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Décisions

CA Versailles, ch. civ. 1-5, 3 juillet 2025, n° 25/00411

VERSAILLES

Arrêt

Autre

CA Versailles n° 25/00411

3 juillet 2025

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 30B

Chambre civile 1-5

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 03 JUILLET 2025

N° RG 25/00411 - N° Portalis DBV3-V-B7J-W66K

AFFAIRE :

S.A.R.L. MDP ARONY

C/

S.N.C. [Adresse 15] (SPACIA & CIE)

Décision déférée à la cour : Ordonnance rendue le 13 Décembre 2024 par le Président du TJ de [Localité 12]

N° RG : 24/00294

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le : 03.07.2025

à :

Me Christian GAYRAUD, avocat au barreau de VAL D'OISE (51)

Me Véronique FAUQUANT, avocat au barreau de VAL D'OISE (100)

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE TROIS JUILLET DEUX MILLE VINGT CINQ,

La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

S.A.R.L. MDP ARONY

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

N° SIRET : 821 020 583

[Adresse 6]

[Localité 2]

Représentant : Me Christian GAYRAUD de la SCP GAYRAUD-BENAHJI-DANIELOU, avocat au barreau de VAL D'OISE, vestiaire : 51 - N° du dossier E00086HD

APPELANTE

****************

S.N.C. [Adresse 15] (SPACIA & CIE)

prise en la personne de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège

N° SIRET : 348 093 196

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentant : Me Véronique FAUQUANT de la SCP PETIT MARCOT HOUILLON, Postulant, avocat au barreau de VAL D'OISE, vestiaire : 100 - N° du dossier 2400222

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 04 Juin 2025 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Pauline DE ROCQUIGNY DU FAYEL, Conseillère faisant fonction de présidente, chargée du rapport et Madame Marina IGELMAN, conseillère.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Pauline DE ROCQUIGNY DU FAYEL, Conseillère faisant fonction de présidente,

Madame Marina IGELMAN, Conseillère,

Monsieur Hervé HENRION, Conseiller,

Greffière lors des débats : Mme Elisabeth TODINI,

EXPOSE DU LITIGE

Par acte sous-seing privé du 23 septembre 2008, la SNC [Adresse 14] [Localité 7] et Cie (Spacia & Cie) a donné à bail commercial à la S.A.R.L. [Adresse 3] [Localité 13] un local situé local n°103, galerie marchande du bâtiment A, [Adresse 5] à [Localité 9]. Le contrat de bail a été transféré avec le fonds de commerce à deux reprises, puis finalement à la S.A.R.L. MDP Arony en date du 25 octobre 2022.

Par acte de commissaire de justice, la société Spacia & Cie a fait délivrer à la société MDP Arony, en date du 8 novembre 2023, un commandement de payer la somme principale de 119 325,43 euros, à titre d'arriéré locatif au 1er octobre 2023, cet acte visant la clause résolutoire insérée au bail.

Les loyers et les charges sont demeurés impayés.

Par acte de commissaire de justice délivré le 4 mars 2024, la société Spacia & Cie a fait assigner en référé la société MDP Arony aux fins d'obtenir principalement le constat de l'acquisition de la clause résolutoire, l'expulsion de sa locataire et sa condamnation au paiement d'une provision de 112 096,47 euros, outre une indemnité d'occupation provisionnelle.

Par ordonnance réputée contradictoire rendue le 13 décembre 2024, le juge des référés du tribunal judiciaire de Pontoise a :

- constaté l'acquisition de la clause résolutoire insérée au bail à la date du 8 décembre 2023 ;

- ordonné, à défaut de restitution volontaire des lieux dans les quinze jours de la signification de la présente ordonnance, l'expulsion de la société MDP Arony, et de tout occupant de son chef des lieux situés à local n°103, galerie marchande du bâtiment A, [Adresse 4] [Adresse 11] à [Localité 10] avec le concours, en tant que de besoin, de la force publique ;

- fixé à titre provisionnel l'indemnité d'occupation due par la société MDP Arony, à compter de la résiliation du bail et jusqu'à la libération effective des lieux par la remise des clés, à une somme égale au montant du loyer contractuel, outre les taxes, charges et accessoires ;

- condamné par provision la société MDP Arony à payer à la société Spacia & Cie la somme de 211 707,99 euros au titre du solde des loyers, charges, accessoires et indemnités d'occupation arriérés au 13 novembre 2024, avec intérêts au taux légal à compter du 8 novembre 2023 sur 119 325,99 euros et à compter de l'assignation sur le surplus, ainsi que les indemnités d'occupation postérieures ;

- dit n'y avoir lieu à référé sur la conservation du dépôt de garantie ;

- condamné la société MDP Arony aux entiers dépens, en ce compris le coût du commandement du 8 novembre 2023 ;

- condamné la société MDP Arony à payer à la société Spacia & Cie la somme de 1 500 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- rappelé que la décision est exécutoire à titre provisoire.

Par déclaration reçue au greffe le 15 janvier 2025, la société MDP Arony a interjeté appel de cette ordonnance en tous ses chefs de disposition.

Par jugement du tribunal de commerce de Pontoise rendu le 3 février 2025, la société MDP Arony a été placée en redressement judiciaire. Le tribunal de commerce a désigné la SELARL V&V, prise en la personne de Maître [K] [N], en qualité d'administrateur judiciaire et la SELARL Asteren, prise en la personne de Maître [M] [L], en qualité de mandataire judiciaire.

Dans leurs dernières conclusions déposées le 31 mars 2025 auxquelles il convient de se reporter pour un exposé détaillé de leurs prétentions et moyens, la société MDP Arony, la société V&V prise en la personne de Maître [K] [N] ès qualités d'administrateur judiciaire de la société MDP Arony, et la société Asteren prise en la personne de Maître [M] [L] ès qualités de mandataire judiciaire de la société MDP Arony, intervenantes volontaires, demandent à la cour de :

'- juger que la clause résolutoire insérée au bail n'était pas définitivement acquise, à la date du jugement d'ouverture de la procédure de redressement judiciaire de la société MDP Arony,

- infirmer en conséquence l'ordonnance de référé en date du 13 décembre 2024 en toutes ses dispositions,

- condamner la [Adresse 14] [Localité 8] & Cie (Spacia & Cie), en tous les dépens.'

Dans ses dernières conclusions déposées le 22 avril 2025 auxquelles il convient de se reporter pour un exposé détaillé de ses prétentions et moyens, la société Spacia & Cie demande à la cour, au visa de l'article L. 621-40 du code de commerce, de :

'- infirmer l'ordonnance dont appel,

- juger que les dépens seront employés en frais privilégiés de la procédure collective de la société MDP Arony,

- débouter les appelant et intervenants volontaires de toute demande plus ample ou contraire de ce chef.'

L'ordonnance de clôture a été rendue le 27 mai 2025.

MOTIFS DE LA DÉCISION

L'article L. 145-41 du code de commerce dispose que toute clause insérée dans le bail prévoyant la résiliation de plein droit ne produit effet qu'un mois après un commandement demeuré infructueux. Le commandement doit à peine de nullité mentionner ce délai.

L'article L. 622-21 I du code de commerce, applicable en procédure de redressement judiciaire par renvoi de l'article L. 631-14 du même code, dispose que le jugement d'ouverture d'une procédure collective 'interrompt ou interdit toute action en justice de la part de tous les créanciers dont la créance n'est pas mentionnée au I de l'article L. 622-17 et tendant :

1° A la condamnation du débiteur au paiement d'une somme d'argent ;

2° A la résolution d'un contrat pour défaut de paiement d'une somme d'argent.'

Il résulte de la combinaison de ces textes que l'action introduite par le bailleur, avant le placement en redressement judiciaire du preneur, en vue de faire constater l'acquisition de la clause résolutoire figurant au bail commercial pour défaut de paiement des loyers ou des charges échus antérieurement au jugement d'ouverture de la procédure, ne peut être poursuivie après ce jugement.

Au cas présent, la décision dont appel date du 13 décembre 2024 et l'appel a été interjeté le 15 janvier 2025 tandis que la procédure de redressement judiciaire de la société MDP Arony a été ouverte par jugement du tribunal de commerce de Pontoise du 3 février 2025, de sorte qu'à cette date, elle n'était pas passée en force de chose jugée.

En application des textes susvisés, à défaut de décision passée en force de chose jugée antérieurement à l'ouverture de la procédure collective, une demande tendant à la constatation en référé de l'acquisition d'une clause résolutoire d'un bail commercial pour défaut de paiement de loyers échus avant l'ouverture de la procédure collective se heurte à l'interdiction des poursuites et doit être déclarée irrecevable.

Il est par ailleurs constant que seules les condamnations prononcées par le juge du fond peuvent faire l'objet d'une fixation au passif d'une société en redressement judiciaire et qu'une provision susceptible d'être accordée par le juge des référés n'étant par nature qu'une créance provisoire, ne peut faire l'objet d'une telle fixation, la demande concernant cette créance devant être soumise au juge-commissaire dans le cadre de la procédure de vérification des créances.

Par voie d'infirmation, il convient dès lors de déclarer la [Adresse 14] [Localité 7] et Cie irrecevable en toutes ses demandes.

Sur les demandes accessoires

Compte tenu des faits de l'espèce et de l'évolution procédurale de la situation de l'appelante, l'ordonnance sera confirmée en ce qu'elle a statué sur les frais irrépétibles ainsi que sur les dépens sauf à préciser qu'ils seront fixés au passif de la procédure collective de la société MDP Arony.

A hauteur d'appel, chacune des parties conservera la charge des dépens par elles exposés.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Vu le jugement du tribunal de commerce de Pontoise rendu le 3 février 2025 ouvrant une procédure de redressement judiciaire à l'égard de la société MDP Arony,

Donne acte à la société V&V prise en la personne de Maître [K] [N] et à la société Asteren prise en la personne de Maître [M] [L] de leur intervention volontaire en leur qualité respective d'administrateur et de mandataire judiciaires de la société MDP Arony ;

Infirme l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions sauf en ce qu'elle a statué sur les frais irrépétibles ainsi que sur les dépens et sauf à préciser qu'ils seront fixés au passif de la procédure collective de la société MDP Arony ;

Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,

Déclare la [Adresse 14] [Localité 7] et Cie irrecevable en ses demandes :

Dit que chaque partie conservera la charge des dépens par elle exposés à hauteur d'appel.

Arrêt prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, signé par Madame Pauline DE ROCQUIGNY DU FAYEL, Conseillère faisant fonction de présidente, et par Madame Elisabeth TODINI, Greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La Greffière La Présidente

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