CA Besançon, 1re ch., 1 juillet 2025, n° 24/01051
BESANÇON
Arrêt
Infirmation partielle
PARTIES
Demandeur :
Domofinance (SA)
Défendeur :
Solution Eco Energie (SAS)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Wachter
Conseillers :
Mme Willm, M. Maurel
Avocats :
Me Giacomoni, Me Goncalves, Me Auffret de Peyrelongue, Me Bensaid
EXPOSE DU LITIGE, DE LA PROCEDURE ET DES PRETENTIONS
M. [I] [S] et Mme [B] [H] épouse [S] ont conclu, le 5 février 2019, un contrat de vente et de pose de panneaux photovoltaïques et de chauffe-eau thermodynamique suite à un démarchage à domicile par la SAS Solution Eco Energie.
La vente a été financée par la conclusion, le même jour, d'un contrat de crédit affecté avec la SA Domofinance (la banque), par l'intermédiaire de la société Solution Eco Energie, pour un montant de 29 900 euros remboursable en 120 mensualités de 305,77 euros.
Le 27 février 2019, le matériel a été livré et installé par la société Solution Eco Energie. Cette dernière a été placée en liquidation judiciaire.
Par actes des 19 et 26 juin 2023, les époux [S] ont fait assigner Maître [C] [F] en qualité de liquidateur judiciaire de la société Solution Eco Energie, et la SA Domofinance devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Lons le Saunier, aux fins notamment de nullité des contrats de vente et de crédit.
Par jugement réputé contradictoire rendu le 27 février 2024, le juge des contentieux de la protection a :
- déclaré les demandes de M. [I] [S] et Mme [B] [H] épouse [S] recevables,
- prononcé la nullité du contrat de vente conclu le 5 février 2019 entre M. [I] [S] et Mme [B] [H] épouse [S] d'une part, et la société Solution Eco Energie d'autre part,
- prononcé la nullité du contrat de crédit affecté conclu le 5 février 2019 entre M. [I] [S] et Mme [B] [H] épouse [S] d'une part, et la SA Domofinance d'autre part,
- condamné la SA Domofinance à rembourser à M. [I] [S] et Mme [B] [H] épouse [S] les sommes déjà perçues par la banque à savoir la somme de 11 753,18 euros arrêtée au 5 juin 2023,
- rejeté la demande en restitution du capital de la SA Domofinance,
- condamné la société Solution Eco Energie prise en la personne de son liquidateur judiciaire,
Maître [C] [F], à venir reprendre à ses frais les panneaux photovoltaïques et le matériel visé au contrat et installé chez M. [I] [S] et Mme [B] [H] épouse [S] et à remettre la toiture en état dans un délai de deux mois à compter de la signification du jugement, faute de quoi le matériel sera réputé abandonné et pourra être conservé par les acquéreurs,
- condamné in solidum la SA Domofinance et la société Solution Eco Energie prise en la personne de son liquidateur judiciaire, Maître [C] [F], à verser à M. [I] [S] et Mme [B] [H] épouse [S] la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- rejeté tous les autres chefs de demandes,
- condamné in solidum la SA Domofinance et la société Solution Eco Energie prise en la personne de son liquidateur judiciaire, Maître [C] [F], aux dépens,
- rappelé que la présente décision est exécutoire de plein droit.
Pour parvenir à cette décision, le tribunal a notamment considéré :
Sur l'irrecevabilité tirée de l'absence de déclaration de créance
- que la demande des époux [S] tendait à l'annulation du contrat de vente,
- que la condamnation du vendeur au paiement d'une somme d'argent n'était pas sollicitée,
- que peu importait le sort de l'éventuelle créance de restitution du prix de vente dans la procédure collective du vendeur,
- que les demandes ne se heurtaient pas à l'interdiction des poursuites,
- que l'action était en conséquence recevable malgré l'absence de déclaration de créance ;
Sur la nullité du contrat de vente
- que les époux [S] invoquaient plusieurs manquements aux dispositions légales, notamment l'absence des caractéristiques essentielles, l'imprécision du prix du bien et du service, l'imprécision de la date de livraison et de pose,
- que le bon de commande était en conséquence nul ;
Sur la demande en nullité du contrat de crédit affecté
- que le contrat de vente étant entaché de nullité, le contrat de crédit était nul de plein droit ;
Sur les conséquences de la nullité
- que la preuve que les époux [S] avaient eu connaissance, au moment de la signature de la fiche de réception des travaux, des irrégularités du bon de commande, et qu'ils avaient eu l'intention de renoncer aux causes de nullité n'était pas rapportée,
- que la nullité du bon de commande n'avait donc pas été confirmée,
- que la nullité du contrat de vente principal entraînait une obligation de restitution de l'installation photovoltaïque entre les époux [S] et la société Solution Eco Energie,
- que la nullité du contrat de crédit affecté entraînait une obligation de restitution du capital par les époux [S] et une obligation de restitution des sommes perçues par la SA Domofinance,
- que cette société aurait dû vérifier la régularité du bon de commande avant de débloquer les fonds,
- qu'elle avait donc commis une faute la privant du droit de réclamer à l'emprunteur la restitution des sommes versées ;
Sur la demande en dommages et intérêts
- que les époux [S] ne rapportaient pas la preuve du préjudice moral et de la perte de chance invoqués.
- oOo-
Par déclaration du 15 juillet 2024, la SA Domofinance a relevé appel de l'entier jugement. Aux termes de ses dernières conclusions transmises le 23 septembre 2024, elle demande à la cour :
- d'infirmer en toutes ses dispositions le jugement du juge des contentieux de la protection du tribunal judicaire de Lons le Saunier du 27 février 2024,
Par conséquent, statuant à nouveau et y ajoutant :
A titre principal,
- de dire et juger que M. [I] [S] et Mme [B] [S] sont irrecevables en leurs demandes en l'absence de déclaration de créances,
- de dire et juger que les conditions de nullité des contrats de vente et de crédit ne sont pas réunies,
- de dire et juger que M. [I] [S] et Mme [B] [S] ne peuvent plus invoquer la nullité du contrat de vente, et donc du contrat de prêt du fait de l'exécution volontaire des contrats, de sorte que l'action est irrecevable en application de l'article 1338 alinéa 2 du code civil,
- de dire et juger que la société Domofinance n'a commis aucune faute,
En conséquence,
- de débouter M. [I] [S] et Mme [B] [S] de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,
- de dire et juger que M. [I] [S] et Mme [B] [S] seront tenus d'exécuter les contrats jusqu'au terme,
A titre subsidiaire et dans l'hypothèse où la nullité des contrats serait prononcée,
- de dire et juger que l'absence de faute de l'établissement de crédit laisse perdurer les obligations de restitutions réciproques,
- de condamner solidairement M. [I] [S] et Mme [B] [S] à lui payer la somme de 29 900 euros (capital déduction à faire des règlements),
- de fixer au passif de la liquidation de la SAS Solution Eco Energie dénommée Soleco, prise en la personne de son liquidateur Maître [C] [F], la somme de 6 792,40 euros au titre des intérêts perdus,
A titre infiniment subsidiaire et dans l'hypothèse où la nullité des contrats serait prononcée et une faute des établissements de crédit retenue,
- de débouter M. [I] [S] et Mme [B] [S] de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,
- de condamner solidairement M. [I] [S] et Mme [B] [S] au paiement de la somme de 29 900 euros à titre de dommages et intérêts,
- de fixer au passif de la liquidation de la SAS Solution Eco Energie dénommée Soleco, prise en la personne de son liquidateur, Maître [C] [F], la somme de 36 692,40 euros au titre du capital et des intérêts perdus,
En tout état de cause,
- de condamner solidairement M. [I] [S] et Mme [B] [S] à payer à la société Domofinance une somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,
- de condamner les mêmes aux entiers dépens de l'appel.
- oOo-
Aux termes de leurs uniques conclusions transmises le 26 novembre 2024, M. et Mme [S] demandent à la cour :
- de dire et juger la société Domofinance recevable en son appel mais mal fondée,
- de confirmer le jugement du tribunal judiciaire de Lons le Saunier du 27 février 2024 en toutes ses dispositions,
A titre subsidiaire, si, par extraordinaire, la cour infirmait le jugement et rejetait la demande en nullité du contrat de vente en application des dispositions du code de la consommation,
- de prononcer la nullité du contrat conclu entre eux et la société Solution Eco Energie sur le fondement du dol,
A titre infiniment subsidiaire, si la cour devait estimer qu'il n'y a pas matière à annulation de la vente et annulation consécutive du prêt,
- de condamner la société Domofinance à leur restituer les intérêts indument perçus depuis la première échéance et jusqu'au jour du jugement, puis établir un nouveau tableau d'amortissement pour la suite du remboursement sans intérêts,
En tout état de cause :
- de les déclarer recevables en leurs demandes,
- de débouter la société Domofinance de toutes ses demandes fins et conclusions,
- de confirmer la condamnation de la société Domofinance au paiement de la somme de 15 211,27 euros, correspondant aux montants déjà réglés, arrêtés au 5 novembre 2024, le solde devant être actualisé au jour de l'arrêt, et emportera intérêts au taux légal à compter de la décision prononçant l'annulation du prêt,
- de condamner solidairement Maître [C] [F], ès qualité de liquidateur judiciaire de la société Solution Eco Energies, et la société Domofinance à leur payer la somme de 4 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- de condamner solidairement Maître [C] [F], ès qualité de liquidateur judiciaire de la société Solution Eco Energie, et la société Domofinance aux entiers dépens de l'instance.
- oOo-
La déclaration d'appel a été signifiée à personne à Maître [C] [F], es qualités de mandataire liquidateur de la société Solution Eco Energie, par acte du 18 septembre 2024.
Mme [C] [F] n'a pas constitué avocat.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 8 avril 2025 et l'affaire a été appelée à l'audience du 29 avril 2025.
Elle a été mise en délibéré au 1er juillet 2025.
En application de l'article 455 du code de procédure civile, il convient de se référer, pour l'exposé des moyens des parties, à leurs conclusions récapitulatives visées ci-dessus.
SUR CE, LA COUR
I. Sur la la recevabilité de l'action en nullité du contrat de vente
La SA Domofinance conclut à l'irrecevabilité de la demande des époux [S] au motif qu'ils n'ont pas déclaré leur créance à la liquidation judiciaire de la société Solution Eco Energie.
M. et Mme [S] font valoir qu'ils n'avaient pas à déclarer de créance dans la mesure où leur action tend à la nullité du contrat.
Réponse de la cour :
En application des articles L. 622-21 et L. 641-3 du code de commerce, le jugement d'ouverture interrompt ou interdit toute action en justice de la part de tous les créanciers dont la créance n'est pas mentionnée au I de l'article L. 622-17 et tendant à la condamnation du débiteur au paiement d'une somme d'argent ou à la résolution d'un contrat pour défaut de paiement d'une somme d'argent.
Il en résulte que l'action en résolution d'un contrat pour inexécution d'une obligation autre qu'une obligation de payer une somme d'argent n'est ni interrompue, ni interdite par le jugement qui ouvre la liquidation judiciaire.
Tel est le cas en l'espèce, de sorte que la fin de non-recevoir tirée du défaut de déclaration de créance soulevée par la SA Domofinance sera rejetée et le jugement entrepris confirmé sur ce point.
II. Sur la nullité du contrat de vente
Sur la nullité du fait des irrégularités du bon de commande
M. et Mme [S] rappellent que le contrat de vente a été conclu hors établissement et font valoir que la société Solution Eco Energie n'a pas respecté les dispositions du code de la consommation en ce que le bon de commande :
- ne mentionne pas les caractéristiques essentielles des biens livrés ou des services proposés (référence, poids, dimension, inclinaison, modèle, type, marque des panneaux ; méthode d'incorporation des panneaux au bâti ; marque, références et type des onduleurs ; marque, poids, puissance calorifique, références, modèle et dimensions du chauffe-eau ; type du ballon thermodynamique (à air ambiant, à air extérieur, et à air extrait) ; nature exacte des travaux de pose, d'installation, et démarches administratives non précisées ; l'option pour «autoconsommation totale» ne correspond pas à la réalité ; absence de ventilation entre le prix de chaque produit, absence d'indication du coût total du crédit),
- contient des renseignements erronés sur le droit de rétractation, dont le formulaire ne correspond pas à celui prévu à l'annexe de l'article R. 221-1 du code de la consommation, et fait référence à un texte abrogé,
- n'indique pas l'identité et les coordonnées de l'assureur garant en responsabilité civile professionnelle et éventuellement en garantie décennale,
- ne comporte aucune information sur la couverture géographique du contrat ou sur l'engagement d'assurance du vendeur,
- n'informe pas le consommateur :
. sur la disponibilité ou la non-disponibilité des pièces détachées indispensables à l'utilisation des biens concernés,
. sur l'existence et les modalités de mise en 'uvre de la garantie commerciale et du service après-vente,
. sur son droit à s'inscrire sur la liste d'opposition au démarchage téléphonique,
. sur la possibilité de recourir à un médiateur de la consommation,
- reproduit des conditions générales qui renvoient à des articles du code de la consommation qui ont été abrogés.
Ils soutiennent également que l'obligation générale d'information précontractuelle n'a pas été respectée par la société Solution Eco Energie.
La SA Domofinance relève que le bon de commande précise la puissance de la centrale, le nombre et la puissance des panneaux ainsi que les accessoires fournis, qu'aucun texte ne définit les caractéristiques essentielles des panneaux photovoltaïques, que les emprunteurs ont été informés des modalités de financement de l'opération lorsqu'ils ont signé le bon de commande puisqu'ils ont souscrit le même jour un contrat de crédit affecté indiquant la nature du crédit, son montant, le taux conventionnel, la durée de remboursement et le montant des mensualités, que le délai de livraison figure au bon de commande, et qu'aucun texte ne prévoit que le manquement à l'obligation d'information sur le médiateur de la consommation soit sanctionné par la résolution du contrat.
Réponse de la cour :
Il est constaté que l'application du régime des contrats conclus hors établissement n'est pas contestée.
Aux termes de l'article L. 221-9 du code de la consommation, dans sa version applicable au litige : 'Le professionnel fournit au consommateur un exemplaire daté du contrat conclu hors établissement, sur papier signé par les parties ou, avec l'accord du consommateur, sur un autre support durable, confirmant l'engagement exprès des parties. Ce contrat comprend toutes les informations prévues à l'article L. 221-5. Le contrat mentionne, le cas échéant, l'accord exprès du consommateur pour la fourniture d'un contenu numérique indépendant de tout support matériel avant l'expiration du délai de rétractation et, dans cette hypothèse, le renoncement de ce dernier à l'exercice de son droit de rétractation. Le contrat est accompagné du formulaire type de rétractation mentionné au 2° de l'article L. 221-5.'
L'article L. 242-1 dudit code précise que : 'Les dispositions de l'article L. 221-9 sont prévues à peine de nullité du contrat conclu hors établissement.'
Selon l'article L. 221-5 : 'Préalablement à la conclusion d'un contrat de vente ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations suivantes :
1° Les informations prévues aux articles L. 111-1 et L. 111-2 ;
2° Lorsque le droit de rétractation existe, les conditions, le délai et les modalités d'exercice de ce droit ainsi que le formulaire type de rétractation, dont les conditions de présentation et les mentions qu'il contient sont fixées par décret en Conseil d'Etat ;
3° Le cas échéant, le fait que le consommateur supporte les frais de renvoi du bien en cas de rétractation et, pour les contrats à distance, le coût de renvoi du bien lorsque celui-ci, en raison de sa nature, ne peut normalement être renvoyé par la poste ;
4° L'information sur l'obligation du consommateur de payer des frais lorsque celui-ci exerce son droit de rétractation d'un contrat de prestation de services, de distribution d'eau, de fourniture de gaz ou d'électricité et d'abonnement à un réseau de chauffage urbain dont il a demandé expressément l'exécution avant la fin du délai de rétractation ; ces frais sont calculés selon les modalités fixées à l'article L. 221-25 ;
5° Lorsque le droit de rétractation ne peut être exercé en application de l'article L. 221-28, l'information selon laquelle le consommateur ne bénéficie pas de ce droit ou, le cas échéant, les circonstances dans lesquelles le consommateur perd son droit de rétractation ;
6° Les informations relatives aux coordonnées du professionnel, le cas échéant aux coûts de l'utilisation de la technique de communication à distance, à l'existence de codes de bonne conduite, le cas échéant aux cautions et garanties, aux modalités de résiliation, aux modes de règlement des litiges et aux autres conditions contractuelles, dont la liste et le contenu sont fixés par décret en Conseil d'Etat.
Dans le cas d'une vente aux enchères publiques telle que définie par le premier alinéa de l'article L. 321-3 du code de commerce, les informations relatives à l'identité et aux coordonnées postales, téléphoniques et électroniques du professionnel prévues au 4° de l'article L. 111-1 peuvent être remplacées par celles du mandataire.'
L'article L. 111-1 dispose qu' : 'Avant que le consommateur ne soit lié par un contrat de vente de biens ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations suivantes :
1° Les caractéristiques essentielles du bien ou du service, compte tenu du support de communication utilisé et du bien ou service concerné ;
2° Le prix du bien ou du service, en application des articles L. 112-1 à L. 112-4 ;
3° En l'absence d'exécution immédiate du contrat, la date ou le délai auquel le professionnel s'engage à livrer le bien ou à exécuter le service ;
4° Les informations relatives à son identité, à ses coordonnées postales, téléphoniques et électroniques et à ses activités, pour autant qu'elles ne ressortent pas du contexte ;
5° S'il y a lieu, les informations relatives aux garanties légales, aux fonctionnalités du contenu numérique et, le cas échéant, à son interopérabilité, à l'existence et aux modalités de mise en 'uvre des garanties et aux autres conditions contractuelles ;
6° La possibilité de recourir à un médiateur de la consommation dans les conditions prévues au titre Ier du livre VI.
La liste et le contenu précis de ces informations sont fixés par décret en Conseil d'Etat.
Les dispositions du présent article s'appliquent également aux contrats portant sur la fourniture d'eau, de gaz ou d'électricité, lorsqu'ils ne sont pas conditionnés dans un volume délimité ou en quantité déterminée, ainsi que de chauffage urbain et de contenu numérique non fourni sur un support matériel. Ces contrats font également référence à la nécessité d'une consommation sobre et respectueuse de la préservation de l'environnement.'
L'article L. 111-2 ajoute : 'Outre les mentions prévues à l'article L. 111-1, tout professionnel, avant la conclusion d'un contrat de fourniture de services et, lorsqu'il n'y a pas de contrat écrit, avant l'exécution de la prestation de services, met à la disposition du consommateur ou lui communique, de manière lisible et compréhensible, les informations complémentaires relatives à ses coordonnées, à son activité de prestation de services et aux autres conditions contractuelles, dont la liste et le contenu sont fixés par décret en Conseil d'Etat.
Les informations complémentaires qui ne sont communiquées qu'à la demande du consommateur sont également précisées par décret en Conseil d'Etat.'
Par ailleurs, l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016, entrée en vigueur le 1er juillet 2016, a ajouté à l'article L. 111-1 du code de la consommation l'obligation précontractuelle du professionnel d'informer le consommateur de ' La possibilité de recourir à un médiateur de la consommation dans les conditions prévues au titre Ier du livre VI'.
Il incombe en conséquence au professionnel de communiquer au consommateur, de manière lisible et compréhensible, un certain nombre d'informations pour lui permettre de conclure en connaissance de cause et pour utiliser correctement le produit ou bénéficier du service, et de rapporter la preuve de la régularité du contrat au regard des mentions légales devant y figurer à peine de nullité.
Relève des caractéristiques essentielles du bien ou du service, la marque du bien ou du service faisant l'objet du contrat (24 janvier 2024, n° 21-20.691).
En l'espèce, la commande du 5 février 2019 porte sur l'installation d'un kit de 10 panneaux photovoltaïques d'une puissance de 300 Watts, sur des micro-onduleurs, sur un compteur régulateur et sur un chauffe-eau thermodynamique.
Il est constaté que le bon de commande porte mention d'une batterie de stockage 'ENPHASE', d'une centrale photovoltaïque 'RECOM ou équivalent' et d'un chauffe-eau thermodynamique 'de marque ARISTON ou équivalent', alors que sur la facture acquittée du 27 février 2019 figurent une centrale solaire photovoltaïque 'La Francilienne' et un ballon thermodynamique de marque AIRWELL.
Aucune marque ne se trouve indiquée s'agissant des micro-onduleurs et du compteur régulateur.
En outre, s'il figure dans la commande une mention manuscrite selon laquelle la date prévue de livraison est de '3 à 8 semaines', cette indication n'est pas suffisante pour répondre aux exigences de l'article L. 111-1, 3° du code de la consommation dès lors qu'il n'est pas distingué entre le délai des opérations matérielles de livraison et d'installation des biens, et celui d'exécution des autres prestations auxquelles le vendeur s'est engagé contractuellement (câbles et connectiques, intégration aux bâtis, démarches administratives, mise en conformité consuel).
Par ailleurs, il est constaté que le bon de commande ne comporte aucune mention relative à la possibilité de recourir à un médiateur de la consommation.
Compte-tenu de ces éléments, la vente encourt la nullité, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres irrégularités du contrat de vente invoquées par les époux [S].
Sur la confirmation de la nullité
La SA Domofinance fait valoir que la signature du bon de commande a emporté connaissance des conditions générales de vente y figurant, permettant ainsi aux époux [S] de se rendre compte de toute éventuelle non conformité au code de la consommation. Elle indique qu'en exécutant volontairement le contrat, les intimés ont couvert toute éventuelle cause de nullité.
M. et Mme [S] soutiennent que les irrégularités dénoncées sont d'ordre public, de sorte que la nullité qui en résulte n'est pas susceptible de confirmation. Ils ajoutent qu'étant des consommateurs profanes, ils n'ont pas pu ratifier la nullité affectant le bon de commande.
Réponse de la cour :
La violation du formalisme prescrit par les dispositions du code de la consommation, qui a pour finalité la protection des intérêts de l'acquéreur démarché, est sanctionnée par une nullité relative à laquelle il peut renoncer par une exécution volontaire de son engagement irrégulier, la confirmation tacite d'un acte nul étant subordonnée à la double condition que son auteur ait eu connaissance du vice l'affectant et qu'il ait eu l'intention de le réparer.
Sur ce point, il est désormais jugé que la reproduction même lisible des dispositions du code de la consommation prescrivant le formalisme applicable à un contrat conclu hors établissement ne permet pas au consommateur d'avoir une connaissance effective du vice résultant de l'inobservation de ces dispositions et de caractériser la confirmation tacite du contrat.
En l'espèce, la cour constate que les conditions générales figurant au verso du bon de commande reprennent des dispositions du code de la consommation qui n'étaient plus applicables à la date de conclusion de la vente.
Par ailleurs, aucune pièce ne démontre que les époux [S] ont pu avoir conscience des irrégularités affectant le bon de commande au moment de sa souscription ou de son exécution.
Ainsi, le défaut d'exercice de la faculté de rétractation, la signature de l'attestation de fin de travaux et le remboursement des échéances du prêt, ne sauraient être interprétés comme une confirmation tacite de l'obligation entachée de nullité.
Compte-tenu de ces éléments, desquels il ressort que le bon de commande du 5 février 2019 se trouve affecté d'irrégularités encourant la nullité, et qu'aucune confirmation de l'acte nul n'est caractérisée, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a prononcé la nullité du contrat de vente conclu le 5 février 2019.
La demande de nullité du contrat de vente fondée sur le dol devient ainsi sans objet, et le jugement sera confirmé en ce qu'il met à la charge de la liquidation judiciaire de la société Solution Eco Energie de procéder à l'enlèvement de l'installation litigieuse et la remise en état de l'immeuble.
III. Sur la nullité du contrat de crédit affecté
M. et Mme [S] font valoir qu'en raison de l'interdépendance des contrats, l'annulation du contrat principal conclu avec la société Solution Eco Energie emporte annulation de plein droit du contrat accessoire de crédit conclu avec la société Domofinance.
La SA Domofinance rétorque qu'en raison de l'absence de déclaration de créance, l'irrecevabilité de la demande formée à l'encontre du mandataire liquidateur du vendeur pour le contrat principal entraîne celle formée à son encontre pour le contrat de crédit.
Réponse de la cour :
Il ressort de l'article L. 312-55 du code de la consommation que le contrat de crédit est résolu ou annulé de plein droit lorsque le contrat en vue duquel il a été conclu est lui même judiciairement résolu ou annulé.
En l'espèce, la fin de non-recevoir tirée du défaut de déclaration de créance étant rejetée, le contrat de crédit affecté souscrit par les époux [S] auprès de la SA Domofinance le 5 février 2019 est donc résolu, de sorte que le jugement entrepris sera confirmé sur ce point.
IV. Sur les conséquences de la nullité des contrats
Les époux [S] soutiennent que la banque a commis une faute engageant sa responsabilité contractuelle et la privant de sa créance de restitution en libérant les fonds sans procéder à des vérifications sur la régularité formelle du contrat principal, et en ne s'assurant pas de l'exécution complète et correcte du contrat. Ils sollicitent en conséquence la condamnation de la société Domofinance à leur verser la somme de 15 211,27 euros correspondant aux montants réglés se composant du principal à hauteur de 12 093,72 euros, et des intérêts de 3 117,55 euros. Ils demandent également une somme de 5 000 euros en réparation de leur préjudice consistant en la perte de chance de ne pas contracter avec la société venderesse ou d'exercer leur droit de rétractation, ainsi qu'une somme de 3 000 euros à titre de préjudice moral.
La société Domofinance s'oppose aux demandes en indiquant qu'il ne lui appartenait pas de s'assurer de la conformité du bon de commande au code de la consommation, et qu'elle se trouvait fondée à débloquer les fonds sur la base de l'attestation de fin de travaux. Elle rappelle que la perte d'une chance ne peut jamais donner lieu à la réparation intégrale du préjudice, et demande subsidairement, dans l'hypothèse où la nullité des contrats serait prononcée, la condamnation des emprunteurs à lui rembourser la somme de 29 900 euros.
Réponse de la cour :
En ne relevant pas les irrégularités affectant le bon de commande au regard des dispositions protectrices du code de la consommation et en manquant d'avertir les emprunteurs qu'ils s'engageaient dans une relation préjudiciable, la SA Domofinance, spécialiste de la distribution du crédit affecté dans le cadre de contrats conclus hors établissements, a commis une faute.
Cependant, le seul fait pour le prêteur d'avoir commis un tel manquement est insuffisant pour le priver de sa créance de restitution, et il appartient à l'emprunteur d'établir que cette faute lui a causé un préjudice actuel et certain, qui constitue la mesure de la privation du droit à restitution du capital.
Si, en principe, à la suite de l'annulation de la vente, l'emprunteur obtient du vendeur la restitution du prix, de sorte que l'obligation de restituer le capital à la banque ne constitue pas, en soi, un préjudice réparable, il en va différemment lorsque, comme en l'espèce, le vendeur est en liquidation judiciaire. En effet, dans une telle hypothèse, compte tenu de l'annulation du contrat de vente, l'emprunteur n'est plus propriétaire de l'installation qu'il avait acquise, laquelle doit pouvoir être restituée au vendeur ou retirée pour éviter des frais d'entretien ou de réparation, alors que l'impossibilité pour l'emprunteur d'obtenir la restitution du prix est, selon le principe d'équivalence des conditions, une conséquence de la faute de la banque dans l'examen du contrat principal.
Ainsi, lorsque la restitution du prix à laquelle le vendeur est condamné, par suite de l'annulation du contrat de vente ou de prestation de service, est devenue impossible du fait de l'insolvabilité du vendeur ou du prestataire, l'emprunteur, privé de la contrepartie de la restitution du bien vendu, justifie d'une perte subie équivalente au montant du crédit souscrit pour le financement du prix du contrat de vente ou de prestation de service annulé en lien de causalité avec la faute de la banque.
La banque étant ainsi privée de son droit à restitution du capital à proportion du montant du crédit souscrit, et le crédit n'ayant été remboursé que partiellement, il en résulte que les époux [S] sont légitimes à obtenir de l'organisme financier qu'il leur verse une somme équivalente au montant du capital d'ores et déjà remboursé, augmentée des intérêts et frais versés, dont la restitution constitue quant à elle la conséquence de la nullité du contrat de financement.
Au final, la société Domofinance sera condamnée à payer aux intimés la somme de 15 211,27 euros correspondant au montant total réglé par les emprunteurs au titre du prêt, tel qu'arrêté à la date du 5 novembre 2024.
Le jugement déféré sera infirmé sur le quantum pour tenir compte de cette actualisation.
S'il ressort des motifs des écritures des époux [S] qu'ils sollicitent une somme de 3 000 euros en réparation du préjudice moral qu'ils estiment avoir subi du fait de l'attitude de l'organisme financier, il ne ressort toutefois pas du dispositif de leurs dernières conclusions, qui seul saisit la cour en application de l'article 954 du code de procédure civile, que le rejet de cette demande fasse l'objet d'une demande d'infirmation. La confirmation s'impose donc de ce chef.
V. Sur la garantie de la société Solution Eco Energie
La SA Domofinance demande, dans l'hypothèse d'une faute retenue à son encontre dans le versement des fonds, que la somme de 29 900 euros soit fixée au passif du vendeur.
Réponse de la cour :
La demande est formée par la société Domofinance aux fins de voir couvrir par le vendeur la seule perte du capital financé, à l'exclusion des frais et intérêts perdus.
Or, si la restitution des frais et intérêts résulte de l'annulation du contrat de crédit à titre accessoire, du fait de l'annulation du contrat de vente imputable au fournisseur, la privation du droit à la restitution du capital est quant à elle la résultante de la faute personnellement commise par la société Domofinance elle-même dans le déblocage des fonds, de sorte que rien ne justifie qu'elle soit garantie des conséquences de sa propre faute par le vendeur.
Ajoutant au jugement, cette demande sera donc rejetée.
VI. Sur les dépens et sur l'article 700 du code de procédure civile
Le jugement entrepris sera confirmé sur les dépens et sur les frais irrépétibles.
La SA Domofinance sera condamnée aux dépens d'appel, ainsi qu'à payer aux époux [S] la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant par arrêt réputé contradictoire, après débats en audience publique,
INFIRME le jugement rendu le 27 février 2024 par le juge des contentieux de la protection de [Localité 6] en ce qu'il a condamné la SA Domofinance à rembourser à M. [I] [S] et Mme [B] [H] épouse [S] les sommes déjà perçues par la banque à savoir la somme de 11 753,18 euros arrêtée au 5 juin 2023 ;
CONFIRME le jugement déféré pour le surplus ;
STATUANT A NOUVEAU DU CHEF INFIRME, ET AJOUTANT
CONDAMNE la SA Domofinance à rembourser à M. [I] [S] et Mme [B] [H] épouse [S] la somme de 15 211,27 euros correspondant au montant total réglé au titre du prêt, arrêté à la date du 5 novembre 2024 ;
REJETTE la demande formée par la SA Domofinance aux fins de fixation d'une somme de 29 900 euros au passif de la procédure collective de la SAS Solution Eco Energie ;
CONDAMNE la SA Domofinance aux dépens d'appel ;
CONDAMNE la SA Domofinance à payer à M. [I] [S] et Mme [B] [H] épouse [S] la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Ledit arrêt a été signé par Michel Wachter, président de chambre, magistrat ayant participé au délibéré et Fabienne Arnoux, greffier.