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Décisions

CA Versailles, ch. civ. 1-2, 1 juillet 2025, n° 24/00446

VERSAILLES

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

X

Défendeur :

Domofinance (SA), Ineo Tertiaire IDF (SNC)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Javelas

Conseillers :

Mme Thivellier, Mme de Larminat

Avocats :

Me Baudin, Me Boulaire, Me Karm, Me Mendes Gil, Me Fajri, Me Mze, Me Varenne

JCP [Localité 10], du 28 nov. 2023, n° 1…

28 novembre 2023

EXPOSE DU LITIGE

Par contrat du 9 mai 2009, M. [J] a acheté un kit solaire photovoltaïque 2 000 Wc, comprenant 10 panneaux de 200 Wc, 1 onduleur, une structure mécanique, des câbles et connecteurs, un raccordement au réseau jusqu'à 700 euros compris, pour un prix total de 21 490 euros toutes taxes comprises.

Afin de financer cette acquisition, M. [J] a contracté un prêt auprès de la société Domofinance le 24 juillet 2009, pour un montant de 20 090 euros sur 149 mois.

Le 31 juillet 2009, à la suite de l'installation des panneaux photovoltaïques, M. [J] a signé un « appel de fonds » demandant à la société Domofinance d'adresser le chèque de 20090 euros à la société Ineo Tertiaire IDF.

Les travaux ont été facturés le 10 août 2009.

M. [J] a ensuite conclu avec la société EDF un contrat d'achat photovoltaïque par lequel la société EDF rachète l'électricité produite par les panneaux solaires.

Par actes de commissaire de justice délivrés le 9 octobre 2020 et le 15 octobre 2020, M. et Mme [J] ont assigné la société Domofinance et la société Ineo Tertiaire IDF devant le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité d'Asnières aux fins de voir :

- prononcer la nullité du contrat de prêt affecté conclu entre eux la société Ineo Tertiaire IDF,

- constater et en tant que besoin prononcer la nullité du contrat de prêt affecté conclu entre eux et la société Domofinance,

- dire et juger que la société Ineo Tertiaire IDF devra leur restituer l'intégralité du prix de vente de l'installation, à savoir la somme de 20 090 euros,

- condamner solidairement la société Ineo Tertiaire IDF et la société Domofinance à leur verser les sommes suivantes :

* 20 090 euros, correspondant à l'intégralité du prix de vente de l'installation,

* une somme à parfaire correspondant aux intérêts conventionnels et frais qu'ils ont payés à la société Domofinance en exécution du prêt souscrit,

* 10 000 euros au titre de l'enlèvement de l'installation, et de la remise en état de l'immeuble, évaluation qui sera faite de manière plus précise et sur devis en cours de procédure,

* 5 000 euros au titre du préjudice moral,

* 3 600 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- dire et juger que la société Domofinance sera privée, de sa créance de restitution du capital emprunté,

- condamner solidairement la société Ineo Tertiaire IDF et la société Domofinance à supporter les dépens de l'instance

Par jugement contradictoire du 28 novembre 2023, le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité d'Asnières-sur-Seine a :

- déclaré M. et Mme [J] irrecevables en leurs demandes, car prescrites,

- condamné M. et Mme [J] aux dépens,

- dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,

- rappelé que l'exécution provisoire est de droit.

Par déclaration reçue au greffe le 18 janvier 2024, M. et Mme [J] ont relevé appel de ce jugement.

Aux termes de leurs dernières conclusions signifiées le 3 mars 2025, M. et Mme [J], appelants, demandent à la cour de :

- infirmer le jugement entrepris purement et simplement,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

- déclarer leurs demandes recevables et bien fondées,

- prononcer la nullité du contrat de vente conclu entre la société Ineo Tertiaire IDF et eux,

- prononcer la nullité du contrat de prêt affecté conclu entre eux et la société Domofinance,

- condamner la société Ineo Tertiaire IDF à leur restituer la somme de 20 090 euros correspondant au prix de vente du contrat de vente litigieux,

- condamner la société Ineo Tertiaire IDF au retrait de l'installation et à la remise en état de l'immeuble, à ses frais, dans le délai de 2 mois à compter de la signification de la décision à intervenir, le tout sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter de la fin de ce délai de 2 mois,

- déclarer que la société Domofinance a commis une faute à leur préjudice, devant entraîner la privation de sa créance de restitution,

- condamner la société Domofinance à leur verser les sommes suivantes'au titre des fautes commises :

* 20 090 euros'correspondant au montant du capital emprunté, en raison de la privation de sa créance de restitution,

* 12 272,56 euros correspondant aux intérêts conventionnels et frais qu'ils ont payé à la société Domofinance en exécution du prêt souscrit,

- condamner solidairement et en tout état de cause la société Ineo Tertiaire IDF et la société Domofinance à leur verser les sommes suivantes':

* 5 000 euros au titre du préjudice moral,

* 6 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

En tout état de cause,

- prononcer la déchéance du droit aux intérêts contractuels à l'encontre de la société Domofinance,

- condamner la société Domofinance à leur rembourser l'ensemble des intérêts versés au titre de l'exécution normale du contrat de prêt jusqu'à parfait paiement et lui enjoindre de produire un nouveau tableau d'amortissement expurgés desdits intérêts,

- débouter la société Domofinance et la société Ineo Tertiaire IDF de l'intégralité de leurs prétentions, fins et conclusions plus amples ou contraires aux présentes,

- condamner solidairement la société Ineo Tertiaire IDF et la société Domofinance à supporter les entiers frais et dépens.

Aux termes de ses dernières conclusions signifiées le 6 mars 2025, la société Domofinance, intimée, demande à la cour de :

- confirmer le jugement rendu par le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité d'Asnières-sur-Seine le 28 novembre 2023 en ce qu'il a déclaré irrecevables M. et Mme [J], en leurs demandes ; en ce qu'il a condamné M. et Mme [J] aux dépens ; en ce qu'il a débouté M. et Mme [J], de leurs demandes plus amples ou contraires,

Statuant à nouveau sur les chefs critiqués et sur les demandes des parties,

A titre principal,

- déclarer irrecevables l'action et l'ensemble des demandes formées par M. et Mme [J], au vu de la prescription quinquennale ; rejeter toutes autres demandes dont le bien-fondé dépend de celles prescrites,

- à défaut, déclarer irrecevable la demande de M. et Mme [J], en nullité du contrat conclu avec la société Ineo Tertiaire IDF ; déclarer, par voie de conséquence, irrecevable la demande de M. et Mme [J] , en nullité du contrat de crédit conclu avec elle, dire et juger à tout le moins que les demandes de nullité des contrats ne sont pas fondées ; débouter M. et Mme [J] de leur demande en nullité du contrat conclu avec la société Ineo Tertiaire IDF, ainsi que de leur demande en nullité du contrat de crédit conclu avec elle et de leur demande en restitution des mensualités réglées,

- déclarer irrecevable la demande visant au prononcé de la déchéance du droit aux intérêts contractuels ; dire et juger à tout le moins qu'elle n'est pas fondée ; la rejeter,

Subsidiairement, en cas de nullité des contrats,

- déclarer irrecevable la demande de M. et Mme [J], visant à la décharge de l'obligation de restituer le capital prêté, à tout le moins les en débouter ;

- condamner, en conséquence, M. [J] à lui régler la somme de 20 090 euros en restitution du capital prêté,

- débouter M. et Mme [J], de leurs demandes de sa condamnation à leur régler les sommes de 20 090 euros et de 12 272,56 euros qui ne correspondent pas aux sommes qu'ils ont réglées,

- limiter la restitution des mensualités réglées aux sommes effectivement réglées par les emprunteurs,

en tout état de cause,

- déclarer irrecevables les demandes de M. et Mme [J], visant à la privation de sa créance, ainsi que leurs demandes de dommages et intérêts,

- à tout le moins, les débouter de leurs demandes,

très subsidiairement,

- limiter la réparation qui lui serait due eu égard au préjudice effectivement subi par l'emprunteur à charge pour lui de l'établir et eu égard à la faute de l'emprunteur ayant concouru à son propre préjudice,

- limiter, en conséquence, la décharge à concurrence du préjudice subi à charge pour M. [J] d'en justifier ; en cas de réparation par voie de dommages et intérêts,

- limiter la réparation à hauteur du préjudice subi, et dire et juger que M. [J] reste tenu de restituer l'entier capital à hauteur de 20 090 euros,

à titre infiniment subsidiaire, en cas de privation de sa créance,

- condamner M. [J] à lui payer la somme de 20 090 euros correspondant au capital perdu à titre de dommages et intérêts en réparation de sa légèreté blâmable,

- enjoindre à M. [J] de restituer, à ses frais, le matériel installé à la société Ineo Tertiaire IDF, dans un délai de 15 jours à compter de la signification de l'arrêt,

- dire et juger qu'à défaut de restitution, M. [J] restera tenu au remboursement/ restitution du capital prêté ; subsidiairement, priver M. [J] de sa créance en restitution des sommes réglées du fait de sa légèreté blâmable,

- dire et juger, en tout état de cause, en cas de nullité des contrats, que la société Ineo Tertiaire IDF est garante de la restitution du capital prêté, ce qui n'exonère toutefois pas l'emprunteur de son obligation lorsqu'il n'en a pas été déchargé,

- condamner, en conséquence, la société Ineo Tertiaire IDF à garantir la restitution de l'entier capital prêté, et donc à lui payer la somme de 20 090 euros au titre de la créance en garantie de la restitution du capital prêté outre le paiement de la somme de 8 312,08 euros correspondant aux intérêts perdus,

subsidiairement, si la cour ne devait pas faire droit à la demande de garantie de restitution du capital prêté ou n'y faire droit que partiellement,

- condamner la société Ineo Tertiaire IDF à lui payer la somme de 20 090 euros, ou le solde, sur le fondement de la répétition de l'indu, et à défaut sur le fondement de la responsabilité ;

- condamner, par ailleurs, la société Ineo Tertiaire IDF au paiement des intérêts perdus du fait de l'annulation des contrats, et donc à lui payer la somme 8 312,08 euros à ce titre,

en tout état de cause,

- condamner la société Ineo Tertiaire IDF à la garantir de toute condamnation qui serait prononcée à son encontre vis-à-vis de M. et Mme [J] ;

- en conséquence, en cas de décharge de l'obligation de l'emprunteur sur le fondement de la responsabilité de la banque,

- condamner la société Ineo Tertiaire IDF à lui régler la somme de 28 402,08 euros dans la limite toutefois de la décharge prononcée,

- débouter M. et Mme [J], de toutes demandes, fins et conclusions,

- débouter la société Ineo Tertiaire IDF de ses demandes à son encontre,

- ordonner le cas échéant la compensation des créances réciproques à due concurrence,

en tout état de cause,

- condamner in solidum M. et Mme [J], à lui payer la somme de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles d'appel sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- les condamner in solidum aux entiers dépens de première instance et d'appel avec distraction au profit de la SCP Mery Renda Karm Genique.

Aux termes de ses conclusions signifiées le 7 mars 2025, la société Ineo Tertiaire IDF, intimée, demande à la cour de :

A titre principal,

- confirmer le jugement rendu par le juge des contentieux de la protection près le tribunal de proximité d'Asnières du 28 novembre 2023 en ce qu'il a :

* déclaré M. et Mme [J] irrecevables en leurs demandes, car prescrites,

* condamné M. et Mme [J] aux dépens,

* rappelé que l'exécution provisoire est de droit,

A défaut de déclarer l'action de M. et Mme [J] prescrite,

- déclarer M. et Mme [J] irrecevables en leurs demandes pour défaut de qualité et d'intérêt à agir,

- déclarer irrecevable la prétention nouvelle formulée par M. et Mme [J], tenant à la voir condamnée 'au retrait de l'installation et à la remise en état de l'immeuble, à ses frais, dans le délai de 2 mois à compter de la signification de la décision à intervenir, le tout sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter de la fin de ce délai de 2 mois',

A titre subsidiaire, si par extraordinaire la cour venait à infirmer le jugement dont appel et, statuant à nouveau, déclarer l'action de M. et Mme [J] recevable,

- débouter M. et Mme [J] de toutes leurs demandes, le contrat de vente étant valable tant au regard de l'ancien article L.121-23 du code de la consommation que des dispositions du code civil sur le dol,

A titre très subsidiaire, si par extraordinaire la cour venait à infirmer le jugement dont appel et déclarer nul le contrat de vente,

- débouter M. et Mme [J] de toutes leurs demandes, le contrat de vente ayant été confirmé du fait de son exécution volontaire en toute connaissance de cause par M. et Mme [J],

A titre infiniment subsidiaire, si par impossible la cour venait à infirmer le jugement dont appel et déclarer le contrat de vente nul et non confirmé,

- limiter sa condamnation à restituer à M. et Mme [J] la somme de 20 090 euros correspondant au prix de vente des panneaux photovoltaïques,

- débouter M. et Mme [J] de leur demande tendant au retrait de l'installation photovoltaïque à ses frais,

- condamner, in solidum, M. et Mme [J] à lui reverser les sommes perçues entre 2009 et 2025 inclus grâce à la vente de l'électricité produite par les panneaux photovoltaïques, qui s'élèvent à la somme provisoire de 8 673,19 euros, à parfaire à la date d'exécution de l'arrêt à venir,

- ordonner la compensation entre, d'une part, les sommes qui lui sont dues par M. et Mme [J] au titre des fruits procurés par les panneaux photovoltaïques et d'autre part, la somme de 20 090 euros due par elle à M. et Mme [J] en restitution du prix de vente des panneaux photovoltaïques,

- débouter M. et Mme [J] de leurs demandes de condamnation solidaire d'elle et de la société Domofinance au titre d'un prétendu préjudice moral,

- débouter la société Domofinance de l'ensemble de ses demandes visant à la condamner,

En tout état de cause,

- condamner M. et Mme [J], in solidum, à lui verser la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,

- condamner M. et Mme [J], in solidum, à lui verser la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner M. et Mme [J], in solidum, aux entiers dépens de l'instance dont distraction au profit de la LX Avocats, conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

La clôture a été prononcée par ordonnance du 11 mars 2025.

Conformément à l'article 455 du code de procédure civile, pour plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens soutenus par les parties, la cour se réfère à leurs écritures et à la décision déférée.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la recevabilité des demandes des époux [J]

Les époux [J] font grief au premier juge d'avoir déclaré leurs demandes irrecevables motif pris de leur prescription en retenant la date de la signature du contrat comme point de départ de la prescription.

Poursuivant l'infirmation du jugement et sollicitant la nullité des contrats de vente et de crédit affecté sur le double fondement du dol et du non-respect des dispositions du code de la consommation, ils font valoir que :

- en application de l'article 2224 du code civil auquel les actions en responsabilité et en nullité sont soumises, le point de départ de la prescription n'est pas fixé au jour des faits susceptibles de fonder une action en justice, mais à la date à laquelle le titulaire du droit d'agir les a connus ou aurait dû les connaître ;

- pour fixer le point de départ d'une action en responsabilité d'un consommateur pour faute de la banque, il convient de déterminer à quel moment le créancier titulaire du droit d'agir a eu connaissance non seulement du préjudice subi dans toute son ampleur mais encore du fait générateur de responsabilité ;

- s'agissant de la connaissance du dommage qui consiste dans le fait d'avoir été engagée dans une opération désavantageuse sur la base de fausses promesses, ils relèvent que l'appréciation de la rentabilité d'une installation censée produire une économie d'énergie sur plusieurs années suppose du recul et qu'en l'espèce, leurs craintes d'une absence complète d'autofinancement et de rentabilité de leur installation ne se sont véritablement confirmées qu'après plusieurs années de production et après la consultation d'un avocat ;

- s'agissant de la connaissance du fait générateur consistant dans le fait, pour le banquier, d'avoir commis une faute dans le déblocage des fonds en manquant à son devoir d'information et d'alerte, encore fallait-il, pour percevoir la matérialité de cette faute, qu'ils eussent eu, au préalable, connaissance des faits sur lesquels la banque devait précisément les alerter ; que tel n'est pas le cas s'agissant d'une consommatrice de crédit ; que si la loi impose à la banque de vérifier la régularité du bon de commande avant le déblocage des fonds, c'est précisément parce qu'il est admis qu'un consommateur normalement diligent ne peut identifier les irrégularités que l'instrumentum pourrait renfermer ; que, tant en droit interne qu'au regard du droit de l'Union européenne, le principe d'effectivité commande d'écarter un régime de prescription qui serait basé sur une présomption de connaissance parfaite par le consommateur des irrégularités renfermées dans le contrat et ce dès sa signature ; qu'ainsi, le point de départ de la prescription s'entend de la connaissance effective des faits ; qu'en application de ces principes, ils ont légitiment ignoré les faits leur permettant d'agir, notamment la faute de la banque, et que ce n'est qu'après avoir consulté un avocat que leur attention a été attirée sur cette faute;

- s'agissant d'une irrégularité d'une mention obligatoire absente du contrat, on ne peut pas considérer que le consommateur serait en faute de ne pas l'avoir détectée, dès la signature, puisque cela ne résulte pas d'une simple lecture de l'acte mais d'une analyse approfondie d'un professionnel comme l'a rappelé la Cour de cassation dans le cadre des erreurs commises en matière de taux effectif global (TEG) en indiquant que le point de départ de la prescription n'est fixé à la date d'acceptation de l'offre par l'emprunteur qu'à la condition qu'il soit en mesure de déceler l'irrégularité par lui-même, et que celle-ci ressorte de la seule lecture de l'acte, ce qui n'est pas le cas en l'espèce, d'autant plus que leur ignorance a été entretenue par la carence de la banque qui ne les en a pas avisés ;

- ils n'étaient pas en mesure de déterminer, au moment de la signature du bon de commande, l'existence d'irrégularités et il appartient à la société Domofinance d'apporter la preuve de sa connaissance de ces irrégularités, dès la signature du contrat, ce qu'elle ne fait pas ;

- la Cour de cassation, dans un arrêt du 24 janvier 2024, opérant un revirement de jurisprudence, a considéré que la reproduction, même lisible, des dispositions du code de la consommation prescrivant le formalisme applicable à un contrat conclu hors établissement, ne permettait pas au consommateur d'avoir une connaissance effective du vice résultant de l'inobservation de ces dispositions et de caractériser la confirmation tacite du contrat ; que dès lors, le premier juge ne pouvait retenir comme point de départ du délai de prescription, pour les irrégularités formelles, la date de la signature du contrat, motif pris de ce que celui-ci reproduisait les articles applicables du code de la consommation.

Les époux [J], sans formuler aucun moyen en réponse à la demande d'irrecevabilité formée par la banque, demandent, enfin, à la cour de prononcer la déchéance du droit aux intérêts et de condamner la société Domofinance à leur rembourser l'ensemble des intérêts versés, aux motifs que la banque a manqué à son obligation de conseil et à son devoir de mise en garde prévus par l'article L. 312-14 du code de la consommation et ne justifie ni de la consultation du FICP, ni que le crédit a été distribué par un professionnel qualifié, compétent donc formé, dont la société Ineo Tertiaire IDF est responsable en application des dispositions des articles L. 546-1, L. 311-8 et D. 311-4-3 du code de la consommation.

La société Ineo Tertiaire IDF, qui conclut à la confirmation du jugement et à l'irrecevabilité des demandes en raison de leur prescription, mais également du défaut de qualité et d'intérêt à agir des époux [J] fait valoir en substance que :

- les développements des époux [J] sont relatifs aux actions en responsabilité contractuelle et ne lui sont donc pas opposables, l'action qu'ils ont diligentée à son encontre étant une action en nullité ;

- s'agissant de l'action en nullité sur le fondement d'irrégularités formelles du contrat de vente, pour inobservation de l'ancien article L.121-23 du code de la consommation:

* le délai de prescription court à compter de la signature du contrat, date à laquelle le cocontractant est en mesure de connaître l'irrégularité et d'agir en nullité du contrat, la qualité de consommateur profane de l'acheteur n'ayant aucune incidence ; qu'il importe également que l'acte comporte ou non la reproduction des dispositions du code de la consommation, dès lors que nul n'est censé ignorer la loi ; qu'au surplus, celles-ci étaient reprises au dos du bon de commande ;

* l'arrêt cité par l'appelante (24 janvier 2024) concerne la confirmation d'un acte nul et non la prescription dont les conditions d'application sont différentes, dans la mesure où en matière de prescription, la connaissance qui fait courir le délai s'applique aux faits qui permettent d'exercer l'action et qu'elle s'apprécie in abstracto au jour où il aurait dû connaître les faits compte tenu de l'impératif de sécurité juridique et de force obligatoire des contrats, alors qu'en matière de confirmation, la connaissance nécessaire s'applique à la cause de la nullité, le consommateur devant avoir une connaissance effective du vice, ce qui implique une appréciation in concreto ;

* l'arrêt cité par les appelants concernant le [14] ne remet pas en cause le point de départ du délai de prescription dans la mesure où le report de ce point de départ est autorisé lorsque l'erreur n'était pas décelable au jour du contrat car nécessitant une expertise, ce qui n'est pas applicable au cas d'espèce dès lors que dès sa signature, les époux [J] étaient en mesure de constater que les mentions impératives n'y figuraient pas en totalité ou partiellement, et donc de déceler l'irrégularité du contrat fondant leur action en nullité, ajoutant que la jurisprudence européenne ne remet pas en cause la prescription de son action ;

- s'agissant de l'action en nullité fondée sur le dol portant sur la rentabilité de l'opération, le point de départ du délai de prescription est fixé, au plus tard, à la réception de la première facture de revente d'électricité, date à laquelle le défaut de rentabilité allégué était nécessairement connu de l'acquéreur, de sorte que l'action des époux [J] sur ce fondement est prescrite ; qu'ils ne justifient pas des éléments établissant qu'ils n'ont eu connaissance du dol ou n'ont été en mesure de le connaître que postérieurement à la conclusion du contrat, dès lors qu'ils n'ont émis aucune contestation quant à la production d'électricité de leur installation et qu'ils ne justifient d'aucune discordance entre la rentabilité promise et celle effective, aucune rentabilité n'ayant été promise; qu'à titre surabondant, la première facture a été émise le 27 juillet 2011, que cette facture, d'un montant de 1 009,20 euros, était supérieure au total des échéances du prêt à rembourser pour la période considérée, et que les époux [J] ayant eu connaissance des sommes leur revenant dès 2011, leur action est également prescrite sur le fondement du dol ;

- les époux [J] n'ont ni intérêt ni qualité pour agir en raison du fait que seul M. [J] est signataire du bon de commande et du contrat de prêt, et que les époux [J] ont vendu le pavillon sur le toit duquel les panneaux photovoltaïques ont été installés.

Enfin, la société Ineo Tertiaire conclut à l'irrecevabilité de la demande formulée par M. et Mme [J], tenant à la voir condamnée 'au retrait de l'installation et à la remise en état de l'immeuble, à ses frais, dans le délai de 2 mois à compter de la signification de la décision à intervenir, le tout sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter de la fin de ce délai de 2 mois, en arguant du caractère nouveau de cette prétention, au sens de l'article 564 du code de procédure civile.

La société Domofinance, qui poursuit également la confirmation du jugement déféré, fait valoir que :

- l'action engagée par les époux [J] est une action en nullité du contrat, nullité sur le fondement de laquelle ils entendent ensuite engager sa responsabilité, de sorte que les principes relatifs aux actions en responsabilité ne s'appliquent pas à cette action ;

- s'agissant de la prescription de l'action en nullité du contrat de vente fondée sur les irrégularités formelles du bon de commande:

* le point de départ du délai de prescription est la signature du contrat de prêt car l'acquéreur était alors en mesure de vérifier la conformité du bon de commande aux dispositions du code de la consommation et de déceler les irrégularités alléguées sans qu'il puisse opposer le fait qu'il ne connaissait pas la réglementation applicable dès lors que 'nul n'est censé ignorer la loi', sauf à rendre l'action imprescriptible ; qu'il importe donc peu que le bon de commande comporte ou non la reproduction des dispositions du code de la consommation ;

* la jurisprudence de la Cour de cassation citée par les appelants (24 janvier 2024) n'est pas applicable à l'espèce, s'agissant de la confirmation d'un acte nul où l'article 1182 du code civil exige la preuve de la connaissance effective de la cause de nullité, tandis que l'article 2224 du code civil exige du titulaire du droit une connaissance effective ou supposée des faits; que de même, la jurisprudence alléguée en matière de TEG n'est pas de nature à remettre en cause ces principes dans la mesure où elle admet le report du point de départ du délai de prescription que lorsque l'erreur n'était pas décelable au moment de la conclusion du contrat car nécessitant une expertise, ce qui n'est pas le cas en l'espèce ;

- s'agissant de la prescription de l'action en nullité pour dol, elle fait valoir que:

* s'il est admis que si le point de départ de la prescription peut être reporté au jour de la découverte des manoeuvres ou la date à laquelle le contractant a pu déceler le vice allégué, encore faut-il que le requérant justifie des éléments de fait qui induisent qu'il n'a eu connaissance du dol ou n'a été en mesure de le connaître que postérieurement à la conclusion du contrat ; en l'espèce, les époux [J] ne justifient nullement qu'ils n'auraient découvert que la quantité d'électricité produite et revendue ne serait pas conforme à ce qui leur avait été annoncé que postérieurement à la souscription du contrat, en ce que le bon de commande ne fait état d'aucune garantie de revenus ou d'autofinancement, de même que les autres pièces contractuelles ; qu'ils peuvent, de ce fait, avoir découvert une différence de rentabilité postérieurement à la conclusion du contrat ; que même à considérer que le point de départ du délai de prescription doive être décalé postérieurement à la souscription du contrat, les époux [J], dès le raccordement de leur installation, avaient connaissance de la quantité d'électricité produite au vu du chiffre mentionné sur leur compteur, de sorte que le point de départ du délai de prescription devrait être décalé à cette date;

- s'agissant de l'action en responsabilité initiée à son encontre, elle fait valoir que:

* cette action n'étant que la conséquence de l'action en nullité du bon de commande, l'irrecevabilité de la demande de nullité des contrats entraîne, par voie de conséquence, l'irrecevabilité de la demande visant à la priver de sa créance en restitution du capital prêté,

* en tout état de cause, cette action est également prescrite ; que le raisonnement des appelants quant à la connaissance du préjudice et du manquement de la banque ne repose sur aucun principe juridique, alors que la jurisprudence constante de la Cour de cassation rappelle que la prescription d'une action en responsabilité court à compter de la réalisation du dommage ou de la date à laquelle il est révélé à la victime, si celle-ci établit qu'elle n'en avait pas eu précédemment connaissance ; que le préjudice consistant dans l'absence d'achèvement de la prestation au moment du déblocage des fonds se manifeste dès le déblocage des fonds, date à laquelle le délai de prescription a commencé à courir ; que les époux [J] ne justifient d'aucun préjudice résultant du déblocage des fonds malgré une irrégularité formelle du contrat ou qui se serait manifesté postérieurement au déblocage des fonds, alors qu'ils ont poursuivi l'exécution des contrats pendant plusieurs années sans contestation ; qu'ils ne sont pas fondés à se prévaloir d'une jurisprudence de la Cour de justice de l'union européenne rendue en matière de prescription dans la mesure où elle n'intervient qu'en cas d'application d'un texte issu d'une directive européenne, ce qui n'est pas le cas de l'action en responsabilité de droit commun y compris dans un litige entre une banque et un consommateur; qu'il s'agit de l'application de règles de droit interne en matière de prescription.

S'agissant, enfin, de la demande de déchéance du droit aux intérêts contractuels, la société Domofinance conclut pareillement à l'irrecevabilité de cette demande. Elle relève qu'aux termes de leurs conclusions d'appel, les époux [J] ont ajouté une nouvelle demande visant au prononcé de la déchéance du droit aux intérêts. Elle fait valoir, sur le fondement de l'article L.( )110-4 du code de commerce et l'article 2224 du code civil, que cette demande est prescrite, car formée plus de 5 ans après la conclusion du prêt.

Réponse de la cour

Aux termes de l'article 2224 du code civil, les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.

* Sur les demandes d'annulation des contrats de vente et de prêt fondées sur un manquement aux dispositions du code de la consommation

Le point de départ du délai de prescription d'une action commence à courir à compter du moment où son auteur a pris connaissance des faits, ou a décelé les erreurs lui permettant de l'exercer.

Au vu du fondement de la demande en nullité du contrat, à savoir le non-respect des prescriptions de l'article L. 121-23 du code de la consommation dans sa version alors applicable, le point de départ de la prescription est la date de l'acte argué de nullité, sauf à ce que les époux [J] démontrent qu'ils étaient dans l'impossibilité d'agir et qu'ils ignoraient l'existence de ses droits.

Les époux [J] ne sauraient, pour administrer une telle preuve et solliciter un report du point de départ de la prescription à la date à laquelle ils ont consulté un avocat, se prévaloir de leur qualité de consommateurs profanes et d'une méconnaissance de la réglementation applicable, alors même que nul n'est censé ignorer la loi et que les irrégularités formelles invoquées, à les supposer avérées, étaient visibles par les intéressés à la date de conclusion du contrat de vente et que les époux [J] étaient donc en mesure d'agir, dès sa signature.

En outre, il sera relevé que la reproduction des dispositions applicables au verso du bon de commande, si elle ne permet pas de rapporter la preuve de la connaissance effective par l'acquéreur des irrégularités formelles entachant le bon de commande, a néanmoins pour conséquence de rendre ces irrégularités décelables au moment de la signature du bon de commande.

Retenir l'argumentation des époux [J] reviendrait, par ailleurs, à voir repousser le point de départ du délai de prescription à une date décidée à leur seule convenance, à savoir celle à laquelle ils ont pu avoir une connaissance effective des conséquences juridiques des irrégularités de pure forme qu'ils invoquent.

Par ailleurs, c'est en vain que les époux [J] entendent se prévaloir de la jurisprudence de la Cour de justice de l'union européenne pour échapper à la prescription quinquennale. En effet, la règle nationale de prescription de l'action est conforme aux principes européens d'effectivité des droits, notamment du consommateur, en ce que d'une part, elle ne fait courir le délai à l'encontre du titulaire d'un droit qu'à partir du moment où il se trouve en possession de tous les éléments lui permettant d'évaluer sa situation au regard de ses droits ; d'autre part en ce qu'elle aménage un délai suffisamment long pour lui permettre de les mettre en 'uvre efficacement.

En outre, le principe d'effectivité des sanctions posé par l'article 23 de la directive 2008.43/CE du 23 avril 2008 n'impose pas à une juridiction nationale d'écarter les règles de prescription internes, et ce dans un souci de sécurité juridique compatible avec le droit communautaire.

De la même manière, les époux [J] ne peuvent utilement invoquer la jurisprudence de la Cour de cassation relative aux erreurs commises en matière de taux effectif global, selon laquelle le point de départ de la prescription quinquennale doit être reporté lorsque l'erreur n'était point décelable lors de la conclusion du contrat, puisque précisément, en l'espèce, les époux [J] étaient en mesure de déceler, lors de la conclusion du contrat de vente litigieux, les irrégularités entachant, selon leurs dires, le bon de commande, sans avoir à se livrer à des calculs ou à une analyse complexe du bon litigieux, ces erreurs résultant du seul constat que certaines mentions prévues par le code de la consommation n'apparaissaient pas sur le bon de commande.

Enfin, ils ne peuvent pas davantage invoquer la jurisprudence de la Cour de cassation issue de son arrêt du 24 janvier 2024 relative à la confirmation d'un acte nul par application de l'article 1182 du code civil, qui juge désormais que la reproduction même lisible des dispositions du code de la consommation prescrivant le formalisme applicable à un contrat conclu hors établissement ne permet pas au consommateur d'avoir une connaissance effective du vice résultant de l'inobservation de ces dispositions, puisque l'article 1182 exige une connaissance effective de la cause de nullité (' en connaissance de la cause de nullité'), alors que l'article 2224 du code civil, applicable à l'espèce, n'exige du titulaire du droit qu'une connaissance effective ou supposée des faits. En effet, le fait permettant d'agir en nullité est l'absence des mentions obligatoires sur le bon de commande, et c'est donc la date de signature de celui-ci qui doit être retenue comme point de départ de prescription, puisque cette absence y était parfaitement visible, et non la connaissance juridique des conséquences de cette absence, de sorte que le fait que la banque ne l'aurait pas alertée sur les irrégularités formelles du contrat est sans incidence sur le point de départ du délai de prescription.

Il résulte de ce qui précède que le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a déclaré prescrite la demande de nullité des contrats de vente et de crédit affecté fondée sur les irrégularités entachant le bon de commande, motif pris de ce qu'elle a été formée par assignations délivrées les 9 et 15 octobre 2020, soit bien plus de cinq ans après la signature du bon de commande litigieux intervenue le 9 mai 2009.

* Sur les demandes d'annulation des contrats fondées sur le dol

En application de l'article 1304 du code civil dans sa version applicable au contrat, la prescription quinquennale de l'action en nullité pour dol a pour point de départ le jour où le contractant a découvert les manoeuvres ou la réticence dolosive qu'il dénonce.

Il incombe au requérant de justifier des éléments de fait qui induisent qu'il n'a eu connaissance du dol ou n'a été en mesure de le connaître que postérieurement à la souscription du contrat.

En l'espèce, les époux [J], qui n'ont émis aucune contestation à réception de leurs factures de revente d'électricité, défaillent à rapporter la preuve d'une découverte postérieure au contrat d'une discordance entre la rentabilité promise et la rentabilité effective de leur installation, dès lors que:

- ils ne justifient pas que le bon de commande et les pièces contractuelles comporteraient un engagement contractuel de la venderesse concernant la rentabilité de l'installation acquise ou une garantie de revenus ou d'autofinancement,

- il n'est pas justifié de la rentabilité effective de l'installation, la seule comparaison faite entre les revenus annuels perçus au titre de la revente de l'électricité et les mensualités de remboursement du crédit affecté ne permettant pas de démontrer la rentabilité sur la durée de vie du matériel, qui est largement supérieure à la durée de remboursement du crédit,

- l'acquisition des époux [J] ne s'inscrit pas uniquement dans une finalité de rentabilité, mais constitue également un achat responsable visant à protéger l'environnement et un geste louable pour la planète.

Partant, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a déclaré irrecevable la demande de nullité des contrats sur le fondement du dol.

* Sur la recevabilité de l'action en responsabilité dirigée contre la banque

Le point de départ du délai de prescription, régi par l'article 2224 du code civil, de l'action en responsabilité dirigée contre la société Domofinance se situe au jour de la commission de la faute prétendue, à savoir en l'espèce le déblocage des fonds en exécution d'un contrat comportant des irrégularités formelles, sans que ce point de départ puisse être reporté à la date à laquelle l'appelante a eu connaissance, par la consultation d'un avocat, de la faute qu'elle reproche à la banque, alors qu'elle était en mesure de connaître les irrégularités du bon de commande pour les motifs ci-dessus indiqués.

Au cas d'espèce, les contrats de vente et de crédit affecté ont été signés les 9 mai et 24 juillet 2009. La banque ne précise pas la date de déblocage des fonds, laquelle est en tout état de cause nécessairement intervenue avant le remboursement du prêt, la demande de déblocage étant le 31 juillet 2009, et la première échéance du prêt prévue 180 jours après le déblocage, qui est donc intervenu bien plus de 5 ans avant la délivrance de l'assignation, les 9 et 15 octobre 2020.

En conséquence, l'action en responsabilité, et subséquemment la totalité des demandes en indemnisation des préjudices des appelants, en ce compris la demande de dommages et intérêts pour préjudice moral, sont irrecevables comme étant prescrites.

Le jugement déféré, en ce qu'il a déclaré les actions en nullité des époux [J] irrecevables car prescrites mérite ainsi confirmation.

* Sur la recevabilité de la demande de déchéance du droit aux intérêts

En application de l'article L. 110-4 du code du commerce, les obligations nées à l'occasion de leur commerce entre commerçants ou entre commerçants et non-commerçants se prescrivent par cinq ans si elles ne sont pas soumises à des prescriptions spéciales plus courtes.

En l'espèce, il convient de relever que ce sont les époux [J] qui ont agi en annulation des contrats et que la banque ne les a pas assignés en paiement du solde du crédit et n'a pas formé de demande reconventionnelle en ce sens.

La société Domofinance s'est bornée à conclure à l'irrecevabilité des demandes d'annulation et subsidiairement à leur débouté et s'est opposée à la privation de sa demande de restitution du capital en cas d'annulation.

Dès lors la demande des époux [J] visant à prononcer la déchéance du droit aux intérêts n'est pas un moyen de défense et se trouve donc prescrite l'assignation ayant été délivrée plus de cinq ans après la signature du contrat de crédit le 25 février 2009.

* Sur la demande visant à voir condamner la société Ineo Tertiaire IDF au retrait de l'installation et à la remise en état de l'immeuble, à ses frais, dans le délai de 2 mois à compter de la signification de la décision à intervenir, le tout sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter de la fin de ce délai de 2 mois.

Il résulte de l'article 564 du code de procédure civile qu'à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait.

L'article 565 du même code dispose :

'Les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge, même si leur fondement juridique est différent'.

L'article 566 du même code précise :

' Les parties ne peuvent ajouter aux prétentions soumises au premier juge que les demandes qui en sont l'accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire'.

L'article 567 du même code, enfin, rend les demandes reconventionnelles recevables en cause d'appel, mais encore faut-il qu'elles respectent l'exigence du lien suffisant avec les prétentions originaires posée par l'article 70 du code de procédure civile.

Les appelants sollicitent pour la première fois en cause d'appel, la condamnation de leur venderesse au retrait de l'installation et à la remise en état de l'immeuble, à ses frais, dans le délai de 2 mois à compter de la signification de la décision à intervenir, le tout sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter de la fin de ce délai de 2 mois.

En l'espèce, la demande litigieuse tend aux mêmes fins que celle soumise au premier juge et qui tendait à obtenir la condamnation de la venderesse à payer une somme de 10 000 euros, correspondant au coût de l'enlèvement de l'installation et de la remise en état de la toiture du pavillon.

La demande doit, par suite, être jugée recevable.

Elle est cependant mal fondée, la prescription de la demande d'annulation du contrat de vente emportant rejet de cette demande.

II) Sur la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive

La société Ineo Tertiaire IDF demande la condamnation des époux [J] à lui verser la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive sur le fondement de l'article 32-1 du code de procédure civile, en faisant valoir que leur action a un caractère opportuniste dans la mesure où plus de 15 ans après la mise en service de l'installation et sans avoir jamais émis la moindre réclamation à son égard, ils entendent aujourd'hui bénéficier d'une installation gratuite, mais également d'un enrichissement indu. Elle ajoute que, dès lors, compte tenu de la mauvaise foi des époux [J] dans le cadre de leurs demandes, ainsi que des nombreuses procédures déjà intentées à son égard dans un contexte similaire et jugées prescrites, la présente procédure présente un caractère abusif.

Les époux [J] s'opposent à cette demande sans faire valoir de moyens à cet effet.

Sur ce,

En application de l'article 32-1 du code de procédure civile, celui qui agit en justice de manière dilatoire ou abusive peut être condamné à une amende civile d'un maximum de 10 000 euros, sans préjudice des dommages-intérêts qui seraient réclamés.

L'exercice d'une action en justice, en demande ou en défense, constitue un droit et seule la preuve d'une faute le faisant dégénérer en abus justifie d'allouer des dommages et intérêts en réparation du préjudice consécutif subi par le demandeur ou le défendeur à l'action.

En l'espèce, le fait pour les époux [J], qui ont pu se méprendre sur l'étendue de leurs droits, de renouveler devant la cour ses demandes en nullité des contrats qui avaient été déclarées prescrites en première instance, ne saurait constituer une faute, la remise en cause d'un contrat postérieurement à l'expiration du délai de prescription ne suffisant pas à caractériser la mauvaise foi alléguée des époux [J], qui agissent en raison de la rentabilité économique de leur acquisition qu'ils estiment insuffisante, alors qu'ils doivent, par ailleurs, rembourser les échéances d'un prêt.

Il convient d'ajouter qu'ils ne sauraient être tenus pour responsable d'autres actions, qui auraient pu être engagées à l'encontre de la société Ineo Tertiaire IDF, et qui étaient également prescrites.

Il convient en conséquence de débouter la société Ineo Tertiaire IDF de cette demande.

III) Sur les dépens

Les époux [J], qui succombent, sont condamnés aux dépens d'appel, les dispositions du jugement déféré relatives aux dépens de première instance étant confirmées.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant par arrêt contradictoire rendu par mise à disposition au greffe,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions dévolues à la cour ;

Y ajoutant

Déclare irrecevable la demande de déchéance du droit aux intérêts contractuels de la société Domofinance et la demande subséquente de remboursement des intérêts payés formée par M. [L] [J], et Mme [G] [S], épouse [J] ;

Déboute M. [L] [J], et Mme [G] [S], épouse [J], de leur demande visant à obtenir la condamnation de la société Ineo Tertiaire IDF à retirer l'installation et à remettre en état l'immeuble, à ses frais, dans le délai de 2 mois à compter de la signification de la décision à intervenir, le tout sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter de la fin de ce délai de 2 mois ;

Déboute la société Ineo Tertiaire IDF de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, déboute M. [L] [J], et Mme [G] [S], épouse [J] de leur demande en paiement ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne M. [L] [J], et Mme [G] [S], épouse [J], à payer à la société Domofinance une indemnité de 3 000 euros, et in solidum à la société Ineo Tertiaire IDF une indemnité de 5 000 euros ;

Condamne in solidum M. [L] [J], et Mme [G] [S], épouse [J], aux dépens de la procédure d'appel, qui pourront être recouvrés par la SCP Mery Renda Karm, pour ceux qui la concernent, et par la Selarl LX Avocats, pour ceux qui la concernent, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

- prononcé hors la présence du public par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Philippe JAVELAS, Président et par Madame Bénédicte NISI, Greffière en pré-affectation, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

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