CA Lyon, ch. juridiction premier président, 30 juin 2025, n° 25/00127
LYON
Ordonnance
Autre
PARTIES
Demandeur :
Iso Set (SA)
Défendeur :
MJ Synergie (SELARL), URSSAF Rhône-Alpes
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Bardoux
Conseiller :
M. Bardoux
Avocats :
SELARL LX Lyon, Me El Baze, Me Vergnoud, Me Nouvellet
EXPOSE DU LITIGE
La S.A. Iso Set est une société de droit suisse, détenant un établissement en France et exerçant une activité de formation continue.
L'URSSAF Rhône-Alpes a assigné la société Iso Set devant le tribunal de commerce de Bourg-en-Bresse en se prévalant de sommes dues sur une période courant de février 2020 à février 2025.
Par jugement contradictoire du 21 mai 2025, le tribunal de commerce de Bourg-en-Bresse a constaté l'état de cessation des paiements de la société Iso Set, prononcé un redressement judiciaire, désigné la SELARL MJ Synergie en qualité de mandataire judiciaire et fixé provisoirement la date de cessation des paiements au 21 novembre 2023.
La société Iso Set a interjeté appel de cette décision le 26 mai 2025.
Par assignations en référé délivrées le 6 juin 2025 à l'URSSAF Rhône-Alpes et à la SELARL MJ Synergie, elle a saisi le premier président afin d'obtenir l'arrêt de l'exécution provisoire et la condamnation de l'URSSAF Rhône-Alpes aux dépens de l'instance.
A l'audience du 23 juin 2025 devant le délégué du premier président, les parties, régulièrement représentées, s'en sont remises à leurs écritures, qu'elles ont soutenues oralement.
Dans son assignation, la société Iso Set soutient au visa de l'article R. 661-1 du code de commerce l'existence de moyens paraissant sérieux de réformation ou d'annulation tenant au non-respect du principe du contradictoire devant le tribunal de commerce et à l'absence de caractérisation d'un état de cessation des paiements par la motivation du jugement.
Elle prétend que l'exécution provisoire de ce jugement va entraîner des conséquences manifestement excessives en ce que la publicité du jugement de redressement judiciaire a un effet désastreux sur ses partenaires de confiance ou sur ses clients, et risquerait d'entraver de manière irrémédiable les différents marchés sur lesquels elle se positionne.
Dans ses conclusions déposées au greffe par RPVA le 17 juin 2025, la SELARL MJ Synergie s'en rapporte à la sagesse du délégué du premier président.
Elle relate que la société Iso Set indique avoir réglé la créance revendiquée par l'URSSAF avant l'audience d'ouverture, et que selon les termes de la déclaration de créance de l'URSSAF, le règlement d'un montant total de 464 263 € a été réceptionné postérieurement au redressement judiciaire, les 21 et 23 mai 2025. Elle en déduit que ces règlements sont donc soumis aux dispositions de l'article L. 622-7 du Code de commerce.
Dans ses observations régulièrement portées à la connaissance des parties le 18 juin 2025, le ministère public requiert la suspension de l'exécution provisoire en raison des possibilités de réformation de la décision.
L'URSSAF Rhône-Alpes, bien que régulièrement assignée par acte remis conformément aux dispositions des articles 656 et 658 du Code de procédure civile, n'a pas comparu.
Pour satisfaire aux dispositions de l'article 455 du Code de procédure civile, il est expressément renvoyé, pour plus de précisions sur les faits, prétentions et arguments des parties, à la décision déférée, aux conclusions régulièrement déposées et ci-dessus visées, comme pour l'exposé des moyens à l'énoncé qui en sera fait ci-dessous dans les motifs.
MOTIFS
Attendu que la présente ordonnance est rendue par défaut en ce que la défenderesse non comparante n'a pas été assignée à sa personne ;
Attendu qu'aux termes de l'article R. 661-1 du Code de commerce, le jugement prononçant le redressement judiciaire est exécutoire de plein droit à titre provisoire et par dérogation aux dispositions de l'article 514-3 du Code de procédure civile, le premier président de la cour d'appel statuant en référé ne peut arrêter l'exécution provisoire d'un tel jugement, que si les moyens invoqués à l'appui de l'appel paraissent sérieux ;
Qu'il n'est pas besoin d'examiner l'existence de conséquences manifestement excessives qui ne constituent pas un critère de l'arrêt de l'exécution provisoire ;
Attendu qu'un moyen sérieux ne relève pas d'une simple affirmation ni de la seule reprise des arguments développés en première instance ; qu'en d'autres termes un moyen sérieux est un moyen suffisamment consistant pour mériter d'être allégué ou soutenu, pris en considération et avoir des chances d'être retenu après discussion et réflexion et qui doit en tout état de cause conduire à l'annulation ou à la réformation ;
Que l'absence de pouvoir juridictionnel du premier président pour déterminer les chances de succès de l'appel doit le conduire à ne retenir un moyen que s'il repose sur une base factuelle évidente ;
Attendu que la société Iso Set invoque un non-respect du contradictoire qu'elle dit consécutif à l'absence de connaissance des pièces visées par l'URSSAF dans son assignation en redressement judiciaire et alors que le tribunal de commerce n'a pas fait droit à la demande de report de l'examen de l'affaire présentée par son conseil ;
Qu'elle soutient à tort qu'il s'agit d'un moyen sérieux d'annulation du jugement dont appel, car d'une part les termes mêmes de l'article 56 du Code de procédure civile n'imposent pas de joindre les pièces visées dans l'assignation et de les produire avant l'ouverture de l'audience et d'autre part, l'absence de réponse positive à une demande de report de l'examen de l'affaire ne caractérise pas une violation du principe du contradictoire ;
Attendu que la société Iso Set conteste se trouver en état de cessation des paiements au sens de l'article L. 631-1 du Code de commerce, et il convient de rappeler que cet état doit être apprécié au jour où le juge statue ;
Attendu qu'il n'est pas discuté que la créance que l'URSSAF invoquait au soutien de sa demande d'ouverture d'un redressement judiciaire a été intégralement couverte dans les jours qui ont précédé ou suivi le jugement dont appel, le mandataire judiciaire évoquant les dates des 21 et 23 mai 2025 sur la base de la déclaration de créance de cet organisme ;
Que la société demanderesse produit un relevé comptable et une attestation de fourniture des déclarations sociales et paiement des cotisations et contributions dressés par l'URSSAF qui établissent cette absence de dette subsistante à l'égard de cet organisme ; qu'il n'est pas du ressort du délégué du premier président d'arbitrer les conditions dans lesquelles ces paiements sont intervenus et de déterminer leur régime applicable ;
Attendu qu'aucun élément produit ne vient faire état d'une dette immédiatement exigible que la société demanderesse serait dans l'impossibilité de payer avec son actif disponible ;
Attendu qu'il convient dès lors de retenir comme l'a considéré le ministère public que la société Iso Set justifie d'un moyen sérieux de réformation de la décision qui a ouvert son redressement judiciaire en ce que son état de cessation des paiements n'est plus avéré en l'espèce ;
Attendu qu'il doit être fait droit à la demande d'arrêt de l'exécution provisoire ;
Attendu que chaque partie se doit de garder la charge de ses propres dépens, aucun élément ne permettant de retenir que l'URSSAF ait entendu s'opposer au renvoi alors sollicité par la société Iso Set, alors même qu'elle lui avait indiqué juste auparavant qu'elle n'entendait pas le faire ;
PAR CES MOTIFS
Nous, Pierre Bardoux, délégué du premier président, statuant publiquement, en référé, par ordonnance par défaut,
Vu la déclaration d'appel du 26 mai 2025,
Ordonnons l'arrêt de l'exécution provisoire de droit attachée au jugement rendu le 21 mai 2025 par le tribunal de commerce de Bourg-en-Bresse ayant ouvert le redressement judiciaire de la S.A. Iso Set,
Disons que chaque partie garde la charge de ses propres dépens.