CA Paris, Pôle 5 - ch. 9, 3 juillet 2025, n° 25/01206
PARIS
Arrêt
Autre
Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 9
ARRÊT DU 03 JUILLET 2025
(n° , 1 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 25/01206 - N° Portalis 35L7-V-B7J-CKU4O
Décision déférée à la Cour : Jugement du 18 Décembre 2024 -Tribunal de Commerce de Melun - RG n° 2024J01096
APPELANTE
S.A.S. O'T3 représentée par sa gérante Madame [X] [K]
[Adresse 6]
[Localité 5]
Immatriculée au RCS de [Localité 9] sous le n°814 068 599
Représentée par Me Marie-Hélène DUJARDIN, avocate au barreau de PARIS, toque : D2153
Assistée par Me Sylvie GRELAT, avocate au barreau d'EVRY
INTIMÉES
S.E.L.A.R.L. ARCHIBALD en la personne de Me [F] [W], mandataire judiciaire ès qualités de liquidateur judiciaire de la S.A.S. O'T3
[Adresse 2]
[Localité 4]
Immatriculée au RCS de [Localité 9] sous le n°453 758 567
Assignation à personne conformément aux dispositions de l'article 654 du code de procédure civile. Non constituée (signification de la déclaration d'appel en date du 10 juin 2025)
S.A. FILL UP MEDIA prise en la personne de ses représentants
légaux domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 1]
[Localité 3]
Immatriculée au RCS de [Localité 8] sous le n°527 691 679
Représentée par Me Frédérique ETEVENARD, avocat au barreau de PARIS, toque : K0065
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 18 Juin 2025, en audience publique, devant la Cour composée de :
Sophie MOLLAT, Présidente
Alexandra PELIER-TETREAU, Conseillère
Caroline TABOUROT, Conseillère
qui en ont délibéré
Greffier, lors des débats : Yvonne TRINCA
ARRÊT :
- Réputé contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Sophie MOLLAT, présidente, et par Yvonne TRINCA, greffier présent lors de la mise à disposition.
Exposé des faits et de la procédure
La société par actions simplifiée OT'3 dirigée par Mme . [X] [K] exploite un fonds de commerce de restauration.
Par ordonnance du 27 juillet 2022, M. le président du tribunal de commerce de Lyon a condamné la société OT'3 à payer à la société Fill Up Media une somme de 3 025 euros.
Sur assignation du 2 décembre 2024, la société Fill Up Media a saisi le tribunal de commerce de Melun aux fins de voir prononcer, à titre principal, la liquidation judiciaire de la Société O'T3, et à titre subsidiaire, l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire.
Par jugement réputé contradictoire faute de comparution de la société OT'3, en date du 18 décembre 2024, le tribunal a ouvert une procédure de liquidation judiciaire à l'égard de la société OT'3, fixé la date de cessation des paiements au 19 juin 2023, désigné la SELARL Archibald, prise en la personne de Me [F] [W] en qualité de liquidateur judiciaire et ordonné l'emploi des dépens en frais privilégiés de liquidation judiciaire.
Par déclaration du 31 décembre 2024, la société OT'3 a interjeté appel de ce jugement, intimant ainsi la SELARL Archibald et la SA Fill Up Media
Par ordonnance du 25 mars 2025, Mme . la délégataire du premier président de la cour d'appel de Paris a ordonné la suspension de l'exécution provisoire du jugement dont appel.
Par dernières conclusions notifiées par voie électronique le 4 juin 2025, la société OT'3 demande à la cour d'appel de Paris de :
- JugeR la Société OT'3 recevable et bien fondée en son appel ;
- Juger que le commissaire de justice ne pouvait dresser un procès-verbal en application de l'article 659 du code de procédure civile ;
- Juger insuffisantes les diligences du commissaire de justice ;
- Prononcer la nullité de l'assignation du 2 décembre 2024 et celle du jugement subséquent du 18 décembre 2024 du tribunal de commerce de Melun ;
- Renvoyer les parties à mieux se pourvoir ;
À titre subsidiaire :
- Infirmer la décision du tribunal de commerce de Melun du 18 décembre 2024 ayant prononcé la liquidation judiciaire de la Société OT'3 ;
Statuant à nouveau :
- Juger que la Société OT'3 n'est pas en état de cessation de paiement au sens de l'article L631-1 du code de commerce ;
- Débouter la société Fill Up Media de l'ensemble de ses demandes ;
- Dire n'y avoir lieu au prononcé de la liquidation judiciaire de la société OT'3 ;
En tous les cas :
- Condamner la Société Fill Up Media à verser à la Société OT'3 la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Par conclusions notifiées par voie électronique le 27 mars 2025, la société Fill Up Media demande à la cour d'appel de Paris de :
- Confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal de commerce de Melun le 18 décembre 2024 ;
- Débouter la Société OT'3 de toutes ses demandes, fins et conclusions ;
- Condamner la Société OT'3 et la SELARL Archibald prise en la personne de Me [F] [W] ès-qualités de liquidateur à la liquidation judiciaire de la société OT'3 à payer à la Société Fill Up Media la somme de 3.000 euros, en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Condamner la Société OT'3 aux entiers dépens de l'instance.
La SELARL Archibald, bien que touchée suivant signification de la déclaration d'appel et des conclusions d'appel intervenue le 6 février 2025, n'a pas constitué avocat.
L'instruction a été clôturée par ordonnance du 12 juin 2025.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur la nullité de l'assignation
La société OT'3, fait valoir trois moyens.
Tout d'abord, rappelant les dispositions de l'article 659 du code de procédure civile et la jurisprudence y afférente, l'appelante soutient que le commissaire de justice ne pouvait avoir recours en la forme d'un procès-verbal 659 alors que l'entreprise est bien domiciliée à l'adresse du siège et dispose d'une boîte aux lettres. En effet, elle considère qu'elle justifie de la réalité de son établissement et que le commissaire de justice aurait pu constater cette réalité s'il avait interrogé le voisinage.
De plus, il estime que la mention « à l'adresse indiquée, la société requise est fermée définitivement », dans le procès-verbal, est erronée. À ce titre, la société OT'3 précise qu'elle n'était fermée que depuis quelques mois en raison de difficultés personnelles de la gérante.
En outre, la société OT'3 affirme que si une copie de l'acte avait été déposée dans la boîte aux lettres, elle aurait pu en prendre connaissance.
Ensuite, rappelant les dispositions des articles 659, 690 et 693 du code de procédure civile, la société OT'3 soutient que les diligences du commissaire de justice ont été insuffisantes. À ce titre, l'appelante considère que l'adresse de la gérante apparaissant sur le K-bis, l'assignation aurait pu être signifiée à son domicile.
De plus, l'appelante estime que le commissaire de justice n'a interrogé ni le voisinage, ni les services de la mairie, ni son conseil, ni sa gérante.
Enfin, rappelant les dispositions des articles 486, 14, 15 et 16 du code de procédure civile, la société OT'3 soutient qu'il y a eu une violation manifeste du principe du contradictoire, eu égard au délai entre la date de délivrance de l'assignation et le mode de délivrance de celle-ci. En effet, l'appelante considère que le tribunal de commerce de Melun ne pouvait pas avoir en mains au jour de l'audience le retour du recommandé adressé par l'huissier de justice, qui a été conservé par les services postaux pendant 15 jours soit jusqu'au 18 décembre inclus, jour de l'audience. Ainsi, l'appelante estime qu'en l'absence du retour du recommandé, le tribunal aurait dû procéder à un renvoi du dossier à une date ultérieure, dont la concluante aurait été informée.
Dès lors, la société OT'3 considère qu'elle n'a pas pu faire valoir ses droits en cours d'instance et justifie ainsi d'un grief au sens de l'article 114 du code de procédure civile. Partant, elle conclut que l'assignation est nulle.
La société Fill Up Media, rappelant les dispositions de l'article 659 du code de procédure civile ainsi que la jurisprudence y afférente, soutient que le commissaire de justice a constaté le 2 décembre 2024 qu'à « l'adresse sus-indiquée, la société requise est fermée définitivement ». De ce fait, l'intimée retient que l'appelante se trouvait dépourvue de domicile connu et relève que la société OT'3 reconnaît avoir fermé pour des circonstances liées à la situation de sa gérante.
De plus, elle rappelle que le courrier initial de mise en demeure, daté du 28 mars 2022, porte la mention
« avisé non réclamé », que l'assignation signifiée le 16 juin 2022 n'a pas pu être signifiée à personne, la société étant fermée et que la société OT'3 n'a pas comparu et n'était pas représentée lors de la procédure de référé devant le président du Tribunal de commerce de Lyon.
En outre, la société Fill Up Media considère que le commissaire de justice a, conformément aux dispositions de l'article 659 du code de procédure civile, « relaté avec précision les diligences qu'il a accomplies pour rechercher le destinataire de l'acte ». À ce titre, l'intimée fait valoir que le commissaire de justice a constaté qu'à « l'adresse sus-indiquée, la société requise est fermée définitivement », trouvé un numéro sur les Pages Jaunes « mais le répondeur automatique m'a indiqué que le numéro n'est pas en service », adressé un mail à l'adresse « [Courriel 7] » revenu non délivré et a consulté le registre du commerce et des sociétés.
Par ailleurs, la société Fill Up Media soutient que conformément aux dispositions de l'article 659 précitée, le commissaire de justice a adressé à la société O'T3, un pli recommandé avec avis de réception, le 3 décembre 2024, présenté le 5 décembre 2024, mais qui n'a pas été retiré par cette dernière. Ainsi, l'intimée retient que la société OT'3 a donc été avisée qu'un pli recommandé lui avait été adressé par un commissaire de justice mais qu'elle a fait le choix de l'ignorer.
S'agissant du respect du principe du contradictoire, la société Fill Up Media soutient que l'assignation a été signifiée le 2 décembre 2024 pour une audience qui s'est tenue le 18 décembre 2024. Dès lors, elle affirme que l'assignation délivrée à la société OT'3 respecte le délai prévu par l'article 856 du code de procédure civile.
Ainsi, la société Fill Up Media conclut que l'assignation mise en cause a été régulièrement signifiée à la société OT'3.
Sur ce
Il ressort de l'assignation que le commissaire de justice s'est présenté à l'adresse de la société telle qu'indiquée sur le K-Bis et a constaté que la société était définitivement fermée, qu'il a essayé de joindre la société sur son numéro de téléphone et qu'un répondeur automatique lui a indiqué que le numéro n'était plus en service, qu'il a adressé un mail à l'adresse mail de la société connue du créancier et que le mail est revenu non délivré, qu'il a effectué des recherches sur le registre du commerce et des sociétés pour déterminer la nouvelle adresse de la société sans succès.
Il ressort de ces éléments que le commissaire de justice a réalisé des diligences suffisantes pour tenter de délivrer son acte à la société.
La société O'T3 soutient que le commissaire de justice aurait du délivrer l'acte à l'adresse du gérant de la société. Cependant il ressort de la jurisprudence qu'il ne peut être reproché au commissaire de justice de ne pas avoir signifié l'acte à l'adresse personnelle du dirigeant de la société lorsqu'il a établi un PV sur le fondement de l'article 659 du code de procédure civile.
Enfin il ressort de l'article 659 du code de procédure civile que le commissaire de justice doit adresser au destinataire de l'acte à la dernière adresse connue par lettre recommandée avec avis de réception une copie du procès-verbal à laquelle est jointe une copie de l'acte objet de la signification.
Le texte ne prévoit pas que le retour de l'accusé de réception doive être produit devant la juridiction de jugement par le demandeur pour que la signification transformée en procès-verbal de recherches infructueuses soit régulière.
En l'espèce il n'est pas contesté que cette lettre recommandée a été adressée. En conséquence les dispositions de l'article 659 ont été respectées sans qu'il y ait lieu de rajouter au texte en retenant que faute de production lors de l'audience de plaidoirie de l'accusé de réception de la lettre recommandée adressée l'assignation doit être déclarée nulle.
La demande de voir prononcer la nullité de l'assignation et en suivant la nullité du jugement, est donc rejetée.
Sur l'état de cessation des paiements
La société OT'3, rappelant les dispositions des articles L.631-1 et L.640-1 du code de commerce et la jurisprudence y afférente, fait valoir qu'elle dégage chaque année des bénéfices et pour l'exercice clos au 31 mars 2024, un bénéfice de 1 644 euros.
De plus, la société OT'3 affirme que son compte était créditeur de 1 140,56 euros au 31 décembre 2024.
S'agissant de son passif, l'appelante considère que la créance détenue par la société Fill Up Media d'un montant de 3 025 euros constituait son seul passif exigible mais que, l'ayant réglée en intégralité, elle ne dispose plus d'aucun passif exigible. En effet, elle expose qu'elle est à jour du règlement de ses charges, de son loyer et de son crédit.
Ainsi, la société OT'3 affirme qu'elle n'était pas en état de cessation des paiements au 19 juin 2023 et ne l'est toujours pas à ce jour.
La société Fill Up Media indique que la société OT'3 demeurait encore débitrice à son égard de la somme de 3 108,25 euros mais qu'elle ne s'est acquittée du solde restant dû que postérieurement au jugement rendu par le tribunal de commerce de Melun. Aussi, au jour dudit jugement, l'intimée considère que la société OT'3 devait faire face à un passif exigible.
De plus, la société Fill Up Media affirme que la situation de l'appelante au 31 décembre 2024 laissait apparaître un actif circulant de 1 191 euros, un passif de 106 304 euros avec un résultat d'exploitation négatif de -57 444 euros pour un chiffre d'affaires de 37 531 euros, des capitaux propres négatifs
En outre, l'intimée argue du fait que l'évolution du chiffre d'affaires laisse apparaitre une baisse significative par rapport à l'année précédente (37 531 euros contre 217 611 euros l'année précédente) mettant en évidence une longue période de fermeture, telle que constatée par le commissaire de justice.
Ainsi, la société Fill Up Media conclut que la Société OT'3 ne dispose donc pas d'un actif disponible lui permettant de faire face à son passif exigible.
Sur ce
Il résulte de l'article L. 631-1 du code de commerce que la cessation des paiements se définit comme étant l'impossibilité de faire face au passif exigible avec son actif disponible.
En l'espèce, si au jour du prononcé du jugement de liquidation par le tribunal de commerce la société OT'3 était débitrice d'une créance de 3108,25 euros à l'égard de la société Fill Up Media il est reconnu par cette dernière que depuis cette créance a été réglée.
Il n'est pas établi par la créancière poursuivante que la société OT'3 aurait à son égard d'autres dettes, ni qu'elle est redevable d'autres dettes vis-à-vis de tiers qu'elle n'est pas en mesure de régler avec son actif disponible.
Le fait que son compte de résultat provisoire sur 9 mois fasse état d'un résultat net en déficit ne rapporte pas la preuve que la société est en état de cessation des paiements au jour où la cour statue, le résultat déficitaire de l'exercice (provisoire et partiel) ne se confondant pas avec l'état de cessation des paiements.
Infirmant le jugement la cour dira n'y avoir lieu à ouverture d'une procédure collective.
Les dépens comprenant les émoluments du liquidateur judiciaire resteront cependant à la charge de la SARL O'T3 qui a manqué à ses obligations de paiement, ce qui a amené l'introduction de l'instance.
PAR CES MOTIFS,
Rejette la demande de la société OT'3 de voir prononcer la nullité de l'assignation
Infirme le jugement rendu le 2.12.2024
Et statuant à nouveau et y ajoutant
Dit n'y avoir lieu à ouverture d'une procédure collective
Dit que les dépens d'appel et les frais de la procédure collective ouverte resteront à la charge de la SAS O'T3.
LA GREFFIERE LA PRESIDENTE
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 9
ARRÊT DU 03 JUILLET 2025
(n° , 1 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 25/01206 - N° Portalis 35L7-V-B7J-CKU4O
Décision déférée à la Cour : Jugement du 18 Décembre 2024 -Tribunal de Commerce de Melun - RG n° 2024J01096
APPELANTE
S.A.S. O'T3 représentée par sa gérante Madame [X] [K]
[Adresse 6]
[Localité 5]
Immatriculée au RCS de [Localité 9] sous le n°814 068 599
Représentée par Me Marie-Hélène DUJARDIN, avocate au barreau de PARIS, toque : D2153
Assistée par Me Sylvie GRELAT, avocate au barreau d'EVRY
INTIMÉES
S.E.L.A.R.L. ARCHIBALD en la personne de Me [F] [W], mandataire judiciaire ès qualités de liquidateur judiciaire de la S.A.S. O'T3
[Adresse 2]
[Localité 4]
Immatriculée au RCS de [Localité 9] sous le n°453 758 567
Assignation à personne conformément aux dispositions de l'article 654 du code de procédure civile. Non constituée (signification de la déclaration d'appel en date du 10 juin 2025)
S.A. FILL UP MEDIA prise en la personne de ses représentants
légaux domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 1]
[Localité 3]
Immatriculée au RCS de [Localité 8] sous le n°527 691 679
Représentée par Me Frédérique ETEVENARD, avocat au barreau de PARIS, toque : K0065
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 18 Juin 2025, en audience publique, devant la Cour composée de :
Sophie MOLLAT, Présidente
Alexandra PELIER-TETREAU, Conseillère
Caroline TABOUROT, Conseillère
qui en ont délibéré
Greffier, lors des débats : Yvonne TRINCA
ARRÊT :
- Réputé contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Sophie MOLLAT, présidente, et par Yvonne TRINCA, greffier présent lors de la mise à disposition.
Exposé des faits et de la procédure
La société par actions simplifiée OT'3 dirigée par Mme . [X] [K] exploite un fonds de commerce de restauration.
Par ordonnance du 27 juillet 2022, M. le président du tribunal de commerce de Lyon a condamné la société OT'3 à payer à la société Fill Up Media une somme de 3 025 euros.
Sur assignation du 2 décembre 2024, la société Fill Up Media a saisi le tribunal de commerce de Melun aux fins de voir prononcer, à titre principal, la liquidation judiciaire de la Société O'T3, et à titre subsidiaire, l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire.
Par jugement réputé contradictoire faute de comparution de la société OT'3, en date du 18 décembre 2024, le tribunal a ouvert une procédure de liquidation judiciaire à l'égard de la société OT'3, fixé la date de cessation des paiements au 19 juin 2023, désigné la SELARL Archibald, prise en la personne de Me [F] [W] en qualité de liquidateur judiciaire et ordonné l'emploi des dépens en frais privilégiés de liquidation judiciaire.
Par déclaration du 31 décembre 2024, la société OT'3 a interjeté appel de ce jugement, intimant ainsi la SELARL Archibald et la SA Fill Up Media
Par ordonnance du 25 mars 2025, Mme . la délégataire du premier président de la cour d'appel de Paris a ordonné la suspension de l'exécution provisoire du jugement dont appel.
Par dernières conclusions notifiées par voie électronique le 4 juin 2025, la société OT'3 demande à la cour d'appel de Paris de :
- JugeR la Société OT'3 recevable et bien fondée en son appel ;
- Juger que le commissaire de justice ne pouvait dresser un procès-verbal en application de l'article 659 du code de procédure civile ;
- Juger insuffisantes les diligences du commissaire de justice ;
- Prononcer la nullité de l'assignation du 2 décembre 2024 et celle du jugement subséquent du 18 décembre 2024 du tribunal de commerce de Melun ;
- Renvoyer les parties à mieux se pourvoir ;
À titre subsidiaire :
- Infirmer la décision du tribunal de commerce de Melun du 18 décembre 2024 ayant prononcé la liquidation judiciaire de la Société OT'3 ;
Statuant à nouveau :
- Juger que la Société OT'3 n'est pas en état de cessation de paiement au sens de l'article L631-1 du code de commerce ;
- Débouter la société Fill Up Media de l'ensemble de ses demandes ;
- Dire n'y avoir lieu au prononcé de la liquidation judiciaire de la société OT'3 ;
En tous les cas :
- Condamner la Société Fill Up Media à verser à la Société OT'3 la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Par conclusions notifiées par voie électronique le 27 mars 2025, la société Fill Up Media demande à la cour d'appel de Paris de :
- Confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal de commerce de Melun le 18 décembre 2024 ;
- Débouter la Société OT'3 de toutes ses demandes, fins et conclusions ;
- Condamner la Société OT'3 et la SELARL Archibald prise en la personne de Me [F] [W] ès-qualités de liquidateur à la liquidation judiciaire de la société OT'3 à payer à la Société Fill Up Media la somme de 3.000 euros, en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Condamner la Société OT'3 aux entiers dépens de l'instance.
La SELARL Archibald, bien que touchée suivant signification de la déclaration d'appel et des conclusions d'appel intervenue le 6 février 2025, n'a pas constitué avocat.
L'instruction a été clôturée par ordonnance du 12 juin 2025.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur la nullité de l'assignation
La société OT'3, fait valoir trois moyens.
Tout d'abord, rappelant les dispositions de l'article 659 du code de procédure civile et la jurisprudence y afférente, l'appelante soutient que le commissaire de justice ne pouvait avoir recours en la forme d'un procès-verbal 659 alors que l'entreprise est bien domiciliée à l'adresse du siège et dispose d'une boîte aux lettres. En effet, elle considère qu'elle justifie de la réalité de son établissement et que le commissaire de justice aurait pu constater cette réalité s'il avait interrogé le voisinage.
De plus, il estime que la mention « à l'adresse indiquée, la société requise est fermée définitivement », dans le procès-verbal, est erronée. À ce titre, la société OT'3 précise qu'elle n'était fermée que depuis quelques mois en raison de difficultés personnelles de la gérante.
En outre, la société OT'3 affirme que si une copie de l'acte avait été déposée dans la boîte aux lettres, elle aurait pu en prendre connaissance.
Ensuite, rappelant les dispositions des articles 659, 690 et 693 du code de procédure civile, la société OT'3 soutient que les diligences du commissaire de justice ont été insuffisantes. À ce titre, l'appelante considère que l'adresse de la gérante apparaissant sur le K-bis, l'assignation aurait pu être signifiée à son domicile.
De plus, l'appelante estime que le commissaire de justice n'a interrogé ni le voisinage, ni les services de la mairie, ni son conseil, ni sa gérante.
Enfin, rappelant les dispositions des articles 486, 14, 15 et 16 du code de procédure civile, la société OT'3 soutient qu'il y a eu une violation manifeste du principe du contradictoire, eu égard au délai entre la date de délivrance de l'assignation et le mode de délivrance de celle-ci. En effet, l'appelante considère que le tribunal de commerce de Melun ne pouvait pas avoir en mains au jour de l'audience le retour du recommandé adressé par l'huissier de justice, qui a été conservé par les services postaux pendant 15 jours soit jusqu'au 18 décembre inclus, jour de l'audience. Ainsi, l'appelante estime qu'en l'absence du retour du recommandé, le tribunal aurait dû procéder à un renvoi du dossier à une date ultérieure, dont la concluante aurait été informée.
Dès lors, la société OT'3 considère qu'elle n'a pas pu faire valoir ses droits en cours d'instance et justifie ainsi d'un grief au sens de l'article 114 du code de procédure civile. Partant, elle conclut que l'assignation est nulle.
La société Fill Up Media, rappelant les dispositions de l'article 659 du code de procédure civile ainsi que la jurisprudence y afférente, soutient que le commissaire de justice a constaté le 2 décembre 2024 qu'à « l'adresse sus-indiquée, la société requise est fermée définitivement ». De ce fait, l'intimée retient que l'appelante se trouvait dépourvue de domicile connu et relève que la société OT'3 reconnaît avoir fermé pour des circonstances liées à la situation de sa gérante.
De plus, elle rappelle que le courrier initial de mise en demeure, daté du 28 mars 2022, porte la mention
« avisé non réclamé », que l'assignation signifiée le 16 juin 2022 n'a pas pu être signifiée à personne, la société étant fermée et que la société OT'3 n'a pas comparu et n'était pas représentée lors de la procédure de référé devant le président du Tribunal de commerce de Lyon.
En outre, la société Fill Up Media considère que le commissaire de justice a, conformément aux dispositions de l'article 659 du code de procédure civile, « relaté avec précision les diligences qu'il a accomplies pour rechercher le destinataire de l'acte ». À ce titre, l'intimée fait valoir que le commissaire de justice a constaté qu'à « l'adresse sus-indiquée, la société requise est fermée définitivement », trouvé un numéro sur les Pages Jaunes « mais le répondeur automatique m'a indiqué que le numéro n'est pas en service », adressé un mail à l'adresse « [Courriel 7] » revenu non délivré et a consulté le registre du commerce et des sociétés.
Par ailleurs, la société Fill Up Media soutient que conformément aux dispositions de l'article 659 précitée, le commissaire de justice a adressé à la société O'T3, un pli recommandé avec avis de réception, le 3 décembre 2024, présenté le 5 décembre 2024, mais qui n'a pas été retiré par cette dernière. Ainsi, l'intimée retient que la société OT'3 a donc été avisée qu'un pli recommandé lui avait été adressé par un commissaire de justice mais qu'elle a fait le choix de l'ignorer.
S'agissant du respect du principe du contradictoire, la société Fill Up Media soutient que l'assignation a été signifiée le 2 décembre 2024 pour une audience qui s'est tenue le 18 décembre 2024. Dès lors, elle affirme que l'assignation délivrée à la société OT'3 respecte le délai prévu par l'article 856 du code de procédure civile.
Ainsi, la société Fill Up Media conclut que l'assignation mise en cause a été régulièrement signifiée à la société OT'3.
Sur ce
Il ressort de l'assignation que le commissaire de justice s'est présenté à l'adresse de la société telle qu'indiquée sur le K-Bis et a constaté que la société était définitivement fermée, qu'il a essayé de joindre la société sur son numéro de téléphone et qu'un répondeur automatique lui a indiqué que le numéro n'était plus en service, qu'il a adressé un mail à l'adresse mail de la société connue du créancier et que le mail est revenu non délivré, qu'il a effectué des recherches sur le registre du commerce et des sociétés pour déterminer la nouvelle adresse de la société sans succès.
Il ressort de ces éléments que le commissaire de justice a réalisé des diligences suffisantes pour tenter de délivrer son acte à la société.
La société O'T3 soutient que le commissaire de justice aurait du délivrer l'acte à l'adresse du gérant de la société. Cependant il ressort de la jurisprudence qu'il ne peut être reproché au commissaire de justice de ne pas avoir signifié l'acte à l'adresse personnelle du dirigeant de la société lorsqu'il a établi un PV sur le fondement de l'article 659 du code de procédure civile.
Enfin il ressort de l'article 659 du code de procédure civile que le commissaire de justice doit adresser au destinataire de l'acte à la dernière adresse connue par lettre recommandée avec avis de réception une copie du procès-verbal à laquelle est jointe une copie de l'acte objet de la signification.
Le texte ne prévoit pas que le retour de l'accusé de réception doive être produit devant la juridiction de jugement par le demandeur pour que la signification transformée en procès-verbal de recherches infructueuses soit régulière.
En l'espèce il n'est pas contesté que cette lettre recommandée a été adressée. En conséquence les dispositions de l'article 659 ont été respectées sans qu'il y ait lieu de rajouter au texte en retenant que faute de production lors de l'audience de plaidoirie de l'accusé de réception de la lettre recommandée adressée l'assignation doit être déclarée nulle.
La demande de voir prononcer la nullité de l'assignation et en suivant la nullité du jugement, est donc rejetée.
Sur l'état de cessation des paiements
La société OT'3, rappelant les dispositions des articles L.631-1 et L.640-1 du code de commerce et la jurisprudence y afférente, fait valoir qu'elle dégage chaque année des bénéfices et pour l'exercice clos au 31 mars 2024, un bénéfice de 1 644 euros.
De plus, la société OT'3 affirme que son compte était créditeur de 1 140,56 euros au 31 décembre 2024.
S'agissant de son passif, l'appelante considère que la créance détenue par la société Fill Up Media d'un montant de 3 025 euros constituait son seul passif exigible mais que, l'ayant réglée en intégralité, elle ne dispose plus d'aucun passif exigible. En effet, elle expose qu'elle est à jour du règlement de ses charges, de son loyer et de son crédit.
Ainsi, la société OT'3 affirme qu'elle n'était pas en état de cessation des paiements au 19 juin 2023 et ne l'est toujours pas à ce jour.
La société Fill Up Media indique que la société OT'3 demeurait encore débitrice à son égard de la somme de 3 108,25 euros mais qu'elle ne s'est acquittée du solde restant dû que postérieurement au jugement rendu par le tribunal de commerce de Melun. Aussi, au jour dudit jugement, l'intimée considère que la société OT'3 devait faire face à un passif exigible.
De plus, la société Fill Up Media affirme que la situation de l'appelante au 31 décembre 2024 laissait apparaître un actif circulant de 1 191 euros, un passif de 106 304 euros avec un résultat d'exploitation négatif de -57 444 euros pour un chiffre d'affaires de 37 531 euros, des capitaux propres négatifs
En outre, l'intimée argue du fait que l'évolution du chiffre d'affaires laisse apparaitre une baisse significative par rapport à l'année précédente (37 531 euros contre 217 611 euros l'année précédente) mettant en évidence une longue période de fermeture, telle que constatée par le commissaire de justice.
Ainsi, la société Fill Up Media conclut que la Société OT'3 ne dispose donc pas d'un actif disponible lui permettant de faire face à son passif exigible.
Sur ce
Il résulte de l'article L. 631-1 du code de commerce que la cessation des paiements se définit comme étant l'impossibilité de faire face au passif exigible avec son actif disponible.
En l'espèce, si au jour du prononcé du jugement de liquidation par le tribunal de commerce la société OT'3 était débitrice d'une créance de 3108,25 euros à l'égard de la société Fill Up Media il est reconnu par cette dernière que depuis cette créance a été réglée.
Il n'est pas établi par la créancière poursuivante que la société OT'3 aurait à son égard d'autres dettes, ni qu'elle est redevable d'autres dettes vis-à-vis de tiers qu'elle n'est pas en mesure de régler avec son actif disponible.
Le fait que son compte de résultat provisoire sur 9 mois fasse état d'un résultat net en déficit ne rapporte pas la preuve que la société est en état de cessation des paiements au jour où la cour statue, le résultat déficitaire de l'exercice (provisoire et partiel) ne se confondant pas avec l'état de cessation des paiements.
Infirmant le jugement la cour dira n'y avoir lieu à ouverture d'une procédure collective.
Les dépens comprenant les émoluments du liquidateur judiciaire resteront cependant à la charge de la SARL O'T3 qui a manqué à ses obligations de paiement, ce qui a amené l'introduction de l'instance.
PAR CES MOTIFS,
Rejette la demande de la société OT'3 de voir prononcer la nullité de l'assignation
Infirme le jugement rendu le 2.12.2024
Et statuant à nouveau et y ajoutant
Dit n'y avoir lieu à ouverture d'une procédure collective
Dit que les dépens d'appel et les frais de la procédure collective ouverte resteront à la charge de la SAS O'T3.
LA GREFFIERE LA PRESIDENTE