CA Grenoble, ch. com., 3 juillet 2025, n° 24/01161
GRENOBLE
Arrêt
Autre
N° RG 24/01161 - N° Portalis DBVM-V-B7I-MFVD
C4
Minute N°
Copie exécutoire
délivrée le :
la SCP LSC AVOCATS
la SELARL CDMF AVOCATS
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE GRENOBLE
CHAMBRE COMMERCIALE
ARRÊT DU JEUDI 03 JUILLET 2025
Appel d'un jugement (N° RG 18/04051)
rendu par le TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de [Localité 9]
en date du 19 février 2024
suivant déclaration d'appel du 14 mars 2024
APPELANTE :
S.C.I. LA BERANGERE au capital de 1 524.49€ immatriculée au RCS de [Localité 9] sous le n°315 492 264, prise en la personne de sa gérante domiciliée en cette qualité audit siège,
[Adresse 4]
[Localité 1]
représentée par Me Cédric LENUZZA de la SCP LSC AVOCATS, avocat au barreau de GRENOBLE
INTIMÉE :
S.A. CIC LYONNAISE DE BANQUE au capital social de 260.840.262,00 euros, immatriculée au RCS de [Localité 10] sous le numéro 954 507 976, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège ;
[Adresse 6]
[Localité 5]
représentée par Me Jean-Luc MEDINA de la SELARL CDMF AVOCATS, avocat au barreau de GRENOBLE, substitué par Me Alexis BANDOSZ, avocat au barreau de GRENOBLE,
COMPOSITION DE LA COUR :
LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Madame Marie-Pierre FIGUET, Présidente,
M. Lionel BRUNO, Conseiller,
Mme Raphaële FAIVRE, Conseillère,
Assistés lors des débats de Alice RICHET, Greffière.
DÉBATS :
A l'audience publique du 17 avril 2025, M. BRUNO, Conseiller, a été entendu en son rapport,
Les avocats ont été entendus en leurs conclusions,
Puis l'affaire a été mise en délibéré pour que l'arrêt soit rendu ce jour,
Faits et procédure :
1. Selon un acte notarié du 30 septembre 2009, la Sci La Bérangère a donné à bail à la société Lyonnaise de Banque un local commercial situé [Adresse 2] à Saint Martin d'Hères (38), à destination d'exercice de toutes opérations concernant le métier d'agence de banque, bourse, assurance et immobilier, avec toutes activités connexes desdits secteurs, ainsi que toutes opérations, de promotion auprès du public des actions et technologies mises en place par la société, à l'exclusion de toute autre utilisation. Le prix du bail a été fixé à 75.000 euros par an, hors taxes, droits et charges, payable par trimestres égaux et d'avance.
2. La société Lyonnaise de Banque a fait délivrer au bailleur une demande de renouvellement à compter du 1er octobre 2018 par acte extra-judiciaire en date du 4 juin 2018, en sollicitant la fixation du loyer à 52.000 euros, au lieu du loyer courant de 82.085,80 euros.
3. La société La Bérangère a accepté l'offre de renouvellement par acte extra-judiciaire en date du 11 juillet 2018, mais s'est opposée à la fixation du loyer au montant proposé, sollicitant la fixation d'un loyer en principal de 82.085,80 euros.
4. Par mémoire en demande notifié le 13 septembre 2018, la société Lyonnaise de Banque a sollicité la fixation du loyer du local commercial à la valeur locative, soit 52.000 euros en principal, celle-ci étant inférieure au loyer courant. Par acte du 17 octobre 2018, elle a assigné la société La Bérangère en fixation de la valeur locative pour ce montant.
5. Par jugement du 16 septembre 2019, le juge des loyers commerciaux du tribunal judiciaire de Grenoble a constaté que par l'effet de la demande de renouvellement délivrée le 4 juin 2018 par le preneur, le bail concernant les locaux s'est renouvelé à compter du 1er octobre 2018, et a, avant dire droit, désigné M. [W] en qualité d'expert. M. [W] ayant refusé la mission, l'expertise a été menée par Mme [B], qui a déposé son rapport le 21 juin 2022.
6. Par jugement du 19 février 2024, le juge des loyers commerciaux du tribunal judiciaire de Grenoble a :
- fixé à 62.658 euros en principal par an, à compter du 1er octobre 2018, le loyer du bail renouvelé depuis cette date entre la Sa Lyonnaise de Banque et la Sci La Bérangère pour les locaux situés [Adresse 2] à Saint Martin d'Hères (38), toutes autres clauses et conditions du bail expiré demeurant inchangées;
- rejeté la demandé de la Sa Lyonnaise de Banque de condamnation au remboursement du trop-perçu de loyers ;
- rappelé toutefois que conformément aux dispositions de l'article L 111-3 du code des procédures civiles d'exécution, la présente décision, lorsqu'elle aura force exécutoire, constituera un titre exécutoire permettant l'exécution forcée;
- ordonné l'exécution provisoire de la présente décision ;
- débouté les parties du surplus de leurs demandes ;
- dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamné chacune des parties par moitié aux dépens qui incluront le coût de l'expertise.
7. La Sci La Bérangère a interjeté appel de cette décision le 14 mars 2024, en ce qu'elle a :
- fixé à 62.658 euros en principal par an, à compter du 1er octobre 2018, le loyer du bail renouvelé depuis cette date entre la Sa Lyonnaise de Banque et la Sci La Bérangère pour les locaux situés [Adresse 2] à Saint Martin d'Hères (38), toutes autres clauses et conditions du bail expiré demeurant inchangées ;
- débouté les parties du surplus de leurs demandes ;
- condamné chacune des parties par moitié aux dépens qui incluront le coût de l'expertise.
8.L'instruction de cette procédure a été clôturée le 13 mars 2025.
Prétentions et moyens de la Sci La Bérangère :
9. Selon ses conclusions remises par voie électronique le 2 décembre 2024, elle demande à la cour, au visa des articles L.145-33 et L.145-34 du code de commerce, des articles 1134 et suivant anciens du code civil':
- de réformer la décision déférée ;
- de fixer à 82.085,80 euros par an, en principal, hors charges et hors taxes, le loyer du bail renouvelé à effet du 1er octobre 2018 dont bénéficie la société Lyonnaise de Banque pour les locaux situés [Adresse 3] à [Localité 16] ;
- de débouter la société Lyonnaise de Banque de l'intégralité de ses demandes';
- préalablement, au cas où la cour s'estimerait insuffisamment informée, d'ordonner une expertise conformément à l'article R.145-30 du code de commerce concernant la seule surface des lieux occupés par la demanderesse;
- dans ce cas, de fixer le loyer provisionnel à la somme de 82.085,80 euros à effet du 1er octobre 2018 jusqu'à fixation définitive ;
- de condamner la société Lyonnaise de Banque au paiement d'une somme de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- de condamner la même aux entiers dépens de première instance et d'appel comprenant le coût de l'expertise.
10. Elle expose':
11. - concernant la surface, que l'expert a procédé aux opérations de relevé avec un sapiteur, sans convoquer formellement les parties qui n'ont pu ainsi critiquer la manière de procéder; qu'il n'a pas été pratiqué conformément à la charge de l'expertise en évaluation immobilière, mais comme en matière de baux d'habitation, puisqu'il a été retenu une surface habitable, alors qu'en matière de bail commercial, il convient de prendre en compte la surface brute hors 'uvre nette (SHON), après déduction des éléments de structures et les circulations verticales; que cette surface SHON comprend ainsi la somme des planchers de chaque niveau, moins tout ce qui n'est pas aménageable (sous-sol, toiture, terrasse, loggia, surfaces non closes) ;
12. - qu'avant la signature du bail, l'agence Nahmias Immobilier et l'intimée se sont rapprochées de la société Papeteries Ode en 2008, pour une reprise de la moitié de la surface commerciale de celle-ci; qu'après accord de celle-ci, elles ont convenu que la concluante accepte une cession d'une partie de la surface de la papeterie à l'intimée, selon le projet de division de la surface commerciale résultant des plans élaborés en mai 2018 par l'architecte de la banque, prévoyant la construction d'un mur de séparation des locaux de la papeterie de ceux de la banque, pour allouer à l'intimée une surface exploitable de 290 m² au rez-de-chaussé, avec une extension de la mezzanine existante pour la porter à 100 m², soit une surface totale de 390 m² ;
13. - que suite au pré-rapport d'expertise, la concluante, ne pouvant se rendre dans les locaux de l'intimée, a obtenu l'autorisation de la papeterie [Localité 11] Ode pour effectuer un relevé du mur de séparation érigée par l'intimée, reporté sur le plan du bâtiment communiqué à l'expert; que les surfaces sont ainsi de 280,17 m² pour le rez-de-chaussé et de 99,81 m² pour la mezzanine, après déduction du mur de séparation et de la trémie de l'escalier;
14. - que l'expert n'ayant pas répondu au dire de la concluante concernant la communication des plans d'exécution réalisés par l'architecte de l'intimée, afin de vérifier les prises de cotes réalisées par la concluante, cette dernière a fait appel à la société [P], architecte, qui a dressé un plan faisant ressortir une surface de 272,52 m² pour le rez-de-chaussé et de 88,81 m² pour la mezzanine, murs de refends, poteaux et trémie d'escalier déduits, soit 361,33 m2 ; qu'il en résulte ainsi une différence de près de 22 m² supplémentaires par rapport aux conclusions de l'expert ;
15. - qu'il appartient en conséquence à la cour, si elle ne retient pas la surface de 361,33 m², d'ordonner une expertise concernant la surface exacte des locaux donnés à bail ;
16. - concernant les facteurs locaux de commercialité, que la concluante conteste l'énonciation de l'expert selon lequel ces facteurs n'ont pas évolué, après l'inauguration de la ligne de tramway en 2006 et du magasin Ikea en 2009, puisque des commerces et des services se sont implantés sur l'[Adresse 7] (Yamaha, Honda, Kawasaki, Macif, [Localité 15], Office Dépôt, résidence hôtelière,restaurants, extension de la Clinique Belledonne, Picard Surgelés, banques, magasin d'optiques, La Vie Claire, La Scooteria, Boulanger...) ; que l'expert n'a pas plus pris les conséquences du projet de centre commercial Neyrpic remontant à 2012, même si à la date de renouvellement du bail les travaux n'avaient pas débutés ;
17. - que des éléments de comparaison ont été adressés à l'expert, mais qu'il n'a pas retenus, pour des valeurs au m² comprises entre 200 euros HT et 240 euros, alors qu'il a proposé un prix de 173 euros HT ; que la concluante loue ainsi quatre autres locaux pour des prix supérieurs à celui proposé par l'expert ;
18. - que lors de la conclusion du bail, la concluante a accepté des concessions, concernant sa renonciation à l'assujettissement du bail à la TVA, à l'absence de dépôt de garantie, et à l'absence de remise en état lors du départ du preneur, ce que l'expert n'a pas pris en compte, alors qu'il s'agit de conditions dérogatoires à la pratique, ayant obligé la concluante à sortir la totalité du bâtiment du régime de la TVA, de sorte qu'elle ne peut la récupérer sur les factures concernant ce bâtiment ; que la fixation du loyer ne résulte pas ainsi de la seule surface, mais également des avantages accordés au preneur, ce dont l'expert n'a pas tenu compte ;
19. - que suite au dépôt du rapport d'expertise, la concluante a fait réaliser un contrôle de cohérence approfondi par M. [M], expert judiciaire, selon lequel aucune pondération n'a été appliquée lors des opérations d'expertise, alors que le bâtiment présente un angle attractif pour la clientèle justifiant une pondération de 1,1, ce qui conduit à une surface totale pondérée de 340,64 m² (un mètre de plus par rapport à l'expertise judiciaire); qu'il note également une différence sur la surface utile brute, aboutissant à 372,02 m² de surface plancher;
20. - que M.[M] a également retenu un surcoût de 20'% restant à la charge du bailleur en raison de l'absence de récupération de la TVA, outre un avantage égal à un voire deux termes de loyers en raison de l'absence de dépôt de garantie;
21. - que cet expert a noté que le rapport de Mme [B] ne détermine aucune zone de chalandise, en vue de permettre de recenser les baux de référence; qu'il a constaté l'existence de quatre établissements bancaires dans la zone retenue le long de l'avenue ;
22. - qu'il a relevé l'absence de production de baux complets concernant les référence Atelier 44, [Localité 11] Ode, Pharmacie Gabriel [Localité 11] et Troc Sport, et de qualification des surfaces indiquées (absence de mesure et d'analyse des surfaces), et des références très distinctes de l'activité bancaire, nécessitant des correctifs.
Prétentions et moyens de la société CIC Lyonnaise de Banque:
23. Selon ses conclusions remises par voie électronique le 18 décembre 2024, elle demande à la cour :
- de la déclarer recevable et bien-fondée en ses demandes ;
- de débouter la Sci La Bérangère de toutes ses demandes puisqu'elles sont mal fondées ;
- de confirmer le jugement en date du 19 février 2024 du juge des loyers commerciaux du tribunal judiciaire de Grenoble ;
- de réformer ce jugement en ce qu'il a décidé ce qui suit : Condamne chacune des parties par moitié aux dépens qui incluront le coût de l'expertise ;
- statuant à nouveau, de condamner, conformément à l'article 696 du code de procédure civile, la même aux entiers dépens de première instance, en ce compris les frais d'expertise judiciaire, dont distraction sera faite au profit de la Selarl CDMF-Avocat, Me Jean-Luc Médina, conformément à l'article 699 du code de procédure civile ;
- en tout état de cause, de condamner la Sci La Bérangère à payer à la concluante la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile;
- de condamner, conformément à l'article 696 du code de procédure civile, la même aux entiers dépens de l'instance, dont distraction sera faite au profit de la Selarl CDMF-Avocat, Me Jean-Luc Médina, conformément à l'article 699 du code de procédure civile.
24. Elle soutient:
25. - que l'appelante sollicite l'application de la variation de l'indice contractuel au loyer initial, alors que le prix du bail renouvelé ne peut excéder ni le plafond résultant des indices prévus à l'article L145-34 du code de commerce, ni la valeur locative définie à l'article L145-33; ainsi, que lorsque la valeur locative est inférieure au plafond, le loyer doit être fixé à la valeur locative ;
26. - que la concluante a fait établir un rapport par M.[F] en mars 2018, faisant ressortir une valeur locative de 140 euros HT par m² utile, outre 300 euros par unité de stationnement, soit ainsi 52.000 euros HT pour 344 m² utiles et 13 stationnements extérieurs ;
27. - concernant le calcul de la surface, que l'expert judiciaire a répondu à l'appelante, et a maintenu une surface utile brute de 339,64 m² mesurée par le sapiteur; que le rapport non contradictoire produit par l'appelante ne peut être pris en compte pour contredire les énonciations de l'expert judiciaire, d'autant que le contrôle de cohérence réalisé après expertise par l'appelante donne une troisième mesure de la surface proche de celle de l'expert judiciaire, puisqu'il retient une surface utile pondérée de 340,64 m² contre 339,64 m² de surface utile brute ;
28. - concernant la valeur locative, que le magasin Ikea existait déjà lors de la conclusion du bail, et ne peut ainsi être pris en compte; que les références produites par l'appelante n'ont pas été retenues par l'expert judiciaire ;
29. - que l'absence d'assujettissement à la TVA est neutre pour le bailleur, alors que l'absence de dépôt de garantie s'explique par la solvabilité de la concluante; que l'absence de remise en état lors du départ du preneur résulte du fait que des locaux aménagés avec le standing d'une agence bancaire n'est pas désavantageux pour le bailleur ;
30. - concernant l'appel incident de la concluante, que les frais d'expertise qu'elle a avancés doivent lui être restitués par application de l'article 396 du code de procédure civile, puisque c'est le montant demandé par la concluante qui a été retenu, de sorte que c'est l'appelante, partie perdante, qui doit supporter les dépens.
31. Il convient en application de l'article 455 du code de procédure civile de se référer aux conclusions susvisées pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties.
MOTIFS DE LA DECISION :
1- Concernant la description des lieux':
32. Selon le jugement déféré, les locaux sont situés dans un bâtiment se trouvant à l'angle de la [Adresse 14] et de l'[Adresse 7], qui est une très grande artère qui traverse la ville de [Localité 16], d'Ouest en Est, jusqu'au centre de [Localité 9], et permet de relier l'Est de [Localité 9] à l'accès de la bretelle de la rocade Sud en direction de [Localité 8] et [Localité 10]. Ce bâtiment, à usage commercial ou professionnel, est composé d'un rez-de-chaussée et d'un étage appartenant en totalité à la Sci La Bérangère. Il comporte deux locaux actuellement loués à la Lyonnaise de Banque et à la société [Localité 11] Ode, et des appartements à l'étage donnés en location. Au rez-de-chaussée, sur la façade Sud donnant [Adresse 13], se trouvent des vitrines sur environ 12 m de long. Sur la façade Ouest d'environ 30 m de long, donnant sur la [Adresse 12], se trouvent des bureaux avec fenêtres.
33. Le local litigieux est composé d'un rez-de-chaussée et d'un étage. Au rez-de-chaussée, le local se compose d'un espace destiné au libre-service bancaire où se trouvent des distributeurs bancaires, d'un accueil et salle d'attente, de six bureaux situés à gauche en entrant dans le local en façade côté [Adresse 14], d'un escalier en métal permettant d'accéder à l'étage, d'un local à usage d'of'ce, d'un dégagement, d'un septième bureau éclairé en second jour, de sanitaires composés de deux WC, et d'un lave-main, d'un local technique, d'une salle de repos équipée d'un point d'eau. A l'étage, au sommet de l'escalier se trouvent un dégagement, un local détente, des sanitaires avec un WC et un lave-main, une grande salle de réunion, un dégagement permettant d'accéder au local technique, un local technique comprenant le système de climatisation et de chauffage.
34. Selon le premier juge, l'expert relève que l'ensemble est en très bon état d'entretien. Il souligne que le local bénéficie d'une bonne visibilité dans les deux sens de circulation de l'avenue et que la commodité d'accès pour le public est excellente, dans la mesure où il est desservi en transports en commun, piste cyclable, axe routier et places de stationnement. L'expert qualifie de très favorable la commercialité de l'emplacement. Il n'est pas contesté que la surface retenue pour l'évaluation des bureaux est la surface utile brute.
35. Compte tenu des surfaces contradictoires invoquées, le juge a indiqué que l'expert a pris soin de recourir aux services d'un sapiteur, et il ressort du rapport de ce dernier (annexe 5 du rapport d'expertise) que contrairement à ce que soutient la Sci La Bérangère, il a établi ses relevés conformément aux termes de la charte de l'expertise immobilière, après déduction des surfaces occupées par les murs, y compris isolation, cloisons fixes, poteaux, marches et cages d'escaliers, gaines, ébrasements de portes et de fenêtres, parties de locaux d'une hauteur inférieure à 1,80 m. Il a déterminé une surface utile de 339,64 m².
36. En conséquence, le premier juge a convenu de retenir cette surface, quand bien même elle n'est pas conforme aux stipulations contractuelles, aux motifs, d'une part, que les références figurant au bail à des surfaces d'environ 290 m2 pour le rez-de-chaussé et d'environ 100 m² pour le premier étage, sans que ces indications ne soient étayées par des plans ou un relevé de surface établi par un géomètre, sont approximatives et ne revêtent pas un caractère intangible, et dès lors, d'autre part, qu'il n'y a pas lieu de prendre en considération le rapport [P] (daté du 17 mars 2023) produit par la bailleresse, établi hors procédure d'expertise judiciaire et sur la base de seuls plans.
37. Enfin, il a jugé que la clause I-1 figurant en page 3 du bail, interdisant aux parties une modification du montant du loyer en cas de différence entre les surfaces indiquées dans le bail et les surfaces réelles, n'a pas vocation à régir le renouvellement du bail. Eu égard à l'ensemble de ces éléments, il a retenu une surface utile brute de 339,64 m².
38. La cour constate que selon le bail conclu le 30 septembre 2009 par acte notarié, les lieux donnés à bail se composent d'un local au rez-de-chaussé d'une surface d'environ 290 m² et d'une mezzanine pour 100 m², qui est à créer. Le bail précise que toute erreur dans cette désignation ou différence de surfaces avec les dimensions réelles ne pourra justifier une modification du loyer, les parties se référant à la consistances des lieux tels qu'ils existent. La cour note que si le bail fait référence à un plan annexé à l'acte authentique, ce plan n'est pas annexé à l'exemplaire du bail produit par les parties, et n'est pas produit.
39. Le rapport déposée par Mme [B], expert désigné par le juge des loyers commerciaux, reprend les données du sapiteur concernant le métrage, sans aucune pondération, alors qu'il existe des locaux à destinations différentes (locaux techniques, sanitaires, lieux de repos, non destinés à l'activité commerciale). Cependant, l'appelante ne conteste pas l'absence de pondération, sauf concernant la surface se trouvant en angle.
40. La cour relève que l'expert judiciaire a tenu deux réunions dans les locaux, avec convocation des parties qui y ont participé, la seconde ayant spécialement pour objet de procéder à un contrôle de relevé de la surface utile brute. L'expert a également commis M. [I], en qualité de sapiteur, pour mesurer le local, en raison de données contradictoires fournies par les parties. Ce technicien immobilier a procédé à une mesure de chaque pièce, pour aboutir à une surface totale utile de 339,64 m², validée par l'expert judiciaire.
41. La cour constate que le sapiteur a pris en compte, en dehors de la trémie de l'escalier conduisant à la mezzanine, des surfaces utiles équivalentes à la surface au sol. La surface totale est ainsi de 345,35 m², en incluant la surface occupée par la trémie. Comme indiqué par le bailleur, le sapiteur a pris en compte une surface n'incluant pas les cloisons, et ainsi n'a pas retenu la surface hors 'uvre nette, soit celle des planchers, moins ce qui n'est pas aménageable. Le rapport [P] réalisé à la demande du bailleur a par contre pris en compte la surface de plancher, déduction faite des murs porteurs et isolant thermique, y compris poteaux porteurs et gros mur séparateur se trouvant entre les locaux donnés à bail à l'intimée, et ceux donnés à bail à la papeterie contiguë. La cour note en effet que la page 20 du bail authentique a prévu la création d'un mur de séparation entre la partie louée à l'intimée et celle exploitée par la société [Localité 11] Ode, à la charge de l'intimée.
42. Il résulte de l'article R145-3 du code de commerce que les caractéristiques propres au local s'apprécient en considération :
1° De sa situation dans l'immeuble où il se trouve, de sa surface et de son volume, de la commodité de son accès pour le public ;
2° De l'importance des surfaces respectivement affectées à la réception du public, à l'exploitation ou à chacune des activités diverses qui sont exercées dans les lieux ;
3° De ses dimensions, de la conformation de chaque partie et de son adaptation à la forme d'activité qui y est exercée ;
4° De l'état d'entretien, de vétusté ou de salubrité et de la conformité aux normes exigées par la législation du travail ;
5° De la nature et de l'état des équipements et des moyens d'exploitation mis à la disposition du locataire.
43. Il résulte de ces dispositions et stipulations que la surface à prendre en compte n'est pas ainsi celle retenue par le rapport [P] fondée sur une surface calculée à partir du plancher, sauf déduction de certains éléments de gros oeuvre, mais celle établie par le sapiteur [I], tenant compte de l'importance des surfaces effectivement nécessaires à l'activité du preneur, et ainsi hors cloisons de toutes sortes, incluant la trémie de l'escalier.
44. En conséquence, la cour, comme le premier juge, retiendra une surface utile brute de 339,64 m², sans qu'il y ait lieu d'ordonner une expertise afin de préciser cette surface. La cour précise qu'il n'y a pas lieu de pondérer à 1,1 l'angle du bâtiment, puisqu'à la différence d'un commerce de distribution, l'activité bancaire exercée par l'intimée ne retire aucun bénéfice de cette disposition particulière, n'exposant pas de produits destinés à la vente en vitrine de nature à attirer la clientèle.
2- Concernant la valeur locative:
45. Le premier juge a constaté que les parties sont d'accord pour dire, conformément ce qu'a indiqué l'expert, que les facteurs locaux de commercialité sont très favorables à l'activité exercée par le preneur, car le local se situe sur un axe majeur de la commune avec une très bonne visibilité, dans un quartier résidentiel très bien desservi par les différents moyens de transports.
46. Il a indiqué que la Sci La Bérangère échoue à établir l'amélioration des facteurs locaux de commercialité en cours du bail renouvelé dès lors en premier lieu et comme le note l'expert, que la ligne C de tramway, inaugurée en juin 2006, et le magasin Ikea, ouvert en 2007, étaient déjà présents à la signature du bail, et qu'il ne convient pas de tenir compte de la construction du nouveau bâtiment Essentiel situé à proximité du local, ni même de la création du nouveau centre commercial Neyrpic, inexistants à cette date. En second lieu, si les activités et enseignes ont changé, l'attractivité commerciale en 'n de bail est la même qu'en début de bail. Il en a retiré qu'entre 2009 et 2018, il n'y a pas eu de modification significative de la commercialité de l'[Adresse 7] à [Localité 17].
47. La cour ne peut que confirmer cette appréciation, puisqu'il s'agit de prendre en compte l'évolution des facteurs locaux de commercialité pendant l'exécution du bail à renouveler. Il ne peut ainsi être pris en compte d'événements survenus après la date de renouvellement du bail, ce qui est le cas pour la création du centre commercial Neyrpic, ce centre n'étant pas en activité à la date du renouvellement du bail.
48. Concernant les éléments de comparaison existants, le juge des loyers commerciaux a indiqué que l'expert a recherché quatre termes de comparaison dans le quartier environnant pour des locaux similaires, qui ne sont pas contestés par les parties, sauf à ce que la Sci La Bérangère déplore la non prise en compte par l'expert d'autres éléments de comparaison. Il a constaté que si cette dernière propose soit des biens offerts à la location, soit des baux qu'elle a elle-même consentis, ils ne peuvent servir de prix de référence, et il a retenu qu'il convient de se baser sur les termes de comparaison retenus par l'expert judiciaire.
49. La cour relève que l'expert judiciaire a exclu les valeurs proposées par le preneur (zone différente plus commerciale, alors que les locaux se trouvent dans une zone plus résidentielle, immeuble destiné à un usage médical, locaux d'une surface beaucoup plus importante), sauf une référence comparable concernant un local proche. L'expert a retenu également deux références proposées par le bailleur. Les prix sont compris entre 134 euros et 191 euros/m² (taxe foncière à la charge du preneur), et l'expert a proposé ainsi 173 euros, outre 300 euros HT par place de parking, soit un loyer annuel de 62.658 euros HT, la taxe foncière étant à la charge du preneur.
50. L'expert a ajouté que le fait que le bail commercial ne soit pas assujetti à la TVA n'est pas de nature à justifier une majoration de loyer, de même que l'absence de remise en état à la fin du bail, dès lors que les travaux d'aménagement financés par le preneur restent acquis au bailleur (article VI 8 du bail). Enfin, il a dit que l'exonération de versement d'un dépôt de garantie, qui ne constitue pas une obligation légale, ne saurait être considérée comme un avantage qu'il convient de prendre en considération au béné'ce du bailleur.
51. La cour ne peut qu'approuver ces éléments du rapport d'expertise, puisque concernant les valeurs de référence, celles rejetées concernent soit des locaux ne trouvant pas preneur, soit ne correspondent pas aux surfaces du bail renouvelé, soit situés dans une zone d'attractivité commerciale différente. La cour constate que l'absence d'assujettissement à la TVA résulte de la volonté du bailleur (qui, selon le bail, a entendu l'étendre à tout l'immeuble), et que la clause dispensant le preneur de remettre les lieux en leur état originel à son départ n'est pas exorbitante pour le bailleur compte tenu du standing auquel doit se conformer un établissement bancaire. La nature de cet établissement permet de reconnaître au preneur une solvabilité certaine, justifiant l'absence de dépôt de garantie, qui n'est effectivement par obligatoire.
52. S'agissant en outre des éléments de comparaison pris en compte par l'expert, la cour indique qu'il a retenu des baux se trouvant tous sur l'avenue sur laquelle le preneur exerce son activité, et ainsi dans la même zone de chalandise, dont un bail conclu par l'appelante avec la société [Localité 11] Ode situé dans le même immeuble que l'intimée. Le fait que l'expert n'ait pas annexé à son rapport les baux retenus n'est pas de nature à remettre en cause ses constatations opérées suite à ses investigations personnelles.
53. Compte tenu de ces éléments, le premier juge a justement retenu un prix unitaire de 173 euros le m² et une valeur locative annuelle globale de 62.658 euros comme proposé par l'expert. Le jugement déféré sera ainsi confirmé en ce qu'il a fixé le loyer du bail renouvelé à 62.658 euros en principal par an à compter du 1er octobre 2018.
3- Concernant les frais et dépens :
54. La cour confirmera le jugement déféré en ce qu'il a indiqué que la procédure et l'expertise ont été nécessaires pour fixer les droits respectifs des parties, et ainsi en ce qu'il a ordonné le partage des dépens, en ce inclus les frais d'expertise et estimé qu'il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
55. Succombant en son appel, la Sci La Bérangère sera condamnée à payer à l'intimée la somme de 3.000 euros au titre des frais exposés sur le fondement de l'article 700 du code de procédure en cause d'appel, outre dépens d'appel.
PAR CES MOTIFS :
La Cour statuant publiquement, contradictoirement, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, après en avoir délibéré conformément à la loi,
Vu les articles L145-1 et suivant du code de commerce';
Confirme le jugement déféré en ses dispositions soumises à la cour;
y ajoutant,
Condamne la Sci La Bérangère à payer à la société CIC Lyonnaise de Banque la somme de 3.000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile';
Condamne la Sci La Bérangère aux dépens d'appel, avec distraction au profit de la Selarl CDMF-Avocat,'Me Jean-Luc Médina';
Signé par Mme FIGUET, Présidente et par Mme RICHET, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La Greffière La Présidente
C4
Minute N°
Copie exécutoire
délivrée le :
la SCP LSC AVOCATS
la SELARL CDMF AVOCATS
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE GRENOBLE
CHAMBRE COMMERCIALE
ARRÊT DU JEUDI 03 JUILLET 2025
Appel d'un jugement (N° RG 18/04051)
rendu par le TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de [Localité 9]
en date du 19 février 2024
suivant déclaration d'appel du 14 mars 2024
APPELANTE :
S.C.I. LA BERANGERE au capital de 1 524.49€ immatriculée au RCS de [Localité 9] sous le n°315 492 264, prise en la personne de sa gérante domiciliée en cette qualité audit siège,
[Adresse 4]
[Localité 1]
représentée par Me Cédric LENUZZA de la SCP LSC AVOCATS, avocat au barreau de GRENOBLE
INTIMÉE :
S.A. CIC LYONNAISE DE BANQUE au capital social de 260.840.262,00 euros, immatriculée au RCS de [Localité 10] sous le numéro 954 507 976, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège ;
[Adresse 6]
[Localité 5]
représentée par Me Jean-Luc MEDINA de la SELARL CDMF AVOCATS, avocat au barreau de GRENOBLE, substitué par Me Alexis BANDOSZ, avocat au barreau de GRENOBLE,
COMPOSITION DE LA COUR :
LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Madame Marie-Pierre FIGUET, Présidente,
M. Lionel BRUNO, Conseiller,
Mme Raphaële FAIVRE, Conseillère,
Assistés lors des débats de Alice RICHET, Greffière.
DÉBATS :
A l'audience publique du 17 avril 2025, M. BRUNO, Conseiller, a été entendu en son rapport,
Les avocats ont été entendus en leurs conclusions,
Puis l'affaire a été mise en délibéré pour que l'arrêt soit rendu ce jour,
Faits et procédure :
1. Selon un acte notarié du 30 septembre 2009, la Sci La Bérangère a donné à bail à la société Lyonnaise de Banque un local commercial situé [Adresse 2] à Saint Martin d'Hères (38), à destination d'exercice de toutes opérations concernant le métier d'agence de banque, bourse, assurance et immobilier, avec toutes activités connexes desdits secteurs, ainsi que toutes opérations, de promotion auprès du public des actions et technologies mises en place par la société, à l'exclusion de toute autre utilisation. Le prix du bail a été fixé à 75.000 euros par an, hors taxes, droits et charges, payable par trimestres égaux et d'avance.
2. La société Lyonnaise de Banque a fait délivrer au bailleur une demande de renouvellement à compter du 1er octobre 2018 par acte extra-judiciaire en date du 4 juin 2018, en sollicitant la fixation du loyer à 52.000 euros, au lieu du loyer courant de 82.085,80 euros.
3. La société La Bérangère a accepté l'offre de renouvellement par acte extra-judiciaire en date du 11 juillet 2018, mais s'est opposée à la fixation du loyer au montant proposé, sollicitant la fixation d'un loyer en principal de 82.085,80 euros.
4. Par mémoire en demande notifié le 13 septembre 2018, la société Lyonnaise de Banque a sollicité la fixation du loyer du local commercial à la valeur locative, soit 52.000 euros en principal, celle-ci étant inférieure au loyer courant. Par acte du 17 octobre 2018, elle a assigné la société La Bérangère en fixation de la valeur locative pour ce montant.
5. Par jugement du 16 septembre 2019, le juge des loyers commerciaux du tribunal judiciaire de Grenoble a constaté que par l'effet de la demande de renouvellement délivrée le 4 juin 2018 par le preneur, le bail concernant les locaux s'est renouvelé à compter du 1er octobre 2018, et a, avant dire droit, désigné M. [W] en qualité d'expert. M. [W] ayant refusé la mission, l'expertise a été menée par Mme [B], qui a déposé son rapport le 21 juin 2022.
6. Par jugement du 19 février 2024, le juge des loyers commerciaux du tribunal judiciaire de Grenoble a :
- fixé à 62.658 euros en principal par an, à compter du 1er octobre 2018, le loyer du bail renouvelé depuis cette date entre la Sa Lyonnaise de Banque et la Sci La Bérangère pour les locaux situés [Adresse 2] à Saint Martin d'Hères (38), toutes autres clauses et conditions du bail expiré demeurant inchangées;
- rejeté la demandé de la Sa Lyonnaise de Banque de condamnation au remboursement du trop-perçu de loyers ;
- rappelé toutefois que conformément aux dispositions de l'article L 111-3 du code des procédures civiles d'exécution, la présente décision, lorsqu'elle aura force exécutoire, constituera un titre exécutoire permettant l'exécution forcée;
- ordonné l'exécution provisoire de la présente décision ;
- débouté les parties du surplus de leurs demandes ;
- dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamné chacune des parties par moitié aux dépens qui incluront le coût de l'expertise.
7. La Sci La Bérangère a interjeté appel de cette décision le 14 mars 2024, en ce qu'elle a :
- fixé à 62.658 euros en principal par an, à compter du 1er octobre 2018, le loyer du bail renouvelé depuis cette date entre la Sa Lyonnaise de Banque et la Sci La Bérangère pour les locaux situés [Adresse 2] à Saint Martin d'Hères (38), toutes autres clauses et conditions du bail expiré demeurant inchangées ;
- débouté les parties du surplus de leurs demandes ;
- condamné chacune des parties par moitié aux dépens qui incluront le coût de l'expertise.
8.L'instruction de cette procédure a été clôturée le 13 mars 2025.
Prétentions et moyens de la Sci La Bérangère :
9. Selon ses conclusions remises par voie électronique le 2 décembre 2024, elle demande à la cour, au visa des articles L.145-33 et L.145-34 du code de commerce, des articles 1134 et suivant anciens du code civil':
- de réformer la décision déférée ;
- de fixer à 82.085,80 euros par an, en principal, hors charges et hors taxes, le loyer du bail renouvelé à effet du 1er octobre 2018 dont bénéficie la société Lyonnaise de Banque pour les locaux situés [Adresse 3] à [Localité 16] ;
- de débouter la société Lyonnaise de Banque de l'intégralité de ses demandes';
- préalablement, au cas où la cour s'estimerait insuffisamment informée, d'ordonner une expertise conformément à l'article R.145-30 du code de commerce concernant la seule surface des lieux occupés par la demanderesse;
- dans ce cas, de fixer le loyer provisionnel à la somme de 82.085,80 euros à effet du 1er octobre 2018 jusqu'à fixation définitive ;
- de condamner la société Lyonnaise de Banque au paiement d'une somme de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- de condamner la même aux entiers dépens de première instance et d'appel comprenant le coût de l'expertise.
10. Elle expose':
11. - concernant la surface, que l'expert a procédé aux opérations de relevé avec un sapiteur, sans convoquer formellement les parties qui n'ont pu ainsi critiquer la manière de procéder; qu'il n'a pas été pratiqué conformément à la charge de l'expertise en évaluation immobilière, mais comme en matière de baux d'habitation, puisqu'il a été retenu une surface habitable, alors qu'en matière de bail commercial, il convient de prendre en compte la surface brute hors 'uvre nette (SHON), après déduction des éléments de structures et les circulations verticales; que cette surface SHON comprend ainsi la somme des planchers de chaque niveau, moins tout ce qui n'est pas aménageable (sous-sol, toiture, terrasse, loggia, surfaces non closes) ;
12. - qu'avant la signature du bail, l'agence Nahmias Immobilier et l'intimée se sont rapprochées de la société Papeteries Ode en 2008, pour une reprise de la moitié de la surface commerciale de celle-ci; qu'après accord de celle-ci, elles ont convenu que la concluante accepte une cession d'une partie de la surface de la papeterie à l'intimée, selon le projet de division de la surface commerciale résultant des plans élaborés en mai 2018 par l'architecte de la banque, prévoyant la construction d'un mur de séparation des locaux de la papeterie de ceux de la banque, pour allouer à l'intimée une surface exploitable de 290 m² au rez-de-chaussé, avec une extension de la mezzanine existante pour la porter à 100 m², soit une surface totale de 390 m² ;
13. - que suite au pré-rapport d'expertise, la concluante, ne pouvant se rendre dans les locaux de l'intimée, a obtenu l'autorisation de la papeterie [Localité 11] Ode pour effectuer un relevé du mur de séparation érigée par l'intimée, reporté sur le plan du bâtiment communiqué à l'expert; que les surfaces sont ainsi de 280,17 m² pour le rez-de-chaussé et de 99,81 m² pour la mezzanine, après déduction du mur de séparation et de la trémie de l'escalier;
14. - que l'expert n'ayant pas répondu au dire de la concluante concernant la communication des plans d'exécution réalisés par l'architecte de l'intimée, afin de vérifier les prises de cotes réalisées par la concluante, cette dernière a fait appel à la société [P], architecte, qui a dressé un plan faisant ressortir une surface de 272,52 m² pour le rez-de-chaussé et de 88,81 m² pour la mezzanine, murs de refends, poteaux et trémie d'escalier déduits, soit 361,33 m2 ; qu'il en résulte ainsi une différence de près de 22 m² supplémentaires par rapport aux conclusions de l'expert ;
15. - qu'il appartient en conséquence à la cour, si elle ne retient pas la surface de 361,33 m², d'ordonner une expertise concernant la surface exacte des locaux donnés à bail ;
16. - concernant les facteurs locaux de commercialité, que la concluante conteste l'énonciation de l'expert selon lequel ces facteurs n'ont pas évolué, après l'inauguration de la ligne de tramway en 2006 et du magasin Ikea en 2009, puisque des commerces et des services se sont implantés sur l'[Adresse 7] (Yamaha, Honda, Kawasaki, Macif, [Localité 15], Office Dépôt, résidence hôtelière,restaurants, extension de la Clinique Belledonne, Picard Surgelés, banques, magasin d'optiques, La Vie Claire, La Scooteria, Boulanger...) ; que l'expert n'a pas plus pris les conséquences du projet de centre commercial Neyrpic remontant à 2012, même si à la date de renouvellement du bail les travaux n'avaient pas débutés ;
17. - que des éléments de comparaison ont été adressés à l'expert, mais qu'il n'a pas retenus, pour des valeurs au m² comprises entre 200 euros HT et 240 euros, alors qu'il a proposé un prix de 173 euros HT ; que la concluante loue ainsi quatre autres locaux pour des prix supérieurs à celui proposé par l'expert ;
18. - que lors de la conclusion du bail, la concluante a accepté des concessions, concernant sa renonciation à l'assujettissement du bail à la TVA, à l'absence de dépôt de garantie, et à l'absence de remise en état lors du départ du preneur, ce que l'expert n'a pas pris en compte, alors qu'il s'agit de conditions dérogatoires à la pratique, ayant obligé la concluante à sortir la totalité du bâtiment du régime de la TVA, de sorte qu'elle ne peut la récupérer sur les factures concernant ce bâtiment ; que la fixation du loyer ne résulte pas ainsi de la seule surface, mais également des avantages accordés au preneur, ce dont l'expert n'a pas tenu compte ;
19. - que suite au dépôt du rapport d'expertise, la concluante a fait réaliser un contrôle de cohérence approfondi par M. [M], expert judiciaire, selon lequel aucune pondération n'a été appliquée lors des opérations d'expertise, alors que le bâtiment présente un angle attractif pour la clientèle justifiant une pondération de 1,1, ce qui conduit à une surface totale pondérée de 340,64 m² (un mètre de plus par rapport à l'expertise judiciaire); qu'il note également une différence sur la surface utile brute, aboutissant à 372,02 m² de surface plancher;
20. - que M.[M] a également retenu un surcoût de 20'% restant à la charge du bailleur en raison de l'absence de récupération de la TVA, outre un avantage égal à un voire deux termes de loyers en raison de l'absence de dépôt de garantie;
21. - que cet expert a noté que le rapport de Mme [B] ne détermine aucune zone de chalandise, en vue de permettre de recenser les baux de référence; qu'il a constaté l'existence de quatre établissements bancaires dans la zone retenue le long de l'avenue ;
22. - qu'il a relevé l'absence de production de baux complets concernant les référence Atelier 44, [Localité 11] Ode, Pharmacie Gabriel [Localité 11] et Troc Sport, et de qualification des surfaces indiquées (absence de mesure et d'analyse des surfaces), et des références très distinctes de l'activité bancaire, nécessitant des correctifs.
Prétentions et moyens de la société CIC Lyonnaise de Banque:
23. Selon ses conclusions remises par voie électronique le 18 décembre 2024, elle demande à la cour :
- de la déclarer recevable et bien-fondée en ses demandes ;
- de débouter la Sci La Bérangère de toutes ses demandes puisqu'elles sont mal fondées ;
- de confirmer le jugement en date du 19 février 2024 du juge des loyers commerciaux du tribunal judiciaire de Grenoble ;
- de réformer ce jugement en ce qu'il a décidé ce qui suit : Condamne chacune des parties par moitié aux dépens qui incluront le coût de l'expertise ;
- statuant à nouveau, de condamner, conformément à l'article 696 du code de procédure civile, la même aux entiers dépens de première instance, en ce compris les frais d'expertise judiciaire, dont distraction sera faite au profit de la Selarl CDMF-Avocat, Me Jean-Luc Médina, conformément à l'article 699 du code de procédure civile ;
- en tout état de cause, de condamner la Sci La Bérangère à payer à la concluante la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile;
- de condamner, conformément à l'article 696 du code de procédure civile, la même aux entiers dépens de l'instance, dont distraction sera faite au profit de la Selarl CDMF-Avocat, Me Jean-Luc Médina, conformément à l'article 699 du code de procédure civile.
24. Elle soutient:
25. - que l'appelante sollicite l'application de la variation de l'indice contractuel au loyer initial, alors que le prix du bail renouvelé ne peut excéder ni le plafond résultant des indices prévus à l'article L145-34 du code de commerce, ni la valeur locative définie à l'article L145-33; ainsi, que lorsque la valeur locative est inférieure au plafond, le loyer doit être fixé à la valeur locative ;
26. - que la concluante a fait établir un rapport par M.[F] en mars 2018, faisant ressortir une valeur locative de 140 euros HT par m² utile, outre 300 euros par unité de stationnement, soit ainsi 52.000 euros HT pour 344 m² utiles et 13 stationnements extérieurs ;
27. - concernant le calcul de la surface, que l'expert judiciaire a répondu à l'appelante, et a maintenu une surface utile brute de 339,64 m² mesurée par le sapiteur; que le rapport non contradictoire produit par l'appelante ne peut être pris en compte pour contredire les énonciations de l'expert judiciaire, d'autant que le contrôle de cohérence réalisé après expertise par l'appelante donne une troisième mesure de la surface proche de celle de l'expert judiciaire, puisqu'il retient une surface utile pondérée de 340,64 m² contre 339,64 m² de surface utile brute ;
28. - concernant la valeur locative, que le magasin Ikea existait déjà lors de la conclusion du bail, et ne peut ainsi être pris en compte; que les références produites par l'appelante n'ont pas été retenues par l'expert judiciaire ;
29. - que l'absence d'assujettissement à la TVA est neutre pour le bailleur, alors que l'absence de dépôt de garantie s'explique par la solvabilité de la concluante; que l'absence de remise en état lors du départ du preneur résulte du fait que des locaux aménagés avec le standing d'une agence bancaire n'est pas désavantageux pour le bailleur ;
30. - concernant l'appel incident de la concluante, que les frais d'expertise qu'elle a avancés doivent lui être restitués par application de l'article 396 du code de procédure civile, puisque c'est le montant demandé par la concluante qui a été retenu, de sorte que c'est l'appelante, partie perdante, qui doit supporter les dépens.
31. Il convient en application de l'article 455 du code de procédure civile de se référer aux conclusions susvisées pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties.
MOTIFS DE LA DECISION :
1- Concernant la description des lieux':
32. Selon le jugement déféré, les locaux sont situés dans un bâtiment se trouvant à l'angle de la [Adresse 14] et de l'[Adresse 7], qui est une très grande artère qui traverse la ville de [Localité 16], d'Ouest en Est, jusqu'au centre de [Localité 9], et permet de relier l'Est de [Localité 9] à l'accès de la bretelle de la rocade Sud en direction de [Localité 8] et [Localité 10]. Ce bâtiment, à usage commercial ou professionnel, est composé d'un rez-de-chaussée et d'un étage appartenant en totalité à la Sci La Bérangère. Il comporte deux locaux actuellement loués à la Lyonnaise de Banque et à la société [Localité 11] Ode, et des appartements à l'étage donnés en location. Au rez-de-chaussée, sur la façade Sud donnant [Adresse 13], se trouvent des vitrines sur environ 12 m de long. Sur la façade Ouest d'environ 30 m de long, donnant sur la [Adresse 12], se trouvent des bureaux avec fenêtres.
33. Le local litigieux est composé d'un rez-de-chaussée et d'un étage. Au rez-de-chaussée, le local se compose d'un espace destiné au libre-service bancaire où se trouvent des distributeurs bancaires, d'un accueil et salle d'attente, de six bureaux situés à gauche en entrant dans le local en façade côté [Adresse 14], d'un escalier en métal permettant d'accéder à l'étage, d'un local à usage d'of'ce, d'un dégagement, d'un septième bureau éclairé en second jour, de sanitaires composés de deux WC, et d'un lave-main, d'un local technique, d'une salle de repos équipée d'un point d'eau. A l'étage, au sommet de l'escalier se trouvent un dégagement, un local détente, des sanitaires avec un WC et un lave-main, une grande salle de réunion, un dégagement permettant d'accéder au local technique, un local technique comprenant le système de climatisation et de chauffage.
34. Selon le premier juge, l'expert relève que l'ensemble est en très bon état d'entretien. Il souligne que le local bénéficie d'une bonne visibilité dans les deux sens de circulation de l'avenue et que la commodité d'accès pour le public est excellente, dans la mesure où il est desservi en transports en commun, piste cyclable, axe routier et places de stationnement. L'expert qualifie de très favorable la commercialité de l'emplacement. Il n'est pas contesté que la surface retenue pour l'évaluation des bureaux est la surface utile brute.
35. Compte tenu des surfaces contradictoires invoquées, le juge a indiqué que l'expert a pris soin de recourir aux services d'un sapiteur, et il ressort du rapport de ce dernier (annexe 5 du rapport d'expertise) que contrairement à ce que soutient la Sci La Bérangère, il a établi ses relevés conformément aux termes de la charte de l'expertise immobilière, après déduction des surfaces occupées par les murs, y compris isolation, cloisons fixes, poteaux, marches et cages d'escaliers, gaines, ébrasements de portes et de fenêtres, parties de locaux d'une hauteur inférieure à 1,80 m. Il a déterminé une surface utile de 339,64 m².
36. En conséquence, le premier juge a convenu de retenir cette surface, quand bien même elle n'est pas conforme aux stipulations contractuelles, aux motifs, d'une part, que les références figurant au bail à des surfaces d'environ 290 m2 pour le rez-de-chaussé et d'environ 100 m² pour le premier étage, sans que ces indications ne soient étayées par des plans ou un relevé de surface établi par un géomètre, sont approximatives et ne revêtent pas un caractère intangible, et dès lors, d'autre part, qu'il n'y a pas lieu de prendre en considération le rapport [P] (daté du 17 mars 2023) produit par la bailleresse, établi hors procédure d'expertise judiciaire et sur la base de seuls plans.
37. Enfin, il a jugé que la clause I-1 figurant en page 3 du bail, interdisant aux parties une modification du montant du loyer en cas de différence entre les surfaces indiquées dans le bail et les surfaces réelles, n'a pas vocation à régir le renouvellement du bail. Eu égard à l'ensemble de ces éléments, il a retenu une surface utile brute de 339,64 m².
38. La cour constate que selon le bail conclu le 30 septembre 2009 par acte notarié, les lieux donnés à bail se composent d'un local au rez-de-chaussé d'une surface d'environ 290 m² et d'une mezzanine pour 100 m², qui est à créer. Le bail précise que toute erreur dans cette désignation ou différence de surfaces avec les dimensions réelles ne pourra justifier une modification du loyer, les parties se référant à la consistances des lieux tels qu'ils existent. La cour note que si le bail fait référence à un plan annexé à l'acte authentique, ce plan n'est pas annexé à l'exemplaire du bail produit par les parties, et n'est pas produit.
39. Le rapport déposée par Mme [B], expert désigné par le juge des loyers commerciaux, reprend les données du sapiteur concernant le métrage, sans aucune pondération, alors qu'il existe des locaux à destinations différentes (locaux techniques, sanitaires, lieux de repos, non destinés à l'activité commerciale). Cependant, l'appelante ne conteste pas l'absence de pondération, sauf concernant la surface se trouvant en angle.
40. La cour relève que l'expert judiciaire a tenu deux réunions dans les locaux, avec convocation des parties qui y ont participé, la seconde ayant spécialement pour objet de procéder à un contrôle de relevé de la surface utile brute. L'expert a également commis M. [I], en qualité de sapiteur, pour mesurer le local, en raison de données contradictoires fournies par les parties. Ce technicien immobilier a procédé à une mesure de chaque pièce, pour aboutir à une surface totale utile de 339,64 m², validée par l'expert judiciaire.
41. La cour constate que le sapiteur a pris en compte, en dehors de la trémie de l'escalier conduisant à la mezzanine, des surfaces utiles équivalentes à la surface au sol. La surface totale est ainsi de 345,35 m², en incluant la surface occupée par la trémie. Comme indiqué par le bailleur, le sapiteur a pris en compte une surface n'incluant pas les cloisons, et ainsi n'a pas retenu la surface hors 'uvre nette, soit celle des planchers, moins ce qui n'est pas aménageable. Le rapport [P] réalisé à la demande du bailleur a par contre pris en compte la surface de plancher, déduction faite des murs porteurs et isolant thermique, y compris poteaux porteurs et gros mur séparateur se trouvant entre les locaux donnés à bail à l'intimée, et ceux donnés à bail à la papeterie contiguë. La cour note en effet que la page 20 du bail authentique a prévu la création d'un mur de séparation entre la partie louée à l'intimée et celle exploitée par la société [Localité 11] Ode, à la charge de l'intimée.
42. Il résulte de l'article R145-3 du code de commerce que les caractéristiques propres au local s'apprécient en considération :
1° De sa situation dans l'immeuble où il se trouve, de sa surface et de son volume, de la commodité de son accès pour le public ;
2° De l'importance des surfaces respectivement affectées à la réception du public, à l'exploitation ou à chacune des activités diverses qui sont exercées dans les lieux ;
3° De ses dimensions, de la conformation de chaque partie et de son adaptation à la forme d'activité qui y est exercée ;
4° De l'état d'entretien, de vétusté ou de salubrité et de la conformité aux normes exigées par la législation du travail ;
5° De la nature et de l'état des équipements et des moyens d'exploitation mis à la disposition du locataire.
43. Il résulte de ces dispositions et stipulations que la surface à prendre en compte n'est pas ainsi celle retenue par le rapport [P] fondée sur une surface calculée à partir du plancher, sauf déduction de certains éléments de gros oeuvre, mais celle établie par le sapiteur [I], tenant compte de l'importance des surfaces effectivement nécessaires à l'activité du preneur, et ainsi hors cloisons de toutes sortes, incluant la trémie de l'escalier.
44. En conséquence, la cour, comme le premier juge, retiendra une surface utile brute de 339,64 m², sans qu'il y ait lieu d'ordonner une expertise afin de préciser cette surface. La cour précise qu'il n'y a pas lieu de pondérer à 1,1 l'angle du bâtiment, puisqu'à la différence d'un commerce de distribution, l'activité bancaire exercée par l'intimée ne retire aucun bénéfice de cette disposition particulière, n'exposant pas de produits destinés à la vente en vitrine de nature à attirer la clientèle.
2- Concernant la valeur locative:
45. Le premier juge a constaté que les parties sont d'accord pour dire, conformément ce qu'a indiqué l'expert, que les facteurs locaux de commercialité sont très favorables à l'activité exercée par le preneur, car le local se situe sur un axe majeur de la commune avec une très bonne visibilité, dans un quartier résidentiel très bien desservi par les différents moyens de transports.
46. Il a indiqué que la Sci La Bérangère échoue à établir l'amélioration des facteurs locaux de commercialité en cours du bail renouvelé dès lors en premier lieu et comme le note l'expert, que la ligne C de tramway, inaugurée en juin 2006, et le magasin Ikea, ouvert en 2007, étaient déjà présents à la signature du bail, et qu'il ne convient pas de tenir compte de la construction du nouveau bâtiment Essentiel situé à proximité du local, ni même de la création du nouveau centre commercial Neyrpic, inexistants à cette date. En second lieu, si les activités et enseignes ont changé, l'attractivité commerciale en 'n de bail est la même qu'en début de bail. Il en a retiré qu'entre 2009 et 2018, il n'y a pas eu de modification significative de la commercialité de l'[Adresse 7] à [Localité 17].
47. La cour ne peut que confirmer cette appréciation, puisqu'il s'agit de prendre en compte l'évolution des facteurs locaux de commercialité pendant l'exécution du bail à renouveler. Il ne peut ainsi être pris en compte d'événements survenus après la date de renouvellement du bail, ce qui est le cas pour la création du centre commercial Neyrpic, ce centre n'étant pas en activité à la date du renouvellement du bail.
48. Concernant les éléments de comparaison existants, le juge des loyers commerciaux a indiqué que l'expert a recherché quatre termes de comparaison dans le quartier environnant pour des locaux similaires, qui ne sont pas contestés par les parties, sauf à ce que la Sci La Bérangère déplore la non prise en compte par l'expert d'autres éléments de comparaison. Il a constaté que si cette dernière propose soit des biens offerts à la location, soit des baux qu'elle a elle-même consentis, ils ne peuvent servir de prix de référence, et il a retenu qu'il convient de se baser sur les termes de comparaison retenus par l'expert judiciaire.
49. La cour relève que l'expert judiciaire a exclu les valeurs proposées par le preneur (zone différente plus commerciale, alors que les locaux se trouvent dans une zone plus résidentielle, immeuble destiné à un usage médical, locaux d'une surface beaucoup plus importante), sauf une référence comparable concernant un local proche. L'expert a retenu également deux références proposées par le bailleur. Les prix sont compris entre 134 euros et 191 euros/m² (taxe foncière à la charge du preneur), et l'expert a proposé ainsi 173 euros, outre 300 euros HT par place de parking, soit un loyer annuel de 62.658 euros HT, la taxe foncière étant à la charge du preneur.
50. L'expert a ajouté que le fait que le bail commercial ne soit pas assujetti à la TVA n'est pas de nature à justifier une majoration de loyer, de même que l'absence de remise en état à la fin du bail, dès lors que les travaux d'aménagement financés par le preneur restent acquis au bailleur (article VI 8 du bail). Enfin, il a dit que l'exonération de versement d'un dépôt de garantie, qui ne constitue pas une obligation légale, ne saurait être considérée comme un avantage qu'il convient de prendre en considération au béné'ce du bailleur.
51. La cour ne peut qu'approuver ces éléments du rapport d'expertise, puisque concernant les valeurs de référence, celles rejetées concernent soit des locaux ne trouvant pas preneur, soit ne correspondent pas aux surfaces du bail renouvelé, soit situés dans une zone d'attractivité commerciale différente. La cour constate que l'absence d'assujettissement à la TVA résulte de la volonté du bailleur (qui, selon le bail, a entendu l'étendre à tout l'immeuble), et que la clause dispensant le preneur de remettre les lieux en leur état originel à son départ n'est pas exorbitante pour le bailleur compte tenu du standing auquel doit se conformer un établissement bancaire. La nature de cet établissement permet de reconnaître au preneur une solvabilité certaine, justifiant l'absence de dépôt de garantie, qui n'est effectivement par obligatoire.
52. S'agissant en outre des éléments de comparaison pris en compte par l'expert, la cour indique qu'il a retenu des baux se trouvant tous sur l'avenue sur laquelle le preneur exerce son activité, et ainsi dans la même zone de chalandise, dont un bail conclu par l'appelante avec la société [Localité 11] Ode situé dans le même immeuble que l'intimée. Le fait que l'expert n'ait pas annexé à son rapport les baux retenus n'est pas de nature à remettre en cause ses constatations opérées suite à ses investigations personnelles.
53. Compte tenu de ces éléments, le premier juge a justement retenu un prix unitaire de 173 euros le m² et une valeur locative annuelle globale de 62.658 euros comme proposé par l'expert. Le jugement déféré sera ainsi confirmé en ce qu'il a fixé le loyer du bail renouvelé à 62.658 euros en principal par an à compter du 1er octobre 2018.
3- Concernant les frais et dépens :
54. La cour confirmera le jugement déféré en ce qu'il a indiqué que la procédure et l'expertise ont été nécessaires pour fixer les droits respectifs des parties, et ainsi en ce qu'il a ordonné le partage des dépens, en ce inclus les frais d'expertise et estimé qu'il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
55. Succombant en son appel, la Sci La Bérangère sera condamnée à payer à l'intimée la somme de 3.000 euros au titre des frais exposés sur le fondement de l'article 700 du code de procédure en cause d'appel, outre dépens d'appel.
PAR CES MOTIFS :
La Cour statuant publiquement, contradictoirement, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, après en avoir délibéré conformément à la loi,
Vu les articles L145-1 et suivant du code de commerce';
Confirme le jugement déféré en ses dispositions soumises à la cour;
y ajoutant,
Condamne la Sci La Bérangère à payer à la société CIC Lyonnaise de Banque la somme de 3.000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile';
Condamne la Sci La Bérangère aux dépens d'appel, avec distraction au profit de la Selarl CDMF-Avocat,'Me Jean-Luc Médina';
Signé par Mme FIGUET, Présidente et par Mme RICHET, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La Greffière La Présidente