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Décisions

CA Toulouse, ch. des référés 1er président, 27 juin 2025, n° 25/00037

TOULOUSE

Ordonnance

Autre

PARTIES

Demandeur :

Chrisophile (SCI)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Dubois

Conseiller :

Mme Izard

Avocats :

Me Baysset, Me Lange

Avocat :

SCP Marguerit ' Baysset

TJ Toulouse, hors JAF, JEX, JLD, J. Expr…

2 décembre 2024

FAITS ' PROCÉDURE ' PRÉTENTIONS :

Le 24 avril 2017, Mme [L] [C] et M. [K] [V], mariés sous le régime de la séparation des biens, ont créé la SCI Chrisophile dont ils sont tous les deux co-gérants et dont ils détiennent chacun la moitié des parts.

La SCI Chrisophile a acquis un local commercial d'environ 33m² sis [Adresse 4] au prix de 180 000 euros au moyen d'un emprunt de 206 500 euros souscrit auprès de la Banque populaire, remboursable sur 15 ans par mensualités de 1 410,80 euros.

Mme [C] qui a transformé ce local en galerie d'art, le loue à des artistes, sans en tirer de revenu personnel.

Mme [C] et M. [V] ont divorcé le 18 novembre 2021.

À compter de février 2024, les échéances du crédit immobilier ont cessé d'être réglées et la déchéance du terme a été prononcée le 6 septembre 2024, la SCI Chrisophile restant redevable de 140 283,86 euros.

Par requête du 9 septembre 2024, M. [V] a saisi le tribunal judiciaire de Toulouse d'une demande d'ouverture de liquidation judiciaire de la SCI.

Par jugement du 2 décembre 2024, le tribunal a notamment :

- constaté que la SCI Chrisophile ne peut pas faire face à son passif exigible avec son actif disponible,

- ouvert une procédure de liquidation judiciaire,

- fixé la date de cessation des paiements au 14 mai 2024,

- désigné en qualité de liquidateur Maître [J] [O] de la SELARL Aegis.

Mme [C] a interjeté appel de cette décision le 20 décembre 2024.

Par acte du 17 mars 2025, Mme [C] et la SCI Chrisophile ont fait assigner Mme [J] [O] et M. [V] en référé devant la première présidente de la cour d'appel de Toulouse, sur le fondement de l'article R.661-1 du code de commerce.

Dans ses dernières conclusions reçues au greffe le 22 mai 2025, soutenues oralement à l'audience, auxquelles il conviendra de se référer pour l'exposé des moyens en application de l'article 455 du code de procédure civile, elles demandent de :

- ordonner l'arrêt de l'exécution provisoire du jugement entrepris,

- débouter M. [V] de ses demandes formulées à l'encontre de Mme [C].

Suivant conclusions reçues au greffe le 1er avril 2025, soutenues oralement à l'audience, auxquelles il conviendra de se référer pour l'exposé des moyens en application de l'article 455 du code de procédure civile, M. [V] demande à la première présidente de :

- débouter Mme [C] de sa requête aux fins d'arrêt de l'exécution provisoire dont est assortie le jugement du 2 décembre 2024 avec tous effets de droit,

- la condamner à lui payer la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- la condamner aux entiers dépens de l'instance.

Par avis reçu au greffe le 27 mars 2025, régulièrement communiqué aux parties, auquel il conviendra de se référer en application de l'article 455 du code de procédure civile, le ministère public demande de rejeter la requête aux fins d'arrêt de l'exécution provisoire du jugement du 2 décembre 2024 prononçant la liquidation judiciaire de la SCI Chrisophile.

La SELARL Aegis ès qualités, régulièrement assignée à personne morale, n'a pas comparu et ne s'est pas fait représenter.

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MOTIVATION :

Il sera liminairement rappelé que les questions de recevabilité de l'appel devant la cour d'appel ne peuvent être tranchées par la présente juridiction et sont indifférentes s'agissant de l'appréciation d'un moyen sérieux de réformation ou d'annulation de la décision de première instance.

Les moyens développés par M. [V] qui excipe de l'irrecevabilité de l'appel interjeté par les demanderesses au motif qu'il serait tardif sont donc inopérants.

Aux termes de l'article R.661-1 du code de commerce, par dérogation aux dispositions de l'article 514-3 du code de procédure civile, le premier président de la cour d'appel, statuant en référé, ne peut arrêter l'exécution provisoire des décisions rendues en matière de liquidation judiciaire que lorsque les moyens à l'appui de l'appel paraissent sérieux.

Selon l'article L.640-1 du code de commerce, il est institué une procédure de liquidation judiciaire ouverte à tout débiteur mentionné à l'article L. 640-2 en cessation des paiements et dont le redressement est manifestement impossible.

La procédure de liquidation judiciaire est destinée à mettre fin à l'activité de l'entreprise ou à réaliser le patrimoine du débiteur par une cession globale ou séparée de ses droits et de ses biens.

En l'espèce, Mme [C] et la SCI Chrisophile sollicitent l'arrêt de l'exécution provisoire du jugement entrepris en faisant valoir que M. [V] n'avait pas la qualité pour demander l'ouverture d'une mesure de liquidation judiciaire de la société, cette décision devant être prise en assemblée générale extraordinaire.

Mais, conformément aux dispositions de l'article R.631-1 du code de commerce par renvoi de l'article R.640-1 relatif à l'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire, la demande est déposée par le présentant légal de la personne morale ou par le débiteur personne physique au greffe du tribunal compétent.

Et, comme valablement souligné par le ministère public, la déclaration de cessation des paiements s'analyse en un acte de gestion effectué dans l'intérêt de la société qui peut être accomplie par un seul gérant comme le prévoit l'article 24 des statuts de la société.

De plus, l'ouverture de la procédure doit être demandée par le débiteur au plus tard dans les 45 jours suivant la cessation des paiements en vertu de l'article L.640-4 du code de commerce.

En conséquence, la fin de non recevoir tiré de l'absence de qualité à agir de M. [V], co-gérant à 50% de la SCI Chrisophile, ne constitue pas un moyen sérieux d'annulation.

Les demanderesses, qui ne discutent pas l'état de cessation des paiements, soutiennent ensuite que le redressement judiciaire n'est pas manifestement impossible.

Le passif s'élève à 207 286,65 euros dont 66 066,37 euros de passif chirographaire et 141 220,28 euros de passif privilégié correspondant au solde restant dû du prêt immobilier après déchéance du terme prononcée le 18 septembre 2024 .

S'il est exact que les produits d'exploitation de la SCI ont augmenté entre 2023 et 2024 pour passer de 8 000 euros à 10 425 euros en 2024, ils n'empêchent pas la société de rester déficitaire (7 748 euros pour l'exercice 2024) et ils ne permettent pas de couvrir le remboursement des charges d'exploitation et de l'emprunt qui s'élèvent respectivement à 4 467 euros et 16 929,60 euros sur ce même exercice.

Au demeurant, tout en indiquant que la banque serait encline à fixer un nouvel échelonnement du remboursement plus long du prêt immobilier, force est de constater que Mme [C] et la SCI se contentent de procéder par affirmations sans corroborer leurs assertions par la moindre pièce probante.

Enfin, bien qu'elles prétendent que la mise en place de tarifs adaptés en haute saison et sur les périodes creuses pourrait permettre de remplir l'agenda, les demanderesses ne fournissent aucun prévisionnel, ni même aucun document au soutien de leurs assertions.

Dans ces conditions, faute de justifier d'un possible redressement judiciaire, Mme [C] et la SCI Chrisophile seront déboutées de leur demande d'arrêt de l'exécution provisoire attachée au jugement entrepris.

Comme elles succombent, elles supporteront la charge des dépens et Mme [C] sera condamnée à payer à M. [K] [V] la somme de 800 euros au titre des frais irrépétibles.

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PAR CES MOTIFS

Statuant par décision réputée contradictoire, après débats en audience publique,

Déboutons Mme [L] [C] et la SCI Chrisophile de leur demande d'arrêt de l'exécution provisoire,

Les condamnons aux dépens,

Condamnons Mme [L] [C] à payer à M. [K] [V] la somme de 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

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