CA Saint-Denis de la Réunion, ch. com., 2 juillet 2025, n° 25/00290
SAINT-DENIS DE LA RÉUNION
Arrêt
Autre
ARRÊT DU 02 JUILLET 2025
Chambre commerciale
Appel d'un jugement rendu par le TRIBUNAL MIXTE DE COMMERCE DE SAINT DENIS en date du 26 FEVRIER 2025 suivant déclaration d'appel en date du 07 MARS 2025 rg n°: 2024F02437
APPELANTE :
S.E.L.A.S. BL ET ASSOCIES prise en la personne de Maître [R] [O], ès qualités d'administrateur judiciaire de la société SOFICOOP, société par actions simplifiée au capital social de 20 791 581,48 €, immatriculée sous le numéro 383 755 949 RCS SAINT-DENIS DE LA REUNION, dont le siège social se situe [Adresse 26], désignée en cette qualité par jugement du tribunal mixte de commerce de SAINT-DENIS DE LA REUNION en date du 17 avril 2024
[Adresse 6]
[Localité 13]
Représentant : Me Eric pierre POITRASSON de la SAS LEXIPOLIS AVOCATS,Postulant, avocat au barreau de SAINT-PIERRE-DE-LA-REUNION - Me Marine SIMONNOT, Plaidante, avocat au barreau de PARIS
INTIMES :
Monsieur [V] [E]
[Adresse 1]
[Localité 15]
Représentant : Me Isabelle MERCIER-BARRACO, Postulant, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION - Me Lorans CAILLERES, Plaidant, avocat au barreau de PARIS
Monsieur [B] [W] [L]
[Adresse 8]
[Localité 18]
Représentant : Me Jean pierre GAUTHIER de la SCP CANALE-GAUTHIER-ANTELME-BENTOLILA, Postulant, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION - Me Nicolas de LA TASTE, Plaidant, avocat au barreau de PARIS
S.A. CEPAC Es qualité de contrôleur à la procédure de sauvegarde de la société «SOFICOOP SAS».
[Adresse 23]
[Localité 2]
E.P.I.C. AGENCE FRANCAISE DE DEVELOPPEMENT Es qualité de contrôleur à la procédure de sauvegarde de la société «SOFICOOP SAS».
[Adresse 7]
[Localité 11]
Madame LE PROCUREUR GENERAL
[Adresse 4]
[Localité 13]
S.A.S. SOFICOOP représentée par son Président en exercice
[Adresse 25]
[Localité 16]
Représentant : Me Alain RAPADY, Postulant, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION - Me Cécile MONTPELLIER, Plaidant, avocat au barreau de LILLE
S.A.S. HDG (HOLDING [L] ET [M])
[Adresse 9]
[Localité 18]
Représentant : Me Jean pierre GAUTHIER de la SCP CANALE-GAUTHIER-ANTELME-BENTOLILA, Postulant, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION - Me Nicolas de LA TASTE, Plaidant, avocat au barreau de PARIS
S.E.L.A.R.L. [X] prise en la personne de Maitre [F] [X], ès qualités de mandataire judiciaire de la société SOFICOOP, société par actions simplifiée au capital social de 20 791 581,48 €, immatriculée sous le numéro 383 755 949 RCS SAINT-DENIS DE LA REUNION, dont le siège social se situe [Adresse 26], désignée en cette qualité par jugement du tribunal mixte de commerce de SAINT-DENIS DE LA REUNION en date du 17 avril 2024;
[Adresse 12]
[Localité 14]
Société CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE LA REUNION ET DE MAYOTTE (CRCAMRM), es qualité de contrôleur à la procédure de sauvegarde de la société « SOFICOOP SAS », société civile coopérative à capital variable régie par les dispositions des articles L. 512-20 à L.512-24 du Code monétaire et financier, immatriculée au registre du commerce et des sociétés de SAINT-DENIS (REUNION) sous le numéro 312 617 046, dont le siège social est situé [Adresse 21], représentée par son Directeur Général en exercice, Monsieur [I] [C] domicilié en cette qualité audit siège social
[Adresse 20]
[Localité 17]
Représentant : Me Mikaël YACOUBI, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de SAINT-PIERRE-DE-LA-REUNION
Société BRED BANQUE POPULAIRE Es qualité de contrôleur à la procédure de sauvegarde de la société «SOFICOOP SAS».
[Adresse 5]
[Localité 11]
S.A. BNP PARIBAS Es qualité de contrôleur à la procédure de sauvegarde de la société «SOFICOOP SAS».
[Adresse 3]
[Localité 10]
DÉBATS : en application des dispositions des articles 917 et suivants du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 21 mai 2025 devant la cour composée de :
Président : Madame Séverine LEGER, Conseillère
Conseiller : Madame Claire BERAUD,Conseillère
La présidente a indiqué que l'audience sera tenue en double rapporteur. Les parties ne s'y sont pas opposées.
En présence de Madame Fabienne ATZORI, Procureur Général.
A l'issue des débats, la présidente a indiqué que l'arrêt sera prononcé, par sa mise à disposition le 02 juillet 2025.
Il a été rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Président : Madame Séverine LEGER, Conseillère
Conseiller : Madame Claire BERAUD, Conseillère
Conseiller : Madame Anne-Charlotte LEGROIS, Vice-présidente placée
Arrêt : prononcé publiquement par sa mise à disposition des parties le 02 juillet 2025.
Greffiere lors des débats : Madame Falida OMARJEE, Greffière.
Greffiere lors de la mise à disposition : Madame Nathalie BEBEAU, Greffière.
* * *
LA COUR
EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE
Soficoop est une société filiale à 100 % du groupe coopératif Urcoopa fondé pour permettre la création d'une usine de nutrition animale.
Soficoop est une société holding qui concentre les principales sources de financement du groupe. Elle détient les sociétés suivantes : Evollys Production exploitant l'activité d'abattage de volailles, Evollys Services Supports assurant la maintenance administrative et financière d'Evollys Production, Evollys Commercialisation en charge de la commercialisation.
La SARL Abattoir [L] et [M] (ADG) a une activité d'abattage, de transformation et de commercialisation des volailles. Elle est le seul concurrent du sous-groupe Evollys sur le territoire réunionnais dans l'activité d'abattage de volailles.
Dans le cadre d'un protocole signé le 5 octobre 2017, a été décidée la constitution d'une filiale commune pour la commercialisation de produits Éleveurs [L] [M] (EDG), détenue à hauteur de 51 % par ADG et de 49 % par Soficoop via Evollys Commercialisation.
Une sous-holding Holding Evollys Production (HEP) a été constituée au sein du groupe Soficoop détenue à 99, 99 % par la société Soficoop et à 0,01 % par Holding [L] et [M] (HDG).
Deux pactes d'associés ont été successivement signés le 16 novembre 2017 par les actionnaires d'EDG et le 27 décembre 2017 au niveau d'HEP.
Par jugement du tribunal mixte de commerce de Saint-Denis de La Réunion du 17 avril 2024, une procédure de sauvegarde a été ouverte à l'égard de la société Soficoop avec désignation de la Selas BL & Associés prise en la personne de Maître [R] [O] en qualité d'administrateur judiciaire et de la Selarl [X] prise en la personne de Maître [F] [X] en qualité de mandataire judiciaire.
Par requête du 24 juillet 2024, la Selas BL & Associés ès qualités d'administrateur judiciaire, a saisi le juge-commissaire sur le fondement de l'article L622-13 IV du code de commerce aux fins de voir prononcer la résiliation du pacte d'associés conclu le 27 décembre 2017 et son avenant du 17 juillet 2018 entre d'une part, la société Holding [L] et [M] (HDG) et d'autre part, la société Soficoop.
Par jugement du 16 octobre 2024, le tribunal mixte de commerce de Saint-Denis de La Réunion a renouvelé la période d'observation de la procédure de sauvegarde Soficoop pour une durée de six mois supplémentaires, soit jusqu'au 17 avril 2025.
Par ordonnance du 14 novembre 2024, le juge-commissaire a :
- dit que le pacte d'associés signé le 27 décembre 2017 et son avenant du 17 juillet 2018 entre la société HDG et la société Soficoop n'est pas un contrat en cours au sens des dispositions de l'article L622-13 du code de commerce ;
- débouté la Selas BL & Associés ès qualités d'administrateur judiciaire de la procédure de sauvegarde la société Soficoop de sa demande de résiliation.
La Selas BL & Associés a formé un recours contre l'ordonnance par déclaration au greffe du 19 novembre 2024 sur le fondement des dispositions de l'article R621-21 du code de commerce.
Par jugement contradictoire du 26 février 2025, le tribunal mixte de commerce de Saint-Denis de La Réunion a :
- déclaré l'action de la Selas BL & Associés ès qualités d'administrateur judiciaire de la procédure de sauvegarde de la société Soficoop recevable ;
- débouté la Selas BL & Associés ès qualités d'administrateur judiciaire de la société Soficoop de sa demande de résiliation du pacte d'associés en date du 27 décembre 2017 conclu entre la société Soficoop et la société HDG et son avenant en date du 7 juillet 2018 ;
- dit n'y avoir lieu à la désignation d'un technicien ;
- débouté la Selas BL & Associés ès qualités d'administrateur judiciaire de la procédure de sauvegarde de la société Soficoop de sa demande de résiliation de la promesse de vente consentie par Soficoop au bénéfice d'HDG ou ADG portant sur 50 % (moins une) des actions de la société HEP conclue au terme du pacte d'associés en date du 27 décembre 2017 et de la clause prévoyant les abandons de créance au préjudice de Soficoop ;
- débouté les parties du surplus de leurs demandes ;
- dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile
- condamné la Selas BL & Associés ès qualités d'administrateur judiciaire de la procédure de sauvegarde de la société Soficoop aux dépens.
Le tribunal a rejeté la demande de résiliation du pacte d'associés en considérant qu'il ne s'agissait pas d'un contrat unique en cours au regard d'une clause d'autonomie des engagements insérée à l'acte.
S'agissant de la demande afférente à la résiliation de la promesse de vente consentie par la société Soficoop au bénéfice d'HDG ou ADG portant sur 50 % moins une des actions de la société HEP telle que résultant du pacte d'associés du 27 décembre 2017 et de la clause prévoyant les abandons de créance au préjudice de Soficoop, le tribunal a considéré qu'il s'agissait effectivement d'un contrat en cours, que le critère de la résiliation relatif à la nécessaire sauvegarde de la société Soficoop était établi au regard des éléments comptables de la société mais qu'il n'était pas prouvé par l'administrateur judiciaire que la résiliation ne porterait pas une atteinte excessive aux intérêts du cocontractant.
Par déclaration du 7 mars 2025, la Selas BL & Associés a interjeté appel de cette décision.
Saisi sur requête du 14 mars 2025, le premier président de la présente cour d'appel, par ordonnance du 17 mars 2025, a autorisé l'appelante à délivrer une assignation à jour fixe sur le fondement des dispositions de l'article 917 du code de procédure civile pour l'audience du 21 mai 2025, l'assignation des intimés devant intervenir avant le 26 mars 2025.
Les assignations ont été délivrées comme suit :
- le 21 mars 2025 à la société Bred Banque Populaire ( remise à personne morale)
- le 21 mars 2025 à la société Bnp Paribas (remise à personne morale)
- le 21 mars 2025 à l'Agence française de développement (remise à personne morale)
- le 24 mars 2025 à la société Soficoop (remise à personne morale)
- le 24 mars 2025 à M. [V] [E] (remise à domicile)
- le 24 mars 2025 à la société HDG (remise à personne morale)
- le 24 mars 2025 à M. [B] [W] [L] (remise à personne)
- le 25 mars 2025 à la CEPAC (remise à personne morale)
- le 24 mars 2025 à la Selarl [X] ès qualités de mandataire judiciaire de la société Soficoop (remise à personne morale)
- le 25 mars 2025 à la Caisse régionale de crédit agricole mutuel de [Localité 19] (remise à personne morale)
- le 25 mars 2025 au procureur général (remise à personne morale).
La société Soficoop, la société HDG, M. [B] [W] [L], M. [V] [E], et la Caisse régionale de crédit agricole ont constitué avocat.
La BRED Banque populaire, la BNP Paribas, la CEPAC et l'Agence française de développement, chacune désignées ès qualités de contrôleur à la procédure de sauvegarde de la société Soficoop et la Selarl [X] ès qualités de mandataire judiciaire de la société Soficoop, n'ont pas constitué avocat.
La décision sera ainsi réputée contradictoire en application des dispositions de l'article 474 du code de procédure civile.
L'affaire fixée à l'audience du 21 mai 2025 et mise en délibéré par mise à disposition au greffe de la décision le 2 juillet 2025.
EXPOSE DES PRETENTIONS ET DES MOYENS
Dans ses dernières conclusions récapitulatives n°2 notifiées par voie électronique le 20 mai 2025, l'appelant demande à la cour d'infirmer en toutes ses dispositions le jugement dont appel et statuant à nouveau, de :
- rejeter la demande de jonction avec le RG n°25800289 ;
A titre principal,
- juger que le pacte d'associés du 27 décembre 2017 conclu entre Soficoop et HDG et son avenant du 7 juillet 2018 sont des contrats en cours au sens de l'article L622-13 du code de commerce ;
- juger que la résiliation du pacte d'associés du 27 décembre 2017 conclu entre Soficoop et HDG est nécessaire à la sauvegarde de Soficoop ;
- juger que la charge de la preuve de l'absence d'atteinte excessive incombe aux cocontractants du débiteur en procédure collective, à savoir en l'espèce HDG, seule cocontractante ;
- juger qu'il n'est pas justifié que la résiliation du pacte d'associés du 27 décembre 2017 conclu entre Soficoop et HDG porte une atteinte excessive aux intérêts de HDG ;
- prononcer la résiliation du pacte d'associés du 27 décembre 2017 conclu entre Soficoop et HDG et son avenant du 7 juillet 2018 ;
A titre subsidiaire,
- prononcer la résiliation de la promesse de vente consentie par Soficoop au bénéfice d'HDG ou ADG portant sur 50 %(moins une) des actions HEP conclue aux termes du pacte d'associés du 27 décembre 2017 et de la clause prévoyant les abandons de créance au préjudice de Soficoop dès lors qu'elle est nécessaire à la sauvegarde de Soficoop et qu'elle ne porte pas une atteinte excessive aux droits de HDG ;
En tout état de cause,
- déclarer irrecevables ADG, Evollys Production, M. [L] et M. [E] en leurs demandes ;
- débouter les intimés de l'ensemble de leurs demandes ;
- déclarer irrecevable la demande HDG de voir désigner un technicien sur le fondement de l'article L621-9 du code de commerce ; subsidiairement, l'en débouter ;
- condamner la société HDG à lui payer la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- statuer ce que de droit sur les dépens.
L'appelant fait valoir que :
- tous les contrats entrent dans le champ d'application de l'article L622-13 du code de commerce sans qu'il y ait lieu de distinguer selon la nature du contrat et le pacte d'associés est un contrat en cours régi par ce texte à défaut d'entrer dans le champ des exceptions légales devant être interprétées strictement ni des exceptions jurisprudentielles dès lors que le pacte d'associés n'est pas un contrat de société lequel donne naissance à une personne morale ;
- l'autonomie des stipulations d'un contrat ne saurait exclure la qualification de contrat en cours contrairement à la décision du premier juge et la clause d'autonomie insérée dans l'acte implique qu'il s'agit précisément d'un contrat unique constitutif d'un ensemble de droits et obligations n'ayant pas épuisé ses effets fondamentaux au regard des engagements réciproques des parties dont certains sont non encore intervenus ;
- les conditions de résiliation du contrat posées par l'article L622-13 IV du code de commerce et dont l'appréciation des critères se fait in concreto sont réunies ;
- la résiliation est nécessaire à la sauvegarde Soficoop comme l'a retenu le premier juge car l'exécution totale du pacte d'associés aboutirait à la priver d'une trésorerie de 7,8 millions d'euros compte tenu des abandons-conversion de créances prévus et conduirait à une prise de contrôle total d'HDG ou ADG sur HEP ; il entraînerait également une perte nette de l'ordre de 26 millions d'euros en tenant compte de la seule valorisation de l'actif immobilier détenu par HEP à hauteur de 73 millions d'euros seulement partiellement compensé au regard du prix de cession de 10 millions d'euros, outre une perte de produits financiers constitué des dividendes et intérêts au regard du droit de vote double attaché aux titres cédés, elle perdrait ainsi 50 % des résultats de sa filiale ainsi que le fonds de commerce d'Evollys Production en cas d'exercice de la faculté de rachat par EDG ouverte par l'exercice de la promesse de 50 % des actions ;
- Soficoop doit obtenir des financements bancaires pour tenir son plan et disposer de l'entièreté de son patrimoine en constitue une condition sine qua non ;
- le tribunal a procédé à une inversion de la charge de la preuve de l'absence d'atteinte excessive aux intérêts du cocontractant, laquelle n'incombe pas à l'administrateur judiciaire ;
- la résiliation du pacte d'associés HEP ne portera pas une atteinte excessive à son seul cocontractant, la société HDG, étant précisé que les contrats de location-gérance et de sous-traitance ne sont pas visés par la procédure de sorte qu'ADG ne sera pas privée de la possibilité de reprendre possession de son fonds de commerce et la résiliation n'entraînera aucune perte d'exploitation, le statu quo demeurant pour cette société.
Par conclusions notifiées par voie électronique le 16 mai 2025, la société Soficoop, intimée, s'associe aux demandes présentées par l'appelante et formule les prétentions suivantes :
A titre principal,
- juger que le pacte d'associés du 27 décembre 2017 conclu entre Soficoop et HDG et son avenant du 7 juillet 2018 sont des contrats en cours au sens de l'article L622-13 du code de commerce ;
- juger que la résiliation du pacte d'associés du 27 décembre 2017 conclu entre Soficoop et HDG est nécessaire à la sauvegarde de Soficoop ;
- juger que la charge de la preuve de l'absence d'atteinte excessive incombe aux cocontractants du débiteur en procédure collective, à savoir en l'espèce HDG, seule cocontractante ;
- juger qu'il n'est pas justifié que la résiliation du pacte d'associés du 27 décembre 2017 conclu entre Soficoop et HDG porte une atteinte excessive aux intérêts de HDG ;
- prononcer la résiliation du pacte d'associés du 27 décembre 2017 conclu entre Soficoop et HDG et son avenant du 7 juillet 2018 ;
- prononcer la résiliation du pacte d'associés du 27 décembre 2017 conclu entre Soficoop et HDG et son avenant du 7 juillet 2018 ;
A titre subsidiaire,
- prononcer la résiliation de la promesse de vente consentie par Soficoop au bénéfice d'HDG ou ADG portant sur 50 %(moins une) des actions HEP conclue aux termes du pacte d'associés du 27 décembre 2017 et de la clause prévoyant les abandons de créance au préjudice de Soficoop dès lors qu'elle est nécessaire à la sauvegarde de Soficoop et qu'elle ne porte pas une atteinte excessive aux droits de HDG ;
En tout état de cause,
- déclarer irrecevables ADG, Evollys Production, M. [L] et M. [E] en leurs demandes ;
- débouter les intimés de l'ensemble de leurs demandes ;
- condamner la société HDG à lui payer la somme de 8 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- statuer ce que de droit sur les dépens.
Elle reprend à son compte le moyens développés par l'appelant et soutient que :
- l'article L622-13 du code de commerce est applicable au pacte HEP, la notion de contrat en cours étant interprétée largement par la jurisprudence qui retient une approche fonctionnelle dont l'enjeu est d'identifier si le contrat crée des obligations exécutoires et non de déterminer si la totalité du contrat est indivisible et les conventions de vote et la promesse unilatérale de vente qui n'a pas encore été levée doivent être qualifiées de contrats en cours ;
- le principe de divisibilité des obligations d'un contrat ne fait pas obstacle à sa qualification comme contrat en cours dès lors que son exécution globale est encore pendante et la divisibilité d'une clause n'exclut pas l'indivisibilité du pacte dans son ensemble si l'économie du contrat repose sur un équilibre global ;
- le pacte HEP peut être assimilé à un contrat-cadre à exécution successive et il compromet gravement la capacité de Soficoop à élaborer un plan de sauvegarde réaliste alors que sa résiliation tend à rétablir la solvabilité globale de la société ;
- le tribunal a inversé la charge de la preuve s'agissant du critère d'atteinte excessive aux intérêts du cocontractant et HDG n'apporte aucun élément objectif démontrant un préjudice excessif car la résiliation ne prive pas HDG de ses droits fondamentaux ni ne met en péril son activité en ce qu'elle consiste seulement à emporter la suppression d'un avantage contractuel non encore exercé.
Par conclusions notifiées par voie électronique le 21 mai 2025, la Caisse régionale de crédit agricole mutuel de [Localité 19] et de Mayotte (le Crédit agricole) ès qualités de contrôleur de la société Soficoop, s'associe aux prétentions de l'appelante et demande à la cour de :
A titre principal,
- juger que le pacte d'associés du 27 décembre 2017 conclu entre Soficoop et HDG et son avenant du 7 juillet 2018 sont des contrats en cours au sens de l'article L622-13 du code de commerce ;
- juger que la résiliation du pacte d'associés du 27 décembre 2017 conclu entre Soficoop et HDG modifié suivant avenant du 7 juillet 2018 est nécessaire à la sauvegarde de Soficoop ;
- juger que la charge de la preuve de l'absence d'atteinte excessive incombe aux cocontractants du débiteur en procédure collective, à savoir en l'espèce HDG ;
- juger qu'il n'est pas démontré que la résiliation du pacte d'associés du 27 décembre 2017 conclu entre Soficoop et HDG modifié suivant avenant du 7 juillet 2018 porte une atteinte excessive aux intérêts de HDG ;
- prononcer la résiliation du pacte d'associés du 27 décembre 2017 conclu entre Soficoop et HDG modifié suivant avenant du 7 juillet 2018 ;
A titre subsidiaire,
- prononcer la résiliation de la promesse de vente consentie par Soficoop au bénéfice d'HDG ou ADG portant sur 50 %(moins une) des actions HEP conclue aux termes du pacte d'associés du 27 décembre 2017 et de la clause prévoyant les abandons de créance au préjudice de Soficoop dès lors qu'elle est nécessaire à la sauvegarde de Soficoop et qu'elle ne porte pas une atteinte excessive aux droits de HDG ;
- rejeter toutes demandes contraires ;
En tout état de cause,
- condamner les parties succombantes à lui payer une somme de 6 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi que les entiers dépens dont distraction, le cas échéant au profit de la Selarl Gaelle Jaffre-Mickael Yacoubi représentée par Maître Mikael Yacoubi dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile.
Elle expose que :
- le pacte HEP est un contrat en cours ainsi qu'en attestent les consultations juridiques et la doctrine versées aux débats et le fait que les stipulations d'un contrat soient autonomes les unes par rapport aux autres ne saurait à lui seul exclure cette qualification ;
- la résiliation du pacte HEP est nécessaire pour la sauvegarde de la société Soficoop au regard du risque de réduction du gage commun des créanciers et du risque de dégradation de la notation bancaire du groupe Urcoopa ainsi que de l'impact sur l'ensemble de la filière avicole réunionnaise ;
- il n'est pas démontré par les cocontractants l'atteinte excessive à leurs intérêts.
Par conclusions notifiées par voie électronique le 19 mai 2025, la société ADG, la société HDG, la société Evollys Production et M. [W] [L] demandent à la cour de les recevoir en leur appel incident et de :
- rejeter toutes demandes contraires ;
- confirmer les jugements déférés sauf en ce qu'ils ont jugé l'action de la Selas BL & Associés ès qualités d'administrateur judiciaire de la société Soficoop recevable, dit n'y avoir lieu à la désignation d'un technicien, débouté du surplus de leurs demandes et dit n'y avoir lieu à l'application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
Statuant à nouveau,
- juger la Selas BL&Associés ès qualités d'administrateur judiciaire de la société Soficoop irrecevable en sa demande de résiliation du pacte d'associés de la société EDG du 16 novembre 2017 ;
- désigner tel technicien qu'il plaira à la cour avec la mission suivante :
- donner un vis motivé sur les conséquences de toute nature qu'aurait le maintien des pactes d'associés de EDG et de HDG pour la société Soficoop ;
- dire si la résiliation des apctes d'associés de EDG et de HDG est de nature à porter préjudice à la sauvegarde de Soficoop ;
- donner un avis motivé sur les conséquences de toute nature qu'aurait la résiliation des pactes d'associés de EDG et de HDG pour le groupe [L] et [M] ;
- faire toutes remarques utiles ;
En tout état de cause,
- juger que la résiliation du pacte d'associés de la société HEP du 27 décembre 2017 et de son avenant du 7 juillet 2018 n'est pas nécessaire à la sauvegarde de la société Soficoop et porte une atteinte excessive au cocontractant ;
- juger que la résiliation de la promesse de cession des actions de HEP et des abandons de créances n'est pas nécessaire à la sauvegarde de Soficoop et porte une atteinte excessive au cocontractant ;
- rejeter la demande de résiliation du pacte d'associés de la société HEP du 27 décembre 2017 et de son avenant du 7 juillet 2018 ;
- rejeter la demande de résiliation du pacte d'associés de la société EDG du 16 novembre 2017;
- rejeter la demande de résiliation de la promesse de cession des actions de HEP et des abandons de créances ;
- condamner la société Soficoop et la Selas BL & Associés ès qualités d'administrateur judiciaire de la société Soficoop à leur régler chacun une somme de 7 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Y ajoutant,
- condamner la société Soficoop et la Selas BL & Associés ès qualités d'administrateur judiciaire de la société Soficoop à leur régler chacun une somme de 20 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens de l'instance.
Ils soutiennent que :
- l'administrateur judiciaire a planifié la demande de placement sous sauvegarde de la société Soficoop dans le but de se prévaloir du régime protecteur des contrats en cours et dévoyé les règles d'ordre public de la procédure collective pour tenter d'échapper à l'exécution d'engagements conclus avec le soutien de pouvoirs publics dans l'intérêt général de la préservation de la filière avicole de [Localité 19] ;
- la demande présentée par l'administrateur judiciaire de la société Soficoop est irrecevable s'agissant du pacte EDG auquel cette société n'est pas partie;
- les stipulations inhérentes à la gouvernance des personnes morales ne peuvent être assimilées à un contrat en cours car elle constituent le prolongement du contrat de société et ont en cela une fonction institutionnelle et non contractuelle et il ne peut être sollicité la résiliation des pactes d'associés dans leur globalité ;
- la promesse de cession d'actions n'est pas non plus un contrat en cours car l'engagement de vendre consenti par la société Soficoop de manière irrévocable a été définitivement consommé;
- il ne peut être fait l'économie d'une expertise judiciaire au regard des seuls rapports privés versés aux débats par les parties, lesquels ne peuvent fonder à eux seuls une décision ;
- la résiliation des contrats en cours doit être vitale à la procédure collective et ne saurait être justifiée par une pure résiliation de confort tendant à faire réaliser une meilleure opération que celle contractuellement prévue ;
- l'atteinte excessive aux intérêts du cocontractant n'est pas synonyme de ruine et la charge de la preuve incombe bien à l'adminsitrateur judiciaire en ce qu'il est demandeur à la résiliation.
Par conclusions notifiées par voie électronique le 19 mai 2025, M. [V] [E] demande à la cour de :
I. Sur l'appel formé à l'encontre du jugement ayant statué sur la requête en résiliation du pacte EDG :
A titre principal,
- infirmer le jugement déféré en ce qu'il a déclaré l'action recevable ;
Statuant à nouveau,
- déclarer la Selas BL & Associés ès qualités d'administrateur judiciaire de la société Soficoop en sa demande de résiliation du pacte d'associés de la société HEP conclu le 16 novembre 2017 entre les sociétés HDG et Evollys Commercialisation ;
A titre subsidiaire,
- confirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté la Selas BL&Associés ès qualités d'administrateur judiciaire de la société Soficoop de sa demande de résiliation du pacte d'associés conclu le 16 novembre 2017 entre d'une part, la société HDG et la d'autre part, la société Evollys Commercialisation en présence des sociétés ADG, Soficoop et Evollys Production ;
A titre infiniment subsidiaire,
- désigner tel technicien qu'il plaira avec mission de :
- donner un avis motivé sur les conséquences de toute nature qu'aurait le maintien du pacte d'associé de la société EDG pour la sauvegarde de la société Soficoop ;
- donner un avis motivé sur les conséquences de toute nature qu'aurait la résiliation du pacte d'associé de la société EDG pour le groupe [L] et [M] ;
En tout état de cause,
- débouter la Selas BL & Associés ès qualités d'administrateur judiciaire de la société Soficoop et la société Soficoop de l'ensemble de leurs demandes;
- condamner solidairement la Selas BL&Associés ès qualités d'administrateur judiciaire de la société Soficoop et la société Soficoop à lui payer la somme de 10 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamner solidairement la Selas BL & Associés ès qualités d'administrateur judiciaire de la société Soficoop et la société Soficoop aux entiers dépens de l'instance.
II. Sur l'appel formé à l'encontre du jugement ayant statué sur la requête en résiliation du pacte HEP :
A titre principal,
- infirmer le jugement déféré en ce qu'il a déclaré l'action recevable ;
Statuant à nouveau,
- déclarer la Selas BL & Associés ès qualités d'administrateur judiciaire de la société Soficoop en sa demande de résiliation du pacte d'associés de la société HEP conclu le 27 décembre 2017 et son avenant du 17 juillet 2018 entre d'une part la société Holding [L] et [M] (HDG) et d'autre part, la société Soficoop ;
A titre subsidiaire,
- confirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté la Selas BL&Associés ès qualités d'administrateur judiciaire de la société Soficoop de sa demande de résiliation du pacte d'associés en date du 27 décembre 2017 conclu entre la société HDG et la société Soficoop et son avenant du 7 juillet 2018 ;
- confirmer le jugement débouté la Selas BL & Associés ès qualités d'administrateur judiciaire de la société Soficoop de sa demande de résiliation de la promesse de vente consentie par Soficoop au bénéfice d'HDG ou ADG portant sur 50 % ( moins une) des actions de la société HEP conclue
au terme du pacte d'associés en date du 27 décembre 2017 et la clause prévoyant les abandons de créance au préjudice de Soficoop ;
A titre infiniment subsidiaire,
- infirmer le jugement déféré en ce qu'il a dit n'y avoir lieu à la désignation d'un technicien ;
Statuant à nouveau,
- désigner tel technicien qu'il plaira avec mission de :
- donner un avis motivé sur les conséquences de toute nature qu'aurait le maintien du pacte d'associé de la société HDG pour la sauvegarde de la société Soficoop ;
- donner un avis motivé sur les conséquences de toute nature qu'aurait la résiliation du pacte d'associé de la société HDG pour le groupe [L] et [M] ;
En tout état de cause,
- débouter la Selas BL & Associés ès qualités d'administrateur judiciaire de la société Soficoop et la société Soficoop de l'ensemble de leurs demandes;
- condamner solidairement la Selas BL & Associés ès qualités d'administrateur judiciaire de la société Soficoop et la société Soficoop à lui payer la somme de 10 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamner solidairement la Selas BL & Associés ès qualités d'administrateur judiciaire de la société Soficoop et la société Soficoop aux entiers dépens de l'instance.
Il fait valoir que :
- la fin de non-recevoir opposée aux prétentions présentées par ses soins soulevée par la Selas BL & Associés est irrecevable en ce qu'elle porte atteinte au principe de l'Estoppel car il a précisément été attrait à la procédure initiée devant le juge-commissaire par l'administrateur judiciaire lui-même et M. [E] est d'ailleurs partie au pacte HEP de même que la société Soficoop au pacte EDG et il dispose d'un intérêt propre en ce qu'il était le représentant légal de la société Soficoop lors de la conclusion des pactes litigieux ;
- la demande de résiliation du pacte EDG encourt l'irrecevabilité car le pacte ne stipule aucune obligation à l'égard de la société Soficoop dont la présence s'explique en qualité d'actionnaire unique de la société Evollys Commercialisation aux fins que les stipulations lui soient opposables;
- la procédure de sauvegarde a été dévoyée par l'administrateur judiciaire car elle n'a été ouverte qu'à la seule fin d'instrumentaliser les dispositions dérogatoires de l'article L622-13 du code de commerce et l'exécution des pactes d'associés est sans incidence sur l'origine des difficultés de l'entreprise résidant dans les concours anormaux apportés par la société Soficoop à Urcoopa ainsi qu'à ses filiales déficitaires ;
- le pacte d'associés n'est pas un contrat en cours car il s'inscrit dans le prolongement du contrat de société et il comporte en l'espèce un ensemble de contrats ayant un objet indépendant le rendant inéligible à l'application des dispositions de l'article L622-13 du code de commerce ;
- les conditions posées par l'article L622-13 du code de commerce ne sont réunies ni pour le pacte EDG qui ne crée aucune obligation pour la société Soficoop, ni pour le pacte HEP car le montant des abandons de créance n'est pas défini avec certitude et qu'il n'est pas établi l'insuffisance alléguée du prix de cession des titres alors que la résiliation du pacte tendrait à priver la société Soficoop du produit de la cession et ainsi d'une manne financière bienvenue au regard des difficultés de financement ;
- la résiliation des pactes serait également de nature à aggraver le passif de la société Soficoop au regard des créances déclarées par les intimés à titre conservatoire.
Par avis notifié aux parties par voie électronique le 15 mai 2025, le ministère public indique que les pactes d'associés sont indissociables entre eux (parties identiques, parties et effets liés) et l'engagement irrévocable de céder par Soficoop n'a de sens qu'au vu de la globalité des protocoles et soutient que les pactes d'associés sont des contrats en cours susceptibles d'être résiliés au visa de l'article L622-13 du code de commerce et requiert la jonction des dossiers RG 24-829 et RG 24-290. Il précise que les éléments sont insuffisants pour apprécier la réalisation de la seconde condition posée par le texte en l'état des seules conclusions déposées par l'appelant.
A l'audience, le ministère public indique être favorable à l'éligibilité des pactes d'associés à la résiliation dérogatoire au droit commun et considère, s'agissant de la charge de la preuve afférente à l'absence d'atteinte aux droits du cocontractant, que celle-ci incombe à ce dernier et non à l'administrateur judiciaire.
Il est fait renvoi aux écritures susvisées pour un plus ample exposé des éléments de la cause, des moyens et prétentions des parties, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la procédure :
- sur la jonction
Deux requêtes en résiliation ont été présentées par l'administrateur judiciaire de la société Soficoop au juge-commissaire, lequel a rendu deux ordonnances à l'encontre desquelles un recours a été formé devant le tribunal mixte de commerce de Saint-Denis de La Réunion qui a rendu deux jugements frappés de deux appels distincts, formalisés par l'administrateur judiciaire sous les numéros de RG 25-289 et 25-290.
Aucun élément ne conduit à ordonner la jonction de ces deux procédures qui concernent deux pactes d'associés distincts, le pacte EDG pour le dossier 25-289 et le pacte HEP pour le dossier 25-290, lesquels n'ont d'ailleurs pas été signés par les mêmes parties.
- sur les conclusions uniques
Les parties ont notifié leurs écritures dans chacune des procédures mais si l'administrateur judiciaire et la société Soficoop au titre de ses droits propres ainsi que le Crédit agricole ès qualités de contrôleur ont pris des écritures distinctes dans chacun des dossiers, tel n'est pas le cas d'une part, de la société ADG, la société HDG, la société Evollys Production et M. [L] et, d'autre part de M. [E] qui ont pris des écritures globales incluant dans le dispositif de leurs conclusions des demandes afférentes tant à l'infirmation du jugement objet de la procédure 25-289 que du jugement objet de la procédure 25-290.
Les demandes afférentes à la procédure 25-289 seront déclarées sans objet dans le cadre de la présente procédure 25-290.
Sur le grief tiré du dévoiement de la procédure collective :
Les intimés arguent du dévoiement de la procédure collective ouverte à l'égard de la société Soficoop en soutenant que la procédure de sauvegarde, ouverte par jugement du 17 avril 2024 au profit de la société Soficoop dans les suites d'un mandat ad hoc, a été initiée dans la seule perspective d'obtenir la résiliation judiciaire des pactes d'associés litigieux.
Cet argument est inopérant dès lors que la procédure de sauvegarde a été convertie en procédure de redressement judiciaire par jugement du 16 avril 2025, ce qui atteste de la réalité des difficultés financières rencontrées par la société Soficoop.
C'est encore vainement qu'il est argué de l'instrumentalisation de la procédure par l'administrateur judiciaire au moyen de la signification, par acte extrajudiciaire du 31 décembre 2024, de l'option de non-continuation de la promesse de cession et des abandons de créances stipulées dans le pacte HEP alors que l'administrateur judiciaire désigné n'a fait qu'user des prérogatives offertes par l'article L622-13 du code de commerce dans le cadre de la mission qui lui a été confiée.
Sur l'irrecevabilité des prétentions formées par les intimés faute d'être partie au pacte HEP:
L'administrateur judiciaire soulève l'irrecevabilité des demandes de la société ADG, Evollys Production, M. [L] et M. [E] en raison de l'absence de signature du pacte d'associés HEP par leurs soins.
Le pacte d'associés HEP a été signé par la société Soficoop (représentée par l'Urcoopa, elle-même représentée par son représentant permanent M. [V] [E]) et par la société HDG (représentée par M. [W] [L]), seules ces sociétés ayant la qualité de parties aux termes de l'acte signé en présence de M. [E] et M. [L].
C'est vainement que les intimés concluent à l'irrecevabilité de cette demande présentée pour la première fois par l'administrateur judiciaire en cause d'appel sur le fondement de l'article 564 du code de procédure civile alors que les fins de non-recevoir peuvent être présentées en tout état de cause et pour la première fois en cause d'appel.
M. [E] se prévaut de son côté du principe d'Estoppel selon lequel nul ne peut se contredire au détriment d'autrui en soulignant qu'il a précisément été appelé en la cause par l'administrateur judiciaire dans le cadre de la requête présentée par ses soins, argumentation également reprise par les autres intimés.
Il ressort de la déclaration d'appel et des assignations à jour fixe délivrées par l'administrateur judiciaire que M. [E] et M. [L] ont été intimés à titre personnel dans le cadre de la présente procédure de sorte que la Selas BL & Associés ne peut invoquer l'irrecevabilité des prétentions présentées par leurs soins.
Les sociétés ADG et Evollys Production n'ont en revanche pas été attraites à la présente procédure 25-290 par l'appelant et seront déclarées irrecevables en leurs prétentions en ce qu'elles sont étrangères au pacte HEP litigieux.
Sur la demande de résiliation du pacte HEP :
L'article L622-13 du code de commerce régit le sort des contrats en cours dans le cadre de la procédure collective lesquels se définissent comme étant ceux n'ayant pas épuisé leurs effets fondamentaux au jour du jugement d'ouverture.
Selon l'article L622-13 IV du code de commerce, à la demande de l'administrateur, la résiliation est prononcée par le juge-commissaire si elle est nécessaire à la sauvegarde du débiteur et ne porte pas une atteinte excessive aux intérêts du cocontractant.
La question qui se pose en l'espèce est de déterminer si un pacte d'associés est susceptible de constituer un contrat en cours au sens de ce texte pouvant donner lieu à la procédure spécifique de résiliation.
Les parties s'opposent en l'espèce sur l'application de ce texte à un pacte d'associés prévoyant plusieurs obligations indépendantes les unes des autres et dont la nature s'oppose à l'analyse d'un ensemble contractuel ordinaire en ce qu'il tend à définir les modalités de gouvernance de la société et s'inscrit ainsi dans le prolongement des statuts de la société, lesquels ne peuvent être considérés comme un contrat en cours susceptible de la faculté exorbitante du droit commun prévue par le texte susvisé.
L'administrateur judiciaire, la société Soficoop et le Crédit agricole en sa qualité de contrôleur prônent de leur côté une application sans distinction de ce texte à tous les contrats en cours et plaident en faveur d'une interprétation stricte des exceptions légales et jurisprudentielles.
Les parties produisent des consultations juridiques non concordantes sur cette question.
La consultation du professeur [K] [Y], de l'université de [Localité 24] 1 relève que : 'En l'état du droit positif, rien ne conduit à exclure les pactes d'associés du domaine de l'article L622-13 du code de commerce. La loi vise les contrats sans distinction. Les pactes d'associés étant de nature contractuelle, il convient de ne pas distinguer là où la loi ne distingue pas. Hors les hypothèses d'exclusion légales (contrat de travail, fiducie) et régimes spéciaux (baux affectés à l'exploitation par ex), tous les contrats en cours relèvent du domaine de l'article L622-13 du code de commerce. Si un arrêt de la Cour de cassation a pu exclure le contrat de société de celui-ci, l'étude a fait apparaître que cette solution ne devrait pas être étendue aux pactes d'associés'.
La consultation du professeur [N] [A], de l'université [Localité 22] 1 Panthéon Sorbonne met en évidence que 'les statuts ne relèvent pas du régime des contrats en cours mais d'une autre logique qui est celle du droit des sociétés. Or, ce qui vaut pour les statuts vaut pour les stipulations d'un pacte lorsqu'elles ont le même objet que les statuts dont elles ne sont que le prolongement et qu'elles régissent le fonctionnement de la société. Il serait en effet incohérent qu'une même stipulation échappe ou non au régime des contrats en cours selon qu'elle aura été stipulée dans les statuts ou dans un pacte. Ce qui compte, c'est l'objet de la clause. Si elle vise à régir le fonctionnement du groupement, préciser les modalités de sa gouvernance, mettre en place un organe délibérant, instituer un droit de veto ou des règles de majorité dérogeant aux règles légales, on se trouve en présence d'un contrat qui complète ou aménage les statuts et qui doit dès lors être vu comme constituant avec eux un tout indivisible. Il s'en évince qu'un tel pacte ne peut, pas plus que les statuts, être soumis au régime de l'option'.
L'objet du pacte est défini comme suit dans l'acte :
'Les parties ont souhaité dans le cadre du présent pacte préciser notamment certaines règles de gouvernance de la société et de la société Evollys Production et prévoir une promesse de cession portant sur partie des titres de la société HEP par la société Soficoop au profit de la société HDG'.
Le pacte d'associés HEP signé le 27 décembre 2017 a été conclu pour une durée de quinze ans à l'exception des stipulations de l'article 'Promesse de cession des titres HEP au bénéfice d'HDG' qui a une durée propre.
Il comporte des engagements afférents à la gouvernance de la société HEP avec l'ajout d'une cause de cessation du mandat de directeur général aux cas listés dans les statuts, prévoit l'apport des titres d'Evollys Production détenus par la société Soficoop à HEP, des règles de gouvernance d'Evollys Production afférentes à la nomination, la cessation des fonctions et un droit de veto ainsi qu'une politique de distribution des dividendes.
Il comporte également une promesse de cession des titres HEP au bénéfice d'HDG dans le cadre d'une promesse de vente par la société Soficoop (le promettant) portant promesse irrévocable de céder à la société HDG et/ou à la société ADG sa filiale (le bénéficiaire) 50 % des actions composant le capital d'HEP moins une action, de façon à ce que le promettant et le bénéficiaire soient strictement égalitaires au capital d'HEP à l'issue de l'exercice de la promesse, la levée de l'option pouvant être mise en oeuvre dans un délai de douze mois à compter de l'approbation des comptes de l'exercice clos au 31 décembre 2024 de la société EDG.
L'exercice de la promesse s'accompagne d'une attribution d'un droit de vote double au profit de la société HDG et d'une reprise des garanties bancaires par le bénéficiaire avec un mécanisme d'abandon de créances par la société Soficoop.
L'avenant au pacte d'associés de la société HEP signé le 17 juillet 2018 par les mêmes parties a modifié le paragraphe IV.8 du pacte HEP afférent aux modalités de calcul des abandons de créances liées à la levée de l'option par la bénéficiaire.
Le pacte comporte une clause IX dans le titre afférent aux dispositions diverses prévoyant que si l'une quelconque des stipulations du pacte se révélait nulle ou non susceptible d'exécution, la validité des autres stipulations et le fait qu'elles soient susceptibles d'exécution ne seront en aucune manière affectée ni compromise, aucune des parties ne pouvant réclamer à l'autre de dommages-intérêts de ce chef.
Le premier juge a considéré que cette clause, consacrant l'autonomie des engagements les uns par rapport aux autres, faisait obstacle à la qualification du pacte d'associés comme un contrat unique en cours.
Comme le soutiennent l'administrateur judiciaire et la société Soficoop, l'autonomie des stipulations d'un contrat ne saurait à elle seule exclure la qualification de contrat en cours au sens de l'article L622-13 du code de commerce.
Il est exact que les engagements découlant du pacte HEP litigieux n'ont pas épuisé leurs effets de sorte qu'ils étaient encore en vigueur au jour de l'ouverture de la procédure collective de la société Soficoop.
Mais la nature des engagements est double ainsi que le précise l'objet même du pacte d'associés HEP en ce qu'il tend d'une part, à l'organisation de la gouvernance de la société et d'autre part, prévoit une promesse de cession des titres de la société HEP.
Ces deux catégories d'engagements doivent être clairement distingués et ne forment pas un ensemble contractuel unique de nature à permettre la résiliation du pacte d'associés dans sa globalité à raison de ce qu'il constituerait un contrat en cours au sens de l'article L622-13 du code de commerce.
Les engagements afférents à la gouvernance de la société ne créent aucun lien d'obligation entre les associés en ce qu'ils tendent à l'organisation des modalités de gouvernance de la personne morale et ont précisément été définis comme ayant vocation à compléter les statuts, les stipulations tendant en outre à faire primer le pacte sur les stipulations statutaires éventuellement contraires.
Les engagements contenus à ce titre dans le pacte HEP s'analysent dès lors comme ayant une fonction institutionnelle et ne sauraient par conséquent être assimilés à un contrat-cadre à exécution successive comme le sollicite la société Soficoop, la seule assimilation possible en l'espèce devant être effectuée à l'égard des statuts de la société HEP.
Si l'engagement afférent à la promesse de cession des titres est quant à lui créateur d'obligations à l'égard des associés et qu'il est ainsi de nature à constituer un contrat en cours au sens de l'article L622-13 du code de commerce, cet engagement ne saurait avoir d'incidence sur la qualification globale du pacte d'associés litigieux.
Le pacte HEP échappe ainsi à la qualification de contrat en cours au sens des dispositions de l'article L622-13 du code de commerce comme l'a retenu le premier juge et l'administrateur judiciaire de la société Soficoop sera par conséquent débouté de sa demande de résiliation globale du pacte par voie de confirmation du jugement déféré sur ce point.
Sur la demande de résiliation de la promesse de cession des actions HEP et des abandons de créance :
La société HDG et M. [L] font grief au premier juge d'avoir considéré que la promesse de cession des actions contenue dans le pacte d'associés HEP et les abandons de créances y afférents étaient des contrats en cours au sens de l'article L622-13 du code de commerce au moyen que l'engagement de vendre consenti par la société Soficoop avait été donné irrévocablement et avait ainsi été définitivement consommé.
Il découle cependant de l'article 1124 du code civil que la promesse unilatérale est le contrat par lequel une partie, le promettant, accorde à l'autre, le bénéficiaire, le droit d'opter pour la conclusion d'un contrat dont les éléments essentiels sont déterminés, et pour la formation duquel ne manque que le consentement du bénéficiaire.
Il s'en infère que la formation du contrat est subordonnée à la levée de l'option par le bénéficiaire de sorte que la promesse de vente consentie par la société Soficoop dont l'option n'avait pas été levée par le bénéficiaire à la date de l'ouverture de la procédure collective doit effectivement être considérée comme étant un contrat en cours. Il en est de même des abandons de créance qui ne constituent qu'une des modalités annexes à la mise en oeuvre de la promesse de vente des titres.
La demande de résiliation de la promesse de vente des titres doit être examinée au regard des deux conditions posées par l'article L622-13 du code de commerce, la condition afférente à la sauvegarde du débiteur et celle concernant l'absence d'atteinte excessive aux droits du cocontractant.
- sur la condition afférente à la sauvegarde du débiteur
Les parties s'opposent sur la définition du critère légal tenant à la condition de nécessité posée par l'article L622-13 du code de commerce, l'administrateur judiciaire, la société Soficoop et le crédit agricole prônant une conception large tandis que les intimés se prévalent d'une conception stricte.
L'administrateur judiciaire soutient que la résiliation de la promesse est nécessaire à la sauvegarde de Soficoop au regard des conséquences financières directes emportant une perte de 7,8 millions d'euros compte tenu des abandons/conversions de créances prévues et considère que la cession des titres emportera une perte nette de valeur patrimoniale de l'ordre de 26 millions d'euros au regard du prix de cession de l'ordre de 10 millions d'euros alors que l'immobilier sous-jacent détenu par la société HEP est valorisé à lui seul à plus de 73 millions d'euros selon le rapport [G] du 1er janvier 2021 et que la société Soficoop a largement financé ce bien constitué par l'abattoir de l'Etang-Salé.
Il se prévaut en outre de la privation du contrôle d'HEP en raison du droit de vote double attaché à la cession des actions et argue d'une perte de produits financiers au titre de dividendes et intérêts et de la perte du fonds de commerce d'Evollys Commercialisation au profit d'EDG en application des termes du contrat de location-gérance.
Il soutient que ces éléments ont une incidence sur la faisabilité du plan de Soficoop dont le passif déclaré s'élève à plus de 200 millions d'euros et dont le plan d'apurement nécessitera de nouveaux concours bancaires à hauteur de 36,7 millions d'euros.
Il excipe de l'impact négatif sur la notation crédit du groupe qu'entraînerait l'exercice de la promesse de cession ayant pour conséquence une réduction des délais de paiement octroyés par les banques ainsi que des difficultés à obtenir des financements pourtant indispensables et relève que Soficoop serait privée de la moitié des produits financiers en perdant ainsi une importante source de revenus.
La société Soficoop, au titre de ses droits propres, développe une argumentation similaire à celle de l'administrateuren exposant que la résiliation est nécessaire à la sauvegarde puisqu'elle vise à restaurer la valeur d'actif, à préserver la liquidité et rétablir la solvabilité globale de la société et souligne que la perte de valeur de plus de 40 millions d'euros qui résulterait de l'exécution de la promesse porterait gravement atteinte à la continuité de l'activité de Soficoop et compromettrait ses chances de redressement.
Le crédit agricole s'associe à l'argumentation de l'administrateur judiciaire.
Les intimés soutiennent de leur côté qu'il appartient à la procédure collective de démontrer qu'il n'existe pas d'alternative à la résiliation du contrat litigieux pour sauvegarder le débiteur et qu'il est impossible d'exciper d'une simple résiliation de confort en la matière.
La société HDG et M. [L] exposent qu'une remise en cause des abandons de créances précipitera la chute de la société Evollys Production qui ne dispose pas de la trésorerie suffisante pour régler ces dettes. Ils soutiennent que la remise en cause des abandons de créances coûtera plus cher que leur maintien et qu'ils ne sont pas gratuits pour être associés à une garantie par HDG de 50 % des engagements financiers de la société Evollys Production, ce qui va mécaniquement alléger la charge de Soficoop.
Ils indiquent que l'acquisition par HDG des titres de HEP n'implique aucune obligation financière pour Soficoop, laquelle a au contraire vocation à percevoir un prix de cession de l'ordre de 10 millions d'euros et des dividendes annuels récurrents certains et que la prise de contrôle de HEP par HDG permettra de consolider sa situation en soulignant que le passé démontre que les méthodes de gestion de Soficoop ne sont en rien pérennes comme en attestent les difficultés rencontrées par celle-ci et par ses filiales.
Ils soutiennent que la valorisation de l'actif immobilier telle que découlant du rapport [G] établi en 2021 à hauteur de 73 millions d'euros n'est pas adéquate car elle repose sur des valeurs assurantielles, c'est-à-dire des valeurs à neufs alors que la valeur vénale est très inférieure et ressort à 30,5 millions d'euros selon l'estimation [G] du 1er février 2025.
Ils ajoutent que le sujet du prix de cession des actions de HEP est hors débat, le prix pouvant être déterminé par un expert désigné en application de l'article 1843-4 du code civil.
S'agissant de la perte alléguée de remontée de dividendes, ils exposent que le positionnement de Soficoop sur ce point relève de la pure spéculation dans la mesure où Evollys Production n'a pas vocation à distribuer des dividendes en ce qu'elle n'exploite aucune activité commerciale et qu'elle est un centre de coûts pour l'ensemble de la filière avicole de [Localité 19] et qu'elle perçoit des subventions d'investissements annuelles aux fins de réalisation de ceux-ci.
Ils ajoutent que la cession du fonds de commerce d'Evollys Production n'a jamais été envisagée, seul le fonds de commerce d'Evollys Commercialisation étant concerné dans le cadre du contrat de location-gérance consenti à EDG.
Ils soutiennent que la faisabilité du plan conditionnée par des financements bancaires à obtenir d'un montant global de 36,7 millions d'euros ne serait nullement impactée par la cession des titres de HEP.
M. [E] argue pour sa part de l'absence de définition avec certitude du montant des abandons de créance au regard des confusions entretenues dans les écritures de l'administrateur judiciaire sur ce point et expose qu'ils ont été dictés dans un impératif de recapitalisation de la société Evollys Production au regard de son activité historiquement déficitaire et précise qu'aucun élément ne permet de déterminer la valorisation réelle des titres de la société Evollys Production.
Les intimés se rejoignent en indiquant que la résiliation de la promesse de cession conduirait à aggraver le passif de la société Soficoop, avec des déclarations de créances à titre conservatoire pour un montant cumulé de 75 millions d'euros que l'administrateur judiciaire n'a pas inclus dans le cadre de l'élaboration du plan de sauvegarde.
Il ressort du rapport du cabinet Grant Thornton saisi par l'administrateur judiciaire aux fins d'identification des modalités envisageables d'apurement du passif dans le cadre d'un plan que les conditions préalables à l'élaboration d'un plan reposent sur l'obtention de financements bancaires pour un montant de 36,7 millions d'euros sur les trois premiers exercices afin de permettre les investissements indispensables (71 millions d'euros) à la réalisation des prévisions d'activité des filiales.
Le rapport sur le déroulement de la période d'observation établi par l'administrateur judiciaire le 9 février 2025 indique que deux modalités d'apurement ont été proposées.
S'agissant des conditions de viabilité du plan de remboursement, il relève que les deux modélisations d'apurement du passif ont permis de démontrer :
- la capacité de la société Soficoop à rembourser l'intégralité des dettes tiers (hors traitement [L]) sur une durée de 10 ans par les flux d'exploitation des entités du groupe Urcoopa et la mise en place de dividendes ;
- l'amélioration du traitement des créanciers en termes de temporalité et de montant par le traitement du compte courant débiteur de l'Urcoopa à l'adoption du projet de plan.
S'agissant des dividendes, il a été noté que compte tenu de l'absence d'informations comptables et financières ainsi que de l'application des pactes EDG et HEP, aucun dividende n'avait été positionné sur la partie avicole alors même que les résultats étaient bénéficiaires.
L'administrateur judiciaire précise avoir insisté auprès des partenaires bancaires sur l'importance de normaliser la relation bancaire future du groupe au regard des besoins de financement sur les prochaines années, la volonté du groupe Urcoopa étant de privilégier ses partenaires bancaires en minimisant l'impact de la procédure sur leurs engagements.
Le rapport réalisé par le 15 mai 2025 par le cabinet Eight Advisory à la demande des intimés conclut que :
Le plan de sauvegarde présenté par Soficoop, lequel permet de désintéresser l'intégralité des créanciers tiers, ne tient pas compte d'une contribution du pôle avicole. Par conséquent, aucun élément économique ou financier ne démontre le caractère nécessaire de la résiliation des pactes associés EDG et HEP et de la promesse de cession des titres d'HEP à HDG.
Il indique que Soficoop prévoit un plan d'apurement du passif gelé de 115 millions d'euros avec deux options qui ne tiennent pas compte d'une quelconque contribution du pôle avicole (représentant en tout état de cause une dette marginale par rapport à Soficoop, comprise entre 7,5% et 14 %) et indique que tout euro complémentaire que percevrait Soficoop en provenance du pôle avicole ne viendrait que rembourser les dettes dues à ses filiales.
Il précise que les deux options du plan prévoient à horizon 2035 la perception par Soficoop de dividendes prévisionnels sur 2024-2035 de Réunilait (38,8 millions euros), Cogedal (18,9 millions euros) et Proval (3,3 millions euros), aucune de ces entités ne faisant partie du pôle avicole.
Le rapport de l'administrateur judiciaire sur la période d'observation du 28 mars 2025 met en évidence au titre des conditions de viabilité du plan de remboursement que :
La proposition d'apurement intègre les trois conditions de viabilité du plan :
- un engagement des partenaires bancaires sur le financement des Capex des pôles d'exploitation sur 2025 et les années futures, ainsi que l'octroi d'une ligne de financement court terme pour un montant et un emprunteur restant à définir ;
- le non-remboursement ou un remboursement très partiel des créances déclarées par [L] & [M] ;
- le remboursement total sur une période de deux ans du compte courant débiteur de l'Urcoopa pour un montant de 16,7 millions d'euros.
Le plan repose sur la réalisation d'investissements dans les différentes filiales pour un montant total de 71 millions d'euros au cours des trois prochains exercices, dont environ 36,7 millions d'euros doivent être financés par des partenaires bancaires, les filiales de Soficoop (hors périmètre d'Evollys Production) devant être en mesure de verser au cours des dix prochains exercices des produits financiers cumulés à 61 millions d'euros.
Il est établi que le plan de sauvegarde n'a pu être finalisé dans les délais en l'absence de l'obtention d'un accord avec les établissements bancaires, raison pour laquelle la mesure de sauvegarde a été convertie en redressement judiciaire par jugement du 16 avril 2025 du tribunal mixte de commerce de Saint-Denis de La Réunion avec prolongation exceptionnelle de la période d'observation.
Ce qui est en jeu est donc l'obtention de financements bancaires par la société Soficoop à hauteur de 36,7 millions d'euros, condition indispensable à la viabilité du plan.
Or, les accords de financements bancaires sont par nature étroitement liés à la surface patrimoniale de l'emprunteur et il est évident que la cession de 50 % des actions de HEP au profit de la société HDG est de nature à impacter le patrimoine de la société Soficoop et par voie de conséquence sa capacité à obtenir des financements bancaires, lesquels sont indispensables à la faisabilité du plan de continuation de l'entreprise.
L'apport de trésorerie dont pourrait bénéficier la société Soficoop dans l'hypothèse de la cession des actions au prix évalué par les parties à environ 10 millions d'euros n'est pas de nature à remettre en cause cette analyse en ce qu'il ne permettrait pas de faire face aux besoins financiers mis en évidence dans le cadre de la préparation du plan.
Dans ces conditions, il est établi que la résiliation de la promesse de cession des actions et des abandons de créances y afférents sont nécessaires à la sauvegarde de la société Soficoop sans qu'il y ait lieu d'ordonner une mesure d'expertise judiciaire pour s'en convaincre.
La demande subsidiaire aux fins de désignation d'un expert sera par conséquent rejetée par voie de confirmation du jugement déféré.
- sur la condition afférente à l'absence d'atteinte excessive aux intérêts du cocontractant
Le tribunal a rejeté la demande de résiliation judiciaire de la promesse de vente et de la clause prévoyant les abandons de créances au préjudice de Soficoop en l'absence de preuve par l'administrateur judiciaire de l'absence d'atteinte excessive aux intérêts du cocontractant.
L'appelant fait grief au premier juge d'avoir inversé la charge de la preuve et considère que la société HDG, seule concernée par la résiliation du contrat en cours, ne rapporte pas la preuve d'une atteinte excessive à ses intérêts en l'absence d'un quelconque impact sur la poursuite de l'activité de la société dans les conditions actuelles.
Contrairement à la décision du premier juge, le cocontractant qui s'oppose à la demande de résiliation doit rapporter l'atteinte excessive à ses droits qu'il allègue.
Seule la société HDG, partie cocontractante de la société Soficoop, bénéficiaire de la promesse de cession des actions est susceptible d'être impactée par la résiliation de ce contrat en cours.
Elle excipe à cet égard de l'éviction de la société EDG au profit de la société Evollys Commercialisation mais cet argument est inopérant car la société EDG est totalement étrangère au contrat afférent à l'acquisition des actions de la société HEP par la société HDG et le fonctionnement de la société EDG n'est donc pas concerné par la résiliation du contrat litigieux.
Elle se prévaut en outre d'une grave atteinte aux intérêts du groupe [L] et [M] en soutenant que le fonds de commerce loué par ADG bénéficierait à une entité dont le fonctionnement serait à terme paralysé et qu'elle se trouverait privée de la possibilité de reprendre son fonds de commerce.
Le fonds de commerce de la société ADG a été consenti à la société EDG comme le fonds de commerce de la société Evollys Commercialisation a été consenti à la société EDG dans les suites du pacte d'associés EDG, lequel ne sera pas impacté par la résiliation de la promesse de cession des actions de HEP, les stipulations prévues dans le contrat de location-gérance ne conditionnant pas la possibilité d'acquisition du fonds de commerce par la société EDG à la levée de l'option d'achat par la société HDG.
C'est donc vainement que les intimés excipent d'une remise en cause des accords de 2017 et de l'organisation de la filière avicole de l'île de la Réunion de nature à avoir des conséquences sociales majeures alors que la résiliation du contrat litigieux est seule de nature à impacter la détention capitalistique de la société HDG en privant celle-ci de la perspective d'augmentation de ses parts dans la société HEP à hauteur de 50 % sans que l'activité économique de la société HDG ne subisse une quelconque incidence.
La seule conséquence concrète pour la société HDG du fait de l'absence de réalisation de la cession des titres à son profit consiste à maintenir celle-ci dans sa position actuelle d'actionnaire ultra-minoritaire en ce qu'elle ne détient qu'une action de la société HEP.
Or, cette situation est sans incidence sur le fonctionnement actuel de l'UES Evollys qui poursuivra son activité dans les conditions antérieures.
La société HDG se prévaut enfin d'une déclaration de créance de 36 283 546,53 euros au passif de la procédure collective de la société Soficoop et se prévaut ainsi d'un préjudice financier.
Le préjudice financier allégué à ce titre est cependant destiné à être compensé par la prise en compte de la créance dans le cadre du plan et celle-ci n'est pas de nature à emporter des conséquences sur la continuité d'exploitation de la société HDG qui poursuivra son activité dans les mêmes conditions.
La perte d'une meilleure détention capitalistique dans la société HEP par la société HDG du fait de la résiliation de la promesse de cession des actions s'analyse en la suppression d'un avantage contractuel non encore exercé et ne caractérise pas une atteinte excessive aux intérêts de la société HDG en ce que les conditions de son activité ne seront pas modifiées alors que la résiliation de ce contrat en cours est nécessaire à la sauvegarde de la société Soficoop.
Il sera ainsi fait droit à la demande de résiliation de la promesse de vente consentie par Soficoop au bénéfice d'HDG et à la clause prévoyant les abandons de créance au préjudice de Soficoop par voie d'infirmation du jugement déféré.
Sur les autres demandes :
Partie succombante, la société HDG sera condamnée à régler les entiers dépens, de première instance et d'appel, sur le fondement des dispositions de l'article 696 du code de procédure civile.
L'équité commande par ailleurs de condamner la société HDG à payer la somme de 6 000 euros à la Selas BL & Associés ès qualités d'administrateur judiciaire de la société Soficoop et la somme de 6 000 euros à la société Soficoop en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Les autres prétentions du même chef présentées par les intimés seront rejetées.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Dit n'y avoir lieu à ordonner la jonction du dossier avec le dossier 25-289 ;
Déclare sans objet les demandes présentées par les parties afférentes à l'infirmation du jugement objet de la procédure RG 25-289 dans le cadre de la présente procédure ;
Déclare irrecevables les demandes des sociétés ADG et Evollys Production dans le cadre de la présente procédure ;
Rejette la fin de non-recevoir tirée de l'irrecevabilité des prétentions de M. [L] et de M. [E] ;
Confirme le jugement déféré en ce qu'il a débouté la Selas BL & Associés ès qualités d'administrateur judiciaire de la procédure de sauvegarde de sa demande de résiliation du pacte d'associés en date du 27 décembre 2017 conclu entre la société Soficoop et la société HDG et son avenant en date du 7 juillet 2018 et en ce qu'il a dit n'y avoir lieu à la désignation d'un technicien;
Infirme le jugement déféré pour le surplus de ses dispositions soumises à la cour ;
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Prononce la résiliation de la promesse de vente consentie par Soficoop au bénéfice d'HDG ou ADG portant sur 50 % (moins une) des actions d'HEP conclue aux termes du pacte d'associés du 27 décembre 2017 et de la clause prévoyant les abandons de créance au préjudice de Soficoop sur le fondement de l'article L622-13 du code de commerce ;
Condamne la société HDG à payer les entiers dépens, de première instance et d'appel ;
Condamne la société HDG à payer à la Selas BL & Associés ès qualités d'administrateur judiciaire de la société Soficoop la somme de 6 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne la société HDG à payer la somme de 6 000 euros à la société Soficoop au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Rejette toute autre demande plus ample ou contraire.
Le présent arrêt a été signé par Madame Séverine LEGER, Conseillère faisant fonction de Présidente de chambre, et par Madame Nathalie BEBEAU, Greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.