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Décisions

CA Paris, Pôle 5 - ch. 8, 1 juillet 2025, n° 24/20578

PARIS

Arrêt

Autre

CA Paris n° 24/20578

1 juillet 2025

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 8

ARRÊT DU 1er JUILLET 2025

(n° / 2025, 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 24/20578 - N° Portalis 35L7-V-B7I-CKP6L

Décision déférée à la Cour : Jugement du 26 Novembre 2024 -Tribunal de commerce de BOBIGNY - RG n° 2024P01709

APPELANTE

S.A.S.U. MANGALA TAXI, société par actions simplifiée à associé unique, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège,

Immatriculée au registre du commerce et des sociétés de BOBIGNY sous le numéro 823 718 663,

Dont le siège social est situé [Adresse 4]

[Localité 9]

Représentée par Me Michel GUIZARD de la SELARL GUIZARD ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0020,

Assistée de Me Camille DARRES de la SELARL NAÏM ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque C1703,

INTIMES

L'URSSAF ILE DE FRANCE (UNION DE RECOUVREMENT DES COTISATIONS DE SECURITE SOCIALE ET D'ALLOCATIONS FAMILIALES)

Située [Adresse 2]

[Localité 10]

Représentée et assistée de Me Vincent DONY de l'AARPI ARKE Avocats, avocat au barreau de PARIS, toque : B 0005,

S.E.L.A.R.L. [U] MJ, prise en la personne de Me [I] [U], ès qualités,

Dont l'étude est située [Adresse 6]

[Localité 8]

Représentée par Me Béatrice HIEST NOBLET de la SCP HYEST et ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0311,

LE PROCUREUR GÉNÉRAL

SERVICE FINANCIER ET COMMERCIAL

[Adresse 3]

[Localité 7]

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 906 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 3 Juin 2025, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant la cour composée en double-rapporteur de Madame Marie-Christine HEBERT-PAGEOT, présidente de chambre, chargée du rapport, et de Madame Constance LACHEZE, conseillère.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Marie-Christine HEBERT-PAGEOT, présidente de chambre

Madame Constance LACHEZE, conseillère

Monsieur François VARICHON, conseiller,

Qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Madame Liselotte FENOUIL

ARRÊT :

- Contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Marie-Christine HEBERT-PAGEOT, présidente de chambre et par Liselotte FENOUIL, greffière, présente lors de la mise à disposition.

***

FAITS ET PROCÉDURE:

La SASU Mangala Taxi, domiciliée à [Localité 13], exerce une activité de prise en charge et de transport de voyageurs par taxi à [Localité 12] et dans sa zone de rattachement.

Sur assignation de l'Urssaf en date du 27 mai 2024 invoquant une créance de 17.093,43 euros dont 4.655,43 euros de parts salariales et par jugement du 26 novembre 2024, le tribunal de commerce de Bobigny a ouvert une procédure de liquidation judiciaire à l'égard de la société Mangala Taxi, fixé provisoirement la date de cessation des paiements au 26 mai 2023 et nommé la SELARL [U] MJ en qualité de liquidateur judiciaire.

Par déclaration du 4 décembre 2024, la société Mangala Taxi a relevé appel de ce jugement en intimant l'Urssaf d'Ile de France, la SELARL [U] MJ, ès qualités de liquidateur judiciaire et le ministère public.

Par dernières conclusions déposées au greffe et notifiées par voie électronique le 7 mai 2025, la société Mangala Taxi demande à la cour de la dire recevable en son appel, infirmer le jugement en toutes ses dispositions, statuant à nouveau, ordonner l'ouverture d'un redressement judiciaire à son égard, désigner la SELARL [U] MJ, prise en la personne de Me [U], ès qualités de mandataire judiciaire, renvoyer l'affaire devant le tribunal de commerce de Bobigny pour désignation du juge-commissaire et organisation de la période d'observation et dire que les dépens seront passés en frais privilégiés de procédure collective.

Dans ses conclusions déposées au greffe et notifiées par voie électronique le 2 mai 2025, l'Urssaf Ile de France demande à la cour de déclarer la société Mangala Taxi mal fondée en son appel et l'en débouter, confirmer le jugement et dire que les dépens seront employés en frais privilégiés de procédure collective.

Par conclusions déposées au greffe et notifiées par voie électronique le 5 mai 2025, la SELARL [U] MJ, ès qualités de liquidateur judicaire, demande à la cour de lui donner acte de ce qu'elle ne s'oppose pas à l'infirmation du jugement et, vu l'état de cessation des paiements de la société Mangala Taxi, d'ouvrir une procédure de redressement judiciaire à son égard et prendre les dépens en frais privilégiés de la procédure collective.

Le dossier a été visé sans observation par le ministère public le 27 janvier 2025.

Par ordonnance du 20 mai 2025, le délégataire du premier président de la cour d'appel de Paris a arrêté l'exécution provisoire du jugement dont appel.

La clôture de l'instruction a été prononcée le 20 mai 2025.

SUR CE,

L'article L.640-1 du code de commerce institue une procédure de liquidation judiciaire ouverte à tout débiteur mentionné à l'article L. 640-2 en cessation des paiements et dont le redressement est manifestement impossible.

Il résulte des termes de l'article L.631-1 du code de commerce qu'est en état de cessation des paiements tout débiteur qui est dans l'impossibilité de faire face à son passif exigible avec son actif disponible. Le débiteur qui établit que les réserves de crédit ou les moratoires dont il bénéficie de la part de ses créanciers lui permettent de faire face au passif exigible avec son actif disponible n'est pas en cessation des paiements.

En cas d'appel l'existence de la cessation des paiements s'apprécie au jour où la cour statue.

La société Mangala Taxi, tout en indiquant être propriétaire de sa licence de taxi valorisée à 150.000 euros, ne conteste pas être en état de cessation des paiements, dès lors que son passif exigible échu s'élève, selon elle, à 35.878,09 euros et sa trésorerie au 28 avril 2025 à 2.804,36 euros (sa pièce n°20).

Le liquidateur judiciaire fait état d'un passif déclaré de 92.017,91 euros correspondant toutefois à un passif exigible antérieur au jugement d'ouverture limité à 34.796,70 euros (principalement composé d'une créance de l'Urssaf) et d'un actif disponible de 309,12 euros sur le compte ouvert à la caisse des dépôts et consignations. Il en déduit que la société Mangala Taxi est effectivement en cessation des paiements.

L'Urssaf invoque un passif exigible de 36.491,43 euros à comparer à un actif disponible de 312,12 euros.

L'état de cessation des paiements étant caractérisé, la société Mangala Taxi relève d'une procédure collective. Il convient d'examiner si comme le soutient la société appelante son redressement n'est pas manifestement impossible.

La société Mangala Taxi fait valoir qu'elle est propriétaire de sa licence de taxi, laquelle est entièrement payée, qu'elle dispose d'un véhicule nécessaire à son activité, le contrat de crédit-bail du véhicule ayant pu reprendre après l'arrêt de l'exécution provisoire et d'une activité pérenne et sûre au moyen du contrat de radio avec la compagnie G7.

Elle met en avant ses résultats positifs sur les exercices de 2021 à 2024 et s'appuie sur les prévisionnels de trésorerie établis par son nouvel expert-comptable démontrant la pérennité de son activité et sa capacité à suivre une période d'observation.

Si l'Urssaf soutient que les résultats de la société Mangala Taxi ne lui ont jamais permis de la désintéresser et ne lui permettront pas de le faire à l'avenir, le prévisionnel établi lui apparaissant incohérent, le liquidateur considère en revanche qu'un redressement n'est pas manifestement possible au regard des éléments communiqués par l'appelant.

La société Mangala Taxi est affiliée à la compagnie G7 depuis 2016 et bénéficie de sa centrale de réservation.

Les liasses fiscales versées aux débats confirment la récurrence du chiffre d'affaires de la société Mangala Taxi: 49.936 euros en 2021, 51.498 euros en 2022 et 50.407 euros en 2023 et l'existence de résultats bénéficiaires chacune de ces années : 2.811 euros, 12.533 euros et 9.736 euros.

Le rapport du cabinet d'expertise comptable Otsar Audit et Conseil mentionne pour l'exercice 2024, un chiffre d'affaires de 49.627,16 euros et un résultat bénéficiaire de 8.076,74 euros.

Sur la base d'une estimation d'encaissements de l'ordre de 7.000 euros par mois, le prévisionnel de trésorerie établi par l'expert-comptable prend pour hypothèse une trésorerie nette de plus de 2.000 euros par mois.

La société justifie d'une assurance en cours de validité et il n'est fait état d'aucun nouvel impayé depuis le jugement d'ouverture.

En cet état, et eu égard au montant modéré du passif exigible, la perspective d'un redressement n'apparait pas manifestement impossible.

En conséquence, il y a lieu d'infirmer le jugement en ce qu'il a ouvert une procédure de liquidation judiciaire et, statuant à nouveau, d'ouvrir une procédure de redressement judiciaire à l'égard de la société Mangala Taxi.

Au regard de l'ancienneté des contraintes délivrées par l'Urssaf et du caractère partiellement infructueux de la saisie attribution pratiquée auprès de la CRCAM le 27 juin 2023 pour un montant de 12.083,84 euros, le solde disponible se limitant à 446,57 euros, il y a lieu de fixer la date de cessation des paiements au maximum du report autorisé par la loi, c'est à dire 18 mois avant la date du présent arrêt ouvrant le redressement judiciaire, soit le 1er janvier 2024.

Le chiffre d'affaires et le nombre de salariés de la société Mangala Taxi sont inférieurs aux seuils prévus aux articles L621-4 et R621-11 du code de commerce, il n'y a pas lieu d'user de la faculté offerte par le premier de ces textes de désigner néanmoins un administrateur judiciaire.

Les dépens seront employés en frais privilégiés de procédure collective.

PAR CES MOTIFS,

La cour, statuant par arrêt contradictoire,

Infirme le jugement sauf en ce qu'il a constaté l'état de cessation des paiements et dit que les dépens seront employés en frais privilégiés de la procédure collective ;

Statuant à nouveau des chefs infirmés,

Ouvre une procédure de redressement judiciaire à l'égard de la SAS Mangala Taxi, [Adresse 5], immatriculée au RCS de [Localité 11] sous le n° 823718663, (transfert du siège social en cours au [Adresse 1]),

Fixe la durée de la période d'observation à six mois à compter du présent arrêt,

Fixe la date de cessation des paiements au 1er janvier 2024,

Désigne la SELARL [U] MJ, en la personne de Maître [U], en qualité de mandataire judiciaire,

Fixe le délai au terme duquel la clôture de la procédure devra être examinée à 2 ans,

Renvoie l'affaire devant le tribunal de commerce de Bobigny pour la poursuite de la procédure et la désignation du juge-commissaire,

Rappelle que le greffe du tribunal de commerce de Bobigny devra procéder aux mentions et publicités prévues par la loi ;

Ordonne l'emploi des dépens d'appel en frais privilégiés de la procédure collective.

Liselotte FENOUIL

Greffière

Marie-Christine HÉBERT-PAGEOT

Présidente

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