Cass. com., 2 juillet 2025, n° 23-17.844
COUR DE CASSATION
Autre
Cassation
PARTIES
Demandeur :
3d Systems France (SASU)
Défendeur :
Lixxbail (SA), Crédit mutuel leasing (SA), Sogelease France (SAS)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Vigneau
Rapporteur :
M. Chazalette
Avocats :
SARL Ortscheidt, SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, SAS Buk Lament-Robillot
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 2 décembre 2022), le 10 juin 2014, la société Créative industrie a commandé à la société 3D Systems France une imprimante 3D professionnelle, différents équipements et périphériques, ainsi que la maintenance complète de la machine pendant trois ans. Le matériel a été réceptionné le 27 août 2014.
2. Pour financer cette opération, la société Créative industrie a conclu un contrat de crédit-bail avec les sociétés Lixxbail, Sogelease France et CM-CIC Bail.
3. La société Créative industrie a été mise en liquidation judiciaire le 27 avril 2018.
4. Les 10 août 2018 et 7 mars 2019, le liquidateur a assigné la société 3D Systems France et les crédit-bailleurs en garantie des vices cachés, et subsidiairement, en résolution du contrat de vente.
Examen des moyens
Sur le premier moyen
5. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le second moyen, pris en ses première, deuxième et troisième branches
Enoncé du moyen
6. La société 3D Systems France fait grief à l'arrêt de la condamner à restituer aux sociétés Lixxbail, Crédit mutuel leasing et Sogelease la somme de 610 000 euros HT augmentée de la TVA et des intérêts au taux de 1 % par mois entre la date du règlement du prix d'achat et le jour du prononcé de l'arrêt, alors :
« 1°/ que la résolution d'un contrat de vente emporte son anéantissement rétroactif, la restitution de la chose vendue et, lorsque des prestations ne peuvent être restituées, l'obligation pour la partie qui en a bénéficié de s'acquitter du prix correspondant à ces prestations ; qu'en condamnant la société 3D Systems France à restituer la somme de 610 000 euros après avoir constaté que ce prix de 610 000 euros, prévu par le bon de commande signé par la société Créative industrie, correspondait non seulement au prix de l'imprimante et de différents équipements, périphériques et logiciels, mais aussi au prix de prestations de maintenance à la charge de la société 3D Systems France et qu'elle avait établi trois rapports d'intervention les 22 juillet 2015, 19 octobre 2015, et 8 novembre 2015, aux termes desquels elle avait effectué des prestations de nettoyage, de remplacement de la poudre et de remplacement d'une vanne à manchon non étanche, ce dont il s'évinçait qu'elle avait exécuté la prestation de maintenance mise à sa charge dont elle devait recevoir restitution en valeur, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé l'article 1184 du code civil, dans sa version antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;
2°/ que la résolution d'un contrat de vente emporte son anéantissement rétroactif, la restitution de la chose vendue et, lorsque des prestations ne peuvent être restituées, l'obligation pour la partie qui en a bénéficié de s'acquitter du prix correspondant à ces prestations ; qu'en condamnant la société 3D Systems France à restituer la somme de 610 000 euros après avoir constaté que ce prix de 610 000 euros, prévu par le bon de commande signé par la société Créative industrie, correspondait non seulement au prix de l'imprimante et de différents équipements, périphériques et logiciels, mais aussi au prix de prestations de formation à la charge de la société 3D Systems France, sans constater qu'elle n'avait pas exécuté la prestation de formation prévue par le bon de commande, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1184 du code civil, dans sa version antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;
3°/ que la résolution d'un contrat de vente emporte son anéantissement rétroactif, la restitution de la chose vendue et, lorsque des prestations ne peuvent être restituées, l'obligation pour la partie qui en a bénéficié de s'acquitter du prix correspondant à ces prestations ; qu'en condamnant la société 3D Systems France à restituer la somme de 610 000 euros après avoir constaté que ce prix de 610 000 euros, prévu par le bon de commande signé par la société Créative industrie correspondait non seulement au prix de l'imprimante et de différents équipements, périphériques et logiciels, mais aussi au prix de 100 kg de poudre, sans constater que la société 3D Systems France n'a pas fourni les 100 kg de poudre prévus par le bon de commande, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1184 du code civil, dans sa version antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016. »
Réponse de la Cour
7. Il ne résulte pas des écritures de la société 3D Systems France que celle-ci ait soutenu détenir une créance de restitution en valeur des consommables fournis et des prestations de service exécutées au profit de la société Créative industrie, ni saisi la cour d'appel d'une demande tendant à la condamnation en paiement du montant de cette créance.
8. Le moyen, nouveau et mélangé de fait et de droit, n'est donc pas recevable.
Mais sur le second moyen, pris en sa cinquième branche
Enoncé du moyen
9. La société 3D Systems fait le même grief à l'arrêt, alors « que les conventions n'ont d'effet qu'entre les parties contractantes et ne nuisent pas aux tiers ; qu'en condamnant la société 3D Systems France au paiement d'intérêts au taux de 1 % par mois, taux dont il résulte des constatations des juges du fond qu'il était prévu par le contrat de crédit-bail conclu par la société Creative industrie avec les crédit-bailleurs et auquel la société 3D Systems France n'était pas partie, la cour d'appel a violé l'article 1165 du code civil, dans sa version antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016. »
Réponse de la Cour
10. Il résulte de l'article 1165 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016, que les conventions n'ont d'effet qu'entre les parties contractantes.
11. Pour condamner la société 3D Systems France à payer des intérêts de retard au taux de 1 % par mois entre la date du règlement du prix d'achat et le jour de son prononcé, l'arrêt retient que cette disposition était prévue contractuellement.
12. En se déterminant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée, si la société 3D Systems France était partie au contrat stipulant l'application de ce taux d'intérêt, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.
Mise hors de cause
13. En application de l'article 625 du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de mettre hors de cause la société Créative industrie, dont la présence est nécessaire devant la cour d'appel de renvoi.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief, la Cour :
Dit n'y avoir lieu à mettre hors de cause la société Créative industrie ;
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il assortit d'un intérêt au taux de 1 % par mois entre la date du règlement du prix d'achat et le jour de son prononcé la condamnation de la société 3D Systems France à restituer aux sociétés Lixxbail, la société Crédit mutuel Leasing, anciennement dénommée CM-CIC Bail et Sogelease la somme de 610 000 euros HT augmentée de la TVA, l'arrêt rendu le 2 décembre 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;
Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne in solidum les sociétés Lixxbail, la société Crédit mutuel Leasing, anciennement dénommée CM-CIC Bail et Sogelease et Mme [K], en qualité de liquidateur de la société Creative industrie, aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé publiquement le deux juillet deux mille vingt-cinq par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.