survenu le 9 janvier 2015, Mme [Y] a sollicité en février 2016 la prise en charge des échéances de son prêt au titre de la garantie incapacité totale de travail (ITT) ; que Mme [Y] ne fournit aucun justificatif de paiement d'une rente d'invalidité de 2e catégorie exigé par l'article 19.4.1 de la notice d'information ; qu'il aura fallu attendre les conclusions d'avril 2024 pour que l'intimée daigne produire les attestations de paiement de la CPAM uniquement pour la période du 1er octobre 2022 au 31 mars 2023 ; que par ailleurs, la production des justificatifs n'est nullement suffisante pour l'octroi d'une prise en charge de l'incapacité de travail et ce conformément à l'article 19.4.2 de la notice d'information ; que la définition contractuelle de la garantie ITT indique qu'est couverte l'incapacité de l'assurée, reconnue médicalement, à exercer une activité professionnelle quelconque, même à temps partiel ; que les décisions prises par les organismes sociaux ou assimilés sont inopposables à l'assureur, sauf référence expresse dans le contrat, ce qui n'est pas le cas en l'espèce ; que le classement en invalidité de 2e catégorie ne saurait en aucun cas justifier une prise en charge puisqu'elle ne permet absolument pas d'établir que la condition médicale exigée par le contrat d'assurance est satisfaite ; que le fait que Mme [Y] ait été reconnue par l'expert judiciaire comme remplissant les conditions pour être reconnue en invalidité de 2e catégorie de la sécurité sociale, est sans incidence sur l'appréciation par la cour de l'application à l'assurée des conditions du contrat d'assurance ; qu'il ne ressort d'aucun document médical une incapacité de Mme [Y] à exercer une quelconque activité professionnelle ; que l'expert judiciaire reconnaît sans équivoque possible que Mme [Y] est dans l'incapacité d'exercer son activité et non une quelconque activité professionnelle ; que les stipulations de la notice d'information ne prévoient nullement d'apprécier la capacité de Mme [Y] à exercer son activité professionnelle sauf à dénaturer la convention, mais au contraire exigent d'apprécier la capacité de l'assurée à exécuter une activité professionnelle quelconque, même partielle, en fonction uniquement de son état de santé ; que l'octroi à Mme [Y] de la reconnaissance de travailleur handicapé, reconnaissance dont la finalité est de l'aider dans ses démarches professionnelles, démontre nécessairement qu'elle n'est pas dans l'impossibilité totale à exercer toute activité professionnelle ; que la cour infirmera le jugement de première instance et déboutera Mme [Y] de l'ensemble de ses demandes ; qu'à titre subsidiaire, si la cour s'estimait insuffisamment informée, il conviendrait d'ordonner une expertise judiciaire aux frais avancés par Mme [Y], qui y a intérêt.
Mme [Y] fait valoir que les dispositions contractuelles prévoient la prise en charge par l'assureur des échéances du prêt immobilier, pour le cas où l'assuré se retrouve en situation d'ITT, à savoir qu'il est dans 1'impossibilité absolue, médicalement constatée, d'exercer une activité professionnelle quelconque au jour du sinistre à temps plein, ou à temps partiel ; que tel est le cas en l'espèce, ce qui est médicalement constaté par l'ensemble des pièces versées au débat et par le rapport d'expertise judiciaire ; qu'ainsi, du 5 août 2017 au 5 juin 2018, elle était dans l'impossibilité
absolue médicalement constatée d'exercer une activité professionnelle quelconque à temps plein ou à temps partiel, puisque notamment elle ne pouvait se déplacer seule ; qu'elle démontre relever de la catégorie 2 de la sécurité sociale et de ce fait être absolument incapable d'exercer une profession quelconque ; que si la société CNP assurances a garanti le risque du 9 janvier 2015 au 5 août 2017 et du 5 juin 2018 jusqu'à ce jour, il n'a existé aucune raison médicale objective au refus de garantie entre le 5 août 2017 et le 5 juin 2018 ; que le corollaire est qu'aucun délai de franchise ne pouvait être appliqué par l'assureur, de sorte que le délai de 90 jours, pendant lequel aucune prestation n'a été versée, doit être payé ; que le jugement sera donc confirmé quant aux sommes allouées.
Réponse de la cour
L'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 applicable au litige, dispose que les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.
En l'espèce, le litige porte sur les sommes versées par l'assureur au titre de la période du 5 août 2017 au 5 juin 2018 puis reprises par compensation, et sur une période de franchise du 5 juin 2018 au 5 septembre 2018.
La société CNP assurances a motivé l'arrêt de versement des prestations à compter du 5 août 2017, dans un courrier adressé au conseil de Mme [Y], comme suit
« Nous avons procédé à une nouvelle étude du dossier de Madame [Y] [D].
Celle-ci est en arrêt à compter du 09/01/2015, une prise en charge a été effectuée sur son dossier.
A compter du 1er août 2017, la Sécurité sociale a placé Madame [Y] [D] en invalidité 1re catégorie.
Nous vous rappelons selon l'article L.341-4 du code de la sécurité sociale, que les personnes titulaires d'une pension d'invalidité 1re catégorie sont capables d'exercer une activité professionnelle, et que conformément aux dispositions contractuelles, la garantie Incapacité Temporaire Totale de travail est effective quand on se trouve dans l'impossibilité absolue médicalement constatée ['.]
C'est pour cette raison qu'un arrêt de prise en charge a été prononcée sur le dossier de Madame [Y] [D] ce qui a généré l'indu réclamé.
A compter du 05/07/2018, la sécurité sociale a placé Madame [Y] [D] en invalidité 2e catégorie.
Nous avons donc établi un nouveau sinistre à cette date avec application du délai de franchise de 90 jours ».
L'article 17.4 de la notice d'information d'assurance définit l'incapacité totale de travail :
« L'assuré est en état d'incapacité temporaire totale de travail (ITT) lorsqu'à l'expiration d'une période d'interruption continue d'activité de 90 jours, appelée délai de franchise et avant son 65e anniversaire, il se trouve par suite d'une maladie ou d'un accident, dans l'impossibilité absolue médicalement constatée :
- pour un assuré exerçant une activité professionnelle ou en recherche d'emploi au jour du sinistre, d'exercer une activité professionnelle quelconque à temps plein ou à temps partiel »
L'article 19.4.1 de la notice d'information stipule :
« Il revient à l'assuré ou ses ayants droit de fournir à l'assureur pour chaque nouveau sinistre Incapacité Temporaire Totale de travail, à l'issue du délai de franchise défini à l'article 17.4 et au plus tard 90 jours après la fin du délai de franchise :
Pour tous les dossiers ITT :
- une copie de l'offre (des offres) préalable(s) de crédit signée(s) et le(s) éventuel(s) avenant(s) de réaménagement,
- une copie du (des) bulletin(s) individuel(s) de demande d'adhésion, accompagné du Questionnaire de Santé,
- un exemplaire des conditions particulières d'assurance acceptées par l'Assuré,
- une attestation médicale d'incapacité / invalidité (imprimé fourni par l'Assureur), complétée et signée par l'Assuré et son médecin,
- une attestation d'arrêts de travail des 5 dernières années précédant l'adhésion pour les sinistres survenus moins de 5 ans après l'adhésion ».
Il est établi que Mme [Y] a justifié d'une incapacité totale de travail médicalement constatée depuis le 9 janvier 2015, ce qui a justifié la prise en charge de celle-ci par l'assureur jusqu'au 5 août 2017, date d'interruption des prestations jusqu'au 3 septembre 2018.
Concernant la période litigieuse, il résulte du certificat médical du docteur [M] en date du 6 juillet 2017, que Mme [Y] était « en incapacité au sens du contrat chez CNP Assurances pour la période du 28 juin 2017 au 27 septembre 2017 », étant précisé que les certificats de ce même médecin établis de la même manière ont justifié la prise en charge du sinistre par l'assureur sur la période antérieure au 5 août 2017.
L'assureur ne justifie pas de l'allocation d'une pension d'invalidité 1re catégorie à Mme [Y] par CPAM, à effet au 1er août 2017, correspondant au sens de l'article L.341-4 du code de la sécurité sociale aux personnes invalides capables d'exercer une activité rémunérée, alors que la seconde catégorie concerne les personnes invalides absolument incapables d'exercer une profession quelconque.
Il convient d'ailleurs de relever que l'assureur a indiqué s'être fondé sur une décision de la CPAM pour interrompre les prestations alors qu'elle conclut à l'inopposabilité de toutes les décisions des organismes sociaux à son encontre pour l'application des garanties du contrat d'assurance.
Surtout, l'expert judiciaire a été chargé de dire si « Mme [Y], du 5 août 2017 au 5 juin 2018, était dans l'impossibilité absolue médicalement constatées d'exercer une activité professionnelle quelconque à temps plein ou à temps partiel, correspondant à la catégorie 2 de la sécurité sociale ».
Aux termes de son rapport, l'expert a conclu :
« Au cours de la période considérée, l'acuité visuelle de Madame [D] [Y] n'était pas compatible avec une activité de comptable à temps plein ou à temps partiel.
Compte tenu de l'acuité visuelle de chaque 'il, le taux de handicap visuel de Madame [D] [Y] est chiffré à 60 % auquel s'ajoute 9 % de handicap du fait de 1'atteinte campimétrique. Il faut ajouter la pseudophaquie, dont le taux est de 3 à cet âge.
Il est donc également très dif'cile à Madame [D] [Y] de se déplacer (la conduite étant bien entendu impossible) pour se rendre sur un lieu de travail.
Il est donc licite de considérer que Madame [D] [Y] remplissait les conditions pour être reconnue comme relevant de la catégorie 2 de la sécurité sociale ».
Ce rapport d'expertise judiciaire informant suffisamment la cour, il n'y a pas lieu d'ordonner une nouvelle expertise judiciaire comme le sollicite la société CNP assurances.
Au regard de l'ensemble de ces éléments, Mme [Y] établit qu'elle ne pouvait exercer une action professionnelle quelconque sur la période du 5 août 2017 au 5 juin 2018, de sorte que l'assureur n'était pas fondé à interrompre les prestations contractuelles.
L'assureur est mal-fondé à soutenir que le classement en invalidité de 2e catégorie ne saurait justifier une prise en charge, alors que c'est justement ce classement de Mme [Y] en 2e catégorie à compter du 5 juillet 2018 qui l'a conduit à reprendre le versement des prestations, après application d'un nouveau délai de franchise de 90 jours.
Il résulte de l'ensemble de ces éléments que Mme [Y] était fondée à solliciter le paiement des prestations reprises par compensation par l'assureur sur la période du 5 août 2017 au 5 juin 2018 et le paiement sur la période du délai de franchise appliqué à tort entre le 5 juillet 2018 et le 3 octobre 2018. Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a condamné la société CNP assurances à payer à Mme [Y] la somme de 4 256,17 euros au titre de la période du 5 août 2017 au 5 juin 2018, et la somme de 1 243,86 euros au titre du délai de franchise.
II- Sur le préjudice moral
Moyens des parties
Mme [Y] soutient qu'en réparation de son préjudice moral, elle sollicite la condamnation de l'assureur à lui payer la somme de 1 000 € ; que du fait de son handicap visuel, elle a des ressources très modiques, et le refus injustifié de l'assureur a restreint son budget de manière considérable ; que ce litige l'a profondément affectée et lui a causé nombre de tracas et soucis ; que depuis lors, l'obtention du versement des prestations est un véritable « parcours du combattant » ; qu'en effet, la CNP met parfois des semaines, voire plusieurs mois, à verser les prestations dues, alors que la prise en charge des échéances du prêt immobilier par l'assurance revêt un caractère absolument vital pour elle.
L'assureur réplique qu'il est particulièrement audacieux de la part de Mme [Y] de prétendre à la réparation d'un préjudice moral et d'un préjudice matériel compte tenu de ce qui précède ; qu'il convient de rappeler que l'emprunteur est tenu de rembourser son prêt tant qu'il ne justifie pas qu'une prise en charge doit être effectuée par l'assureur ; qu'elle ne commet pas de faute quand elle conteste sa garantie en s'appuyant sur des moyens sérieux, ce qui est le cas en l'espèce ; qu'en tout état de cause, la réparation d'un préjudice suppose la démonstration d'une faute, d'un préjudice et d'un lien de causalité ; que Mme [Y] ne justifie d'aucun préjudice imputable à CNP assurances, dont la position ne peut s'analyser comme une réticence ou une résistance abusive comme cela est sous-entendu ; qu'elle ne prouve pas plus l'existence d'une faute de sa part ; que Mme [Y] doit être déboutée de sa demande de dommages et intérêts.
Réponse de la cour
Le seul fait que l'assureur ait entendu faire valoir que sa garantie ne s'appliquait pas sur une période de près d'un an, ne constitue pas une faute caractérisant sa mauvaise foi, les juridictions pouvant être saisies de litiges portant sur l'interprétation du contrat d'assurance. En l'absence de faute, les dommages invoqués ne peuvent être indemnisés. Le jugement sera confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral.
III- Sur les frais de procédure
Le jugement sera confirmé en ses chefs statuant sur les dépens et les frais irrépétibles.
La société CNP assurances sera condamnée aux dépens d'appel comprenant les frais d'expertise judiciaire sur lesquels le tribunal ne s'est pas prononcé.
PAR CES MOTIFS,
Statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,
CONFIRME le jugement en toutes ses dispositions ;
Y AJOUTANT :
CONDAMNE la société CNP assurances aux entiers dépens d'appel comprenant les frais d'expertise judiciaire ;
DIT que les dépens seront recouvrés conformément aux règles régissant l'aide juridictionnelle.
Arrêt signé par Madame Anne-Lise COLLOMP, Présidente de Chambre et Mme Karine DUPONT, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.